| While our hearts are young ☼ Lio#1 |
| | (#)Dim 1 Déc 2019 - 20:45 | |
| Les drôles de rencontres sont toujours celles qui restent au fond de la tête. Voilà quelques mois que je discute par memes interposés avec cette fille. C'est une relation un peu fantasque et qui me convient absolument parfaitement. Un truc que je ne pensais pas trouver un jour et surtout par sur Tinder, la zone d'internet la moins axée sur tout ce qui se rapproche de près ou de moins à de l'amitié. C'est, je crois, ce qui fait que nos échanges sont d'autant plus surnaturels. Mais je crois - je suis sûr - que cela me plaît exactement comme c'est.
C'est tout pile à l'heure que je me rends sur le lieu de notre rendez-vous. C'est la première fois que je vais rencontrer cette drôle de correspondante, celle avec laquelle je n'ai échangé que - ou presque - des memes merveilleux qui ont mis, surtout ces derniers temps, un peu de rire dans le mois passé entre ma couette et trop de chocolat. J'ai enfilé ma plus belle chemise, remontée aux coudes et ouverte au col pour ne pas paraître trop strict. Avec une pointe de je ne sais quoi au creux de l'estomac, je pousse la porte du Canvas, plutôt peu rempli en ce début d'après-midi. La seule personne que j'ai rencontré après avoir longtemps échangé par mail fut Sophia, cette jeune femme dont je suivais le blog et que j'ai eu la drôle de surprise de rencontrer non loin d'ici il y a quelques mois. Rien n'a vraiment changé, je suis toujours aussi excité de rencontrer de nouvelles personnes. C'est bien, de sortir de sa tanière. Cela m'évite de phaser en pensant à d'autres trucs. C'est bénéfique, pas vrai ?
Mes yeux balaient la pièce et se posent sur une jeune femme seule, brune. Mais je sais qu'elle n'est pas celle que je cherche. Une autre table attire mon attention, à laquelle est installée une jeune femme que je reconnais comme celle que j'ai désormais renommé dans mon téléphone "meme queen". « J'aurais dû venir avec mon pull "haha, I do that". C'aurait été mieux. » Les mots ont franchi mes lèvres seuls, sans mon autorisation. Mais si, c'est vrai, je le jure. « Je ne suis pas en retard ? Pardon si je suis en retard, d'habitude je ne suis jamais en retard. » Comme d'habitude, je parle trop. Et là, encore, je me contiens. « C'est Léo. Si jamais t'avais... pas reconnu. Mais tu peux m'appeler meme lord, je le prendrai super bien. » J'ai envie de savoir trop de trucs à son propos. Mais je me suis auto-briefé: 1) ne pas l'accaparer, 2) parler doucement, 3) ne pas bouger dans tous les sens. Un serveur passe à notre hauteur, je l'arrête pour me commander un thé et me tourne vers la jeune femme. « Qu'est-ce que tu prends ? » Moi je prendrais bien une dose de "calme toi Léo" saupoudrée de "respire", avec un supplément "tu vas la faire fuir", en fin de compte. |
| | | | (#)Mar 3 Déc 2019 - 12:59 | |
| (Canvas) Lily s’est enfin décidée à franchir le pas de la communication par téléphones interposés pour enfin découvrir en chair et en os ce Léo à qui elle parle depuis plusieurs mois déjà. C’est la première fois qu’elle sort de sa tanière depuis cette soirée de 2018 pendant laquelle elle avait fait la connaissance de Matt - cette même soirée sur laquelle il faut absolument éviter de parler. Cette fois ci cependant, les conditions sont bien différentes et le fait qu’ils se soient rencontrés sur une application de rencontre ne semble être qu’une drôle de coïncidence, tout deux ayant parlé à peu près de tout sauf de choses sérieuses, ayant à peu près tout fait sauf se tourner autour. Ils se parlent depuis le premier jour comme s’ils étaient des amis d’enfance et cela semble parfaitement leur convenir, ne parlant ainsi jamais de leurs problèmes si ce n’est par des meme de fin du monde. Et c’est bien, comme ça, aussi. Ils agissent naïvement, se voilent la face - du eux tout craché.
Un jour est venue l’idée d’une rencontre. Serait-ce Lily qui en a parlé la première ? Ou Léo ? Ou un meme ? Peu importe. Le fait est que cela n’a posé de problème à personne, que personne n’a dit non non plus et que voilà la brune en train de rechercher Ivywreath comme s’il était son fils perdu dans la file d’une attraction. A défaut d’avoir été friendzoné, il s’est aussitôt retrouvé dans la sonzone avec tout le reste de la population de Brisbane.
Et pour une fois, pour une très, très rare fois, Lily est à l’heure. Ça a sans doute quelque chose à voir avec le fait qu’elle ait mal lu l’heure convenue par message, qu’elle ait cru que c’était une heure plus tôt qu’en réalité. Mais Léo n’a pas à savoir ça, uh ? Elle n’aura qu’à rétorquer qu’elle attend depuis à peine cinq minutes, pas trente, et elle ne passera pas pour une illettrée. Alors Lily s’occupe, Lily fait l’inventaire de la pharmacie dans son esprit, Lily joue avec la paille, Lily mord la paille, la paille n’aspire plus rien du tout et Lily en recommande une autre. Les serveurs la maudissent, la pointent du doigt pour stipuler que ‘c’est elle celle qui est déjà à la Sangria au beau milieu de l’après midi et qui mange les pailles’. Heureusement, Léo vient rapidement la tirer de ce pétrin et se présente avec autant de gaucherie qu’elle l’en aurait crû capable. Alors elle sourit, bien sûr qu’elle sourit. Une fossette apparaît sur une joue mais pas l’autre, ses dents se découvrent, ses yeux prennent une forme rieuse. ”C’est moi qui suis en retard d’habitude, mais ce n’est pas ton cas aujourd’hui.” Il parle beaucoup trop pour qu’elle puisse répondre à toutes ses craintes en une seule phrase mais elle tente quand même de répondre à chacune d’elle avec douceur. ”Meme Lord, vraiment ? Tu ne m’avais pas parlé de ce problème de chevilles sur le point d’exploser.” Un premier rire de sa part vient détendre l’atmosphère, preuve qu’elle ne prend aucune de ses propres paroles au sérieux. ”J’espère seulement que ce n’est pas contagieux.” Qu’elle invente, qu’elle se demande, qu’elle s’inquiète faussement.
Il demande ce qu’elle souhaite boire à son tour et, à la vue du cadavre de Sangria face à elle (qu’elle pourrait très bien faire passer pour un verre de Coca Cola), sa raison lui crie de commander la même chose que son cadet ; ce qu’elle fait aussitôt. "Okay, de propriétaire de chat à propriétaire de chat, parlons sérieusement. Quelle est la limite de stories de mon chaton pour 24h ?" Il parle de lui s'il veut, elle parle du nouveau venu Merlin pour se donner une bonne raison de déjà commencer à parler de tout et de rien. Et elle l'informe qu'elle vient d'adopter un chat, aussi. Surprise. "En sachant qu'on ne peut pas poster plus de cinquante stories en 24h, je dirais quarante-neuf. T'en penses quoi ?"
- Léo be like:
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| | | | (#)Mer 4 Déc 2019 - 0:21 | |
| Je ne suis pas en retard. Tant mieux. Je me retiens d'ajouter autre chose, me contente de sourire avant de nous commander à boire. C'est très étrange, de soudain la voir en vrai. L'étrange réflexe que j'ai pris au fil du temps de lui envoyer toute une flopée de memes n'est pas apaisé pour autant, comme si je devais absolument trouver la confirmation qu'elle est bien la Lily que je cherche. Je lance un rire à sa pique, ravi - et rassuré - de voir que mon humour un peu maladroit n'a pas l'air de la déranger plus que ça. « Mes chevilles se portent vraiment très bien. » Je passe un main entre mes boucles d'un air exagérément théâtral avant de m'asseoir face à ma comparse. Mon palpitant a un peu ralenti sa course effrénée. Tant mieux, je n'ai pas spécialement envie de faire un malaise lors de notre toute première rencontre. « Ça pourrait l'être, méfie toi. Tu sais que j'ai contaminé Beyoncé ? C'est grâce à moi qu'elle est si charismatique. » Je tire la chaise sous mon séant, sans arrêter de sourire.
Si elle veut parler de chat, je suis au rendez-vous. Les miens sont comme mes gosses. Il m'arrive de leur parler, parfois. Avec la même voix de débile que l'on retrouve dans toutes les émissions de télévision qui parlent d'animaux. Et je sais que tous les propriétaires font pareil. « T'as un chaton ?? Oh mon Dieu, j'adore les chatons. Créé lui un compte, comme ça tu pourras poster des photos de lui sur la story et puis en poster aussi sur ta propre story, élevant ainsi le compteur à cent photos en vingt-quatre heures. » On ne voit jamais assez de chatons. Dès que je croise les félins qui vagabondent dans mon appartement - ou plutôt lorsque je croise les propriétaires de l'appartement en question - j'ai envie de courir au refuge pour en adopter un autre. Mais les chats sont territoriaux, on ne peut pas introduire de nouveaux félins dans un milieu déjà peuplé, à moins que les chats aient grandi ensemble. Sinon, c'est le drame. « Je met trop de photos de mes chats sur les réseaux. Ce sont... un peu mes colocs. »
Le serveur vient poser nos boissons et je me jette sur la tasse de thé fumante qui se trouve devant moi. « Tu viens souvent, ici ? Ou t'es plutôt bar du soir, genre... ambiance de la nuit ? » Je préfère la nuit au jour, qui est étrangement plus révélatrice que n'importe quelle source de lumière. « C'est marrant, j'aurais juré pouvoir te croiser à l'Université, mais tu n'y es évidemment plus. » Le rouge me monte aux joues alors que je me rends compte de la manière dont Lily pourrait prendre mes paroles. Il y a une éternité que je n'ai pas été si maladroit. « Pas que je sois en train d'insinuer que t'as l'air âgée. Oublie absolument tout ce que je viens de dire. » Parce qu'en plus, je lui trouve cet air juvénile qui me met tant en confiance, que j'apprécie tant chez les gens que je rencontre. Et elle a de jolis yeux bleus. Et moi, j'ai envie de m'enterrer dans le sol.
- La conscience de Léo be like:
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| | | | (#)Mer 4 Déc 2019 - 20:47 | |
| Il joue de ses cheveux et pendant une simple seconde elle l’envie de ses boucles dans lesquelles il peut si aisément se perdre alors qu’elle n’a aucun moyen de cacher son trouble lorsqu’il est présent. Elle se contente de remarques qui n’ont pas lieu d’être et autres approximations, ce dont Léo ne semble pas non plus se passer - la faisant sourire à nouveau. ”Queen B ? La classe, je vais devoir demander tes services !” Qu’elle renchérit avec un rire alors qu’elle a déjà oublié le sujet premier de cette discussion ci. Cela n’a pas d’importance, de toute façon, tant qu’elle renchérit et lui prouve par la même occasion qu’elle ne va pas le manger. Pas tout de suite.
Heureusement le sujet des chats ranime aussitôt l’enfant intérieur de Léo (comme si elle avait déjà doute qu’il ne l’ait perdu un jour) et, au fond, elle n’est pas peu fière d’avoir animé son intérêt dès les premières secondes. ”Mon propre compte va devenir celui du chat, c’est certain. Mais quitte à ce que mes proches me détestent, autant en créer rien que pour lui, t’as raison !” Ce qui ne l’empêchera pas pour autant d’inonder le compte principal avec des photos de Malco/Merlin (à défaut d’avoir pu choisir entre les deux noms, elle a pris les deux), pour le plus grand damne de tout le monde. Cela les changera des photos de marshmallows grillés au feu de bois, ceci dit. ”Tu ne peux pas mettre trop de photos de chats sur ton compte, c’est une antithèse.” Il n’y a jamais assez de photos de chats, jamais assez de chats non plus ! Il n’y a pas à douter qu’eux au moins sauraient apprécier les gâteaux un peu trop cuits de Lily et ses autres assemblages un peu atypiques de différentes saveurs et textures.
A son tour, il enchaîne les questions et tombe rapidement des les pièges. Lily le laisse parler le temps qu’elle souffle doucement sur la tasse brûlante, celle la même qu’elle va rapidement se renverser dessus - ce n’est qu’une question de temps. Il s’emmêle dans ses mots, tente de se reprendre, s’emmêle encore plus. Et elle, elle ne dit rien. Elle sourit, prince ses lèvres pour ne pas rire, pose ses grands yeux bleus attendris sur cet homme qui se confond en excuses. ”C’est moi qui ais l’air âgée et c’est toi qui commande un thé au beau milieu d’un bar.” Elle a grandi avec un frère aîné, elle sait y faire avec les mots maladroits. Il en faudra bien plus pour la choquer. ”J’oublie ce que t’as dit ou je fais semblant de ne pas avoir compris la fin quand tu mâchais tes mots et on se concentre seulement sur ta question ?” Le second plan est le meilleur, assurément. Un clin d’oeil plus tard et pas vexée pour un sou, elle se lance dans des explications qui n’ont pas réellement d’intérêt si ce n’est de passer le temps et faire comme si leur rencontre était tout à fait normale. ”Je sors de temps à autres, avec des amis, mais généralement je suis plutôt du genre à ramener du vin chez moi et les inviter. Ou alors sur la plage ou dans la forêt - comme dans chaque début de film d’horreur, tu vois le genre ?” Elle s’étonne encore de ne pas avoir vécu d’attaque de fantômes, de zombies, de loups garous, d’ours ou même de l’antéchrist … parce que ça arrive quand même souvent, dans les films d’horreur. Du genre, très souvent. Du genre, un ratio qui fait que ça aurait déjà dû arriver dans sa vie. ”Mais toi t’as l’air d’apprécier ça, l’ambiance de la nuit. Et je dis ça parce que peut être que tu m’en as déjà parlé, en fait. Mais ne me dis pas oui à ce propos, on dirait que je suis medium si tu dis rien.” Et si elle n’avait pas été pharmacienne, nul doute qu’elle aurait pris la voie de “medium”. Parce que c’est vachement cool, quand même. Elle l’aurait spécifié sur son profil Tinder, sans aucun doute. Elle l’aurait spécifié avant son propre prénom. ”Ton thé de papi, tu l'as pris à quelle saveur ?" Elle raille, elle rigole, elle se moque et elle se brûle la langue avec sa propre boisson. |
| | | | (#)Mar 10 Déc 2019 - 22:41 | |
| On rigole, on s'amuse, on parle de chat. J'ai l'impression de connaître Lily depuis longtemps. C'est que, d'avoir un humour similaire aux gens, ça rapproche. Ça permet de se sentir plus... compris. Moins gêné. Comme si au final, toute la partie qui consistait à jouer un rôle avec les gens avant de se dévoiler vraiment était un peu passée. Comme si on en était déjà à l'étape d'après, celle pendant laquelle j'ai envie de courir partout et de parler de mes chats. Non, attendez, ça je le fais déjà avec les inconnus. « Si tes proches te détestent pour des chats, change de proches. Les gens qui n'aiment pas les chats ne devraient pas faire partie de ton entourage. » que je lance, théâtral, les yeux rieurs. Quoi, c'est vrai. Je tolère Clément, même s'il n'a pas vraiment l'air d'apprécier mes chats. C'est un gars à chien. C'est peut-être pour ça que ça n'a pas marché, entre nous.
Je ne crois pas qu'elle soit vexée par mon manque de tact. Je suis à prendre ou à laisser, avec ma franchise pas forcément volontaire. On mettra le tout sur une maladresse évidente, qui connaît des pics lors de situations peu ordinaires comme celles-ci; ce n'est pas un date, ce n'est pas vraiment une première rencontre. Qu'est-ce qu'on fait ici, au juste ? Je manque de me brûler avec l'eau de mon thé qui infuse. « Hey, le thé c'est hyper bon. D'ailleurs, c'est mieux d'en boire en été qu'en hiver. » J'adore justifier mes goûts de papy avec de la science de comptoir. J'apprécie que Lily désamorce ma maladresse par une pique. « Seulement sur ma question. » Je bois une lampée de thé pour toute confirmation, préférant masquer les rougeurs de mes joues par la fumée qui s'élève gentiment jusque sur mes cils. Lily a l'air de vivre une vraie vie de trentenaire. J'approche doucement de cet âge et j'ai l'impression d'avoir été bloqué à l'âge pendant lequel on passe son temps en club, en soirée, à ne se préoccuper de rien, à détester le monde des adultes. C'est drôle, mais je crois que ces idées là ne changeront peut-être jamais. Le jour où j'aurais envie de boire du vin sera le jour où je devrais commencer à m'inquiéter.
« J'adore la nuit. C'est plus créatif ! J'aime énormément l'aube, aussi. Mais vraiment, la nuit je me sens... mieux. Plus libre. Wooooaw, t'as si bien découvert mon penchant pour la fête et le monde qui s'éveille une fois la lune haute dans le ciel, t'es vraiment un devin. Je vais commencer à t'appeler Madame Irma. » Je ricane, pour lui donner raison. Si elle préfère s'amuser à deviner ma vie, je prendrai grand plaisir à être son sujet d'expérience. « Y'a un truc qui m'intrigue, M'am Irma. » Je me penche légèrement en avant, comme pour lui faire une confidence. Ou pour lui poser la plus indiscrète des questions. « Qu'est-ce qu'on fait ici ? Tu veux que je te file d'autres memes ? J'ai une nouvelle cargaison, c'est vraiment de la bonne. Mais fais vite, on est observés. » Je jette un œil faussement inquiet à une vieille dame qui dort la bouche grande ouverte à deux tables de la notre. Elle, pour sûr, elle va se mettre à ronfler d'ici quelques minutes. « T'étais vraiment sur Tinder pour trouver la perle rare du meme game ? » Pourquoi je suis sur Tinder, moi ? Bah, la réponse est évidente. |
| | | | (#)Mar 17 Déc 2019 - 13:28 | |
| Léo sort une règle générale de son chapeau à propos des chats et Lily se contente d’en rire, un sourire en coin. Elle est certaine que la présence du chat dans son entourage ne posera aucun problème, même Joseph aurait certainement pu devenir ami avec dès qu’elle aurait eu le dos tourné. Après tout, son frère était ami avec les grenouilles et les vaches, il peut bien faire un petit effort pour les animaux domestiques et pas seulement ceux créés par la nature pour rendre sa petite soeur folle. ”Je note vos conseils, Professeur meme.” Il joue et dramatise et elle ne se fait pas prier pour le suivre dans sa lancée et en faire de même, sûrement déjà bien trop à l’aise en sa présence alors qu’elle le rencontre pour la première fois.
La conversation n’a ni queue ni tête et c’est sans doute bien mieux ainsi. Ils sont libérés des règles d’une première rencontre, libérés de toutes ces questions barbantes qu’ils sont supposés se poser l’un à l’autre à propos des activités et passion de l’autre. Ils ont déjà discuté de toute ceci, entre deux meme rigolos, deux vidéos hilarantes. C’est comme s’ils se connaissaient depuis des années, à vrai dire, et même la passion de Léo pour le thé n’était pas étrangère à la jeune femme. ”Papi qui donne des conseils pour boire son thé ? Le rôle te colle à la peau, dis moi !” Ne manque plus que le temps d’infusion parfait donné à la seconde près et il sera absolument parfait.
Il parle en même temps qu’il réfléchit et son discours est décousu, ce qui fait rire Lily. Elle a la fâcheuse tendance à faire de même et ensuite regretter chacun des mots qu’elle a pu prononcer, tous aussi à double sens les uns que les autres. L’avaient-ils tous les deux spécifié dans leur bio’ ? Parce que si ce n’est pas le cas, le destin a sacrément bien fait les choses en décidant néanmoins de les rapprocher pour créer une amitié aussi bizarre qu’attachante. ”Empêche moi de faire une imitation foireuse de l’accent roumain, s’il te plaît.” Elle ne sait pas les jouer, les accents, pourtant. Elle le sait mais elle persiste, elle fait un accent américain qui ressemble à un indien, un chinois qui ressemble à un russe, un français qui roule les r comme les espagnols - bref, une véritable catastrophe. Alors non, vraiment, il ne faut pas la laisser entrer dans le rôle de Madame Irma la voyante roumaine aux mille quiproquos, ce serait le début de la fin.
Comme pour se forcer à se taire un peu et cesser de raconter autant de bêtises, elle boit une nouvelle gorgée de thé brûlant - y’a pas à dire, rien ne vaut son vin - avec lequel elle s’étouffe bien rapidement en entendant la question de Léo. Elle n’était sûrement pas prête à ce qu’il change de sujet de discussion aussi rapidement et sûrement pas qu’il dérive avec une telle ardeur vers ce qui fait mal. ”Le plan A c’était pas se trouver une excuse pour juste aller boire dans un bar sans être seul et extrêmement louche ? Merde.” Elle l’aimait bien, ce plan là, pourtant. Il avait tout son charme. ”Le plan B me plaît bien, aussi. Ton meilleur meme contre le meilleur des miens, tel un échange de pokemon rare.” Ses yeux bleus perçants se retrouvent à le toiser avec douceur, en parfaite contradiction avec ses paroles pourtant énoncées sur un ton bien plus dur.
”Pourquoi est ce que tu veux savoir ça ?” Lily qui se referme sur elle même à peine commence-t-on à évoquer des sujets personnels, aussi doucement soit-il. Elle ne veut pas parler d’elle, elle ne veut pas parler de ses histoires passées et celles qui n’ont même pas eu le temps de naître. Elle est une adulte qui vit encore dans son monde d’enfant dans lequel elle a simplement besoin de fermer les yeux pour devenir invisible. ”Tout le monde a cette appli. C’est juste comme ça. C’est drôle.” Les réponses bateau, celles auxquelles elle ne s’identifie absolument pas. ”Tu cherchais le grand amour, toi ?” Elle a ce sourire qui ne se moque pas, parce que si elle avait été honnête c’est la réponse qu’elle aurait donné à Léo. Elle veut simplement trouver le grand amour et être heureuse à son tour.
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| | | | (#)Ven 27 Déc 2019 - 14:43 | |
| Elle se moque de mes chevilles trop gonflées d'orgueil, de mon thé que je finis d'une traite en me brûlant la langue. Je prends le tout à merveille, le menton haut, la main dans les cheveux, l'air théâtral. Le temps passe agréablement, même lorsqu'elle propose d'imiter un accent roumain pour me donner sa meilleure interprétation de Madame Irma. Je serais absolument ravi d'entendre le tout, et cela se sent peut-être à mon rire qui s'élève doucement dans la pièce.
Tinder est abattu comme une carte sur une table de jeu. Peut-être n'aurais-je pas dû parler des raisons qui nous ont poussé tous deux à passer les drôles de portes virtuelles de cette application de rencontre qui a, admettons-le, vraiment mauvaise réputation. Pas celle de créer des couples stables et durables, en tous cas, pour la majorité des cas. « La technique pour ton plan A, c'est plutôt d'aller dans un bar louche pour paraître moins étrange que le lieu. Y'a toujours des gens bizarres qui y traînent, tu paraîtras jamais louche là-bas. Mais bois pas seule, c'est triste, ça. » Carrément triste, même. C'est mieux de se soûler à plusieurs. Mais l'échange de meme est définitivement plus séduisant et je ne peux qu'opiner du chef à sa remarque. « En tous cas, merci, j'avais jamais rencontré quelqu'un capable de saisir le grand enjeu qu'est celui de l'échange de meme. Personne pour comprendre vraiment mon langage. Je suis presque ému. » Presque. Encore meilleurs que les mots, les images. Tout devient alors plus facile. A sa question, je m'accoude à la table, écrase ma joue contre mon poing sans la lâcher des yeux. « 'Sais pas. C'est toujours intéressant, je suppose, d'écouter les gens. » C'est en partie la raison qui a motivé mes études. Le soin. Les gens. Aujourd'hui tout est flou. Aujourd'hui je parle d'art, je dessine, je me perds de plus en plus au théâtre. « Je crois que les motivations qui poussent les gens à faire les choses - et la manière qu'ils ont de les réaliser - en disent beaucoup sur les gens eux-mêmes. », que je lance, sur le même ton de la confidence précédemment utilisé.
« Tout le monde a cette appli, oui. » Mais les gens l'ont pour différentes raisons. « Le grand amour ? Je ne sais pas. Je ne crois pas. » Peut-être un peu, au fond, comme tout le monde. Surtout un moyen de s'échapper, de rencontrer du monde facilement. « C'est surtout la paresse, je crois. Un mélange de tout. » J'omets volontairement de parler des rencontres d'un soir, celles dont on ne retient presque pas l'identité. C'est mieux comme ça. « C'est ce que tu cherches, toi ? Le grand amour ? » Je ne suis pas certain que l'on puisse trouver le grand amour sur Tinder. Je ne suis même pas certain qu'il existe, ce grand amour. Je suis déjà bien incapable de rester en couple plus de trois semaines... et dans quelques temps, je serai marié. C'est drôle, quand on y pense. « Tu crois que c'est possible de le trouver, le grand amour, sur Tinder ? » |
| | | | (#)Jeu 16 Jan 2020 - 20:29 | |
| Elle le trouve attendrissant, à lui donner des conseils de vie comme s’il était une sorte de grand frère. “Si je suis une fille normale qui va dans un bar louche, je deviens une fille louche.” Règle générale de la vie qu’elle a appris à ses dépens, elle qui n’a souvent vu que le meilleur en chaque chose sans jamais se soucier des néons à moitié cassés, de la façade en lambeaux, de la lettre branlante prête à tomber sur la tête du premier venu et tout ceci est seulement à l’image de toutes les personnes qui composent ledit bar. Elle comprise, par défaut, même si elle a une jupe jusqu’aux genoux, un haut de costard et une coiffure tirée à quatre épingles avec comme seul intention se prendre un verre de vin. Même avec tout ça, elle devient elle aussi une fille louche entrée en toute connaissance de causes dans un bar tout aussi louche. “J’ai le droit de choisir quelqu’un random et de boire avec lui ? Pour que ça soit moins triste ? Ou c’est trop creep ?” Lily négocie les terme du contrat imposé par Léo, elle tente de rigoler de ce qu’elle peut rigoler même si au fond elle est souvent incapable de réprimer ce besoin viscéral de rappeler la réalité factuelle.
« Je crois que les motivations qui poussent les gens à faire les choses - et la manière qu'ils ont de les réaliser - en disent beaucoup sur les gens eux-mêmes. » “Je le crois aussi.” Elle avoue à son tour d’un sourire conciliant comme s’ils étaient en train d’exposer leurs pires secrets - oh, s’il savait. Le ton est rapidement passé de celui de la plaisanterie à la confidence et elle ne fait rien pour briser ce moment puisqu’au contraire, elle l’apprécie à sa juste valeur.
Léo semble pourtant loin d’être sur la même longueur d’onde qu’elle et elle écoute ses arguments patiemment alors qu’il statue ne pas du tout croire au grand amour, chose qu’elle arrive parfaitement à comprendre. Ses yeux bleus se relèvent vivement vers lui lorsqu’il lui renvoie la question, elle est réellement surprise qu’il le fasse. “Je ne cherche rien.” Sa réponse aurait dû être oui, pourtant, parce que c’est bien le grand amour qu’elle recherche naïvement sur ce site, et c’est peut être à ce même grand amour qu’elle a cessé de répondre du jour au lendemain parce qu’il avait demandé à la voir. Oh, Lily qui n’a toujours pas su regagner confiance en qui que ce soit. Elle n’arrive pas à avouer cette partie romantique d’elle même mais s’accorde au moins pour leur laisser un peu d’espoir. “J’ai encore l’espoir de croire que oui.” Le grand amour saura se différencier du lot s’il est vraiment ce qu’il est, non ? C’est comme ça dans les films, c’est comme ça dans les livres, c’est comme ça dans les dessins animés alors ça doit forcément en être de même dans la vie réelle.
”Tu trouves ça gênant de quand même se voir alors qu’on ne fait que rigoler ?” Trop franche Lily, trop franche.
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| | | | (#)Lun 30 Mar 2020 - 20:44 | |
| « Si je suis une fille normale qui va dans un bar louche, je deviens une fille louche. » Je crois que ça résume bien la situation. Mais on n'est pas dans un bar louche. Si ? Je laisse échapper un petit rire. « T'as grave le droit d'effectivement choisir. Méfie toi des vieux à lunettes. » Toujours, c'est le critère numéro un quand on choisi des gens avec lesquels boire. Pas de vieux à lunettes, pas de jeunes avec des des ensemble léopards - genre tout le corps en léopard, c'est non - et pas non plus de casquettes à l'envers. Sauf si la casquette en question est rouge, là, ok.
Je ne cherche rien. Bien sûr que si, on cherche tous un truc en venant à des rendez-vous comme ceux-là. On est tous en train d'essayer de se camoufler derrière de fausses raisons, mais on cherche tous un truc, surtout sur ces applications. Surtout sur Tinder. Peut-être qu'elle ne cherche effectivement pas le grand amour. Peut-être qu'elle cherchait juste quelqu'un avec qui échanger des memes, auquel cas elle aura réussi sa grande mission : je suis la personne idéale. Plus la peine de chercher, Lily. « Non, bien sûr. Ok, moi je cherche des gens cool. J'ai trouvé, je crois. », que je lance, fier de moi. Je ne crois pas, j'en suis sûr. Il n'y a que les gens cool pour comprendre les images sans qu'on leur explique pendant cinq minutes en soulignant "mais si, c'est drôle". Je déteste devoir expliquer les trucs que j'envoie aux gens, je ne sais pas expliquer le sentiment de malaise qui s'étire dans mes veines lorsque je termine enfin par un "nan c'est pas grave oublie haha". Ça me fait penser à ma mère, à qui j'envoie parfois des trucs drôle pour "garder le lien intact", comme ils disent. A ma mère, je lui envoie toujours les plus simples, celles avec les photos de chats. Quand elle répond "très drôle, mon chéri", je sais qu'elle n'a pas compris. Si elle ne répond pas, c'est qu'elle a honte que je sois son fils.
« J’ai encore l’espoir de croire que oui. » Elle est mignonne. Je ne rigole pas, je me retiens de le faire, le sarcasme prêt à pointer le bout de son nez. Mais non, je suis sage, je soupire doucement comme si l'idée me faisait envie. Peut-être que son espoir à elle me fait envie, c'est vrai. Je ne suis pas capable d'une telle prouesse. Mes yeux se posent sur ma tasse. Elle est vide, à mon grand désarroi. « Tu trouves ça gênant de quand même se voir alors qu’on ne fait que rigoler ? » Je relève les yeux, fronce doucement les sourcils. Mon léger sourire ne m'a pas quitté, pourtant. « Oh, bah je pars, si c'est que ça. » Et pourtant, je ne bouge pas. « La prochaine fois on ira au cinéma, pour pleurer. » Ça sera peut-être moins gênant. « Je choisirai le film, par contre. Toi, tu vas à coup sûr choisir un film à l'eau de rose. » Beurk. « On prendra un truc de zombie. Ok, si tu veux, à la fin ils trouvent l'amour. » Pardon Lily, je te jure que je t'apprécie. C'est juste trop aisé de te taquiner, même si je te découvre à peine.
Et de toute façon, moi aussi j'ai peur des films d'horreur. |
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