LUCIA&EVELYN ► Lost in the echo

(#)Sam 9 Nov 2019 - 15:58

Lost in the echo
Lucia Whitemore & @Evelyn Pearson LUCIA&EVELYN ► Lost in the echo 873483867

J’aimais cet endroit. Autrefois, quand il était synonyme de liberté et d’indépendance, quand à l’aube de mes seize ans il avait été mon premier lieu de travail, quand faire le service ici m’avait apporté ma première paye, me permettant de gagner mon argent, à moi, plus celui de mes parents. Cet argent même qui nous permet de commencer à faire des rêves pour l’avenir. Quand cinq cent dollars nous semblent tout d’un coup suffisant pour projeter de parcourir l’Australie dans un van, d’acheter un bateau pour aller exploser Fraser Island tous les week-ends, d’acheter une maison de campagne pour y vivre avec son futur époux, ses futurs enfants et son futur golden retriever. J’avais accueilli cette indépendance relative comme la plupart des adolescentes de mon âge. Et au-delà de ça, j’aimais l’ambiance qui se dégageait du Pelican’s Nest Café, profondément. La vue sur la jetée, qui avait toujours été mon endroit préféré de Wynnum, au bout de laquelle j’aimais aller m’asseoir pour laisser mes pieds tremper dans l’eau, la piscine extérieure dans laquelle j’aimais aller faire quelques longueurs entre midi et deux ou après une journée de travail, la plage, la brise, l’atmosphère bienveillante et tranquille qui se dégageait du café autant que du quartier. Je n’avais retrouvé ça nulle part, moi qui imaginais la grande vie en partant à Sydney, mais aujourd’hui tout est différent. L’endroit n’a pas changé, comme figé dans le temps, comme si les trois dernières années n’avaient pas existé, comme si les neuf dernières années n’avaient existé en fait, le café était resté figé en 2010, à l’époque où j’avais poussé la porte pour la première fois. Mais je ne connaissais plus les autres employés, et surtout j’avais changé. L’insouciance qui m’habitait à l’époque avait disparu, et mon innocence avait pris un coup dans les dents. Comme si j’avais réalisé que cet endroit n’était qu’un mensonge, que la vie adulte ne se résumait pas à des couleurs vives et un joli intérieur au style suédois, à des tartes au citron et millefeuilles, à des cupcakes de toutes les couleurs. Je n’arrivais plus à ressentir ce que je ressentais alors dans cet endroit édulcoré, parce que même si je refusais de l’admettre, ma vision des choses avait profondément changée, en trois ans.

Mais pourtant malgré tout je continuais de me sentir attirée par le lieu. Malgré les souvenirs qu’il faisait affluer, malgré les employés que je ne connaissais plus, malgré le fait que ma récente chute à vélo ait mis temporairement fin à mon temps partiel au Pelican’s, parce que travailler avec un bras dans le plâtre et en écharpe était quasi impossible. Parce que je n’ai beau plus me sentir totalement chez moi ici, cela reste ce qui s’en rapproche le plus. Et parce que ce mensonge, cette jolie fable qu’il nous raconte j’ai encore envie d’y croire au fond, au moins un peu. Me raccrocher à ce genre de chose me permets de ne pas sombrer, continuer à rêver me permets d’oublier la douleur, celle que je ressens encore après ma rupture encore trois mois après, celle que je ressens à cause de ces trois dernières années et celle que me cause ma relation houleuse avec Hannah. Alors même si je ne travaille plus ici, temporairement ou définitivement je n’en sais rien, c’est un lieu où je me réfugie finalement assez naturellement. Et j’en ai marre, de tourner en rond dans la maison parce que je ne peux plus ni travailler ni faire du sport à cause de ma fracture, j’en ai marre d’éplucher les offres de travail en espérant trouver quelque chose qui me corresponde, en espérant trouver un endroit qui veuille bien me faire confiance, assez d’éplucher les annonces de colocation sans finalement oser décrocher mon téléphone. Je veux faire les choses dans l’ordre, trouver un emploi, n’importe lequel tant qu’il paye correctement. Trouver un appartement dont le loyer ne soit pas exorbitant. Quitter la maison familiale et quitter Wynnum, parce que même si j’aime cet endroit j’ai besoin de changer d’air, je me rends compte que la fuite en arrière n’est finalement pas la solution à tous mes problèmes, j’ai besoin d’aller de l’avant.

Arrivée au comptoir du café je commande un café noisette et me laisse tenter par une part de marbré au citron, avant de remercier poliment la serveuse qui en posant un regard sur mon bras propose de m’apporter le plateau jusqu’à ma table. Ce n’est que plus tard, une fois installée et mon goûter bien entamé que mes yeux se posent sur la jeune femme assise à deux tables de la mienne. Je détourne le regard rapidement, par peur de paraître malpolie, mais fouille dans ma mémoire, parce que le doux visage de l’inconnue me parle, parce que je crois le reconnaître. Il me faut quelques secondes supplémentaires pour réaliser que si je n’ai jamais rencontré la brune et que nous n’avons jamais échangé de vive voix, il s’agit d’Evelyn Pearson. La même Evelyn Pearson que j’ai écouté religieusement quand il y a trois ans elle est intervenue en vidéo conférence lors d’un cours de management de dernière année de master. Elle a tout ce qu’il faut pour être le genre de femme que j’admire, cela va sans dire : elle est indépendante, la preuve en est qu’elle a quitté l’Australie et n’est revenue qu’après avoir créé une affaire florissante à plus de quinze mille kilomètres de nos côtes. Et elle a fait ça seule, malgré une famille au nom qu’il est difficile d’ignorer, même pour quelqu’un comme moi dont les connaissances en matière de ballon ovale sont proches du néant. Son intervention m’avait inspirée, et si j’étais déjà à l’époque à peu près consciente de ne pas avoir un dixième de son assurance et de sa détermination, je l’avais écoutée religieusement du début à la fin du cours. Elle me semble plus impressionnante en vrai qu’en vidéo au fond d’un amphithéâtre, mais je meurs d’envie d’aller lui parler, gardant même dans un coin de ma tête qu’il y a quelques jours j’ai vu l’offre d’emploi d’assistante qu’elle a faite publier, et si je l’ai écartée, persuadée de ne pas avoir les qualifications nécessaires, je n’ai pas pu m’empêcher de la laisser sur un coin de mon bureau.

Sans trop savoir ce qui me prend et surtout d’où me vient cette soudaine audace, je me lève maladroitement de ma chaise pour faire quelques pas timides dans sa direction. « Melle Pearson ? » Il est trop tard pour faire marche arrière, et ce même si mon cœur trébuche dans ma poitrine. Je sens le rouge me monter aux joues, et tente de lui tendre mon bras valide de la façon la moins gauche possible, alors que j’arrive face à elle. « Bonjour, Lucia Whitemore, on ne se connait pas mais vous êtes intervenue pendant l’un de mes cours de management, à l’université du Queensland il y a quelques années. » Jusqu’ici je me surprends, je n’ai pas bafouillé, me suis exprimée d’une voix certes fluette et qui manque un peu d’assurance mais de façon claire, quelque chose me dit que le vent risque de tourner maintenant qu’il faut que je me justifie de l’avoir accostée ainsi, alors qu’elle prenait tranquillement un café. « Je me rends compte que je vous dérange peut être, je suis désolée mais je… » Mes méninges se mettent à fonctionner à plein régime, et c’est généralement quand je commence à douter de moi que je perds mes moyens. « Je vous ai trouvée inspirante, et je voulais juste venir vous saluer. » Et voilà, le moment où j’arrête de parler pour lui laisser en placer une. Ça a toujours été ma technique ça, de parler, parler et encore parler pour dissimuler mon malaise.

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(#)Sam 16 Nov 2019 - 15:14

Lost in the echo
evelyn pearson & @lucia whitemore

Lorsqu'il s'agissait de son travail, Evelyn était intransigeante et fonctionnait de façon méthodique. Ca frôlait presque l'obsession. Elle tenait des listes savamment préparées, légendes colorées à l'appuis, et ne se couchait une fois qu'elle était certaine d'avoir allégé le poids de ses responsabilités. Contrôler cette partie de sa vie avait toujours été facile, parce qu'elle savait ce qu'elle valait en tant qu'organisatrice de mariages. Qui plus est, elle avait beaucoup trop travaillé pour prétendre à la réputation qui la précédait désormais. Elle n'attendait pas qu'on lui octroie un quelconque droit à l'erreur, elle refusait d'emblée de l'envisager. Était-elle trop dure avec elle-même ? Sans doute, mais c'était toujours moins que ces gens avec qui elle avait grandi et qui attendaient d'elle autre chose : que du mieux, la plupart du temps. Sans verser dans la prétention, elle connaissait ses atouts et savait les mettre en avant pour proposer des services à la hauteur de ce dont elle se savait capable, et ça comportait pas mal de choses, en définitive. Bien sûr, elle n'édulcorait pas ses lacunes, mais si elle pouvait prétendre à la perfection pure, elle ne se privait pas pour le faire, s'armant du sourire charismatique qui ajoutait à la panoplie de la commerciale si amicale qu'on finissait souvent par oublier qu'elle vendait quelque chose en vérité. Non, ce n'était pas de la publicité mensongère, simplement la volonté farouche de répondre à la requête stricte faite par ceux qui venaient vers elle.
Elle gardait cependant à l'esprit que l'imprévu était une possibilité. C'était ça aussi qui régentait son besoin compulsif de réussir tous les challenges qui se dressaient sur son chemin : l'idée d'être capable de déjouer les plans de l'impondérable était une satisfaction certaine qu'elle ressentait plus souvent qu'à son tour d'ailleurs, et qui démontrait probablement un complexe de supériorité profondément enfoui dans son petit cœur meurtri. Cependant, il était beaucoup trop tôt pour l'auto-analyse… aussi ce fût en s'emparant de sa tasse de café fumant qu'elle relégua ses états d'âme plus loin encore que d'habitude. Evelyn conclut mentalement que revenir aussi brusquement sur l'exigence dont elle s'auto-allouait depuis des années n'était due qu'à l'annonce qu'elle avait faite publiée récemment, et qui la forçait à se remettre en question ; est-ce qu'elle-même aurait eu le profil adéquat pour répondre à la place d'assistant qu'elle avait mis en ligne pour pallier l'absence de Neal qu'elle n'attendait plus depuis longtemps ? Elle aimait se faire croire que oui. Jouissant de son statut d'organisatrice de mariages depuis bientôt huit ans désormais, elle était une valeur sûre et n'avait que très peu besoin de convaincre qui que ce soit qu'elle était bonne à l'exercice… mais si elle devait être tout à fait honnête avec elle-même, au tout début de sa carrière, elle n'aurait pas été capable de gérer les entretiens qu'elle faisait passer aux candidats qui s'étaient présentés à elle ces dernières semaines. C'était bien pour cette raison qu'elle avait décidé d'être sa propre patronne de toute façon, pour pouvoir gérer les choses comme elle l'entendait.
Pourtant, elle n'était pas particulièrement exigeante, se montrant toujours bienveillante envers les jeunes gens qui postulaient. Ce n'était qu'une fois qu'elle entamait l'énumération des inconvénients de son métier qu'elle voyait les mines souriantes se désintégrer. Veiller au bonheur des autres, c'était sacrifier le sien. Si elle, ça ne lui avait pas fait peur de passer à côté de tous ses weekends et de sa vie privée, elle pouvait comprendre que les aspirations différaient et que l'éventualité de ne vivre que pour son métier était une ombre trop menaçante pour la nouvelle génération. Elle soupira. Sa tasse de café posée sur l'ourlet de sa lèvre inférieure recouverte d'une subtile couche de rouge à lèvre couleur pêche, elle ferma très brièvement les yeux : elle retirerait l'annonce en rentrant à l'agence tout à l'heure. Elle reverrait ses critères et allégerait la sentence qu'elle réservait à son futur, ou à sa future, binôme, c'était nécessaire. A cet instant précis, Neal se mit à lui manquer terriblement. Elle repoussa son souvenir néanmoins, rengorgeant ses poumons d'un peu d'air chargé d'iode, puis elle reposa délicatement sa tasse de café devant son carnet de croquis, noircis des dernières esquisses qu'elle s'était laissé aller à tracer pour soulager son esprit.

La voix qui l'interpella lui fit lever la tête droit devant elle. Les sourcils légèrement haussés, elle marqua un temps de silence que seul son hochement de tête vint perturber "Evie." fit-elle par vieux réflexe, corrigeant son interlocutrice avec le ton doux qui était le sien, sans même craindre qu'on puisse l'interpeller pour de mauvaises raisons. Quel genre de mauvaises raisons pouvaient avoir cette jeune femme plâtrée qui se présenta à elle, de toute façon ? Elle paraissait si douce. Dégageant une longue mèche ondulée de son visage, Evelyn saisit la main qu'elle lui tendit avec la bienséance qu'on lui avait inculquée à une époque pas si lointaine, et s'apprêta à demander à la jeune femme ce qu'elle pouvait faire pour elle… quand cette dernière leva le voile sur son identité dans une adorable démonstration de timidité qui fit sourire la fille Pearson "Je m'en souviens." confirma-t-elle pendant qu'elle se remémorait avec pointe d'amertume l'insistance avec laquelle le professeur de management de Lucia avait insisté pour la faire intervenir lors de ce cours qu'il lui avait vendu comme une étape charnière dans l'apprentissage de ses étudiants ; Evie avait appris bien plus tard qu'il entretenait des liens étroits avec sa mère, mais elle avait sciemment décidé de ne pas s'y appesantir, parce qu'elle avait aimé parler de son expérience devant un parterre de jeunes gens basés à des kilomètres et des kilomètres de là où elle se trouvait, dans son pays natal qui plus est. Là encore, malgré l'écran qui les séparait, une satisfaction certaine s'était emparée d'elle, lui faisant redouter qu'elle appréciait davantage l'éclat des projecteurs qu'elle le prétendait.
Elle montra le siège vide qui lui faisait face à Lucia. Se redressant élégamment, elle opina négativement du chef pour la mettre plus à l'aise "Pas du tout. Pour être franche avec vous, j'allais bientôt m'en aller. Mais j'ai un peu de temps devant moi en vérité, alors asseyez-vous. Qu'est-ce qu'il vous est arrivée, Lucia ?" demanda-t-elle en désignant du menton son bras plâtré. Elle échangea avec elle un sourire, et se lança dans une rapide observation des traits enfantins qu'elle percevait sous le couche habile de bonne éducation qu'elle présentait tandis qu'un compliment se perdait dans sa direction. Sans s'en sentir obligée, elle reprit la parole "Oh, je n'en mérite vraiment pas autant. Mais merci, j'apprécie." Et c'était sincère, la façon dont ses yeux chocolat se mirent à briller était une preuve tangible, même si elle restait réservée sur ce qu'elle laissait entrevoir, toujours trop soucieuse de ne rien laisser déborder en présence d'autrui. Se ranimant soudain, Evie leva doucement un bras pour appeler le premier serveur qui passait par là, proposant en même temps à Lucia "Si je peux vous offrir quelque chose en échange de vos jolis mots, c'est avec grand plaisir." conclut-elle en cherchant son regard, ne pouvant cependant pas s'empêcher d'ajouter, curieuse tout à coup, et baissant le bras le temps que quelqu'un daigne leur accorder un peu d'attention "J'imagine que vous avez poursuivi dans le management. Qu'est-ce que vous faites alors, vous vous en sortez ?"

they said the end is coming, everyone's up to something, i find myself running home to your sweet nothings. outside, they're push and shoving, you’re in the kitchen humming, all that you ever wanted from me was sweet nothing.

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(#)Sam 16 Nov 2019 - 21:00

Lost in the echo
Lucia Whitemore & @Evelyn Pearson LUCIA&EVELYN ► Lost in the echo 873483867

Quand mes yeux se sont posés sur l’offre d’emploi que la brune a passée dans les petites annonce, évidement que je l’ai écartée. Je l’ai écartée comme je le fais pour toute les offres pour des emplois qui nécessitent un diplôme que j’ai pourtant. Que j’ai obtenu avec des résultats corrects et des très bonnes appréciations de la part du corps universitaire, parce que si je ne suis pas le petit génie qu’est ma sœur j’ai toujours été le genre d’élève qui plait aux enseignants. Appliquée, organisée et studieuse, j’ai toujours rendu des bons devoirs et j’ai toujours fait consciencieusement le travail qui m’était demandé sans faire de vagues. Pas parce que manquais de personnalité ou de répartie, mais parce que j’ai toujours été plus à l’aise à l’idée de passer inaperçue qu’avec celle de me retrouver au centre de l’attention. Non, ça je le laisse à d’autres, à des femmes comme ma mère, comme Hannah ou comme Evelyn, celles qui n’essayent même pas mais que l’on ne peut s’empêcher de remarquer, parce qu’elles ont quelque chose en plus, parce qu’elles sont magnétiques, belle et intelligentes. Ce complexe n’est pourtant chez moi théâtre d’aucune jalousie, parce qu’elles font ça avec tant de naturel, parce qu’elles ne cherchent même pas à écraser celles qui comment moi sont plus discrètes et réservées.

Cette annonce je l’ai écartée comme toutes les autres sans trop savoir pourquoi, en me disait que Lawrence avait peut-être raison, que je manque simplement d’ambition, que je n’ai pas ce qu’il faut pour réussir et je préfère m’éviter des déceptions que je ne saurais encaisser. Parce que je suis une rêveuse aussi, et que faire un choix que je perçois comme un choix d’adulte me tétanise, me donne l’impression que toute marche arrière deviendrait dès lors impossible. Pourtant je n’ai pas pu empêcher mes yeux de la parcourir et mon cerveau de se dire que finalement sur le papier l’offre était plus qu’alléchante, et qu’en en sens je matchais avec le profil requis. Foutaise, bien sûr que non tu ne feras pas l’affairev voilà ce que je m’étais finalement rapidement dit, après m’être laissée aller à parcourir le site internet de l’agence d’organisation de mariage de la jeune femme. J’avais cliqué sur la croix en haut de l’écran, et si je n’ai pas su m’empêcher de garder l’idée dans un coin de ma tête je n’y ai plus sérieusement pensé depuis. Mais je suis le genre de jeune fille qui croit au destin, je crois dur comme fer que tout arrive pour une raison et c’est surement ça qui me donne la force nécessaire pour aller saluer la businesswoman. « Evie. » Mes joues rosissent quand je réalise que je vais avoir bien des difficultés à me laisser aller si rapidement à ce genre de familiarité. « Je m'en souviens. » Mon sourire s’étend, et je suis bien soulagée de voir qu’elle ne prend pas mal le fait que tout d’un coup une inconnue apparaisse dans son champ de vision pour la déranger dans ce qu’elle était en train de faire. Je suis hors de ma zone de confort, et une fois que j’ai fini de parler je reste là, mon bras libre ballant le bras du corps, visiblement un peu mal à l’aise. J’accueille la proposition d’Evelyn avec soulagement, et m’installe en face d’elle, les fesses au bord de ma chaise, comme prête à m’enfuir à l’instant même où elle me le demandera. « Pas du tout. Pour être franche avec vous, j'allais bientôt m'en aller. Mais j'ai un peu de temps devant moi en vérité, alors asseyez-vous. Qu'est-ce qu'il vous est arrivée, Lucia ? » Mon regard suit le sien et je me rends rapidement compte qu’elle parle de mon bras. « Oh ce n’est rien. J’ai fait une mauvaise chute à vélo, on me l’enlève dans quelques semaines. » Je réalise après coup qu’il est fort probable qu’elle ne m’ait posé la question que par politesse, et que oh ce n’est rien, une mauvaise chute aurait probablement suffit. Ou peut-être pas ? Je n’en sais rien, parce qu’impressionnée par la brune j’utilise toute ma concentration pour réussir à ne pas me ridiculiser en faisant tomber quelque chose ou en disant quelque chose d’idiot. « Oh, je n'en mérite vraiment pas autant. Mais merci, j'apprécie. » Je ne sais pas s’il s’agit là d’une fausse modestie ou simplement d’un malaise à l’idée de recevoir des compliments. J’ai de parfaits exemples des deux cas de figures à la maison, Gabrielle rentrant la seconde case, ne sachant jamais où se mettre quand quelqu’un a un mot gentil à son égard, souvent donc, et Hannah… Et bien évidement Hannah, consciente d’avoir une intelligence au-dessus de la moyenne et un physique avantageux ne peut parfois se retenir de verser dans les travers de la fausse modestie. Quoi qu’il en soit j’étais sincère, et j’avais écouté les mots de la jeune femme avec plaisir à l’époque, allant jusqu’à fouiller un peu plus loin pour me renseigner à son sujet, et surtout au sujet de l’entreprise qu’elle avait créée en partant de rien. « Si je peux vous offrir quelque chose en échange de vos jolis mots, c'est avec grand plaisir. » A nouveau mes lèvres s’étirent et mes fossettes apparaissent en un sourire. « C’est plutôt moi qui devrais vous offrir quelque chose. » Les pâtisseries de l’établissement n’ont plus aucun secret pour moi depuis des années. « J’ai travaillé ici pendant quelques temps, quand j’étais étudiante. Le cake au citron et le millefeuille sont les spécialités de la pâtissière, mais ne dites à personne que c’est moi qui vous l’ai dit. » Je m’explique, tentant même contre toute attente un trait d’esprit. Le serveur s’approche finalement, me salue d’un sourire avant de prendre la commande de la jeune femme. « Un café noisette pour moi s’il te plait Dan. » Je me garde bien de lui expliquer que j’avais recommencé à travailler ici il y a quelques semaines, et que sans mon bras en écharpe c’est certainement moi qui l’aurait servie aujourd’hui, et non mon collègue. Ancien collègue. Je ne sais pas en fait. Pourtant, je ne suis pas de celles qui mentent pour se faire bien voir, mais devant une femme comme Evelyn Pearson, je ne sais pourquoi je n’ai pas envie d’admettre qu’à vingt-cinq ans je n’étais qu’une simple serveuse à temps partiel il y a encore moins d’un mois.

Elle est comme je l’imaginais en tout cas, raffinée et polie, et il émane d’elle une sorte de bienveillance qui m’apaise, sans que je ne sache trop pourquoi. Et quand elle me pose des questions quant à mon parcours après l’université, j’ai l’impression qu’elle s’y intéresse, au-delà de la politesse de rigueur. « J'imagine que vous avez poursuivi dans le management. Qu'est-ce que vous faites alors, vous vous en sortez ? » Ah la fameuse question. Celle à laquelle je ne peux répondre sans avouer à demi-mot que finalement je me suis un peu perdue. J’ai du mal à imaginer qu’une femme comme elle puisse avoir une quelconque estime pour une jeune fille qui son diplôme en poche a fait fi de tout bon sens pour suivre son petit ami dans une ville étrangère, n’acceptant que des petits boulots qui se quittent facilement pour pouvoir le suivre sur ses rares concerts et tournées. Une jeune fille qui s’est laissée convaincre que de toute façon, elle n’avait pas les capacités pour faire bien plus. Alors encore une fois, j’élude, et lui offre une réponse honnête mais édulcorée. « J’ai un master en événementiel en fait pour être tout à fait exacte. Mais je suis partie vivre à Sydney pendant deux ans et j’ai dû revenir cet été. Pour l’instant je cherche toujours un emploi ici à Brisbane. » Je grimace, avant de recomposer un sourire et de tenter de faire passer ça pour de l’ironie. « Donc je suis un peu en pause en ce moment. Mais cela ne fait que trois mois, alors... J'essaye de ne pas me faire de soucis. » Je vis chez mes parents à vingt-cinq ans parce que sans travail à temps plein c’est tout ce que je peux me permettre, bien sûr que je me fais du soucis. « Et vous ? C’est à Londres que vous avez créé votre entreprise si mes souvenirs sont bons ? » Non pas que j’ai relu l’historique de la compagnie il y a quelques jours seulement sur internet… « Pourquoi être rentrée ? Les gens ont cessé de se marier au Royaume Uni ? » J’espère que je ne suis pas indiscrète mais devant elle, je me sens pousser des ailes et l’envie de faire preuve d’un peu de répartie. Ce n’est surement pas grande chose par rapport aux gens qu’elle doit côtoyer au quotidien, mais sans trop savoir pourquoi j’en envie de faire bonne impression.

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(#)Ven 22 Nov 2019 - 21:38

Lost in the echo
evelyn pearson & @lucia whitemore

On ne s'y faisait jamais, à l'attention décuplée des autres, aux regards scrutateurs par-delà le troisième mur de la décence, celui derrière lequel chacun est en droit de vouloir se cacher pour se protéger. Evelyn avait grandi sous le feu des projecteurs, elle n'avait pas eu droit à ce privilège ; pas parce qu'elle avait un talent particulier, loin d'être l'enfant prodige qu'aurait tant aimé élever sa mère, convaincue de pouvoir la modeler comme ça la chantait, mais bien à cause du nom qu'elle portait – le nom d'un homme disparu, une légende intouchable qui, pour elle, répondait tout simplement au petit nom de papa. Aussi, c''était étrange d'être ainsi estimé par une certaine catégorie de personnes sous le prétexte qu'elles connaissaient son père, et les fois où elle s'était fait prendre aléatoirement à partie, gentiment ou pas, au détour d'une rue par exemple, se comptaient en dizaine de fois. En vérité, ça avait fait partie de son lot quotidien à une époque. Elle n'aimait pas ça, ça lui donnait la sensation erronée d'être spéciale, de mériter qu'on s'intéresse à elle, et jamais pour les bonnes raisons. Cet intérêt, c'était aussi malsain que destructeur, mais elle avait eu assez de force de caractère pour tourner sa peur d'être alpaguée de la sorte en un avantage qu'aucun des membres de sa famille n'avait. Grâce à son besoin d'anonymat, Evie s'était faite toute seule.
Quitter l'Australie lui avait permis d'envisager sa vie comme elle l'avait toujours voulu, et la solitude relative à sa prise de distance avec sa famille et son pays natal lui avait fait prendre de la hauteur sur le cercle très fermé duquel elle venait. Elle n'était qu'une fille de, et cette idée précise, c'était ce qui l'avait tant fait travailler pour mériter autre chose que d'être placée dans la case peu glorieuse du népotisme. Ses sœurs s'y complaisaient, ce n'était pas son cas – et désormais, on l'alpaguait pour autre chose que pour son nom. C'était une fierté qui ne manquait pas de la faire sourire, mais dont elle amenuisait l'effet pour ne pas paraître plus présomptueuse qu'elle ne l'était.
Qu'il était doux ce sentiment d'être interpellée pour son travail et pas pour son nom. C'était bien souvent ce qui l'encourageait à se montrer bienveillante avec ses interlocuteurs. Bien qu'elle ne se forçait jamais véritablement, surtout pas quand la personne qui se présentait à elle était aussi charmante que la jeune femme qu'elle avait sous les yeux.

"J'ai toujours dit que le sport était une escroquerie. Vous devriez vous contenter de prendre les transports en commun, c'est plus sûr." répondit-elle à Lucia qui l'informa de sa chute à vélo après qu'elle se soit inquiétée de la voir arborer un plâtre, et tandis qu'elle laissait un sourire poindre et creuser sa joue, elle n'explicita pas sa pensée à propos des activités sportives ; elle préférait perdre son temps à autre chose, elle n'avait rien à dire de bon à ce sujet. Ce fût d'ailleurs dans cette optique, mais pas que, qu'elle se laissa guider par l'expertise de la jeune femme concernant la carte du café dans lequel elles se trouvaient, et dans lequel elle avait travaillé, déjà prête à la remercier par une douceur qu'elle la laisserait choisir et qu'elle lui offrirait volontiers, touchée par la façon dont elle s'était présentée à elle.
Elle lui sourit un peu plus fort, inclinant la tête dans une expression grande-dame qu'elle accompagna par quelques mots "Je ne dirais rien à personne, croix de bois." Elle se signa, et jeta par-dessus son épaule la clef invisible d'une foi sur laquelle elle ne comptait plus depuis des années, pour faire bonne mesure. Elle insisterait plus tard pour régler la note de leur consommation, pour l'heure elle dit au jeune serveur qui s'approcha de leur table "La même chose que tout à l'heure. Et mettez-nous un mille-feuille et une part de cake au citron, j'ai entendu dire qu'ils étaient fameux." Un clin d'œil se perdit en direction de la blonde vers qui elle retourna toute son attention.

Posant les mains sur le bord de la table, elle repoussa son carnet de croquis qu'elle avait fermé quelques instants plus tôt, prête à assouvir la curiosité qui s'était illuminée dans son regard à la seconde où la jeune femme avait mentionné la conférence à laquelle elle avait participé quelques années plus tôt. S'en suivit une question sur ses progrès dont la réponse fit pencher la tête à l'organisatrice de mariage qui, les yeux braqués sur le doux visage de Lucia, eut un léger tressaillement "Ce moment de flottement après l'obtention du diplôme… mais je salue votre choix de master. C'est un domaine en pleine expansion, vous avez un panel extraordinaire qui s'offre à vous. Vous aimeriez vous lancer sur quel terrain exactement, vous avez quand même quelques pistes ?" Elle roula ses lèvres l'une sur l'autre, l'œil se plissant en repensant à l'annonce qu'elle avait publié quelques semaines plus tôt et qui la tourmentait un peu, au demeurant. Elle joignit ses mains devant elle après avoir dégagé de nouveau une mèche de cheveux de son visage hâlé "Vous avez raison. Le temps, c'est important dans l'élaboration d'un projet. On a tendance à se précipiter pour rentrer dans la vie active, mais répondre à la pression sociale, c'est une erreur… enfin à mon avis. Je peux vous dire un secret, Lucia ?" chuchota-t-elle doucement, n'attendant pas que Lucia lui appose son assentiment "Moi aussi j'ai erré pendant quelques temps avant de me lancer. C'est normal. Vous y arriverez, faites-vous confiance." Loin d'être friande des confidences, Evelyn consentait parfois à partager ce genre de choses pour encourager les plus jeunes – ça lui donnait des allures de grande sœur parfaite… ironique, quand on savait qu'elle avait déserté sa sororité pour se créer son propre destin.
Elle se recula, laissant l'espace qu'elle avait momentanément comblé pour prendre sens des interrogation de Lucia. Un rire s'échappa de ses lèvres "Exact, vous avez bonne mémoire." Des félicitations qu'elle accompagna d'un petit regard au travers de ses longs cils maquillés, non sans quitter le sourire qui fendait son visage "Depuis Harry et Meghan, le mariage n'a jamais eu autant de succès… il était simplement temps que je rentre au pays, je suis née ici." précisa-t-elle en toute simplicité, mettant de côté la possibilité que Lucia le sache déjà ; il lui semblait que l'historique de sa famille avait été survolé lors de la conférence à laquelle elle avait participé. Elle ne s'y appesantit pas, reprenant assez rapidement "Alors Sydney, vous dites ? Vous n'y avez pas trouvé ce que vous cherchiez si vous êtes de retour ici, j'imagine ?" Un peu d'indiscrétion en retour. C'était de bonne guerre, non ?

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(#)Sam 23 Nov 2019 - 20:15

Lost in the echo
Lucia Whitemore & @Evelyn Pearson LUCIA&EVELYN ► Lost in the echo 873483867

Maintenant que je lui là je me trouve idiote, de l’avoir approchée sans plus réfléchir que ça à ce que j’allais lui dire, en prenant le risque évident de la dérangée. Elle était seule dans un café, un petit carnet ouvert sous les yeux, évidement qu’elle était en train de travailler avant que je ne chamboule son après-midi, et son temps, je n’en doute pas, était certainement bien plus précieux que le mien. En même temps, difficile de faire plus inutile pour la société qu’une jeune femme momentanément au chômage et un bras dans le plâtre, qui vit chez ses parents de surcroît. A déjà d’être un tant soit peu productive je ne suis même pas capable d’empêcher ceux qui le sont de bosser, et je le réalise alors que j’arrive à sa table, confuse et ne sachant plus trop où me mettre. Mais elle semble d’une rare douceur, et d’une rare gentillesse puisqu’au lieu de me remercier poliment et de me congédier, elle semble réellement apprécier mon intervention et me sort de mon malaise, me proposant de m’asseoir et entamant à ma place la conversation, finalement. Silencieusement je la remercie, et observe avec une fascination à peine dissimulée comment elle parvient si facilement à prendre la maîtrise de la conversation, me parler comme si nous étions des amies de longue date, et comment en trouve de quoi meubler et quoi me raconter. De mon côté j’ai beau être une bavarde cela cache souvent plus un manque de confiance en moi qu’autre chose – je remplis les blancs parce que j’ai peur de passer pour une idiote sinon, autrement dit – j’ai beau être le genre de jeune fille bien élevée et agréable en société, il me faut souvent du temps avant de sortir de ma coquille, et je suis loin de le faire avec l’aisance de la brune.

« "J'ai toujours dit que le sport était une escroquerie. Vous devriez vous contenter de prendre les transports en commun, c'est plus sûr. » Je suis une hyperactive et sa phrase me fait sourire. Il ne s’agit pas de ma blessure la plus pénible, ni la plus longue à rééduquer et la dernière je me l’étais bien faite en pratiquant la danse classique. Celle-ci aurait pu être entrainée par une mauvaise chute en surf ou wakeboard, pendant l’un de mes joggings matinaux, mais non, je rêvassais un peu trop seulement au moment de me rabattre sur la voix de droite, alors que je roulais au ralenti en plein embouteillage. Ce genre d’aventure ridicule ne peut arriver qu’à moi, si bien que je préfère ne pas la contredire, et lui laisser imaginer quelque chose de bien plus spectaculaire. Encore une fois je suis en terrain connu, dans un café dont je connais tous le personnel et la carte par cœur, pourtant c’est elle qui appelle le serveur pour commander, avec une aisance relationnelle que j’aimerais posséder. « Je ne dirais rien à personne, croix de bois. » J’esquisse un sourire en ramenant une mèche de cheveux derrière moi oreille. « Merci. » Si je me contente de commander un café Evelyn elle semble décidée à suivre mes conseils. « La même chose que tout à l'heure. Et mettez-nous un mille-feuille et une part de cake au citron, j'ai entendu dire qu'ils étaient fameux. » Elle m’adresse un clin d’œil et je ne peux m’empêcher de lui retourner un sourire radieux, un peu grisée par le fait qu’elle s’intéresse à moi, suive mes conseils, et plus globalement par l’attention qu’elle me donne.

Mais le sujet suivant, tout naturel si l’on prend en compte la raison pour laquelle je l’ai approchée, m’est par contre bien moins agréable. Parce que je sais qu’il ne me met pas en valeur, parce que je suis consciente que cela me force à avouer à demi-mots mes échecs. Alors je prends des pincettes, tente de tourner les choses d’une jolie façon, mais me vois de toute façon bien obligée d’admettre que malgré les deux années qui me séparent pourtant de la fin de mes études, je n’ai pas décroché le moindre boulot dans ma branche. Assez évident, quand on sait que je n’ai postulé à aucune annonce dans ce sens. « Ce moment de flottement après l'obtention du diplôme… mais je salue votre choix de master. C'est un domaine en pleine expansion, vous avez un panel extraordinaire qui s'offre à vous. Vous aimeriez vous lancer sur quel terrain exactement, vous avez quand même quelques pistes ? » Un domaine en pleine expansion. Il vaudrait mieux qu’elle ne se retrouve jamais dans la même pièce que ma mère, puisque la raison que je lui donne quand à ce léger flottement qui dure depuis plus de deux ans, c’est ma difficulté à trouver un emploi dans une branche que je lui vends comme assez bouchée. « A vrai dire pas encore. Le souci pour être honnête c’est qu’aujourd’hui j’arrive mal à dresser un portrait de l’offre qui me conviendrait, et quand je tombe sur un annonce qui m’intéresse j’ai rarement les compétence ou l’expérience requise. » Ou je ne crois pas les avoir en tout cas. C’est comme l’offre de la brune, celle que j’ai repérée, sur laquelle je me suis attardée avant de secouer la tête et de l’écarter. Elle doit recevoir des dizaines de candidatures bien plus intéressantes que la mienne. « Vous avez raison. Le temps, c'est important dans l'élaboration d'un projet. On a tendance à se précipiter pour rentrer dans la vie active, mais répondre à la pression sociale, c'est une erreur… enfin à mon avis. Je peux vous dire un secret, Lucia ? » Elle baisse d’un ton, se penche légèrement, et en instant me donne l’impression d’être privilégiée. Alors vivement je hoche la tête, consciente d’avoir exactement la réaction qu’elle attendait. « Moi aussi j'ai erré pendant quelques temps avant de me lancer. C'est normal. Vous y arriverez, faites-vous confiance. » Elle cherche surement à être polie, rien de plus, mais sans trop savoir pourquoi je me sens rassurée par ces mots. Mais rapidement je secoue la tête, un sourire triste sur les lèvres. « J’ai peur d’en avoir perdu un peu trop du temps. J’ai autant de qualifications que ceux qui sortent d’université mais un trou béant de deux ans dans mon CV, le choix me semble vite fait pour un employeur. » Et pourtant des qualités j’en ai, et elles pourraient m’être utiles si j’osais essayer de les mettre en avant. Travailleuse et appliquée, j’ai toujours été une jeune femme consciencieuse, avec cette volonté de bien faire qui pourrait être bien plus exploitée qu’en servant des macchiatos la journée et des pintes de bière le soir. Je suis douce, et je sais écouter et rassurer, autant d’atouts précieux dans n’importe quel travail tourné vers l’humain. Mais ce sont mes défauts que je vois, eux qui me crèvent les yeux et me paralysent. « Difficile de vendre ma maîtrise de la préparation du macchiato dans mon domaine d'étude. »

« Exact, vous avez bonne mémoire. » J’ai surtout regardé son site internet il n’y a que quelques jours, mais je crois que je m’en serais souvenue sans ça. Son histoire n’avait rien d’anodine et avait beaucoup plus fait sens pour moi que celles d’autres intervenants pompeux qui avaient pris la parole pendant ces cours de management. « Votre intervention était bien plus intéressante que la moyenne je dois dire, je m’en souviens beaucoup plus que de celles de la demie douzaine de banquiers ou de tradeurs qui ont pu prendre la parole pendant ce cours. » Un sourire un peu gênée sur le lèvres je lutte contre moi-même pour ne pas porter mes doigts à mes lèvres et ronger mes ongles, chose que je fais habituellement lorsque je suis nerveuse. Un peu de tenue bon sang. « Depuis Harry et Meghan, le mariage n'a jamais eu autant de succès… il était simplement temps que je rentre au pays, je suis née ici. » Il m’a semblé plutôt évident en l’écoutant à l’époque qu’elle avait cherché à se construire seule, alors je ne lui dit pas qu’il faudrait avoir vécu dans une grotte pour ignorer qui elle est, ainsi que ses origines. « La transition n’a pas été trop compliquée ? » La question n’est pas anodine, puisque de mon côté j’ai l’impression d’être de retour à la case départ. Mais je n’ai rien bâti à Sydney, alors qu’elle est revenue grandie et couronnée de succès, pas la queue entre les jambes. « Alors Sydney, vous dites ? Vous n'y avez pas trouvé ce que vous cherchiez si vous êtes de retour ici, j'imagine ? » Je tente de détacher la ville et ces deux dernières années de mon histoire avec Lawrence et ses travers, comme la psychiatre me l’a appris, pour ne pas perdre mes moyens ou pire fondre en larme, et si cela semble marcher, je ne peux masquer un léger changement dans mon ton, signe que le sujet n’est pas mon favori. « J’ai plus perdu que trouvé à vrai dire, il était temps que je prenne un nouveau départ. » J’efface mon sourire un peu triste, et le serveur qui vient déposer nos boissons et les deux pâtisseries commandées par la jeune femme m’aide à me recomposer. « Je suis également née ici, ça a été l’occasion de voir du pays après tout. » Je pose ma main sur ma tasse, constatant avec soulagement qu’elle ne tremble pas. J’ai tout sauf envie de paraître fragile à quelqu’un comme la brune en face de moi.

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Lost in the echo
evelyn pearson & @lucia whitemore

"Je n'en suis pas si sûre, Lucia." commença Evelyn. Elle avait les sourcils si subtilement froncés que c'en était imperceptible. L'éclat de désarroi qu'elle lisait dans la façon de se tenir de la jeune femme qu'elle avait en face d'elle la forçait à davantage s'impliquer dans cette conversation qu'elle semblait déjà mener d'une main de maître. Charmée par l'approche toute douce de son interlocutrice, elle ressentit soudain l'envie de partager point de vue sur le sujet, probablement pour éclaircir le ciel des possibilités de Lucia avec qui elle échangea un regard avant de reprendre avec bienveillance "On demande aux jeunes diplômés une expérience professionnelle qu'ils n'ont pas bien souvent, parce que se lancer dans un cursus universitaire de cette envergure demande une implication irréprochable pour obtenir de bons résultats. Et par conséquent, pour obtenir son diplôme." Lancer Evelyn sur ce genre de sujet, c'était prendre le risque de la voir endosser le rôle de chef d'entreprise qu'elle était devenue avec le temps. Elle s'était faite à la force de sa volonté, apprenant sur le tard à déceler les contradictions du monde du travail et à les combattre pour mieux sortir du lot. C'était dans ces moments-là qu'elle s'apercevait qu'elle tenait plus de sa mère qu'elle ne le pensait : elle avait le même talent qu'elle pour attirer l'attention de tout un auditoire. Du ton de sa voix jusqu'aux gestes qu'elle choisissait d'exécuter, c'était instinctif toutefois, et si dans le passé elle n'aurait jamais imaginé terminer avec une carrière comme celle qu'elle menait désormais, il y avait pourtant quelque chose de complètement inné dans sa façon de l'envisager aujourd'hui. En d'autres termes, elle était faite pour ça.
La tête légèrement penchée sur le côté, elle verrouilla définitivement son regard à celui de Lucia, continuant son laïus avec cette maîtrise qu'elle avait et qui, d'un certain côté, forçait le respect "Or, prendre un travail à côté, c'est difficile. Ca demande de faire des sacrifices et de venir rogner le planning de révisions des étudiants… et nous savons toutes les deux que les stages en entreprise sont une arnaque à échelle grandeur nature." Elle sourit de façon entendue, un peu comme si elle partageait une anecdote indicible avec la jeune femme qui avait probablement connu les déboires du stage en entreprise. On n'apprenait jamais vraiment dans ces cas-là, si ce n'était à apporter des cafés à bonne température et à repasser des chemises dès 6h00 du matin pour le patron bougon qui daignait à peine laisser échapper un s'il te plaît et un merci après sa requête – et la paye était mauvaise. Personne n'en ressortait jamais vraiment grandi, ça avait même tendance à en écœurer certain.
Elle prit une inspiration, joignant ses doigts les uns aux autres, puis elle se recula de la table pour que son dos vienne élégamment cogner contre le dossier de sa chaise sur laquelle elle se rassit convenablement " En fait, c'est un peu le serpent qui se mord la queue. On recherche des jeunes gens compétents, mais aussi des jeunes gens avec une expérience professionnelle de deux ans et plus… des années qu'ils ne peuvent décemment pas avoir au compteur puisque pendant ce temps-là, ils ont préparé leur diplôme dont ils ont indiscutablement besoin pour postuler ; vous voyez où je veux en venir ?" Son regard se grossit au fur et à mesure, traduisant combien elle trouvait ce principe totalement idiot et hypocrite de la part des recruteurs. Elle, elle ne basait plus ses critères d'embauches sur le diplôme de ses futurs collaborateurs. Elle était bien sûre obligée de mettre en ligne des annonces classiques, avec des attentes classées, et des critères assez ouverts néanmoins, elle s'était toutefois aperçut qu'elle se laissait plutôt porter par le feeling de la première rencontre. Avec Neal, c'était de cette façon que ça avait collé, et pas parce que son curriculum vitae débordait d'expériences, ou que son cursus universitaire reflétait son talent pour le management – c'était sa gouaille, son culot et peut-être un peu son charme british qui avait remporté la partie. Elle laissa filer un sourire, imposant le chemin inverse à son buste qui s'inclinant légèrement par-dessus la table pendant qu'elle revenait mentalement sur les propos de Lucia.
Assez vite, Evie le matérialisa par la parole, déroulant sa pensée avec les sourcils levés et les cils battant le rythme de ses paroles qu'elle prononça en prenant garde de bien rester claire "En toute honnêteté, vous avec exactement les mêmes chances qu'une jeune femme qui vient de recevoir son diplôme. Je dirais même que vous avez un petit avantage. Vous vous êtes aperçue que ce n'était pas aussi évident d'entamer une carrière dans un domaine qu'on a pourtant étudié. Vous devriez en faire une force plutôt qu'une faiblesse, Lucia." finit-elle par lui conseiller, et tandis qu'elle s'agitait, sa main droite s'abattit, paume vers le haut, dans l'espace qui les séparait. Elle haussa les épaules, souriant toujours lorsqu'elle ajouta "Allez-y au culot. Présentez-vous là où on ne vous attend pas, et faites bonne impression. Ca passera ou ça cassera, mais vous aurez la satisfaction d'avoir essayé de sortir de l'errance dans laquelle vous vous complaisez – ou pas, vous semblez motivée à faire quelque chose de vos deux bras… enfin, de votre bras en l'occurrence, mais vous guérirez vite." ponctua-t-elle avec esprit avant de chasser, d'un geste de la main, les compliments de Lucia qui lui firent baisser brièvement la tête.

Juste le temps de rassembler ses esprits et de décider qu'il valait sans doute mieux qu'elle ne s'attarde pas sur son ressenti à propos de son retour en ville. Bien sûr que n'avait pas été facile, les souvenirs étaient les pires choses à refouler, mais elle était sur un chemin plus ou moins déblayée désormais, et elle ne risquait plus grand-chose. Personne ne connaissait vraiment la femme qu'elle était devenue, et comme elle avait fait en sorte de complètement sortir du carcan dans lequel on l'avait forcé à évoluer, elle n'avait définitivement plus de compte à rendre à personne, si ce n'était à elle-même. Coinçant une mèche de cheveux derrière son oreille, elle releva la tête "J'avais oublié à quel point il pouvait faire chaud en été… autrement, j'ai retrouvé mes marques assez rapidement. De toute façon, je n'ai pas eu trop le choix, mon entreprise dépendait du temps que je mettrais à me réacclimater. Je suis sur le bon chemin, je crois que je me débrouille assez bien." lui répondit-elle alors, élusive sans l'être totalement non plus. C'était toujours plus facile de s'intéresser aux autres, ça lui évitait de devoir partager des choses avec lesquelles elle n'était pas très à l'aise, malhabile avec ses propres émotions. Aussi elle retrouva vite le fil de la conversation, et pendant qu'elle ressentit un net changement dans le ton de Lucia, elle finit par lui dire "Vous savez, vous devriez passer à l'agence un de ces quatre." Aussi naturellement que l'attitude qu'elle empruntait pour dispenser ses bons conseils, elle jugea que l'annonce qu'elle avait publiée récemment pouvait intéresser la jeune femme. Dans cette optique, tandis que Dan venait déposer leur commande devant elles et qu'elle le remercia d'un sourire éclatant, elle lui expliqua "J'ai récemment publié une annonce pour de l'assistanat. Je ne vous promets rien, mais si l'idée d'évoluer dans ce milieu peut se rapprocher du portrait que vous aimeriez dresser de l'offre qui vous conviendrait le mieux, et qu'un essai à mes côtés vous intéresse, je peux ajouter votre nom à la liste de ceux à qui je dois faire passer un entretien." En même temps que ses mains trouvèrent le corps de sa tasse chaude, elle pencha de nouveau la tête sur son épaule, cherchant les yeux de la jeune femme qu'elle relança aussitôt "Qu'est-ce que vous en dites ?"

they said the end is coming, everyone's up to something, i find myself running home to your sweet nothings. outside, they're push and shoving, you’re in the kitchen humming, all that you ever wanted from me was sweet nothing.

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Lost in the echo
Lucia Whitemore & @Evelyn Pearson LUCIA&EVELYN ► Lost in the echo 873483867

« Je n'en suis pas si sûre, Lucia. » Mes joues prennent une jolie teinte rose, comme à chaque fois que l’on me contredit, que l’on me prend à défaut en m’expliquant que j’ai tort. Je doute forcément, parce qu’il n’en faut pas plus pour que je perde ma maigre confiance en moi, celle que j’essaye de bâtir, celle que j’essaye de simuler tant que je ne l’ai pas acquise. Mais je bois ses paroles, sans l’ombre d’un doute, parce qu’elle m’impressionne trop pour que je ne me vexe que l’on remette mes paroles en doutes, elle m’impression trop pour que je fasse autre chose que l’écouter comme si elle détenait la vérité absolue. « On demande aux jeunes diplômés une expérience professionnelle qu'ils n'ont pas bien souvent, parce que se lancer dans un cursus universitaire de cette envergure demande une implication irréprochable pour obtenir de bons résultats. Et par conséquent, pour obtenir son diplôme. » Sans compter que j’ai envie d’y croire à la jolie histoire qu’elle raconte. J’ai envie de croire que malgré mes errances il me reste encore une petite chance d’arriver à trouver un boulot, un vrai, pas un travail de serveuse, un qui soulage mes parents, à défaut de les rendre fiers, puisque sur ce dernier point j’arrive loin derrière la sœur en passe de devenir psychiatre et la pharmacienne qui reprendra à coup sûr les rênes de l’enseigne familial. Un boulot dont ils n’auront pas honte de parler à leurs proches, pour devenir la fille de laquelle il n’auront pas honte de parler à leurs proches. « Or, prendre un travail à côté, c'est difficile. Ça demande de faire des sacrifices et de venir rogner le planning de révisions des étudiants… et nous savons toutes les deux que les stages en entreprise sont une arnaque à échelle grandeur nature. » Je n’avais jamais vu les choses comme ça. J’ai pris un travail à côté parce que j’avais besoin de ressentir un sentiment d’indépendance financière, malgré des parents qui possèdent une bonne situation financière et qui nous ont toujours aidées quand nous en avions besoin mes sœurs et moi. Je souris, ayant connu mon lot de stage inutiles, ceux qui me faisaient regretter de ne pas être en train de prendre mon servie au Pelican’s, parce que là au moins le temps passait vite et la paye était plus intéressante. « J’ai toujours pensé que c’était une vaste blague, un moyen de justifier les financements des entreprises. J’ai plus appris ici que pendant n'importe quel stage. » Je hausse les épaules, ne prenant pas forcément la pleine mesure de ce que je dis, de ce que m’ont apportées mes années à enchainer des boulots ingrats à Sydney. A m’affirmer, à décrocher le téléphone pour passer des commandes, à être à l’aise et souriante même lorsque j’étais stressée, fatiguée, quand j’avais de la peine. A m’intéresser aux gens, à leurs histoires, à ceux qui les poussait à se retrouver à avoir besoin d’une dose faramineuse de sucre un samedi après-midi. C’est là-dedans que je m’épanoui, le contact avec les autres, c’est même là que je suis douée, malgré ma timidité maladive du premier abord. « Je crois que je n’avais jamais vu les choses comme ça. J’aime beaucoup cet endroit parce que je m’y sens bien, parce que j’aime prendre le temps d’échanger avec les clients, d’apprendre à connaître les histoires et commandes des habitués. Mais… Difficile de valoriser ça sur un CV. » Jusqu’ici mon expérience m’avait enfermée dans ce genre de petits boulot. Les quelques candidatures que j’avais envoyés à des entreprises plus sérieuses n’avaient jamais donné quoi que ce soit. « En fait, c'est un peu le serpent qui se mord la queue. On recherche des jeunes gens compétents, mais aussi des jeunes gens avec une expérience professionnelle de deux ans et plus… des années qu'ils ne peuvent décemment pas avoir au compteur puisque pendant ce temps-là, ils ont préparé leur diplôme dont ils ont indiscutablement besoin pour postuler ; vous voyez où je veux en venir ? » Je hoche la tête sans répondre, profitant de chaque parcelle de sagesse que je peux gagner à son contact. « En toute honnêteté, vous avec exactement les mêmes chances qu'une jeune femme qui vient de recevoir son diplôme. Je dirais même que vous avez un petit avantage. Vous vous êtes aperçue que ce n'était pas aussi évident d'entamer une carrière dans un domaine qu'on a pourtant étudié. Vous devriez en faire une force plutôt qu'une faiblesse, Lucia. » Je grimace, renouant finalement avec la réalité. « Allez-y au culot. Présentez-vous là où on ne vous attend pas, et faites bonne impression. Ça passera ou ça cassera, mais vous aurez la satisfaction d'avoir essayé de sortir de l'errance dans laquelle vous vous complaisez – ou pas, vous semblez motivée à faire quelque chose de vos deux bras… enfin, de votre bras en l'occurrence, mais vous guérirez vite. » Le culot n’est pas une qualité que je possède, pas que je pense posséder. Il m’a fallu une sacrée dose de courage ne serait-ce que pour me convaincre de l’approcher aujourd’hui. Et je me suis surprise, parce que je sais qu’en temps normal je l’aurais simplement observée de loin, tentant de trouver l’audace d’aller lui parler, regrettant finalement de ne pas l’avoir eue au moment où la brune se serait levée pour quitter le café. Mais assez de m’enfoncer et de me descendre, je ne peux admettre ça face à elle. « Merci. » J’esquisse un sourire en coin. Ce n’est pas que je me complais dans ma situation, c’est qu’en changer me terrifie, j’ai toujours été terriblement mauvaise lorsqu’il s’agit de prendre des décisions. « La peur de manquer une opportunité, de se fermer des portes, c’est un peu le fléau de ma génération je crois. » D’un air pensif je regarde dans le vide, avant de tourner à nouveau mon visage vers elle. « C’est de capacité de décision que je manque, pas de motivation où de bonne volonté. » Je marque une pause, avant de reprendre. « Mais merci pour vos précieux conseils. » Je les apprécie, vraiment.

« J'avais oublié à quel point il pouvait faire chaud en été… autrement, j'ai retrouvé mes marques assez rapidement. De toute façon, je n'ai pas eu trop le choix, mon entreprise dépendait du temps que je mettrais à me réacclimater. Je suis sur le bon chemin, je crois que je me débrouille assez bien. » Je lui renvoie un sourire poli, parce que je ne vois pas quoi répondre, tant nos routes me semblent éloignées. Et bien sûr que c’est elle qui est sur le bon de chemin, elle est à mes yeux un exemple de réussite, et le pari qu’elle a fait de s’expatrier pour se développer à l’étranger, je serais incapable de le faire, je crois en tout cas. Je ne me complais pas dans mon inactivité, mais ce qui est familier me rassure, et j’ai toujours eu besoin d’être rassurée. « Vous savez, vous devriez passer à l'agence un de ces quatre. » Je suis incapable de masquer ma surprise, et porte ma tasse à mes lèvres, pour me donner une contenance. « J'ai récemment publié une annonce pour de l'assistanat. Je ne vous promets rien, mais si l'idée d'évoluer dans ce milieu peut se rapprocher du portrait que vous aimeriez dresser de l'offre qui vous conviendrait le mieux, et qu'un essai à mes côtés vous intéresse, je peux ajouter votre nom à la liste de ceux à qui je dois faire passer un entretien. » J’ai du mal à croire ce que j’entends. J’ai l’impression que j’hallucine, que mon cerveau me fait entendre ce que je désespère d’entendre que quelqu’un est prêt à envisager l’idée de me donner une chance. Je lutte aussi, pour empêcher mes joues de passer du rose au rouge carmin, peu habitée à ce type d’attention, peu habituée à être vue. « Qu'est-ce que vous en dites ? » Respire Lucia. Il faut que je ralentisse les battements de mon cœur, sans quoi ce qui sortira de ma bouche de ressemblera qu’une suite de son sans sens. Alors je pose ma tasse, et m’efforce de ne pas bégayer. « Je… » Allez, un peu mieux que ça. « Ce serait avec plaisir. » Je sais qu’elle ne m’a pas proposé une place, que ce qu’elle m’offre est simplement une chance de défendre mon dossier, de plaider mes compétences, mais c’est plus que ce qu’on m’a offert jusqu’ici dans le milieu. « Et bien sûr que l’opportunité m’intéresse, cela va sans dire. J’admire votre parcours et je suis persuadée que travailler avec vous m’apporterai énormément. » Malgré ses paroles je reste persuadée qu’elle partira en courant en posant les yeux sur mon CV, alors il vaut mieux que j’évite de m’emballer. C’est là que je suis censée me vendre, vendre ce que moi je pourrais apporter comme pierre à l’édifice ? Je reste pétrifiée, incapable de le faire. Alors j’improvise. « Je ne m’y attendais pas, mais je vous remercie, vraiment. » Je ne sais pas ce que j’ai pu dire pour qu’elle me fasse cette proposition. A-t-elle décelé quelque chose, ou bien lui ai-je juste fait de la peine, assez de peine pour qu’elle décide de me donner un peu d’espoir ? « Quand voulez-vous que je vienne ? » Je lui adresse un sourire que je veux amusé. « Un peu mieux préparée, cela va sans dire. » Et ce n’est pas gagné.

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Lost in the echo
evelyn pearson & @lucia whitemore

"Ça ne devrait pas être si compliqué pourtant. C'est sans doute affreusement cliché, mais il n'y a pas de sous-métiers." fit-elle en rebondissant sur les propos de Lucia. En effet, c'était un cliché que seule une fille de bonne famille comme elle pouvait déclamer sans rougir. Pourtant, malgré ces bons sentiments qu'elle éructa avec la naïveté d'une héroïne de série B, dans le milieu d'Evelyn, chacun faisait carrière – même s'il y avait bien souvent l'appui de papa et maman derrière tout ça. Sa cousine Lara, ce condensé de liberté aux cheveux magenta, s'était elle-même laissée charmer par l'éventualité de profiter des avantages liés au nom qu'elle portait pour mieux se reprendre quelques années après, et entrer dans la vraie vie ; celle où il fallait relever ses manches au-dessus des coudes et mettre les mains dans le cambouis pour espérer avoir de quoi picorer au moins une fois dans la journée. C'était de ça, du trop charmant népotisme, qu'Evelyn avait voulu se départir, refusant tout net de devenir la copie conforme de ses sœurs qui n'ambitionnaient rien d'autre que de garder leur petit confort adéquat, et faire partie du rang de La Fondation. Elle n'avait jamais su si c'était par paresse ou par manque d'ambition, elle n'avait jamais cherché à le savoir à vrai dire, toujours est-il qu'elle trouvait ça affreusement triste qu'elles se soient toutes les trois senties obligées de répondre aux attentes de leur mère quand elles auraient été capables de bâtir leur propre empire. Enola, Ester et Ethel n'étaient pas idiotes, elles étaient brillantes et caractérielles… elles avaient tout pour elles, à part le sens des réalités, et c'était bien dommage. Elles avaient choisi des voies qui leur permettraient de terminer auprès de Celie qui se faisait un plaisir non-dissimulé d'accepter leur candidature dans l'idée de parfaire l'image d'harmonie familiale qu'elle avait tant cultivé au fil des années, ruinant au passage les valeurs de travail acharné que Kai aurait tant aimé inculquer à sa descendance s'il avait toujours été en vie aujourd'hui.
Ce n'était pas étonnant qu'à côté d'elles, Evie passait pour la rebelle de service tandis que dès son plus jeune âge, elle avait démontré un intérêt vivace pour le monde artistique, et pas pour celui des affaires. La roue avait tournée certes, il restait qu'elle n'avait toujours pas répondu au chant entêtant de sa génitrice qui n'avait pas boudé son plaisir lorsqu'elle avait appris que sa fille s'était tournée vers le monde de l'événementiel. Tout comme sa sœur aînée, un hasard qu'elle avait trouvé on ne peut plus savoureux. Dans le regard de la matriarche, on pouvait déceler la lueur de victoire quand elle se répétait intérieurement que ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle n'abandonne l'organisation de mariages pour celle des soirées mondaines qu'elle saurait mettre à profit, remportant cette longue bataille commencée il y avait bien des années. Dans tes rêves, Celie.
"Et puis entre nous, le contact avec les clients, l'envie d'en connaître davantage sur leur histoire… ce sont des points importants à acquérir pour réussir. Dans mon corps de métier en tout cas." notifia-t-elle à voix haute, sortant de sa courte rêverie et appréciant les remerciements de Lucia avec un signe de tête. Elle avala sa gorgée de café avec rapidité. Pendant qu'elle agitait sa main devant sa bouche, un peu comme si elle s'était brûlée la langue alors qu'il n'en était rien, elle tint à lui dire "Ça se voit que vous en voulez. On a tous tendance à couver jalousement nos conseils en pensant que ça nous rendra plus fort… je ne vois pas les choses de cette façon. J'aurais aimé qu'on me tende la main lorsque j'ai commencé dans ce milieu, c'est toujours rassurant, alors…" Elle posa sa tasse sur la table, tendit sa main en travers de cette dernière pour que Lucia la saisisse. Avec un sourire à la Pearson, la tête légèrement inclinée sur le côté, et le haut de son nez piqué de tache de rousseur retroussé, elle ajouta "J'assure vos arrières, Lucia." Et la poignée de main qu'elles échangèrent était assez ferme pour être professionnelle, mais assez douce aussi pour diffuser toute la bonne volonté que la jeune femme mettait à vouloir indiquer le chemin à cette brebis qui s'était égarée près de son petit près.

Dans la foulée, et dans une continuité qui laissait présager à Evie qu'elle venait probablement d'accomplir sa bonne action de l'année, la proposition qu'elle lui fit vint poser un voile lumineux sur le conversation. La réaction de Lucia fit naître un rire au fond de la gorge de la brunette qui, s'étant de nouveau emparée de sa tasse, lorgnait de plus en plus sur les pâtisseries que Dan avait posé en face d'elles deux. Elle abandonna sa contemplation pour de nouveau glisser ses yeux subtilement ridés par ses sourires droit sur son interlocutrice qui lui promit une préparation plus poussée de l'entretien qui s'annonçait "J'ai longtemps travaillé avec le même assistant. Il a préféré rester à Londres après mon départ, mais si vous voulez grapiller quelques conseils supplémentaires pour préparer votre entretien, ça me ferait plaisir de vous mettre en contact avec lui, et ce le plus rapidement possible." Neal était la passerelle immanquable entre Evelyn et les candidats. Alors qu'il lui avait sciemment fait savoir qu'il ne voulait plus travailler avec elle désormais, elle se sentait toujours obligée de l'inclure dans le processus de recrutement, comme si quelque part, ça le pousserait à revoir son jugement à dépasser la rancœur qu'il ressentait pour elle, bien qu'elle fût minime. Il lui manquait, ça transparaissait dans la façon dont elle parlait de lui… comme à cet instant précis – elle s'en aperçut, aussi se racla-t-elle la gorge avec détermination pour ne pas donner l'impression d'être trop affectée par quoi que ce soit "Mis à part l'accent à couper au couteau, c'est une crème qui vous donnera les meilleurs tuyaux pour trouver votre place dans mes petits papiers." ajouta-t-elle en accompagnant ses propos dans geste distrait de la main qu'elle finit par passer dans ses longs cheveux bruns "Je vous en prie. On a toutes les deux à y gagner dans cette histoire et à côté de ça, ça me fait vraiment plaisir de vous aider." Elle avait quelque chose, Lucia. C'était certain… Evie ne réussissait pas à le déterminer pour l'instant, mais c'était bel et bien présent. Suffisamment pour qu'elle cesse de la fixer avec autant d'intensité pour mieux tirer vers elle le carnet qu'elle avait délaissé lorsque la jeune femme s'était présentée à elle. Elle en ouvrit une page partiellement vierge qu'elle consulta en suivant les lignes avec ses ongles impeccablement vernis – ça faisait d'elle quelqu'un de vieux jeu de tenir des journaux de cette façon, mais elle avait appris la calligraphie pour une raison ; elle préférait les stylos aux stylets, c'était un fait. Posant le doigt sur un encart vide de son agenda, Evelyn lui demanda "J'ai un créneau lundi prochain à", par petite habitude, elle vérifia l'heure sur la cadran de la montre qu'elle portait au poignet, et continua sur sa lancée en relevant la tête vers Lucia qu'elle gratifia d'un sourire chaleureux "10H15 tapantes. Ça vous conviendrait ? Sinon je vous positionne à la suite des entretiens que je dois faire passer cet après-midi même. Mais je crains que vous n'ayez le temps de vous préparer comme vous l'entendez."

they said the end is coming, everyone's up to something, i find myself running home to your sweet nothings. outside, they're push and shoving, you’re in the kitchen humming, all that you ever wanted from me was sweet nothing.

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Lost in the echo
Lucia Whitemore & @Evelyn Pearson LUCIA&EVELYN ► Lost in the echo 873483867

« Ça ne devrait pas être si compliqué pourtant. C'est sans doute affreusement cliché, mais il n'y a pas de sous-métiers. » Mes parents, clichés de la famille bienpensante, ont toujours beaucoup aimé répéter ça. J’avais reçu une éducation catholique classique, prêchant la tolérance et la gentillesse, si l’on vous frappe tendez l’autre joue et tout ce qui va avec, mais dans le fond, Elen et Franck Whitemore avaient bien évidement été les premiers déçus que je ne me tourne pas vers des études plus prestigieuses à leurs yeux que celles que j’avais choisie. Difficile de les blâmer, lorsqu’on sait qu’eux avaient eu le choix entre des études de médecine ou de droit, et que mes deux sœurs s’était toutes les deux naturellement dirigées dans une voie similaire à la leur. J’avais rapidement compris que sans être idiote je n’avais pas hérité du génie familial, et que devenir chirurgienne ou avocate était exclu dans mon cas, et à vrai dire je n’avais continue en master que pour les rendre fiers, pour les rassurer sur le fait que non, je ne serais jamais Gabrielle ou Hannah, mais que je n’étais pas une raté vouée à finir sous les ponts non plus. Je n’avais jamais manqué d’ambition, comme je m’en étais pourtant laissé persuader, mais je n’avais jamais eu la moindre confiance en mes capacités d’étude. En ayant grandi dans une famille comme la mienne en tout cas je cultive une certaine forme d’intolérance, même si ma douceur naturelle l’empêche de s’exprimer et m’empêche moi d’exprimer toute forme de véhémence. Voir une femme comme Evelyn réussir dans un domaine proche du mien a tendance à me donner un peu d’espoir, même si je reste persuadée de ne pas avoir un dixième du talent qu’elle a et de l’assurance qu’elle dégage. « Et puis entre nous, le contact avec les clients, l'envie d'en connaître davantage sur leur histoire… ce sont des points importants à acquérir pour réussir. Dans mon corps de métier en tout cas. » Je n’avais jamais vu les choses sous cet angle là pour être tout à fait honnête, me laissant plus porter par les opportunités que je décroche sans avoir à me battre pour elles. « Je suppose oui, je n’y avais pas pensé. » Le fait qu’elle me projette dans son corps de métier me fait monter le rose aux joues, plus encore que le fait qu’elle m’accorde une attention qui me surprend. Je n’ai jamais pensé au domaine de l’organisation de mariages. En vivant avec un musicien j’avais développé ces dernières années une envie de travailler pour une grande salle de concert ou des festivals, mais plus pour me fondre dans le monde de Lawrence que par réelle vocation. Aujourd’hui je ne sais pas ce que je veux faire, mais en grande romantique, celle qui croit aux âmes sœurs, l’idée ne peut que me séduire, même si je me fais du milieu une version certainement très édulcorée. « Ça se voit que vous en voulez. On a tous tendance à couver jalousement nos conseils en pensant que ça nous rendra plus fort… je ne vois pas les choses de cette façon. J'aurais aimé qu'on me tende la main lorsque j'ai commencé dans ce milieu, c'est toujours rassurant, alors… » Elle tend sa main vers moi, un joli sourire sur son joli visage. « J'assure vos arrières, Lucia. » C’est un peu incrédule que j’attrape sa main, maladroitement mais tentant malgré tout de mettre un peu de fermeté dans mon geste. Bien sûr que j’aimerais apprendre d’une femme comme Evelyn, bien sûr que j’aimerais pouvoir passer des heures ici à écouter ses conseils, mais j’ai bien du mal à voir à mon tour ce qu’elle semble voir en moi. « Je… Merci beaucoup. Si j’avais su que la conversation allait prendre cette tournure, j’aurais passé une tenue plus adéquaté, et vous pouvez être sure que j’aurais préparé une liste de questions longue comme le bras. » Je préfère rire de mon naturel bavard, trop bavard lorsqu’on me lance, en grande partie parce que j’ai besoin d’être rassurée, la plupart du temps. « Mais c’est peut-être mieux comme ça, nous y aurions passé l’après-midi et je vous aurais certainement assommée. » Et une femme comme elle a certainement mieux à faire aussi. Je suis sure qu’en me prenant sous son aile comme un petit oiseau, elle ne se doutait pas d’avoir à faire à un spécimen avec les pattes et les ailes cassées.

A nouveau incrédule, je ne peux empêcher la surprise de venir s’inviter sur mon visage lorsqu’elle me propose de me laisser la chance, de me laisser passer des entretiens pour le poste que j’avais moi-même écartée, certaine de ne pas avoir ce qu’il faut pour faire l’affaire. « J'ai longtemps travaillé avec le même assistant. Il a préféré rester à Londres après mon départ, mais si vous voulez grappiller quelques conseils supplémentaires pour préparer votre entretien, ça me ferait plaisir de vous mettre en contact avec lui, et ce le plus rapidement possible. » C’est irréel pour moi ce qu’il est en train de se passer. J’ai l’impression d’être une adulte, qui récupère des contacts et se présente à des entretiens d’embauches. Si je ne l’avais pas croisée aujourd’hui, jamais je n’aurais osé postuler, et prétendre à l’opportunité. « Mis à part l'accent à couper au couteau, c'est une crème qui vous donnera les meilleurs tuyaux pour trouver votre place dans mes petits papiers. » Je tire mon téléphone, pas assez préparée de mon côté pour avoir sur mon petit calepin rose dans lequel je griffonne aussi bien des adresses d’appartements à visiter que les séries et films que je dois regarder. « Avec plaisir, je vous donne mon numéro où vous préférez me confier le sien ? » J’ai déjà dégainé, prêt à prendre note de la moindre information. « Et j’ai assez regardé d’épisode de The Office ou Misfits pour dialoguer avec lui, j’en suis sure. » Etait-ce le moment de préciser que je passe bien trop de mon temps libre sur Netflix ?

« Je vous en prie. On a toutes les deux à y gagner dans cette histoire et à côté de ça, ça me fait vraiment plaisir de vous aider. » Si je n’arrive pas à exprimer à quel point ma reconnaissance est immense et sincère, je pense que mon visage parle pour moi, de mes yeux qui s’illumine au sourire béat qui ne me quitte plus. Pour une fille comme moi, ce genre de chose ça compte, même si elle ne m’a fait aucune promesse. « J'ai un créneau lundi prochain à 10H15 tapantes. Ça vous conviendrait ? Sinon je vous positionne à la suite des entretiens que je dois faire passer cet après-midi même. Mais je crains que vous n'ayez le temps de vous préparer comme vous l'entendez. » Je ne sais pas si elle me teste, cherche à évaluer mon audace ou au contraire mon sérieux, mais une chose est sûre, je ne suis pas une audacieuse. Je suis une consciencieuse, qui prépare dans les moindres détails ce type de rendez-vous par peur d’être démunie, et compte bien mettre à profit chaque minute de préparation. « Lundi c’est parfait, si vous n’avez pas besoin d’avoir pris une décision d’ici là. » Pitié, faites que cela ne soit pas le cas. Je n’ai pas envie de bégayer, de perdre mes moyens et de rougir, pas envie de l’amener à penser que finalement elle s’est peut-être trompée à mon sujet. Et je n’ai pas confiance en mes capacité d’improvisation la plus complète. « Généralement je préfère ne rien laisser au hasard. Si ce jeune homme a travaillé avec vous pendant des années, il m’évitera certainement de vous faire perdre votre temps. » Parce que ce boulot me fait briller les yeux, mais que je ne suis toujours pas persuadée d’avoir ce qu’il faut. Bon, j’espère que ce n’était pas un test.

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Lost in the echo
evelyn pearson & @lucia whitemore

Déjà parée à dégainer ses bonnes manières comme on dégaine une arme particulièrement bien aiguisée dans l'espoir d'imposer le respect, Evelyn n'attendit pas que Lucia s'enquière de la meilleure façon de contacter son ancien assistant londonien. Elle se pencha pour récupérer son sac à main dans lequel elle trifouilla à la recherche d'un porte-cartes de visite estampillé à son nom et duquel elle piocha un tout petit encart fait à la main. Un modèle unique, fait pour elle, par elle, qui démontrait qu'au-delà de ses talents en communication, elle était aussi dotée d'une âme d'artiste qu'elle avait su affiner tout au long de ses études en école d'arts – ce genre de choses ne nous quitte jamais vraiment, qu'importe la voie choisit en finalité, ça reste ancré. La calligraphie, qu'elle avait consciencieusement étudiée, était parfaite, la disposition aussi épurée que la signature qu'elle y avait apposé du bout de son stylo-plume et qui reflétait assez bien sa personnalité ; élégante sans trop d'effort, mais définitivement attachée aux détails et à la bonne qualité des prestations qu'elle proposait aux clients dont elle s'occupait "Je vais vous noter son numéro derrière ma carte. J'aimerais le prévenir avant toute chose, histoire qu'il ne soit pas trop surpris pas votre appel. Vous n'avez qu'à me donner vos coordonnées, je vous ferai signe une fois que je l'aurais tenu au courant. Comme ça, vous pourrez vous lancer en terrain conquis, il n'est pas très difficile à convaincre – et voilà, c'est pour vous, prenez-en soin." ponctua-t-elle, tendant sa carte à la jeune femme après y avoir noté le numéro de Neal. Il serait ravi, l'espérait-elle, et quelque part, elle qui marchait un peu sur des œufs à propos du jeune homme, venait de gagner une belle excuse pour l'appeler. Elle avait l'impression que leur dernier coup de fil remontait à bien trop longtemps.

Attendant que Lucia lui rende l'appareil en lui récitant les chiffres de son numéro de téléphone, Evie finit par les noter d'une traite lorsqu'elle se lança enfin "Parfait, mademoiselle Whitemore. Je reviendrai vers vous le plus rapidement possible et ne craignez rien ; je fais partie des indécises. J'ai besoin de temps avant de me décider, alors lundi est une bonne alternative." Sans compter que finalement, les candidats ne se bousculaient pas au portillon, et que son instinct concernant Lucia étant plutôt bon, une part d'elle savait pertinemment qu'aucun de ceux qui se présenteraient à elle cet après-midi-même ne feraient vraiment l'affaire. Relevant le menton, ce fût avec un sourire qu'elle reprit à l'adresse de son interlocutrice "Je ne me déciderai qu'une fois que j'aurai exploré toutes mes options, et vous en faites désormais partie. J'ai hâte de vous revoir." lui indiqua-t-elle en fermant son carnet, son stylo calé entre son pouce et son index qu'elle pointa brièvement vers la jeune femme "Un conseil cependant : ne vous mettez pas la pression. Ce ne sera rien de plus qu'un autre moment agréable comme celui-ci. Neal vous le dira, ça ne vaut pas la peine d'angoisser… tout se passera pour le mieux, d'accord ?" lui demanda-t-elle en affrontant son regard quelques secondes. Une fois qu'elle eut la confirmation que son message fût bien passé, elle opina résolument du chef, puis elle amorça un geste pour se lever "Très bien. Je vais vous laissez maintenant, j'ai des entretiens à faire passer." Un clin d'œil lui échappa. Avant de ranger ses petites affaires, Evelyn déposa le compte juste de l'addition de la commande qu'elles avaient consommée avec la jeune femme, plus un pourboire pour ce bon vieux Dan – elle devait bien avouer que l'idée de laisser ces deux parts de gâteaux intouchées lui brisait le cœur, mais elle était persuadée que Lucia saurait leur faire honneur. Remportant ses petites affaires avec elle, ce fût après avoir glissé une mèche de cheveux derrière son oreille qu'Evie finit par tendre de nouveau la main à Lucia qu'elle salua de vive voix, un sourire fendant encore une fois l'expression de son visage "J'ai été ravie, sincèrement." Et sans en prononcer davantage, la promesse qu'elles se reverraient bientôt étant suffisamment explicite pour qu'elle ne s'échine à la verbaliser, elle tourna les talons pour s'en aller.

they said the end is coming, everyone's up to something, i find myself running home to your sweet nothings. outside, they're push and shoving, you’re in the kitchen humming, all that you ever wanted from me was sweet nothing.

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