S’il y avait une chose qui pouvait caractériser Nino, c’était sa méfiance des réseaux sociaux, des appareils électroniques connectés, de tout ce qui pouvait le traquer par GPS ou laisser sa trace quelques part via internet. Il n’avait ni smartphone, ni ordinateur avec une box connectée chez lui. Il n’avait pas de profil facebook, pas snapchat ou instagram. Il avait juste appris avoir un profil Tinder à son insu que Maze s’amusait à entretenir et on peut dire que grâce à elle, il avait fait au moins une belle rencontre. Il s’en amusait à présent mais il doit avouer que la blague aurait pu être de courte durée si le courant n’était pas passé avec Apolline. Le seul moyen de communication de Nino était son vieux Nokia qu’il n’avait d’ailleurs même pas toujours sur lui. Il n’y enregistrait aucun numéro mais notait ceux qui l’intéressait sur un papier qui traversait les âges et les temps avec lui. Un ou plusieurs papiers d’ailleurs car il n’avait pas la place pour tout y inscrire et depuis qu’il était à Brisbane, son répertoire gonflait à mesure que le temps passait.
Il y a un papier qu’il avait perdu depuis son arrivée, différents numéro y apparaissaient : celui de Duncan, celui de Silvia et celui de Sohan. Il regrettait d’avoir perdu le numéro de Duncan car il lui avait réellement apporté de l’aide et une aide si précieuse. Il se souvient encore lorsqu’il a pu lui faire passer des examens médicaux en le faisant passer pour un interne à l’hopîtal, mais aussi toutes ces soirées où Nino avait pu dormir chez lui. L’italien savait où il habitait mais en réalité, il n’osait plus s’imposer à lui. Quant à Silvia, elle avait surement brûlé les quelques affaires que l’italien avait laissé chez elle. Le troisième se tenait devant lui, à quelques mètres de Nino devant une friperie vintage, a regarder la vitrine. Nino n’avait pas oublié Sohan, au contraire, il se souvenait bien de l’aide qu’il lui avait apporté aussi, une dette qu’il ne pourra jamais remboursé. Car grâce à Sohan et ses talents de hackers, il avait pu retrouver la trace de Vitto en voyant que son nom était dans un registre d’une salle de boxe à Brisbane. C’est de cette manière que l’italien avait retrouvé Vittorio et contrairement à ce qu’il avait pu dire à Sohan, ce n’était, à la base, pas pour renouer contact avec son frère perdu et lui dire Ô combien il l’aimait. Nino avait bien d’autres intentions à cette époque mais s’il avait été aussi honnête en avouant tout à Sohan, il se doutait qu’il ne prendrait aucun risque pour lui.
L’italien se décida enfin à faire un pas vers lui. « Les chemises à fleurs tahitienne, ca aurait jamais dû exister. » dit il en regardant cette chemise dans la vitrime. « J’espère que t’étais pas entrain d’hésiter à te la prendre. » Nino lâcha naturellement, comme si les deux hommes s’étaient quitté la veille, alors que Nino était vite rattrapé par le temps… ca allait faire trois ans qu’il était arrivé à Brisbane, et presque autant de temps qu’il n’avait pas revu Sohan.

Sohan et les soirées déguisées ça faisait deux. Ce n'était pas qu'il était contre le fait d'enfiler un costume et de se faire passer pour quelqu'un d'autre l'espace d'une soirée. Il l'avait fait malgré lui pendant des années quand il cachait son homosexualité à ses parents. Non, son réel problème avec ce genre de soirée c'était qu'il avait toujours peur d'attirer un peu trop l'attention sur lui, sa nature timide et discrète faisait qu'il aimait passer inaperçu. Le choix du costume était crucial il s'agissait d'être dans le thème, de se fondre dans la masse tout en n'ayant pas l'air d'un imbécile. Beaucoup de choses qui faisaient que c'était un vrai casse-tête pour lui qui ne pouvait s'empêcher de peser le pour et le contre de chaque idée qui lui venait en tête. La soirée à laquelle il était invité ce weekend était une soirée tropiques. Il avait d'abord pensé se déguiser en guerrier maoris, mais avait très rapidement écarté cette idée. Il n'avait pas vraiment un physique qui se prêtait au port d'un simple pagne. Il aurait clairement l'air d'un clown habillé de la sorte et ce n'était pas envisageable. Il serait parfaitement incapable de faire peur à qui que ce soit s'il se lançait dans un haka improvisé. Lui qui pensait avoir trouvé l'idée parfaite avait donc dû retourner se creuser les méninges pour trouver une meilleure idée. C'était comme ça qu'il s'était retrouvé devant cette friperie du Queen Street Mall ce jour-là. Sa recherche du jour : une chemise à fleurs. Il lui suffirait de l'accompagner d'un short, d'une paire de tongs, de lunettes de soleil et bien évidemment d'un collier à fleurs et la panoplie du touriste serait complète. Cependant, trouver une chemise à fleurs à Brisbane s'était avéré bien plus compliqué qu'il n'aurait pu l'imaginer, apparemment ce n'était pas du tout à la mode et il n'y en avait pas une seule dans les grandes enseignes de prêt à porter. Qui aurait pu l'imaginer ? C'était finalement dans la vitrine de cette friperie qu'il l'avait vu. Le Saint Graal qu'il avait tant cherché. C'était coloré, c'était fleuri, c'était à manches courtes. C'était bien le genre de chemises que Sohan ne mettait pas et là, devant la vitrine il était en train de se demander s'il oserait se pointer à la soirée avec ça sur le dos.

C'est une voix qu'il connait qui le fait se retourner. Nino. Ca devait faire environ trois ans qu'il ne l'avait pas vu. Il l'avait aidé à retrouver son frère. Il avait combiné ses talents de hacker et les ressources du poste de police. Il avait longuement hésité puis Nino avait su le convaincre. Il voulait retrouver son frère qui visiblement comptait beaucoup pour lui et il n'en avait pas fallu plus pour que Sohan accepte. Il avait retrouvé la trace de Vittorio dans le registre d'une salle de boxe, avait donné l'information à Nino et n'avait plus entendu parler de lui. "Je sais pas ce qui est passé par la tête du type qui a inventé ça !" répond-il à Nino en hochant la tête de gauche à droite. Il ne parvenait pas à comprendre comment quelqu'un, quelque part sur la planète avait pu trouver ce genre de vêtement beau. Ce n'était pas envisageable, le type avait sûrement dû inventer ça comme une grosse farce sans s'imaginer que ça allait se répandre à ce point-là. "C'est pour une soirée costumée ! Jamais je porterai ça dans la vie de tous les jours." Lui précise t-il en souriant. C'était bien trop tape à l'oeil, bien trop flamboyant pour qu'il ose sortir habillé comme cela. "Et j'suis en train de me demander si j'oserai me pointer avec à la soirée justement !" Car cette chemise, même pour une soirée costumée, il fallait l'assumer et rien ne lui disait que quelqu'un d'autre aurait la même idée de costume que lui. Peut-être allait il se retrouver seul accoutré de la sorte au milieu de maoris en pagnes et peintures de guerre. "Ca fait un bail !" Commente t-il avant d'ajouter. "La trace que j'avais trouvée avait donné quelque chose ? T'as pu retrouver ton frère ?" Car oui, il n'avait jamais su si Nino avait retrouvé son frère et si le Vittorio de la salle de boxe était le bon.

Nino qui regardait toujours cette chemise avec un air dégouté sur son visage. Il n’avait jamais porté ce genre de vêtement et jugeait fortement ceux qui s’y osaient. Nino restait très conventionnel dans sa façon de s’habiller, passe partout pour se fondre parfaitement dans le paysage et pouvoir ressembler à tout le monde. Il ne voulait pas se démarquer des autres, il ne voulait pas qu’on puisse le voir arriver de loin. Il restait sobre tout en pensant bien choisir le peu de fringue qu’il pouvait avoir chez lui. Sa garde-robe n’était pas pleine à craquer, il tournait avec trois jeans, quatre ou cinq t-shirts et autant de pull. Tout ça dans des teintes de blanc, gris à noir. Un peu de bleu parfois, c’était sa touche exotique. « Je sais pas ce qui est passé par la tête du type qui a inventé ça ! » Au moins, Sohan portait le même jugement que lui sur la question et il ne risquait pas de le froisser. « C'est pour une soirée costumée ! Jamais je porterai ça dans la vie de tous les jours. » amen. L’italien était au moins rassuré. « Et j'suis en train de me demander si j'oserai me pointer avec à la soirée justement ! » Les soirées déguisées, c’était pas la came de Nino. Il en avait jamais fait ou plutôt, il avait jamais joué le jeu. Il se faisait passer pour le rabajoie de service mais ca lui posait pas de problème. Faut dire qu’à Scampia, en Italie, c’était pas courant, les soirées du genre. Et les mecs qui osaient se déguiser pour x ou y raison étaient souvent insulté de « grosse tapette » et autres injures qui n’étaient pas bonnes à entendre. Et parfois, accompagnées de gestes tout aussi affectifs. Nino se contentait une fois de plus d’être discret, de pas se faire remarquer pour pas chercher les ennuis. Il avait alors grandi dans l’idée que les déguisements étaient réservés aux fragiles ou excentriques et que si t’étais un homme, un vrai, fallait surtout pas essayer. Il savait bien que c’était que des conneries mais pour autant, porter un costume, faire le clown, c’était pas son délire. « C’est quoi le thème ? » parce qu’il y a toujours un thème, une ligne directrice pour ce genre de soirée là.
« Ca fait un bail ! » tu m’étonnes. Nino se tourna une bonne fois pour toute vers Sohan, s’ouvrant à lui. « La trace que j'avais trouvée avait donné quelque chose ? T'as pu retrouver ton frère ? » il hocha la tête l’italien, se frottant le haut du crâne. « Ouais, j’ai retrouvé Vitto. » et il grimaça à l’idée de plus avoir jamais donné de nouvelles à celui qui lui avait permis de trouver son frère. « Désolé d’avoir fait l’mort après ça. Faut dire que tout s’est pas passé comment j’avais espéré. » Nino se rappelant qu’il avait dépeint un tableau qui ressemblait plus aux bisounours qu’à la vraie raison pour laquelle il voulait, de base, retrouvait son frère. « Enfin, ca va, maintenant. Tout rentre, petit à petit dans l’ordre. » il avait cette impression qu’il y avait bien moins de tensions entre lui et son frère et si Vitto lui en voudrait sans doute jamais à vie pour toutes les conneries que Nino avait fait, le cadet savait qu’il pourrait compter sur lui encore et toujours. « T’achètes cette horreur et t’as un peu de temps pour boire un coup ? j’invite. » il lui devait bien ça.

Sohan ne savait pas trop s'il avait envie d'acheter cette chemise. Elle était moche, il ne la mettrait que quelques heures et après ça il la rangerait au fond de son placard puis finirait par oublier qu'il possède un truc comme ça dans sa garde robe. Il ne savait donc pas si ça valait réellement le coup, mais en même temps, il n'avait pas envie de chercher plus loin, persuadé que de toute façon, il ne trouverait probablement pas mieux. C'était la chemise ou le pagne, alors à choisir, la chemise restait la meilleure option et si un jour il sentait un trop plein de confiance en lui, il pourrait la porter pour sortir dans la rue et se la jouer un peu hipster avec un style décalé, mais assumé. Il était loin de ça cependant et s'il achetait cette chemise il ne la porterait que pour la soirée, mais après tout, c'était le but d'un déguisement de ne servir que pour certaines occasions bien particulières. "C'est 'soirée tropiques'." Répond-il à Nino en haussant les épaules. Pourquoi un tel thème, il n'en avait aucune idée. D'ailleurs il ne savait même pas pourquoi il fallait que cette soirée soit une soirée déguisée, mais il n'était pas vraiment du genre à poser trop de questions. Surtout quand on avait la gentillesse de l'inviter. "C'est la chemise ou un pagne en feuilles de palmier ou je ne sais quel arbre. Le choix est vite fait." Se la jouer touriste lambda lui semblait bien plus acceptable et bien plus jouable, même s'il était persuadé que plus d'un homme à cette soirée allait opter pour l'option guerrier polynésien.

Nino se tourne ensuite vers lui et Sohan le questionne immédiatement sur son frère. Après tout, c'était ce qui les avait amenés à se côtoyer au départ. Le souhait de Nino de retrouver son frère qu'il avait perdu de vue depuis des années. Il avait touché la corde sensible de Sohan qui n'avait pas hésité à aller à l'encontre de ses principes pour l'aider au mieux. Il avait trouvé un nom qui correspondait, l'adresse d'une salle de boxe. Le reste, il l'avait laissé à Nino et depuis, il n'avait plus entendu parler de lui. Ca ne l'avait pas dérangé ou vexé. Après tout, il l'avait engagé dans un but bien précis, Sohan avait fait le travail que l'italien lui avait demandé de faire et c'était tout. Cependant, il était curieux de savoir s'il avait réellement trouvé son frère ou si ça avait été un échec et qu'il avait décidé d'arrêter là. "C'est génial ! J'suis content d'apprendre que la piste était la bonne." Au moins ce n'était pas un échec pour sa part et il éprouvait tout de même une petite fierté. La satisfaction de savoir que ses talents et les logiciels de la police de Brisbane avaient servi à quelque chose. Enfin, visiblement les retrouvailles n'avaient pas été celles espérées par l'italien. "T'en fais pas il y a pas de soucis. Il s'est passé quoi ?" demande t-il à Nino avant d'ajouter après un court instant. "Enfin, t'es pas obligé de répondre, c'est pas parce que je t'ai aidé que je dois connaitre les moindres détails." Après tout, il avait payé pour ses services et c'était tout ce que Sohan lui avait demandé. Le reste ne le regardait pas vraiment. Il n'avait d'ailleurs pas trop questionner le jeune homme à l'époque juste assez pour décider si oui ou non il acceptait de l'aider ou pas. "Ah tant mieux alors ! Vous avez gardé contact ! Je te cache pas que ça m'arrange, j'sais pas si j'oserai utiliser les ressources de la police maintenant, ils ont renforcé leur sécurité. Enfin j'ai renforcé leur sécurité et c'est plus compliqué de passer inaperçu." Il n'était pas le seul dans son département il n'était donc pas le seul à avoir accès à tout ça, ni même à voir s'il y avait une intrusion ou pas. "J'sais pas si j'ai envie de l'acheter quand tu répètes que c'est moche. Mais oui j'ai carrément le temps, je reviens." Lui lance t-il en rentrant dans la boutique. Elle n'était peut-être pas belle, mais s'il pouvait s'éviter de faire plusieurs magasins de plus, il pouvait bien mettre ce détail de côté.

Et c'est comme ça qu'il ressort quelques minutes plus tard avec la fameuse chemise, soigneusement mise dans un sac par la vendeuse, ce qui l'arrangeait bien parce qu'il n'allait pas se balader avec une telle abomination en main à la vue de tous. "Du coup j'suis paré, c'est pas le déguisement du siècle, mais je crois pas que ce soit le plus important. Tu veux aller où ? T'as un bar que t'aime bien dans le coin ?" Lui demande t-il. Lui tant qu'il pouvait commander un soda, il se fichait bien du lieu.

« C'est 'soirée tropiques'. » ca semblait si évident et si peu original aussi. L’italien n’avait pourtant jamais participé à ce genre de soirée mais il pouvait déjà s’y imaginer et il en ressentait déjà l’ennui. « C'est la chemise ou un pagne en feuilles de palmier ou je ne sais quel arbre. Le choix est vite fait. » Nino qui dérive son regard vers Sohan, le dévisageant et l’envisageant aussi avec une jupe en feuille de palmier. Le sourire ne se fit pas attendre. « Au choix, je prends le deuxième ! » Juste pour rire, mais pas pour lui, pour Sohan. Nino et les déguisements, c’est pas ça du tout. Ou alors, il le ferait pour halloween, et pour faire flipper absolument toutes les personnes qu’il pourrait croiser dans la rue. « Ou t’y vas normal et tu dis que t’avais oublié que c’était déguisé. » il hausse les épaules, lui aurait totalement fuit la soirée. Voir tout le monde se prendre pour des touristes des caraïbes, alors que lui-même n’avait jamais mis un pied dans un de ces pays désigné par « les tropiques ».
Concernant Vitto, c’était bien grâce à Sohan que l’italien avait pu le retrouver. Même si Nino avait fait preuve d’un tour de passe passe pour arriver à ses fins, se doutant bien que s’il avait expliqué les vraies raisons qui le poussaient à trouver Vitto, Sohan n’aurait sans doute pas accepter de lui rendre ce service. « C'est génial ! J'suis content d'apprendre que la piste était la bonne. » et finalement, l’impulsivité de Nino ne l’avait tout de même pas conduit à s’en prendre si violemment à son frère, pas comme il l’avait pensé en débarquant à Brisbane en tout cas. Vitto avait toujours cette emprise sur le plus jeune, qui, dès qu’il posait ses yeux sur lui, on sentait que Nino ne faisait pas tant le fier. « T'en fais pas il y a pas de soucis. Il s'est passé quoi ? » c’était bien l’occasion de se faire passer à nouveau pour une victime, histoire de se faire passer pour l’ange. « Enfin, t'es pas obligé de répondre, c'est pas parce que je t'ai aidé que je dois connaitre les moindres détails. » l’italien haussa les épaules, s’il pouvait se racheter une bonne conduite, il allait s’en saisir. « T’inquiète… C’est juste qu’il était pas si enjoué que moi à l’idée de nous retrouver. Moi qui pensais lui faire une bonne surprise.» raté. Vitto avait quitté l’Italie pour s’éloigner de tous ces problèmes que sa famille et notamment Nino lui avait toujours apporté, tourner la page et reprendre tout à zéro. Car même si la carrière professionnelle de Vitto était retombée aussi vite qu’elle n’avait décollé, Nino en était en partie responsable. Lui et ses affaires troubles. Mais bientôt trois ans que Nino était à Brisbane, depuis, de l’eau avait coulé sous les ponts et l’ainé s’était montré plus ouvert envers son petit frère. « Ah tant mieux alors ! Vous avez gardé contact ! Je te cache pas que ça m'arrange, j'sais pas si j'oserai utiliser les ressources de la police maintenant, ils ont renforcé leur sécurité. Enfin j'ai renforcé leur sécurité et c'est plus compliqué de passer inaperçu. » donc Sohan bosse toujours pour les flics. « J’ai plus besoin de retrouver personne. Et j’ai même son numéro maintenant. Tout va bien. » et Nino savait aussi que le club avait un système informatique si poussé que s’il avait besoin de quoi que ce soit, il savait aussi qu’il pouvait se tourner vers eux. Même s’il avait fait le choix de quitter leurs rangs.
Sohan disparait pour aller faire son achat, il choisit finalement la chemise et Nino observait la scène à travers la vitrine. Même la vendeuse semblait l’avoir jugé lorsqu’il lui donna le vêtement pour passer en caisse. Le jeune homme revint vers Nino, pas très fier de son achat visiblement. « Du coup j'suis paré, c'est pas le déguisement du siècle, mais je crois pas que ce soit le plus important. Tu veux aller où ? T'as un bar que t'aime bien dans le coin ? » de base, la soirée ne semblait pas être l’idée du siècle, alors le déguisement ne pouvait pas être plus prétentieux que ça. « J’connais pas le quartier, j’t’avoue. J’traine pas souvent par ici. J’habite à Fortitude Valley maintenant. Mais j’suis pas difficile. » Il enclenche le pas et balaie la rue du regard. « c’est pas les pubs qui manquent dans le coin. » il en désigna un du menton. « et c’est l’happy hour en plus. » on pouvait voir la pancarte à des dizaines de mètres tellement elle était énorme. « La pinte pour 4 dollars. Ca m’semble pas mal ! » l’italien leva ses yeux vers Sohan. « tu bois de l’alcool ? » Il voulait pas paraitre raciste ou quoi, mais il semblerait que les origines du jeune homme lui faisait penser qu’il était peut être musulman, et comme l’italien était particulièrement maladroit… il ne savait pas comment lui demander autrement. il avait comme un doute. « doivent bien faire du chocolat chaud même. » qu’il se moque gentiment l’italien. « tu viens d’où toi ? » Qu’il fini par demander, parce que la question ne lui avait jamais traversé l’esprit.

Il avait pensé à y aller sans déguisement. Surtout quand il avait commencé à se creuser la tête pour savoir ce qu'il allait bien pouvoir porter. Il s'était dit que pas de déguisement pourrait probablement fonctionner. Il n'avait jamais mis un pied sous les tropiques, mais il était certain que là-bas, il y avait au moins une personne qui ne portait ni pagne, ni chemise à fleurs. Que tout ceci n'étaient que des clichés, mais il ne voulait pas paraitre rabat-joie, il ne voulait pas être celui qui plombe l'ambiance ou qui n'est pas drôle parce qu'il n'aurait pas voulu se prêter au jeu. Il hoche donc la tête de gauche à droite dans un premier temps en guise de réponse à Nino. "Je préfère encore la chemise à fleurs." Même s'il était certain qu'il y aurait au moins une personne qui se pointerait sans déguisement à cette fameuse soirée. Par oubli volontaire ou non, mais il préférait que ce ne soit pas lui. Si ça pouvait lui éviter d'inventer une excuse, il porterait sa chemise à fleurs avec fierté. Ou presque.

Sohan était un peu déçu d'entendre que les retrouvailles entre Nino et son frère ne s'étaient pas si bien passées que cela. Le frère n'était apparemment pas enchanté de retrouver Nino. L'australien est désolé pour le jeune homme qui avait l'air de vraiment vouloir retrouver son frère. Il ne s'attendait probablement pas à un mauvais accueil. Quoi que. Sohan ne connaissait pas grand-chose de la relation entre les deux frères en revanche, s'ils n'étaient toujours pas en contact il y a trois ans, il y avait fort à parier que Vittorio n'avait pas tenté de chercher son frère plus que cela. Auquel cas, il l'aurait trouvé et Sohan n'aurait pas eu à offrir ses services à Nino. "Ah mince, j'suis désolé ! J'imagine que t'as dû être un peu déçu ?" lui demande t-il, se rappelant l'enjouement dont le jeune homme avait fait preuve du début à la fin des recherches de Sohan. Il se mettait à sa place. Il savait que s'il se trouvait dans la position de l'italien, il aurait pris les choses très à coeur. Il imaginait parfaitement la déception qu'il avait pu ressentir et qui avait surement suivie l'euphorie de cette fameuse piste sur le registre d'une salle de boxe. Sohan aurait bien aimé entendre une fin un peu plus joyeuse, mais il fallait se rendre à l'évidence, ils étaient dans la vraie vie, pas dans un film et tout ne se passait pas toujours comme il l'espérait. Cependant, il semblait y avoir de la lumière au bout du tunnel puisque Nino lui apprend que les choses se sont tout de même arrangées entre lui et son frère. "Ahh bon tu refais ma journée là alors ! Ca me fais plaisir d'avoir pu t'aider." Même s'il ne savait pas s'il le referait avec le recul, mais ce qui était fait était fait et il ne regrettait pas d'avoir aidé l'italien. Même si utiliser les ressources de la police n'était pas très légal, il avait fait une bonne action et selon lui, ça rendait la chose bien moins grave. "Il avait jamais tenté de te retrouver ?" demande t-il, à tout hasard, parce que c'est une question qu'il se pose. De ce qu'il se souvient, les frères s'étaient perdus de vue depuis des années quand Nino est venu le trouver pour lui demander de l'aide.

Il est content, Sohan, avec son affreuse chemise à fleurs qu'il va porter une fois avant de l'oublier tout au fond de son armoire. Au moins, il n'aura pas l'air d'un idiot à cette fameuse soirée, quoi que. Mais ça lui importe peu pour le moment. Nino lui dit ne pas trop connaître le quartier. Sohan lui, c'est les bars dans le quartier qu'il ne connait pas, mais de toute façon, il n'est pas difficile, du moment que le bar en question sert des sodas, ça lui convient très bien. "Je connais le quartier, mais je t'avoue que je suis pas du genre à faire la tournée des bars, alors je saurai pas te dire lequel est le mieux, mais vas-y, choisis en un, je te suis." Surtout que comme le mentionne très justement le jeune homme, ils tombent en plein dans l'happy hour et que les consommations sont servies pour un prix quasi dérisoire dans tous les établissements de la rue. Ca le fait rire quand l'italien s'arrête devant un bar, relève le prix de la pinte de bière, avant de lui demander s'il boit de l'alcool. "Non, je bois pas, mais du moment qu'ils ont des sodas ou n'importe quelle boisson non alcoolisée ça me va. On peut aller là." Surtout que le bar en lui-même à l'air sympathique et il y a du monde, signe qu'ils ne sont probablement pas tombés sur un taudis. Puis il prend un air vexé "Et du chocolat chaud ? J'suis pas si ennuyeux que ça quand même." Répond-il en riant. Ce n'était pas parce qu'il ne buvait pas d'alcool qu'il buvait sa petite tisane avant d'aller se mettre au lit. Il pouvait comprendre cependant, il savait que l'alcool était tellement ancré dans les moeurs qu'il était parfois compliqué d'imaginer que quelqu'un ne puisse pas avoir touché une seule goutte de sa vie. "Je suis né ici, mais mes parents sont marocains." Explique t-il à Nino. "Ils ont quitté le pays après un tremblement de terre, mon père rêvait d'offrir une bonne vie à sa famille et visiblement, c'est l'Australie qui lui a semblé être le pays le plus à même d'atteindre ce but." Et il avait réussi. Même s'ils n'étaient pas les plus riches, ils n'avaient manqué de rien. Sohan rentre donc dans le bar accompagné de Nino et s'installe à une des tables vides. "Tu deviens quoi toi sinon ? T'as réussi à te poser ?" Demande t-il, se rappelant de la situation de Nino il y a trois ans.

Sohan aurait sans doute aimé que Nino lui conte une happy ending, digne de retrouvailles joyeuses, familiales, heureuses comme on les aime. Mais Nino avait volontairement omis certains détails de l’histoire pour être sûre qu’il aurait un coup de main de sa part. Il se disait que s’il lui disait qu’il avait quitté l’Italie pour fuir la mafia de son quartier – et pas des plus sympathiques qu’on connaisse – pour pouvoir se venger auprès de son frère qui l’avait lâchement abandonné selon ses termes, pas certain que Sohan soit partant pour prendre le risques d’utiliser du matériel policier à des fins tragiques. Bon finalement, pas si tragique que ça. Certes Vittorio et Nino avaient manqué de se battre dans cette salle de boxe dès que leurs regards s’étaient croisé, mais pas plus de casses. Nino comptait sur la culpabilité de son frère et ce rôle de grand frère qui lui a toujours tenu tant à cœur. Il savait que Vitto ne lui ferait pas mal, physiquement du moins, car l’aîné par contre avait bien usé de mots difficiles pour faire comprendre à Nino qu’il était responsable de tous ses maux et ceux qu’ils infligent aussi aux autres, notamment leur mère, décédée il y a plusieurs années. Vittorio avait directement accusé l’italien d’être à l’origine de cette mort. Des mots que trois ans après, Nino n’oublie toujours pas. « Ah mince, j'suis désolé ! J'imagine que t'as dû être un peu déçu ? » déçu pour la version qu’il en connait, peu surpris pour celle de Nino. Il était surtout déçu à l’époque de ne pas avoir été capable de lui mettre une belle raclée comme il avait prévu de le faire. Mais depuis trois ans, l’eau avait coulé sous les ponts et le cadet avait pu tenter de se racheter auprès de son frère, assez maladroitement, mais leurs rapports étaient moins délétères et même si Nino prendra toujours la fuite de Vitto comme un abandon, il devait – difficilement – avouer qu’il était content de la tournure que prenait leur relation à présent. Il pensait d’ailleurs à inviter son frère chez lui la prochaine fois qu’il aurait en garde sa fille, pour lui présenter. « Il avait jamais tenté de te retrouver ? » l’italien secoua la tête négativement. « Il savait pas que j’étais ici. Y a trois ans, j’débarquais tout juste d’Italie. L’idée c’était de le surprendre. Ca a marché en quelques sorte. » ouais, Nino voyait encore très bien la tête de son frère le jour où il est rentré dans cette salle de boxe. Mythique. Vitto aurait jamais parié sur son frère pour prendre l’avion seul et partir à l’autre bout du monde, loin de son pays chéri.

« Je connais le quartier, mais je t'avoue que je suis pas du genre à faire la tournée des bars, alors je saurai pas te dire lequel est le mieux, mais vas-y, choisis en un, je te suis. » Nino avait que l’embarras du choix et allait donc faire marcher la concurrence déloyal des prix. Mais force est de constater que finalement à quelques centimes près, il semblerait que les commerçants du coin se soient mis d’accord pour ne pas trop abuser sur les gaps des prix des pintes. Nino avait alors choisi le premier devant lui, entrant dans celui-ci, laissant Sohan suivre la marche, se demandant alors si le jeune homme buvait de l’alcool. « Et du chocolat chaud ? J'suis pas si ennuyeux que ça quand même. » pour Nino, chocolat chaud ou soda, c’était aussi ennuyant en vrai. « J’ai pas eu l’occasion de te voir suffisamment à l’œuvre pour voir si t’étais si chiant que ça. » il se moque un peu l’italien. « Mais si t’étais si ennuyant, j’aurai fais semblant de pas te voir devant la boutique, t’aurais rien vu non plus. Ca m’fait quand même plaisir d’te croiser. » et c’était sincère.
Sohan expose alors ses origines à l’italien pour réponse à sa curiosité. D’origine marocaine donc. « Ils ont quitté le pays après un tremblement de terre, mon père rêvait d'offrir une bonne vie à sa famille et visiblement, c'est l'Australie qui lui a semblé être le pays le plus à même d'atteindre ce but. » c’était pas la porte à côté pourtant. « Ca a pas dû être simple. » il hausse les épaules et va s’assoir à la table que Sohan semblait avoir désignée comme leur table. « Tu deviens quoi toi sinon ? T'as réussi à te poser ? » tout en jetant un œil à l’ardoise au mur avec les suggestions d’Happy Hour, Nino pouvait répondre à son interlocuteur. « Yep. » il pose à nouveau son regard sur lui. «J’ai enfin un vrai taf. J’bosse à l’asso beauregard, ils pèsent pas mal. Grosse famille qui du fric et qui s’donne bonne conscience en travaillant pour ceux qui ont l’cancer. Mais moi, j’suis juste un agent d’entretien. J’fais les tâches de merde. C’est ça quand on est doué en rien. Ca m’permet au moins d’avoir un toit sur la tête. » pas forcément de payer avec facilité toutes ses autres dépenses mais pour ça, il comptait toujours sur ses paris qui lui rapportaient quand même pas mal de tune pour mettre du beurre dans ses épinards.

Sohan hoche la tête. Effectivement, si Vittorio n'avait aucune idée que son frère se trouvait en Australie, il était plutôt évident qu'il n'avait pas entrepris des recherches pour le retrouver. C'était déjà suffisamment compliqué de trouver quelqu'un quand on a connaissance de la ville dans laquelle il réside, ça doit relever d'un travail de titan que de chercher quelqu'un partout sur la planète. L'important pour Sohan c'était que tout soit rentré quand l'ordre, que les deux frères soient parvenus à se retrouver malgré tout. Pour lui, c'était une belle histoire et il ne regrettait pas d'avoir été à l'encontre de ses principes pour ce qui est des ressources de la police. La fin justifie les moyens comme on dit et si sa recherche n'avait abouti à rien, il aurait probablement été déçu, ayant eu l'impression d'enfreindre la loi sans aucune raison. Il avait bien eu envie à l'époque de contacter Nino pour savoir comment tout s'était passé, mais il n'avait pas voulu s'immiscer, se disant que même s'il l'avait aidé, ça ne le regardait probablement pas.

Il était donc content d'avoir des nouvelles du jeune homme et de ses retrouvailles avec son frère, même trois ans plus tard. Mieux valait tard que jamais comme on dit. C'était l'occasion de se poser calmement et prendre le temps de discuter autour d'un verra. Chose qu'ils n'avaient jamais vraiment fait à l'époque. Leurs seules entrevues consistant à parler de l'avancer des recherches de Sohan et des informations que Nino pouvait lui donner afin d'écarter certaines pistes qui ne collaient pas du tout. Ils s'étaient donc beaucoup côtoyé durant cette période, mais c'était principalement pour parler business. Ils ne savaient donc pas grand-chose l'un de l'autre finalement. Sohan en sachant peut-être un peu plus sur Nino que l'inverse. Il avait bien été obligé de lui poser des questions personnelles quand il avait commencé ses recherches et en avait donc appris plus sur lui de cette façon. Nino en revanche, ne savait que peu de choses sur Sohan, mis à part le fait qu'il était doué avec les ordinateurs et qu'il était un hacker hors pair. C'était déjà pas mal, pour un inconnu. "C'est vrai ! Peut-être que si tu m'avais vu plus à l'oeuvre t'aurai justement choisi de faire comme si tu ne m'avais pas vu aujourd'hui." Il ne se considérait pas comme quelqu'un de chiant. Il n'était pas le type doté de la plus grande estime de lui-même, mais chiant n'était pas un adjectif qu'il utiliserait pour se définir. Il pouvait cependant comprendre que pour certains, il ne satisfaisait pas les critères de la personne la plus fun qui soit, à commencer par son refus catégorique de toucher une seule goutte d'alcool. Chose qu'il doit encore et toujours expliquer. Ce n'est pas parce qu'il ne suit pas les préceptes de sa religion à la lettre qu'il décide de la renier complètement et même s'il s'est fait sa propre interprétation de l'Islam avec le temps, il y a des choses auxquelles il ne dérogera probablement jamais, dont le fait de ne pas boire d'alcool ou de ne pas manger de porc. "Et je confirme que j'aurai rien vu du tout j'étais bien trop pris par cette horrible chemise. Partagé entre le dégout et la fascination en me demandant qui avait bien pu avoir l'idée de créer un truc pareil." Elle avait fini dans une friperie, signe que même son propriétaire originel n'avait été que partiellement convaincu. "En tout cas j'suis content que tu sois venu me voir, je me suis demandé comment t'allais à plusieurs reprises." Parce qu'il avait été touché par l'histoire que le jeune homme lui avait conté lors de leur première rencontre. Histoire qui lui avait fait mettre de côté tous ses principes. Ce n'était donc pas rien.

Il s'assoit donc en face de Nino, repensant à ses parents et à leur arrivée à Brisbane. "Ils ont bien galèrés au début, principalement à cause de la barrière de la langue, pendant plusieurs années ils ont pas vraiment eu l'occasion de profiter de la vie ici. Mais j'en sais pas énormément là-dessus, ils en parlent pas trop." Il pourrait compter sur les doigts d'une main le nombre de fois où ses parents avaient parlé de leur arrivée et de leurs débuts difficiles à Brisbane. Ils n'étaient pas du genre à se plaindre. Au contraire, ils préféraient admirer leurs réussites plutôt que de penser au passé et aux épreuves qu'ils avaient dûs surmonter pour en arriver. D'ailleurs, en parlant de quitter son pays et de tout recommencer à zéro dans un autre, il est curieux de savoir ce que devient Nino depuis trois ans. Se rappelant de la situation un peu précaire du jeune homme à l'époque. Un sourire se dessine sur son visage quand il apprend que l'italien a réussi à trouver un job fixe, même si ce n'est pas le job dont il avait toujours rêvé. "Je connais cette asso'. Difficile de pas la connaitre quand on a toujours vécu ici. J'suis content que t'ai trouvé un travail en tout cas. C'est toujours mieux que rien. Tu bosses là-bas depuis quand ? Tu penses y rester pour de bon ou tu cherches ailleurs en même temps ?" Parce qu'il ne pouvait pas croire une seule seconde que Nino soit un bon à rien, il y avait forcément un domaine quand lequel il se débrouillait bien mieux que monsieur tout le monde.

"C'est vrai ! Peut-être que si tu m'avais vu plus à l'œuvre t'aurai justement choisi de faire comme si tu ne m'avais pas vu aujourd'hui." L’italien prendrai soin d’en juger après cette entrevue surprise. Et rien ne l’engageait à s’arrêter la prochaine fois s’il devait recroiser Sohan. L’italien ne se forçait à côtoyer personne, il ne le faisait pas par obligation, s’il voulait se débarrasser de quelqu’un, il faisait le mort ou alors lui disait simplement d’aller s’faire voir si celui-ci était un peu trop insistant. Mais il savait déjà que Sohan ne serait pas de ce style, puisqu’il ne l’avait pas revu depuis trois ans et sans doute il aurait eu l’occasion de le contacter s’il l’avait voulu ou s’il était comme une moule accrochée à un rocher qui n’avait rien demandé. L’italien ne se faisait pas de soucis quant à un possible harcèlement de la part de celui qui l’avait aidé à retrouvé son frère. "Et je confirme que j'aurai rien vu du tout j'étais bien trop pris par cette horrible chemise. Partagé entre le dégout et la fascination en me demandant qui avait bien pu avoir l'idée de créer un truc pareil." L’italien sourit, jetant un œil à ce sac dans lequel se trouvait la dit chemise. Ne reviendra pas sur ce qu’il en pense, l’ayant suffisamment exprimé plus tôt, mais le fait est que finalement, moche ou belle, elle était en possession de Sohan à présent. Les yeux rivés sur l’ardoise des suggestions du pub, Nino avait enfin fait son choix. "En tout cas j'suis content que tu sois venu me voir, je me suis demandé comment t'allais à plusieurs reprises." Il posa à nouveau son regard sur Sohan, alors que l’italien se contentait d’hausser les épaules. « On peut dire qu’à l’heure qu’il est, ca va plutôt bien. » du moins, il était pas le plus à plaindre même si des évènements inattendu étaient venus bousculer son quotidien. « J’ai une petite fille, qui est née en janvier. » ça c’était sans doute le plus gros scoop que Nino aurait jamais dit et n’aurait jamais pensé pouvoir annoncer, pas si tôt en tout cas. « Mais ça reste compliqué, si non, ce serait pas drole, hein. » qu’il dit presque fatalement.
Le serveur arriva à leur table et Nino pris la commande. « Pour moi, une blonde belge et pour lui, un chocolat chaud. » que plaisante l’italien. « Nan, j’déconne… » laissant ainsi Sohan prendre sa commande, espérant qu’il ne se soit pas vexé pour si peu. Le serveur une fois avoir noté les boissons sur son calepin, retourne préparer les commandes. « Ouais, du coup, j’ai une petite fille, j’suis pas avec la mère, elle vit chez elle, j’l’ai de temps en temps en mode baby sitter quand ça arrange sa mère, mais j’crois que ça m’arrange aussi comme ça. » bien qu’il prenne de plus en plus à cœur sa place de père, il ne se sentait absolument pas prêt à l’être à temps complet. Mais la question ne se posait pas puisque Katherine avait décidé qu’elle serait plus apte à offrir un environnement sain à sa fille et ça, Nino ne pouvait pas le nier.
L’italien écoutait avec attention l’histoire des parents de Sohan et leurs parcours pour s’insérer dans un pays comme celui-ci. « J’suis arrivé ici sans être vraiment sûr de comprendre tout c’qu’on m’disait ou encore de me faire comprendre, c’était pas évident ! » Sohan devait se souvenir des bourdes que faisait Nino au début, limitant son vocabulaire d’ailleurs. Il communiquait avec des gestes aussi et mélangeait à la fois italien et anglais. « A force, y a pas l’choix que de s’y mettre. » et maintenant, il pouvait quand même se vanter de pas trop mal se débrouiller même s’il lui arrivait de ne pas comprendre certaines expression. Et mine de rien, son manque d’éducation, ses années à ne pas se rendre à l’école et le fait de n’avoir aucun diplôme était aussi une barrière pour lui, mais il avait eu la chance de pouvoir avoir des jobs alimentaires, dont celui qu’il occupait actuellement, qui ne lui demande pas vraiment de réfléchir mais plutôt d’agir. Adepte du système D, Nino savait se débrouiller avec ses deux mains et c’est sans doute pour cette raison qu’il a encore son boulot à l’association Beauregard. "Je connais cette asso'. Difficile de pas la connaitre quand on a toujours vécu ici. J'suis content que t'ai trouvé un travail en tout cas. C'est toujours mieux que rien. Tu bosses là-bas depuis quand ? Tu penses y rester pour de bon ou tu cherches ailleurs en même temps ?" l’italien grimace légérement, il s’était posé la question de partir. « Le soucis c’est que tu vois, la mère de ma fille, c’est la fille du grand bosse. Et que j’suis tombée sur son frère y a pas longtemps, j’ai bien cru qu’il allait m’en mettre une. J’aime bien l’taff, mais du coup, j’ai l’impression qu’ils peuvent me tomber dessus à tout moment. Si j’pouvais trouver un travail ailleurs, ce serait pas mal mais j’ai pas cherché encore. »

Nino va plutôt bien. C'est ce qu'il dit à Sohan et Sohan, lui est content pour lui. Il hoche d'ailleurs la tête avant d'écarquiller les yeux à la deuxième information que lui donne le jeune homme. Il est papa. Pour une nouvelle ! C'est là qu'il réalise qu'il s'en passe des choses en trois ans et que durant ce laps de temps, il est aisé de passer à côté de beaucoup de choses. Notamment une naissance. “C'est vrai ? Félicitations !” lui répond-il, se disant que c'est plutôt de mise pour l'occasion, même si le jeune homme précise que ce n'est pas si simple que ça. “Elle s'appelle comment ?” demande t-il curieux, avant de rebondir sur la remarque de Nino. “C'est la paternité qui est pas si simple que ça ? J'suis sûr que t'es trop dur avec toi-même et qu'en réalité tu t'en sors à merveille.” Parce qu'il ne connaît pas vraiment Nino dans le fond et qu'il ne veut pas demander de but en blanc ce qui est réellement compliqué dans cette histoire. Il préfère donc détourner un peu la chose, même s'il est possible qu'il soit totalement à côté de la plaque.

Il n'a pas le temps d'en dire plus puisque le serveur arrive à hauteur de leur table, prêt à prendre leur commande. Nino commande le premier, une bière avant d'annoncer fièrement que Sohan prendrait un chocolat chaud. Ca le fait plus rire qu'autre chose, surtout qu'il sait que ça n'a rien de méchant venant du jeune homme et qu'en plus de tout ça, il n'est pas du genre à se vexer pour si peu. “Ce sera un coca pour moi.” Rectifie t-il en souriant avant que le serveur ne tourne les talons pour se diriger vers le bar et préparer leurs boissons. Nino lui élabore un peu plus sur la naissance de sa fille, donnant quelques détails supplémentaires à Sohan qui comprend un peu plus ce que le jeune homme voulait dire quand il disait que cela restait compliqué. “L'important c'est que vous ayez trouvé un bon équilibre qui vous convient à tous les deux. C'est un plus, autant pour vous que pour la petite.” Certe, ce n'était pas vraiment ce qu'on lui avait inculqué en grandissant et ce n'était pas l'image de la famille que lui avait dépeint ses parents, mais il s'était détaché de la vision de la société et de la famille que ses parents avaient ancrée dans sa tête dès son enfance. Il trouvait ça plutôt remarquable que Nino ait pu trouver un équilibre avec la mère de sa fille, aussi instable soit il. “Ca fait quoi d'être père alors ? Tu as l'impression que ça t'a changé ?” Il n'avait pas d'enfant, il ne pouvait pas se mettre à sa place et il était assez curieux d'avoir sa vision des choses. Lui qui lui avait semblé être un gamin un peu perdu quand il était venu le trouver il y a trois ans de cela pour qu'il puisse l'aider à retrouver son frère. C'était donc un changement plus que surprenant, dans le bon sens du terme.

Quand le serveur réapparaît avec leurs boissons, Sohan est en train de parler de ses parents à Nino, lui expliquant ce qui les avaient amenés jusqu'à Brisbane et les difficultés auxquelles ils s'étaient retrouvés confrontés à leur arrivée en Australie. Il n'est pas surpris que Nino puisse en comprendre certaines. Après tout, lui aussi s'était retrouvé dans cette situation. Arrivé dans un pays dont la langue ne lui était pas forcément familière. Il se rappelle de quelques quiproquos qui avaient pu avoir lieu entre eux à cause de cette fameuse barrière de la langue et les quelques fois où Nino n'avait pas bien compris ce que Sohan essayait de lui dire et inversement. “C'est super courageux je trouve, je sais pas si j'oserai déménager dans un pays dont je parle pas la langue. Je sais pas. Rien que de quitter son pays ne doit pas être facile, alors si en plus on rajoute la barrière de la langue …” Lui répond-il. Il fallait être courageux ou alors il fallait vraiment avoir envie de partir sans se retourner parce que même si à un moment ou un autre il fallait se jeter dans le bain et qu'avec le temps cette barrière s'efface, ce n'est pas si simple que ça. “T'as pas le choix, mais je pense que c'est aussi une question de caractère. Je pense que d'autres n'auraient pas forcément le courage de se jeter dans le bain et finiraient par se renfermer un peu à cause de ça justement ou à rester dans leur communauté. Je suis sûr qu'on pourrait trouver au moins une bonne poignée de personnes qui sont là depuis des années et ne parlent pas un mot d'anglais.” Explique t-il. Il ne s'était jamais fait de soucis pour Nino de ce côté-là et avait eu l'occasion de capter la détermination du jeune homme dès le début. Ca ne l'étonnait donc pas non plus d'apprendre qu'il avait réussi à se trouver un travail. “Ah oui donc c'est effectivement super compliqué. Il t'apprécie pas trop le frère ? Après, il y a quand même des lois dans ce pays donc ils peuvent pas te tomber dessus comme ça, tant que tu restes réglo tu devrais être tranquille et pouvoir chercher quelque chose d'autre en même temps.” Lui répond-il, marquant une pause avant de reprendre. “Tu chercherais quoi comme job ? Je pourrais en parler autour de moi, peut-être que quelqu'un aurait besoin d'aide pour quelque chose.” Il pourrait bien lui proposer de venir faire le ménage chez lui, mais honnêtement, ça ne lui permettait vraiment pas de survivre.

Il y a encore quelques mois si on avait félicité Nino sur cette naissance, il ne l’aurait pas très bien pris. Prenant les révélations de Katherine comme des coups de poings en pleine figure, il n’avait pas choisi d’être père et encore moins dans ces circonstances. Ce serait peut être mieux passé si la mère était sa petite amie – une fiancée, quelqu’un d’officiel pour lui, mais c’était loin d’être le cas et c’était aussi loin d’être facile à assumer, que ce soit pour elle et aussi pour lui. Mais les mois passaient et Nino s’était fait à son rôle, même s’il ne pouvait pas porter la casquette de père tous les jours – et c’était peut être pas plus mal pour lui – il était de plus en plus fier de pouvoir dire qu’il avait une fille et qu’elle lui ressemblait un peu aussi. « Elle s'appelle comment ? C'est la paternité qui est pas si simple que ça ? J'suis sûr que t'es trop dur avec toi-même et qu'en réalité tu t'en sors à merveille. » Si il savait… Avant de pouvoir répondre, le serveur pris la commande des deux hommes. Laissant ainsi Nino s’expliquer un peu plus sur la situation. « L'important c'est que vous ayez trouvé un bon équilibre qui vous convient à tous les deux. C'est un plus, autant pour vous que pour la petite. » « Elle s’appelle Lucia. Et pour l’instant, ca va, on s’en sort… c’est juste que j’dois prouver par A+B que j’suis vraiment digne de sa confiance. Mais bon, petit à petit… » faut dire que Katherine sait bien que Nino a pas un passé très glorieux, surtout quand on sait que leur première rencontre s’est fait alors que Nino avait une grosse vente prévu et qu’elle a tout fait capoter. « Ca fait quoi d'être père alors ? Tu as l'impression que ça t'a changé ? » par la force des choses l’italien avait fini par atténuer sa capacité à se retrouver dans des situations de merdes, mais bon, c’était pas non plus le jour et la nuit. « Doucement ouais. J’range mon appartement maintenant, j’ai arrêté quelques conneries. On va dire que c’est des conditions de bases pour que j’puisse la voir.»
Nino se rend compte qu’il s’était jamais vraiment intéressé à Sohan et que le peu de fois où ils s’étaient vu il y a trois ans, c’était surtout pour servir son propre intérêt et en même temps, il avait pas pensé qu’il pourrait le recroiser comme ça plus tard. Sohan c’était resté ce gars qui lui avait donné un coup de main à son arrivée et voilà. Mine de rien l’italien était pas mécontent de le recroiser et d’en apprendre davantage sur lui, sur sa famille.
Sohan qui souligne le courage de Nino d’avoir quitté son pays pour un pays où il ne parlait pas la langue mais si on cherche les pays où on parle l’italien dans le monde, ca reste assez limité. Et heureusement qu’il y a Vitto pour pouvoir échanger dans leurs langue maternelle lorsqu’ils s voient, ou encore Gaia mais moins il la voit, mieux il se porte.
Concernant l’association Beauregard, Nino expose une nouvelle fois les difficultés qu’il a pu y rencontrer et même s’il commence à se sentir à sa place dans ce travail, il avait du mal à se dire qu’elle appartenait à la famille de Lucia. « Ah oui donc c'est effectivement super compliqué. Il t'apprécie pas trop le frère ? Après, il y a quand même des lois dans ce pays donc ils peuvent pas te tomber dessus comme ça, tant que tu restes réglo tu devrais être tranquille et pouvoir chercher quelque chose d'autre en même temps. » « Je crois que c’est pas l’amour fou. J’reste le mec qui a touché à sa sœur et lui a fait une gamine. Mais, j’crois qu’il aurait pas tant intérêt à m’foutre à l’écart ou me tomber dessus. » parce qu’il restait le père de sa nièce avant tout. « Tu chercherais quoi comme job ? Je pourrais en parler autour de moi, peut-être que quelqu'un aurait besoin d'aide pour quelque chose. » il hausse les épaules l’italien, qualifié en rien de spécial, il avait quand même appris à toucher à tout sur le terrain. « J’fais des petits travaux ici et là. Avant j’bossais dans une épicerie et encore avant j’étais l’homme à tout faire d’une nana hyper friquée. » quel beau souvenir. « Si non, toi, tu deviens quoi ? »

Faire ses preuves afin de prouver à la mère de sa fille qu'il est digne d'être un père. Une idée qui semble un peu désuète et contrefaite pour Sohan, mais il doit bien se rendre à l'évidence qu'il ne connaît que très peu Nino. A part les quelques informations qu'il avait dûes obtenir du jeune homme dans le but de retrouver son frère trois ans plus tôt, il ne connaissait pas grand-chose de lui. D'ailleurs, il n'avait même aucun moyen de vérifier que tout ce qu'il lui avait raconté jusqu'ici était vrai. La mère du bébé avait donc peut-être des raisons d'être méfiante ou alors, elle avait décidé de lui mener la vie dure. Les deux étaient possibles tout comme un savant mélange l'était aussi et Sohan ne le saurait probablement jamais. Ce qu'il savait en revanche, c'était que l'italien ne manquait pas de motivation. Il avait eu l'occasion de s'en rendre compte quand ce dernier était venu le trouver pour l'aider à retrouver son frère, alors même qu'il lui avait dit qu'il n'était pas détective privé et que son activité se limitait à la résolution des problèmes informatiques. Nino n'avait rien voulu entendre, il n'avait pas lâché l'affaire et Sohan avait finalement fini par céder. Pas de doute qu'il était donc capable de faire preuve d'autant de motivation pour se montrer digne d'élever sa fille s'il en avait réellement la volonté. “J'ai aucun doute quant au fait que t'arriveras à gagner complètement sa confiance à un moment ou un autre.” Lui répond-il comme s'il avait besoin de le rassurer. Nino était majeur et vacciné, il savait probablement ce dont il était capable ou pas, mais Sohan trouvait ça important à dire à voix haute. Même s'il ne le connaissait pas plus que ça et qu'il connaissait encore moins la mère de sa fille. Il ne le connaissait pas, mais il avait foi en lui et il était persuadé qu'il était capable de tout faire pour faire ses preuves s'il en avait l'envie. Sohan ne peut s'empêcher de rire quand Nino mentionne son appartement rangé depuis qu'il est père. C'est un changement comme un autre après tout, mais ce n'était pas ce qu'il avait imaginé comme réponse en posant sa question. “J'imagine que c'est pas si mal, c'est des changements qui sont bénéfiques pour toi aussi, outre le fait que ça te permet de voir ta fille.” Répond-il en haussant les épaules.

Sohan s'intéresse réellement à ce que Nino devient depuis trois ans. Il est content d'entendre qu'il a un travail, même si ça va de paire avec le fait d'avoir à côtoyer le frère de celle qui lui a donné un enfant. Dans un sens, Sohan le comprend, le frère. Il a une soeur lui aussi et il tient à elle comme à la prunelle de ses yeux. Il n'a jamais eu de problème en particulier avec ses petits copains, même avec Edge qui l'a pourtant trompée, il est un peu trop diplomate pour chercher des ennuis ou vouloir user de quelconque techniques d'intimidation. En revanche, si la situation était différente et qu'elle s'était retrouvée à avoir un enfant avec un type lambda avec lequel elle ne partageait aucune relation, il y aurait probablement un peu d'animosité, ou au moins une bonne dose de méfiance de sa part. Cela étant dit, il pouvait parfaitement imaginer que ce ne soit pas simple à vivre pour Nino, qui n'avait sans doute rien demandé à personne dans cette histoire et n'était donc pas à blâmer pour quoi que ce soit. “C'est sûr que vu comme ça, j'ai une petite soeur je peux le comprendre … Après faut qu'il relativise aussi, faut être deux pour faire un enfant.” Ce qui voulait dire que Nino n'était pas le seul responsable et que la jeune femme avait probablement été consentante sur le moment. Il était cependant très facile pour certain de jouer aux frères hyper protecteur qui n'apprécient aucun homme osant s'approcher de leur soeur. Avant de pouvoir accepter ce genre de choses, il fallait avant tout accepter que la petite soeur n'était plus une fillette haute comme trois pommes aussi agaçante que attendrissante, ce qui n'était pas toujours chose facile. Sohan était bien placé pour le savoir, ayant encore du mal à réaliser que sa soeur avait passé la trentaine. “En gros, tu peux à peu près tout faire c'est ça ?” Il avait tout de l'allégorie de la polyvalence en tout cas et Sohan ne manquerait pas de se renseigner dans son entourage pour voir si quelqu'un ne cherchait pas à engager une personne en plus pour un travail quel qu'il soit. Ca ne lui coûtait rien et si ça pouvait aider le jeune homme, ça lui faisait plaisir. “De mon côté, il y a pas grand-chose qui a changé en trois ans. Je travaille toujours pour la police de Brisbane et j'ai toujours mon activité freelance quand j'ai du temps libre. Je compte pas vraiment en changer, c'est un équilibre qui me convient bien comme ça. Contrairement à toi, j'ai pas eu de grand changement dans ma vie depuis la dernière fois.” Il faisait les deux parce que ça lui plaisait. Ce n'était pas une question d'argent. Il pourrait se passer de son activité freelance, mais ça l'amusait plus qu'autre chose.

Ca avait l’air de rien, ranger un appartement, c’était à porté de tout le monde, mais vraiment, pour Nino Marchetti c’était incroyable. Il avait pris cette habitude de se laisser aller, de ne pas entretenir ses appartements et de vivre dans de surprenante conditions qui ne semblaient jamais le déranger, du moins, il ne se posait pas de question. La seule personne qui avait pointé le doigt sur ces conditions était Allie, surement parce qu’elle était la première personne à mettre un pied dans l’un de ses appartements. Et avant qu’elle ne lui fasse remarquer, Nino ne s’était jamais posé de question. Elle avait surtout pointé le fait que si il vivait dans un appartement aussi crade, il était loin d’offrir un environnement sain à sa fille et que la louve, comme la voisine l’appelait, ne le laisserait jamais prendre Lucia chez lui. Pour un bébé, trainer dans un appartement aussi délabré n’était pas bon pour sa santé. Il avait dû apprendre les bases et il avait pu compter sur Allie pour ça, il ne saurait sans doute jamais comment la remercier vraiment. « J'imagine que c'est pas si mal, c'est des changements qui sont bénéfiques pour toi aussi, outre le fait que ça te permet de voir ta fille. » il hocha la tête et pris cette remarque comme un encouragement même si finalement, pour lui, il ne voyait pas forcément d’autres bénéfices mais il pouvait admettre que les changements qui étaient intervenus dans sa vie récemment lui avaient apporté du bon, entre autre, prendre de la distance avec le club et enfin réussir à en sortir – même si il pouvait mettre ça sur le coup d’un excellent timing où il avait pu sauver Mitchell d’une mort éventuelle. Nino n’avait jamais été aussi content de passer par le club que cette fois là, où il avait enfin pu mettre carte sur table et dire les raisons qui l’avaient poussé à s’éloigner du club. Non pas pour les trahir, mais bien pour offrir toute la protection possible à sa fille. Et pour protéger sa fille, il fallait avant tout qu’il se protège lui-même. Ce que devrais sans doute comprendre le frère de Kath, quand on en parle… Ezra l’avait mauvaise quant à Nino et lui devait sans doute se dire que pour protéger Lucia, il fallait peut être supprimer Nino de l’équation. Mais l’italien ne pensait pas autant à l’extrem, même s’il se doutait que le frère de Kath ne le portait pas dans son cœur, il ne lui avait jusqu’à présent pas fait de mal. Il avait laissé sous-entendre qu’il devait bien se comporter s’il ne voulait pas avoir de soucis et si d’habitude Nino est provocateur et aurait sans doute fait exprès de pousser le Beauregard jusqu’à ses limites, il ne prendrait pas de risque dans ces circonstances ci. Nino ne voulait aucun problème avec la famille maternelle de sa fille. Même si légalement, personne ne pouvait vraiment l’empêcher de voir sa fille, il savait bien que les Beauregard avaient le bras long et pourraient lui mettre des bâtons dans les roues, ce n’était pas le but. L’italien prenait beaucoup sur lui et d’ailleurs, il songeait à changer de boulot pour ne plus à les voir chaque jour et ne plus à voir sur ses fiches de paies leurs non de famille. « En gros, tu peux à peu près tout faire c'est ça ? » il hoche la tête. « J’me suis même déguisé en clown une après midi pour faire de la publicité dans un centre commercial… » autrement dit : oui, absolument tout.
L’italien s’intéressa ensuite à Sohan, fini de parler de lui, il n’aimait pas être au devant de la scène et on lui avait toujours appris à en dire le moins possible sur lui. C’était déjà trop tard mais il était temps de changer de cible. « De mon côté, il y a pas grand-chose qui a changé en trois ans. Je travaille toujours pour la police de Brisbane et j'ai toujours mon activité freelance quand j'ai du temps libre. Je compte pas vraiment en changer, c'est un équilibre qui me convient bien comme ça. Contrairement à toi, j'ai pas eu de grand changement dans ma vie depuis la dernière fois. » l’italien se frotta l’arrière du crâne, portant sa bière à ses lèvres. « La routine quoi… » il regarda son interlocuteur dans les yeux tandis que l’alcool coulait dans sa gorge et reposa son verre. « Comment ça t’est venu de vouloir bosser pour les flics ? »

Sohan ne peut s'empêcher de sourire et même de laisser échapper un petit rire quand Nino lui dit qu'il a même accepté de se déguiser en clown une après-midi pour faire de la publicité. Il a du mal a imaginer l'italien affublé d'une perruque orange, d'un nez rouge et de chaussures bien trop grande pour lui, mais il n'avait pas de doute quand au fait que le jeune homme était parfaitement sérieux. Il disait qu'il l'avait fait, Sohan le croyait sur parole. A croire qu'il n'y avait rien qui n'était pas à la portée du jeune homme ou alors, qu'il ne rechignait pas quand il s'agissait d'accepter des emplois pas forcément très glamour. Pour Sohan, ça reflétait une réelle volonté de s'en sortir et de faire quelque chose de sa vie. Dans ces moments-là, Sohan se disait qu'il avait vraiment bien fait de l'aider trois ans plus tôt, parce qu'il le méritait réellement. “En clown carrément ? Et tu oses critiquer ma magnifique chemise à fleurs à la pointe de la mode ?” qu'il lui répond en plaisantant. “Plus sérieusement, si t'es capable de faire à peu près tout, je vois pas trop pourquoi tu aurais du mal à trouver un autre job quand tu en auras marre de l'association Beauregard.” Ajoute t-il en souriant. Il semblait plein de ressources et plein de bonne volonté aussi. C'était en général deux éléments qui permettaient de faire ce qu'on voulait et d'arriver à ses fins.

La conversation se retourne vers lui, sur ce qu'il a fait ses trois dernières années. Il n'a pas énormément de choses à raconter là-dessus. Il n'a pas changé d'emploi depuis la dernière fois, il n'a pas déménagé non plus, ses fréquentations sont restées les mêmes. Il vit une vie plutôt posée qui lui convient parfaitement et il ne cherche pas forcément à sortir des sentiers battus. Il se plaît dans sa routine quotidienne, il n'a pas l'impression de s'ennuyer ou de tourner en rond. C'est probablement ça l'important. La routine n'est pas une mauvaise chose, tant qu'elle ne devient pas pesante et ne donne pas l'impression d'être coincé, enfermé dans un étau impossible à desserrer. “Exactement ! La routine. Mais c'est vraiment pas si terrible que ça, au contraire. Je suis juste pas de ces gens qui ont besoin de changement tous les quatre matins. J'ai trouvé quelque chose qui me plait j'ai pas le besoin de chercher quelque chose d'autre ailleurs.” Explique t-il. Il n'est pas un éternel insatisfait, bien au contraire et sûrement pour ça qu'il s'est si facilement installé dans sa vie une fois sorti de l'université. Il a trouvé son travail, s'est acheté une maison, a pris ses marques petit à petit, étendu un peu sa vie sociale et a continué son chemin sur la même lancée. Il n'a pas cette impression de vide ou une quelconque impression que quelque chose manque à sa vie, le poussant sans cesse à rechercher ce qui pourrait combler ce gouffre. “Honnêtement ? C'était un peu du pur hasard.” Commence t-il à expliquer à Nino. “L'idée m'avait jamais traversé l'esprit et ça avait jamais été un de mes buts dans le vie, c'est juste que l'opportunité s'est présentée. Je sortais à peine de la fac, je savais pas trop où je voulais me diriger exactement, alors j'ai tenté. Dans ma tête, soit ça allait être une expérience temporaire qui me serait bénéfique pour la suite si ça finissait par ne pas coller. Soit ça serait un peu la révélation. Je te laisse deviner ce que ça a été.” Finit il en souriant. Le hasard fait parfois bien les choses puisque cela faisait un peu plus de dix ans qu'il bossait pour la police de Brisbane et il ne comptait pas en partir de si tôt. “T'es retourné en Italie depuis la dernière fois qu'on s'est vu ?” demande t-il en sirotant son soda, curieux de savoir si Nino était resté à Brisbane tout ce temps ou s'il était retourné un peu chez lui.

. “En clown carrément ? Et tu oses critiquer ma magnifique chemise à fleurs à la pointe de la mode ?” Il haussa les épaules avec son air coupable sur le visage, laissant apparaitre un sourire complice. Nino avait traversé une période où il avait du mal à trouver un travail qui lui apportait des revenus fixes ou suffisant pour payer des courses ou un loyer, il avait alors accepter tout job qui lui avaient été proposé et faire le clown en faisait partie. Loin d’être une partie de plaisir ce jour-là, il avait plutôt l’air du clown triste ou effrayant tel Ca, mais il avait fini par empocher le fric à la fin de la journée et n’en avait plus reparlé. Et pour le coup, ca lui avait permis de prendre un peu de recul et de ne plus forcément accepter ce genre de taf là, d’autant plus que ça n’avait pas payé si cher pour tout l’effort qu’il avait fourni à être gentil avec des enfants – on comptera pas les deux, trois qui avaient fini par lui pleurer dans les bras – loin d’être à l’aise avec les mômes, il avait pourtant donné de sa personne pour faire de son mieux. Les résultats n’avaient pas été très probants et puisqu’on ne l’avait pas rappelé, il en avait conclu qu’il n’était pas fait pour le rôle et que tout le monde s’y était accordé. “Plus sérieusement, si t'es capable de faire à peu près tout, je vois pas trop pourquoi tu aurais du mal à trouver un autre job quand tu en auras marre de l'association Beauregard.” Et c’était pas faux, mais l’italien avait pas envie d’aller changer des rouleaux de PQ pour une autre structure, s’il devait changer, ce serait pour un tout autre taf. « On sait c’qu’on perd, on sait pas c’qu’on trouve… » autrement dit ,ca le faisait aussi flipper de savoir sur quoi il pourrait tomber après ça. Et là, il avait un salair fixe, pas trop dégueulasse, qui lui permettait de payer ses factures et de pouvoir accueillir sa fille régulièrement. Et il ne pouvait pas se permettre de partir s’il n’avait rien de sérieux derrière. Katherine ne lui pardonnerait pas.
Concernant Sohan, l’italien avait l’impression de se retrouver en lui lorsqu’il disait que la routine lui convenait. Lui non plus n’avait pas ce besoin de nouveauté constant, le challenge ne l’emballait pas plus que ça. Au contraire, moins on lui en demandait, mieux il se sentait. Mais il avait quand même besoin de se sentir un minimum utile et pas le larbin de service. Finalement, ce qui lui plaisait et qu’il ne voyait que rarement, à l’association Beauregard, c’était aussi que le contact avec des personnes humaines lui plaisait au fond. Et surtout, sans ça, il n’aurait pas rencontré Adèle… Il n’était pas toujours cet homme invisible qui ne faisait que changer des rouleaux de PQ. « J’vois l’genre, j’crois que toi et moi, on doit avoir plus de points communs qu’on l’pense. Même si tu bois du chocolat chaud. » qu’il taquine encore, lâchant un rire amusé mais sans se moquer de lui. Par contre, là où l’Italien n’aura pas de point commun avec Sohan, c’est son attachement à la police, le fait de bosser pour eux, ça, ce serait même impensable pour Nino. “Honnêtement ? C'était un peu du pur hasard. L'idée m'avait jamais traversé l'esprit et ça avait jamais été un de mes buts dans le vie, c'est juste que l'opportunité s'est présentée. Je sortais à peine de la fac, je savais pas trop où je voulais me diriger exactement, alors j'ai tenté. Dans ma tête, soit ça allait être une expérience temporaire qui me serait bénéfique pour la suite si ça finissait par ne pas coller. Soit ça serait un peu la révélation. Je te laisse deviner ce que ça a été.” On dirait bien que ce soit la révélation. « L’experience temporaire qui dure un peu trop longtemps ? » qu’il lâche encore sur un ton léger. « J’plaisante. » qu’il se sent obligé d’ajouter cette fois. « Tant mieux, si ca t’plait… » portant sa bière à ses lèvres, l’italien se reteint de boire sa gorgée alors que Sohan le questionnait sur un éventuel retour en Italie depuis ces trois dernières années… Après une pause, comme s’il avait arrêté le temps, Nino avala l’alcool qu’il avait dans la bouche. « Hm. » il secoua la tête de droite à gauche avant de reposer sa pinte. « J’pense que j’y retournerai jamais. » qu’il avoua. Ces quelques mots lui faisaient toujours un peu de mal et il ne se souvenait pas de la dernière fois qu’il les avait prononcés ou même s’il les avait déjà prononcés un jour. Il n’en avait en réalité jamais parlé à personne. « J’suis pas l’bienvenue là-bas. » il laissa alors un suspens planer et se demandant si maintenant il n’en avait pas trop dit. L’italien vira rouge pour devenir pâle ensuite. Sentant qu’il n’était pas à l’aise avec ce sujet de conversation là.