C’est très bizarre de reprendre un stylo pour m’adresser à toi mais j’ai la sensation que ça a toujours été le meilleur moyen que j’ai eu pour communiquer avec toi. Peut-être parce que je ne t’ai pas en face de moi et que tu ne peux pas me couper la parole pour me donner envie de te frapper. Je suis désolée. Désolée pour ça, d’avoir levé la main sur toi. Tu sais que ce n’est pas mon genre, je n’aurais pas dû faire ça, ça a été plus fort que moi mais ce n’est pas une excuse. Je n’aurai jamais dû, c’est tout, et je te présente mes excuses d’avoir dépassé cette limite. Ça a été trop loin, dans tous les sens du terme et sur tous les plans.
Je pleure, tous les jours. Je pleure parce que tu me manques. Je pleure parce que je n’arrive pas à te pardonner et ça me fait souffrir. Je pleure parce que tu m’as enfermé dans un putain de cercle vicieux dont je n’arrive pas à sortir. Tu me manques, j’ai envie de te voir, je t’en veux, je ne viens pas te voir, tu me manques… C’est sans fin et c’est fatiguant. Je suis fatiguée de tout ça sans être capable de passer à autre chose. Tu m’as menti pendant des mois et ça fait mal. Je ne sais pas si ça sera très clair mais j’aurais tant préféré que tu me dises que tu avais repris la coke au moment où tu l’as fait plutôt que de me le cacher. C’est le mensonge qui fait mal, pas la déception de te voir replonger. Je sais que tu es malade que ce n’est pas ta faute cette attirance indéniable mais c’est entièrement la tienne d’avoir menti, c’est de ton fait et ça fait mal de penser que tu m’as cru capable de te fermer la porte au nez parce que tu aurais été trop honnête. Oui, je ne te cache pas que j’aurais été déçue, triste et peut-être un peu en colère mais ça ne serait sûrement pas à ce point et j’aurais tout fait pour t’aider à penser à autre chose, pour t’éloigner de tout ça, j’aurais tenté de te comprendre. Aujourd’hui, je ne comprends pas. Je n’ai pas compris que tu ais menti, que tu ais eu peur de moi, de ma réaction. Ça aussi, ça me fait mal. Je ne pensais pas t’effrayer un jour comme je ne pensais pas que tu puisses me mentir. Est-ce que j’ai fait quelque chose qui pourrait le justifier ? J’aimerai tant avoir fait quelque chose de travers, j’aimerai tant le mériter, ça serait plus facile à accepter parce que j’aurais été la fautive. Mais je ne trouve pas. Je ne trouve pas de raison qui puisse te forcer à faire ça alors je continue d’avoir mal sans pouvoir y faire quoi que ce soit, je doute même que le temps soit un remède. J’expérimente tous les jours que je me suis trompée : ce n’est pas les sentiments amoureux qui font le plus mal quand ils s’arrêtent.
Il y a quelques jours, j’ai compris. J’ai repensé à ce que tu m’as dit (je ne fais que ça) et j’ai compris que tout est lié. Ton passé, la drogue, le sexe. Tout se rejoint, l’un déclenche l’autre, l’autre enclenche l’un. J’ai compris que tu as juste fuit la coke (ou tu as tenté de le faire, j’ignore si tu t’es drogué ensuite et je ne veux pas le savoir) pour le peu de fois où toi et moi ça a été trop loin. Je ne t’en veux pas pour ça, j’ai bien compris que tu as tenté de me préserver même si tu t’es bien loupé pour le coup. Je suis désolée aussi pour ça, d’avoir été celle qui t’a donné envie de te doper, ça n’arrivera plus.
Je n’attends pas spécialement de réponse de ta part, je comprendrais que tu n’ais rien à dire d’autre que le fait que tu sois désolé quand bien même ce n’est pas suffisant. Je comprendrais que tu n’ais pas envie non plus, que tu sois juste passé à autre chose mais j’avais besoin d’écrire, de te le dire. J’espère que tu prends soin de toi, j’espère que tu arriveras à avoir la vie que tu veux. J’espère que tu me préviendras si tu décides d’entrer en rehab ou au moins de te faire suivre psychologiquement par quelqu’un. J’espère juste que tu trouveras le bonheur auquel tu aspires, c’est tout.
Debbie
P.S : Je ne te déteste pas, je ne te détesterais jamais.
Cette lettre, Joseph ne la recevra jamais. Elle était bien écrite et bien timbrée. Elle avait bien été triée par le service de poste Australien et le facteur l’avait bien remise à l’adresse indiquée. Mais Jo, il n’habite plus chez Alfie désormais. Retour à l’envoyeur pour erreur d’adresse alors la lettre, c’est chez Debbie qu’elle est retournée, dans cette boite qu’elle conserve précieusement sous son lit avec les autres mots qu’ils s’étaient échangés, accompagnée d’une inquiétude tacite d’ignorer où il est.
one last time | ONE SHOT
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