Lonnie était assez prévenant pour ne pas insister là où elle affirmait ne pas vouloir en dire davantage quant à ce prénom qu’elle détestait. Elle était toutefois persuadée qu’il irait vérifier par lui-même sitôt rentrés à Brisbane, mais le flic lui promettait qu’il n’en ferait rien. « Alors jamais. » Opinant du chef, Romy était plutôt d’accord avec ce qu’il venait de dire, se laissant de toute façon happer par la douceur amenée par la suite de leur conversation. L’histoire de son prénom aux oubliettes (elle espérait) la petite blonde l’avait observé tirer de sa boîte à gants le paquet de cigarettes sur lequel elle avait griffonné son numéro de téléphone quelques mois plus tôt. Ce bout de carton avait une histoire particulière, et elle appréciait que Lonnie l’ait conservé sans trop savoir pourquoi il avait cherché à la revoir après l’entrée rocambolesque qu’elle avait fait dans sa vie. « Bien sûr que je voulais te revoir. C'était la première fois qu'une fille me parlait de cette façon et ça a tout changé ... » Elle lui glissait un regard, pressant ses doigts contre les siens en esquissant un demi-sourire. « … la première fois qu’on te poursuivait sur un parking ? Je suis ravie d’avoir l’exclu des rencontres étranges. Au moins tu ne m’oublieras pas de sitôt. » Elle espérait bien qu’il n’avait connu personne de cette façon, ni même que ce début n’ait été si intense pour aucune autre, car si Romy n’en disait rien et en parlait avec légèreté, elle avait fini par s’attacher au Hartwell d’une façon qu’elle n’aurait pas pu prédire mais qui la rendait heureuse plus qu’elle ne s’autorisait à le croire. « D'ailleurs je me suis toujours posé la question … comment t'as su que j'étais là ? » Ah ça. Elle secouait le menton, amusée par ce souvenir qui ne lui avait pas coûté grand-chose au final. « Tu te souviens quand tu m’as amené au kiosque à bonbons après notre premier rendez-vous ? T’avais monnayé tes charmes contre la clé du parc ? C'est vieux comme le monde comme stratagème. » Et quoi ? Evidemment que non, elle n'avait pas fait de même, mais la blondinette s’amusait, bien que le ton de sa voix demeurait le plus nonchalant possible. « … et bien moi j’ai promis un café à la secrétaire qui tient les registres si elle me prévenait quand tu étais là. Une dame très gentille. Un peu lente par contre, ce qui fait que j’ai perdu un poumon en te courant après. » Et probablement aussi sa dignité, un peu, mais le flic ne semblait pas lui en avoir tenu rigueur. Du moins, pas bien longtemps. Il était maintenant question de leur seconde escapade alors même que la première était tout juste entamée, mais qu’importe. Rêver leur faisait du bien. « Si l'aventure c'est de rester au chaud avec toi dans un fort fait de coussins et de couvertures alors je suis prêt à vivre dangereusement. » Son idée de l’aventure en était proche effectivement, alors dans un large sourire la petite blonde hochait le menton, répondant « Tu seras pas déçu. » avant d’écouter Lonnie lui parler de son projet culinaire du weekend puis de rebondir sur son lien avec Caleb. Il fallait qu’ils se rencontrent un jour, et Romy se promettait d’organiser cela dans les semaines à venir. Le flic ne semblait de toute façon pas réfractaire à l’idée, bien qu’il émette quelques réserves. « Du moment qu'il ne cherche pas à m'éventrer avec un couteau, tout ira bien. » Ah ça. Le restaurateur était un dangereux et un sanguinaire, c’était bien connu. « Pourquoi il le ferait ? Et … crois-moi. C’est la dernière personne au monde dont tu devrais te méfier. » 1) parce que Caleb et Lonnie étaient bien trop adorables pour ce monde, et 2) car si elle devait laisser une chance à Clarke, lui se garderait bien d’éviscérer l’homme qu’elle aimait, question de principes. Finalement arrivés, Romy avait laissé parler la gamine qui sommeillait en elle pour extérioriser ce qu’elle ressentait à l’idée de se retrouver à Banks Creek, l’impression de faire un bond de dix ans dans le temps pour replonger dans un souvenir parfait la rendant profondément heureuse. Le Hartwell avait parfait la scène au point d’emmener avec lui des chamallows, et pour sa façon de vouloir lui faire plaisir de façon si désintéressée elle le plaçait en tête des (quelques) petits amis qu’elle avait eu dans sa vie et de loin. « Non, mais j'aime l'entendre. » Lonnie avait toutefois laissé planer un suspens auquel elle avait réagit en arquant le sourcil, se satisfaisant de l’entendre dire qu’il était conscient qu’il l’aurait sur le dos un long (très long) moment. Alors qu'ils avançaient vers leur logement du weekend, Romy promettait de lever le pied sur le travail, glissant au passage qu'elle n'éteindrait toutefois pas son téléphone totalement ; aucune réaction indignée en retour, la petite blonde poursuivait sur sa lancée en proposant alterner leurs moments à ne rien faire à quelques randonnées. Elle même ne se sentait pas vraiment capable de s'aventurer bien loin du plaid mais ... pourquoi pas ? Le cadre s'y prêtait assez après tout. « Tout ce que tu veux. » Tout ce que eux voulaient, car ce weekend était à lui autant qu'à elle, mais Romy ne se sentait pas de batailler alors que le flic venait de sortir les clés de leur cabane qui semblait être un véritable petit nid douillet. « Pour l'instant je rêve d'une douche. » Sitôt la porte déverrouillée, Romy avait fait glisser mains contre sa torse, lui déposant un baiser sur la joue. "Je préparerai du café, netflix, et le plus grand plaid du monde en t'attendant." C'était sa vision d'une fin de journée parfaite, et cette dernière se précisait alors que l'intérieur de leur logement du weekend se dessinait sous ses yeux. Cosy, adorable, la petite blonde avait deviné l'immense lit confortable et bourré de coussins qui trônait au milieu de la pièce, et ne tardait pas à y trouver refuge. « Home sweet home mademoiselle Ashby. » Elle se sentait assurément à la maison, ses baskets envolées dans l'entrée tandis qu'elle testait la literie en s'étalant sur le matelas de tout son long. "C'est officiellement le meilleur endroit du monde." Ses mots à moitié mâchés par son visage sur l'oreiller, Romy avait fini par se retourner et se relever sur les coudes, intimant à Lonnie de la rejoindre de l'index ; un geste un brin autoritaire qui tranchait avec le large sourire amusé qui lui ornait le coin des lèvres. "On a encore un peu de temps pour nous avant que tu m'abandonnes pour cette douche et les spaghettis ?" Car avec ou sans son fidèle plaid, la petite blonde ne se sortait pas du crâne l'idée d'avoir Lonnie contre elle alors qu'ils venaient de passer toute une journée et presque deux heures de voiture séparés des bras de l'autre.  

   

Romy se remémorait volontiers cette rencontre sur le parking de la prison, et même si aujourd’hui ce souvenir singulier faisait partie des bons, dans les faits, sur l’instant elle avait pensé qu’il ne voudrait jamais la revoir à la façon dont elle avait bouleversé sa vie. De là à imaginer une histoire … c’était inattendu, mais pourtant la jeune femme se laissait volontiers happer par ce bonheur qui l’enveloppait sans qu’elle ne sache trop comment ni pourquoi il lui était tombé dessus. « Généralement c'est moi qui poursuis les gens … Mais je vois pas pourquoi je t'oublierai... » Elle haussait les épaules, lui glissant un coup d’œil appuyé avant de reporter son attention sur la route. Leur histoire était invraisemblable, et pourtant, elle était ce qui lui était arrivé de mieux ces derniers mois. D’autres interrogations fleurissaient dans l’esprit du flic, et parmi lesquelles comment avait-elle fait pour savoir qu’il était présent dans la prison ? Prenant le parti de l’humour, Romy avait pris pour référence le commentaire de Lonnie sur son collègue afin de lui rendre la pareille. « Tu connais donc toutes les techniques du bon inspecteur de police... Mais dis moi que t'as pas promis un tête-à-tête à un surveillant … » A l’entendre elle avait de quoi se faire débaucher, mais sûrement ne l’avait-il jamais vu s’essayer à la course à pied ou manier une arme, même factice. Précisant ensuite qu’elle n’avait effectivement pas monnayé son corps pour si peu, la petite blonde avait en revanche avoué que son sprint n’avait pas été de tout repos et qu’elle avait clairement manqué de perdre un organe respiratoire en voulant le rattraper. « Si j'avais pas pris le temps pour essayer de m'allumer une clope … Peut-être que tout serait différent... » Oui mais non. Le destin était ce qu’il était, et quand bien même elle se savait assez têtue pour recommencer encore et encore jusqu’à ce qu’elle puisse pouvoir lui dire ce qu’elle avait en tête ; elle aurait forcément réussi un jour. « Tu sais comme moi que j’aurais réessayé la semaine d’après, et celle d’après, et celle d’encore encore après.. » Pour sûr il l’aurait eu sur le dos, même si elle préférait cent fois la façon dont les choses s’étaient déroulées. Ils nageaient littéralement dans une bulle de guimauve depuis des semaines et tout était bien trop parfait pour être altéré par une hypothèse d’un destin bis. « Avec toi ? Jamais. » Elle enserrait ses doigts un peu plus aux siens, ravie de constater qu’il lui faisait confiance et que sa vision des moments qu’elle voulait qu’ils passent ensemble était semblable à la sienne. Leur histoire n’en était qu’à ses débuts, et pourtant elle figurait parmi les choses que Romy chérissait le plus, l’envie de le partager avec les personnes dont elle se sentait le plus proche lui trottant dans un coin de la tête. Caleb en tête de liste, la jeune femme suggérait au Hartwell qu’une virée à l’interlude serait sans aucun doute la meilleure façon de commencer à l’introduire chez les Ashby, bien que le flic semblait tendu.  « On sait jamais … si ça se trouve il va penser que je suis le plus grand des connards. » Oh, ça ne risquait pas. Secouant la tête de droite à gauche, Romy réfutait l’idée sans la moindre once d’hésitation. « Y’a aucune chance, promis. » répondait elle de but en blanc avant d’arquer le sourcil face à la révélation de Lonnie. « Tu sais, j'ai jamais rencontré les familles de mes anciennes copines. » Jamais jamais ? Et la première qu’il rencontrerait serait la sienne ? Oh. « On est un peu bizarres mais tu devrais t’en sortir. Ceci dit je me sens chanceuse que tu commences avec moi. » et si elle n’avait pas envie d’envisager qu’il puisse y avoir quelqu’un d’autre après elle sans que 1) ça ne sonne creepy et 2) elle ne mette la charrue avant les bœufs, Romy se mordait le bout de la langue avant de se muer en gamine de six ans lorsque le panneau indiquant qu’ils étaient à Banks Creek se profilait sous ses yeux. Elle avait laissé parler sa joie, son énergie retrouvée, et avait presque sautillé en suivant Lonnie jusqu’à la cabane, ponctuant leur parcours de quelques étreintes, parce qu’elle ne décollait pas de son nuage. Il lui confiait avoir besoin d’une douche, ce à quoi elle répondait être en mesure de préparer les bases d’une fin de journée netflix & chill avant de s’écrouler sur le lit. « Je dois avouer que c'est plutôt pas mal. » C’était même carrément parfait, et alors qu’elle l’invitait à la rejoindre en prétextant qu’il leur restait un peu de temps avant le dîner, Lonnie ne s’était pas fait prier pour la rejoindre, l’attirant à lui d’un geste du bras. « Ça valait le coup le kidnapping hein ? Je dis pas qu'on est mieux ici qu'à la maison mais y'a un petit côté exotique que j'apprécie. » Elle souriait comme une idiote en l’écoutant, accueillant ses lèvres contre les siennes avec douceur et malice. « J’ai déjà plus envie de repartir. A moins qu’on ne se fasse réveiller par des opossums en pleine nuit  et qu’on termine recouvert de piqures de moustiques … t’as réussi ton coup Hartwell. » Totalement, car si ses craintes irrationnelles de fille vivant en ville refaisaient surface, dans le fond Romy savait que rien de tout cela n’arriverait et qu’ils vivraient dans une bulle de bonheur pendant un peu plus de quarante-huit heures. « Il me semble que cette baignoire est assez grande pour nous deux …. »  Oh ? Oh. Oh. Dans un demi sourire, elle nouait ses doigts à ceux du flic, les faisant se relever du matelas pour prendre le chemin de la salle de bain. Soudainement, l’énergie lui était revenue, et larver sur le lit en attendant l’heure des spaghettis n’était plus au programme. Plus vraiment en tout cas. « Je crois même que je peux faire une tonne de mousse et mettre l’eau assez chaude pour qu’on puisse y rester deux heures. » Quitte à finir en écrevisse, au moins ils seraient au chaud. « Laisse-moi faire, je gère. » et comme pour joindre le geste à la parole, la prêtresse de la salle de bain qu’elle était avait filé pour laisser souffler Lonnie, et lui préparer le plus grand bain moussant du monde.