On m’a conseillé un psy online parce que j’avais pas trop de temps ces derniers jours mais non. Je me suis bougé le cul et j’ai pris le temps parce que j’en ai besoin. Vraiment. J’ai personne à qui me confier à part Charlie et elle a assez sur ses épaules, j’ai pas envie de lui mettre tous mes doutes et toutes mes questions comme si c’était sa responsabilité. C’est pas le cas. J’avoue j’ai mis au claire pas mal de chose tout seul dans ma tête. Mais entre ce que ma tête sait et mon cour ressent, c’est un grand écart. C’est pas facile. Ca fait juste quelques séances que j’ai chez cette psy. C’est une femme. Dr Taylor. J’ai tout de suite penser à Corey Taylor mais y’a plus de chance qu’elle soit affilié à Jake Taylor de In Hearts Wake. Je lui demanderai un jour. Mais pour l’instant j’ai pas eu l’occasion parce que j’ai beaucoup de trucs à dire. Elle a surtout acquiescé à tout ce que j’ai affirmé. Elle m’a pas remis beaucoup en question. Elle me donne l’impression que j’ai toute ma shit together alors que pas du tout. Ca fait du bien quand même au fond. Peut être qu’en fait si, je fais ce qu’il faut. Mais alors pourquoi je me sens pas heureux ? Pourquoi je me retrouve dans cette situation ? Tout le monde change. Je sais. C’est ce que j’arrête pas de me dire. Ca colle juste plus parfois en fonction du moment de notre vie. Faut que je l’accepte une bonne fois pour toute. Mais c’est dur.

J’arrive dans la salle d’attente et c’est bizarre parce que y’a déjà quelqu’un là. Est-ce que y’a 2 docteurs dans ce cabinet ? Il me semblait pas mais je suis pas au courant de tout donc ok. Le gars a pas l’air très rassuré.

« Bonjour. »

Poli. Je m’installe sur une chaise en face alors que j’ai qu’une envie c’est d’aller de nouveau devant la porte d’entré pour vérifier si y’a une autre plaque que celle du Dr Taylor. Y’a un truc qui est pas comme d’habitude ici. Je suis seul à attendre en temps normal parce que le patient d’avant est en consultation avant mon tour. Mais pas aujourd’hui.

« T’attends pour le Dr Taylor ? »

Plus fort que moi. C’est trop étrange qu’il y ait autant de retard si c’est le cas.

Un moment de panique de plus, une nausée, des tremblements, cette sensation que le monde s'ouvrait sous ses pieds et qu'il allait y passer. Tim n'avait rien demandé bien évidemment et pire encore, il ne l'avait pas vu venir mais c'était ce qu'il y avait de plus fréquent avec l'angoisse. Il était juste en train de revenir du cimetière, histoire de donner un petit coup de main à Freya avec la fréquentation plus importante ces derniers temps et il s'était fait happer par le trou noir. Il aurait pu rentrer chez lui et aller se cloîtrer dans sa chambre, dans le noir le plus complet mais Timothy avait croisé le regard d'une plaque sur un bâtiment au moment de contrôler son souffle. Un cabinet de psychologues. Pourquoi pas, après tout? Il avait demandé sa route à l'accueil, l'hôtesse sentant sa panique et lui offrant la possibilité de passer après le dernier rendez-vous d'une des psychologues du cabinet. Decastel avait hoché la tête avant de se retrouver assis dans la salle d'attente, à essayer de tenir le coup autant que possible, même si le tout semblait peine perdue. Allait-il pouvoir rester jusqu'au bout? Tim en doutait fortement mais il avait voulu faire cet effort, finissant par voir la silhouette d'un homme qui pénétrait dans la salle à son tour. Il avait beau avoir la vision qui se floutait par intermittences, Tim n'eut pas trop de mal à reconnaître Kane. Son coeur rata un battement, ce n'était clairement pas le moment de croiser le regard de l'homme qui peuplait la vie de Charlie et ses réseaux sociaux parce que c'était pour cela qu'il l'avait reconnu. Devait-il lui dire et risquer sa peau ou faire comme si de rien n'était? Sa deuxième idée semblait meilleure mais le blond lui adressa la parole et le soldat se sentit perturbé au plus haut point. Encore. "Je passerai après toi, apparemment, Kane." Maintenant, il savait qu'il le connaissait et Tim devait sûrement lui expliquer, avec le peu de mots qu'il était en mesure de prononcer vu son état. "Tim." S'arrêter et tâcher de respirer, mal à l'aise au plus haut point. Pour changer.

 
Y’a un truc étrange. Un truc étrange dans sa façon de me regarder. J’ai un truc entre les dents?  »Je passerai après toi, apparemment, Kane." Quoi ? Mais d’où il sort mon prénom comme ça ? J’ai même pas mon uniforme sur le dos et encore, y’a mon nom de famille dessus pas mon prénom. Je suis… scotché. "Tim."

Oh.
My.
God.

Mon cerveau se gèle un moment à cette nouvelle. Je m’attendais à tout sauf à ça. Et oh mon dieu. Je suis pas bien là. Pas bien du tout. Je sais pas comment me sentir mais une chose est sûr, je suis pas à l’aise. Je suis pas bien, je suis jaloux ? Oui. Je suis complètement jaloux de ce type qui va être lié à Charlie jusqu’au restant de ses jours parce qu’ils ont un être humain avec leurs gênes en construction dans son ventre à elle.

"Tim." Mon dieu. J’ai sa voix qui résonne encore et encore dans ma tête. J’étais pas prêt du tout à le rencontrer. Et encore moins chez ma psy. "Tim." Il a besoin d’une psy lui aussi. Il a pas l’air très bien c’est vrai. Je l’ai remarqué quand je suis entré dans la pièce. Et je suis beaucoup trop emphatique parce que s’il est là c’est qu’il a des problème, qu’il le sait, et qu’il veut faire quelque chose pour les changer.

« Salut je… »

Je sais clairement pas quoi dire.

« Hem… Félicitations pour le bébé. »

J’ai envie de me facepalm. Mais. Tellement. Fort. Avec une brique. Genre que ça finisse en me défigurant. Pourquoi j’ai dit ça ? Pourquoi je parle du gosse direct ? Pourquoi je fais ça ? Pourquoi je suis obligé de dire le truc le plus embarrassant qu’il puisse être ? Pourquoi mon cerveau il connecte plus rien comme il faut là ? Pourquoi je sens qu’il va me mettre une droite ? Pourquoi je vais lui dire de viser les côtes pour plus de souffrance de mon côté ? Pourquoi je suis comme ça ?

Loin de lui l'idée de le mettre mal à l'aise mais Tim n'était pas suffisamment en bon état pour laisser traîner un mensonge. Il aurait très bien pu pourtant. Faire la conversation avec Kane comme s'il ne savait pas du tout qui il était, parler de la pluie et du beau temps, des chaises peu confortables de la salle d'attente mais Tim sentait les tremblements de ses mains, son souffle encore en proie à des difficultés insurmontables et il n'avait pas la force de le traiter comme un inconnu. Que voulait-il faire exactement? Decastel n'en avait aucune idée, se présenter à lui en ne sachant pas du tout ce qu'il pouvait penser de sa petite personne, il devait le mépriser et Tim lui donnait raison à ce sujet. Tout ce qu'il touchait se transformait en tragédie, il n'aurait probablement jamais dû exister, c'était ce que son géniteur avait pensé après tout et pour une fois dans sa vie, le jeune soldat se décidait à lui donner raison. Le brun resta là, à regarder le blond, sans rien dire alors qu'il lui apportait ses félicitations pour le bébé à venir. Cette conversation était déjà parfaitement surréaliste, pourquoi entamer la discussion là dessus, pourquoi? Timothy ferma les yeux une demie seconde, histoire de retrouver un semblant de contenance même si sa tentative était bien vaine, assurément. "Merci." Qu'ajouter de plus? C'était atroce ce qui se passait, c'était douloureux et Tim n'avait pas les armes pour y survivre, ou en tout cas, c'était ce qu'il pensait de son côté. "Et désolé. J'ai jamais voulu que tu subisses tout ça." Il n'avait lui même pas vraiment demandé ce qui était arrivé mais le destin avait voulu que les événements s'enchaînent de la sorte et maintenant, Tim n'avait plus rien à dire. Il attendait, patiemment, essayant de contrôler son corps et le flot de ses pensées parce qu'il avait peur que Kane le fasse souffrir. Mais après tout, n'était-ce pas la seule chose qu'il méritait?

 
 »Merci. » Mais ok ? Le gars il dit merci ? Le gars il est pas en train de s’énerver parce que j’ai mis ça sur le tapis direct. Je sais pas quoi penser de tout ça, je le connais pas du tout. Je sais juste qu’il est important pour Charlie. "Et désolé. J'ai jamais voulu que tu subisses tout ça. » Oh mon dieu. Mais. Je sais pas quoi penser. Le gars en théorie je dois le détester. Je le déteste. Mais. Non en fait. Là. Il a l’air pas bien et il me dit ça et il me frappe pas alors que je mérite sûrement. Je comprends pas. Merde. Je suis sensé le détester. Je le déteste. En théorie. Mais non. En fait non. Le gars il me rend triste de le voir comme ça. Et je vois bien comment il respire, comment il se tient. Il est pas bien du tout. Ca me fait trop chier de le voir comme ça parce que j’ai envie de l’aider le gars. Mon complexe du sauveur. Mais je le connais pas et il me déteste sûrement. Je sais pas du tout quoi faire là. C’est compliqué et en vrai je comprends pas du tout la nature de leur relation à Charlie et lui. J’ai jamais demandé s’ils couchaient ensemble toujours ou pas. S’ils sont un vrai truc ou pas. Mais elle est clairement plus avec moi qu’avec lui vu qu’elle habite carrément chez moi donc… Il sait forcément qu’elle et moi on joue pas qu’aux cartes depuis le temps qu’on se fréquente. C’est super compliqué.

« Je sais pas quoi te répondre… C’est la vie. »

Je suis grave défaitiste parce que j’ai jamais eu de happy ending alors en vrai ça me change pas des masses. C’est juste la suite logique.

« Je veux juste que Charlie soit heureuse. »

Avec moi, de préférence, mais c’est trop compliqué et apparemment mon cerveau collabore là. Il ne me laisse pas dire ça à voix haute. Je comprends quand même toujours pas pourquoi elle a pas avorté. La vie est déjà assez compliqué sans gosse… Je sais que je pourrais pas moi. Je me gère déjà pas tout seul. Je vais pour ajouter un truc sur le fait qu’elle va aller vivre chez son oncle et donc pas chez Tim, mais le gars il a l’air vraiment pas bien du tout. C’est pas le moment pour ça.

« Si t’as besoin de voir la psy en priorité y’a pas de problème hein. »

Je me vois en lui là et… ça me fou un peu mal à l’aise ? Je sais pas trop. C’est bizarre. Mais il est pas bien ça se voit comme le nez au milieu de la figure. On lit en lui comme un livre ouvert. Comme moi. Ou peut être justement c’est que je reconnais que trop bien tout ce qui émane de lui à ce moment précis ? Peut être…

Il n'avait plus vraiment envie d'être ici au bout du compte mais Tim n'était plus réellement capable de se relever. Ses jambes n'étaient plus les siennes, elles appartenaient à son anxiété et cette rencontre avec Kane ne l'aidait pas réellement à l'apaiser. Le misérable soldat ne pouvait plus s'en aller, il se devait de soutenir le regard du blond en espérant tenir le coup, une bien belle illusion. Rien n'allait ces derniers temps et aucun mot ne serait à la hauteur de ce qu'il pouvait penser. Decastel était perdu et il ne trouverait probablement aucune réponse lors de cette entrevue. Il n'avait jamais désiré rencontrer Kane et même maintenant, il y avait cette envie de faire demi tour, de ne plus l'avoir en face de lui, de ne pas penser à tout ce qu'il lui avait fait subir, sans l'avoir réellement demandé lui non plus. Ils n'étaient que les deux personnes qui subissaient les choix de Charlie, sans vraiment en comprendre les conséquences mais ils n'avaient pas vraiment d'autres manières de survivre désormais. Timothy, en tout cas, n'avait pas grand chose à dire, il n'avait d'ailleurs pas spécialement envie de parler, ses pensées lui apportant la plus infâme des migraines. Il se méprisait, il voulait en finir et pourtant, le soldat restait là, assis, à hocher la tête parce que ce n'était que la vie comme le disait le pompier. Tout cela n'était rien d'autre qu'un instant parmi d'autres, avant que l'humanité ne périsse alors ce n'était pas si grave, si? "Moi aussi." Rien d'autre à dire parce que c'était vrai, même si aucune décision récente ne semblait aller dans ce sens. Peu importait au fond, la vie était ainsi. "Non, vas y. Je vais probablement partir avant d'entrer là dedans." Il voulait juste attendre que sa malédiction passe, comme si elle serait clémente avec lui en réalité. "Je veux juste que ça s'arrête tout ça. Tu penses que c'est possible? Parce que j'ai l'impression qu'on se méprise pour des conneries. Je suis pas avec Charlie et elle va te quitter, pourquoi se faire subir ça, hein?" C'était aberrant tout cela et Tim en avait assez. Oui, il voulait juste en finir, surtout avec lui-même.

 
"Moi aussi. » J’hoche la tête. On est sur la même longueur d’ondes c’est bien. J’avais vraiment aucune idée de comment ce gars était avant là maintenant. J’aurai pas imaginé qu’il soit autant… comme moi ? En vrai j’en sais rien mais de ce que je vois là, de ce qui ressort de lui, vraiment c’est flippant comme j’ai l’impression de me voir. Je me répète mais, je suis assez retourné de le voir comme ça. Je crois que Charlie a un type de mec. "Non, vas y. Je vais probablement partir avant d'entrer là dedans. » Oh. Non. C’est pas une bonne idée ça. Mais je sais aussi que s’il est venu jusqu’ici c’est déjà énorme. Je vais pas lui dire ce qu’il doit faire. Je sais rien de sa vie à part qu’il est fertile. "Je veux juste que ça s'arrête tout ça. Tu penses que c'est possible? Parce que j'ai l'impression qu'on se méprise pour des conneries. Je suis pas avec Charlie et elle va te quitter, pourquoi se faire subir ça, hein?" Il est pas avec Charlie c’est une info que j’aime beaucoup mais le reste de ce qu’il dit j’aime pas trop. Mes sourcils se froncent parce que le gars il va vraiment pas bien. Ca se voit. Ca s’entend aussi.

« C’est compliqué… »

C’est pas mon gosse et j’ai pas envie d’avoir ça sur les bras. Je crois que je l’ai bien fait comprendre malgré moi à Charlie. Malgré que je lui ai dit que je serai là pour le gosse si elle le veut. Mais elle est partie dans une direction où elle me fera pas subir ça et c’est vraiment très gentil de sa part. Même si en même temps ça nous séparent aussi. Je suis clairement pas près pour être père et je ne le serai pas parce que lui, Tim, est dans les parages. Si ça n’était pas le cas, sûrement que ça aurait été différent.

« C’est très compliqué… »

Mais lui il a l’air grave en détresse et je sais pas vraiment pourquoi. J’ai aucune idée de ce qu’il se passe dans sa vie. J’ai envie de lui demander s’il aurait préféré qu’elle avorte mais il va tellement mal, c’est pas du tout le moment de parler de trucs si sérieux. Je crois qu’il vaut mieux que je lui change les idées ? Je suis pas sûr. Mais il a vraiment besoin d’aide et je sais pas si je serai rassuré de le savoir seul une fois qu’il va quitter la pièce.

« Je te méprise pas. Je… C’est compliqué. Mais je te méprise pas. »

Je te méprise plus serait plus juste. Parce que oui, je l’ai détesté dès la première fois qu’il a été mention de lui. Le gars il est tellement pas bien là, je peux pas le détester. C’est horrible ce qui est devant moi là. Je peux rien faire pour l’aider. Je sais même pas s’il me laisserait l’aider. Parce que lui il me méprise. Il l’a dit.

« Là j’ai surtout envie de t’aider à t’apaiser mais… Je sais pas si je peux et je sais pas si tu veux. »

Il va tellement pas. Je me repasse ses mots en tête. « Je veux juste que ça s'arrête tout ça. » Il va se flinguer le gars. Ou peut être je suis trop dramatique ? Nope. On dirait vraiment qu’il y pense vraiment.

Et s'il y avait une solution miraculeuse pour que tout s'arrête subitement? Tim la choisirait sans hésitation, cette fameuse recette mais il savait qu'il n'y avait pas beaucoup d'issues favorables dans son cas. Il se connaissait suffisamment pour savoir dans quoi il s'engageait désormais, il tombait peu à peu vers ce fichu désespoir et celui-là ne le laisserait pas tomber de sitôt. La situation était plus qu'instable et Decastel avait juste envie de ne plus avoir à faire face. C'était trop tard pourtant parce que Kane était en face de lui et qu'il était la deuxième partie de cet échiquier géant. Personne n'avait le contrôle des faits, pas eux deux en tout cas mais apparemment, ils allaient devoir vivre dans cette bien étrange cohabitation pendant les quelques minutes à venir et c'était un fait qui tuait Timothy. Il n'était pas aussi fort qu'il voulait le croire, cela faisait en tout cas bien longtemps qu'il ne l'était plus. Personne ne pouvait être dupe de son état, avec son teint diaphane et ses mains tremblantes, personne ne pouvait se tromper, non. Il défaillirait à un moment donné, ne restait à savoir le fameux quand justement. "T'es pas obligé de mentir, tu sais. Je sais ce que tu penses, je sais que tu te dis que je suis celui qui t'empêche de vivre ton idylle parfaite en tous points avec Charlie... Je le sais parce que je sais aussi qu'elle s'est droguée avec toi. T'aimes pas le bébé, Kane." C'était au moins quelque chose sur lequel ils pouvaient s'entendre parce que Decastel savait, il comprenait. A sa place, il n'aurait pas agi d'une meilleure manière: quand on était blessé, on était toujours un peu idiot. Il l'était encore d'ailleurs à ce moment là, baissant les yeux pour compter ses respirations même si ce n'était qu'une mascarade supplémentaire. "Je devrais t'en vouloir pour ça. Et pourtant, je peux pas parce que j'ai fait pire. J'ai laissé Charlie te tromper, je suis vraiment la pire personne qui ait jamais arpenté cet univers." Il l'avait fait, oui, il n'avait pas pensé à lui. A cet autre homme, jamais parce qu'on était tous égoïste quand on aimait et maintenant, Timothy ne savait pas comment obtenir un pardon qui semblait impossible. "C'est gentil mais je mérite pas ça, Kane. M'apaise pas. C'est pas ce que tu veux, c'est pas ce que je voudrais à ta place en tout cas." C'était impossible et Tim se sentait faiblir, encore et toujours. Il ne pleurerait pas, il se l'était promis alors, il fallait qu'il aille au bout. Il le devait, avant de sombrer pour l'éternité.

 
"T'es pas obligé de mentir, tu sais. Je sais ce que tu penses, je sais que tu te dis que je suis celui qui t'empêche de vivre ton idylle parfaite en tous points avec Charlie..." Heu… Il fait quoi le gars ? Je le connais pas et il balance des trucs comme s’il était au courant de tout ce qu’il se passe dans ma tête ? Il a pas tort, mais quand même c’est super bizarre ce qui est en train de se passer là.  " Je le sais parce que je sais aussi qu'elle s'est droguée avec toi. T'aimes pas le bébé, Kane." What the fuck ?? J’ai aucune idée de comment réagir à tout ce qu’il dit là. Est-ce que je dois me justifier ? Pourquoi il balance la drogue en plus au milieu ?? Il est vraiment au courant de tout what the fuck ?? Je suis grave choqué qu’il balance tout ça d’un coup. "Je devrais t'en vouloir pour ça. Et pourtant, je peux pas parce que j'ai fait pire. J'ai laissé Charlie te tromper, je suis vraiment la pire personne qui ait jamais arpenté cet univers." Mais qu’est ce qui est en train de se passer ? Il me lance tellement d’infos d’un coup là je suis perdu, je sais pas quoi dire je suis là comme un con à rien dire. "C'est gentil mais je mérite pas ça, Kane. M'apaise pas. C'est pas ce que tu veux, c'est pas ce que je voudrais à ta place en tout cas." Mais faut qu’il arrête de parler pour moi. Heureusement il se reprend à la fin. Je suis tellement choqué là je sais pas quoi dire. D’où Charlie m’a trompé ? On est même pas ensemble. Mais ça confirme bien qu’ils sont un peu ensemble tous les deux. C’est tellement le bordel cette affaire. Ca m’étonne pas au fond. Ca confirme juste qu’elle va finir avec lui. Et vraiment là j’ai aucune idée de ce que je dois répondre ou quoi. Je suis sur le cul. Le gars il est pas bien et il balance tout ça et j’ai pas envie d’insister sur quoi que ce soit parce qu’il a pas l’air dans le mon état d’esprit pour entendre quoi que ce soit.

« C’est le bordel mais… Tu devrais aller voir la psy. »

Parce que c’est pas mon ami ce type et il a vraiment besoin d’aide là. Il a l’air d’avoir voulu utiliser toute ses cartouches contre moi parce que la vérité c’est que c’est lui qui me déteste là. C’est sûr. Il m’en veut de pas vouloir le gosse. Désolé c’est pas le mien, j’ai rien demandé. Il m’en veut pour la drogue. Désolé c’est Charlie qui l’a mis sous mon nez et je suis fucked up aussi en ce moment alors j’ai foncé sans réfléchir parce que ça m’a paru la meilleure idée sur le moment. Je le regrette mais je peux rien faire pour changer ça. Mais je dis rien, je lui dois rien au gars. Tout ça c’est entre Charlie et moi. On a déjà les choses à peu près au clair à mon avis.

Comme je sais d’avance qu’il va partir parce que j’ai déjà été à sa place un jour, je sors mon téléphone pour envoyer un SMS à Charlie. Sûrement qu’elle va pouvoir l’aider elle. Qu’il va l’écouter elle.

Holy
Je suis chez ma psy, y'a Tim, il va pas bien du tout et je crois qu'il va partir.

Je relève la tête vers lui.

« Tu veux pas mon aide, mais tu peux avoir celle du Dr Taylor. »

Un oeil frais. S’il est là c’est qu’il voulait ça quelque part. Faut juste qu’il arrive à tenir au bout de son idée, même si c’est pas la chose la plus simple à faire quand on est dans son état actuel. Il est quand même en train de me mettre grave en PLS de le voir comme ça. Cette situation est en train de foutre en l’air la santé mentale de beaucoup de personnes. J’essaie juste de limiter les dégâts parce que de toute façon on peut rien faire de plus. J’ai aucun pouvoir dans tout ça. Je suis inutile.

Il aurait dû se taire, non, clairement, il n'était pas en état de discuter de tout ce qui s'était passé dans ce triangle des plus étranges. Pourtant, la vérité éclatait peu à peu, Tim laissant entendre que la limite avait été franchie alors que le couple de Kane et Charlie vivait encore. Il se sentait mal d'avoir agi de la sorte, d'avoir été l'autre homme alors qu'il n'aurait pas pu survivre dans cette position. De toute évidence, Timothy se détestait pour énormément de faits récemment et toute cette histoire n'était que la partie immergée de l'iceberg. L'affaire qui le liait à Ariane était plus tordue encore et le soldat ne digérait pas vraiment de ne plus savoir qui il était en réalité. Confronter Kane ne l'aidait pas vraiment à comprendre tout cela, à mettre de côté le faux pour se concentrer sur le vrai parce qu'il était le type qui ne savait pas vraiment pourquoi il agissait et quelque part, le manque de réactions du blond le rendait encore plus nauséeux que s'il avait été colère. Peut être qu'il aurait préféré cela, que Kane se montre cruel envers lui pour tout ce qu'il venait de lui confier mais non, le pompier se contentait de lui demander d'aller consulter la psychologue en s'acharnant sur son téléphone portable. Tim ne voyait rien, il ne posait pas de questions, il n'avait de toute manière plus vraiment de mots pour répondre à son tour. A quoi bon? Qu'est-ce que parler avait arrangé dans sa vie? Rien. Tout cela n'avait fait que creuser les écarts entre lui et le reste du monde, le jeune brun n'en pouvait plus de cette frontière constante d'ailleurs. "Ça sert plus à rien tout ça. Je sais même pas pourquoi je suis venu jusque là, je sais pertinemment que j'ai rien à faire là..." Là, comme dans un cabinet médical de ce type ou là, comme dans ce bas monde? La limite était floue et Tim se releva de son siège un peu brutalement, se mettant à faire les cent pas avant de faire ce qu'il savait faire de mieux... Se blesser. S'enfermer. Ne plus répondre. Il quitta précipitamment la salle d'attente avant de s'écrouler quelques mètres plus loin, au coin du mur, juste à côté de l'escalier et il resta là, à chercher un second souffle, sachant fort bien qu'il ne viendrait pas. Qu'il ne viendrait plus pour lui.

L’index de Charlie s’abat sur la sonnette du médecin avec bien trop d’anxiété pour que cela ne soit pas visible. Son poing remplace rapidement son index au fur et à mesure des secondes alors que personne ne semble daigner lui ouvrir. Elle n’a pas de temps pour ce genre de choses ci, n’a pas de temps pour rien d’autre si ce n’est Tim. Son cerveau n’a toujours pas pris le temps de prendre en compte le fait qu’il ait rencontré Kane et cela semble bien être le cadet de ses problèmes en cet instant. Ses problèmes n’ont par ailleurs plus aucune sorte d’importance, surtout pas quand le message sur son téléphone stipule explicitement qu’il va mal. Elle ne s’est toujours pas remise de leur dernier face à face au Death Before Decaf’ et encore moins de la lâcheté dont elle avait fait preuve ce jour là. Elle s’était seulement promis de ne plus jamais commettre cette erreur un jour et de ne plus jamais l’abandonner, qu’il aille bien ou mal.
Elle monte rapidement les marches à son tour, trois par trois à défaut de pouvoir le faire quatre par quatre. Son poing se serre dans sa main, son cœur risque d’exploser à tout moment. Le parallèle est atroce, encore plus alors qu’elle retrouve Tim assis dans un coin mal éclairé, à même le sol, les genoux repliés sur lui même. Comme à chaque fois qu’il va mal. Comme à chaque fois qu’elle allait mal aussi. Cette sensation de déjà vu ne devrait pas avoir à exister. La blonde s’accorde un instant pour souffler, au moins rassurée de le retrouver sain et sauf. Le destin lui laisse une simple chance de pouvoir lui faire remonter le moral ou de faire quoi que ce soit en sa faveur et cette fois ci elle n’a pas le droit à l’échec. Cette fois ci plus que toutes les autres elle ne peut pas simplement le rapprocher de son cœur pour mieux l’en éloigner ensuite. Il ne le supporterait pas et, pour être honnête, elle non plus.

Ses mouvements ralentissent, elle s’accroupit d’abord devant lui et vient déposer un long baiser sur son front avant de se laisser glisser sur le sol à ses côtés, le dos collé au même mur. Ses mains viennent entourer les siennes pour les réchauffer et lui démontrer qu’elle est bien présente. Si elle garde une main dans la sienne et qu’elle vient mêler ses doigts aux siens, Charlie dépose la seconde sur son ventre largement arrondi par les mois écoulés et appose sa propre main par dessus. Elle, lui, le bébé. Peu importe que la vie leur sourie ou que tout aille mal, ils seront toujours présents. Sa tête glisse à son tour contre le mur jusqu’à se poser sur l’épaule du brun. ”On devrait aller sur la plage. Je te dois toujours une sortie.” Ils savent bien quels sont les problèmes, nul besoin d’appuyer dessus encore une fois. Ils doivent plutôt se concentrer sur ce qui les unit encore aujourd’hui, sur ce qui les fait sourire entre deux crises. ”On a le temps d’apercevoir le coucher de soleil. L’air marin nous fera du bien à tous les trois.” Parce qu’on est trois, maintenant, et qu’on le restera.

Il aurait dû se relever, retourner auprès de Kane et s'excuser de son attitude de sale connard mais Tim ne sentait plus que les fourmillements qui grimpaient le long de ses jambes et il détestait ardemment cette sensation. Il savait qu'il devait fermer les yeux, au moins un court instant, pour reprendre le contrôle de tous ses sens et par extension, du moindre de ses muscles mais ce n'était pas toujours une mince affaire. Dans les livres ou dans les films, tout paraissait facile mais il y avait l'envers du décor qu'on ne montrait jamais, des pleurs aux cris de douleurs, de cette vision qui disparaissait momentanément alors que tous les muscles se contractaient. Il ne fallait pas montrer ce qui était vilain et récemment, Timothy n'avait l'impression d'être composé que de cela. Il aurait voulu disparaître un peu, faire une pause par rapport à ce monde et pour sûr que la réciproque devait être vraie vu la douleur qu'il avait dû créer chez Kane en l'espace de quelques minutes seulement. Il se sentait déjà atrocement coupable pour cela aussi et un moment de plus qui s'ajoutait à la pile bien longues des mots qu'il allait devoir expier dans les semaines à venir. Au moins, dans son malheur, le mur n'était pas si inconfortable et il pouvait se tasser un peu sur lui-même sans déranger les allées et venues hypothétiques dans le bâtiment. Et si Kane venait le rechercher? Et s'il lui parlait encore? Decastel ne savait pas s'il pourrait gérer. Il n'était même plus certain de pouvoir gérer les concepts de base comme vivre, respirer, ce genre de délires. Il était dans un état second au moment où il sentit un léger baiser se poser sur sa tempe puis des mains attraper les siennes. Le soldat n'était plus seul et il avait vite reconnu le parfum de Charlie qui se collait contre le mur à côté de lui. Voilà qui Kane avait appelé, à croire qu'il était encore plus masochiste que Tim l'avait pensé de prime abord. Il n'était pas aussi bon que ce gars là et Charlie faisait sûrement une erreur en venant jusqu'à l'amas de douleurs au sol, elle avait toujours mérité que le pauvre être qu'il était devenu au fil du temps. "Je suppose que Kane t'a envoyé un message, alors." Et il avait honte de se présenter ainsi de nouveau face à elle, même s'il était sûrement dans un état plus beau que lors de leur dernière entrevue au célèbre bar où elle travaillait. "Tous les trois, oui." Il avait l'air pensif en insistant sur ces mots parce qu'il avait encore du mal à y croire malgré tout, sa vision de l'affaire avait été si floue ces derniers temps, il se sentait si perdu. "Tu crois que se baigner, ça calme l'angoisse? Je veux qu'elle disparaisse sinon c'est moi qui dois disparaître." D'un regard, il lui indiquait qu'il était fatigué de vivre cette situation, d'être en crise perpétuelle, toujours à deux doigts d'exploser sans le faire totalement parce qu'il savait qu'on comptait encore sur lui quelque part... Parce qu'ils étaient trois, maintenant.

Elle se rapproche un peu plus de lui, cherche à gagner quelques centimètres sur le sol pour être toujours plus proche et tant pis si elle le serre contre le mur. Leurs cuisses frottent les unes contre les autres et si elle le pouvait elle se serait encore plus rapprochée de lui, seulement pour se rassurer et pour lui faire sentir qu’elle est là, même s’il ne la voit peut être pas. Charlie sait ses yeux perdus ailleurs et ne cherche pas à les ramener à elle. Une chose à la fois, impossible de se battre sur tous les fronts dans cette guerre qui la dépasse. "Je suppose que Kane t'a envoyé un message, alors." Kane. C’est vrai. Il est là, lui aussi, sûrement même de l’autre côté de ce mur. Il a fait passer le bien de Tim avant le sien et la blonde lui en sera à jamais redevable, bien plus que tout ce qu’il pourrait imaginer. Elle se promet de lui en parler un jour, de tout lui raconter si c’est ce qu’il souhaite entendre ; plus tard. Peu importe quand, à partir du moment où Tim ira mieux. Il est sa priorité absolue pour le moment et, au fond, il continuera à le rester. Ses pouces caressent doucement le dos de ses mains à défaut de pouvoir directement soigner son coeur meurtri par les décennies. ”Ce n’est pas important.” Et si c’est ce qu’il désire ils pourront en parler plus tard mais ce n’est ni le lieu ni le moment. Plus tard. Un jour entre demain et la fin du monde ; plus tard. Pas maintenant. Il doit apprendre à faire passer ses besoins avec ceux des autres. "Tous les trois, oui." Il est là sans être là. Sans le regarder dans les yeux, elle le sait, elle l’entend. Charlie n’a toujours pas de méthode miracle pour l’aider et cela la rend malade de seulement être capable d’assister à sa détresse sans pouvoir ne lui drainer aucune peine ni aucune souffrance. "Tu crois que se baigner, ça calme l'angoisse? Je veux qu'elle disparaisse sinon c'est moi qui dois disparaître." Ok Tim, continue de me parler. Parle moi, tout ira mieux. Les doigts de la blonde se referment un peu plus sur les siens. Impossible de s’habituer à d’aussi violentes paroles venant de lui mais il ne les lui annonce pas de gaieté de coeur. Il ressent le besoin d’exprimer sa détresse la plus profonde, il lui ouvre son coeur et son âme et Charlie n’a pas le droit de lui dire ce qu’il peut dire ou non, ressentir ou non. Il est le seul maître à bord et il le restera. ”Se baigner fait disparaître l’angoisse. Que feraient un triton et sa sirène hors de l’eau, hm ? Et un petit têtard ?” La ligne rouge de leur conversation est l’enfant, il est la seule chose dont elle est certaine qu’il le rendra heureux. Il est aussi sûrement le seul être humain à ne lui jamais avoir fait de mal ; seule Charlie l’a utilisé contre Tim. ”Il y a un super glacier à Bayside, pas loin de là où j’habitais.” Elle n’a aucune idée de ce qu’elle fait mais peut être qu’essayer d’activer ses souvenirs est la meilleure chose à faire. Lui faire se remémorer cette seule et unique nuit passée à Bayside semble être la meilleure chose à faire pour le moment et même si toute la journée avait débuté pour de mauvaises raisons, il avait rapidement su devenir son sauveur et l’avait réconforté. Elle veut lui rendre la pareille, être capable d’enfin le rassurer une fois pour toutes et cesser de jouer de son coeur comme s’il pouvait se régénérer à l’infini. Ce n’est pas le cas. Un jour, il n’y aura plus de retour possible.

Le bras de la jeune femme vient l’entourer sans jamais lâcher sa main et elle repositionne sa tête contre sa tempe. Elle a elle même fermé les yeux, seulement concentrée sur la respiration de Tim dans l’espoir de l’entendre s’apaiser. ”Tu ne m’as jamais dit ton parfum de glace préféré.” Son seul but devient de leur faire parler pour ne pas qu’il sombre dans ses pensées, qu’il ne reparle plus jamais de disparaître.

Kane avait contacté Charlie, forcément. Il n'y avait aucune autre possibilité pour empêcher Tim de faire la pire des bêtises et comme elle était toujours là pour lui, la belle blonde s'était vite retrouvée assise à ses côtés, à tenter par dessus tout de le ramener parmi les vivants. Decastel voulait paraître plus fort, surtout parce qu'il avait conscience que leur enfant était à même d'entendre toute la conversation et qu'il ne voulait pas que ce petit bout de lui ait déjà une piètre opinion de son père. Sa peur était si forte rien que d'y penser puisqu'il ne se sentait pas du tout à la hauteur de cette mission à l'heure actuelle. Tout le monde lui répétait qu'il s'en sortirait à merveille pourtant mais Tim avait bien du mal à croire tous ces gens. Il se sentait surtout fragile, à perdre son souffle en un rien de temps, la panique l'envahissant sans qu'il ne la sente réellement venir. Allait-il arrêter de défaillir un jour? Il commençait sérieusement à en douter et Timothy se demandait allègrement comment une femme comme Charlie pouvait vouloir être présente pour lui dans ce genre de moments. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien trouver à ce type sans identité propre? Pourtant, c'était elle qui lui avait couru après à peine quelques minutes après qu'Ariane lui avait appris leur lien de parenté et c'était encore elle qui le tenait fermement contre elle, s'apeurant sûrement qu'il ne lui échappe à nouveau. Cette fois, Tim n'essayerait même pas de s'en aller, il n'était de toute manière pas tout à fait certain que ses jambes le soutiendraient longtemps. Il voulait juste que le flot d'angoisse le quitte, ne serait-ce qu'une minute ou deux, retrouver l'homme qu'il était encore quelques mois auparavant, celui qui était toujours si optimiste et enjoué, même si sa vie se déroulait au fin fond d'un cimetière. Il était trop tard pour réécrire l'histoire mais Tim allait devoir remonter la pente pour affronter son destin, même si c'était normal d'en être effrayé ces derniers temps. Tout s'enchaînait si vite et les décisions qu'il prenait n'étaient peut être pas celles qu'il aurait aimé avoir à faire mais il ne pouvait plus rien changer à tout cela, juste laisser sa tête tomber contre celle de Charlie et attendre que sa respiration revienne plus normale. "C'est vrai qu'on est des êtres de l'eau, j'ai pas le droit d'oublier ça." Pour sûr que nager les aiderait tous les trois à retrouver le cours d'une vie normale, sans tous ces drames qui s'accumulaient dans leur vie. Timothy tenta un faible sourire en relevant son regard bleuté vers Charlie, quelques secondes avant que sa tête ne chute à nouveau contre l'épaule de la blonde. "Un glacier? Si tu veux... C'était bien à Bayside, ça me manque." Ce passé lui manquait, oui, il ne pouvait pas le nier même si c'était aussi celui-là qui l'avait mis dans cet état. Le soldat était plus fragile encore qu'il n'avait pu le croire mais il y avait peut être encore une porte de sortie. Du mieux à prévoir. "Vanille, et toi?" Il ne pouvait pas encore faire de longues phrases mais il était en mesure de répondre à sa sirène, c'était déjà un bon début. "On fait comment pour aller à la plage? Et... Et Kane?" Cela le stressait aussi. Tout le rendait malade. "Je lui ai dit que tu l'avais trompée, je suis désolé. Je suis un type horrible, Charlie. Je casse tout." Et il y croyait dur comme fer à ce discours puisque, dernièrement, il avait été détruit plus qu'il ne l'aurait mérité mais est-ce que cela méritait pour autant qu'il se venge sur autrui? Probablement pas et Decastel se détestait pour tout cela. Il se détestait depuis le premier jour, de toute façon.

"C'est vrai qu'on est des êtres de l'eau, j'ai pas le droit d'oublier ça." Oh Tim, si tu savais. Tu pourrais en oublier jusqu’à l’existence même de Charlie si tu en avais besoin que cela lui serait égal. Elle serait pour une fois capable de faire passer ses besoins après celui du brun si cela lui assurerait son bonheur véritable et durable. Elle serait prête à tous les sacrifices pour lui, à tous les excès. Ils ont connu le pire et il serait enfin dans la logique des choses que le meilleur se présente à eux. A lui, au moins, cette âme si pure qui n’a jamais rien fait de mal pour que le destin s’acharne ainsi sur son seul sort. Elle le laisse faire tomber sa tête sur son épaule à son tour, tourne la sienne pour naturellement venir déposer un baiser dans ses cheveux. "Un glacier? Si tu veux... C'était bien à Bayside, ça me manque." C’était leur monde à eux au moment où tout allait encore à peu près bien. C’était cette époque où avoir un enfant semblait totalement loufoque, totalement improbable. C’était l’époque où ils pouvaient encore rêver de simplement se ballader sur la plage sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit, parce que par dessus tout c’était l’époque où ils n’étaient que tous les deux. Dans un sens, c’était parfait. ”Ca me manque aussi.” Son prochain appartement sera à nouveau à Bayside. Qu’elle y habite seule avec l’enfant ou que Tim soit avec eux, peu importe. Elle ne vivra pas chez Kane ni chez Cian pour l’éternité et il n’y a qu’à Bayside qu’elle se sente chez elle. Ce quartier représente beaucoup pour eux, elle sait aussi que Tim saura apprécié le calme en étant retiré de la ville. Ils seront d’accord sur ça, à défaut de l’être sur tout le reste. "Vanille, et toi ?" ”Pêche blanche.” Léo l’a forcé à manger cette saveur là et il s’est averé que ce n’était pas si horrible que ce qu’elel avait pu lui dire, à tel point que c’en est devenue sa saveur préférée. Même si elle ne le voit plus autant qu’avant, son meilleur ami reste toujours présent, même dans les pires moments. La blonde est rassurée rien qu’en entendant le son de sa voix, elle a fermé ses yeux pour seulement se concentrer sur son ouïe. "On fait comment pour aller à la plage? Et... Et Kane?" Oh Tim, doux Tim. Il sauverait le monde entier s’il le pouvait. Kane est la source de beaucoup de ses maux par extension et il ne peut pas cesser de se soucier de lui quoi qu’il se passe. Elle l’aime tant. Pour cette raison et pour mille autres, elle l’aime tant. ”On ira à la plage en taxi.” Réaliste, elle se doute bien qu’il ne sera sûrement pas en état de marcher aussi longtemps. Il a besoin de garder ses forces pour qu’ils puissent ensuite se laisser flotter dans l’eau plus tard ; parce que Charlie y tient réellement. Ils iront se baigner, ils iront noyer leurs idées noires et leurs problèmes pour laisser plus d’espace aux espoirs et bonnes ondes dans leur esprit. ”Kane saura se débrouiller. Il n’a pas besoin de nous.” Il rentrera à Fortitude Valley, dans cet appartement qu’elle connait si bien parce qu’elle y passe ses nuits comme ses journées. Il passera sa journée à se poser mille questions et alors que Charlie pensera qu’il finira par l’accabler en rentrant, il n’en fera sûrement rien. Parce qu’il est comme ça. Il est aussi doux que Tim, aussi brisé que lui. "Je lui ai dit que tu l'avais trompée, je suis désolé. Je suis un type horrible, Charlie. Je casse tout." Impossible pour la jeune femme de faire quoi que ce soit qui puisse l’apaiser, elle est seulement spectatrice de sa détresse et parfois actrice. Elle n’a jamais été une bonne influence pour lui mais elle continue d’égoïstement s’accrocher parce qu’elle n’ose plus imaginer sa vie sans sa présence. Avec l’enfant qui grandit en elle, cela semble d’ailleurs impossible. ”T’es la personne la plus formidable que je connaisse.” Il est tout sauf horrible. Absolument tout sauf horrible. Ca la tue qu’il pense de telles choses à son propos, qu’il puisse autant se tromper sur lui alors qu’il ne cesse de voir le bien partout ailleurs. ”Je savais ce que je faisais en passant la nuit avec toi. Tu avais essayé de m’en dissuader, tu ne casses rien du tout Tim. Tu as toujours pris les bonnes décisions. Il l’aurait appris un jour ou l’autre, je parlerai avec lui plus tard.” Quand Tim ira mieux, ils pourront se disputer si Kane en ressent le besoin. Il pourra hurler, il pourra lui rejeter toute la faute, il pourra lui en vouloir. Il pourra faire n’importe quoi, dire n’importe quoi. Et elle comprendra. Parce qu’il aura raison de se sentir trahi, il aura raison de sur-réagir. ”Si c’était à refaire je ne changerais rien à cette soirée, et je resterais au petit matin. C’est la seule chose que je regrette. Pas tout ce qu’il s’est passé entre nous.” Il n’est pas inutile, il n’est pas mauvais, il n’est pas personne. Il n’est rien de tout ce qu’il peut penser à propos de lui même en cet instant précis. Elle dépose un nouveau baiser dans ses cheveux, garde sa tête tournée vers lui, le bout de son nez perdu dans sa chevelure. Pas une seule seconde il ne lui vient à l’esprit de lui en vouloir pour les révélations qu’il a faites à Kane. Il méritait de savoir et Tim ne méritait pas d’être le gardien de ses secrets. ”Il faut que tu t’occupes de toi, Tim. Le reste du monde peut se débrouiller.” Je ne veux pas te perdre.