| The tide that left and never came back (ft. Jasper) |
| | (#)Mar 17 Déc 2019 - 6:39 | |
| The tide that left and never came back Quinn Callahan & Jasper Wickham Samedi 18 Janvier 2020.Un vent chaud souffle doucement sur la marina de Brisbane, faisant tanguer les quelques bateaux de plaisance encore amarrés. Je longe l’un des pontons en bois, laissant mon regard se balader aux alentours. En ce samedi matin d’été prometteur, de nombreuses personnes se préparent à passer les prochaines heures en mer. Sur ma gauche, une famille de cinq embarque, glacières sous le bras et sourires détendus aux lèvres. Sur ma droite, un couple discute avec un autre homme devant un petit yacht affichant une pancarte A louer. S’agit-il de touristes ? Ou bien de locaux qui vivent à l’intérieur des terres et ont envie de se faire plaisir pour le week-end ? Quelles que soient les raisons qui les poussent à s’éloigner des côtes, je les comprends tellement. A un point qu’ils ne peuvent imaginer. Je me laisserais sans doute mourir si je me retrouvais un jour à plus de trente ou quarante kilomètres de l’eau. Et encore, c’est un grand maximum. Les océans et leur univers font partie intégrante de moi depuis ma plus tendre enfance. Et mon métier, que je vois davantage comme une vocation, en est la preuve ultime. Je ne me vois pas faire autre chose, jamais. Je suis pourtant passée près de tout perdre récemment, mais le sort en a décidé autrement. D’autres n’ont pas eu cette chance. Mon cœur se serre alors que j’approche de mon point de chute, et mes pas ralentissent malgré moi. Mes yeux se posent sur le catamaran qui se dresse juste devant, à une vingtaine de mètres. Je peux même apercevoir son propriétaire, en train de bricoler quelque chose sur le pont. A cet instant précis, j’ai envie de prendre mes jambes à mon cou. Faire demi-tour, m’éloigner aussi vite que possible, remonter dans ma voiture et rentrer à la maison. Je lutte contre ce besoin viscéral de fuir et avance un peu plus. Je n’ai rien à me reprocher, pourtant. Je le sais. Les choses ne se sont pas déroulées comme prévu, mais ce n’est pas faute d’avoir essayé. Jusqu’à demander un service totalement illégal à un ami proche pour éviter la déchéance de deux autres. Je m’arrête devant le voilier voisin, souffle un bon coup en espérant retrouver un peu de force et de courage, puis me dévoile enfin à Jasper. Lorsque nos regards se croisent, je me sens soudain démunie, vidée. Incapable de faire le moindre mouvement, ni de prononcer le moindre mot. C’est la première fois qu’on se revoit depuis Novembre. Depuis la réunion de crise causée par trois missives adressées à chacun d’entre nous : lui, Caelan et moi. L’étincelle qui avait mis le feu aux poudres. Par la suite, je les avais tenus informés de cette « enquête » qui n’avançait pas et leur avait donné la nouvelle date butoir (obtenue après une forte négociation) par simples textos interposés. Je ne me sentais pas capable de lire la peur sur leurs visages, ni d’entendre la déception dans leurs voix, alors que le temps passait et que Jan n’avait toujours aucune piste. Jusqu’à cet appel de Caelan, dans les tous premiers jours de Décembre. Je me souviens encore de ses mots comme s’ils dataient de la veille. « Ça n’apporterait rien qu’on coule tous avec ce navire et tu le sais. Jasper le sait aussi. Le risque est trop grand. Si ton ami ne trouve pas la personne qui nous menace pour l’empêcher de tout dévoiler, tu as le devoir de sauver ton équipe, et de te sauver toi. Quinn, il faudra que tu publies les vrais résultats. Ça ira pour nous. Je te le promets. » J’avais fait bonne figure pour ne pas rendre les choses encore plus difficiles qu’elles ne l’étaient déjà. Pourtant, à la seconde où la communication avait été coupée, je m’étais écroulée, en larmes à l’idée de devoir en arriver à de tels extrêmes. Mais consciente, comme Caelan l’avait souligné, qu’il ne s’agissait aucunement d’un choix. Je me racle la gorge pour évacuer la boule qui s’y était formée. « Hey, Jasper. » Ma voix reste faible. Je dois admettre que j’appréhende sa réaction. Même si je ne suis pas responsable de la manière dont cette histoire s’est terminée, je pourrais comprendre qu’il ne veuille pas se retrouver en face de celle qui a détruit sa carrière. Qu’il ne veuille plus entendre parler de moi du tout. Je me contente donc de rester là, immobile, silencieuse et le cœur battant, attendant de connaître la sentence qu’il me réserve. @Jasper Wickham - Spoiler:
DRAMAAAA. @Caelan Leckie - Pour info, et me dire si je dois changer quelque chose dans le texte qui te concerne.
Dernière édition par Quinn Callahan le Mar 24 Déc 2019 - 4:19, édité 1 fois |
| | | | (#)Mer 18 Déc 2019 - 9:08 | |
| Dire que 2020 avait débuté de la pire des façons était un euphémisme que tous (y compris les plus optimistes) ne pouvaient que constater. Divorcé, libéré de ses fonctions d’enseignant, le cœur en vrac et sa vie entassée dans des cartons, Jasper en était rendu à un point où il sentait que tout lui échappait, ou du moins que tout lui avait déjà échappé et qu’il ne pouvait plus rien faire pour se sortir du pétrin. Par chance (disons-le ainsi) il ne pouvait plus rien lui arriver de pire ; l’impression d’avoir touché le fond omniprésente, constante, comme une vieille amie qui le tirait vers le bas à chaque seconde. Jasper avait gâché sa vie à trente-six ans, et ce constat le rongeait depuis des semaines depuis que la sentence était tombée. Il ne tenait personne pour responsable de ce gigantesque fiasco, de son discrédit scientifique, car au final il s’agissait de son idée, de ses choix avec Caelan, et du scénario qu’il avait lui-même contribué à monter en avançant ses pions de la pire des façons. Aujourd’hui c’était terminé, et il fallait désormais songer à tourner la page, à réécrire une histoire. C’était mal le connaître que de l’imaginer le convaincre de faire autre chose qu’enseigner, alors le deuil de sa carrière prendrait sans doute bien plus de temps que prévu d’autant plus que cet incident n’était pas le seul à être venu noircir sa vie ces derniers temps. Il y avait une accumulation de choses qui n’allaient pas, mais pour s’empêcher de sombrer totalement, comme à chaque fois le Wickham trouvait son réconfort dans l’essentiel, son essentiel ; l’océan. L’avantage de vivre sur un bateau était certainement d’avoir le confort d’être sur place pour plonger, pour nager. Aujourd’hui il avait simplement prévu de profiter de la météo clémente (la fournaise les avait épargnés là où ils cuisaient littéralement depuis quelques jours) alors tandis qu’il rassemblait ses affaires sur le pont, le blond se jurait de faire de cette journée l’une de celles qu’il ne terminerait pas en maudissant la terre entière. Un sacré challenge. « Ouais, monte la garde. » Le chat de gouttière qui avait élu domicile dans son cordage était sans doute la seule présence qu’il tolérait, et c’était très certainement puisque ce dernier ne parlait pas pour lui rappeler à quel point sa vie était un désastre que Jasper l’appréciait. Il était resté silencieux auprès de ses amis, de ses collègues, de sa famille et même de son ex-femme, terré en ermite le temps que ses nerfs s’apaisent. Il se laissait jusqu’à la fin de l’hiver ; encore quelques semaines pour souffler. Du moins ... « Hey, Jasper. » Alors qu’il embarquait quelques affaires dans un sac à dos, Quinn était apparue dans son champ de vision, à quelques mètres de lui, à peine. Oh. L’océanographe avait une voix faiblarde et la décence de ne pas le chambouler en arrivant en trombe ; sans trop le savoir encore il l’en remerciait. Les émotions se massaient, s’entrechoquaient dans son esprit alors que son rythme cardiaque frôlait les sommets. Jasper était rarement dans des états de stress comme celui-ci, mais ces derniers temps ils étaient communs, et lui qui s’était toujours considéré comme étant d’un calme olympien se retrouvait désormais à faire des montagnes russes des battements de son cœur. Il ne savait pas bien si Quinn était à classer dans une bonne où dans une mauvaise case, car il appréciait la personne, il appréciait les valeurs qu’elle protégeait, mais Jasper ne pouvait pas la dissocier de son auto destruction et ce souvenir était encore trop frais pour être balayé. Il lui avait fallu quelques secondes pour répondre, bien qu’il ne s’agisse en réalité que d’un balbutiement, d’un « Salut, Quinn. » répondu dans un souffle alors qu’il se rapprochait instinctivement. « Ça fait ... un moment. » Et par un moment il était inutile de préciser qu’il faisait référence à la période post-désastre. Il ne lui en voulait pas de ne refaire surface qu’aujourd’hui, lui non plus n’avait pas pris de ses nouvelles après tout. Il aurait dû. « Tu voulais me voir ? » Elle aurait pu être là par hasard, mais Jasper en doutait. Non, il y avait de fortes chances pour que la blonde soit là pour lui, alors s’ajustant d’un quart sur le côté il proposait : « Tu veux monter ? Je dois pouvoir faire du café. » Il le pouvait sans conteste ; le café avait été la seule boisson à trouver grâce à ses yeux lors de ses nombreuses nuits d’insomnie.
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| | | | (#)Lun 23 Déc 2019 - 11:42 | |
| Le temps est comme suspendu au moment où nos regards se croisent. La marina, son effervescence du samedi matin ou encore le roulis des bateaux amarrés aux nombreux ponts alentours n’existent plus. Jasper et moi sommes seuls. Complètement seuls face à notre amertume, nos regrets, notre amitié mise à mal par les derniers événements. Aussi louables aient été nos intentions, nous nous sommes retrouvés dépassés, ensevelis. Aujourd’hui, nous n’avons pas d’autre choix que d’apprendre à vivre avec les conséquences de nos actes. La grande question est de savoir si nous le ferons ensemble ou non. Jasper me laissera-t-il le soutenir dans cette épreuve ? Ou m’obligera-t-il au contraire à l’abandonner ? Il est dit que l’on peut voir toute notre vie défiler devant nos yeux lors de notre dernier souffle. Et ces quelques secondes durant lesquelles tout se fige, durant lesquelles je ne sais pas ce qu’il adviendra de nous, je comprends que c’est sans doute vrai. Les souvenirs remontent un par un, depuis notre rencontre. Je ne me retrouve pas seulement devant Jasper, mais devant tout ce qu’il représente : cet étudiant passionné avec qui je pouvais passer de longues heures à débattre, ce collègue respecté avec qui j’échangeais sur nos dernières découvertes à l’occasion de déjeuners sur le campus, et enfin, cet homme brisé dont j’ai pulvérisé la carrière d’une simple signature sur un bout de papier. Jasper et moi n’avons jamais été plus proches que ce qui découlait de notre choix professionnel commun. La plupart de nos conversations prenaient place au cours de quelques repas ou de quelques bières non loin du campus, et le plus souvent avec Caelan. A deux ou trois reprises, je suis venue lui faire signe ici même au pied de son catamaran, me trouvant déjà à la marina pour une autre raison. C’était tout. Je ne peux pas prétendre le connaître vraiment. Malgré cela, il n’a jamais été qu’un simple confrère pour moi. Il fait partie de ces amitiés discrètes qui ne font pas de bruit mais qui n’en sont pas moins importantes. Qui ne prennent pas de place mais qui, pourtant, vous manquent en laissant un grand vide dans votre cœur si vous avez le malheur de les perdre un jour. « Salut, Quinn. Ça fait... un moment. » La voix de Jasper fait taire tous ces doutes, toutes ces questions qui m’ont envahie en une poignée de secondes. Il a raison. Je m’en veux d’avoir attendu. D’avoir manqué de courage pour venir réclamer de ses nouvelles après la publication des résultats. De son côté, le ton de sa voix n’a rien de réprobateur, et je lui en suis sincèrement reconnaissante. « Tu voulais me voir ? » J’acquiesce en silence. Intérieurement, je suis toujours en train de me battre pour contenir ce trop-plein d’émotions qui menace d’exploser. « Tu veux monter ? Je dois pouvoir faire du café. » Ses mots libèrent l’immense poids qui pesait sur mes épaules. Si Jasper avait voulu couper les ponts, il l’aurait fait sans détour. Je le sais. Il m’invite parce qu’il en a envie et pas parce qu’il se sent obligé. Ce simple fait me donne une énergie nouvelle. Celle de lui sourire, le regard brillant. « J’aimerais beaucoup. » Il me tend la main pour m’aider à grimper. Je la saisis sans attendre, et d’un mouvement leste, trahissant une habitude à effectuer ce dernier, je me retrouve à bord aux côtés de Jasper. J’ai envie de le serrer dans mes bras et de lui dire combien je suis désolée. Tu as cru que c’était le bon moment, mais t’étais pas prête, Quinn. T’étais pas prête à le revoir. A te retrouver face à lui. Face à ce que tu lui as fait. Un peu plus tôt, je pensais qu’il ne voudrait peut-être plus entendre parler de moi, parce que je suis désormais le symbole d’une fin aussi soudaine que brutale. Mais la réciproque est tout aussi vraie. Et des deux, c’est clairement moi la plus faible. Je me racle la gorge pour essayer de dissimuler mon trouble au moment où Jasper s’avance vers l’échelle qui mène à l’intérieur du bateau. Je le suis et un instant plus tard, m’installe sur la banquette. Il me tourne le dos pour préparer le café, ce qui rend ma question, formulée du bout des lèvres, un peu plus facile à poser. « Comment tu vas ? » @Jasper Wickham |
| | | | (#)Mer 1 Jan 2020 - 10:14 | |
| D'aussi loin qu'il s'en souvienne, Quinn avait toujours été un visage familier, une présence habituelle, une amie. C'était comme ça qu'il avait fini par la considérer au fil des années, car ces deux passionnés de l'océan étaient faits du même bois, animés du même feu, et si lui avait eu une façon un brin trop chaotique de gérer sa carrière, il avait fini par prendre du recul et par considérer sa chute comme n'appartenant qu'à lui seul. Du moins en théorie. Dans les faits subsistait de la rancœur, un sentiment d'injustice, car il ne pouvait se targuer d'être l'homme parfait, celui qui arrivait à faire la part des choses là où la situation l'avait brisé, mais non, il n'en voulait pas à Quinn, et si de là voir sur le ponton devant son catamaran l'avait quelques peu chamboulé, il était sincère dans sa façon de l'accueillir. Du café apaiserait les aiderait de toute façon à discuter, car comme elle lui avait silencieusement acquiescé il y a quelques secondes, elle désirait le voir, lui parler. « J’aimerais beaucoup. » A son tour d'hocher la tête, lui proposant sa main pour l'aider à grimper. Une main qu'elle acceptait. « Comment tu vas ? » La suite s'était enchaînée avec rapidité, dans une atmosphère tendue, sans doute un peu trop. Quinn s'était installée sur la banquette et lui avait mis en marche la machine à café ; un geste mécanique qu'il aurait pu accomplir les yeux fermés. "On fait aller." A quoi bon mentir ? Ces derniers jours avaient été durs, et outre les sentiments négatifs qui l'enveloppaient, l'ennui prenait de plus en plus de place dans sa vie de trentenaire à la dérive. "Je me suis laissé quelques jours pour ... reprendre mes marques." pour s'habituer à ce nouveau quotidien. "Mais je vais bien" mensonge "je me laisse un peu de temps avant de retrouver un autre job. Le temps de souffler." Le temps de faire le deuil de l'enseignement. C'avait toujours été une vocation pour lui, alors tourner la page n'avait rien d'évident, bien qu'il ait été approché par quelques ONG depuis que l'éclatement de sa destitution avait fait des échos dans le milieu. "Et toi ? Comment tu vas ?" Il attrapait les deux tasses de dessous la machine, en faisant glisser une vers Quinn tandis qu'il se réservait la seconde, la tournant entre ses doigts avec nervosité. "Ça se passe bien à la fac ?" C'était sûrement une mauvaise idée que de ressasser le passé, mais l'université avait représenté presque vingt ans de son existence ; c'était plus fort que lui, et il n'arrivait pas encore à se détacher, à couper le cordon d'un lieu qui avait été sa maison lorsque sa vie s'était fait la malle sous ses yeux. Entre son divorce et cette affaire, son laboratoire avait été le seul endroit ou Jasper avait l'impression d’œuvrer pour une cause qui avait du sens, et bien qu'elle lui ait coûté sa carrière ... aujourd'hui si on le lui proposait il referait tout à l'identique. "Je ... pourquoi t'es venue Quinn ? Je suis content de te voir. Promis. Mais quelque chose me dit que c'est pas du fait du hasard." Avait elle quelque chose à lui dire ? Ou peut être qu'elle avait laissé une période de sûreté avant d'oser se confronter à lui s'il la tenait responsable de sa chute. Ce qui n'était pas le cas.
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| | | | (#)Sam 4 Jan 2020 - 7:21 | |
| Je pose la question tant redoutée au moment où Jasper me tourne le dos afin de faire couler nos deux boissons chaudes. Tu n’as même pas le cran d’attendre qu’il soit assis devant toi pour lui demander de ses nouvelles. Bien plus encore que ses mots, c’est son regard qui me terrifie. Parce que j’ai peur des émotions que ce dernier exprimera une courte seconde, avant que Jasper ne recompose le masque dont il se servira pour me répondre. La déception. La rancœur. Éventuellement la colère. Je me sens coupable de manquer de courage à ce point, surtout que je me fais peut-être des idées sur la façon dont il appréhende ce qui s’est passé. Caelan ne m’en veut pas. Pourquoi les choses seraient différentes avec Jasper ? Parce qu’ils sont différents. Parce qu’en cette fraîche journée du mois d’août où ma vie avait basculé face à leurs révélations, Caelan avait affirmé qu’il comprendrait si je refusais de les couvrir. Son acolyte de toujours avait acquiescé, mais ses yeux et le ton de sa voix l’avaient trahi. Parfois, j’en suis à me demander s’il m’a crue quand j’ai promis avoir fait le maximum pour mettre la main sur celui ou celle qui nous a menacés. Jusqu’à harceler Jan plusieurs fois par jour. Jusqu’à passer des nuits blanches en espérant un appel tardif. Croit-il que j’espérais secrètement l’échec des recherches de Jan ? Pire : croit-il que j’ai fait semblant, m’assurant ainsi que mon équipe et moi-même ne risquerions rien, quitte à détruire les carrières de deux collègues au passage ? Non, tu divagues parce que tu crains sa réaction, c’est tout.La sentence ne tarde pas. « On fait aller. » Je hoche la tête en silence, quand bien même Jasper ne peut pas me voir. Je ne m’attendais pas à ce qu’il me raconte en détail la difficulté des dernières semaines. Nous n’avons jamais été assez proches pour prétendre à ce niveau de confidence, même en-dehors des récents événements et de leur contrecoups. « Je me suis laissé quelques jours pour... reprendre mes marques. Mais je vais bien. » Vraiment ? « Je me laisse un peu de temps avant de retrouver un autre job. Le temps de souffler. » « Oui, tu as raison. » J’acquiesce doucement. C’est, en tout cas, ce que j’aurais fait à sa place. Je le sais, parce que j’ai imaginé m’y trouver à maintes reprises, lorsque nos futurs à tous étaient encore incertains. Tant de scénarios, tant d’éventualités s’étaient formés dans mon esprit. Ils avaient tous un point commun : la douleur d’avoir perdu un morceau de moi-même. « Et toi ? Comment tu vas ? » Il se rapproche de la table et fait glisser l’une des deux tasses vers moi. « Merci. » « Ça se passe bien à la fac ? » Je risque enfin un regard sur Jasper. Mon cœur bat la chamade. Comme je ne vois aucune trace d’amertume en lui, je reprends peu à peu contenance. « C’est… » Oserais-je me plaindre face à lui ? Lui dire combien je hais tous ceux qui viennent me féliciter d’avoir révélé un terrible mensonge ? Que chacun de leurs mots sont autant de lames qui me transpercent de part en part ? Bien sûr que non. « Ça va. » Je hausse les épaules et esquisse une grimace. « C’est… plus pareil. » Je laisse apparaître un petit sourire en coin. « J’ai droit à des regards noirs de certains de tes étudiants, tu sais. » Contre toute attente, ce sont eux qui me font tenir. Savoir que Jasper et Caelan sont appuyés même de loin et malgré la décision indiscutable de l’université me réconforte. Et tant pis si je passe pour la méchante aux yeux de ces personnes-là. « Malgré vos renvois, vous avez beaucoup de soutien. » Je ne sais pas s’il en a conscience, ce serait compréhensible qu’il reste éloigné des médias. Mais je pense qu’il est important qu’il le sache quand même. « Je ... pourquoi t'es venue Quinn ? Je suis content de te voir. Promis. Mais quelque chose me dit que c'est pas du fait du hasard. » Je fais tourner la tasse entre mes mains avant d’avaler une gorgée du café chaud et de reporter mon attention sur Jasper. OK, c’est le moment. « Je suis venue pour un million de raisons. Pour savoir comment tu allais. Mais… » Je détourne mon regard déjà brillant d’émotion. Soutenir le sien est cent fois plus dur que ce à quoi je m’attendais. « J’avais aussi besoin de savoir si tu m’en voulais, Jasper. Je… On s’est pratiquement pas vus depuis la lettre de menace et… » Tant pis si mes yeux sont pleins de larmes : je les plonge finalement à nouveau dans les siens, espérant qu’ils laissent entrevoir toute ma sincérité. « J’ai vraiment fait tout ce que je pouvais. Je suis désolée. » Je souffle. « Il fallait que je te le dise. De vive voix. » Je laisse passer un court instant de silence afin d’empêcher mes émotions de prendre le dessus. Puis j’ajoute, le ton un peu plus assuré cette fois. « Mon ami continue les recherches. Jusqu’à ce qu’il trouve le ou la coupable. » Mon visage s’assombrit. « Et je peux te faire la promesse que qui que ce soit, il paiera. » Je ne sais pas encore de quelle manière. Mais il ne s’en sortira pas comme ça, c’est une certitude. @Jasper Wickham |
| | | | (#)Lun 13 Jan 2020 - 12:22 | |
| Les émotions se bousculaient sans qu’il ne sache trop quelle place leur accorder ni comment les prioriser. Pour l’heure importait le café qu’il faisait couler pour eux, et c’était déjà bien assez de le faire tout en sachant que Quinn se trouvait derrière lui. Il ne lui en voulait pas pour la fin de sa carrière, celle pour laquelle il avait tant travaillé. L’océanographe savait qu’il était responsable de son propre désastre, mais la conjoncture des choses faisait qu’il se sentait pris au piège dans une injustice, et cela rendait le tout un brin plus compliqué à accepter. Caelan avait toujours été plus compréhensif, prenait plus de recul que lui, mais si Jasper était différent, dans le fond les deux pensaient la même chose ou presque de toute cette histoire. Quinn avait fait son maximum, et eux n’avaient plus qu’à assumer les conséquences de leurs choix. Lui confiant qu’il n’était pas au top de sa forme sans toutefois se perdre dans les détails, il expliquait ensuite avoir besoin d’encore un peu de temps avant de se remettre sur le marché du travail, ce à quoi la blonde répondait doucement : « Oui, tu as raison. » en opinant du chef. Il n’avait pas envie de s’épancher sur ses malheurs, aussi enchaînait il en lui demandant ce qu’il en était d’elle en ramenant leurs deux cafés sur la table. Elle lui soufflait un : « Merci. » avant qu’il n’enchaîne et ne lui demande comment était l’atmosphère à l’université ; c’était plus fort que lui. « C’est… » Arquant un sourcil face à cette hésitation, Jasper n’intervenait pourtant pas, préférant la laisser poursuivre. « Ça va. » Donc le monde continuait de tourner alors. Peut-être était-ce mieux ainsi. Mensonge. Le monde s’était arrêté pour lui. « C’est… plus pareil. » Elle laissait apparaître un rictus au coin de ses lèvres, et lui faisait tourner sa tasse entre ses doigts, attendant la suite avec impatience. Comment ça ne n’était plus pareil ? « J’ai droit à des regards noirs de certains de tes étudiants, tu sais. » Les élèves. Ses élèves. L’université avait beau l’avoir rayé de la liste du personnel, eux ne lui avaient donc pas tourné le dos. « Malgré vos renvois, vous avez beaucoup de soutien. » Il hochait la tête, laissant un sourire sans joie étirer ses traits. « Je suis désolé que tu te sois retrouvée au milieu de tout ça. Ils finiront par … s’y faire et tout redeviendra à la normale. » Il avait failli ajouter qu’elle ne devait pas s’en faire, mais même lui n’était pas persuadé que tout irait bien et qu’il ne finirait pas par tout plaquer pour s’exiler au bout du monde et refaire sa vie loin du fantôme des épreuves dont il se serait volontiers passées. Une question le taraudait toutefois ; pourquoi Quinn était venue ? Certes il était content de la voir, mais l’océanographe semblait être … mal à l’aise. Comme si elle avait quelque chose à lui dire sans savoir par quel bout commencer. « Je suis venue pour un million de raisons. Pour savoir comment tu allais. Mais… » Penchant la tête sur le côté, Jasper observait Quinn sans trop savoir quoi dire. Il n’était pas le seul dont la vie avait été chamboulée par cette histoire, mais si lui se posait en victime, la blonde ne semblait pas s’octroyer ce droit, et prenait à charge une responsabilité qui n’était pas la sienne. « J’avais aussi besoin de savoir si tu m’en voulais, Jasper. Je… On s’est pratiquement pas vus depuis la lettre de menace et… » Parce que ç’avait été dur, qu’il avait préféré s’isoler, que sa colère aurait certainement irradié jusqu’à elle et qu’il ne se sentait pas de voir ses proches pâtir du feu qui l’animait. « J’ai vraiment fait tout ce que je pouvais. Je suis désolée. « Il fallait que je te le dise. De vive voix. » Il n’en avait pas douté une seule seconde, et si ses larmes témoignaient de sa sincérité, Jasper ne se sentait pas de la laisser poser un jugement si dur face à ce qu’elle pensait de cette réalité qu’était la leur. « Quinn … je te promets que je vais bien. Je vais pas te mentir en te disant que je suis heureux mais tu n’y es pour rien. Je peux pas te mettre sur le dos mes erreurs. Et j’aurais peut-être dû te dire que je suis reconnaissant de … tout ce que tu as essayé de faire pour nous tirer de là, mais crois moi je le suis. Ça n’a pas fonctionné, mais ce n’est pas toi. Je le sais bien, crois-moi. » Pour appuyer son discours, Jasper avait employé un ton un brin plus assuré, laissant ainsi à Quinn le temps de faire le vide et de se recentrer. « Mon ami continue les recherches. Jusqu’à ce qu’il trouve le ou la coupable. Et je peux te faire la promesse que qui que ce soit, il paiera. » Pour la première fois, elle laissait parler sa détermination plus que le fond de son cœur, mais si d’ordinaire Jasper était quelqu’un de très déterminé à faire éclater la justice (en témoignait d’ailleurs les choix pris avec Caelan et leurs équipes) là … il se sentait davantage comme le pot de terre contre le pot de fer. « C’est fini Quinn. J’y crois plus, il faut … avancer. » et tourner la page. Une page qu’il aurait aimé ne jamais avoir à tourner.
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| | | | (#)Sam 25 Jan 2020 - 5:21 | |
| Les sensations et relations humaines sont parfois bien compliquées. Je n’aurais jamais pensé que des regards sombres et inamicaux me donneraient davantage de force que nombre de compliments sincères. Je me sens soulagée de voir que Jasper et Caelan fédèrent autant de gens autour de leurs renvois. Des gens qui ne comprennent pas la décision officielle du campus et qui auraient préféré les voir rester. Ils sont appréciés, appuyés, et cela me réchauffe le cœur. Pourtant, ce sont ces mêmes personnes qui me lancent des coups d’œil assassins au détour des couloirs, et qui me considèrent comme une véritable traitresse à la cause pour avoir dénoncé mes confrères plutôt que d’avoir choisi la complicité. Je ne peux pas leur en vouloir. Ils ne savent rien de la vérité, de ce que nous avons vécu tous les trois. Ils n’ont aucunement conscience que chez moi, dans un tiroir sous clé discret de mon bureau, il existe un second dossier, que je n’ai pas eu l’occasion de présenter. Même si j’ai voulu croire que ce serait le cas, jusqu’à la toute dernière seconde. Jasper s’excuse de la situation, ce qui me touche sincèrement. J’esquisse alors un petit sourire, avant de lui répondre. « Au contraire. Ça me réconforte de voir tout le soutien dont ils font preuve envers toi. Envers vous. » Il faut qu’il comprenne que je ne suis pas venue ici pour me plaindre de la façon dont certains étudiants (voire même certains adultes) de l’université me traitent depuis que cette histoire a explosé au grand jour. D’ailleurs, heureusement qu’ils sont là, m’offrant un répit entre tous les moments où je suis obligée de serrer les poings et les mâchoires face aux félicitations des autres, et à leurs remerciements. C’est dans des instants comme ceux-là que je réalise une chose importante : je n’aurais jamais pu refuser de les aider, ce fameux jour où ils m’ont demandé un rendez-vous en urgence dans le parc. Du moins, pas sans de terribles conséquences. Si j’avais écouté ma raison plutôt que mon cœur, aujourd’hui je ne pourrais plus me regarder dans une glace. Mais après avoir fait tout mon possible, je m’en veux quand même. Alors, quand Jasper me demande pourquoi je suis venue le voir sur son catamaran, je fais tourner la tasse entre mes mains et réponds sans aucune retenue. Je mets dans mes mots toute la sincérité, toute la peine que je ressens face à cette situation qui nous a complètement échappé avant de gâcher deux vies. La réaction de Jasper ne se fait pas attendre. Je l’écoute en silence, le regard baissé sur le café noir, alors qu’il refuse de reconnaître ma responsabilité. Au contraire, il est reconnaissant de mes efforts, il sait que j’ai fait mon maximum et que cet échec cuisant n’est pas le mien. J’efface une larme avant qu’elle ne se fraie un chemin sur ma joue d’un geste rapide. Ce qu’il me dit me fait du bien, il ne saura jamais à quel point. Je repose mon attention sur lui et souffle. « Merci, Jasper. » C’est court, et c’est simple, mais cela suffit à faire passer toute ma gratitude. Je lui avoue alors que je n’ai pas fait cesser les recherches du coupable. Je tiens à savoir qui est derrière ces lettres de chantage, qui m’a enlevé mon choix de publier l’une ou l’autre des contre-expertises. Jasper secoue la tête, abattu. « C’est fini Quinn. J’y crois plus, il faut … avancer. » Il a raison et j’aimerais tellement en être capable. Ce n’est pourtant pas dans mon caractère, et encore moins quand des proches ont été touchés. « Non, Jan est sur plusieurs pistes, il va finir par trouver. Je sais que je devrais laisser tomber, mais c’est au-dessus de mes forces. Il faut que je sache. » Je bois une autre gorgée de café et aborde la seconde raison de ma visite. « Il y a autre chose. Je vais attaquer l’usine en justice. Au nom de ma fondation. » Comme un appui, je plonge mon regard déterminé dans celui de Jasper. Il pourra aisément lire que je compte bien aller jusqu’au bout. « On a perdu une bataille, mais on n’a pas encore perdu la guerre. Il est hors de question qu’ils détruisent nos côtes parce que les chiffres sont légèrement en-dessous de la limite. » J’entreprends de donner quelques détails à Jasper lorsque je suis certaine qu’il a digéré cette information inattendue. « Ce n’est pas encore officiel. Ça ne le sera que lundi. Je tenais à ce que vous soyez les premiers au courant, Caelan et toi. » Je sais dans quoi je m’embarque. Les prochaines semaines, les prochains mois, allaient être sous haute tension. Il allait me falloir un dossier béton, encore plus détaillé et percutant que les expertises habituelles. On ne traîne pas un gros industriel en justice sans s’armer au préalable, sauf à vouloir se faire écraser dès les premières secondes. « Tout aide sera la bienvenue. » J’ajoute finalement. Mais comme il n’a plus le droit de s’impliquer, pas ouvertement tout du moins, j’esquisse un sourire complice, avant de conclure. « Même celle de l’ombre. » Si cela peut lui permettre de vraiment tourner la page, alors je n’en serais que plus heureuse encore. @Jasper Wickham |
| | | | (#)Mer 5 Fév 2020 - 4:06 | |
| Jasper n'avait jamais voulu que Quinn pâtisse de ses choix, ni même qu'elle se retrouve dans une position si délicate à l'université. Elle avait beau esquisser un semblant de sourire, lui assurer que : « Au contraire. Ça me réconforte de voir tout le soutien dont ils font preuve envers toi. Envers vous. », c'était dans sa nature de s'en faire, et en l’occurrence, si sa situation n'était pas aussi catastrophique et dramatique qu'elle ne l'était, il aurait sûrement tenté d'arranger les choses. Malheureusement, là il en était incapable. Pour toute réponse il hochait le menton, peu convaincu par les paroles de la blonde bien qu'elles lui fassent chaud au cœur, dans un sens. Ses étudiants n'en étaient pas encore au stade des âmes corrompues qui avaient joué un rôle dans son renvoi de l'université et de son discrédit scientifique, ce qui était une bonne chose, sans doute. Ils seraient plus à l'aise autour d'une tasse de café, aussi Jasper (dont la relation avec le percolateur était devenue fusionnelle) en avait fait couler deux, alimentant la conversation du mieux qu'il le pouvait. Notamment en demandant à Quinn pourquoi elle se trouvait ici, devant lui. Cela semblait faire des semaines qu'elle se sentait rongée par la culpabilité, et s'il n'avait pas été le plus affable du duo qu'il formait avec Caelan, Jasper n'en demeurait pas moins reconnaissant de tout le travail que Quinn avait fourni pour les tirer de ce mauvais pas. Elle n'avait pas choisi de briser sa carrière mais avait œuvré d'arrache pieds pour trouver des solutions. S'il s'était reclus dans son bateau ce n'était pas pour bouder, mais bien parce qu'il avait besoin de se couper du monde, ce monde ignoble qui faisait passer les fortunes avant la nature. Il était loin d'être un illuminé, ni une sorte d'activiste faisant fi des lois pour sauver quelques crevettes. Jasper protégeait simplement ce qui lui tenait à coeur, ce qui le faisait vibrer depuis toujours. L'océan était son refuge, et jamais il ne se serait risqué à le mettre en péril pour étoffer le porte monnaie d'une poignée d'hommes d'affaires. « Merci, Jasper. » Elle lui avait répondu dans un souffle, la voix prise par l'émotion. L'espace d'une seconde l'ex océanographe s'en voulait terriblement d'avoir pu la laisser croire qu'il la tenait pour responsable de tout ce désastre. Ce n'était pas le cas, loin de là, mais si Quinn poursuivait ses recherches pour mettre la main sur le corbeau qui avait précipité son renvoi et celui de Caelan, dans les faits lui voulait oublier, se reconstruire. Du moins essayer. « Non, Jan est sur plusieurs pistes, il va finir par trouver. Je sais que je devrais laisser tomber, mais c’est au-dessus de mes forces. Il faut que je sache. » Il opinait du chef, pensif. "N'y laisse pas ta peau, c'est tout ce que je te demande." Car lui avait perdu tout (ou presque) et le vivait terriblement mal. « Il y a autre chose. Je vais attaquer l’usine en justice. Au nom de ma fondation. » Pardon ? Le sourcil arqué, Jasper reposait sa tasse sur la table, se passant une main sur le visage avant de l'entendre poursuivre. « On a perdu une bataille, mais on n’a pas encore perdu la guerre. Il est hors de question qu’ils détruisent nos côtes parce que les chiffres sont légèrement en-dessous de la limite. » Sur ce point il était d'accord, mais avait été refroidi par le cataclysme dans lequel s'était terminé sa carrière. "C'est un peu le pot de terre contre le pot de fer. Tu sais que je suis du même avis de toi, mais Quinn ... t'as bien vu ce qui nous est arrivé." Il ne lui faisait pas l'affront de lui demander de ne pas le faire si elle culpabilisait, car la blonde était aussi concernée que Caelan et lui l'avaient été au sujet de leurs côtes. Elle était passionnée, et attachée. Ce choix se comprenait, mais renfermait de nombreux obstacles. « Ce n’est pas encore officiel. Ça ne le sera que lundi. Je tenais à ce que vous soyez les premiers au courant, Caelan et toi. » Il hoche la tête, tachant d'intégrer l'information du mieux qu'il le pouvait sans trop la comprendre encore. Se relancer dans un procès le paniquait, et pour le moment il tenait sa tasse avec fermeté, comme si elle était son seul point d'équilibre dans ce bateau. « Toute aide sera la bienvenue. » Cette remarque lui fit relever le menton, et son regard croisait le sien, comme si le sens de ce qu'elle venait de dire était implicite. « Même celle de l’ombre. » Cette fois il n'y avait plus de doutes, et si à nouveau, Japser laissait filer un moment avant de répondre, le "D'accord" qu'il répondait en hochant le menton était assez équivoque. "Je vais t'aider. Qu'est ce que je peux faire ? J'ai relativement le temps maintenant." Un brin cynique (il l'avait toujours été) Jasper en aurait presque retrouvé son habituel dynamisme. Il lui avait fallu d'un petit rien pour relancer la machine, et si Quinn avait assez de force pour poursuivre la bataille, lui se devait de la suivre. Son investissement pour l'océan et ses dix années d'enseignement à l'université ne pouvaient (et ne devaient) pas être balayées aussi facilement.
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| | | | (#)Dim 16 Fév 2020 - 8:22 | |
| Je suis parfaitement consciente de ne pas choisir le meilleur des chemins concernant notre adversaire, notre ennemi. La vengeance ne mène à rien. Je devrais pourtant le savoir, mais c'est au-dessus de mes forces. Je ne peux pas fermer les yeux. Je suis incapable de laisser cette histoire derrière moi sans en connaître le dénouement, sans apposer moi-même le point final. On m'a enlevé mon choix. On m'a forcée à briser la longue et belle carrière de deux confrères, de deux amis. Comment pourrais-je me contenter de tourner la page alors que le coupable court toujours ? « N'y laisse pas ta peau, c'est tout ce que je te demande. » Je ne sais pas quoi répondre à cela. Jasper se montre prudent, rationnel, et il a raison. J'aimerais pouvoir lui dire qu'il ne doit pas s'inquiéter, que je tiens simplement à savoir qui se cache derrière ces trois lettres menaçantes. Et qu'ensuite je pourrai enfin mettre cette histoire de côté, la laisser appartenir au passé. Mais je ne veux pas lui mentir. « Je ferai attention. » C'est là ma seule promesse. Je laisse une autre gorgée de café couler au fond de ma gorge et entreprends de lui offrir - enfin - l'autre raison de ma visite surprise. Je lui révèle alors ma décision de ne pas laisser cette usine détruire notre magnifique environnement, annihiler la faune et la flore de nos côtes. Je vais intenter un procès contre l'industriel sous couvert de ma fondation. C'est un droit, et je ne compte pas passer à côté. Je veux aller jusqu'au bout. Je veux me battre et gagner. Je sais que j'aurai du soutien. Voilà à quoi servent les regards noirs qui me transpercent, les commentaires violents à mon encontre dans les articles en ligne des médias locaux évoquant le renvoi de Jasper et Caelan. Ils sont là pour me rappeler qu'ils ne sont pas seuls, que nombre de gens auraient préféré un mensonge à la vérité, tant que cela permettait de sauver notre paysage. Mais encore une fois, Jasper fait preuve d'une certaine modération vis-à-vis de cet audacieux projet. « C'est un peu le pot de terre contre le pot de fer. Tu sais que je suis du même avis de toi, mais Quinn ... t'as bien vu ce qui nous est arrivé. » Je hoche la tête. Je comprends ses réserves, mais je n'ai pas envie qu'il me pense mal préparée, qu'il parte défaitiste. « J'y ai beaucoup réfléchi. Evidemment, le dossier devra être béton, mais on peut y arriver. Et puis, qui dit que d'autres organismes, d'autres fondations ne se joindront pas à nous ? Il ont peut-être juste besoin qu'on leur montre la voie pour oser en faire de même. J'ai confiance. » Ma voix est définitivement assurée. Mais je n'oublie pas non plus à qui je fais face. Je n'ai pas envie de lui cacher mon autre raison d'engager ce combat, plus personnelle celle-ci. « En fait, pour être franche, je n'ai pas l'impression d'avoir le choix. Même si on perd, je pourrais au moins me dire qu'on aura tout essayé, et je n'aurais aucun regret. Mais si je reste les bras croisés, Jasper… Je ne pourrais plus jamais me regarder dans une glace. » Mes yeux transpercent les siens. Je sais qu'il ne comprend que trop bien. Je lui propose évidemment de nous aider à récolter les preuves, à constituer notre arsenal de défense. S'il préfère ne pas s'en mêler du tout, je ne lui en voudrais pas le moins du monde. Au contraire. Je peux concevoir qu'il veuille se détacher de cette affaire, de cette situation qui l'a mis à mal. Néanmoins, après des années à côtoyer cet homme, ce passionné, quelque chose me dit qu'il fera partie de notre équipe. Qu'il acceptera de nous aider, même officieusement. « D'accord. » Un sourire illumine mon visage et je hoche la tête, satisfaite, mais surtout soulagée. « Je vais t'aider. Qu'est ce que je peux faire ? J'ai relativement le temps maintenant. » « Je te rappellerai pour discuter de tout ça en détail. J'organiserai sûrement une réunion avec tout le monde. Avant, il faut que je recontacte mon avocat pour finaliser deux ou trois choses sur la procédure. » Je plonge un regard inquisiteur dans le sien. « Je… Je n'ai pas encore été voir Caelan. » Jasper était le premier sur ma (très courte) liste. J'avais besoin de lui parler, de mettre les choses au clair avec lui pour aller de l'avant. Et maintenant que c'est chose faite, il m'est enfin possible de me concentrer sur le reste, le cœur plus léger, l'esprit plus affûté. « Tu as eu des nouvelles ? » Je l'interroge finalement avec espoir. Je me doute que Caelan n'est pas au top de sa forme compte tenu des circonstances. Prend-il le temps de rebondir, comme Jasper ? Ou a-t-il déjà d'autres idées professionnelles en tête ? J'avoue que Caelan m'inquiète davantage que son comparse de toujours. Ils ont deux caractères bien différents. Je ne suis pas sûre que Caelan ait pu prendre le même recul. Pas encore, en tout cas. « Est-ce que tu penses qu'il pourra nous aider, lui aussi ? » Choix de mot délibéré. Pourra et non pas voudra. Sous-entendu : en aura-t-il la force ? Je laisse Jasper être le seul juge. Il le connaît mieux que moi. Même si, bien sûr, j'ai déjà ma propre idée sur la question. @Jasper Wickham |
| | | | (#)Mer 26 Fév 2020 - 7:46 | |
| Il n'avait jamais été du genre à s'avouer vaincu, à accepter un sort qui ne lui convenait pas si facilement, mais en vieillissant Jasper était devenu plus pondéré. Leur bataille face à ce grand groupe ne l'avait pas laissé sans séquelles, et bien qu'il soit prêt à se relancer dans la bataille (qu'avait il à perdre ?) il n'en valait pas de même pour Quinn dont il espérait qu'elle ne fasse rien d'inconscient par culpabilité. Bien qu'à ses yeux elle n'avait absolument rien fait de mal. Au contraire. « Je ferai attention. » lui promettait-elle, sans qu'il ne sache trop s'il pouvait la croire ou non. Pour rien au monde il n'aurait voulu qu'elle subisse le même sort que celui de Caelan et le sien. D'être privé de son emploi, de sa passion, était sans doute la pire chose qui puisse arriver à ces trois passionnés, bien que d'empêcher le capitalisme détruire leurs côtes avait été une cause qui valait le sacrifice. Quinn semblait pourtant loin de laisser les choses ainsi, et lui ne pouvait que la mettre en garde une nouvelle fois. « J'y ai beaucoup réfléchi. Evidemment, le dossier devra être béton, mais on peut y arriver. Et puis, qui dit que d'autres organismes, d'autres fondations ne se joindront pas à nous ? Il ont peut-être juste besoin qu'on leur montre la voie pour oser en faire de même. J'ai confiance. » Assurée, suffisamment pour deux, la petite blonde semblait montrer une détermination qu'avait (un peu) perdue Jasper au fil des semaines. Il avait été refroidi par tout cela, et probablement que son divorce n'avait rien arrangé à son état d'esprit. « En fait, pour être franche, je n'ai pas l'impression d'avoir le choix. Même si on perd, je pourrais au moins me dire qu'on aura tout essayé, et je n'aurais aucun regret. Mais si je reste les bras croisés, Jasper… Je ne pourrais plus jamais me regarder dans une glace. » Son regard avait croisé le sien, insufflant une force qu'il pensait endormie. C'était plus facile d'oublier le massacre environnant lorsqu'on était cloisonné dans la cabine de son bateau, mais la bataille n'était pas terminée, et ils avaient encore des cartes à jouer. "D'accord." répondait il dans un souffle, venant faire tourner son mug entre ses doigts dans un geste qui traduisait le fait que ses méninges filaient à vive allure. "Il faut vraiment, vraiment, que le dossier soit béton. Parce qu'ils sont plus gros que nous." Et qu'ils s'étaient déjà fait dévorer tout cru une première fois. L'océanographe n'avait pas hésité longtemps à se mêler à la bataille ; rétablir la vérité lui tenait évidemment à coeur vu sa situation. Quinn semblait être soulagée de sa décision, souriant d'une façon qu'il jugeait sincère. « Je te rappellerai pour discuter de tout ça en détail. J'organiserai sûrement une réunion avec tout le monde. Avant, il faut que je recontacte mon avocat pour finaliser deux ou trois choses sur la procédure. » Donc elle n'avait jamais cessé d'agir. Jasper hochait la tête, s'en voulant presque d'avoir baissé les bras après l'annonce de son renvoi. Tout s'était enchaîné bien trop vite en cette fin d'année dernière, et il avait définitivement perdu pieds. "Tu comptes réunir ton équipe à nouveau ?" Il les connaissait pour la plupart, et bien que les récents évènements l'aient pas mal refroidis quant à l'idée de faire confiance à quelqu'un à nouveau ... quelque part il en avait envie. Parce que c'était dans sa nature de voir le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide. « Je… Je n'ai pas encore été voir Caelan. » Caelan. Jasper eut un rictus, un sourire sans joie qui lui étirait le coin des lèvres. Lui non plus n'avait pas de contact avec son ami, et ce depuis qu'ils avaient été renvoyés. « Tu as eu des nouvelles ? » Non. Jasper secouait le menton à la négative, précisant : "Pas depuis qu'on a été convoqués. Il m'a envoyé un message pour savoir si moi aussi, j'avais été renvoyé, et c'était tout." A peine trois mots, et sans doute était ce suffisant pour faire état du raz de marée qui avait bousillé leurs carrières respectives. « Est-ce que tu penses qu'il pourra nous aider, lui aussi ? » Quinn avait encore espoir de voir les choses s'arranger, mais en vérité, le Wickham sentait que le vent avait tourné, et qu'ils écrvaient un nouveau livre, bien différent des précédents chapitres. "Je ... peux pas en être sûr, mais je ne pense pas. Il fonctionne différemment." Caelan n'en était pas moins investi, mais Jasper le connaissait depuis suffisamment longtemps pour l'imaginer prendre le large et ne pas replonger la tête la première dans le drama. Visiblement, il était bien plus sage. "Dans tous les cas tu peux compter sur moi." Puisque lui, n'avait strictement plus rien à perdre. Il haussait d'ailleurs les épaules, se passant une main sur le visage en précisant : "J'ai enfin signé les papiers du divorce, d'ailleurs. J'aurais du chercher un autre endroit que ce bateau pour vivre maintenant que tout est officiellement réglé mais ... faut croire que j'aime bien vivre sur l'eau." Il ne savait pas bien pourquoi il en parlait à Quinn, toujours est il que depuis des semaines qu'il n'avait vu personne qui pouvait comprendre, Jasper s'était laissé aller à quelques confidences. Ils étaient devenus un peu plus que de simples collègues de travail, après tout.
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| | | | (#)Sam 7 Mar 2020 - 3:58 | |
| Il me semble important de remettre les choses dans leur contexte. Je ne me suis pas levée un beau matin en me disant que poursuivre un puissant industriel en justice mettrait un peu de piment dans ma vie (surtout qu'elle a été bien assez mouvementée ces derniers mois sans en remettre une couche). Cette décision a, au contraire, été mûrement réfléchie. Je savais que la publication de la contre-expertise ne pouvait pas représenter la fin de notre combat. J'ai donc tourné et retourné la situation dans mon esprit des centaines de fois, imaginant tous les chemins possibles, les dangers et les conséquences que ce procès pourrait avoir. Sur moi et ma carrière. Mais aussi sur mes proches, puisque les médias seraient forcément impliqués. A chaque fois, j'en suis arrivée à la même conclusion : peu importe le reste, nos magnifiques côtes, leur faune et leur flore, en valent vraiment la peine. Elles n'ont pas de voix, ne peuvent pas se défendre. Il fallait que quelqu'un le fasse pour elles. Et ce quelqu'un, ce serait ma fondation, peut-être suivie par d'autres. C'est ma manière de me racheter pour avoir officiellement autorisé l'implantation de l'usine, même si approuver de tels résultats m'a rendue malade. Je me sens donc plus motivée que jamais à mener et à gagner cette guerre, entourée d'autres gens qui, comme moi, donneront tout ce qu'ils ont pour que la victoire nous appartienne. « D'accord. Il faut vraiment, vraiment, que le dossier soit béton. Parce qu'ils sont plus gros que nous. » Jasper vient de se joindre à notre petit groupe et je ne cherche pas à dissimuler la joie que cela me procure. Un large sourire et des yeux brillants accueillent cette bonne nouvelle. « On s'en assurera. » J'acquiesce, sans perdre une once de ma détermination. J'explique ensuite à mon nouveau complice que je le rappellerai pour les détails. Il me faut encore voir quelques points avec l'avocat qui représentera Ocean Life. « Tu comptes réunir ton équipe à nouveau ? » « Je leur en ai longuement parlé. Ils sont tout aussi atterrés que moi de ce qui s'est passé, de ne pas avoir pu vous couvrir et sauver notre nature du même coup. Ils tiennent à être de la partie, eux aussi. » Mon équipe du labo, ceux en qui j'ai le plus confiance, m'ont une nouvelle fois prouvé leur loyauté. Pas envers moi non, mais envers ce que nous avons juré de protéger coûte que coûte. Je sais qu'avec eux, nous avons encore plus de chances de faire un pied de nez à ceux qui veulent polluer et détruire nos terres. Je me demande si Caelan se joindra à nous, lui aussi, et partage ce doute avec Jasper qui est l'un de ses plus proches amis. Il n'a, apparemment, pas eu beaucoup de nouvelles depuis leur renvoi. « Je ... peux pas en être sûr, mais je ne pense pas. Il fonctionne différemment. » J'approuve d'un léger geste de la tête. Je penchais aussi en ce sens, avant de demander l'avis de Jasper. « Je comprends. » Et je suis sincère. Contrairement à nous deux, Caelan a besoin de s'éloigner le plus possible du problème pour arriver à le dépasser et à en faire abstraction. Il n'est pas prêt à replonger dans toute cette histoire. Peut-être nous soutiendra-t-il de loin, c'est même probable, mais il ne proposera sans doute pas son assistance. « Dans tous les cas tu peux compter sur moi. » Je n'ai pas besoin de l'en remercier à haute voix. Mes yeux le font déjà bien assez. Il hausse les épaules et reprend. « J'ai enfin signé les papiers du divorce, d'ailleurs. J'aurais du chercher un autre endroit que ce bateau pour vivre maintenant que tout est officiellement réglé mais ... faut croire que j'aime bien vivre sur l'eau. » Un fin sourire étire mes traits. « Caelan avait parié que tu y resterais plus que prévu. Il faut croire qu'il te connaît aussi bien que tu le connais, lui. » Au-delà de son lieu de vie actuel, j'apprécie que Jasper s'ouvre davantage avec moi. Nos discussions personnelles sont toujours restées plus ou moins en surface, surtout lorsque Caelan était absent. Notre sujet de conversation privilégié n'était autre que nos recherches ainsi que nos dernières découvertes dans notre domaine. « Si tu te sens bien ici, rien ne t'oblige à en partir. Il y a pire comme lieu de vie pour un passionné de l'océan. » J'ajoute d'un air complice. Par exemple, à cinquante ou cent kilomètres à l'intérieur des terres, ou plus loin encore. « Tu tiens le coup ? » Je lui demande plus sérieusement. Il doit avoir un sacré mental, quoi qu'il en soit, pour ne pas être roulé en boule au fond de son lit. Perdre son travail est déjà dur, mais gérer son divorce dans le même temps… Je suis admirative de sa force de caractère. « Si jamais tu as besoin de quoi que ce soit… » Je sais que je ne suis pas celle vers qui il se tournerait en premier lieu, mais je tiens à ce qu'il sache qu'il peut compter sur moi. Et plus seulement comme une consœur, mais comme une amie. « J'avais prévu de passer voir Caelan après. » Je lui annonce en terminant mon café. « Mais je ne sais plus trop si c'est une bonne idée ou si je devrais me contenter de l'appeler… » Je lance alors une proposition alternative. « Ça lui ferait peut-être plaisir qu'on aille le voir ensemble ? » Je demande à Jasper, me rappelant qu'il n'a pas eu plus de nouvelles que moi. « Ce serait une bonne occasion de voir comment il va ? » Et surtout de s'assurer qu'il n'est pas au bord du gouffre… @Jasper Wickham |
| | | | (#)Mar 24 Mar 2020 - 10:32 | |
| C'était sans aucun doute idiot de se sentir mieux à l'idée de replonger tête la première dans une lutte qui lui avait déjà tant coûté, mais Jasper avait toujours été animé par le même feu, et ne se laisserait pas briser si vite. Il avait toutefois été échaudé par leur première gestion de crise un brin chaotique, et s'assurerait de ne pas commettre les mêmes impairs, tout comme Quinn, d'ailleurs. « On s'en assurera. » lui répondit-elle d'ailleurs, après qu'il ait fait part de ses inquiétudes. C'était à la fois stressant ... et grisant de reprendre les armes, mais tant qu'ils étaient soudés, leurs opinions ne sombreront jamais. Il espérait d'ailleurs qu'elle réunirait son équipe, sachant pertinemment qu'ils étaient de confiance. Surtout après les récents incidents. « Je leur en ai longuement parlé. Ils sont tout aussi atterrés que moi de ce qui s'est passé, de ne pas avoir pu vous couvrir et sauver notre nature du même coup. Ils tiennent à être de la partie, eux aussi. » Bien. Jasper hochait la tête, conscient de la chance qu'il avait d'avoir ces personnes comme soutien. Il était reconnaissant de tout le travail qu'ils fournissaient ; pour leurs côtes comme pour les tirer d'affaire, Caelan et lui. Ce dernier était d'ailleurs devenu fantomatique, et si le Wickham ne s'était pas plus que ça attardé sur le silence de son ami -pas après une épreuve comme celle qu'ils avaient traversé- il comprenait que ce ne soit pas le cas de leur collègue qui concédait d'un : « Je comprends. » sa frustration. Le silence Caelan était assez pesant, mais ils n'avaient pas d'autres choix que de s'y accommoder, du moins, pour le moment. Jasper comprenait qu'il puisse avoir des envies d'ailleurs, car lui aussi en avait. D'aussi longtemps qu'il s'en souvienne il était du genre à prendre le large à chaque mauvaise passe ; en témoignait d'ailleurs le fait qu'il vive sur l'eau. « Caelan avait parié que tu y resterais plus que prévu. Il faut croire qu'il te connaît aussi bien que tu le connais, lui. » Un demi sourire lui étirait le coin des lèvres, amusé par la remarque de Quinn. " Faut croire ..." Il ne pouvait pas se targuer de connaître le Leckie autant qu'elle le suggérait, mais il fallait avouer que les deux étaient semblables sur bien des points, notamment en ce qui était question de leur lien à l'océan. « Si tu te sens bien ici, rien ne t'oblige à en partir. Il y a pire comme lieu de vie pour un passionné. » Totalement. C'était d'ailleurs ce qui le poussait à rester vivre sur une embarcation au confort rudimentaire. Plus d'une année qu'il avait posé ses valises sur son catamaran, et cette garçonnière lui convenait tout à fait ... ou presque. « Tu tiens le coup ? » lui demandait-elle ensuite, comme plus sérieuse. « Si jamais tu as besoin de quoi que ce soit… » Non, pas besoin. Jasper balayait ses paroles d'un geste de la main, puis confirmait dans un demi sourire que : " Je finirais bien par avoir envie de quelque chose de plus solide, mais en attendant tout va bien ne t'en fais pas." Car c'était la vérité la plus vraie. Il bougerait lorsqu'il en aurait besoin. « J'avais prévu de passer voir Caelan après. » Oh ? Le Wickham fronçait les sourcils un instant, et comme si Quinn avait compris son hésitation, elle précisait : « Mais je ne sais plus trop si c'est une bonne idée ou si je devrais me contenter de l'appeler… » Lui même ne savait pas vraiment. Penchant la tête sur le côté, il ouvrait la bouche puis la refermait, sans trop répondre à chaud. Il ignorait tout de l'état dans lequel se trouvait Caelan après l'implosion de leurs carrières respectives. « Ça lui ferait peut-être plaisir qu'on aille le voir ensemble ? » Sûrement. Ou peut être pas, à vrai dire, Jasper n'en savait rien. « Ce serait une bonne occasion de voir comment il va ? » " Dis plutôt que tu veux voir de tes yeux qu'il n'est pas en train de déprimer ?" Car Quinn ne venait pas les voir tour à tour pour simplement prendre des nouvelles, il en était certain. Elle culpabilisait certainement, et lui n'avait pas la moindre envie de la savoir ainsi inquiète. Ils avaient considéré tous les risques bien avant de la mêler à toute cette histoire. " Je veux bien venir. Puis au moins ... ça me fera bouger d'ici." rétorquait il alors, s'emparant de sa veste en laissant leurs deux tasses dans l'évier. -sujet terminé-
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| | | | | | | | The tide that left and never came back (ft. Jasper) |
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