Les mains sur un dossier ouvert devant elle, Hannah avait le regard dans le vide, ressassant les dernières séances qu’elle avait eu avec le patient dont il était question dans ces pages. Un garçon d’une vingtaine d’année, atteint d’une leucémie plutôt fulgurante. Ses pronostics vitaux n’avaient jamais été très encourageants, mais il avait reçu les meilleurs soins possibles. La brune était arrivée tardivement sur son cas, car la famille n’avait jamais désiré avoir recours à un suivi psychologique, prétendant que cela était inutile et qu’ils s’en sortaient très bien. Puisque son intervention n’avait pas été demandée, la jeune femme était restée en retrait tout en suivant son évolution de loin, l’observant parfois s’attarder sur des séances de groupe auxquelles il avait l’air d’avoir envie de participer. Elle avait finalement eu l’opportunité de discuter avec lui, découvrant une détresse émotionnelle écrasée par ses parents qui parlaient à sa place la plupart du temps. Elle avait discrètement poussé Noa à suggérer une nouvelle fois la thérapie, lui expliquant l'entrevue qu'elle avait eu avec le garçon. Après plusieurs tentatives, les parents avaient fini par céder et Hannah avait pu commencer à le prendre en charge. Au vu de la situation, elle aurait aimé pouvoir travailler sur des sessions de groupe mais s'ils avaient autorisé leur fils à se faire suivre par la jeune femme, ils se montraient toujours aussi réfractaires à son travail. La brune avait beau ne pas comprendre pourquoi ils se braquaient de la sorte, elle s'efforçait de ne pas les juger et de concentrer son attention sur le jeune Thomas. Sa souffrance était palpable, et le médecin comprit très vite qu'elle ne pourrait pas l'aider en si peu de temps, surtout quand elle avait l'impression que les progrès effectués à chaque session étaient sapés la fois suivante, comme si l'influence de ses parents l'empêchait de progresser. Eux aussi étaient dévastés, et leur attitude avait beau ne pas être la plus indiquée, il s'agissait là de la seule façon qu'ils avaient de réagir à ce drame: tout prendre sous contrôle. Pinçant les lèvres, la brunette tourna la page suivante du dossier, y cherchant des signes avant-coureurs de la catastrophe qui avait suivit. En toute objectivité, elle avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour venir en aide à Thomas, mais sans doute aurait elle pu faire mieux, ou plus, si elle avait eu l'opportunité de travailler avec lui dès son arrivée à l'association. A présent, il était trop tard. Le jeune homme était décédé quarante-huit heures plus tôt et ses parents avaient apparemment retrouvés des lettres où il exprimait son mal-être durant les dernières semaines qui avaient précédées sa mort. Comme tout un chacun, cette famille avait cherché quelqu'un à blâmer pour se sortir de la torpeur que cette nouvelle leur avait infligée, et c'est tout naturellement vers eux qu'ils s'étaient tourné; l'association. Un rendez-vous avait été fixé et Noa avait rassuré Hannah en disant qu'elle avait tout sous contrôle, en dépit du désir du médecin de l'accompagner pour faire face au couple anéanti de douleur. Mais si Noa était son amie, elle était avant tout sa supérieure hiérarchique et par conséquent, si elle estimait pouvoir et devoir gérer seule, Hannah n'allait certainement pas la contredire. Refermant le dossier dans un soupir, elle jeta un oeil à l'horloge qui ornait le mur face à elle et qui lui indiquait que son amie devait être avec eux depuis environs une dizaine de minutes. Tapotant son bic sur son bureau avec nervosité, elle décida qu'il lui serait impossible de travailler tant qu'elle ne saurait pas comment cette rencontre s'était passée. Elle décida donc de quitter la pièce pour aller se servir un café, consciente que ça n'était probablement pas le choix le plus indiqué pour retrouver son calme. Ouvrant la porte, elle sursauta en tombant nez à nez avec Noa qui s'apprêtait apparemment à faire son entrée en même temps. "Qu'est ce q..." Elle s'interrompit en l'observant plus attentivement, constatant que son visage avait blêmit et qu'elle n'avait pas l'air en forme. "Noa, ça va? Ils sont déjà partis?" Demanda-t-elle en tournant la tête en direction du bureau de son amie qui était juste à côté du sien, cherchant à comprendre ce qu'il se passait.
Je n’arrêtais pas de m’autoconvaincre : tout allait bien se passer. Et si Hannah m’avait proposé à plusieurs reprises de m’accompagner pour cet entretien, je lui avais laisser entendre que j’allais m’en sortir, que ça n’allait pas être si terrible et que la famille de Thomas avait simplement besoin de vider son sac et d’être écoutée. Ils venaient de perdre leur fils dont l’état de santé s’était dégradé à une vitesse folle et en quelques semaines, son pronostic vital avait chuté violement. Il était décédé il y a moins de 48 heures et cette annonce avait été brutale pour tout le monde, tant ils avaient manqué de temps pour s’y préparer. Si l’annonce d’un cancer est toujours difficile à entendre, les familles en général ont toujours un petit espoir en eux que leur proche s’en sorte. C’est là que le travail d’Hannah est nécessaire, à la fois pour les patients et pour les familles. Accueillir la nouvelle, le vivre avec, anticiper les mauvaises nouvelles, travailler le deuil. C’était peut être violent aussi, mais Hannah faisait si bien son travail qu’elle permettait de limiter les dégâts et de trouver en chacun la force de s’en sortir, la force de combattre la maladie seul ou avec du soutien. Cette aide que la famille avait toujours repousser d’un revers de main, j’avais tenté à plusieurs reprises de leurs proposer, pensant qu’avec mon statut de directrice, ils ne finiraient pas nous écouter mais quand Thomas, ou plutôt sa famille, donnèrent le feu vert, il était sans doute déjà trop tard. La détresse du jeune homme et son état psychologique fragilisé l’avaient entrainé dans les limbes des enfers, comme emprisonné, il n’avait pas réussi à s’en sortir, et la maladie l’avait emportée. Les lettres, je les avais toutes eu sous les yeux. La famille de Thomas m’avait forcé à les lire devant eux, à lire cette souffrance et les mots difficiles qu’il employait. « Si la maladie ne l’avait pas emporté, il aurait fini par se pendre, ou se jeter par la fenêtre. Vous n’avez pas fait votre travail ! » quelle accusation. Et en lisant ces mots, j’avais la sensation qu’ils avaient raison : nous avions manqué à notre rôle, nous étions passés à côté de lui, nous étions responsables. Alors qu’ils avaient eu même freiner toutes les démarches d’un accompagnement psychologique. Inutile – foutaises – il n’y a que la science qui pourra le sauver – mettant de côté tout l’aspect psychologique de la maladie. – notre fils n’est pas fou. Autant d’expression qu’ils avaient eu même prononcer de vive voix dans ce même bureau, ces mêmes locaux il y a encore quelques semaines, mais j’étais incapable de m’en défendre, incapable d’être rationnelle et professionnelle. Je manquais justement, à ce moment-là, à mon rôle et mes missions. Je les laissais repartir, avec la menace de porter plainte contre l’association pour n’avoir su sauver leur fils. Je sortais à mon tour du bureau, décomposée, tombant nez à nez avec Hannah qui sortait de son bureau. "Qu'est ce q..." nos regards se croisèrent et moi, j’avais cette sensation d’être complétement shootée, comme si je m’étais plongé dans un second état pour me protéger de l’explosion. "Noa, ça va? Ils sont déjà partis?" je hochais la tête. « à l’instant. » je fis signe à Hannah de me suivre jusqu’à la machine à café, car même si je n’en buvais jamais, en cas extrême, il fallait une dose de caféine. « Ils m’ont fait lire les lettres qu’ils ont trouvés. » je tapote sur la machine, insérant mes pièces dedans. « j’ai pas été foutu de leur dire qu’ils avaient leurs part de responsabilité. J’ai tout pris dans la tronche sans être capable de répondre quoi que ce soit. » et je regrettais de ne pas avoir impliquer plus Hannah pour les recevoir. J’avais finalement agit comme eux : le déni, pensant que je pourrais m’en sortir sans elle, que je n’avais pas besoin de son assistance. « J’aurai du saisir la main que tu m’as tendu ! »
Hannah avait eu bien du mal à attendre tranquillement dans son bureau que cette entrevue se déroule juste à côté et ce sans qu’elle ne puisse y participer. Peut-être que si elle avait insisté, Noa lui aurait finalement accordé le droit de venir, mais elle ne l’avait pas fait. Elle respectait suffisamment son amie pour laisser en place les barrières dressées entre leur carrière professionnelle respective et leur amitié. C’était Noa la directrice qui lui avait suggéré de ne pas se montrer, et c’était bien pour ça que la brune avait obtempéré même si elle aurait largement préféré se trouver dans cette pièce avec eux. Il n’était jamais facile de perdre un patient et même si le garçon n’avait pas mis fin à ses jours, le fait que les parents sous-entendent que ça aurait tout aussi bien pu être le cas l’irritait beaucoup. C’était bien eux qui avaient refusé jusqu’il y a peu qu’elle reçoive le jeune Thomas en séance et encore, Noa avait dû interférer pour que ça arrive. Et maintenant qu’il était trop tard, ils cherchaient à jeter la pierre à quelqu’un. C’était facile de blâmer ceux qui avaient entourés le garçon avant sa mort et Hannah aurait souhaité pouvoir leur ouvrir les yeux sur la situation, peut-être les aider à l’accepter. Mais elle était restée là, impuissante, à écouter des éclats de voix ici et là. Ce rendez-vous n’avait pas l’air de se passer sous les meilleurs auspices, mais la brunette avait conservé sa position assise, la tête dans le dossier de Thomas afin de voir si quelque chose pourrait aider Noa pour cette histoire. Après de longues minutes, le médecin s’était dirigé vers la porte afin de s’offrir un café bien mérité, et c’est là qu’elle tomba nez à nez avec son amie. Cette dernière avait le visage décomposé et Hannah l’observa avec inquiétude, lui demandant si elle allait bien avant de jeter un œil curieux en direction de son bureau afin de voir si les parents de son défunt patient étaient toujours sur place. « A l’instant. » Lui répondit-elle, amenant une moue déçue sur le visage de la brune qui aurait aimé les voir avant qu’ils ne partent. Noa lui fit signe de la suivre en direction de la machine à café, signe qu’elles avaient eu la même idée même si ce fait inquiéta encore plus Hannah ; son amie ne buvait jamais de café. Attentive, elle laissa la brune se servir tout en l’écoutant lui expliquer brièvement ce qu’il s’était passé là-dedans. « Ils m’ont fait lire les lettres qu’ils ont trouvés. J’ai pas été foutu de leur dire qu’ils avaient leurs part de responsabilité. J’ai tout pris dans la tronche sans être capable de répondre quoi que ce soit. » Hannah retint un soupir de frustration, désolée pour Noa qu’elle n’ait pas su faire face à tout ça. Gérer l’agressivité d’autrui n’était pas une chose évidente, encore plus quand celle-ci était menée sur base d’un chagrin aussi terrible que celui de parents pleurant la mort de leur fils. Ça n’était pas la faute de son amie, cette dernière n’avait encore jamais eu affaire à ce type de situation et elle n’était sans doute pas formée à en gérer. Il fallait qu’elles y remédient. « J’aurai du saisir la main que tu m’as tendu ! » La jeune femme balaya ses paroles d’un geste signifiant qu’il était trop tard maintenant pour regretter telle ou telle réaction ; elles devaient réagir pour que ça ne se reproduise plus. « C’est pas ta faute Noa, ils se sont servis des lettres et toi t’étais pas prête à ça… » Elle haussa les épaules en se dirigeant à son tour vers la machine pour se servir le café tant attendu, relevant le menton en direction de son amie avec un regard compatissant. « Tu les as toujours avec toi ? Faut qu’on mette au point une stratégie pour quand ils reviendront, j’ai pas envie qu’ils te mettent un procès au cul. » Lança-t-elle en serrant les dents tout en reportant son attention sur le café qui coulait dans son gobelet, réfléchissant à la suite des évènements.
J’en suis encore toute chamboulée mais Hannah avait sans doute prévue le coup, elle avait vu venir, c’est aussi pour cette raison qu’elle m’avait proposé de m’accompagner de toutes façons. Au moins, ca m’apprendrait une belle leçon : ne pas croire que je suis capable de tout par simple prétexte que je suis la directrice de cette association. C’est pas si simple et il va falloir que j’admette que je ne peux pas tout supporter et encore moins quand il s’agit de s’en prendre plein la tronche, d’être portée responsable et pointée du doigts pour le décès d’un jeune homme. Qu’en serait-il s’il s’était donné la morte, s’il s’était suicidé ? Ca aurait été encore plus simple pour les parents d’accuser l’association, enfin, de m’accuser directement, d’après eux. « C’est pas ta faute Noa, ils se sont servis des lettres et toi t’étais pas prête à ça… » ah ça non, j’étais pas prête à me prendre toute cette souffrance en pleine poire, j’avais pas le recul nécessaire pour prendre ça avec hauteur et le lire avec détachement. J’avais cette image de Thomas en train d’écrire sa lettre avec les larmes qui coulaient sur ses joues car à certains endroits, on pouvait voir l’encre qui avait coulée à cause d’un liquide et ça ressemblait bien à des larmes. « Tu les as toujours avec toi ? Faut qu’on mette au point une stratégie pour quand ils reviendront, j’ai pas envie qu’ils te mettent un procès au cul. » je secoue la tête. « Ils n’ont rien voulu laisser… ils ont tout repris avec eux. » ca aurait été trop simple et nous laisser ne serait-ce qu’une copie. Un bip retenti, signifiant que le café était prêt, je prends alors le gobelet chaud dans mes mains en laissant Hannah faire à son tour. « Quel procès… » je voyais encore difficilement de quoi ils pourraient nous attaquer concrètement. « On va refaire l’histoire à l’envers… » On travaillait sur un logiciel qui nous permettait de retracer chaque appels téléphonique, chaque entretien, chaque activité collective passées à l’association. On pourrait reprendre chaque fois qu’Hannah avait reçu Thomas, chaque fois qu’elle aurait proposé à la famille de l’aide, chaque fois qu’ils ont refusé cette main tendue et chaque fois où ils avaient mis des bâtons dans les roues d’Hannah pour travailler avec leur fils. « J’ai toujours été contre les logiciels, la première à dire que ça ne sert uniquement qu’à être fliquée, mais pour le coup, j’trouve ça très utile. » je regarde Hannah et j’espère qu’elle est plus assidue que moi sur son utilisation. Mais la connaissant, je me doute que oui, mais j’ai besoin d’une confirmation là. « Dis-moi que tu y as tout noté depuis le début… » je la supplie même pour qu’elle me donne une réponse positive. Mais je sais aussi que si elle n’écrit pas sur ce logiciel, Hannah n’oublie jamais de prendre des notes dans son cahier qui la suit toujours partout. Attendant que son café soit prêt, je recule pour retourner dans mon bureau, l’invitant à me suivre. Jetant un œil bref sur mon bureau, je remarque la présence d’un papier plié en quatre, me précipitant dessus pour l’ouvrir. « Ils en ont oublié une ! » et c’était presque inespéré. Je la tends à Hannah. « si tu veux la lire… » moi j’avais donné, pas la peine de me replongée dedans à nouveau.
Devant la machine à café, Hannah observait l’air déboussolé de son amie en plissant les lèvres, persuadée que la catastrophe aurait pu être évitée. Et elle le pouvait encore. Il allait peut-être falloir organiser un autre rendez-vous afin de mettre les choses au clair, mais le médecin se doutait que l’idée risque d’être accueillie avec une froideur digne du pôle nord. Après tout, les parents du garçon n’avaient pas jugé opportun d’apporter un soutien psychologique à ce dernier lorsqu’il était au plus mal, ce qui suggérait qu’ils n’avaient aucune foi en la psychologie. Une session avec eux risquerait de s’avérer sportive, mais peut-être qu’elle parviendrait à déceler la faille qui pourrait les faire craquer et embrasser la peine qu’ils ressentent au lieu de se réfugier dans la colère, et donc dans le déni. Leur fils était mort d’un cancer, pas d’un suicide dû aux mauvais conseils de l’association. Il fallait qu’ils le réalisent pour laisser Noa tranquille à ce sujet, c’était le seul moyen. Attristée par le sentiment qu’avait Noa en ce moment, elle s’empressa de la rassurer en précisant que rien n’était sa faute. Elle n'aurait pas pu se préparer à un tel fiasco et le médecin avait entendu toute l’agressivité qui se dégageait des paroles du couple ; autant dire que la directrice n’était pas prête à accuser le coup. Les lettres avaient eu l’air de la désarmer, ce qui n’avait sans doute aidé en rien la brunette à conserver le stoïcisme nécessaire pour faire face à la situation. N’ayant pas eu l’occasion de voir de quoi il en retournait, Hannah s’aventura à lui demander si elle avait conservé lesdites lettres afin de prendre à son tour connaissance de son contenu. « Ils n’ont rien voulu laisser… ils ont tout repris avec eux. » Un soupir s’échappa des lèvres de la jeune femme tandis que Noa lui annonçait n’avoir aucune arme en main pour se défendre contre l’assaut des parents en deuil. Elle laissa son amie s’emparer de son café – signe évident de son état d’anxiété – et sélectionna à son tour le graal sous la forme d’un café noir serré, histoire de se donner un coup de boost. « Quel procès… » La brune n’avait pas l’air de voir comment ces personnes pouvaient se décider à attaquer en justice pour une chose pareille, mais Hannah savait pertinemment que le chagrin faisait agir les gens de façon totalement irréaliste parfois. « Je dis pas qu’ils ont assez d’éléments pour gagner un éventuel procès, juste que comme c’est parti là… » Elle haussa les épaules, espérant se tromper sur les intentions du couple. « On va refaire l’histoire à l’envers… » Le médecin haussa un sourcil, se demandant ce que son amie avait derrière la tête tout en attrapant le gobelet chaud après que la machine ait émis un bip signifiant que son café était prêt. « J’ai toujours été contre les logiciels, la première à dire que ça ne sert uniquement qu’à être fliquée, mais pour le coup, j’trouve ça très utile. » Ah, ça. La brunette n’avait pas vraiment été perturbée sur le fait de devoir fonctionner sur cette base de travail, ayant toujours pris l’habitude de tout noter d’elle-même lorsqu’il s’agissait de ses patients. Chaque détail avait son importance, et elle avait fini par utiliser ce logiciel comme un outil supplémentaire dans la rédaction de ses journées. « Dis-moi que tu y as tout noté depuis le début… » Un sourire en coin étira les lèvres d’Hannah qui hocha la tête tout en buvant une gorgée de son café, ne laissant pas trop traîner le suspens au vu de l’état de nervosité dans lequel était Noa. « Évidemment, tu me connais. » Elle lui emboîta le pas, se dirigeant vers le bureau de la directrice dont la porte était restée grande ouverte. Les pensées de la brune s’entremêlaient tandis qu’elle réfléchissait déjà à ce qui aurait pu être inscrit dans son cahier ou le fameux logiciel qui pourrait éventuellement venir appuyer leur défense dans le cas où les parents du jeune homme ne viendraient à passer à l’action. « Ils en ont oublié une ! » Se précipitant vers son bureau, la jeune femme s’empara d’une des lettres qui traînait là, par pure chance et la tendit à son amie, un air à la fois soulagé et triste – sans doute en se rappelant du contenu de cette dernière. « Si tu veux la lire… » Le bras tendu, Noa l’observait et sans hésitation, le médecin attrapa la feuille d’où l’on pouvait voir l’écriture maladroite de son ancien patient. « Il faut bien passer par là. » Murmura-t-elle en passant une main dans ses cheveux, se dirigeant vers une des chaises où elle prit place sans quitter la lettre des yeux. Sa première lecture fut rapide, curieuse et empressée de découvrir ce qu’il se cachait dans l’esprit torturé du jeune homme au moment où il avait écrit ces mots. Elle serra les dents à certains moments, l’image de son patient lui revenant à l’esprit tandis qu’elle pouvait presque l’imaginer rédiger cette lettre en pleine crise de désespoir. Noa n’avait pas dû en mener large non plus en découvrant son contenu sous le regard des parents qui devaient l’attendre au tournant à l’instant même où elle avait relevé les yeux de la feuille. Elle leva d’ailleurs les siens en direction de son amie dont le regard ne la quittait pas, lui montrant ainsi qu’elle avait pris connaissance de son contenu et puis se replongea une seconde fois dans la lecture de celle-ci, plus lentement cette fois. Elle analysa les courbes des lettres écrites par la main fébrile du garçon, les tâches indiquant qu’il avait dû pleurer en couchant ses émotions sur le papier ainsi que les intentions qui se cachaient derrière les termes qu’il avait utilisé lors de la rédaction. « N’importe quel expert pourra te dire qu’une lettre écrite par un adolescent malade comme lui n’est pas suffisante pour nous accuser de quoi que ce soit. Il ne dit pas qu’il veut mettre fin à ses jours, juste qu’il… qu’il aimerait que la douleur s’arrête. » Elle rendit la lettre à Noa avant de replonger ses lèvres dans son gobelet fumant, continuant de réfléchir. « Mais pour ses parents, il s’agit là d’un appel de détresse… Auquel on n’aurait soi-disant pas répondu ? » Elle secoua la tête, se rappelant son insistance à voir le garçon en session et à quel point ils s’étaient montrés réticents à ce sujet. « Il te faut mes notes jusqu’à quelle période ? » Lui demanda-t-elle ensuite en relevant les yeux vers son amie, un air interrogateur sur le visage.
« Je dis pas qu’ils ont assez d’éléments pour gagner un éventuel procès, juste que comme c’est parti là… » Il me manquait l’information où on pouvait facilement se retourner contre une organisation pour un oui ou pour un non. Non pas que la décès de Thomas ne me touchait pas, mais porter l’association devant la justice pour un décès suite à une maladie, hormis un manquement grave à nos obligations, je ne vois pas en quoi nous étions réellement responsables. Et je savais que mes équipes n’étaient pas responsable du mal-être de Thomas. Je savais qu’elles avaient tout fait pour qu’il ai la meilleure prise en charge, que ce soit au niveau médicale, au niveau psychologique et psychiatrique mais aussi social. Nous avions la chance, à l’association Beauregard d’avoir des équipes pluridisciplinaires et de pouvoir entourer et accompagner une personne sur tous les aspects de sa vie et ainsi, mieux prendre en compte tous ses besoins, favoriser une bonne coordination entre chaque service. L’association était précurseur car bon nombre d’organisation préférait ne mettre en place qu’un champ de compétence et multiplier les relations avec des organismes partenaires. Les deux systèmes ont leurs bons et mauvais côtés. On pourrait nous tacler d’austérité, d’être renfermés sur nous et de ne pas s’ouvrir aux autres, mais je suis persuadée que notre système est bon et juste. L’important, c’est bien qu’ici, ça fonctionne. Pour moi, il fallait déjà préparer une contre-attaque et le schéma se dessinait petit à petit dans ma tête : logiciel, retracer la prise en charge, prouver tous les échanges avec Thomas et sa famille et démontrer que nous n’aurions pas pu faire plus sans leurs consentements. J’allais dans tous les sens, mais je me concentrai à nouveau pour expliquer à Hannah la marche à suivre. Elle me confirme avoir tout noté, et je n’en doutais pas, j’avais seulement besoin de l’entendre. Son sourire et sa sérénité étaient si bénéfiques, ça me détendait. « Alors on va s’y mettre. » pas de temps à perdre. Avec mon café chaud qui me brule presque les doigts, je me dirige à nouveau vers mon bureau, sommant Hannah de me suivre pour travailler sur le dossier chaud bouillant. Encore un peu retournée de cette confrontation directe, la vue de cette lettre qui traine encore sur mon bureau me redonne un regain d’espoir supplémentaire. Laissant Hannah prendre connaissance du contenu de la lettre, je restais silencieuse en rejoignant mon bureau, j’allumais le logiciel et y entra mes logins personnels en attendant qu’elle finisse sa lecture. Je jetais un œil vers elle pour observer ses réactions, j’attendais son avis extérieur, elle qui savait si bien lire entre les lignes, bien plus expérimentée en sémantique que moi également, même si le champ lexical emprunté par Thomas pendant la rédaction de sa lettre se montrait dur et obscure. « N’importe quel expert pourra te dire qu’une lettre écrite par un adolescent malade comme lui n’est pas suffisante pour nous accuser de quoi que ce soit. Il ne dit pas qu’il veut mettre fin à ses jours, juste qu’il… qu’il aimerait que la douleur s’arrête. » comme n’importe quelle personne atteinte d’un cancer aussi foudroyant. Le pauvre n’avait pas été épargné et son combat a été semé d’embuches. « Mais pour ses parents, il s’agit là d’un appel de détresse… Auquel on n’aurait soi-disant pas répondu ? » je hoche la tête, confirmant la réponse à sa question rhétorique. « Il te faut mes notes jusqu’à quelle période ? » jetant un œil à la date dans le coin droit en bas de mon ordinateur, comme si elle allait me donner la réponse. « Depuis la première fois que tu l’as vu. Je vais prendre note de ses participations aux ateliers… » j’entrais son nom dans le logiciel pour arriver à son dossier unique informatisé et alla à la recherche de son parcours dans l’établissement. Je pouvais déjà voir plusieurs notes écrites par Hannah mais je lui laisserai soin d’en faire le relevé. J’étais embêtée de constaté que mise à par les siennes, le dossier n’était pas très fournis. « Je vois qu’il a participé une fois à l’atelier théâtre… une fois à la relaxation et deux fois au sport… puis plus rien. Depuis le 5 septembre, tu peux regarder si ca correspond à quelques chose de précis de ton côté ? » je lui note sur un post-it qui traine par là cette date clé du 5 septembre et également sa date d’admission dans l’association. « Il est arrivé le 9 juin… » tout est allé si vite… « Je vais voir avec les médecins pour une réunion de coordo. On a besoin des avis de tout le monde. » et en tant que directrice, je n’avais aucune vision sur le parcours médical du jeune homme au sein de l’association, ces informations restants confidentielles et à partager uniquement entre médecin. Hannah y avait accès de son côté. « Il va falloir que j’appelle James. » James n’était plus le directeur de cette section de l’association Beauregard mais il était toujours très disponible pour répondre à mes questions et était pour moi une sorte de mentor et j’étais toujours très impressionnée par son tact, sa diplomatie et sa patience. Comme s’il était habitué à toute situation et qu’il savait toujours comment réagir et comment se comporter. Si Hannah était mon pilier au sein de l’association, lui était une vraie roue de secours. « Il faut que je me mette en lien avec l’aide juridictionnelle de l’association et informer les avocats également. Qu’ils se tiennent près, si jamais… » et on aura déjà bien avancé de notre côté en collectant toutes les informations nécessaires à y voir plus claire.
Même si Hannah savait que dans les faits, elle n’aurait rien su faire de plus pour lui, sa responsabilité professionnelle était engagée sur tous les cas qui tombaient entre ses mains. Et le fait qu’on puisse juger son travail d’une façon aussi négative avait tendance à l’irriter, d’autant plus quand elle savait que les parents du garçon étaient de mauvaise foi quant à leur propre part de responsabilité dans cette histoire. Il était facile d’éluder les moments où elle était intervenue et s’était aussitôt fait rabrouer par eux, sous prétexte qu’ils avaient la situation sous contrôle et qu’ils ne croyaient pas en ses méthodes. Evidemment qu’un éventuel procès ne mènerait à rien dans sa finalité, mais ça jetterait tout de même une ombre sur l’association et Hannah voulait éviter ça à Noa. Ce job de directrice lui tenait à cœur et la pression qui suivrait un éventuel procès la mettrait dans tous ses états, c’était certain. « Alors on va s’y mettre. » La brune hocha la tête avec un sourire qui se voulait rassurant et s’empressa de suivre son amie dans son bureau tout en avalant une première dose de caféine qui lui fit un bien fou. Et tandis que Noa se lançait dans les premières recherches sur son ordinateur, le médecin s’empara de la lettre qu’elle lui avait tendu pour prendre connaissance de son contenu, une légère boule en travers de la gorge. Elle avait parfois du mal à ne pas se laisser submerger par l’émotion lorsqu’il s’agissait de travailler avec des jeunes atteints du cancer et garder un visage stoïque en toute circonstance requérait un travail continuel sur elle-même. Mais si lire les paroles désespérées du jeune Thomas lui faisait beaucoup de peine, elle n’oubliait pas qu’il était question d’une analyse scrupuleuse et c’est sur quoi elle se pencha lors de sa deuxième lecture. Beaucoup de choses pouvaient être devinées au travers des mots utilisés ou même par la façon dont les phrases étaient tournées, et Hannah rassura immédiatement la brune sur la question : il n’y avait rien d’incriminant dans cette lettre. Déposant la feuille de papier sur le bureau déjà bien encombré de la brunette, elle lui demanda jusqu’à quelle période devaient remonter les notes dont elle avait besoin. Après tout, elle ignorait le plan d’attaque que Noa avait en tête et trouvait déjà rassurant qu’elle en ait un tout court. Mais ça ne l’étonnait pas vraiment ; son amie était pleine de ressources et méritait amplement son poste de directrice de l’association. « Depuis la première fois que tu l’as vu. Je vais prendre note de ses participations aux ateliers… » Hannah hocha la tête en notant de son côté cette information afin de ne pas l’oublier, se remémorant au passage la première session qu’elle avait eue avec lui. « N’oublie pas qu’il a participé à quelques séances de groupe avant que je ne puisse l’avoir en entretien solo. » Elle se rappelait son air absent lorsqu’elle l’observait par la vitre ; Thomas n’avait jamais été à l’aise avec la prise de parole en public, c’était pour cette raison qu’elle avait demandé à ses parents de le recevoir seul. Elle avait voulu lui offrir un environnement rassurant, où il se sentirait libre de s’exprimer sans crainte d’être jugé par les autres. « Je vois qu’il a participé une fois à l’atelier théâtre… une fois à la relaxation et deux fois au sport… puis plus rien. Depuis le 5 septembre, tu peux regarder si ca correspond à quelques chose de précis de ton côté ? » Sans demander son reste, la brunette se leva et pris la direction de son bureau pour y retrouver tout ce qui pouvait concerner Thomas. Avec toute cette histoire et le raffut qu’avait fait la venue de ses parents, Hannah avait déjà pris les devants et rassemblé tout ce qu’elle avait, anticipant ce moment même si elle aurait préféré l’éviter. Elle revint ensuite dans le bureau de son amie où elle s’installa avec quelques dossiers dans les mains ; elle notait vraiment tout histoire de ne rien oublier, ce qui était à la fois un défaut et une véritable bénédiction dans le cas présent. « Le 5 septembre, c’est le jour où il est parti en pleurant d’une de ses sessions… Et c’est à partir de là que j’ai commencé à le prendre en entretien individuel. J’avais beau l’encourager à continuer les activités avec les autres, ses parents n’arrêtaient pas de répéter que ça ne servait à rien. » Elle haussa les épaules sans pour autant s’empêcher de retenir une moue en repensant au mur qu’avait représenté ses parents pendant tout le processus. Comme s’ils s’attendaient à ce qu’on leur propose un jour une activité qui permettrait directement de soigner le cancer de leur fils. Ils n’avaient pas compris que l’association s’évertuait à apaiser les patients et à mieux vivre leur maladie en l’acceptant et en développant pas des outils pour la combattre mais qu’il leur était impossible de développer une technique visant à guérir le cancer. Les médecins savaient ce qu’ils faisaient, le reste était accessoire et visait au bien-être général. Leur apporter un peu de répit, de réconfort. « Il est arrivé le 9 juin… Je vais voir avec les médecins pour une réunion de coordo. On a besoin des avis de tout le monde. » Le médecin était bien d’accord et si réellement un procès leur pendait au nez, il était évident que l’avis de tout le monde sur la question était nécessaire. Thomas avait eu affaire à beaucoup de membres du personnels et Hannah savait qu’un œil extérieur pouvait parfois éclairer pas mal de choses. « Il va falloir que j’appelle James. » Outch. C’était tout de suite une autre paire de manche, et si le médecin savait que Noa était en bon terme avec lui, ça ne rendait pas moins cette discussion difficile à avoir. « Je suis sûre que tout le monde fera son possible pour trouver de quoi nous dédouaner de toute cette histoire. Et puis si ça se trouve on s’inquiète pour rien, il faudra juste attendre qu’ils redescendent et acceptent la situation. » Plus facile à dire qu’à faire au vu de la détermination qu’ils avaient eue à jeter le blâme sur l’association tout entière. « On fait beaucoup de bien ici, je crois que ça reste le plus important et que cette image prendra le pas sur le reste. » Elle esquissa un nouveau sourire tout en feuilletant les pages de ses dossiers à la recherche de quelque chose pouvant aider Noa, là tout de suite. Mais rien ne lui sautait aux yeux pour l’instant. « Il faut que je me mette en lien avec l’aide juridictionnelle de l’association et informer les avocats également. Qu’ils se tiennent près, si jamais… » Ça faisait beaucoup. Mais Noa avait raison de se tenir prête et d’anticiper le pire, c’est ce qu’Hannah aurait fait à sa place aussi. « Ils voudront décortiquer chaque séance pour trouver quelque chose de tangible à mettre sur la table s’ils portent réellement plainte contre nous, je vais essayer de me préparer au mieux. » La brune était sérieuse et si elle disait ça, c’est qu’elle comptait réellement plancher toute la nuit s’il le fallait pour trouver de quoi appuyer leur défense. « Tu vas assurer Noa, mais si j’étais toi j’essayerais de les revoir encore une fois. Peut-être avec un médiateur ? » C’était une piste, mais elle ne voulait pas que son amie pense qu’elle se permettait de dire des choses là où elle n’était pas à sa place, elle voulait simplement se montrer de bon conseil.
Il faut refaire l’histoire à l’envers, tout remonter jusqu’à ses premiers pas dans l’association. Je veux savoir quel jour et à quelle heure il a poussé la porte d’entrée pour la première fois et absolument tous ses faits et gestes, chaque parole qu’il aura prononcé depuis qu’il est connu de l’association. C’est mon premier vrai cas de crise à gérer alors peut être que j’en fais des tonnes, peut être que je ne réagis pas vraiment comme il le faudrait, que je suis trop directive, trop parano mais c’est surtout ma place qui peut être en jeu aujourd’hui, celle d’Hannah peut être, je sais pas quels sont les vrais enjeux de tout ça… mais on ne devait prendre aucun risque. Pas un de plus. Et ça nous servira peut être pour les prochaines fois où des parents se montreront réfractaires à ce que leurs enfants se rendent régulièrement ici. « Le 5 septembre, c’est le jour où il est parti en pleurant d’une de ses sessions… Et c’est à partir de là que j’ai commencé à le prendre en entretien individuel. J’avais beau l’encourager à continuer les activités avec les autres, ses parents n’arrêtaient pas de répéter que ça ne servait à rien. » Je lève les yeux au ciel, je suis agacée et en colère contre eux aussi. Je ne devrais peut être pas réagir ainsi mais quand même … « quel culot… » Nous croyons dur comme fer en nos méthodes et en tout le soutien que nous pouvons apporter à nos patients pour les aider à tenir le coup psychologiquement, car il a été prouvé que le mental avait une grande part de responsabilité dans l’évolution de la maladie. Et pour ça, Hannah et ses collègues étaient d’une aide si précieuse. C’est pourquoi il était important aussi de rassembler toutes les équipes et de faire une réunion pour revenir sur son accompagner avec l’équipe pluridisciplinaire. Tout le monde avait son mot à dire et ca pourrait aussi permettre à ceux qui le souhaite de s’exprimer suite au décès de Thomas. Ce n’était jamais facile d’apprendre que l’un des patients de l’association avait fini par se laisser porter par la maladie. « Je suis sûre que tout le monde fera son possible pour trouver de quoi nous dédouaner de toute cette histoire. Et puis si ça se trouve on s’inquiète pour rien, il faudra juste attendre qu’ils redescendent et acceptent la situation. » peut être bien qu’Hannah avait raison, que pris dans l’émotion les parents n’avaient trouvé comme seule coupable l’association et ils s’était rués vers nos locaux sans avoir pris la peine de réfléchir posément et de prendre du recul. Difficile de prendre du recul ceci dit lorsqu’il s’agit de la perte de son propre enfant… « Je crois que moi-même, je prends tout ça un peu trop à cœur… » j’en avais au moins conscience mais il était plus fort que moi de réagir autrement pour le moment. « On fait beaucoup de bien ici, je crois que ça reste le plus important et que cette image prendra le pas sur le reste. » je hoche la tête, l’association était reconnu de d’utilité publique et n’avait plus ses preuves à faire. « Je suppose que ce n’est pas la première situation de crise que l’association connait … et je suppose que James sait exactement comment faire pour que les bruits ne se rependent pas trop dans les couloirs non plus. » non loin de moi l’idée de vouloir étouffer l’affaire mais ce n’était pas encourageant pour les patients accompagnés d’être pris dans ce tourbillon là et ils méritaient de se concentrer sur eux même sans être parasités par une histoire familiale suite au décès d’un d’entre eux… Les avocats seront mes alliés et sauront quoi faire également. Ils sont experts et travaillent pour l’association depuis des années, je suppose qu’ils connaissent tous les rouages. « Ils voudront décortiquer chaque séance pour trouver quelque chose de tangible à mettre sur la table s’ils portent réellement plainte contre nous, je vais essayer de me préparer au mieux. » la plainte, j’espérais vivement ne pas en arriver là… « Tu vas assurer Noa, mais si j’étais toi j’essayerais de les revoir encore une fois. Peut-être avec un médiateur ? » Chacune des paroles d’Hannah était depuis le début d’une bienveillance sans nom, je ne peux que la remercier de me soutenir ainsi. « T’as raison… » je pose mes mains à plat sur le bureau, inspire et expire doucement. « Je vais leur laisser quelques jours… ils ont besoin d’avaler la pilule aussi… ils changeront peut être d’avis.» que je tente aussi de me rassurer. « Tu peux prendre une pause, si tu veux… je vais synthétiser tous les éléments que j’ai et je te propose qu’on se retrouve demain pour mettre tout à plat et croiser nos données… » et après avoir pris un peu de recul aussi. « J'te remercie Hannah...»