La salle avait été si facile à trouver, le challenge était plutôt de s’assurer que je ne fonce dans personne sur le trottoir, que je ne me renverse pas moi-même au sol. Que je ne perde pas le pied entre la dernière rue à tourner et la porte du speakeasy à pousser de l’épaule. Que je ne m’égare pas dans la petite foule agglomérée autour de la presque scène aménagée à même le sol, le truc hyper intime en acoustique, les deux micros déjà allumés et leurs silhouettes que je repère à la seconde où Isy me dit un truc, mais que je suis scotchée sur le sourire de Julia qui vient de filer au bar.  

« Okay, je m’excuse d’avance. » ma main dans la sienne se resserre un peu plus, pas assez pour que la pression soit dérangeante, quoique. « Genre, sincèrement. » mes iris suivent le chapeau d’Angus qui valse entre les paumes du musicien, il éclate de rire à ce que vient de lui dire les dudes à sa gauche apparemment. Le show impromptu n’est même pas commencé que déjà mon coeur manque un battement, que ma respiration peine à avoir du sens.  

Et mes doigts se referment encore, ils s’enlacent trop fort à ceux d’Isaac, je suis sûre qu’il sent mes ongles là, dans sa chair. « Du plus profond de mon coeur. » je suis sûre que je lui fais mal et ma mine est dépitée, mes yeux sont désolés. Mais mon visage s’illumine, par contre. Dès que les premières notes de guitare prennent, dès que le pub entier se tait pour se rapprocher de l’espace de fortune où ils ont posté le duo ce soir, où la voix de l’une murmure les notes de l’un, y’a un soupir qui part, un sourire aussi. Et mon attention que je tourne vers eux, et mon excitation qui est palpable, pauvre petite gamine épatée, admirative devant son groupe préféré depuis des années.

On s'y trouvait enfin, à l'orée d'un des bonheurs de Ginny. Ce speakeasy qui abritait les célèbres et talentueux Stones, ceux qui faisaient vibrer incessamment l'âme et le cœur de celle qui animait, enveloppait sans mesure les miens. Je lui souffle quelques mots pour attirer son attention sur la beauté du lieu, cette authenticité transcendante des deux musiciens qui offrent ces instants intimes de passion et d'échange. L'atmosphère m'étreint et j'ai le sentiment de vivre une expérience unique, une sensation sans doute partagée par la McGrath qui m'en fait part munie de bienséance : « Okay, je m’excuse d’avance. » Sa main n'a pas quitté la mienne depuis que la foule s'est intensifiée autour de nous et happée par l'ambiance, son étreinte se resserre à m'en couper la circulation sanguine, à créer des demi-lunes forgées par ses ongles au creux de mes paumes. « Genre, sincèrement. » Ses pupilles se précipitent d'un élément à un autre, je devine qu'elle s'en met plein la vue, qu'elle remplit ses précieuses boîtes à souvenirs, qu'elle mémorise ces moments magiques pour la fan qu'elle compose. « Du plus profond de mon cœur. »

Je constate sa mine désolée pour y répondre par un discret et vif baiser sur sa joue, stratagème permettant notamment d'assurer brièvement au creux de son oreille que seul du positif est permis de s'extirper de cette situation. « Profite. » Davantage de mots seraient superflus tandis que les premières notes de Private Lawns commencent et que le regard de Ginny se rive sur un de ses - si ce n'est son - couple de musiciens favoris. J'admire l'extériorisation de son bonheur quelques instants avant de me concentrer également sur la scène, comblé d'assister à cette sortie avec la McGrath et d'être témoin de sa joie particulière, priant pour que cette félicité qu'elle mérite largement se reproduise à d'innombrables reprises au sein d'une abondance de circonstances.

C’est la trame sonore à l’atelier d’aussi loin que je me souvienne. Ce sont leurs guitares et leurs paroles qui jouent en boucle, qui créent l’ambiance, qui calment aussi, le confort à la clé. Ce sont mes référents, ceux qui commencent ma journée, qui la terminent doucement. J’ignorais combien de fois j’avais pu venir les voir en show, j’avais arrêté de compter à force, parce que ça ne servait à rien de le faire si je prenais pour acquis qu’à n’importe quel moment où ils jouaient dans le coin, j’étais là, présente.

Isy qui partage ce petit éclat de mon quotidien en s’en amusant doucement, ses sourires attendris qui rebondissent sur mes exclamations enfantines. J’ai les yeux qui brillent et il le souligne, sa voix à mon oreille et son souffle sur ma nuque qui chatouille, mes doigts qui jouent avec les siens. « Profite. » mon visage se tourne vers lui, j’hausse ma main libre avec un sérieux trop forcé pour l’être, un « Promis. » qui se veut obéissant, avant qu’un énième éclat de rire se perde au fil des notes qui s’entament.

J’ignore combien de temps s’écoule entre la première chanson et les autres qui suivent, les mots que je chantonne en chuchotant, pas particulièrement intéressée à masquer leurs voix de la mienne. Ma tête qui dodeline sur la musique, l’acoustique qui remplit la petite salle feutrée quand ils s’arrêtent entre un morceau et un autre pour discuter avec la foule. Un groupe un peu plus proche d’eux a l’air de les connaître d’avant, je ne serais jamais assez intrusive pour m’y incruster même si je dois être de ceux qui maîtrisent leur historique à la perfection aussi.

Yellow Brick Road se termine, ils enchaînent de suite Nothing Else et j’ai un frisson qui parcourt mon échine au fil de la rythmique espacée. « Celle-là me fait toujours penser à toi. » que je confie à Isy, dans un murmure, mes iris qui trouvent les siens, qui retournent vers la scène improvisée par la suite, espérant qu’il ne remarque pas mes joues qui ont fini par rosir suite à mon enfantine confession.

You're not like the others ones
You just wanna go slow, sit still and come undone
In the meantime, you wanna have some fun
Oh, you say you have to fall apart to really be someone
There's nothing else to do here but kiss under the stars
I like you just the way you are
There's nothing else to do here but fall into your arms
I like you just the way you are

Ses doigts entremêlés naturellement, tendrement, aux miens, elle promet, prémices d'un éclat de rire cristallin qui me réchauffe le cœur, savourer chaque instant de ce speakeasy prodigué par ses artistes préférés. J'en savais peu de l'univers de la musique, je gonflais les rangs du public distant et rengaine : celui qui achète encore les cassettes pour son bolide datant du siècle dernier, enclenche des playlists sur Spotify que ce dernier a mixé selon les dernières écoutes. Je connaissais rarement les têtes des musiciens, si bien qu'il n'était pas exclus que j'en eus soigné certains d'entre eux, desquels les paroles de leurs œuvres demeuraient mémorisées dans mon esprit, sans même avoir pu les reconnaître.

Mais Ginny, elle aime de toute son âme Angus et Julia. Ils l'accompagnent dans son quotidien, valeurs sûres tantôt tremplins, tantôt consolateurs. Je contemple toute cette fascination reconnaissante faire pétiller de mille feux les prunelles noisette de celle à qui le tambour de mon palpitant est dédié. Elle chantonne, sa tête dodeline ; elle s'extirpe de la bulle musicale lorsqu'un morceau s'achève pour mieux en laisser découvrir un autre. « Celle-là me fait toujours penser à toi. »  Nothing Else débute, fierté et honneur étirent mes lippes. Le rose teint délicatement les joues de la McGrath, et en écho à un I like you just the way you are, j'attire doucement Ginny vers moi dans une étreinte et lui susurre à l'oreille : « And I love you just the way you are » Je dépose subtilement un baiser sur sa tempe.
La playlist suit son court, alors que Paper Aeroplane est entamé, j'annonce à Ginny : « Je reviens. » Le petit shop est aperçu, je m'y oriente de manière à nous ravitailler en sucreries pour la jeune mère et en boissons pour nous deux. Je range mon butin dans la poche de mon hoodie et reviens aux côtés de l'artiste avec ma bière dans ma main droite. Je lui tends une barre chocolatée, n'osant pas interrompre son bonheur d'écouter les Stone par davantage de paroles.

Le duo fraternel annonce une pause, une fois l'attention de ma compagnie captée, je prononce, malicieux : « Regarde ce que j'ai trouvé » Je laisse durer le suspens une poignée de secondes, avant d'exhiber une cassette du groupe. J'en avais cherché, et aussi étrangement cela avait pu paraître vu la nationalité du groupe, je n'étais jamais parvenu à mettre la main sur une cassette - tous les supports que je croisais relevant du CD. « Elle sera un bon argument pour bien aimer les futurs road trips dans ma voiture, non ? » Je taquine, envisageant davantage les virées en quête de crèmes glacées que de réels road trips avec la vingtenaire, bien que je n'étais absolument pas fermé à cette optique.

Et tout est parfait, juste parfait. J'ai pas l'habitude que ce soit si simple, et même si les derniers mois avec Isy dans les parages n'ont fait que me confirmer que l'ère compliquée de ma vie avait enfin fini d'être tout ce à quoi j'aspirais, je m'en étonne encore. Je m'étonne au fil des notes de guitare et des voix qui remontent, je m'en étonne quand je sens son bras s'enrouler autour de ma taille, ses lèvres se poser avec amour sur ma tempe. « And I love you just the way you are » j'avais oublié comment faire, comment jouer ce rôle-là depuis Ezra. J'avais oublié ce que c'était qu'être amoureuse, j'avais oublié l'effet qu'un seul regard, même pas additionné de paroles, pouvait avoir sur moi s'il venait de la personne que j'aimais du plus profond de mon coeur. J'avais oublié tout ça, et je le réapprenais, réapprivoisais. « Je reviens. » j'hoche doucement de la tête pour lui montrer que j'ai bien entendu, le laisse s'engouffrer dans la foule quand mes prunelles quittent sa silhouette de longues secondes plus tard pour revenir se planter sur les musiciens devant nous.

Amongst the crowd a heart will break and a heart will mend
He walks on home tired from work
The letter falls from his hand
He reaches out only to catch the sky
It's gone with the wind

Quand Isy revient se faufiler à mes côtés, je laisse échapper un léger rire de voir le chocolat qu'il m'a instinctivement ramené - ma sorte préférée - ouvrant l'emballage dans l'instant sans même y réfléchir. « Regarde ce que j'ai trouvé » j'ai probablement les joues tâchées de cacao pour une sombre raison doublée de maladresse certaine, mais toute mon attention se rive sur la cassette d'Angus & Julia qu'il me montre avec fierté, sa découverte du jour. Facile, c'était tellement facile avec Isy. Tout dans ses gestes qui me rassure, tout dans ses paroles qui me calme, tout dans sa présence dont je ne me lasse jamais. « Elle sera un bon argument pour bien aimer les futurs road trips dans ma voiture, non ? » il s'amuse Isy, il se moque de sa bagnole le sourire aux lèvres, il est beau, tellement beau, et je suis déjà sur la pointe des pieds lorsque je réalise que mes lèvres se sont posées sur les siennes comme futile réponse.

J'inspire une dose de courage supplémentaire à travers un baiser aussi doux que possible, quand j'en viens à finalement me détacher du Jensen pour lui demander inopinément ce que je n'aurais jamais cru demander à qui que ce soit de ma vie. « Je vais à Londres voir mes parents le mois prochain. Veux-tu venir avec moi?  » tant d'éléments qui font mal au coeur dans cette phrase, tant d'espoirs aussi. Si je m'étais promis de ne jamais remettre le pied en Angleterre à la seconde où j'ai finalement quitté le pays, si je m'étais juré de ne jamais reparler à mes parents après avoir découvert tout ce qu'ils avaient manigancé dans mon dos, n'en reste qu'aujourd'hui, qu'il y a à peine une poignée d'heures, j'ai pris la décision d'y retourner à nouveau, de tenter de les raisonner, de voir s'ils peuvent, s'ils veulent, s'ils méritent de revenir dans ma vie, dans celle de Noah aussi.

« Je dis "parents" mais en vrai tu ne les verras probablement même pas. » Isy connaît l'histoire sur le bout de ses doigts pour avoir assisté aux premières loges des révélations, je m'assure donc de lui confirmer qu'il ne se retrouvera pas par ma faute pris au piège dans d'énièmes drames familiaux. Je les verrai toute seule, je le rejoindrai ensuite n'importe où sauf au domicile McGrath. « C'est juste que... » je me mords, distraite, la lèvre. Ça aussi, je ne m'aurais jamais cru capable de le dire, encore moins de l'entendre. « ... que je sais que ça ne sera pas facile de retourner là-bas. Et que si tu es dans le coin, peut-être que j'arriverai à me faire de meilleurs souvenirs de Londres que ceux que j'ai en ce moment. » j'hausse l'épaule, dédramatise un peu. Ma gorge encore sèche de la demande, mon coeur encore emmêlé de la pression tout sauf nécessaire que je lui mets sur les épaules. « Mais si tu peux pas à cause du boulot ou juste que tu n'en as pas envie, t'inquiètes pas du tout. J'arriverai à gérer. » tout dépend quel masque j'aborerai lorsque je passerai les gates de Heathrow.

C'est dans ces moments majestueux dans leur simplicité et spontanéité que Ginny éclaircit, valorise, surélève de volonté mon avenir. Son bonheur irradie jusqu'en moi, gonflant mes états d'âme d'une fierté inavouable ambitionnant d'envisager que j'en détiens une minuscule part de responsabilité. En ces instants précis, frisant la magie dans leur inattendu, j'ai espoir dans le futur, mon futur, et suis heureux d'être encore là. Sans s'en douter, sans faire exprès, elle est celle qui me sauve.

Amongst the crowd a heart will break and a heart will mend
He walks on home tired from work
The letter falls from his hand
He reaches out only to catch the sky
It's gone with the wind

Elle acquiesce quand je lui souffle que je m'absente quelques minutes, rit sincèrement dès que je lui tends une barre de chocolat que je soupçonne être sa favorite. Puis, malicieux, j'expose mon dernier achat : une vidéo cassette d'Angus & Julia qui pourra très bien retentir dans l'habitacle de mon vieux tacot si nous décidons de partir en road trip. Elle se hisse sur la pointe de ses pieds, pose tendrement ses lèvres contre les miennes en un baiser aussi amoureux que délicat ; notre marque de fabrique, je songe.

Je porte mon attention sur la scène improvisée le temps de quelques minutes, ma main effleurant affectueusement son dos, les instants nécessaires à la McGrath pour me faire une demande. « Je vais à Londres voir mes parents le mois prochain. Veux-tu venir avec moi? » Je fronce doucement les sourcils, aucunement dans l'opposition mais bien épris d'interrogatif. Je connais une bonne partie de l'épais dossier relatif à la relation entre les parents et leur progéniture et même si une partie en moi assimile le fait que Ginny souhaite renouer avec son sang et la soutiendrai si tel est son vœu, ces derniers possèdent tout de même à leur actif des actes inimaginables - frisant le tyrannisme à mes yeux. « Je dis "parents" mais en vrai tu ne les verras probablement même pas. » Elle précise, je lui souris avec empathie, glisse mes doigts de nouveau entre les siens, non pour la remercier de cette liberté présentée mais bien pour lui assurer que je suis présent où elle veut, quand elle veut, parents ou pas. Je ne redoutais pas les McGrath seniors et j'étais prêt à défendre l'artiste envers et contre tous. « C'est juste que... que je sais que ça ne sera pas facile de retourner là-bas. Et que si tu es dans le coin, peut-être que j'arriverai à me faire de meilleurs souvenirs de Londres que ceux que j'ai en ce moment. » Sa lèvre est légèrement pâle sur la zone où elle s'est mordue, le sang traînant à s'y rapatrier maintenant la pression disparue. Elle hausse une épaule, conclut : « Mais si tu peux pas à cause du boulot ou juste que tu n'en as pas envie, t'inquiètes pas du tout. J'arriverai à gérer. » Elle me semble avoir terminé, j'en profite pour certifier : « Je serai là. » Pas de conditionnel ici, je promets, catégorique, accepte l'invitation et ne reviendrais sur mes pas que si elle l'ôtait elle-même. « Je serai là autant que tu veux, où tu veux, avec qui tu veux. » Je sais pertinemment détenir le compte de jours off suffisant pour pouvoir me rendre avec Ginny à Londres, et même s'il venait à m'en manquer en cas de force majeure, je n'aurais aucun scrupule à faire une demande de congé sans solde. Quant à Joy, Oakley vivant chez moi, je me disais qu'elle pouvait très bien pallier si Hannah ne tenait plus la maisonnée à flot et que mes parents n'étaient plus en mesure de prêter main forte. « T'as qu'à me donner la date de départ, et je serai là. » Je confirme une nouvelle fois, dessinant les plans de et résolvant d'emblée les éléments à gérer quand je serai absent de Brisbane. Puis, attentionné à ce que ma bien-aimée n'ait pas à subir une porte qui se ferme contre son nez, je questionne : « Leur en as-tu parlé ? » :

Sa main me confirme bien avant ses mots. Il me laisse parler Isy, il ne presse pas. La seule chose qui presse, c’est sa paume contre la mienne et c’est tout ce dont j’ai besoin. J’extrapole, j’en rajoute, je parle trop, il sait que je suis nerveuse. J’ai imposé ma vie à son quotidien bien avant que je ne me l’autorise, je suis arrivée à toute vitesse avec un gamin malade, avec des histoires de famille tout sauf réglées. Il a été patient et il a tout écouté, bien avant qu’il m’embrasse, bien avant que je l’aime autant. Et aujourd’hui il ne fait que le confirmer un peu plus.  « Je serai là. »  

Ma respiration qui de suite s’adapte à la sienne. Il accepte, et le soulagement qui glisse de ma mâchoire à mes épaules en terminant sa course le long de mon dos qu’il caresse avec toute la douceur du monde suffit, amplement. « Je serai là autant que tu veux, où tu veux, avec qui tu veux. » il ne le sait pas, il l’ignore sûrement, mais le simple fait de savoir qu’il sera présent change tout. La seule et unique confirmation que peu importe les drames, peu importe les embûches, peu importe les complications Isy sera à mes côtés me rend un peu plus solide, beaucoup plus confiante. Je déteste avoir dû lui demander, autant que j’aime de toutes mes forces la réponse qu’il a été si naturellement en mesure de me donner. « T'as qu'à me donner la date de départ, et je serai là. »  j’hoche de la tête, les derniers détails encore volatiles, jurerais que ma poitrine a laissé s’envoler l’étau qui la gardait en otage depuis des heures sans que je ne le sache.

« Leur en as-tu parlé ? » « Oui. » je ravale, retrouve les faits, en dresse la liste mentale avant de lui donner tous les détails desquels il aura besoin pour pallier à la suite. « J’ai téléphoné à - » la maison sonnant faux, ne m’y étant jamais sentie complètement chez moi. « Je leur ai téléphoné tout à l’heure. » lorsque le décalage me semblait poli. « Ils n’avaient pas l’air particulièrement ouverts, mais pas non plus fermés. » l’éternel cercle avec eux, mes parents encore et toujours incapables de démontrer une émotion plus forte ou plus présente qu’une autre. « Ils m’ont dit qu’ils devraient avoir du temps pour moi si je leur donne une journée d’avance pour se préparer. » rien de bien étonnant ici, autant occupés, autant détachés pouvaient-ils être.

« Tu gagnes une carte d’échange contre n’importe quoi, même une séance complète et élaborée de vaisselle après que j’ai essayé de cuisiner des caramels. » le désastre, encore et toujours, du sucre collé par mes soins. Encore sous le choc qu’il ait accepté aussi simplement, secouée à chaque fois par la facilité avec laquelle ma vie allait, ma vie était, depuis qu’Isy y occupait un rôle aussi important, un rôle calé sur mesure pour lui.

L'évidence de l'accompagner en toutes circonstances, le naturel de l'aimer sous toutes les conditions que son histoire impose ; celles-ci ne constituant véritablement que des facettes à mes sens, des couleurs supplémentaires à la palette existentielle que sa présence m'offre salutairement. Mes priorités lui sont dédiées, dévouées ; tacite reconduction que mes sentiments lui ont érigée. Mon cœur bat la chamade pour cette femme que je sais suivrais bon gré dans toutes ses aventures comme mésaventures, tant qu'elle m'y autorise, qu'elle m'y convie. Il ne peut en être autrement, quand sa chaleur rend inévitablement supportable le pire de mes enfers.

« Leur en as-tu parlé ? » J'interroge, attentif, prêt à résoudre les banalités d'agenda pour confirmer mon départ à l'autre bout du monde avec la McGrath. « Oui. » Elle indique, réfléchie, raisonnée. « J’ai téléphoné à - » L'hésitation qui heurte, mon pouce qui caresse, réconfortant, armé de douceur, le dos de sa main. « Je leur ai téléphoné tout à l’heure. » Je lui souris, encourageant, complice. « Ils n’avaient pas l’air particulièrement ouverts, mais pas non plus fermés. » Je hoche la tête, n'émets aucun jugement sur deux adultes que je ne connais que de réputation. « Ils m’ont dit qu’ils devraient avoir du temps pour moi si je leur donne une journée d’avance pour se préparer. » « Le délai est pratique. » Je commente. Vingt-quatre heures compte tenu de milliers de kilomètres à franchir pour toquer à la maison me semblent raisonnables, frisent même le généreux s'ils tiennent leur engagement à être tous deux à leur maison quand leur fille envisagera de les confronter, remettre des pendules à l'heure, panser quelques blessures et tracer une lignée vers un futur plus soudé et sain.

« Tu gagnes une carte d’échange contre n’importe quoi, même une séance complète et élaborée de vaisselle après que j’ai essayé de cuisiner des caramels. » Je ris doucement, commente en glissant un baiser au-dessus de son oreille : « Tes caramels étaient bons. » Ceux qui n'étaient pas calcinés, mais la précision est dérisoire, n'est-ce pas ? « J'ai dû forcer Azrael dans la cour pour qu'il ne dévore pas toute trace de ta cuisine. » Je confie, le chat rouquin désormais - et enfin - baptisé ayant développé promptement - et sans surprise - une dent très sucrée. Je lui passe les vengeances de l'animal qui ont suivies. « Je veux rien en échange, » je lui communique, tendre sourire aux lèvres, yeux amoureux. « Je veux juste être avec toi et je suis heureux de pouvoir t'accompagner là-bas. »