| You're my better | léolie #12 |
| | (#)Mar 3 Sep 2019 - 1:00 | |
| You're my better
Aujourd’hui c’est leur jour. Techniquement, ce n’est que l’anniversaire de Charlie mais pourtant elle partage ce jour avec Léo depuis trois ans maintenant et il est la seule raison pour laquelle elle continue de fêter le neuf septembre comme un jour si spécial. La blonde n’aime pas fêter ses anniversaires mais son meilleur ami a toujours eu ce don de rendre cette journée spéciale et ce dès le premier jour, sans même le savoir. Tous ses anniversaires étaient atypiques, parfaits, inoubliables. Parce qu’ils étaient ensemble, toujours. Les deux jeunes adultes se sont bien moins parlés que d’habitude lors de ces dernières semaines pourtant ils n’avaient pas besoin de mot pour réserver cette journée là à l’autre. Il n’est plus question de Kane ni de Clément aujourd’hui, seulement eux deux. Comme ça l’a toujours été et comme ça le restera, malgré l’éloignement, malgré les choix différents. Malgré les secrets et les non dits, aussi. Ils finiront par se révéler un jour, quand ça sera le bon moment ou alors le pire. Tout finit par se savoir à un moment ou à un autre et Villanelle est bien placée pour le savoir.
Tambourinant à la porte de Léo, elle ne prend pas l’initiative d’ouvrir la porte elle même cette fois ci. Malgré tous ses défauts, elle a au moins pour mérite de savoir attendre de ses erreurs. Elle attend qu’on lui ouvre maintenant, c’est noté, c’est compris, c’est acté. “Leooooo !’ Cependant rien ne l’empêche encore de crier et elle connaît déjà les voisins de son meilleur qui la détestent tant, entre Maximilien-nez-cassé et Finnley-squattage-de-canapé. Il a vraiment de bons voisins, sans doute devrait-elle aller toquer à la porte de ceux de Kane pour voir s’ils sont aussi marrants. Plus tard, oui. Aujourd’hui c’est Leo day et elle n’en a absolument rien à faire de fêter ses vingt quatre ans.
La porte s’ouvre et la lumière passant par les fenêtres vient réchauffer le visage de la blonde qui n’y prend pas garde, bien trop empressée de laisser une main s’enrouler autour des épaules du brun et déposer un long baiser sur ses joues diaphanes. Il lui a tellement manqué, maintenant qu’elle avait pris l’habitude de vivre avec lui au quotidien et que tout a été chamboulé depuis qu’elle vit plus ou moins chez Kane. “Allez, raconte. On fait quoi aujourd’hui ? T’as prévu un voyage sur la Lune ? Sur Mars ? Venus ? C’est beau, Venus. Y'a les anneaux de Saturne sinon.” Il n’a rien voulu lui dire et elle s’est imaginé à peu près toutes les activités du monde, de la journée netflix & chill à un voyage à Végas. L’un ou l’autre la rendrait heureuse, quoi qu’on puisse en penser. Il sera toujours là, à critiquer les acteurs avec elle ou à se ruiner dans les machines à sous. Il sera toujours là, et elle aussi.
@Léo Ivywreath
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| | | | (#)Jeu 5 Sep 2019 - 7:12 | |
| Meilleur jour de l'année. Celui de la personne qui comptait le plus pour moi, devant tout un tas de gens que je n'aurais aucun scrupule à laisser mourir pour cette fille là. Charlie Villanelle. La meilleure grande perche rousse de la planète Terre, la fausse blonde, la seule personne qui pouvait être bien plus grande que moi sans que je ne trouvasse cela très insultant - oui, je me sentais beaucoup insulté, dans la vie courante. Le jour lui était dédié, donc, puisqu'elle et moi avions toujours l'habitude de le passer ensemble. Fêter un anniversaire, ce n'était pas rien. Et si je préférais plutôt oublier que le temps passait à une vitesse incroyablement folle, j'oubliais toujours mes angoisses pour célébrer ma meilleure amie.
Chaque année, j'organisais un truc différent. La première fois, je n'avais rien organisé du tout. C'était elle et moi au milieu de mes cartons, ivres morts d'alcool et de rire. Les fois suivantes étaient des journées que je faisais toujours en sorte de remplir de tout un tas de trucs en vrac. Des trucs cool, que nous ne partagions qu'ensemble. J'avais prévenu Clément qu'aujourd'hui c'était Charlie's day, et qu'à Charlie's day, il y avait des traditions à respecter. Du genre "je coupe mon téléphone", "je ne répondrai à aucun appel ni à aucun message" et "le Canada peut imploser: je remettrai le deuil de mon pays à plus tard". Aujourd'hui, c'était encore plus spécial. J'avais prévu un truc d'un genre unique. Un truc dont j'avais eu l'idée il y a déjà un bon bout de temps, mais que ma récente soirée chez Auden avait ravivé.
Ma meilleure amie ne tarda pas à venir tambouriner à ma porte et je me pressai de venir lui ouvrir, large sourire aux lèvres. Puisque ces journées passées ensemble se faisaient plus rares, je savais en profiter. Je la serrai tout contre moi alors qu'elle venait à peine de passer la porte d'entrée, les yeux fermés. J'étais en manque de câlins. Toujours, en fait. Tout le temps. « J'ai prévu un truc de fou. Genre vraiment. Tu pourras même pas deviner. » Je ne me détachai d'elle que pour lui envoyer un regard éloquent. « Non on ne part pas à Paris, non on ne va pas au concert de Beyoncé et non, je ne vais pas te cuisiner des trucs. Désolé, je sais que tu raffoles de ma cuisine. » Et par 'ma cuisine', j'entendais mes meilleurs skills de réchauffeur de pizzas surgelées ou de cuiseur de popcorn. Chez les Ivywreath, nous possédions un talent pour la cuisine d'environ -1000 sur une échelle de 1 à 10, 10 étant Curtis Stone et 0 étant un enfant de 4 ans.
J'allai attraper ma veste et mes papiers d'identité avant de retourner auprès de ma meilleure amie. « Alors ? Ça fait quoi de s'approcher de la trentaine ? Enfin, du quart de siècle, d'abord. T'avances bien sur le chemin de la vie, tu fais des études, t'as un mec chez qui tu vis presque... » Plus que le gosse, le labrador, la villa... Je m'arrêtai un instant avant de l'inviter à sortir. « Et un meilleur ami chez qui tu vis presque aussi, évidemment. Comment ça va, avec Kane ? » On n'était pas supposés parler de ces trucs aujourd'hui. Mais c'était plus fort que moi, je devais demander des nouvelles, pour savoir si tout allait bien. C'était un peu mon rôle, non ? « Désolé. On parle pas de ça si tu veux pas. T'as qu'à essayer de deviner mon cadeau. Pour te donner un indice, c'est dérivé d'un truc que j'aime faire. En quelque sorte. »
Parce que j'emmenais ma meilleure amie se faire tatouer. Et j'allais faire de même. J'avais trouvé un tatoueur à qui j'avais présenté pleins d'idées différentes de matching tatoos et qui était capable de toutes les réaliser. De quoi sceller un peu plus notre amitié en ce jour spécial. |
| | | | (#)Jeu 5 Sep 2019 - 19:19 | |
| Alors qu’ils s’enlassent toujours, son meilleur ami distille quelques informations à propos de leur journée à venir et elles sont plus que prometteuses. Un truc de fou, rien que ça. Un truc de fou, rien que tous les deux ; elle le croit. Il ne ment jamais et il a toujours d’incroyables idées. Quoi qu’il aie prévu de faire aujourd’hui, elle sait bien que ça sera un putain de truc de fou parce que les deux meilleurs amis n’ont jamais pris pour habitude de faire dans la demie mesure et cela ne risque pas de commencer aujourd’hui. “C’était l’anniversaire de Queen B le quatre.” qu’elle annonce, très sérieuse mais le sourire aux lèvres, comme si cette information allait révolutionner la journée de Léo et le faire changer d’avis pour qu’ils s’envolent la voir en concert. Parce que ça serait sacrément cool de la voir en concert, quand même, maintenant qu’il vient de déposer l’idée dans l’esprit de la blonde. “Mais, ouais, ok, on s’en fou. Je suis juste déçue de ne pas pouvoir goûter à ta cuisiner de grand chef aujourd’hui.” Rire qui s’échappe de la bouche de la blonde railleuse. Il est autant un grand chef qu’elle, et c’est pour dire. Cela relève du miracle que leurs quelques semaines de colocation n’ont connues aucun départ de feu dans la cuisine. Léo part un instant pour mieux revenir ensuite avec une nouvelle dose de questions auxquelles il ne laisse même pas à Charlie le temps de répondre. “Tu connais ça bien mieux que moi, papi. T’es pas mort après avoir passé le quart de siècle et t’as l’air plutôt bien conservé pour un trentenaire en devenir, alors je pense que je vais pouvoir gérer.” Elle sourit à nouveau, tente de le rassurer à sa manière parce qu’elle sait que lui contrairement à elle n’aime pas forcément continuer à gagner une année de plus tous les dix juin. Elle tente de le rassurer lui, incapable de se rassurer elle même lorsqu’il annonce qu’elle avance bien sur le chemin de la vie. Charlie avance, oui, mais à reculons. Surtout en ce moment, son chemin de vie est pris dans des rollercoaster et fait des loopings à tout va, des détours impromptus et des accélérations inconsidérées sans même la prévenir. Lui et Kane sont une des rares constantes dans cette vie, et elle dit ça seulement parce qu’aucun des deux n’est au courant de l’enfant qu’elle porte et qu’elle n’a pas encore eu à s’occuper des conséquences de ses actions. “Les deux hommes de ma vie chez qui je vis presque.” Elle passe son temps à se réfugier chez l’un ou chez l’autre au moindre problème, vit cette vie de quasi nomade à devoir trimbaler ses fringues dans tout Fortitude Valley et de squatter la machine à laver de chacun. Ce n’est pas forcément la vie dont elle rêvait puisque quelques mois auparavant elle vivait encore dans cette jolie maison en bord de mer, mais elle a su s’y habituer. Elle vient enrouler un bras autour des épaules de son meilleur ami en même temps qu’ils descendent les escaliers et qu’il la questionne sur Kane avant de se reprendre. “Tout va bien avec lui, t’en fais pas. On peut en parler si ça t’inquiète.” Parce qu’il commence à bien connaître le don de Charlie pour s’engouffrer dans des relations amoureuses dévastatrices. Kane n’a pas le droit d’entrer dans cette catégorie parce qu’elle lui a juré qu’elle serait toujours là pour lui, in one way or another, alors ils ont intérêt de toujours se parler quand ils auront quatre vingt ans et qu’ils seront vieux et cons. Elle parlera toujours à Léo quand ils auront cet âge là, c’est évident. Les hommes de sa vie. “Tu sais que le ‘en quelque sorte’ est genre hyper flippant ? T’aimes faire trop de choses, Léo ! Mais genre, jouer de la musique ça marche pas … Boire ? Manger ? Danser ? Chanter ? Dessiner … non, je sais pas faire ça. On va aller sur un clochet et juger tous les gens en bas ?” Elle s’arrête un instant, bien consciente de patauger. “Allez, diiis !”
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| | | | (#)Lun 9 Sep 2019 - 8:24 | |
| Ça pouvait être l'anniversaire de Jules César ou de Queen B, peu m'importait. Je pris ma meilleure face étonnée et hochai la tête. « Oui, ça m'étonne pas que vous soyez du même signe astrologique. » lançai-je d'une voix affreusement niaise. Putain je détestais ces trucs d'astrologie. C'était, selon moi, une invention un peu fantasque pour donner aux gens de quoi acheter les magazines - et avant les magazines, les prédictions - de types un peu farfelus. Encore un coup de la société de consommation. Elle nous avait vraiment sur tous les fronts, cette société de consommation. Charlie avait au moins l'audace de ne pas critiquer ma cuisine, ou du moins de planquer une critique sous une bonne dose de faux compliment - 'grand chef', et puis quoi encore - et je marchai à fond, faussement flatté dans mon ego de chef cuistot. Comme si, hier, je n'avais pas encore manqué de faire brûler mon toaster en oubliant les tranches de pain grillées dedans. Non, vraiment, la cuisine et moi ça faisait un résultat bien au-delà du nombre de décimales de la constante d'Archimède - aussi appelé chiffre pi, pour les intimes.
Bien sûr, on ne pouvait pas rester sur un - presque - gentil mot. Il fallait que je manque de m'étouffer avec de l'air - littéralement rien, donc - lorsqu'elle évoqua mon vénérable âge. « Rien que t'en parles je sens les rides. Faut que tu me files des trucs genre... des masques. Pour les rides. » Je ne plaisantai qu'à moitié. Non, je n'avais pas encore de rides. Mais elles allaient venir bientôt, pour sûr. Mieux valait prévenir que guérir. Nous sortions tranquillement de mon appartement et je faisais la probable bourde d'évoquer Kane un jour de Charlie's Day. Pas d'autres sujets que des potins et Charlie et Léo, à Charlie's Day. Mais Kane, c'était aussi une grande partie de la vie de Charlie, désormais. Je devais me faire à l'idée. Jalousie ? Non. Non ? 0,1% alors. « Content d'être compté dans les hommes de ta vie. A plus de deux, tu vas ouvrir un harem. Je te surveille. » Et comme je disais cela, je faisais le fameux 'i'm watching you' que l'on trouvait partout dans nos propres conversations, souvent agrémentées de memes qui valaient parfois mieux que les mots.
Sa main passée autour de mes épaules avait cela de réconfortant qu'elle était probablement la seule personne à ne pas me faire sentir petit à ses côtés. Je me sentais son égal. Il me semblait que rien qui provenait d'elle ne pouvait m'échapper, et qu'elle pouvait lire en moi comme un livre ouvert. Nous étions comme le reflet l'un de l'autre, two sides of the same coin. « C'est comme tu veux. Tu sais que si y'a un truc dont tu veux me parler à propos de lui, tu peux le faire. Et s'il faut aller lui casser la gueule à lui aussi, je suis là. » On se souvenait de ma réussite critique de la dernière fois. C'était le jour de mon anniversaire, en plus. Plus qu'à attendre un an pour réitérer l'exploit.
Charlie semblait un peu trop impatiente et je ne me décollai d'elle que pour lui ouvrir la porte de l'immeuble en secouant la tête de droite à gauche. « T'es sur la bonne piste, en vrai. Mais je dirai rien, tu verras bien assez tôt. » Ouais. Bien assez trop tôt même.
Nous déambulions un moment dans la ville. Après les tatoos - que j'imaginais assez petits pour ne pas rester chez le tatoueur des heures durant - j'avais prévu de l'emmener écouter de la musique dans des bars. Nous finirions la soirée dans un cinéma qui repassait une comédie romantique pourrie que nous adorions critiquer. Je ne voyais déjà heureux, ivres de notre jeunesse retrouvée en ce jour de vieillissement instantané. Avant de tourner à l'angle de la rue qui donnait directement sur le but de notre périple, j'arrêtai ma meilleure amie dans son pas. « Ok, stop, là tu vas fermer les yeux. » Je sortis un bandeau de la poche de ma veste. « Et puis tu vas me faire le plaisir d'enfiler ceci. Comme ça je suis sûr et certain que tu ne vas pas tricher. » Grand sourire aux lèvres, je la suppliais du regard de ne pas faire d'histoires.
Et lorsque le tout fut prêt, je la guidai quelques mètres plus loin, juste assez pour voir l'enseigne joliment éclairée qui pointait son nez de l'autre côté de la rue. « Faut que tu te souviennes que c'est un jour super spécial, pour toi comme pour moi. Il y a quelques années, presque jour pour jour, je rencontrais la fille la plus incroyable de la planète. Au delà de mal cuisiner et de te plaindre que mon chat te dors sur la tête, t'es vraiment une personne géniale et je serai jamais assez reconnaissant envers ce qui m'aura poussé sur ton chemin. » Je retirai le bandeau des yeux de Charlie, parce que j'étais un peu trop ému pour continuer mon speech. « Tadam. Le cadeau se trouve en face. Littéralement. Non c'est pas la voiture garée en face du tatoueur. C'est heu... Justement. Ça. » Je me pinçai les lèvres, guettant les réactions de ma personne préférée de la Terre. « J'ai tout prévu, des modèles que t'es susceptible d'aimer au temps que chaque dessin pourra prendre. Ça me semblait être un cadeau un peu spécial pour un jour du même acabit. » Ah, ça, pour sûr. |
| | | | (#)Mar 10 Sep 2019 - 19:04 | |
| Il se sent pousser des ailes lorsqu’elle ne critique pas son talent de cuisiner et manque de s’écraser lourdement sur le sol à la moindre évocation de son âge légèrement plus avancé que celui de Charlie ; le paradoxe de Léo. Son Léo, son si cher Léo. Alors qu’il prend sa meilleure amie pour un magasin de cosmétique ambulant, elle ne répond rien mais se perd en rires. Peu importe ce qu’il se passe dans leur vie respective, aujourd’hui est un jour de fête et un jour d’union, à tous les deux. Ils s’amusent, ils crient, ils chantent et ils rigolent. Jamais rien d’autre ne sera toléré les 9 septembre et 10 juin. Ils occupent l’hiver à leur manière à eux et c’est la plus belle qui soit, sûrement. On évitera seulement de vouloir casser la gueule d’autres personnes cette fois ci puisque cela avait été le point noir du dernier Leo’s Day. La blonde, le sourire aux lèvres, passe une main dans les cheveux de son ami pour les ébourrifer légèrement (à peine, comme s’il avait été pris dans des montagnes russes et séché par le réacteur d’Apollo 11). “T’aimes pas l’idée du harem ? Je la trouve cool, pourtant. T’auras le droit d’amener Clément, je suis sûre qu’il se plaira dans l’étable.” Et vite envolée la règle égocentrique de ne parler qu’eux, l’attaque du jeune danseur étant cette fois ci bien trop facile. Léo lui a tendu une perche qu’elle ne pouvait pas refuser et tout le monde sait qu’elle n’en manque jamais une pour pouvoir se moquer du brun ; ce qui n’entâche à rien toute la sympathie qu’elle a pour lui. Il est un des hommes de sa vie lui aussi … à sa manière. Son meilleur ami n’en démord pas au sujet de Kane, arrivant seulement à restreindre son nombre de questions mais pas son appréhension. Il a peur pour elle et cela a un côté mignon et attendrissant. Il s’en fait trop, oui, sans aucun doute, mais au moins il reste là. Il est toujours à ses côtés et il persiste quand bien même elle lui dit que tout va bien, parce qu’il sait qu’elle dira toujours ça même quand son monde aura totalement vrillé. Tout va toujours bien selon elle parce qu’elle aimerait que les choses soient comme telles. Le brun sait, le brun ne dit rien et attaque seulement lorsqu’il en ressent le besoin. “Maintenant que tu en parles, c’est vrai qu’il rate un peu trop souvent ses tours de vaisselle à mon goût.” La blonde rigole doucement et pose sa tête sur l’épaule de son ami, la même qui ne cesse de frotter contre la sienne. Le pire dans tout ça c’est qu’elle n’en veut même pas à Kane qui enchaîne des dizaines d’heures de travail sans jamais s’arrêter, elle peut donc laver deux fourchettes en plus si cela lui permet de se reposer. Il le mérite. Charlie écoute docilement ce qu’a à lui dire son meilleur ami, enfile le bandeau auquel s’ajoute le casque et laisse seulement une main dans les airs pour se raccrocher à lui. Elle n’a absolument aucun problème de confiance et pourrait lui confier sa vie mille fois si besoin, elle doute seulement de la capacité de tout son corps à se mouvoir sans ne heurter rien ni personne alors qu’on la prive de des de ses sens. La musique dans ses oreilles, pourtant, lui fait balancer la tête de droite à gauche dans un rythme plus que discutable. La seule constante dans toute cette histoire reste le sourire qu’elle continue d’afficher bêtement alors qu’elle n’est au courant de rien du tout et qu’il pourrait tout simplement l’amener à une dégustation de criquets. Beurk. Même là ils pourraient trouver le moyen de rendre la chose plus amusante (moins dégueulasse). A peine quelques pas plus loin, on lui annonce déjà que le tour de la ville en version aveugle est terminé et qu’ils sont arrivés. Léo lui sert même tout un speech avant de lui retirer son bandeau et à cet instant elle n’en a tout simplement plus rien à faire de la surprise parce que ses mots l’émeuvent profondément. Le sourire de la blonde disparait peu à peu à cause de l’émotion et si elle savait exactement où son meilleur ami était elle l’aurait enlacé. “T’es con, t’as pas le droit de me faire pleurer alors que je ne peux même pas ouvrir les yeux.” Ces mots équivalent à un I love you buddy dans leur esprit à tous les deux. Ses yeux s’habituent rapidement à la lumière à nouveau et elle tend une moue émue au brun, ne sachant réellement pas quoi lui dire pour gâcher ce moment qu’elle chérit tant. Lui, pourtant, n’en oublie pas la surprise derrière tout ça. Et quelle surprise. Le sourire de la blonde revient à nouveau, sa bouche forme un “o” de surprise et elle sautille même légèrement sur place alors qu’il continue de lui expliquer avoir tout prévu. Matching tatoos. Deal. Avec lui, le most perfect match ever. Et elle comprend. Elle se reprend, racle sa gorge. Tatoo ne fonctionne pas avec grossesse. “Léo … Déjà, sache que t’es définitivement un des hommes de ma vie et je regretterai jamais de t’avoir saoulé à la Poleen ou d’avoir usé de la délicatesse d’un tractopelle. Tu vaux toutes les cuites du monde et toutes les nuits blanches et toutes les alarmes incendies qui détruisent nos tympans parce que t’as oublié un truc sur le feu. Tu vaux carrément tout et je te jure que j’aurais continué la liste mais là j’ai trop de trucs à te dire, faut pas que ça prenne une heure non plus.” Elle sourit, repose le bandeau dans sa poche pour qu’il n’embête personne et vient placer ses mains derrière les épaules de son ami. Le meilleur ami du monde entier et au delà. “Je sais que t’as toujours l’impression de mal faire, ou de ne pas faire assez, ou d’en faire trop, ou je ne sais pas quoi encore. Mais t’es parfait. Et retiens ça parce que ça ne sera pas répété en dehors des anniversaires. T’es tout ce dont j’ai besoin.” Ses yeux bleus cherchent les siens et l’émotion est palpable. “Cependant … Je ne peux pas faire de tatouage. T’as déjà tout prévu et je suis désolée, l’idée est vraiment géniale et je suis jalouse de ne pas y avoir pensé avant. Ce n’est pas que je ne veux pas Leone, c’est que je ne peux pas. La vérité c’est que … je suis enceinte. Et c’était pas franchement prévu et j’aurais voulu te l’apprendre autrement parce que là c’est vraiment nul comme annonce, mais … voilà … surprise ... ?”
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| | | | (#)Dim 15 Sep 2019 - 8:20 | |
| J'avais toujours organisé des trucs un peu hors du commun, pour Charlie's Day. Non, les simples soirées, ça n'était pas notre truc. Trop facile. Tout le monde faisait des soirées d'anniversaire. Je pensais ces journées des mois à l'avance. Chaque année, une semaine après l'anniversaire de Charlie, je regrettai de ne pas avoir pensé plus tôt à l'idée géniale que je venais d'avoir. Vingt-quatre heures, c'était court. Il fallait bien réfléchir à l'organisation de ces quelques heures de folie. Un tatouage, ça bouffait pas mal de temps... mais quel souvenir ! De quoi ne pas du tout évoquer nos copains respectifs... ce que nous parvenions malgré tout à faire. Je parlais de harem, et bien sûr que Charlie fonçait dans la brèche, évoquant Clément. « Laisse Clément en dehors de tes idées de harem. Imagine que je l'y amène et qu'il y trouve quelqu'un de plus cool que moi. Non, non, hors de question. » ricanai-je en secouant la tête. « Je viendrai en secret. Tu me couvrira, tu diras que j'étais simplement venu faire mes devoirs chez toi le temps d'une soirée. » Clin d’œil envoyé à la volée, nous descendions les escaliers quatre à quatre. « C'est son anniversaire aussi, aujourd'hui. Vous n'auriez pas pu choisir des jours différents, pour naître ? » Bien sûr que non bordel, c'était plus drôle quand tout était compliqué.
Nous descendions dans la rue, plus qu'enjoués de rejoindre un lieu tenu secret. Je ne comptais pas divulguer la surprise de l'année. Quand bien même savais-je que l'idée plairait à Charlie, j'étais un peu stressé à l'idée de me heurter à un refus. La manière avec laquelle ma meilleure amie évoquait Kane me donnait malgré tout de quoi me rassurer, calmant l'anxiété qui s'ajoutait immanquablement à celle d'un potentiel raté niveau cadeau d'anniversaire. Kane et Charlie, ça avait l'air plutôt solide. Et le mec avait l'air sympa. J'étais rassuré. Mais s'il fallait aller le chercher dans un bar, j'étais prêt à remettre ça.
Bien sûr, que je ne voulais pas qu'elle voit la surprise sans avoir droit, en plus, à un petit speech. C'était pas trop ce que j'avais l'habitude de faire, les speech. J'étais plutôt démonstratif que... cérébral. Mais parfois, les câlins ne suffisaient pas. Et lorsque je retirai le bandeau de ses yeux, ma meilleure amie se mit à sautiller sur place. Visiblement, j'avais touché très juste. Grand sourire aux lèvres, je m'efforçai de ne pas verser de petite larmichette.
Et soudain, le visage de Charlie changea d'air. Quelque chose n'allait pas. Je savais toujours lorsque quelque chose n'allait pas. Je le sentais. Comme si passer du temps en sa compagnie avait développé chez moi un sens qui allait au delà du simple sens de l'observateur lambda. C'était à son tour, de se lancer dans une déclaration d'amour qui me donna à sourire plus que de raison. Sourire comme il y avait longtemps que je n'avais pas souri. « T'abuses, j'oublie pas tant de trucs sur le feu que ça. » lançai-je, faussement outré par son propos. Si si. Oublier le pain dans le micro-ondes, oublier les pâtes dans l'eau bouillonnante, oublier le steak dans la poêle et oublie d'éteindre le gaz... Je n'oubliais habituellement jamais rien, sauf ce qui touchait à la cuisine.
Et la sentence tomba. Charlie ne pouvait pas faire ce tatouage. Mes épaules s'affaissèrent un peu alors que je cherchai à lire dans ses yeux, l'air étonné, la raison qui la poussait à décliner mon cadeau. Et la raison était de taille. A mesure qu'elle continuait de parler, mes yeux s'agrandissaient de surprise. C'était une blague, pas vrai ? Enceinte. Le mot tournait dans ma tête. Je fixai un point invisible de ses yeux, sous le choc. Enceinte. Comme 'future maman d'un bébé'. Le truc qui courait partout, bavait un max et ne faisait ses nuits que... jamais. Le machin rose et joufflu qu'il fallait nourrir trop souvent - une véritable arnaque - et qui pleurait à outrance. Trop d'images de Charlie maman s'enchaînaient dans ma tête. « T-tu veux dire comme... comme future maman ? D'un bébé ? » Bien vu, champion. Le temps semblait s'être complètement arrêté, autour de nous. Je ne voyais rien d'autre que les yeux de ma meilleure amie, alors que mes orbites amincies de surprises venaient de retrouver ses prunelles claires. « M-mais attends. » Mes yeux se posèrent un instant sur son ventre, puis retrouvèrent son regard. « Attends attends attends. C'est qui le père ? Pas moi...? » Dans ma tête, je comptais les mois qui s'étaient écoulés depuis notre 'dernière fois avant John'. Non, pas possible. Et puis, nous nous étions toujours protégés. Mon cœur venait de démarrer un sacré sprint. Bordel de merde. Impossible. L'autre connasse se disait déjà enceinte de moi, impossible que je sois aussi le père du bébé de Charlie. Si ? Non ? Oui ? J'avais sacrément l'impression que le sol s'ouvrait sous mes pieds. J'étais littéralement à deux doigts de tourner de l’œil, comme si mon cerveau prenait conscience que la fuite était très nécessaire. « ...ou Kane ? » Ou pire. Pire pire pire pire pire. John.
Seigneur Dieu.
Peut-être que j'avais besoin d'une chaise. « Je vais être parrain ? Attends, tu comptais me l'annoncer avec une baby-shower et tout ? Non, c'est mort, désormais je suis l'organisateur de la baby-shower. » Le meilleur organisateur de trucs de la planète. Enfin, j'avais jamais organisé de baby-shower. Charlie savait presque autant que moi combien j'avais toujours eu du mal avec les gosses. En fait, je ne m'étais juste jamais occupé de bambins ou d'enfants. Le monde des gosses, je ne l'avais vécu que dans ma propre enfance. Pas plus.
J'avais très envie de prendre Charlie dans mes bras. Pourtant, je me retrouvai soudain coincé, comme tétanisé, trop surpris pour faire des blagues ou pour réagir de façon décente. Y avait-il une façon décente de réagir ? « Putain tu vas être maman. T'as déjà réfléchi à des prénoms ? Non, je te vois venir, tu ne peux pas appeler cet enfant Freddie Mercury. » Pas moyen de rendre ce moment triste. C'était Charlie's Day. Un jour de fête, pas un jour de stress. Pas un jour pendant lequel on pensait au futur. Alors, plutôt que d'ajouter quoi que ce soit, je la pris dans mes bras. Autour de nous, le monde continuait de tourner au ralenti. Comme si soudain, plus rien n'avait d'importance. |
| | | | (#)Mar 17 Sep 2019 - 22:42 | |
| L’idée du harem ne semble bizarrement pas plaire à Léo mais continue de faire rêver Charlie, parce que tout ça au moins réglerait bon nombre de ses problèmes. Ca paraît bizarre comme idée, certes, un peu archaïque, certes ; mais avec un peu de temps elle est certaine que tout le monde pourrait y trouver son compte. Comme si tout cela pouvait un jour dépasser le stade de simple blague. “Il faudrait qu’il cherche longtemps avant de trouver quelqu’un de mieux que toi.” Elle sourit, le rassure parce qu’elle sait qu’il ne rigole qu’à moitié et qu’il n’a aucune confiance en sa légitimité à être en couple. Il a tous les droits du monde d’être heureux à son tour. “Vraiment ? C’est lui qui m’a recopié de toute façon, il est le plus jeune alors il a tous les torts.” Voilà, problème réglé. Elle lui enverra un message dans la journée, sans doute quelque peu gênée de lui avoir dérobé son petit ami alors qu’elle n’était au courant de rien. Si elle avait su elle aurait proposé de tenir la chandelle entre eux deux pour la journée, parce que tout ce qu’elle veut c’est que tout le monde soit heureux ; au moins le jour de son propre anniversaire.
Pourtant il faut toujours que les choses ne se passent pas comme prévu, qu’un imprévu vienne s’immiscer dans leur journée et qu’il vienne dérégler tous leurs plans. Tous les plans de Léo qu’il avait mis tant de coeur à construire. Elle tente de garder un sourire de façade, n’a aucune idée de ce qu’il pense réellement. Elle sait bien qu’il n’est pas le genre de personne à fondre à la vue d’un nourrisson - et elle non plus, n’est pas ce genre de personne. Mais cette fois ci c’est différent, c’est de sa meilleure amie dont on parle et elle espère profondément qu’il cache tout son désarroi parce qu’elle est encore bien trop fragile à ce niveau là. ”Ca ressemblait à un bébé à l’échographie. Enfin moi je voyais rien du tout, mais c’est ce que le docteur a dit.” Ca aurait pu être une orange, un nénuphar, une paire de tongues ou quoi que ce soit d’autre que ça ne l’aurait pas étonné. N’importe quoi. Quelque chose qui aurait pu avoir un petit coeur battant aussi vite, cependant, cela ne peut être qu’un mini être humain … Mais un bébé. Charlie, enceinte, comme future maman d’un bébé, oui. L’air étonné de Léo ne s’efface toujours pas de son visage et elle sourit avec tendresse. Il a l’air encore plus choqué qu’elle et ce petit rien la fait rire. Ce son cristallin devient un peu plus fort alors qu’il s’inquiète déjà d’en être le père, vraiment pas doué pour les mathématiques. ”Non ce n’est pas toi tête d’ampoule.” La blonde raille, la blonde rigole à gorge déployée sans jamais réellement se moquer. C’est son moyen à elle d’évacuer la pression. Son rire ne se fait plus entendre alors qu’il émet la second hypothèse sur la paternité ; et ce n’est toujours pas la bonne. ”Et … pas Kane non plus. C’est Tim. Je t’ai déjà parlé de lui, tu t’en souviens ? Je ne sais pas si je t’avais donné son prénom mais au moins maintenant tu sais.” Il ne sait pas grand chose à vrai dire et elle doit lui expliquer la chronologie des faits, surtout maintenant qu’elle est devenue aussi importante. Elle ne veut pas qu’il pense qu’elle ait trompé Kane (parce que oui, c’est vrai, mais ce n’était pas à ce moment là alors ça change tout … hein ?), même si elle sait qu’il serait de son côté et qu’il ne la jugerait pas. Quand bien même. ”Tu sais que j’ai toujours pas la faculté de répondre à toutes tes questions en même temps, hein ?” Elles arrivent de toute part et submergent une Charlie qui n’avait rien préparé de tout cela, rien préparé du tout même. Elle n’était même pas supposée lui annoncée maintenant ou sinon elle aurait préparé en post it avec toutes les informations à lui donner, classées par ordre d’importance. ”Je comptais te l’annoncer avec un truc mignon, ou cool, ou n’importe quoi dont on se serait souvenus / T’es en tête de liste pour être parrain mais fais gaffe, Matt te colle aux fesses / Idem pour la baby shower / petit apparté, c’est que Matt ne sait rien de tout ça mais je prédis l’avenir / Et le prénom, euh … J’aimais bien Freddie, moi. Fred. Mercure ? M … Bon je sais pas, on a encore sept mois pour trouver le meilleur prénom de l’univers.” Merde. Le prénom. Si elle doit décider d’un prénom, elle devra se décider de reparler à Tim un jour. Merde. Vous êtes sûrs qu’on ne peut pas avoir la version “sans prénom” dans la commande “enfant” ? Non ? Merde. C’est pas si important que ça, un prénom, de nos jours. Et merde, heureusement qu’il y a Léo et qu’il la prend dans ses bras parce qu’elle commençait à overthink et que ce n’est pas une bonne chose. Elle se contente d’enrouler ses bras autour de ses épaules et de plonger sa tête dans son cou. Elle ne lui avait pas fait de câlins depuis bien trop longtemps et bon sang qu’il lui manquait. Il est son être humain préféré sur terre et elle l’a délaissé, c’est impardonnable.
”On peut aller manger en ville ? Se prendre une glace ? Des churros ? On a eu assez d’émotions pour la journée je pense, on est pas obligés de faire quoi que ce soit. Tant qu’on reste ensemble alors ça me va. Et ça te laisse touuuuute une journée pour me poser les dix mille questions qui font la queue dans ta tête là.” Elle recule une main pour pointer son front du doigts, juste au cas où il n’ait toujours rien compris à l’anatomie humaine. ”Mais, ouais. Je vais être maman.” Quand on le dit à voix haute, tout devient subitement plus réel. Ce n’est peut être pas ce qu’elle désirait. "L'offre du tatouage a intérêt d'être toujours valable dans sept mois par contre, aucune négociation possible." |
| | | | (#)Dim 22 Sep 2019 - 8:13 | |
| J'avais sacrifié l'anniversaire de mon premier copain au profit de Charlie's Day. Mais le motif était compréhensible, non ? Recevable, au moins ? « Ça va, vous avez quoi, un an d'écart ? Je suis toujours le plus vieux de l'histoire. Pauvre de moi. » Dans ma tête, j'avais arrêté de vieillir à l'âge de vingt ans. J'espérais juste ne jamais me réveiller un jour en prenant conscience d'en avoir quarante, sans pour autant avoir accompli ce que je voulais accomplir dans ma vie.
Et puis le cadeau qui était littéralement catapulté hors de Charlie's Day, pour une raison non pas évidente... mais plutôt surprenante. Une nouvelle qui faisait l'effet d'une bombe et qui distillait, un peu égoïstement peut-être, un peu de stress au creux de mon ventre. Heureusement, Charlie me rassurait à propos de ma non-paternité. Mon cœur ne battait pas moins vite pour autant. Le rire de Charlie avait au moins la propriété presque médicinale de faire redescendre l'inquiétude, le questionnement, la surprise et toutes les autres émotions de ma petite tornade mentale personnelle d'un cran. Au moins pour quelques secondes. Pas moi le père. Pas Kane non plus. Elle évoquait Tim. S'en suivit une avalanche de questions, qui me semblaient toutes plus vitales les unes que les autres. Un raz-de-marée, onde de tempête émotionnelle. Elle comptait me l'annoncer. Dans un endroit plus sympa. Pas au milieu d'une rue, donc, alors que de gens pressés nous poussaient presque du chemin de leurs regards mauvais. Un titre de parrain disputé et je mimais l'effarement. « Objectivement, je serai le meilleur parrain. J'ai des chats. C'est bien pour l'éveil des enfants, les animaux. » Étrange, comme je me battais pour être relié à cet enfant avant même sa naissance, moi qui avait toujours détesté m'occuper de ces derniers. Moi qui passais mon temps à râler quand ils occupaient la place à côté de la mienne, dans les transports en commun. Moi qui n'avais jamais su tenir un bébé convenablement entre mes bras. « Tu peux l'appeler 'le bébé' jusqu'à ce qu'il naisse. Au pire, tu donneras un nom à ce gosse quand il sera né. Après avoir vu sa tête. » Histoire de l'appeler Gollum. Tous les bébés avaient des têtes de Gollum, à la naissance. Les gens qui disaient 'quel beau bébé !' d'un air ému n'étaient que des hypocrites.
Le câlin semblait une solution adéquate à la crise. De quoi apaiser instantanément les blessures, les craintes et les appréhensions. « T'inquiète pas pour le tatouage. Et ok pour les churros. 'Faut que t'en mange beaucoup, parce que comme ça ton bébé aimera ça, vu qu'il se souviendra inconsciemment que c'est ce qu'il mangeait dans ton ventre. Il faut lui inculquer les bonnes valeurs. » Churros et popcorn salé, comme sa maman qui semblait un peu dépassée par les événements. J'attrapai la main de ma meilleure amie pour la guider jusqu'à un spot que nous avions l'habitude de squatter en mangeant des churros. « J'ai une idée. Appelle le Haricot. C'est à ça que ça ressemble, sur l'échographie, non ? Et bah appelle le Haricot, ça le rend moins angoissant. Pas vrai Haricot ? », lançai-je à l'attention de la petite gerbe de vie qui se développait dans le ventre de Charlie - et qui ne pouvais définitivement pas encore m'entendre. En tous cas, si elle ne voulait pas l'appeler Haricot jusqu'à ce qu'il naisse, moi j'allais m'en charger. « Le père, il sait qu'il est père ? » Question qui fâche. La seconde était assurément pire. « Et Kane, il sait ? » Peut-être qu'il croyait être le père de Haricot. Ou peut-être aussi qu'il ne savait rien. « Dans tous les cas, si t'as des galères, tu sais que l'appartement t'es grand ouvert. » Mais ça, ça n'avait jamais changé. |
| | | | (#)Mer 25 Sep 2019 - 2:04 | |
| Il a ce don qui est le sien de toujours pouvoir balayer toutes les inquiétudes de Charlie d’un simple revers de la main. Il sourit, il rigole, ou parfois aucun des deux mais il ne cesse jamais de parler. Il raconte n’importe quoi, balance une blague à peine drôle. Mais il essaye, toujours. Que ce soit volontaire ou non, le résultat est toujours là : les innombrables inquiétudes de la blonde sont balayées au second plan pour un temps. Plus ce temps est long et mieux c’est. ”Si t’es le plus vieux alors ça veut dire que tu dois nous surveiller, et là, ouais, pauvre de toi !” Entre elle et Clément, il a vraiment de quoi faire. Les deux imbéciles qui s’aiment autant qu’ils se détestent, qui n’en manquent jamais une pour pouvoir tacler l’autre mais qui au fond seraient pret à beaucoup si jamais le besoin s’en faisait ressentir. Ils sont bêtes à toujours mettre les cailloux sur le chemin de l’autre tout ça à cause d’une obscure raison qu’eux même ne doivent pas connaître ; au moins en ont-ils pris l’habitude aujourd’hui et peut être qu’à force ils cesseront ce stupide jeu.
Ils se battent entre les coups de coude et les regards noirs pour continuer à garder leur bateau (que dis je, leur radeau) sur les flots et y parviennent miraculeusement. Charlie est seulement soulagée qu’il ne soit fâché de rien ou qu’en tout cas il ne lui montre pas. Peut être qu’il bouillonne à l’intérieur mais une égoïste partie de la jeune femme préfère ne pas le savoir et continuer à vivre dans l’ignorance. Il évoque l’irréfutable argument des chats pour être proclamé meilleur parent et bien sûr qu’elle hoche vivement la tête ; il sera le meilleur parrain de tous les temps et ce quoi qu’il arrive. Sauf si un chat crève les yeux du bébé, là ses chances seraient assez compromises … Mais jusque là il restera toujours le parrain idéal, c’est certain. ”C’est joli aussi, “le bébé”. Ca fera l’affaire pour le moment en tout cas, t’as raison. Ca vaut bien un titre de parrain temporaire.” C’est joli, ça n’engage à rien de plus et ça permet de ne pas avoir trop d’espoirs dans cet embryon qu’elle ne pense de toute façon même pas viable. Elle pense qu’il va naître et mourir dans son ventre et que cette expérience sera la plus horrible de toute sa vie. Dans un sens, elle n’a pas tort.
Blottie dans ses bras, elle laisse son souffle se perdre dans son cou à chaque fois qu’il la fait rigoler pour un rien. Il continue de la faire penser à autre chose, à ne surtout pas la faire paniquer, et tous les mots du monde ne seraient pas suffisants pour que Charlie puisse lui exprimer à quel point elle l’aime. Cette annonce n’est certainement pas facile pour lui non plus mais il n’en dit rien, ne se plaint pas, continue de supporter le poids du monde pour eux deux. ”Si c’est pour le bébé alors on est o - bli - gés d’aller manger des churros.” C’est sûrement la première fois de sa vie que ce lardon lui sert d’excuse et ce n’est pas trop tôt ! Il fallait au moins qu’il serve à quelque chose et pas seulement à la faire vomir des semaines durant - cette partie là était bizarrement beaucoup moins fun que les churros. Bien sûr qu’il aura intérêt à aimer les churros, ce n’est même pas un point négociable. La jeune femme rechigne à quitter son cou alors qu’elle se sentait si bien près de lui, à humer son odeur, mais c’est pourtant tout en tenant la main de son meilleur ami qu’ils quittent ce trottoir tortueux et empli de mondes. Ils se retrouvent dans un coin à eux, bien plus intimiste, bien plus prompt à leur faire avouer tous leurs secrets (qui n’en sont pas, parce qu’ils ne se cachent rien). Le prénom de Haricot approuvé par un sourire et un vif hochemen de tête, elle déglutit lentement alors qu’il retourne sur le sujet de la paternité. C’est normal, c’est prévisible, c’est son droit. C’est la vérité, de toute façon. Kane n’est pas le père et peu importe à quel point il est encore présent pour Charlie ; il ne sera jamais le père. Tim le sera toujours, même s’il en aime une autre, même s’il a décidé d’en choisir une autre ; même si elle l’aime plus que tout et que rien de tout ça n’est réciproque. ”Ils savent. Le père … veut continuer d’être là. Aux examens, et tout ça. Et je sais qu’il sera là ensuite aussi.” Ces mots sont difficiles à prononcer parce qu’ils la renvoient à tous ces moments passés en compagnie du père, tous ces moments de bonheur intense comme de détresse, toutes ces larmes et tous ces cris partagés. Cette absence. Ce retour. Et le cercle vicieux qui recommence encore et encore. Il aurait pu la choisir elle et son choix s’est porté sur une autre ; c’est tout ce qu’elle retiendra. ”Kane le sait depuis le début, parce que ça se passait pas vraiment bien et que je passais mon temps à venir. Aussi bien il a même compris avant moi. Et … j’étais pas supposé le garder. Je lui avais dit ça, et je le pensais. Mais maintenant, comme tu vois, j’ai changé d’avis. Il est toujours là aussi, il ne veut pas s’en aller.” Et de ces deux hommes extraordinaires elle ne peut pas continuer à jongler entre. Ce n’est juste ni pour un ni pour l’autre et pourtant c’est ce qu’elle continue de faire, qu’elle ne cessera jamais de faire avant que la corde ne lâche et que son instinct la pousse à se rattraper du côté de Tim ou de Kane. Et la réponse sera évidente, si elle ne l’est pas déjà. ”T’inquiète même pas, je t’amènerai de la poudre pour bébé et tu me serviras de stockage pour les coups dur, je traverserai deux rues et boum, rendez vous chez Leone.” Qu’elle ironise alors qu’il dit lui laisser la porte de chez lui grande ouverte. Mais elle a compris la véritable signification de ces quelques mots, en prouve ce sourire peiné qu’elle lui tend. Il sera toujours là, lui aussi, et jamais elle n’aura à le mettre dans une pseudo compétition contre qui que ce soit. Il a tous les jokers du monde, il gagnerait haut la main. Comme toujours.
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| | | | (#)Mer 2 Oct 2019 - 8:35 | |
| Mon titre de parrain n'était que temporaire. Donc, j'avais encore de la concurrence. Plus pour longtemps. Pour sûr que j'allais préparer à Charlie un PowerPoint intitulé 'pourquoi je serais le plus adéquat des parrains'. Un PowerPoint avec des photos d'elle, des photos de nous et beaucoup de photos de moi faisant la cuisine (je ne possédais absolument pas ce genre de photo), moi faisant de la peinture - activité idéale, pour les enfants, bien sûr - et moi étudiant comme l'adulte responsable que j'étais. Assurément, j'étais le plus qualifié pour le rôle, si rôle il y avait. Et puis, oui, les chats étaient de sacrément bons arguments. « Je sais même changer les couches ! » Nop, toujours pas. Mais promis, je pouvais au moins essayer de m'y mettre, au cas où. Si jamais Charlie avait besoin d'aide, j'étais fin prêt - ou pas, mais encore une fois, il était important de souligner que seule l'intention pesait lourd dans la balance.
Le bébé servait déjà de prétexte à manger tout et n'importe quoi. Pauvre bébé. Pourrit gâté avant même sa naissance. Mais Charlie allait bientôt devoir troquer la pizza dans le frigo pour les petits pots en verre. Ceux que balançaient les bébés par dessus bord. Haricot n'avait qu'à bien se tenir. La fin du câlin était justement signalé par notre départ imminent vers l'objectif goûter à une heure un peu avancée de la journée. « J'ai hâte de te voir lui préparer des trucs comme des patates en forme de bonhomme sourire. Et ne compte pas sur moi pour t'aider, je te regarderai galérer en mangeant du popcorn en compagnie de ta progéniture. » Haricot, le bébé au papa 'présent aux examens'. Je hochai doucement la tête. « C'est bien que vous ayez trouvé une sorte de de terrain d'entente. Pour toi, comme pour le bébé. » Le stress, aka le pire ennemi de la femme enceinte. Mais s'il fallait préparer des litres d'infusion 'détente-sommeil-énergie' à Charlie, alors ok. Le facteur stress, il avait de quoi être élevé, chez ma meilleure amie. Et pourtant, elle n'avait pas l'air de se démonter. « C'est quelqu'un de bien, assurément. Je suis content que vous vous soyez trouvés. » Pour de vrai.
Je regrettais un peu d'avoir spécifié 'si t'as des galères'. Et je regrettais aussi déjà que la réponse soit parvenue jusqu'à mes oreilles. Parce qu'au fond, elle me blessait un peu. Rien qu'un peu. Comme un minuscule coup de pied dans un caillou pas très solide. Comme un coup de pioche au fond d'une mine, que je sentais s'ébranler sous le choc et dont la structure tremblait sous le coup de l'effort appelé 'encaisser les mots tu me serviras de stockage pour les coups durs'. « Et pas que pendant les coups durs. », m'efforçai-je de souligner un peu maladroitement, comme pour me raccrocher aux branches de ma propre remarque. « Je veux dire, même quand t'es pas en galère tu- tu peux venir. » Un genre de sourire plus tard, je lâchai le bras de ma meilleure amie pour aller nous commander trop de churros avec trop de nutella. « Dormir avec Clément, c'est quand même pas pareil que de dormir avec toi. » lançai-je en revenant vers elle, un cornet XXL entre les mains. La bombe était peut-être un peu maladroite et mes méninges tournaient déjà pour rattraper la bourde. « Lui, il ne prend pas toute la place. » Non, définitivement pas la meilleure façon de se rattraper non plus. J'accrochai mon meilleur sourire mi désolé mi oublie-ce-que-je-viens-de-dire à mon visage. « Ce que je veux dire c'est que j'ai l'impression que pleins de trucs ont évolué très, très vite ces derniers temps. C'est pas négatif c'est juste... heu... impressionnant ? Peu importe, oublie, je sais pas m'exprimer. » Ça, par contre, ça n'avait pas changé. |
| | | | (#)Lun 7 Oct 2019 - 20:15 | |
| Elle est heureuse et infiniment rassurée de voir que Léo semble à peu près bien la nouvelle et surtout qu’il ne commence pas déjà à paniquer. S’il panique, elle panique. C’est scientifiquement prouvé, ça arrive toujours comme ça. Si elle panique, il panique. Tout marche dans les deux sens avec eux, et c’est tant un avantage qu’un énorme problème. Savoir ce que ressent l’autre est une bonne chose pour le comprendre, mais endurer une douleur double … ce n’est plus du tout une bonne chose. Elle serait néanmoins capable d’endurer n’importe quelle sorte de douleur physique ou mentale pour lui et l’inverse est d’autant plus vrai maintenant qu’il déballe tout un éventail d’arguments en faveur du meilleur (/moins pire) parrain potentiel de cet enfant. Sa façon à lui de lui dire qu’il sera toujours là c’est d'évoquer les futures heures de préparation de bonhommes-patates auxquelles il se soustrait déjà. Au moins, toutes ses bêtises ont l’art de la faire rire et elle garde un mince sourire sur son visage lorsqu’il s’en va chercher leur dose de sucre pour le mois. Il pose des mots sur la relation qu’elle a désormais avec Tim et la qualifie “d’entente”. C’est ça, en quelques sortes. Ca lui brise le coeur mais c’est bien ce qu’ils sont devenus, deux adultes s’entendant. Il n’y aura plus jamais de plus, apparemment, et elle espère qu’il n’y aura jamais de moins non plus. ”Tant que le popcorn en question est salé alors vous aurez le droit de me regarder galérer en cuisine.” Elle finit par lui lancer alors qu’il est déjà parti. Il faut au moins habituer cet enfant aux bonnes choses de la vie.
Le ton de la discussion change subitement sans qu’elle ne voit rien arriver, la faute à sa maladresse. Léo se fait entendre par segments de phrases, chose caractéristique quand quelque chose ne va pas et qu’il cherche ses mots. La blonde ne répond pas alors qu’il semble de tomber de Charybde en Scylla parce qu’elle sait qu’il est le meilleur ami le plus maladroit de la Terre entière. Il lui faut seulement du temps pour assembler toutes les phrases dans son esprit et elle a appris à ne pas réagir au quart de tour avec lui, parce qu’elle l’aime bien trop pour se disputer à cause de mots perdus. Elle garde ses yeux alertes et guette la moindre de ses réactions alors que son bras vient entourer le sien, signe silencieux qu’il pourra toujours dire tout ce qu’il a envie avec elle. Pas de jugements, pas de censure. Jamais, sinon leur amitié ne voudrait plus rien signifier. ”Je … ouais. J’aurais aimé que les choses se passent différemment à propos de plein de choses … et je suis désolée de m’être éloignée. J’ai pas été là et encore moins depuis que t’es avec l’autre pau - … Clément. Mais tu sais, je suis sûre qu’il peut prendre autant de place que moi dans le lit, donne lui du temps.” Charlie qui défend l’autre paumé, une première. A noter dans les annales parce que cela ne se reproduira pas avant que toutes les planètes soient alignés un vendredi treize. ”Tu resteras toujours le meilleur Leone du monde entier, même si j’te détesterai à manger des popcorns pendant que je galérerai. J’sais pas trop où on va mais ça va bien se passer. Parce que je l’ai décidé, donc maintenant y’a plus le choix.” Parce qu’ils resteront tous les deux, aussi, quoi qu’il se passe. Comme pour souligner ses paroles, sa main vient se glisser autour des épaules de son ami et se pose entre sa clavicule et la base de son cou. Un baiser sur sa tempe agrémente cette marque d’affection et elle finit par voler un fameux churros de sa main gauche.
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| | | | (#)Dim 20 Oct 2019 - 10:01 | |
| Foutu moi-même et mon incapacité à réfléchir avant de parler. Pas moyen de mettre en pause ma voix, pas de bouton "mute" et définitivement pas assez d'alarmes "tais-toi, Léo!" pour me stopper. Et nous voilà, à filer dans le malaise le plus profond, moi avec un cornet de churros qui brûlait mes doigts et Charlie, le regard simplement calme, visiblement pas trop blessée par ma maladresse. Pourtant, il y avait de quoi. J'avais envie de me frapper la tête contre un mur pour la seule faute d'avoir amené Clément dans la discussion. Pourtant, ma meilleure amie ne sembla pas en tenir trop rigueur. Je haussai les épaules, détournai le regard. Dormir avec Clément n'était définitivement pas pareil qu'avec Charlie. La connexion était différente. Une différence que je digérais mal, car elle signifiait foncièrement de renoncer à elle, qui prenait trop de place dans le lit. Je n'étais plus très sûr d'avoir envie de tout ça, désormais. « Non, il est calme quand il dort. Il ne prendra jamais autant de place que toi. » Ni au sens propre, et pas non plus - surtout pas - au sens figuré. « C'est aussi de ma faute. J'aurais dû nous organiser plus de sorties, de trucs pour nous deux. T'aurais pas pu venir, mais c'est la démarche qui compte. » Des sorties cinéma-nachos-pop-corn-salé, des sorties au parc, des moments pour nous deux, hors des bornes du bon sens et en dépit de nos réserves d'énergie respectives.
Fort heureusement, les derniers mots de ma meilleure amie me mirent un peu de baume au cœur. J'accueillis ses mots en souriant, son baiser avec un petit rire. Baiser à visée de distraction, visiblement, en témoignait le churros dérobé que je regardai filer en affichant une mine absolument outrée. « Tout ça pour voler un churros ! Je sais à qui faire appel si je veux braquer une bijouterie. » Je me défis de son emprise en filant avec le cornet, précieux trophée, que je manquai au passage de déverser sur le sol sablonneux. « Je serai le meilleur Leone, mais c'est aussi parce que je suis le seul que tu fréquentes ! Mais soit, je prends la déclaration d'amour. » Je croquai dans une de mes prises, grand sourire aux lèvres.
« Quand tu pourras de nouveau boire, on boira à notre santé. » A nous. Je gardais dans ma collection d'excellentes bouteilles pour des grandes occasions qui ne se présentaient absolument jamais. C'était l'occasion. Fêter notre amitié, et/ou la naissance de Haricot. Peu importait, au final, la suite de l'histoire. Je savais qu'au fond, nous ferions toujours partie de nos histoires mutuelles. JE SERAI LA ROUILLE SE SOUVENANT DE L'EAU |
| | | | | | | | You're my better | léolie #12 |
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