@Seth Briggs & Emma ⊹ Been watching all the neon blossom, flickering You look as if you've all forgotten, where you've been Going riding through the thunder circle, fuzz canyon Ten, nine, eight, seven, six, five, four, three, two, one
« Et donc, des nains de jardin ? » Est-ce qu’Emma essayait de faire diversion après avoir à moitié embouti la voiture de Seth sur la bordure en se garant devant chez ses parents ? Totalement. Est-ce qu’elle priait pour que la jante ne se soit pas brisée sous le choc ? Yep, affirmatif. « Non tu vois je l’aurais plus vu du genre haies géométriques ton père. Jardin zen, épuré, tout ça. » A vrai dire elle n’en savait rien, et elle s’en foutait complètement, mais la brune tâchait d’alimenter la conversation avant de détacher sa ceinture et de faire face à sa (fausse) belle-famille chez qui elle venait de faire une entrée en matière mouvementée. Faites qu’ils n’aient rien vu. Après tout elle avait quoi ... à peine démoli le pare choc. Le plastique ça ne fait pas grand bruit. Sauf s'ils attendaient derrière la fenêtre de voir à quoi ressemblait celle de l'après mariage catastrophique de leur fils aîné ; ce qui était plausible. Elle même aurait attendu avec une paire de jumelles de voir à quoi ressemblait l'hypothétique future copine de son frère si elle était annoncée au déjeuner, mais pour l'heure la jeune femme en était encore à se demander pourquoi elle avait accepté de tenir le rôle de la briseuse de ménage pour Seth. Certes, elle s'y était fichue elle même en se mettant en tête de clouer le bec de son ex femme lorsqu'elle l'avait sauvé d'une dispute qui n'avait pas aidé à lui faire redonner foi en la gente féminine ; cette nana était certainement la plus aigrie qu'elle n'ait jamais vu, et Dieu sait qu'elle pouvait parler en tant qu'experte « Eh détends toi j’suis sûre qu’ils vont m’adorer. J’ai préparé mon discours. » Lui donnant un coup sur l'avant bras, la Lawson se fendait d'un clin d’œil appuyé qui n'avait rien de rassurant bien qu'elle prétende le contraire. En théorie, Emma savait papillonner du regard et jouer à l'ingénieure chimiste saine d'esprit. Celle du genre avec la tête sur les épaules et un plan d'avenir on fleek. Elle avait même sorti son chemisier des jours de promotion, celui qui faisait sérieux mais pas trop, avant de se rendre compte qu’il faisait surtout trop mais que son boss était un abruti fini. Au moins elle avait l’air jolie dedans. « Puis en vrai j'ai un capital sympathie dix fois plus important que l'autre mégère qui te servait de femme. Comment t'as tenu aussi longtemps avec elle déjà ? » Pourquoi est ce que tu t'es marié ? étant certainement la véritable interrogation. Réajustant son rouge à lèvres dans le pare soleil, Emma glissait alors un regard en coin à Seth, le jaugeant un instant. Ils étaient fait du même bois, et bien que ça lui coûtait encore de l'avouer - leurs débuts avaient été un chouïa compliqué, vraiment trois fois rien (faux) - elle l'appréciait, suffisamment pour se pointer à l'autre bout de la ville à contempler des nains de jardin tout en feignant d'être la parfaite cruche amoureuse. Si le deal initial était des heures de conduite en échange d'un alibi, dans les faits la brune commençait à trouver amusante et attachante la présence de son voisin dans les parages là où d'ordinaire elle congédiait tout le monde avec sa tête du lundi permanente et son cynisme. « C'est parti. » Joignant le geste à la parole, Emma quittait l'habitacle de la voiture, rejoignant Seth de l'autre côté en glissant sa main dans la sienne pour parfaire le cliché. "Tu préfères que je t'appelle doudou ou mon lapin ?" demandait elle en relevant le menton vers lui, le plus normalement du monde ou presque. Ce n'est que lorsque ses lèvres s'étiraient d'un sourire bien plus large qu'elle lui laissait comprendre qu'elle plaisantait, se mordant l'intérieur de la joue pour ne pas rire et se griller d'entrée de jeu. "Tu m'en dois une belle, Briggs." Et la réponse était oui, Emma oubliait qu'elle avait embouti sa voiture quelques secondes plus tôt.
Somewhere darker, Talking the same shite, I need a partner, Well ''Are you out tonight?'' @Emma Lawson & Seth Briggs
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Longtemps cette collection avait hanté ses nuits. Un jour même, il certifiait avoir vu un nain de jardin dans un bus, assis au fond, l’épiant en cachette telle une ombre meurtrière, un mauvais sort. Mais, shit. Ca n’était pas le sujet. Et donc, des nains de jardin ? » « Ma voiture … » Il était étonnamment stoïque compte tenu de la situation. Résumons : dans quelques minutes à peine il allait se retrouver à table, avec ses parents, sa sœur, et sa … petite-amie, dans l’atmosphère étriquée qu’il connaissait si bien, et qui l’oppressait d’avance. Emma était un alibi plutôt mal choisi, et ça, il en prenait pleinement conscience à cet instant précis, alors que tous les deux se trouvaient à l’orée de la maison des Briggs. Acculés comme jamais. Ok, elle était belle et élégante. Ok, elle était pleine d’esprit et capable de rebondir (Littéralement parlant, bientôt, si elle s’évertuait à vouloir détruire sa caisse, semble-t-il). Mais, non. Cette nana était une bombe à retardement. Tout à fait capable d’exploser à table, autour de la dinde et des marrons, à balancer à son père la mauvaise allure de sa moustache, et ses goûts morbides pour la déco’. Une chose est sûre, elle allait de toute évidence bien s’accorder avec Mia, la petite sœur. Seth se demandait aussi combien de temps ça allait lui prendre, à elle, avant qu’elle ne découvre la supercherie. « Non tu vois je l’aurais plus vu du genre haies géométriques ton père. Jardin zen, épuré, tout ça. » « Ma voiture … » Qu’il répétait, alors qu’il n’était pas spécialement matérialiste -enfin, sauf si on parle matériel de musique-, et que cette voiture était celle du travail, de toute façon. C’était sa façon à lui, intérieur, d’exprimer son wtf. Il s’interrogeait aussi sur ses compétences, à lui, de flic. Il n’était pas censé être doué pour flairer les sources à emmerdes de ce genre ? A croire qu’il savait depuis le début que l’entreprise était vaine et stupide, qu’ensemble ils fonçaient joyeusement dans le mur en sautillant comme des sales gosses, juste pour se marrer. Pour se marrer, c’était peut-être juste ça ? Se marrer de la situation, donner aux parents juste une petite étincelle d’illusion, se donner en spectacle juste pour emmerder tout le monde : sa famille, ses collègues, son ex-femme (surtout). Il l’aurait dû l’inviter elle, d’ailleurs. Emma et elle : une antithèse, radicalement, et ça, ça aurait pu être vraiment fun à exploiter. Seulement pour la rendre jalouse, éveiller sa possessivité, taquiner son égo’ aussi et surtout. La faire chier, tout simplement. « Tu joues à quoi là ? En fait tu veux nous griller directement, c’est ça ? On fait le truc sérieusement Lawson, et là je sais pas pourquoi, je te sens pas dans le rôle, bizarrement. » « Eh détends toi j’suis sûre qu’ils vont m’adorer. J’ai préparé mon discours. » Purement et simplement, ils n’étaient pas prêt. Seth la connaissait à peine finalement. Suffisamment pour reconnaître qu’il subsistait entre eux un feeling bien réel, certes, et suffisamment pour lui donner le rôle de la nouvelle copine, certes, mais à part ça, il ne savait pas grand-chose de sa vie. Un point commun indéniable les reliait quand même : leur vie sentimentale. Comparable à un bêtisier de noël : rigolo et pathétique à la fois. « Puis en vrai j'ai un capital sympathie dix fois plus important que l'autre mégère qui te servait de femme. Comment t'as tenu aussi longtemps avec elle déjà ? » « Mes parents l’adoraient. Sans te mettre la pression, hein. Ils étaient raides dingues d’elle. Elle, elle aimait la cuisine de ma mère, complimentait les nains de jardin de mon père. Mia pouvait pas l’encadrer, par contre. Mais, toi, reste comme t’es … enfin, nan, pas trop. Oublie, on verra bien. Mais rien que t'entendre prononcer le mot discours, ça me file des frissons. » Le chaos, bientôt. Elle ajustait sa tenue, se fondait dans le rôle de l’amoureuse transi, et lui ne croyait plus du tout en leurs chances. Mais maintenant qu’il s’était empêtré dans cette galère, il ne lui restait plus beaucoup de choix. Il remettait en place le col de sa chemise, ses cheveux à peine coiffés, ‘go. Il n’est pas spécialement détente et harmonie. Mais Seth à cette compétence de bien maîtriser ses émotions. Il lui prend la main et respire à pleins poumons. « C'est parti. » Vraiment, pas moyen de reculer ? « Tu préfères que je t'appelle doudou ou mon lapin ? » Il sourit. Il avait envie de se marrer, bordel. Ses parents pas autant, si jamais ils comprenaient la mascarade. Alors il refreine ses envies et dissimule sa connerie. « N’essaie même pas. » « Tu m'en dois une belle, Briggs» Ah oui ? Il désigne d’un coup de menton sa carlingue, amochée. « Nan. On est quitte. » Il frappe deux fois, le troupeau de chien gueule, son père aussi, sa mère ouvre, colgate party, affable et accueillante. Trop pour sentir le naturel. Elle avait employé la même figure pour son ex’. La même attitude, peut-être bien la même tirade. « Bonjour mon chéri … Mon Dieu, qu’elle est belle ! Mon fils, ce tombeur. Emma, c’est bien ça ? Seth m’a tellement, tellement parlé de vous ! » Faux. « Emma, je te présente Kate, ma mère, James, mon père, et Mia … La petite dernière … Les Briggs, voici Emma. » Présentation faîte. Fichtre, il n’est pas à l’aise. « Emma, vous venez d’avoir votre permis ? Ou bien, la conduite c’est pas votre fort … Enfin, vous avez bien d’autres qualités, hein, vous les femmes … » Que le père surligne d’un rire gras. Lourdeur et gêne réuni dans un seul bonhomme. Seth se gratte le sourcil en regardant le sol, impressionné par tant de subtilité. « Ca va, je plaisante. » « Nan, nan, c’est drôle. Très drôle, papa. » Mia roule des yeux, ma mère rougie, mon père jauge Emma sans pincette, et moi j’aimerai changer de peau. Tout était normal, et terriblement cliché. « Bon, allez, venez, on passe à table. Vous devez être affamés, et puis on veut tellement en savoir plus sur cette jolie Eva ! »« Emma … » Seth passe une main sur la taille de sa comparse, assez naturellement, pour l’inviter à le suivre. L'inviter à se jeter à l'eau, en première, la jeter dans la fosse aux lions.
« Ma voiture … » Garée de façon plus ou moins correcte devant la maisonnée des Briggs, Emma avait préféré détourner l'attention de sa conduite sur la collection de nains de jardins du père de Seth. C'était étrange comme lubie. Et bien plus propice à la conversation que sa manière de se stationner. « Ma voiture … » Oh, change de disque Monsieur l'inspecteur. Elle n'avait rien cette bagnole, alors la chimiste levait les yeux au ciel, lui donnant une tape sur l'épaule comme pour signifier que non ce n'était rien et que le pare chocs allait s'en remettre. Les hommes, un cliché dans toute sa magnificence qui n'avait pourtant pas lieu d'être pour le moment. Pour l'heure, le but était de donner le change face aux parents du Briggs, mais si Emma avait accepté de jouer à la fausse copine, il était hors de question qu'elle prenne part aux disputes de couples en guise de prélude. « Tu joues à quoi là ? En fait tu veux nous griller directement, c’est ça ? On fait le truc sérieusement Lawson, et là je sais pas pourquoi, je te sens pas dans le rôle, bizarrement. » Mouais. C'était plutôt lui qui avait l'air de douter mais soit. Le sourcil arqué, la brune lui assurait pourtant être briefée, le rassurant même quant au fait d'avoir préparé un discours. Puis sa situation n'était pas à plaindre non plus alors qu'il se détende. Il devait sûrement y avoir pire qu'une fille comme elle pour faire sa vie. Sur papier du moins, quand bien même il ne s'agissait que d'un déjeuner. Emma restait persuadée qu'elle était bien mieux que l'autre mégère qui servait d'ex femme dans le rôle de la future mère de leurs petits enfants, alors ces quelques heures ne seraient qu'une formalité, un battement de cils. « Mes parents l’adoraient. Sans te mettre la pression, hein. Ils étaient raides dingues d’elle. Elle, elle aimait la cuisine de ma mère, complimentait les nains de jardin de mon père. Mia pouvait pas l’encadrer, par contre. Mais, toi, reste comme t’es … enfin, nan, pas trop. Oublie, on verra bien. Mais rien que t'entendre prononcer le mot discours, ça me file des frissons. » Oh ? Hein ? Comment ça reste comme t'es mais pas trop ? Et pardon ? Ils l'adoraient ? "Sérieusement elle complimentait ton père sur ses nains de jardins ? Et toi tu t'es marié avec cette hypocrite ?" Parce que personne de moins de cinquante ans ne pouvait décemment apprécier les sculptures de jardin. "Mais je note que ta confiance en moi s'arrête au fait de ma capacité à jouer au pot de fleurs. Relax. J'ai pris option théâtre à la fac." Et ç'avait été un massacre, mais ça Emma se gardait bien de le préciser. Il était plus facile de faire culpabiliser Seth sur ses doutes que de remettre en question sa capacité à se contenir en société.
Après un bref coup d’œil dans le miroir du pare soleil, il était désormais temps de quitter le véhicule, d'aller rencontrer Monsieur Nain de jardin et Madame j'aime la cuisine et de feindre au grand amour. Facile. Entremêlant leurs doigts ensembles, Emma lui demandait quel sobriquet il préférait entre ceux parmi les plus niais qu'elle avait en stock, mais la langue mordue Seth lui répondait que « N’essaie même pas. » Bien, compris. D'un hochement de tête, la brune approuvait, et alors qu'ils s'apprêtaient à rentrer elle ne pouvait laisser de côté le fait qu'elle lui rendait un service énorme et qu'il lui devait une fière chandelle. « Nan. On est quitte. » Hééé. Les lèvres pincées, Emma montrait son mécontentement en laissant son ongle lui pincer la paume de main. Sa foutue voiture n'avait rien. Ou presque rien. « Bonjour mon chéri … Mon Dieu, qu’elle est belle ! Mon fils, ce tombeur. Emma, c’est bien ça ? Seth m’a tellement, tellement parlé de vous ! » Oula. Une tornade s'abattait sur elle, lui souriant en dévoilant une rangée de dents bien trop blanches. « Emma, je te présente Kate, ma mère, James, mon père, et Mia … La petite dernière … Les Briggs, voici Emma. » De sa main libre elle fit un semblant de coucou, peu désireuse de se lancer dans les grandes effusions là où elle n'était pas (vraiment pas) tactile. Au mieux elle ferait passer ça pour de la timidité. "Seth m'a beaucoup parlé de vous également. Je suis ravie d'être ici." Non. Mais elle avait promis à son voisin (un ami désormais, même si ça lui coûtait) d'être présente alors ... elle était là. « Emma, vous venez d’avoir votre permis ? Ou bien, la conduite c’est pas votre fort … Enfin, vous avez bien d’autres qualités, hein, vous les femmes … » Le cliché du connard sexiste dans toute sa splendeur. Celui là même qui avait un stock de blagues dignes de figurer dans le manuel du lourdingue. « Ça va, je plaisante. » « Nan, nan, c’est drôle. Très drôle, papa. » Elle enserrerait un peu plus ses doigts à ceux de Seth, un sourire poli pour la forme. Dans le fond elle avait bien envie de lui fourrer son majeur sous le nez. Ce déjeuner serait décidément moins drôle qu'elle l'imaginait. « Bon, allez, venez, on passe à table. Vous devez être affamés, et puis on veut tellement en savoir plus sur cette jolie Eva ! » De mieux en mieux. « Emma … » que corrige le brun, glissant sa main contre sa taille pour l'inviter à suivre le petit groupe dans la salle à manger. "Je pensais que tu leur avais parlé de moi. Je suis terriblement déçue." Eva. Et puis quoi encore. Emma avait soufflé ces quelques mots à Seth, se laissant ensuite glisser jusque sur une chaise avant de se voir servir un verre de vin par Papa Briggs himself. "Vous faites quoi déjà dans la vie Emma ?" Les regards étaient rivés sur elle, et pour le moment elle ne s'était pas encore sentie trop prise au piège pour hurler et déserter. "Je suis chimiste." "Comme dans breaking bad ?" C'était la première fois que Mia s'adressait à elle, et Emma en aurait presque été soulagée. D'entre tous elle était la seule à ne pas la scruter du regard comme si elle était une bête de foire. "J'aimerais bien." De combien étaient les probabilités que les parents Briggs connaissent les joies d'internet eux qui vouaient un culte aux nains de jardin ? Zero. Alors elle s'autorisait à faire sourire la petite dernière. "Et comment vous vous êtes rencontrés avec Seth ? Je veux tout savoir." Kate était revenue dans la pièce les bras chargés d'un plateau de petits fours. Génial. En plus de finir noyée sous les questions elle subirait un gavage en bonne et due forme. "C'est une longue histoire." C'était surtout long parce qu'elle n'avait pas la moindre idée du bobard à raconter à ce sujet. Se tournant vers son complice, la brune fit remonter sa main jusqu'à la naissance de sa chevelure, le sourire de la parfaite idiote plaquée sur les lèvres même si ses yeux lançaient des SOS. "On habite tout près ... alors quand il a emménagé dans l'immeuble je lui ai proposé un coup de main." Faux, elle lui avait hurlé dessus parce qu'il avait monopolisé l’ascenseur toute la matinée. "... et ensuite on a appris à se connaître." Elle avait continué d'entretenir sa rancœur en apprenant qu'il avait un chien et que ce dernier était une foutue plaie. "Un coup de foudre." Littéralement. Celui avec des éclairs et des envies de meurtre. "Maintenant on ne se quitte plus." Niaise à en vomir, Emma avait poussé son interprétation de l'amoureuse transie au point d'approcher son visage de celui du Briggs pour frôler son nez du sien, le tout dans un geste que la niaiserie pouvait revendiquer à cent pour cent. Elle n'était pas comme ça naturellement, elle qui tirait la gueule une majeure partie du temps, mais au fond ça l'amusait beaucoup de tenir ce rôle, de rendre Seth mal à l'aise, car même si elle était ici pour lui tirer une épine du pied personne ne lui avait interdit de samuser un peu.
Somewhere darker, Talking the same shite, I need a partner, Well ''Are you out tonight?'' @Emma Lawson & Seth Briggs
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Love & Garden gnomes, acte 1 scène 1. Il n’avait pas vraiment considéré l’ampleur de la galère. Emma non plus, sans doute, ou bien peut-être qu’elle, elle prenait ça comme un vaste terrain de jeu. Après tout, c’est lui qui allait payer les pots cassés, le tout, c’était d’œuvrer pour repousser l’échéance au maximum. Il sent sa main se comprimer, Lawson devient électrique, déjà. Il espérait quand même qu’elle allait savoir se tenir jusqu’à la fin du repas. (La notion du temps s’altère dans ce genre de situation) Son père avait ouvert la bouche, c’était une catastrophe. Sa mère, c’était différent, mais le résultat n’était pas beaucoup mieux. Mia n’agissait pas, elle subissait la scène. Elle était plutôt taiseuse à ce sujet -sûrement plus maligne, sans doute aussi- que son frère. Mais l’avis n’était pas divergent. Avoir honte de ses parents, c’était inconfortable, surtout en public. Ca n’enlevait pas l’estime qu’il avait pour eux, l’amour aussi. Mais il les trouvait tellement en retard, tellement fermés sur le monde, tellement trop. « Je pensais que tu leur avais parlé de moi. Je suis terriblement déçue. » La vérité c’est qu’il n’avait pas dit grand-chose à propos de l’élue de son cœur. La mise en scène avait été faîte précipitamment, c’était mal organisé, mal préparé. Entreprise complétement foutraque, qui manquerait de se casser la gueule au moindre faux pas. Ca ressemblait assez à nos deux tourtereaux, finalement. « Je suis chimiste. » « Comme dans breaking bad ? » « J'aimerais bien. » « Walt est un petit joueur, à côté » Lui qui n’était pas du genre à se coltiner des séries, il avait trouvé délectant de suivre les aventures de Walter, à une époque. La private joke n’atteint pas ses parents. En fait, il y aurait fort à parier qu’ils se marreraient bien seulement tous les trois. Pour l’heure, il se voyait mal glisser un sédatif dans le verre de ses parents. Emma commence à broder, et lui décide de se taire. Elle se débrouille bien, romance la rencontre avec passion et théâtralité. Seth la dévore des yeux, la contemple assez niaisement. Il avait envie de lui pincer la peau, lui faire comprendre que c’était too much à souhait. Maintenant on ne se quitte plus. Ca l’amusait, la peste. Seth lui prend la main -il n’est pas très tendre, mais ça lui apprendra-, et l’embrasse (la main). Il avait constaté cette étrange habitude, chez les couples qu’ils observaient parfois. « C’était comme une évidence en fait. J’ai … j’arrivais pas à la fixer. Mon cœur a commencé à battre très fort, et très vite. Je cherchais mes mots, j’ai eu chaud, les mains moites … Je vous fais une définition du coup de cœur, là, nan ? » Bordel, chiant à mourir. C’était bien lui qui avait prononcé ces mots ? Il jouait le mielleux du mieux qu’il pouvait, et c’était outrageusement exagéré. Qui pouvait croire à ça ? Il évitait pour croiser le regard de Mia, qui le connaissait par cœur. « Juliette l’a adoptée en plus » Faux. Sa chienne s’amusait à décorer son paillasson, et lui avait bouffé une paire de chaussures. Il avait trouvé ça drôle, lui. Sa mère était emportée dans la spirale amoureuse, dans les limbes de ce délicieux conte de fée. Seth se sentait presque mal par rapport à ça. « Vous allez bien rester dormir à la maison ce soir ? » Un coup d’œil vers Emma, puis vers sa mère. « Nan. » Qu’il annonce, un poil brutalement. « Nan, je travaille tôt demain. Je suis sur une grosse affaire … » Il était en congés, chut. « Mon fils travail trop. J’espère qu’il s’occupe quand même correctement de vous, Emma ? »T’es bien placé pour dire ça. Ca lui brûle les lèvres, mais évitons de foutre le feu. « Parce qu’avec la précédente, c’était pas vraiment son fort … » Il connaissait son père par cœur. Il savait pourquoi il faisait ça, il savait à quel point il regrettait son mariage raté, à quel point il trouvait que Seth passait complètement à côté de sa vie. Son boulot n’était pas assez clinquant, son appartement n’était pas assez grand, il n’avait pas d’enfants, pas de bague au doigt. Pour lui, c’était trop. « Qu’est-ce que tu me fais, là ? Il te vient pas à l’idée que c’est complétement déplacé de parler de ça, maintenant ? … Ah, mais j’oubliais que t’étais un expert en la matière toi. » « Fait attention à ce que tu dis fils … » Seth savait pourquoi il avait fait ça, et cette comédie, à cet instant précis, prenait tout son sens. Il s’emporte, plus qu’il ne l’aurait voulu. Son géniteur avait cette aisance déconcertante pour le foutre hors de lui. Ce côté control freak lui donnait la gerbe. Ce qu’il voulait : lui mettre une claque, virtuelle, dans la gueule. Se lever, et lui dire « Je l’aime papa. J’aime Emma … Et … et je t’annonce officiellement qu’on va se marier. » Le silence, total. Seth redescend. Il prend une gorgée, non, une rasade de vin. Son père ne parlait plus, il était tellement fier de lui. « Maman ta quiche est délicieuse. » Mais c’était important de prendre un ton plus léger, de toute évidence.
Emma avait sans doute minimisé l’importance de la patience et du self control à fournir lorsqu’elle avait accepté de faire office de petite amie de secours pour Seth, car si les nains de jardin étaient une chose (discutable, certes, mais les goûts et les couleurs ne se discutaient pas) il n’en valait pas de même du tempérament un brin trop expansif des Briggs. Si la petite sœur de Seth restait en retrait, ce n’était pas le cas de ses parents qui faisaient boulette sur boulette. Pour une fois que ce n’était pas elle ; la brune en aurait presque trouvé le tout touchant. Presque. Elle n’était pas vraiment dans son élément ici, brodant du mieux qu’elle le pouvait lorsqu’on lui demandait d’entrer dans la conversation, comme lorsqu’on l’interrogeait au sujet de son travail. « Walt est un petit joueur, à côté » Elle aurait peut-être dû s’inventer une nouvelle vie, quitte à jouer à la potiche amoureuse. Pilote de ligne ou joueuse de cornemuse dans l’orchestre national, mais non. A la remarque de la petite dernière Emma avait malgré elle insufflé un peu de légèreté dans cette conversation, même si la remarque de Seth n’était comprise que d’eux trois. Elle était une toute autre chimiste que ce cher Walter en effet, mais mentait de façon si éhontée qu’elle aurait sans doute pu se faire passer pour tel. S’inventer une romance niaise et guimauve était bien plus facile qu’il n’y semblait, et si jusqu’à présent c’était elle qui tirait les ficelles de cette mise en scène qui l’amusait grandement, Seth décidait de sortir de son mutisme en attrapant sa main pour lui en embrasser le dos avec plus ou moins de douceur. Eeeeh. « C’était comme une évidence en fait. J’ai … j’arrivais pas à la fixer. Mon cœur a commencé à battre très fort, et très vite. Je cherchais mes mots, j’ai eu chaud, les mains moites … Je vous fais une définition du coup de cœur, là, nan ? » Tu fais une définition de l’AVC crétin. Mais soit. Cela semblait fonctionner puisque les Briggs avaient l’air d’y croire, alors elle se contenait du mieux qu’elle le pouvait sur sa chaise, priant pour qu’on ne leur demande pas de faire davantage étalage de leur bonheur naissant. « Juliette l’a adoptée en plus » C’était surtout son paillasson qu’elle avait adopté. « Un amour. » qu’ajoutait Emma pour la forme, car dans les faits l’abominable animal de compagnie du flic était classé parmi les indésirables. La scène semblait des plus irréelles alors que ce déjeuner suivait son cours d’une façon bien trop cliché pour que Emma ne l’intègre. La brune n’avait jamais eu à présenter qui que ce soit à ses parents, et encore moins à passer par la case roucouler en public pour feindre que tout était normal, mais jusqu’à présent elle évoluait comme un poisson dans l’eau dans le jeu des sourires de plante verte. Du moins, avant d’entendre la mère de Seth reprendre la parole. « Vous allez bien rester dormir à la maison ce soir ? » Oula. « Nan. » C’était qu’il avait l’air paniqué, le fils Briggs. « Nan, je travaille tôt demain. Je suis sur une grosse affaire … » Celle qui consistait à pourrir son quotidien en faisant aller la musique bien trop fort près de ses murs quand elle essayait de bosser en revenant du bureau ? « Mon fils travail trop. J’espère qu’il s’occupe quand même correctement de vous, Emma ? » Clairement pas. En temps normal elle aurait balancé un trait d’humour, mis les pieds dans le plat pour s’amuser et mettre son ami dans l’embarras, mais la situation glissait vers un terrain dangereux qui n’était pas vraiment propice à l’amusement. « Parce qu’avec la précédente, c’était pas vraiment son fort … » Oh oh. Alerte rouge. Emma se pinçait les lèvres, prenait une gorgée de vin pour se retenir d’entrer dans la mêlée, mais elle aurait peut-être dû, ne serait-ce que pour éviter la suite. « Qu’est-ce que tu me fais, là ? Il te vient pas à l’idée que c’est complétement déplacé de parler de ça, maintenant ? … Ah, mais j’oubliais que t’étais un expert en la matière toi. » « Fait attention à ce que tu dis fils … » Help. Ses yeux lançaient des signaux d’alerte. A ce moment précis la Lawson aurait aimé disparaître, fuir dans un autre pays, un autre continent, un autre … « Je l’aime papa. J’aime Emma … Et … et je t’annonce officiellement qu’on va se marier. » système solaire. PARDON ? A quel moment la conversation était passée d’amusante à étouffante ? Emma noyait littéralement son envie de fuir sous le vin, préférant boire plutôt que de dire une connerie qui aurait fait planter la façon (très discutable) qu’avait eue Seth d’apaiser les tensions. Un mariage ? UN MARIAGE ? « Maman ta quiche est délicieuse. » Hein ? Il y avait de la quiche ? Ah. Ouais. Emma y avait à peine touché, mais avant de prétexter qu’un bébé était en route pour palier à son manque d’appétit, la brune avait profité de la fin du plat pour s’octroyer une interlude avec son fiancé avant le combo café/dessert et son lot de nouvelles révélations. « Doudou tu viens ? Il faut que je te parle d’un truc. » Emma ne laissait pas vraiment le choix à Seth, attrapant sa main avec délicatesse (pas vraiment) sitôt sa fourchette reposée. Elle ne connaissait pas la maison mais trouvait sans peine la buanderie ; une pièce suffisamment à l’écart pour qu’elle puisse parler sans avoir à subir les oreilles indiscrètes. Normalement. « Tu comptais m’annoncer quand que je devais jouer à la future femme ? C’est quoi la prochaine étape ? J’emmène ta mère et ta sœur choisir ma robe de mariée ? » Est-ce qu’elle freezait ? Complètement. Emma ponctuait d’ailleurs chacune de ses phrases d’une tape sur le torse de Seth, comme pour lui montrer qu’il l’emmenait dangereusement vers la ligne rouge et que ce rôle de copine modèle, elle ne saurait jamais le tenir. « Et comment tu comptes gérer la suite hein ? Ils vont pas être dupes longtemps. » Cette fois ci elle avait considérablement baissé d’un ton, les sourcils froncés et l'arrête du nez pincée à l’entente du parquet qui grinçait. Seigneur. Ils étaient donc ce genre de parents ? « Parce que là, vu comme ils doivent camper derrière la porte en pensant qu’on entend rien ça risque pas d’aller en s’arrangeant. Sors-nous de là, parce que t’as annoncé une bombe. » L’une de celles que Emma ne se sentait pas de gérer sur le long terme.
Garden gnomes, scène 2. Hiroshima. Seth n’était pas ce genre de mec qui perdait son sang froid facilement. Dans son métier, il était même reconnu pour ça. Dans la vie de tous les jours, même, il était apprécié pour ça. Tout roule, toujours, même lorsque ça n’était pas le cas. Et lorsqu’il s’était senti étouffé la veille de son mariage, lui, l’intouchable, une source d’inquiétude avait vu le jour dans son for intérieur. Ca n’était pas tant son ex-femme qui était à l’origine de son trouble, et ça, il le comprenait bien aujourd’hui. Son problème ? Son père, et l’archi pression écrasante qu’il imposait tout autour de lui. Seth avait eu envie de l’envoyer sur les roses, mais au lieu de ça, il mettait en place l’échiquier pour l’envoyer dans les cordes, par KO. Enfin, les échecs imposent d’être fin stratège, nan ? Et là, il n’excellait pas vraiment en la matière. Malgré l’iceberg qu’il venait de créer, et de placer en plein dans leur trajectoire, il se contentait de maintenir leur embarcation sur les flots. Emma, elle, avait déjà enfilé son gilet de sauvetage. C’était un peu son problème, à Briggs. L’instant présent était facile à assumer, mais quand était-il de l’avenir ?
Un mariage, encore. A croire que sa précédente demande avait été aussi légère que celle qu’il venait de lâcher quelques secondes plus tôt. Un record sur l’échelle de Ritcher. Il n’affronte pas le regard de sa partenaire (pour toujours, désormais ?), et encore moins celle de sa sœur, qui devait se marrer intérieurement. Sa mère est un amalgame de sensations, contradictoires, et son père ne pipe pas un mot. Enfin. Emma est une cocote minute, il la sent prête à exploser d’une minute à l’autre. Il croise les doigts pour ne pas avoir lâcher le scandale de trop. Il prie pour qu’elle continue à briller dans son rôle de composition. Au fond, il l’avait fait parce qu’il la sentait paré à encaisser le coup (Pas vraiment). Il avait entre eux une complicité qui elle, n’était pas factice. Seth misait là-dessus, et il ne craignait pas son courroux, bizarrement. Alors qu’il ne la connaissait pas parfaitement, et que les trois quarts de leurs échanges avaient été des batailles plus que des confidences, il lui faisait confiance. Enfin, il ose la braver. Dans ses yeux les flammes de l’enfer. Shit. « Doudou tu viens ? Il faut que je te parle d’un truc. » Bien entendu, mon oiseau des îles. Surnom à garder pour plus tard, lorsqu’elle portera enfin son nom. On rigole.
Une pirouette et un sourire de façade plus tard, pour rassurer sa famille, les deux amoureux se retrouvent dans la buanderie. Lawson, t’as pas plus discret comme parloir ? Détendu après le cataclysme, il se la joue cool. De la poudre aux yeux, tant il ne savait plus du tout où il foutait les pieds. « On s’en sort bien, nan ? » C’est de l’humour. Mal placé, certes, mais il voulait absolument dédramatiser ce désastre. « Tu comptais m’annoncer quand que je devais jouer à la future femme ? C’est quoi la prochaine étape ? J’emmène ta mère et ta sœur choisir ma robe de mariée ? » Alors qu’il tente de tenir le cap face aux soubresauts qu’elle lui infligeait en cognant frénétiquement sa cage thoracique, il essaie de la faire redescendre en agitant ses paumes ouvertes par des petits gestes. Vaine tentative. « Ecoute Lawson … écoute-moi, et baisse le volume tu veux ? … Je suis certain que tu vas faire une mariée magnifique, ok, si c’est ça qui te fait peur … » Elle le frappe, encore. « Je plaisante, je plaisante. » C’était nul. Tentative désespérée de désamorçage. Et comment tu comptes gérer la suite hein ? Ils vont pas être dupes longtemps. » Seth n’avait pas de plan, mais il allait trouver. Si, si. Au pire ils n’auront qu’à jouer le jeu. Mariage à deux sur une plage en Amérique du sud, des cocktails avec des parasols, et une vie entière à jouer à la console, et à écouter de la musique en sous-vêtement. Une approche du paradis. « Tu me fais un peu confiance, ok ? Et surtout pas de panique, plonge dans le truc à fond, et … » Et on verra bien ? C’était tout à fait ça. « Parce que là, vu comme ils doivent camper derrière la porte en pensant qu’on entend rien ça risque pas d’aller en s’arrangeant. Sors-nous de là, parce que t’as annoncé une bombe. » Espion en approche. Pas du grand James Bond. Seth avait tellement honte, ses parents n’étaient définitivement pas fréquentables. Précipitamment, il s’approche d’Emma et l’enlace, avant de poser son front contre le sien. Et mes yeux dans tes yeux. « Tout va bien ? » Demande fébrilement sa mère. Non, tout n’allait pas bien. « C’est rien. Juste beaucoup d’émotion. Pas vrai, ma chérie ? » Il sonde sa complice, l’air bienveillant, l’œil assassin. « Ton père a ouvert le champagne … »
Retour sur la scène de crime. Le père avec la dîte bouteille, un sourire crispé au visage. Il ressemblait vraiment à Robert de Niro. Un air tantôt menaçant, tantôt sympathique. « Je suis vraiment heureux pour vous. Emma, bienvenue dans la famille ! » Coupe levée pour célébrer l’événement. Une angoisse naissante qui se niche dans l’estomac. Seth qui enveloppe la taille de sa bien aimée d’un bras perdu. « Vous avez de la famille Emma ? Originaire du coin ? Il faudrait organiser une rencontre. » Un Robert de Niro, chirurgicale, flippant.
L’affublant du (très charmant) sobriquet de doudou, Emma avait désiré une entrevue avec son futur époux, non pas pour avoir un avant-goût de la nuit de noces, mais bel et bien pour lui crever les yeux. Et puis quoi encore ? Un mariage ? Un mariage ? Le terme tourbillonnait dans son esprit jusqu’à lui en filer la nausée, car les conséquences que cela impliquait étaient bien trop importantes pour rester neutres et à la portée de l’imaginaire d’une Emma qui avait la sensibilité d’une petite cuillère. Nains de jardin, gamins, nains de jardins, monospace … l’horreur se profilait sous la forme de la félicité conjugale, et il n’y avait pas moyen que la Lawson y prenne part. Même pour de faux. De ses petits poings elle avait martelé le torse de Seth, ponctuant chacune de ses phrases par une attaque en avançant des points qui lui semblaient primordiaux, à savoir : 1) Il n’y avait pas moyen qu’elle joue aux potiches dans une robe blanche, et 2) Ce serait difficile de convaincre un juge ET un prêtre pour parfaire la mise en scène. « On s’en sort bien, nan ? » Seth aurait pu dire tout un tas de choses pour détendre l’atmosphère, mais à dire vrai Emma ne s’attendait pas à ce qu’il sorte une débilité de ce genre qui le mènerait tout droit six pieds sous terre. Les portes du paradis allaient s’ouvrir sur ce petit ange parti trop tôt que la brune allait manger tout cru. « Tu te fous de ma gueule ? » Les bras croisés contre sa poitrine, la brunette était revenue de son énervement passager pour laisser parler son cynisme, c’était déjà ça de pris, car les paumes de mains relevées de Seth façon « je n’ai rien fait pitié épargne moi » l’agaçaient. « Ecoute Lawson … écoute-moi, et baisse le volume tu veux ? … Je suis certain que tu vas faire une mariée magnifique, ok, si c’est ça qui te fait peur … » Ok, cette giga frappe en plein thorax, il ne l’avait pas volée. Il ne bronchait même pas d’ailleurs. Ou presque. « Je plaisante, je plaisante. » Encore heureux. Elle n’avait pas la moindre idée de la comédie qui se jouait dans cette salle à manger, toujours est-il qu’il était hors de question de se vouer en sacrifice pour la cause des éclopés en amour. Pas même pour les beaux yeux de Seth. « J’espère bien que tu plaisantes. Tu pensais quoi ? Parce que là au rythme où tu vas, pour le dessert on parle de mes ovaires et leur capacité à pondre un mini Briggs et je te promets que je te plante. » Littéralement. Qu’il soit flic ou pas, Emma s’en foutait bien, tout ce qu’elle voulait c’était apprendre à conduire, pas se retrouver embarquée dans un faux mariage avec son voisin. Joey se foutrait tellement d’elle s’il était là. « Tu me fais un peu confiance, ok ? Et surtout pas de panique, plonge dans le truc à fond, et … » Oh non. Nononononon. La chimiste connaissait bien ce regard, celui de on avisera. Et autant elle s’en foutait d’à peu près tout, autant là … « Je vais te faire confiance. Et uniquement parce que je passe ta tête au mixeur si ta mère sonne chez moi un jour en me demandant ce que je préfère pour notre gâteau de mariage. » Certes, il fallait une petite gymnastique pour s’imaginer le visage du flic dans un appareil ménager, mais Emma appuierait sans hésiter sur le bouton vert si jamais ce dernier venait à ne pas freiner la machine familiale. Cette dernière campait d’ailleurs derrière la porte, sans doute à l’affût du moindre petit frémissement de ce couple de jeunes fiancés. Si seulement ils savaient. « Tout va bien ? » Tout s’enchaine trop vite, tout semble si faux qu’elle est incapable de réagir. Seth pose ses mains contre sa taille, son front contre le sien. On dirait un clip des Jonas Brothers. « C’est rien. Juste beaucoup d’émotion. Pas vrai, ma chérie ? » Tout était si faux dans le regard de Seth, tout tranchait si nettement avec sa voix mielleuse. « J’ai bien trop hâte. » d’en finir. Glissant sa main dans la sienne, entremêlant ses doigts aux siens, la petite brune se laissait guider dans la salle à manger pour retourner alimenter le massacre. « Ton père a ouvert le champagne … » Chouette, de l’alcool. Picolons gaiement. Avec un peu de chance elle réussirait à tenir sur la durée, et alors que tous levaient leurs verres, Emma lorgnait sur le sien à l’instar d’une alcoolique notoire. « Je suis vraiment heureux pour vous. Emma, bienvenue dans la famille ! » Un sourire crispé lui naissait sur les lèvres, et alors que Seth encerclait sa taille de ses bras, la brune lui posait la main sur le torse façon Kate et William. « C’est moi qui suis heureuse de vous connaître, vous êtes formidables. » Bullshit, bullshit, bullshit. « Vous avez de la famille Emma ? Originaire du coin ? Il faudrait organiser une rencontre. » Alerte rouge. Clignotante. Gyrophare lumineux et sonore. Joey popait dans son esprit, et avec lui l’image de ce faire débridé et au moins aussi gênant qu’il était humainement possible d’être. « … Une sœur. Johanna. » Elle aurait été incapable de parler de Joey sans rester sérieuse. Ce n’était pas comme s’ils allaient le rencontrer de toute façon. Au pire, elle était certaine que son frère tenait parfaitement bien le rôle du transgenre telle une Caitlyn Jenner après un mariage avec la mère Kardashian. « Mais vous savez elle habite loin. On est originaires de Tasmanie. » Sûrement le seul point sur lequel elle ne mentait pas, et d’ailleurs … « Seth m’y emmène pour mon anniversaire. Il m’a pris des billets d’avion pour me faire la surprise. C’est le mois prochain. » Est-ce qu’elle venait de gratter des cadeaux de parfaits inconnus ? Clairement. Elle espérait qu'ils prendraient des trucs géniaux pour palier au fait qu'elle épouserait leur cause perdue de fils ? Yep. Est-ce qu’elle avait des remords ? Hell no. Dans un sourire bien trop large pour être sincère, Emma avait remonté son regard vers son fiancé en carton avant de reporter son attention sur sa mère. Tu veux jouer Briggs, on va jouer.
Chercher désespérément une issue de secours. Il n’y en avait aucune, pour l’heure. Pas sûr pour autant que Briggs cherchait une solution tangible pour les sortir de cette embrouille de haut vol. Ambivalence de la situation. Son cœur riait de la détresse de sa complice (ça n’était pas si grave, si ?) sa raison lui faisait comprendre qu’il se comportait comme un abruti complet. Le mec sauvait des vies. Ballotté entre la mort et la mort, tous les jours. Dans l’extrême noirceur de son métier, il était ce flic consciencieux qui ne prenait pas à la légère les destins tragiques qui jalonnaient sa route. Dans sa vie, il était ce type ahurissant d’incertitude, bel et bien capable d’annoncer une romance imaginaire, doublé d’un mariage imaginaire, à sa famille. Sa mariée était réelle, elle. Aussi réel que ce couteau qu’elle n’allait plus tarder à lui foutre dans la gorge s’il continuait à jouer avec le feu. Pas une minute sans qu’il ne se demande à quel moment elle allait plier, le tuer, se tirer, brûler la maison, sa voiture, les nains de jardin. Tout à la fois. L’empathie, l’acquis de conscience. Il se promettait de lui rendre la pareille. Des leçons de conduite pour faire d’elle la nouvelle Hamilton (pas gagné, certes), des places pour aller voir Arctic Monkeys (il l’accompagne, pour sûr), le droit de garder Juliette pour elle toute seule, le coffret collector d’Harry Potter (Elle raffolait de cette saga). Promis, Emma.
La une de Gala. Ils étaient beaux, ensemble. Il ne lâchait plus ses hanches, à tel point que c’était beaucoup trop pour être crédible. Ses parents ne le savaient peut-être pas, aveuglés par une vision de l’amour qui leurs étaient propre, mais Seth avait horreur de parader de cette façon. Bien sûr, là, c’était décuplé fois milles. Mais même. Il avait besoin de son espace, de sa liberté, n’aimait pas qu’on l’attrape à tout bout de champs, qu’on lui chatouille la nuque, qu’on lui susurre des petits mots doux à la vitesse de la lumière. Il n’aimait pas montrer, mais juste démontrer. A la concernée, et à personne d’autre. La concernée, mais quelle concernée, d’ailleurs. Pointera t’elle le bout de son nez un jour ? Emma ferait l’affaire. Ca peut paraître un peu péjoratif, dit comme ça. Mais elle et lui, c’était un peu de la même trempe. Pas d’ennui, pas de routine. Chacun est libre d’aller voir ailleurs, et les soirs de solitude, ils n’auront qu’à se retrouver pour combler le néant qui sidérait leur existence. Quoi, c’est pas ça, l’amour ?
D’un côté James De Niro Briggs, de l’autre Lawson la presque mariée mais pas trop. Le regard du père est figé, il a la gueule dure des vieux gaillards, dans les vieux westerns. Les questions sont concises et brutales, mais Emma s’en sort bien. Elle en fait trop, mais elle le joue bien. Seth assiste à l’affrontement, et cultiverait presque de la fierté pour sa demi femme, tant son aplomb à l’égard du géniteur le satisfaisait. Il aimerait bien disparaître, quand même. Fuir, sa famille, la gêne, l’odeur de la quiche qui lui donnait, maintenant, envie de gerber. « Seth m’y emmène pour mon anniversaire. Il m’a pris des billets d’avion pour me faire la surprise. C’est le mois prochain. » Bitch. Il hoche de la tête lentement, rictus aux lèvres, yeux clos. En surface, il se fait heureux élu d’emmener sa bien aimée en voyage, dans le fond il pince subtilement la chair de sa tendre. Vraisemblablement, c’était coup pour coup, maintenant. Surenchère permanente, longue descente en enfer. Quelles étaient les limites ?
Seth fixe son père, fraction de seconde, plusieurs minutes, impossible de déterminer. Alors, tu la vois bien, là, la réussite de ton fils ? Il était rageur, frondeur, plein d’orgueil, alors que tout n’était que décor en carton-pâte. Illusion. Personne ne voit le bouchon de la bouteille qui fait son bonhomme de chemin. Petite absence de papa Briggs, le liège s’envole, fracas sonore, projection directe vers … Shit. Le front d’Emma. Bouton rouge enclenché, il ne donnait plus chère de sa peau. D’abord inquiet (quand même), Seth délaisse son costume de fils idéal, bien décidé à s’occuper d’elle. D’un revers de main il bloque l’affolement de sa mère. Il s’en occupe.
Dans la cuisine. Il l’invite à s’assoir, alors qu’il dépose sur la zone d’atterrissage un paquet de petit-pois qu’il venait de sortir du congélateur. En face d’elle, il se fait protecteur « Tiens … Fais moi voir ça. » Il examine le front de celle qui ne devrait pas tarder à demander le divorce. « Ca va … J’ai l’impression de voir un terrain de golf sur ce front, mais sinon, ça va. » Lourdeur. Il rigolerait bien à sa connerie, mais il redoute quand même un poil les représailles. Ce repas était un désastre, et le mot était faible. Il s’en voulait de l’avoir emmené dans ce guêpier. « Emma, je suis vraiment désolé. Pour ça. C’est une catastrophe. Allez, on se tire. Je te ramène si tu veux. Je me débrouille pour trouver une excuse … Et t’es en droit de me demander une faveur, n’importe quoi. »
Il y avait de fortes chances pour que Seth passe le pire des quarts d’heure sur le chemin du retour, et Emma aurait même été prête à sacrifier son tour de volant pour asséner des coups contre l’épaule de ce voisin qui avait dépassé les limites de ce qu’elle était capable d’accepter depuis un moment déjà. Un mariage. Et puis quoi encore ? La prochaine étape consistait à un tête à tête avec belle maman en vue de choisir la robe de princesse parfaite ? Non. Il en était hors de question. Tout ce que la brune accepterait de cet échange de bons procédés étaient des cours de conduites, voire un aller/retour à Port Arthur si elle se débrouillait bien avec le Briggs. Rien de plus. Niet. Nada. Que dalle. Un sourire de façade plaqué sur les lèvres, pour le moment Emma ne bronchait pas, mais ne tarderait pas à basculer du côté obscur si cette overdose de guimauve continuait à se montrer hostile envers elle. Son père était louche, sa mère perchée, sa sœur se retenait de ne pas hurler qu’il s’agissait de conneries sur toute la ligne, et elle tenait le rôle de la potiche. Un rôle qu’elle détestait, surtout lorsque Seth se lançait dans des délires qui méritaient qu’elle le fasse baigner dans l’acide. Qu’il n’oublie pas qu’elle avait des ressources dans ce domaine.
C’était sans conteste pour se venger qu’elle avait avancé qu’il l’emmènerait en vacances dans sa Tasmanie natale, quand bien même l’idée de s’y rendre ne la dérangeait absolument pas si c’était tout frais payés. Le flic n’avait qu’à assumer son histoire de mariage si elle devait se coltiner le titre de fiancée, lui pouvait s’agrémenter de celui de canard prêt à tout pour rendre sa bienaimée aussi douce et aimante que possible. « Te fatigue pas j’aime ça. » murmurait elle lorsque Seth enfonçait ses ongles dans sa chair, arborant le sourire de la parfaite connasse à laquelle elle adorait jouer. Qu’importe qu’on l’entende, elle était à pas grand-chose de tout foutre en l’air de toute façon. Toujours plus. Il y avait toujours plus de gêne dans ces échanges, et Emma sentait la pression grimper à vitesse grand V. Les voyants lumineux lui ordonnant de fuir fusaient plus vite, brillaient plus forts que lors d’une catastrophe nucléaire, mais elle était coincée entre deux parts de quiche. Elle n’aimait même pas ça ; le drame d’une vie. Combien de temps devait-elle poursuivre cette comédie (tragédie ?) Quand est-ce que ce foutu massacre prendrait fin ? Plus vite qu’elle ne l’imaginait, puisque sans même qu’elle ne s’y attende, un projectile avait foncé sur son front. Un bouchon. Un putain de bouchon. « Merde ! » Oubliée la gamine parfaite, la Kate Middleton amourachée qui souriait plus que dans une pub pour dentifrice, le naturel d’Emma revenait, et si Seth ne l’avait pas embarquée dans la cuisine, il y avait de fortes chances pour qu’elle cède à un massacre. « Tiens … Fais-moi voir ça. » « Va te faire foutre. » Attrapant néanmoins le paquet de petits pois pour se le coller sur le front, la chimiste avait le regard qui lançait des éclairs. Peu, voire pas, encline à laisser le flic se la jouer infirmier en carton, même si cela ne l’empêchait pas de prendre son rôle à cœur. « Ca va … J’ai l’impression de voir un terrain de golf sur ce front, mais sinon, ça va. » Un majeur fièrement dressé pour réponse, elle avait préféré se taire. Mieux valait pour lui d’ailleurs. « Emma, je suis vraiment désolé. Pour ça. C’est une catastrophe. Allez, on se tire. Je te ramène si tu veux. Je me débrouille pour trouver une excuse … Et t’es en droit de me demander une faveur, n’importe quoi. » Il n’y avait de toute façon pas la moindre chance pour qu’elle reste. Nope nope. Balançant sans ménagement le paquet de surgelé sur la table, la chimiste se relevait alors, fusillant son complice en carton du regard. « Je vais dans la voiture. Récupère mon sac à main, et essaie de dire à personne que je suis enceinte pour justifier mon départ. Jouer à la nana transie d’amour ok. Kidnapper un gosse à la maternité ça me gaverait. » C’était sans doute un brin cavalier de laisser Seth y retourner seul, mais il était hors de question pour Emma de remettre un orteil dans ce salon de la mort. Plus jamais elle ne retournerait chez les Briggs. Pas même pour tous les voyages en Tasmanie du monde.