christmas beer pong secret santa party

C'est comme si le poids de l'univers en entier avait quitté mes épaules pour venir se lover contre ma poitrine, contractant ma cage thoracique à chaque nouvelle inspiration. Il a entendu même si j'ai murmuré, il sait tout même si je l'ai caché à qui que ce soit depuis des jours déjà. Depuis les premiers doutes, depuis les premiers indices, depuis que ma tête se charge de faire remonter quotidiennement les pires scénarios à travers tout le reste. Même les plus simples moments de répits parmi lesquels je me cherche, pour trouver ce qui me terrifie. C'est ça le mot au final, terrifiée.

« Je ne saisissais pas trop le rapport avec une galaxie, je t'avoue, » ses bras autour de moi qui font office de barrière, de barrage, de cocon, de peu importe ce dont j'ai besoin là, pour me sentir en sécurité. « Encore une zone grise que seuls les gens captant mon humour raffiné comprendront. » que j'ironise, un sourire incertain sur les lèvres. Il comprend l'urgence à désamorcer Isy, parce qu'il comprend toujours tout. Ma tête vient se lover contre son torse, y trouve une place qui est devenue avec le temps innée, un réconfort à portée. Sa respiration me donne le ton pour la mienne, son calme que je puise dans un élan d'égoïsme qui me caractérise depuis la seconde où il m'a donné sa lettre, depuis l'instant où j'ai troqué ses mots pour les miens. Je crois que je suis enceinte. « Je suis là pour toi, Ginny. Pour tout, toujours. Je serai toujours là pour toi, je te le promets, je t'aimerais toujours plus chaque jour. » et ses mots, encore et toujours, qui savent trouver le chemin jusqu'à moi, jusqu'à mes oreilles, jusqu'à mon coeur. « Merci. » tout va trop vite, quand pourtant tout est au ralenti. « J'avais besoin de l'entendre, ça. » et j'avais besoin de le lire, encore. Le papier dans ma paume que j'ai toujours pas lâché, sa lettre que je rapproche de moi de ma main libre, que je relirai ce soir et demain et après-demain encore. Petites bribes de courage qui parlent autant à la Ginny d'il y a presque 9 ans maintenant qu'à la Ginny d'aujourd'hui.

Les traumatismes, ils font mal parce qu'ils ne devraient pas remonter. Les blocages, ils blessent, parce que je sais que jamais la situation ne se reproduira avec Isy. Et pourtant je les revois les scènes, je les entends encore, les paroles de Matt, de mes parents, celles d'Ezra même, que je ne connaîtrai jamais. Le silence, et la solitude. Surtout. L'impression d'être seule contre le monde, que l'étreinte du Jensen chasse, momentanément. Ce sont des séquelles de presqu'une décennie que je viens de lui exposer, qui viennent d'exploser, et pour être totalement honnête, quand je croise son regard, quand il me demande avec tout le calme et toute la douceur du monde « Qu'est-ce que tu souhaites faire ? Tu veux prendre le test ? » il n'y a qu'une seule et unique réponse que je suis capable d'articuler. « Tu m'en voudrais si je voulais attendre? » une question, une crainte. Ma voix qui ne se casse pas pourtant, c'est étonnant. « Tu m'en voudrais si je voulais qu'on reste comme ça encore un peu, juste un tout petit peu plus longtemps? »

Mes paumes remontent le long de son dos, le rapprochent un peu plus si c'est possible. mes paupières qui se ferment quand j'inspire, quand je me recentre à ici, à maintenant, à lui, à nous.

Tu m'en voudrais si je voulais attendre?
Encore un peu, juste un tout petit peu plus longtemps.
À être bien, à être heureux, à ne pas avoir mes démons qui prennent toute la place entre nous deux.

« Et c'est le moment du... »
« ... secret Santa! »

Oh, ce timing.

christmas beer pong secret santa party

C'est spontanément, instinctivement, que je l'attire, muni de toute l'attention et la tendresse dont mon être est façonné, vers mon cœur. Mes bras caressent doucement son dos, avant de conclure l'étreinte de bras aussi forts que conciliants. Ses sentiments déchirent mon cœur, ricochent contre les parois de mon âme, formant des entailles où se logent des émotions de culpabilité, de tristesse, mais aussi d'espérance et de vaillance. Si les doutes de Ginny s'avèrent fondés, nous étions parvenus à nous aimer si forts que nous avions fait germer la vie, en dépit de nos précautions. J'avais conscience qu'il n'existait jamais de risque zéro, ainsi, même si mon orgueil de soignant pouvait en prendre un coup, je ne rejetais pas les craintes de la McGrath en déblatérant sur des probabilités faibles qu'elle porte réellement la vie.

Pourtant, égoïstement, j'en rêvais. Je ne voulais pas d'enfant d'elle si ça signifiait la terrifier, la blesser, la briser. Cependant, je rêvais de fonder une famille avec celle que j'aimais à l'infini, j'aspirais à peupler le monde de petits êtres qui seraient nôtres et que nous chéririons tels nos trésors teintés d'une infaillible alliance. Utopique, je priais pour que cette famille existe un jour, même si j'avais aussi appris par mes expériences passées que nos projets ne sont pas toujours synonymes du bonheur. Que les portes qui se referment, que les vœux qui se défont, dressent le terrain pour de plus beaux événements encore.
Si ma relation avec Chloe avait perduré, je n'aurais jamais été en couple avec Ginny.
Si ma passion pour le football australien ne m'avait pas conduit à ne plus être apte à le pratiquer au niveau professionnel, je n'aurais jamais découvert ma réelle vocation : celle d'être infirmier.

« Je ne saisissais pas trop le rapport avec une galaxie, je t'avoue, » J'attrape sa perche, relève ce tuba qu'elle érige au milieu de ses tourments pour respirer un peu mieux, décontracter les nœuds impétueux de son corps, surmonter la tempête de frayeurs. « Encore une zone grise que seuls les gens captant mon humour raffiné comprendront. » Je souris doucement, mon souffle complice se cassant sur sa tempe que je baise délicatement, amoureusement.

C'est aussi naturellement qu'honnêtement que je lui promets d'être toujours là pour elle et de l'aimer seulement davantage chaque jour. Jamais je ne m'imposerais dans sa vie ni ne forcerais mes choix sur son histoire ; cependant, tant qu'elle m'acceptait à ses côtés, je ferai tout pour la choyer, la combler. « Merci. » Elle répond, politesse superfétatoire adressée à une vérité indétrônable et non circonstancielle. « J'avais besoin de l'entendre, ça. » Je caresse suavement sa joue, dégage précautionneusement son visage de porcelaine d'une mèche rebelle. Je ne cesse de l'enlacer, la couver de mon adoration, quand je la questionne sur ce qu'elle souhaite effectuer, l'annonce d'un test de grossesse dans son sac émise.  « Tu m'en voudrais si je voulais attendre? » Ma main remonte sur son épaule, câline. « Tu m'en voudrais si je voulais qu'on reste comme ça encore un peu, juste un tout petit peu plus longtemps? » Mes lèvres se déposent en un nouveau baiser sur sa chaire, mes bras la lovent davantage contre ma personne. Mes mots ne sont audibles que pour elle, au milieu d'une foule qui s'est dispersée pour boire, fêter, discuter. « Jamais je ne t'en voudrais. » Je promets. « Je respecterais et voudrais comprendre tes choix quels qu'ils soient. Ils n'appartiennent qu'à toi. » Autant j'aurais pu en mourir, du choix d'une autre, deux ans plus tôt. « On reste comme ça autant que tu le veux. » Que ce soit dans cette position ou dans l'inconnue. « Il y a aucune presse. On fait à ton rythme, quand tu te sens prête. » J'étais capable de surmonter l'appréhension et l'ignorance. Je ne jurais pas toujours bien y réagir, mais je m'engageais à faire mon possible.

Ses paumes remontent dans mon dos, réduisent davantage notre distance, si bien que mon cœur semble battre contre le sien. Je l'entends inspirer, je l'espère s'apaiser. Les minutes défilent, puissantes de sensations, le Secret Santa commence. Jennifer manie la liste, les participants sont appelés un à un et tirent un numéro dans un chapeau à l'effigie de celui du Père Noël qui correspondra à un paquet sous le sapin. « Est-ce que je peux te donner mon autre cadeau ? » J'interroge, le présent désormais si lourd dans ma poche, sa sémantique ayant pris de l'ampleur avec la révélation potentielle de ma petite amie. Elle se détache doucement, mes doigts s'entremêlent aux siens. « Viens, » j'invite calmement, sensiblement, pour l'attirer au bar où je demanderais à la plus inconnue des barmaids de préparer : « J'peux avoir deux cocktails soignants spécial astreinte s'il-te-plaît ? » Soit, sans alcool. Ça passerait incognito, ici, quand certains des convives étaient de garde ou travaillaient dans quelques heures. Les boissons entre les mains - en commander deux rendait le tout encore plus discret à mon sens, même si je n'avais pas la dent si sucrée - , je mène Ginny vers un endroit confortable, pour lui tendre le rafraîchissement qui, je le souhaite, lui prodiguera énergie et réconfort. Après tout, le sucre lui était toujours bénéfique, n'est-ce pas ?

christmas beer pong secret santa party

« Jamais je ne t'en voudrais. Je respecterais et voudrais comprendre tes choix quels qu'ils soient. Ils n'appartiennent qu'à toi. » chaque parole, chaque geste, chaque mot même qui a l'effet d'un baume, encore et toujours. J'ignore comment il fait Isy pour prendre chacun de mes tourments et pour me donner l'impression qu'il n'est que prétexte pour une autre occasion d'être forte, d'y arriver. Il fait tout pour que je me sente à ma place depuis si longtemps maintenant et il réussit de plus en plus, sa lettre que je garde toujours blottie contre mon coeur pour le prouver. Enfouie entre nos deux silhouettes d'une étreinte qui durera aussi longtemps qu'on pourra, aussi longtemps qu'on tiendra nous-même. « On reste comme ça autant que tu le veux. » j'inspire son parfum unique, l'odeur Isy, celle qui m'encourage à fermer les yeux pour profiter des secondes sacrées, celle qui m'inspire à embrasser l'endroit au hasard où se posent mes lèvres, j'ignore où, son torse, sa clavicule, son épaule, son coeur. Mais y'a un baiser et un autre qui s'y perd. « Il y a aucune presse. On fait à ton rythme, quand tu te sens prête. » si seulement on m'avait dit ça y'a dix ans. Si seulement il avait été là, y'a dix ans. « Je t'aime. » et j'en doute pas une seule seconde.

J'ai arrêté de compter les hésitations, j'ai arrêté de compter les expirations aussi. « Est-ce que je peux te donner mon autre cadeau ? » un fin sourire se dessine sur mes lèvres quand je dégage la tête de l'étreinte pour lever les yeux vers ceux du brun. Il pétille son regard, il est beau quand il est heureux, il devrait l'être plus souvent, il le mérite tellement. « Si t'insistes... » il a pas insisté mais c'est tout comme, quand peu à peu je retrouve contenance, quand les bruits ambiants reprennent leur place et piquent ma concentration. « Viens, » le bar entier qui reprend vie, le secret santa qu'ils sont à même de lancer, mais ma main a cédé à la sienne le plus naturellement du monde. Quand ma silhouette se laisse entraîner, quand on s'isole à nouveau dans un cocon qui nous appartient, que je me sens si égoïste d'aimer de tout mon coeur. « J'peux avoir deux cocktails soignants spécial astreinte s'il-te-plaît ? » drôle de constat, que l'une des seules fois où j'ai pu boire devant Isy aurait dû être l'une des seules où il n'en était pas question. La vie me fait rire parfois, les circonstances tout autant.

Et on s'égare, on repère un canapé, on s'y pose, on y respire. « Personne sait. » pas que je ressente le besoin de justifier quoi que ce soit, pas que je doute qu'il n'ait pas compris le caractère incertain de la nouvelle. « Je voulais que ce soit toi, le premier. » c'était l'évidence même. Pas seulement parce qu'il était probablement père, même si ça comptait énormément dans la balance. Mais parce que je savais que peu importe ce que je pourrais dire, peu importe ce que je pourrais faire, il trouverait toujours les bons gestes, toujours les bons mots, pour arrimer ce qui est en lambeaux. Les dommages collatéraux que je provoque depuis 29 ans déjà, les éclats de ce soir qui font écho à ma vie d'avant, à toutes les pièces et à toutes les fissures que j'avais tenté de recoller et de ranimer, depuis.

christmas beer pong secret santa party

C'est naturellement, instinctivement, amoureusement, que je l'attire suavement contre moi, dans une étreinte motivée des vocations imperturbables de lui assurer que je serai toujours là pour elle, que je lui dédierai la plus puissante de mes affections quelles que soient ses décisions. Je la protégerai, contre les autres comme contre elle, au nom de son bonheur et de son bien-être. Je me fichais bien du monde qui nous entourait, ma prunelle contre mon cœur. Mes termes lui sont articulés, doux, sincères, certifiant que les choix lui revenaient entièrement, que jamais, sous aucun prétexte, je ne lui en voudrais. Je ne saurai que la respecter, tout comme honorer le rythme qui lui apparaîtra le plus opportun. Sa bouche se perd sur ma chaire, mes bras caressent délicatement son dos, mes lippes se déposent, réconfortantes et tendres, sur sa tempe. « Je t'aime. » « Je t'aime aussi. » Vérité générale, soufflée au présent comme au futur.

Les secondes se faufilent, les minutes nous enlacent. J'inspire son parfum, sa candeur, panse et prévois l'épauler pour guérir du mieux possible ses maux. Ginny seule détient les règles et les clefs vers sa béatitude, j'en ai purement conscience, cependant, je demeurerai à ses côtés pour lui tenir les nombreux trousseaux de souvenirs, déboires et fausses routes quand ils se feront trop lourds. Je serai toujours là à la place qu'elle m'accordera.

Posé, je propose de lui offrir son deuxième cadeau. Un fin sourire orne son visage de porcelaine, les échos de ses terreurs ricochant contre mes sentiments et me sommant de taire ses démons. « Si t'insistes... » Je souris, loge ma main dans la sienne, l'attire dans une zone moins animée du café/bar après nous avoir ravitaillés de deux cocktails sucrés sans alcool.

Installés sur le canapé, ma paille jouant avec la multitude de bonbons aux couleurs de Noël, la jeune mère reprend la parole : « Personne sait. » Je lève les yeux, mousse sucrée en suspens sur l'objet biodégradable. « Je voulais que ce soit toi, le premier. » Je n'y avais pas réellement pensé, à cette liste de personne à informer. Je n'avais pas soupçonné le fait de découvrir qu'elle révèle sa croyance secrète et effarante à son esprit à ma personne en premier lieu. Ça me semble cohérent, légitime, toutefois, jamais n'aurais-pu lui en vouloir d'avoir requis le soutien de quelqu'un d'autre au préalable.

Je n'avais pas prévu, le coup d'émotions qui me submerge sans cérémonie, telle une impétueuse et infaillible vague, en recevant ce titre, cette primeur, en plus de l'éventualité que l'un de mes rêves se réalise avec la femme que j'aime à l'infini. Je n'avais pas programmé cette gorge qui se serre brusquement et ce regard que je lui adresse, firmament de reconnaissance comme d'adoration, avant que je ne réduise la distance entre nos deux âmes pour lui adresser, intense de franchise : « Merci. » Je ne lui demanderai jamais d'être le premier informé mais j'étais incroyablement touché de l'être, ce soir. Si ému que j'en perds mon latin, les fantômes d'une vie plus tôt, composés du renoncement à m'apporter la connaissance d'avoir créé la vie que j'avais appris à accepter, tolérer, justifier, rejouant en arrière-plan. « Merci de me l'avoir dit. » Merci de me faire confiance, de m'inclure, de continuer de fonder ce futur avec moi, avec toutes ses probabilités. « Tu seras toujours mon plus beau cadeau, tu sais. » Je bafouille, franc, répète les termes d'une lettre datant de neuf mois, où elle reste, indétrônable, le présent de mes quotidiens. La boîte repose dans ma paume, noyée dans un emballage cadeau de toutes les couleurs, de tous les rubans. Vaine tentative de ma part de faire quelque chose de joli quand manifestement, jamais ne pourrais-je être un bon lutin du Père Noël - ou alors, mon talent n'est pas reconnu dans ce centenaire. Je le lui tends, pâle sourire amusé aux lèvres, auto-dérision au rapport alors que l'émoi de cette attention qu'elle me livre ne cesse de me transpercer. « J'ai fait de mon mieux, pour l'emballage. » A l'intérieur de l'écrin, mon nouveau cœur, la plus belle histoire de ma nouvelle vie.

christmas beer pong secret santa party

« Merci. » les remerciements qui à mes yeux sont obsolètes, rhétoriques. « Merci de me l'avoir dit. » et il les répète, et mes sourcils se froncent, sans que le moindre mot ne sorte de ma bouche, ne franchisse mes lèvres. J'ignore d'où il croyait que ç'aurait pu être autrement, j'ignore d'où il pourrait penser que ça ne serait pas naturel, qu'il sache, qu'il sache tout de suite. J'ai en travers de la gorge tous les mots que je n'ai pas pu dire à l'époque à Ezra, j'ai en travers du coeur tout ce qu'on m'a volé quand c'est Matt lui-même qui était allé lui annoncer la nouvelle, et les horreurs qui avaient pu en découler. Lentement mais sûrement, le monde extérieur recommence à faire du sens, le cocktail entre mes paumes semble bel et bien là, les conversations remontent à mes oreilles. Et j'y pense, à tous ceux et à toutes celles à qui je devrai l'annoncer, si le test est positif. Ce qui rend mon sac particulièrement beaucoup plus lourd qu'il ne devrait l'être sur mon épaule, sac que je pose sur le canapé à mes côtés en le rapprochant tout de même de ma cuisse. M'assurant qu'il ne me quitte pas du moindre millimètre. J'ai assez donné pour une vie et une autre pour que ce genre de nouvelle s'ébruite, j'ai assez investi et perdu pour choisir mes combats, et celui-ci est très clair à mes yeux ; prendre mon temps, le plus de temps possible. Si je suis bel et bien vouée à être maman à nouveau, ce sera selon mon rythme ce qu'égoïstement Isy me soufflait plus tôt à l'oreille, me rassurant à travers.

« Tu seras toujours mon plus beau cadeau, tu sais. » « Là, ce sont mes chevilles à moi qui vont enfler. » que je reprends, l'humour bon enfant qui revient, les couleurs sur mes joues également. Ma respiration est un peu plus normale et ma main libre a fini par trouver celle d'Isy avec laquelle mes doigts jouent distraitement, s'égarant entre son index et son annulaire, dansant sur le revers de sa paume pour reprendre sa place contre mon verre lorsqu'il s'affaire à dégager un nouveau présent de sa poche. « J'ai fait de mon mieux, pour l'emballage. » et pourtant, je nie rigole pas des papiers, ni des rubans. Je ne rigole pas de l'emballage qui semble être en parfaite proportion de vert, de rouge et de paillettes au premier regard. Je ne rigole pas, parce que la boîte tient dans sa paume, parce qu'elle est carrée, parce que sa lettre parlait d'éternité et parce que pendant une seconde, une fraction de seconde j'ai arrêté de respirer.

Il était aux premières loges de mon mariage arrangé lorsque je suis revenue en Australie, il connaît tous les déboires qui ont suivi. Il a assisté aux émois de mon divorce comme témoin collatéral. Il a entendu parler de toutes les frasques de mes parents et de toutes les montagnes russes que l'union qu'ils avaient planifiée pour leur gamine enceinte et désemparée à l'époque. Et pendant une seconde, une fraction de seconde, j'ai ma vie entière qui passe devant mes yeux, qui recule, qui remonte à Londres, à 2010, à Bailey, à mon I do, au sien. Et pendant une seconde, une fraction de seconde, je m'attends à trouver une alliance.

L'écrin est brodé, gravé. Mon index glisse sur les lettres, retracent leur chemin une par une. Mon souffle lui, s'est calmé lorsque mes prunelles se posent sur le pendentif, le coeur bleu, rouge, la délicate chaîne qui l'entoure. « Il est adorable. Merci, merci beaucoup. » je prends le temps d'inspirer, d'expirer aussi, alors que je pose délicatement la boîte sur mes cuisses, une main s'affairant à dégager ma nuque des mèches qui s'y sont logées. « Tu peux? » mon visage s'est redressé, mes iris sont plongés dans les siens. On sait tous les deux que si je m'attèle à l'enfiler moi-même, je me risque à briser quatre fois l'attache et à m'arracher une couette complète au passage ; autant limiter les dégâts. Mes doigts qui trouvent les siens alors qu'Isy s'applique à passer le collier autour de mon cou, son souffle que je sens caresser la naissance de ma nuque quand je finis par lui demander, par lui chuchoter à demi-mot. « Pourquoi est-ce que tu étais aussi étonné, que je te l'ai dit en premier? »

christmas beer pong secret santa party

(2018) Il brûle, le papier cartonné, infernal messager animant, attisant, la déchéance d'un rêve maltraité. Les mots dansent devant mes pupilles voilées par le déchirant du réel, les schémas sont méconnaissables, une censure visant à préserver un cœur pourtant brisé s'opérant en misérable futilité. La raison connaît parfaitement ces prospectus, mes propres mains les ont délivrés aux femmes confrontées à cette décision qui marquera perpétuellement leur histoire.
Je n'avais néanmoins jamais envisagé que la mienne soit ainsi étampée.

Le monde s'arrête, mes sens s'éteignent. L'horreur glace mon sang, ankylose mon rythme cardiaque. Ma gorge se serre à en étriper mes mots, mes songes, mes rejets, mes espérances. Mon teint s'apparente au blême, mon souffle se coupe, l'oxygène devient beaucoup trop lourd, trop dense, pour des poumons atrophiés, estomaqués. C'est armé de tous les efforts du monde, toute la contenance et la vaillance qu'il me reste et qui fuient par toutes les failles de mon âme criblée d'impacts, que je raidis les doigts tenant encore solidement le prospectus de manière à le laisser retomber mollement dans la poubelle. Mes jambes, machinales, mon cerveau, robotisé, s'orientent vers la sortie du domicile. Les quelques mots adressés à un potentiel ruiné à tout jamais de belle-sœur et de beau-frère ainsi le refus livide, muet, d'être accompagné jusque chez moi s'en suivent. La seule chose dont j'ai besoin, à ce moment, c'est d'être seul. Isolé pour subir tous les dégâts d'une révélation aussi fortuite qu'insoutenable.

▲▲▲

Je cille, chassant les papillons de mon passé, dédramatisant les fissures et blessures que je comble, panse, du mieux possible depuis des mois, des années. J'avais appris à prendre du recul, je m'étais conduit à pardonner. Cependant, il n'en demeure qu'il me hante encore, cet enfant qui n'a jamais pu voir le jour. Je me perds à me heurter à l'imaginer, cet être de moi et d'elle, qui, par faute de timing et d'amour, n'a jamais pu dépasser le stade de probable. J'en ai rédigé des histoires, de véritables contes merveilleux, où je ne me sentirais pas coupable d'avoir causé sa fin, où je ne me jugerais pas responsable de sa disparition, où je ne me qualifierais pas comme motif de sa privation d'une chance sur notre planète. Je désirerais toujours avoir pu être son père, avec ou sans elle, plutôt que d'être l'homme qui a contribué à sa création pour ignorer le préserver.

« Tu seras toujours mon plus beau cadeau, tu sais. » Les étoiles dans mes yeux clament sans vergogne à celle qui m'a enseigné à tolérer le pire, celle qui m'a bâti un phare qui me guider dans mes pires pénombres, celle qui a créé un refuge pour m'épargner des pires tourments ; même si tous ces outils ne me rendent pas encore invulnérable contre les tortueuses voies du destin, ils m'ont permis à monter une pente que jamais je n'aurais soupçonné être apte à affronter. Mes doigts, discrets, timorés, effleurent les siens, comme pour m'assurer qu'elle est bien réelle, qu'elle existe, que tout ceci n'est pas qu'un rêve. « Là, ce sont mes chevilles à moi qui vont enfler. » Un sourire tendre apparaît sur mes lèvres, la malice se glisse dans mon regard. « Ça tombe bien, le tournoi n'est pas encore fini. A deux melons pour distraire les adversaires, on a toutes nos chances. » Je hoche la tête, prenant un air grave.

Sa main libre se love contre la mienne, ses doigts y dansent momentanément avant d'être indéniablement attirés vers le rush de sucre de sa boisson, pendant que j'extirpe mon présent, la réflexion matérielle de ce nouveau cœur, le havre de mon infini. Finalement, elle dégage l'écrin, caresse ses lettres, découvre le bijou. « Il est adorable. Merci, merci beaucoup. » Un sourire apparaît sur mes lèvres, je l'observe l'analyser, cœur tambourinant, appréhensions s'intensifiant malgré les qualités proclamées. Je ne quitte pas son mouvement lorsqu'elle libère son cou de ses cascades brunes pour que j'y glisse le pendentif et délicatement, je referme la fine chaîne dans son dos. Ma main caresse brièvement, suavement, son épaule, où ses doigts viennent rencontrer les miens. « Pourquoi est-ce que tu étais aussi étonné, que je te l'ai dit en premier? »

Mes yeux se perdent, s'abaissent, se réfugient sur le cœur de rouge et de bleu. Je n'étais pas aussi expert en jeux vidéos que la femme qui faisait battre impétueusement mon cœur, toutefois, de ma compréhension, dans les aventures de Link - à la recherche de sa princesse Zelda -, les cœurs représentaient les vies. A chaque épreuve, il pouvait en perdre ; mais à chaque fois qu'il combattait un monstre effroyable, il était capable d'en remporter. Il pouvait même obtenir de nouvelles vies, de manière à être plus résistant, fort, et poursuivre son aventure à la recherche de sa bien-aimée. Mon histoire avec Ginny se répercutait, à mon sens, avec cette fantastique épopée, en plus de faire un joli - à mon sens - clin d’œil à l'une de ses passions.

« Il fut un temps où l'on voulait tous les deux fonder une famille, avec Chloe. » Je commence, précautionneux, désireux de ne pas lui cacher la vérité, mais en aucun cas lui nourrir la terreur qui l'habitait devant la possibilité que la vie puisse croître sous son nombril. « On a essayé pendant deux ans, en vain. Puis elle est tombée enceinte. » Ils beuglent et se bousculent, les souvenirs de disputes, le goût salé des larmes, l'ardent de la culpabilité, l'amer des remords, le vulgaire des désolations, l'évanouissement de l'amour. « Elle est tombée enceinte quand notre couple n'en était plus vraiment un. A la fin de notre relation, Chloe me trompait et me mentait. Elle a rencontré un mec, un de mes collègues, qui était supposé être qu'un fantasme, un coup comme ça, mais qu'elle a revu ensuite. Je lui pardonnais, elle recommençait. Puis un soir, j'avais bu, je suis allé chez sa sœur et son copain. On a toujours été entre bons termes, malgré tout. Ils ont acheté des pizzas, on a passé la soirée ensemble, ils m'ont un peu remonté le moral, beaucoup écouté me plaindre. » Un sourire désolé, honteux, coupe mon récit. « Chloe vivait chez eux mais elle n'y était pas ce soir-là. J'ai découvert par inadvertance qu'elle s'était faite avorter, et par la même occasion, qu'elle était enceinte de moi. » Mes pupilles quittent le pendentif pour rencontrer les perles de ses yeux. « Je l'ai confrontée ensuite, pour être sûr. Elle m'a tout confirmé et notre histoire s'est terminée ainsi. » Peu de temps après, j'ai attenté à mes jours. Ma main vient cueillir la sienne, dans une volonté profonde, indétrônable, d'appuyer toute la sincérité des mots qui suivront : « C'était pas tant de l'étonnement, c'était de la reconnaissance. Ça signifie énormément pour moi, de le savoir, que tu me le dises, que tu m'autorises à vivre ça avec toi. » J'inspire profondément, concluant sur un honnête rappel : « Peu importe le rythme et la suite. » Qui seront siens et pour lesquels je l'épaulerai amoureusement, tant qu'elle me l'accordera. Ce n'était pas parce que je rêvais d'être père, que Ginny devait s'imposer un cauchemar. Jamais je ne l'accepterai, son bien-être composant ma priorité sur mes aspirations.

christmas beer pong secret santa party

Il fait du bien, le temps de répit. Il est nécessaire, il est vital, il est naturel aussi, quand chaque geste est à sa place. Quand sa silhouette se pose près de la mienne, que ses doigts s'affairent à délicatement nouer le pendentif autour de ma nuque. Je le sens, qui inspire, qui expire aussi, l'air qui caresse ma peau alors que je me replace doucement, lui fait face. J'aime pas le voile qui monte dans son regard, et j'aime encore moins l'avoir provoqué avec ma question indiscrète. Quand la suite je la lui laisse. Quand les confidences ne verront pas mon regard quitter le sien, s'il me l'autorise.

« Il fut un temps où l'on voulait tous les deux fonder une famille, avec Chloe. On a essayé pendant deux ans, en vain. Puis elle est tombée enceinte. » mais son regard, il a glissé vers le collier. Et mes prunelles elles, ne lâchent pas son visage. Elles scrutent les traits, elles analysent les expressions, elles essaient stupidement et naïvement de panser le moindre mal, savent fatalement que rien de ce que je pourrai dire ou faire n'aidera le passé à faire moins mal. « Elle est tombée enceinte quand notre couple n'en était plus vraiment un. A la fin de notre relation, Chloe me trompait et me mentait. Elle a rencontré un mec, un de mes collègues, qui était supposé être qu'un fantasme, un coup comme ça, mais qu'elle a revu ensuite. Je lui pardonnais, elle recommençait. Puis un soir, j'avais bu, je suis allé chez sa sœur et son copain. On a toujours été entre bons termes, malgré tout. Ils ont acheté des pizzas, on a passé la soirée ensemble, ils m'ont un peu remonté le moral, beaucoup écouté me plaindre. » elle est là, la mauvaise impression qui remonte, celle qui fronce mes sourcils, celle qui force éhontément ma main entre la sienne. Je voudrais seulement qu'il lève la tête vers moi. Ne demande que ça. « Chloe vivait chez eux mais elle n'y était pas ce soir-là. J'ai découvert par inadvertance qu'elle s'était faite avorter, et par la même occasion, qu'elle était enceinte de moi. Je l'ai confrontée ensuite, pour être sûr. Elle m'a tout confirmé et notre histoire s'est terminée ainsi. » son sourire, ce sourire. Si triste, si cassé, si lourd aussi, du passé. Qui me brise le coeur, qui me couperait la parole si j'avais osé la prendre, qui gèle tout sur son passage.

« C'était pas tant de l'étonnement, c'était de la reconnaissance. Ça signifie énormément pour moi, de le savoir, que tu me le dises, que tu m'autorises à vivre ça avec toi. Peu importe le rythme et la suite. » les éléments s'additionnent dans ma tête, les différentes pièces restantes au puzzle de sa vie que je pose dans un sens comme dans l'autre. Par moment, c'est ma crainte de ne pas être à la hauteur qui remonte. Celle où, dans un scénario ou l'autre, j'additionnerais à ses traumatismes, je multiplierais ses démons. Le scénario où le test en ressortirait négatif. Le scénario où je perdrais le bébé en cours de grossesse. Le scénario où il réaliserait que ses espoirs de fonder une famille avec Chloe étaient beaucoup plus beaux et beaucoup plus parfaits qu'ils ne le seront jamais avec moi. Mais pour lui, je ravale. Pour lui, je laisse mes éternels doutes de ne pas mériter tout cet amour, toute cette confiance, pour plonger mes prunelles dans les siennes, pour inspirer en espérant qu'il en fasse de même.

« Je veux le vivre, avec toi. » ma voix est un brin enrouée d'avoir si peu parlé, d'avoir tant écouté. Dans ma tête, les divers éléments de son récit sont toujours flottants, j'y reviendrai à un autre moment, j'y reviendrai quand il le voudra, ne le forcerai jamais à confesser quoi que ce soit. Entre temps, mes lèvres se sont posées sur les siennes, à l'abri des regards du personnel soignant qui s'en donne à coeur joie sur la différente distribution des cadeaux secrets et pigés. « Je sais pas du tout ce que le résultat dira, je sais pas du tout si ça sera à la hauteur, si moi, je le serai - » ça fait beaucoup de si, ça me stresse de plus en plus, ça ramène les réflexions et le malaise et le mal-être et j'arrête tout, je stoppe tout, pour prendre une longue et bonne inspiration, pour être forte, pour lui, pour nous. « - mais si c'est le cas, si quand je fais le test il sort positif, on vivra tout, ensemble. » il est hors de question qu'il soit mis à part des décisions. Il est hors de question qu'il s'en étonne même, quand ma seule et unique priorité est maintenant de lui confirmer qu'on sera une famille.

Puis, mon visage s'approche de son oreille, mes murmures se veulent un peu plus doux, un peu plus calmes, un peu plus beaux, après tout le reste. « Est-ce que c'est un bon moment, là, pour te donner ton cadeau? »

”C’est le moment où je te dis que je me suis inscrite seulement pour boire le plus de verres possible sans être jugée ? Juste parce qu’on perd et qu’on est vraiment nuls ?” c'est Lily et je sais pas du tout où me mettre et encore moins quoi faire de l'information qu'elle n'existe pas que dans mon téléphone. Comme le film avec Joaquin Phoenix avec Scarjo qui lui parle de son appareil comme s'ils étaient les meilleurs amis du monde - et plus si affinités. La dernière fois où elle était venue ici (et la seule, Matt) ça s'était fini en déclaration sous fond de Cluedo et là. Et là? Et là elle tousse, et je tousse, elle tousse plus fort et je renchéris à me faire mal aux cordes vocales et sérieux, ça va pas. Vous aviez remarqué?

« On perdra pas, on est pas nuls, mais ok pour les verres y'a de la bière mais on a des trucs sucrés qui sont tellement sucrés que tu penseras perdre la vue mais ça plaît à ma soeur du coup ça te plaira p't'être. » que je déblatère, parce qu'elle me fait cet effet-là Lily, elle me fait parler bien plus que d'hab, elle me fait vider mon sac et ma tête, elle m'encourage avec ses grands yeux et ses longs cils et son sourire rose et ses yeux damn je me souvenais pas qu'ils étaient aussi bleus que ça et ses cils ce sont des faux ou elle a juste testé tous les mascaras à sa pharmacie et je- « Pas que t'es comme ma soeur. » rattrape-toi, Matt. « Pas que ma soeur est pas cool. » hum, tu peux faire mieux. « Pas que t'es pas cool. » c'était presque ça, vraiment, t'étais à deux secondes de pas avoir l'air d'un idiot. « On joue? » ok, ok, we can work with that.

Mais la partie est un chaos ambulant. Elle sent bon et moi j'sens la sueur du gars qui se donne beaucoup trop pour une partie que j'ai perdue d'avance. J'ai donné tous mes trucs à mes soeurs en me disant que jamais les élèves ne dépasseraient le maître - lol ouais, à d'autres. ”Y’a vraiment des Passiflores ? Ça s’est agrandi, ici, tu fais quoi de nouveau ? Une remise spéciale fromage ? T’as du vin ? Je te l’échange contre les verres n°5 et 6 et parce que t’es poli tu vas faire semblant que ça se vaut, hm ?” « Respire. » c'est tout ce que je trouve d'intelligent à dire, pour une fois c'est pas si mal. Quand je doute de la quantité d'oxygène qu'elle a envoyé à son cerveau durant les dernières secondes ET qu'elle use de la meilleure tactique ever pour me faire oublier la partie qu'on perd lamentablement en mettant à rude épreuve sa survie. « Et choisis les verres numéros 4 et 2. Ils sont mieux. » les chiffres pairs, toujours. Elle se souvient pas?

”Matthusan McGrath, alors ?” je les compte là, les verres, pour lui donner les bons, pour pas qu'elle se trompe et qu'elle ruine sa bonne fortune avec son 3 et son 5 de malheur."On peut passer la partie où tu boudes, s'il te plaît ? Je ne l'aime pas tellement." « Je boude si je veux. » même Noah est pas aussi doué pour faire cette moue-là, celle que j'aie à l'instant sur le visage, celle qui me donne l'air du gamin gâté qui a eu 10 cadeaux à Noël mais qui en aurait voulu 10 de plus.

Mais dans mon champ de vision, je le vois notre salut, je la vois notre victoire. « Oh, ils partent! » je suis con, je suis con parce que d'office j'envoie mes balles chez Gin et Isy, marque encore et toujours, fait quelques allers et tout autant de retours pour les chercher et les relancer à nouveau. Avant de revenir victorieux vers Lily avec tous mes verres (les leurs, really) en main. Elle voulait boire, on sera deux. Cheers, deux L, trois O.

christmas beer pong secret santa party

Puisque nous ne sommes à mes sens que deux malgré la foule qui s'anime, s'agite, s'enthousiasme tout autour, puisque sa main serre la mienne au fil de mes confidences, puisque ses prunelles ne cessent de quitter mon minois comme si son âme promettait à la mienne de l'épauler, je confie à Ginny cette part interdite par sa douleur, refoulée par sa souffrance, funèbre par sa source de fatalité comme finalité. Mon courage s'inspire du bijou pendant à son cou et toute sa symbolique qu'il me représente, toute cette sémantique que je lui inculque plus ou moins secrètement ; de sorte que ce n'est que lorsque les souvenirs se heurtent à l'actuel, lorsque mon récit se termine sur quelques termes si légers quand ils relèvent d'un indéniable mal, que mes yeux se lovent enfin au creux des siens, qu'un fin sourire, conciliant, vaillant, étire mes lèvres pâles.

Chloe appartient au passé, elle a franchit ce stade de non-retour à mon histoire. Lorsque j'ai promis, une année plus tôt, que j'avais tourné la page à mes meilleurs amis, il n'en était pas autrement. Je ne suis pas quelqu'un qui rompt les ponts avec les personnes auxquelles il tient facilement, tant que j'ai vu des proches quitter mon quotidien davantage qu'en avoir chassés. Cependant, pour mon ex fiancée, j'ai dû briser ce lien, et la force des maux générés par les événements n'ont que solidifié le fait que tout l'impact qu'elle possède sur ma vie ne réside que dans mon passé. Aujourd'hui, c'est Ginny qui compte, plus que tout, si bien que c'est auprès d'elle que je prie un futur.

Calmement, muni de toute la franchise de mon être, je lui explique cette reconnaissance que je lui voue à m'inclure, me prioriser, me privilégier, dans l'éventualité de cette vie que nous avions fondée en nous aimant. Nos iris se croisent, ma main caresse doucement la sienne, le silence nous enveloppe, nous berce, nous étreint. « Je veux le vivre, avec toi. » L'artiste annonce, mon interrogation se tait contre un baiser échangé qu'elle initie. Mes doigts caressent doucement, chèrement, naturellement sa joue, comme ils ont l'habitude de faire, régis par l'affection. « Je sais pas du tout ce que le résultat dira, je sais pas du tout si ça sera à la hauteur, si moi, je le serai - » Je fronce les sourcils, désapprobateur contre l'idée d'une potentielle barre à atteindre. « - mais si c'est le cas, si quand je fais le test il sort positif, on vivra tout, ensemble. » Il est si franc, si pur de bonheur, le sourire qui s'impose sur ma bouche que je ne sais le retenir, l'amoindrir. De plus, toute la prestance du monde ne me suffit pas pour m'empêcher de l'enlacer de suite, joyeux, épris : « Je sais que j'me répète, mais je t'aime. » Tellement. Je t'aime tellement.

Je me distance légèrement, m'apparaissant indispensable d'assurer, de promettre : « Et même si t'essayais, tu ne pourrais pas ne pas être à la hauteur. Quoi qu'il arrive. » Quand bien même les faux pas se multiplient, des torts s'immiscent, des erreurs se dressent, je sais qu'au fond, naturellement, Ginny n'est que juste et aucune ombre ne saurait nuire à cette vérité qui est mienne. « A mes yeux. » Pour ce que ça vaut, pour ce que je vaux, aussi honnête, altruiste et véhément puis-je l'être. Je ne lui imposerais rien, jamais, que ce soit un choix comme une manière de penser. « Je serai là, quand tu voudras le faire, dès que tu voudras le faire. Mais Ginny, peu importe le résultat, pour moi, il ne sera pas mauvais. » Même si je rêve d'être père, même si Chloe m'a refusé cette expérience, même si j'ai un passé de désir de paternité qu'elle connaît entièrement aujourd'hui, cela ne lui impose aucun poids ni devoir à mon égard et je tiens à ce qu'elle en soit certaine. Si le test est positif et qu'elle désire cet enfant autant que moi, une véritable euphorie m'enivra. S'il est négatif, en aucun cas je ne ressentirai de la déception ni de l'amertume. Il n'y avait à mes yeux pas de mauvaise réponse à ce test tant qu'elle était heureuse. Ma main ne quitte la sienne, comblé, exalté.

Son visage s'approche, l'éclat dans mes yeux s'intensifie. « Est-ce que c'est un bon moment, là, pour te donner ton cadeau? » Un léger rire file entre mes lèvres, je réponds avec malice et envie : « Eh, j'attends que ça. Mes méninges ont épuisé toutes les conjectures possibles de galaxies. » Mon attention est momentanément attirée par Jennifer qui nous tend à chacun deux numéros, nous invitant à recueillir notre cadeau de Secret Santa quand nous le souhaiterions, pour poursuivre sa tournée en bon lutin boisé dès les papiers confiés.

Elle ne le lâche pas des yeux et il y a fort à parier qu’il en sera de même pour toute la soirée. « On perdra pas, on est pas nuls, mais ok pour les verres y'a de la bière mais on a des trucs sucrés qui sont tellement sucrés que tu penseras perdre la vue mais ça plaît à ma soeur du coup ça te plaira p't'être. » Et elle aussi elle aimerait dire qu’elle jauge les goûts des autres selon ce qu’aime son frère parce qu’il a des goûts moins bizarres que les siens mais quand même assez bizarres parce qu’il n’est pas un Keegan pour rien même si elle fait de son mieux pour rayer le ‘Keegan’ de son nom et de sa tête. Mais ça, ça serait partir du postulat qu’elle peut parler de son existence, ce qui n’est pas le cas. Ca serait aussi répondre à cette phrase si longue et si alambiquée et prendre le risque de répondre par un ‘je sais’ ou ‘ouais, elle adore ça’ alors que ce n’est sûrement pas le moment pour lui expliquer qu’elle connaît apparemment sa soeur bien mieux qu’elle ne le connaît lui. Et c’est bizarre. Alors elle se contente d’hocher la tête, une seconde avant qu’il juge nécessaire de rattraper ses paroles et qu’il utilise mille manières différentes, toutes aussi maladroites les unes que les autres.

« Pas que t'es comme ma soeur. » Plus que tu ne le crois. « Pas que ma soeur est pas cool. » Je le suis, ça veut dire ? « Pas que t'es pas cool. » Pour sûr qu’elle est cool, entre deux chignons déstructurés et des allers retours à l’église le dimanche. « On joue? » Lily, huit ans à nouveau, opine de la tête dans un sourire bien heureux de se sortir de cette impasse.

Elle enchaîne les déconvenues et la balle rebondit davantage sur la table que dans les verres. La seule chose qu’elle arrive à faire c’est de voler les verres de Matt une seconde avant qu’il les porte à ses lèvres et ce sans jamais renverser une seule goutte et c’est un exploit qui devrait être admiré à sa juste valeur, ça. « Respire. » Pourtant la brune n’a aucune idée de comment réagir ni de comment lui parler ; encore moins le regarder. Parce que c’est Matt, parce que c’est bizarre, parce que tout est absolument encore plus bizarre parce qu’elle est ici avec ses collègues mais qu’en face d’elle il y a Ginny mais que Matt devrait simplement laisser sa soeur gérer sa vie seule et … Et elle elle tente de concilier le tout sans perdre la tête et vraiment ce n’est pas la chose la plus aisée qui soit. Alors elle parle, pensant naïvement que ça arrangera quoi que ce soit.

« Je boude si je veux. » Mais elle a des yeux attendris, là, juste là. Parce qu’il fait la moue, parce que sa voix a changée, parce qu’il ressemble soudainement à tous ces enfants qu’elle croise à l’hôpital et qu’il en faut réellement aussi peu pour l’attendrir. Il a retroussé ses lèvres, relevé des yeux larmoyants vers elle - d’ici deux secondes il va lui demander de l’argent pour acheter des bonbons. « Oh, ils partent! » Et là il est l’enfant qui joue tout seul à son jeu préféré et devinez quoi ? Il gagne. Alors elle le laisse faire, se contente d’observer la brune d’un oeil attentif et attendri pendant une simple seconde avant de se concentrer à nouveau sur Matt et les verres qu’il ramène, victorieux et fier comme un paon. Y’a de quoi, il vient de gagner contre un fantôme et c’est un fait assez important pour le souligner.

Elle prend un verre dans chaque main, en attrape un dernier entre ses dents tout en priant fort pour que cette mauvaise idée ne lui porte pas préjudice. La brune fait preuve d’une assurance qui n’est pas la sienne alors qu’elle sourit au brun et lui incite d’un mouvement de tête à la suivre alors qu’elle connaît déjà le chemin à emprunter pour se rendre dehors, là où il y a des Passiflores par milliers. Lily étant assez sorti de sa zone de confort pour une vie entière, c’est sur la même chaise qu’une année auparavant qu’elle revient se poser, laissant ses verres sur la table (elle n’a enlevé que le rouge à lèvre sur sa lippe donc il faut croire que ce n’était pas une si mauvaise idée que ça). ”Je savais pas, que tu avais une soeur.” Les longs doigts de la brune s’enroulent autour du gobelet en plastique alors qu’elle met déjà les deux pieds dans le plat, Matt n’ayant même pas eu le temps de s’assoir en retour. S’ils parlent de Ginny ils ne parlent de rien d’autre qui pourrait être inconfortable, s’ils parlent de Ginny ils restent dans une safe zone - parce que les histoires de famille sont toujours simples et elle est bien placée pour le savoir. ”Elle va t’en vouloir parce que tu viens de gagner, tu crois ?” Cette discussion n’a aucun sens, elle tente de gagner quelques informations avec autant de maladresse qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine.

christmas beer pong secret santa party

« Je sais que j'me répète, mais je t'aime. » « Tu peux te répéter autant que tu veux tant que je peux me répéter moi aussi. » y'a jamais trop d'Isy. Mes lèvres dessinées d'un sourire le lui font comprendre, en se posant furtivement sur les siennes. Y'a jamais trop de son calme, y'a jamais trop de sa tendresse, y'a jamais trop de son amour. Il est patient, il l'est avec tout le monde. On pourrait croire que j'avais droit au traitement de faveur pour avoir été celle qui partage sa vie officiellement depuis un peu plus d'un an mais au final, le Jensen était ainsi avec tout le monde, la douceur incarnée. Il s'adaptait, il aidait, foncièrement. Jamais je ne l'avais vu brusquer qui que ce soit, jamais je ne l'avais vu être autrement que vrai, authentique. Il avait énormément évolué depuis notre nuit sous les étoiles. Il était le même comme il était plus fort, il était identique comme il avait grandi, pris en confiance, en ouverture. Jamais je ne serais assez imbue pour m'accorder le moindre crédit, pourtant j'arrivais à voir à quel point jour après jour il gagnait sur ses démons, malgré les combats les plus difficiles, malgré les voiles encore présents dans son regard qu'il arrivait malgré tout toujours à chasser.

Ses démons que je tapisse bien malgré moi des miens, encore une fois. « Et même si t'essayais, tu ne pourrais pas ne pas être à la hauteur. Quoi qu'il arrive. A mes yeux. » j'inspire, hoche docilement de la tête. J'aimerais tellement le croire, j'aimerais tellement aller dans son sens, j'aimerais tellement que tous les mots qu'il m'a écrits dans cette lettre et dans la toute première se soient ancrés et encrés aussi fort dans ma tête qu'ils le sont dans mon coeur. Un pas à la fois Ginny, juste un. « Je serai là, quand tu voudras le faire, dès que tu voudras le faire. Mais Ginny, peu importe le résultat, pour moi, il ne sera pas mauvais. » ses gestes sont lents, sont doux. Ses mots aussi, tellement. « Je sais pas encore quand je le ferai, le test. Je sais juste que ce jour-là je me sentirai assez forte pour le faire. » que ce jour-là, je me sentirai assez forte pour porter toute cette pression sur mes épaules à nouveau. Que ce jour-là, je serai capable de me regarder dans la glace, de voir l'expression que je ferai quand je saurai. Que je serai capable aussi, de le regarder lui pour le lui annoncer. Une part de moi va à l'encontre de ce que j'ai affirmé, une part de moi veut s'isoler pour se prouver qu'elle sera capable de faire le test seule, que je ne suis plus la petite chose fragile que mes parents et mon frère ont décrite si longtemps ; mais je verrai. Un pas à la fois Ginny, juste un.

La confidence qui est censée tout alléger, le secret et son cadeau que je m'amuse, que je souffle maintenant de lui rappeler. « Eh, j'attends que ça. Mes méninges ont épuisé toutes les conjectures possibles de galaxies. » un sourire et un secret de plus à son oreille. « C'est impoli, si on s'éclipse juste après qu'on ait joué à secret santa? » le coupon que je triture de mes doigts, et l'envie de lui donner son cadeau dans une intimité qui nous est propre.