| It's a simple meal with my brother, isn't it ? (ft Tommy Warren) |
| | (#)Jeu 9 Jan 2020 - 16:59 | |
| 11H15, Elizabeth appela son assistante pour refaire le point avec elle avant de partir. D’habitude, elle ne prenait que quelques minutes pour manger mais aujourd’hui c’était différent. Aujourd’hui elle voyait Tommy…Ce cher Tommy…
Tout était devenu tellement compliqué avec les différents membres de sa famille. Même avec ses parents, qui lui rabâchaient le fait qu’elle soit seule à son âge dès qu’elles les voyaient. Le temps où elle était leur petite fille parfaite était révolu. Toutes ces années à se donner tant de mal pour être parfaite à leurs yeux et que cela ne dure que quelques années. Elizabeth s’en voulait de toute l’énergie qu’elle avait mise dans ce projet. Elle ressentait de la frustration, elle aurait mieux fait de se concentrer sur ce qu’elle voulait elle au lieu de rester fixer sur leur volonté à eux. Elle en serait probablement plus heureuse aujourd’hui. Enfin, on ne peut pas revenir dans le passé.
Il en est de même avec son frère et sa sœur. Elle avait été si dure envers Tommy et Scarlett. Pourtant, Elizabeth n’avait pas de mauvaises intentions, elle voulait juste ce qu’il y a de meilleur pour eux. Ce qu’il y a de meilleur dans sa conception à elle, pas la leur…C’est grâce à Tommy qu’elle s’était rendue compte que leur définition de la réussite pouvait être différente. Tommy et Moïra, cette petite incroyable. Lorsque Marius avait décidé d’empêcher Tommy d’avoir des nouvelles de Moïra, cela avait laissé Elizabeth sans voix, ce qui n’arrivait jamais vu le caractère de notre belle brune ! Elle était dans l’incompréhension totale de la réaction de son frère aîné. Elle avait bien compris que la situation entre Tommy et Marius était compliqué mais Elizabeth ne pouvait rester de marbre face à l’injustice. Un père avait le droit de communiquer avec sa fille, même en prison. Elizabeth avait donc décidé de continuer à lui donner des nouvelles. Ce n’était pas pareil que de la voir mais c’était une petite consolation. Elle avait tenté de lui en donner le plus souvent possible. Marius avait évidemment vu ce choix d’un mauvais œil mais avait respecté Elizabeth. Il faut dire qu’il était difficile de tenir tête à Elizabeth sans se préparer à aller au combat et il semblait que Marius était fatigué à ce moment-là, du combat qu’il avait déjà mené avec Tommy.
Ce positionnement de donner des nouvelles de sa fille a permis à Tommy et Elizabeth de créer un vrai lien pour la première fois de leur vie. Ils se sont parlés, écoutés…Les émotions étaient intenses mais sans vraiment les dire. Mais voilà, il y avait un contexte particulier. Dans la vraie vie de tous les jours, ils n’étaient pas habitués à se voir, à parler…Alors depuis le retour de Tommy, de la distance s’était remise entre eux. Certes, Elizabeth avait enfin compris la belle réussite que Tommy avait réalisé en la personne de Moïra et Tommy avait enfin compris qu’il pouvait compter sur sa sœur, mais cela ne suffisait pas à rattraper des années de distance.
Alors aujourd’hui, ils tentaient chacun de faire des efforts. Cela passait par faire des choses « normales » comme aller manger ensemble. C’est ce qu’ils avaient décidé de faire en ce jeudi. Moïra était au centre aéré pendant la journée. Elizabeth, qui avait bien entendu en bon bourreau du travail qu’elle est, une tonne d’heures à prendre, avait décidé de prendre son après-midi. Ils n’avaient prévu que de manger ensemble mais elle était stressée comme une fillette qui faisait sa rentrée à l’école : les camarades allaient-ils l’apprécier ? Tommy allait-il apprendre à aimer sa compagnie ? Cela faisait pourtant plusieurs années qu’il était rentré mais au début il avait été très occupé et Elizabeth aussi avec son travail. Puis du temps avait passé. Ils avaient essayé de se voir de temps en temps tous les deux mais ils n’avaient pas tenu…et finalement ils ne se voyaient qu’en présence de Moïra qui occupait très facilement tout l’espace et le temps à elle ! Mais voilà, maintenant Moïra avait grandi, elle allait bientôt rentrer au collège, elle commençait à avoir des préoccupations d’adolescente et elle souhaitait donc voir moins souvent sa famille et plus souvent ses copines. Alors Tommy et Elizabeth avaient réalisé chacun de leur côté le même constat : ils étaient bien obligés de tenter à nouveau de continuer le début de lien qu’ils avaient creusé ou bien leur relation fanerait et ce n’était une solution pour aucun des deux.
Elizabeth savait que peu importe comment ça se passait aujourd’hui, elle allait être remuée. Elle avait donc pris par précaution son après-midi car hors de question de montrer la moindre faille au travail. Et puis, elle ne savait pas ce que Tommy avait prévu de son après-midi donc elle préférait également se laisser le temps de vivre un moment avec lui. Lorsque Tommy l’avait contactée pour ce repas, elle s’était posé mille questions. Elle avait finalement arrêté, trop fatiguée pour en rajouter. Elle avait pris les choses pragmatiques en mains parce que ça, elle savait très bien le faire. Poser son aprem, check. Appeler le resto, check. Ecrire à Tommy pour le prévenir du lieu et de l’heure, check. Préparer son assistante à son absence, check.
11H30, elle termina le point avec son assistante. Elle était prête à partir. Elle qui n’était jamais en retard, elle n’allait certainement pas l’être aujourd’hui. Pendant le trajet dans sa voiture, elle sentit les milles questions revenir mais les verrouilla. Non, ce n’était pas le moment de douter. Cela allait très bien se passer ! Elle se gara et arriva au restaurant. Elle était la première. On l’installa à la table, elle avait bien précisé qu’elle voulait celle avec la meilleure vue. Le Chumley Warner’s servait le meilleur fish & chips. Peut-être Tommy n’avait-il pas encore eu le temps de le découvrir ? Cela faisait certes plusieurs années qu’il était rentré mais parfois on peut passer à côté d’un endroit un millier de fois avant de le découvrir.
Ce restaurant semblait idéal à Elizabeth pour leur rendez-vous. Vue magnifique sur le port et prix abordables. Hors de question de mettre Tommy mal à l’aise en affichant ses moyens financiers. Et puis, Elizabeth appréciait sincèrement venir ici. Elle y venait justement avant, quand elle n’avait pas beaucoup les moyens, qu’elle essayait de percer dans son métier. Alors revenir ici lui rappelait des souvenirs. Ce sentiment de mélancolie, de n’être partie de rien et de s’être battue dans un milieu de requins. Oui, Elizabeth pouvait tout réussir. Mais pouvait-elle conquérir le cœur de son frère ? |
| | | | (#)Mer 12 Fév 2020 - 12:19 | |
| En déposant Moïra dans un salon de thé de Queen Street Mall – le lieu choisi par la mère d’une de ses camarades de classe pour organiser sa fête d’anniversaire, puisqu’à l’évidence certains avaient les moyens pour ce genre d’extravagances – Tommy avait presque pu sentir un ou deux cheveux blancs supplémentaires lui pousser sur le crâne lorsque sa fille avait bondi pour rejoindre ses copines sans prendre le temps d’un baiser, et en le gratifiant simplement d’un « Oui, oui. » distrait lorsqu’il avait annoncé repasser la chercher vers dix-huit heures. Pas même un regard vers lui après avoir déposé son cadeau sur la pile des autres et engagé la conversation avec Julie, la fille de Norah, et ne pouvant pas rester éternellement planté là bras ballants, le brun avait fini par tourner les talons. Il se sentait partagé entre tout un tas de sentiments contradictoires : il se sentait soudainement heurté par la vitesse à laquelle sa fille s'éloignait de l'enfance, il aurait voulu tordre le cou au temps qui passait, l’arrêter et faire que Moïra reste une petite fille à tout jamais. Mais il se sentait soulagé aussi, de la voir enfin s’épanouir comme n’importe quelle fillette de dix ans, revenir de l’école contente de ses journées et non plus morose, ou avec dans ses affaires un mot de l’institutrice pour signaler une chamaillerie d'élèves dont la cause était souvent la même. Deux ans plus tôt Moïra était la fille de l’ancien taulard – Tommy n’avait aucune idée de comment cette information avait fait le tour de la classe, mais elle l’avait fait – mais aussi cruels étaient les enfants entre eux ils avaient cette capacité à passer à autre chose et à ne plus y penser ; Et ils n'y pensaient effectivement plus, désormais, quant à Tommy il ne pouvait qu’espérer que l’entrée au collège de sa fille et les nouveaux camarades et professeurs qui allaient avec ne seraient pas une occasion malheureuse pour que l’incident se produise une seconde fois. Il se sentait un peu dépassé aussi, inquiet à l’idée de la voir bientôt grandir vers cet âge où l’on se détachait de ses parents, où l’on s’en désintéressait … Et pourrait-il l’en blâmer, quand lui s’était autant éloigné des siens ? Il voulait croire qu’il avait suffisamment imprimé les erreurs de ses parents pour ne pas les reproduire, mais en serait-il capable ? Et qui serait là pour le lui faire remarquer, si Alice n’était plus là ? Peut-être Scarlett, ou peut-être pas. Peut-être Beth, ou peut-être pas. Assurément pas Marius, en tout cas. Mais de divaguer ainsi jusqu’à sa sœur aînée risquait ironiquement de le mettre en retard, alors même que c’était avec elle que le brun avait rendez-vous ce midi-là. Depuis qu’il avait rendu son tablier et ne travaillait plus au McTavish, les occasions pour Tommy de traîner du côté de Bayside étaient devenues plus rares. En tant que pire représentant de la nationalité australienne, le brun n’avait jamais été très porté sur l’océan, la plage et tout ce qui pouvait s’y rapporter de près ou de loin ; Les forêts canadiennes lui avaient bien plus manqué en quatre ans que le sable fin de la banlieue de Gold Coast ne l’avait fait en une décennie. Toutefois, il s’était surpris à apprécier le trajet jusqu’à la Marina, et à observer le paysage à travers la vitre du tramway puis du bus avec un brin de rêverie. Réajustant ses lunettes de soleil sur son nez en mettant le pied dehors, il avait néanmoins pressé le pas en jetant un coup d’œil à sa montre et en réalisant qu’il était déjà un peu en retard – rien de dramatique à ses yeux, mais malheureusement pour lui sa sœur avait la ponctualité à cœur, et aujourd’hui ne serait donc pas encore le jour où il pourrait se targuer du fait qu’elle n’ait absolument rien à lui reprocher. Mais après tout il n’y aurait que le bus à blâmer, il n’aurait pas été plus vite en courant à côté. Sans grande surprise la terrasse du Fish & Chips était déserte, la plupart des convives lui ayant préféré la climatisation par une telle chaleur, et coinçant ses lunettes de soleil sur le col de son tee-shirt à peine entré Tommy n’avait pas eu à chercher des yeux bien longtemps avant de repérer Elizabeth, installée à une table près de la baie vitrée. « Pardon, je suis en retard, je sais. J’ai dû faire un détour par Spring Hill pour déposer Moïra à un anniversaire et je … Bref, désolé. » Les excuses déblatérées sans prendre le temps de respirer, il s’était éclairci la gorge avec un brin de malaise avant de prendre place de l’autre côté de la table, face à sa sœur. Ni accolade, ni embrassade … Pas même une main posée furtivement sur son avant-bras ou quoi que ce soit du genre – Tommy n’avait pas osé, comme il n’osait plus grand-chose à l’égard des membres de sa famille depuis son retour, d’ailleurs, englué comme il était dans l’impression qu’on lui tiendrait rigueur de la manière dont les choses s’étaient faites avec la mère de Moïra aussi longtemps qu’il vivrait, car bien sûr Marius était la victime de toute cette histoire et lui n’en était que le bourreau. Mais il se morfondait à nouveau, et d’un geste presque imperceptible il avait secoué la tête pour chasser tout cela de son esprit. « Ça fait longtemps que tu m’attends ? Tu aurais dû te commander à boire … Qu’est-ce que tu prends ? Je suis sûr qu’ils ont du vin. » Et une autre chose était sûre, sa tendance à trop parler lorsqu’il était nerveux refaisait encore des siennes, lui d’habitude homme de si peu de mots. Car ils en étaient là, tristement … La simple perspective d’un repas avec son aînée le rendait nerveux.
|
| | | | (#)Lun 17 Fév 2020 - 16:46 | |
| Elizabeth avait pris son portable pour s’occuper en attendant son frère. Elle regardait l’appli d’actualités de la ABC pour faire le point sur les améliorations à apporter. Même en pleine pause il fallait qu’elle bosse…Evidemment Tommy était en retard…Etait-elle la seule à accorder de l’importance à ce repas ? Bon bon, il fallait qu’elle se calme. Tout le monde n’aimait pas être autant ponctuel qu’elle. Depuis toute jeune, Elizabeth était toujours à cran lorsqu’il s’agissait d’être à l’heure. Elle engueulait déjà ses petits copains pour leurs retards à leurs rencards et elle faisait même parfois des réflexions à des professeurs en retard ! Et tout ceci était parti du fait qu’un jour sa mère lui avait avoué qu’elle trouvait que c’était un manque de respect d’être en retard et que c’était inconcevable pour elle. Elizabeth, en bonne petite fille parfaite, avait donc pris la décision qu’à partir de ce jour elle serait toujours à l’heure. Elle avait 10 ans… « Pardon, je suis en retard, je sais. J’ai dû faire un détour par Spring Hill pour déposer Moïra à un anniversaire et je … Bref, désolé. »Elizabeth leva les yeux et aperçut son frère Tommy. Il la regardait avec son air désolé, elle ne pouvait pas lui en vouloir. Et puis son excuse concernait Moïra…Il faisait tellement d’efforts pour être présent pour elle. C’était un bon père. Elizabeth n’avait jamais pris le temps de lui dire. A vrai dire, elle n’avait jamais vraiment eu l’occasion non plus. Et puis, Elizabeth n’était tellement pas du genre à parler sérieusement et intimement. Tommy essayait vraiment d’être là et de soutenir Moïra dans toutes les épreuves qu’elle vivait. Comme quand ses camarades avaient découvert que son père était un ex-taulard. Pauvre Tommy, lui qui essayait d’aller de l’avant, le passé venait toujours lui fouetter le visage pour lui rappeler qu’il ne pourrait jamais lui échapper…Tommy s’assit en face d’Elizabeth. « Ça fait longtemps que tu m’attends ? Tu aurais dû te commander à boire … Qu’est-ce que tu prends ? Je suis sûr qu’ils ont du vin. »Il parlait assez rapidement…Etait-il nerveux ? Elizabeth n’était peut-être pas la seule alors…Comment en étaient-ils arrivés là, à ce point, ne pas pouvoir partager un simple repas ? « Non, ça ne fait pas si longtemps que ça. J’en ai profité pour regarder quelques petits trucs pour le travail » le rassura-t-elle. « Je n’ai pas encore commandé à boire car j’étais captivée par ce que je regardais et je me disais que ça serait plus poli de t’attendre ». Plus poli ? Non mais franchement qui parle comme ça à son frère ? Elizabeth ne laissa pas le temps à Tommy de réagir à son vocabulaire si formel et si ridicule dans une situation pareille… « Je vais prendre un whisky on ice ». Il lui fallait au moins ça pour faire face à ce repas… « Et toi tu prends quoi ? ». @Tommy Warren |
| | | | (#)Mer 1 Avr 2020 - 18:03 | |
| Il avait fallu attendre que Tommy mentionne Spring Hill à voix-haute pour qu’il réaliser que le plus simple, en réalité, aurait été de suggérer à sa sœur de se rejoindre directement dans ce quartier pour déjeuner plutôt que de leur faire faire à l’un et à l’autre un immense détour jusqu’aux abords chaleureux mais terriblement lointains de Bayside. Mais tout à Spring Hill était horriblement cher, les restaurants ne faisaient pas exception à la règle, et pour le bien du portefeuille de Tommy Bayside restait un choix moins dangereux … Il ne se faisait d’ailleurs aucune illusion quant au fait que sa sœur n’avait pas tant choisi cet endroit par volonté irrépressible de déguster un fish & chips que par égard pour son budget à lui, et si sa fierté l’empêchait de l’énoncer à voix-haute Tommy ne lui en était pas moins reconnaissant. Sa bonne foi néanmoins n’avait pas été suffisante pour lui permettre d’arriver à l’heure, et si dix minutes n’étaient que fort peu de choses à l’échelle d’une vie, à celle du planning d’Elizabeth ainsi que de son sens de la ponctualité il s’agissait probablement d’une éternité dont Tommy n’avait pu que s’excuser platement, sans la moindre assurance toutefois qu’avoir quitté son appartement dix minutes plus tôt lui aurait assuré d’attraper le bus précédent et donc, d’arriver à l’heure. Puisque son aînée n’avait pas rebondi sur le sujet néanmoins le brun n’avait pas jugé utile de se flageller plus longtemps à ce sujet, et avait pris place de l’autre côté de la table non sans lui reprocher – gentiment – de l’avoir attendu pour commander. « Non, ça ne fait pas si longtemps que ça. » lui avait-elle pourtant assuré, avant d’ajouter « J’en ai profité pour regarder quelques petits trucs pour le travail. Je n’ai pas encore commandé à boire car j’étais captivée par ce que je regardais et je me disais que ça serait plus poli de t’attendre. » sans que Tommy ne soit le moins du monde surpris d’apprendre que le travail avant su se montrer d’excellente compagnie auprès sa sœur, ne fusse que pour lui faire paraitre une attente quelconque moins longue. « Comment se portent les affaires chez ABC ? » s’était-il alors permis de demander, au cas où Elizabeth aurait envie de s’épancher à ce sujet, quand bien même il n’y connaissait pas grand-chose. Pour ne pas dire rien du tout. Il n’avait pas la moindre idée de comment se gérait une chaîne de télévision et aurait bien été incapable d’expliquer en détail ce que faisait sa sœur de ses journées ; C’était une femme occupée, sa connaissance du sujet s’arrêtait là. « Je vais prendre un whisky on ice. » avait-elle en tout cas repris, pour répondre à sa question initiale. « Et toi tu prends quoi ? » Jetant un coup d’œil furtif à la carte des boissons sans réellement la lire, Tommy avait répondu « Une limonade. » pour mieux se justifier la seconde suivante. « J’ai plus vraiment l’habitude de l’alcool … surtout par cette chaleur. » Ce qui en soit n’était pas un mensonge, quand bien même il lui arrivait de consommer de l’alcool … Mais plutôt le soir, et plutôt chez lui. Une bière devant un match de cricket ou de football australien, à défaut du hockey qu’il ne suivait plus que sporadiquement puisque peu – voir pas – diffusé sur les chaînes publiques du pays. « Moïra t’embrasse, au fait. » Il passait du coq à l’âne, mais cela venait de lui revenir. « Y’a dix jours elle était prête à renoncer à cet anniversaire, et finalement depuis hier elle trépignait d’impatience. » Reposant le menu à côté de lui – il n’en avait pas besoin pour savoir qu’il prendrait un fish & chips – il avait repris « Elle a dû dire au revoir à un de ses copains de classe de ces trois dernières années, son père et lui partent s’installer je ne sais plus où, en Irlande je crois. Elle était un peu contrariée, je crois qu’elle en pinçait pour lui. » Moïra jurait que non, mais Tommy était certain du contraire, lui. Et pour l’heure il trouvait encore cela mignon, parce qu’à dix ans les garçons étaient encore inoffensifs et les béguins n’allaient pas plus loin qu’un partage de petit-suisse ou un bisou derrière un toboggan. « Mais bon, entre temps j’ai accepté qu’une de ses copines vienne dormir à la maison ce soir, ça a eu l’air de suffire à la consoler. Comme quoi à cet âge-là, on se remet de tout vitesse grand V. » Mais le voilà qui racontait en long, en large et en travers les déboires de bac à sable de sa fille, quand sa sœur n’en avait peut-être strictement rien à faire.
Dernière édition par Tommy Warren le Jeu 16 Avr 2020 - 22:29, édité 1 fois |
| | | | (#)Mer 8 Avr 2020 - 18:03 | |
| « Comment se portent les affaires chez ABC ? »Tommy lui demanda comment se passait le travail. Une question des plus banales. Et pourtant, Elizabeth ne savait que répondre. Elle savait pertinemment que Tommy ne connaissait presque rien de son activité là-bas. Mais d’un autre côté, ce n’est pas comme s’ils avaient énormément de sujets en commun...Il était là, en face d’elle et il faisait un effort. « Tout va bien. C’est une boîte qui tourne bien tu sais. D’ailleurs, c’est rassurant au niveau de la sécurité de l’emploi. Tu sais comme c’est important pour moi…Et puis je me sens bien là-bas. J’aime ce que je fais »Et tout le monde ne pouvait pas en dire autant. Tommy écouta attentivement et acquiesça avec la réponse d’Elizabeth. Puis il rebondit sur un autre sujet qu’ils pouvaient avoir tous les deux, et c’était le préféré d’Elizabeth, celui de sa nièce. « Moïra t’embrasse, au fait. Y’a dix jours elle était prête à renoncer à cet anniversaire, et finalement depuis hier elle trépignait d’impatience. Elle a dû dire au revoir à un de ses copains de classe de ces trois dernières années, son père et lui partent s’installer je ne sais plus où, en Irlande je crois. Elle était un peu contrariée, je crois qu’elle en pinçait pour lui. Mais bon, entre temps j’ai accepté qu’une de ses copines vienne dormir à la maison ce soir, ça a eu l’air de suffire à la consoler. Comme quoi à cet âge-là, on se remet de tout vitesse grand V. »Elizabeth écoutait Tommy parler de sa fille. SA fille. Elle ne pouvait s’empêcher de penser à ce jeune garçon fougueux qu’elle avait connu à l’époque. Et le voilà maintenant devenu un adulte, un père aimant et investi. Elizabeth avait encore un goût amer du départ de Tommy. Elle aurait aimé voir grandir son petit frère. Avec le temps et le recul elle avait réussi à comprendre pourquoi il était parti. Ou du moins elle s’était imaginé des raisons sans savoir si elles étaient vraies ou non. Mais par contre elle ne pouvait définitivement pas assimiler le fait qu’il soit parti sans regarder en arrière, sans donner de nouvelles, en coupant les ponts. On lui avait retiré quelque chose de précieux qu’elle ne pourrait jamais récupérer, car elle ne pourra jamais revivre ces années-là à ses côtés. A chaque fois qu’elle voyait Tommy, elle ne pouvait s’empêcher d’y penser. Elle repoussait avec toute la force dont elle pouvait cette pensée au fin fond de son esprit, mais elle restait là, la narguant avec un sourire diabolique. Tommy et Elizabeth étaient destinés à se parler un jour, mais l’un comme l’autre ils repoussaient cette discussion. Ils savaient que leur relation était trop fragile et ne pourrait peut-être pas y survivre. « Sacrée Moïra ! C’était son premier amour alors tu penses ? Faudra que je la cuisine pour savoir »Elizabeth était proche de sa nièce. Pourtant, elle n’aimait pas les enfants. Mais avec Moïra c’était différent. Elle avait ouvert la porte sur une partie d’elle qu’elle ne pensait pas exister. Elizabeth avait pourtant conscience qu’elle avait toujours tenu une position maternante envers ses frères et sa sœur mais elle ne pensait pas qu’elle ressentirait cela pour quelqu’un d’autre qu’eux. Elle n’était peut-être pas aussi proche qu’elle le souhaitait de Tommy et Scarlett mais elle était prête à passer sous un bus pour les sauver. La fidélité d’Elizabeth était sans fin. Ils auraient beau lui crier dessus, lui faire des reproches, jamais elle ne cesserait de les aimer. Et la voilà aujourd'hui qui ressentait ça pour une enfant, enfin une jeune fille bientôt. Moïra avait réveillé en Elizabeth la possibilité de devenir mère un jour alors qu'Elizabeth avait repoussé cette idée depuis bien longtemps. Elle ne voulait pas y penser mais elle savait pourtant que cette possibilité toquait à la porte de son esprit. « C’est bien que tu aies identifié qu’elle n’était pas bien et que tu lui aies proposé d’inviter une copine. Et tant mieux si ça a suffit pour lui remonter le moral. Elle grandit si vite…Bientôt les peines de cœur seront plus importantes »Et Tommy était bien placé pour le savoir…son adolescence avait été tumultueuse. Il avait toujours eu un certain caractère mais c’était exacerbé pendant cette période de sa vie. @Tommy Warren |
| | | | (#)Jeu 16 Avr 2020 - 22:48 | |
| Tommy se demandait parfois si sa sœur aînée aimait véritablement son métier. S’il l’intéressait réellement, ou bien si elle se satisfaisait du simple fait qu’il s’agisse d’un poste prestigieux et lui incombant suffisamment de responsabilités pour coller à l’image qu’elle se faisait de la Réussite avec une majuscule. Dans le fond il ne lui enviait ni son métier ni sa position, il se plaisait à être celui qui exécutait les directives d’autrui plutôt que celui qui les donnait – Tommy n’avait pas l’âme d’un leader. Ce qu’il lui enviait en revanche c’était cette impression qu’elle lui avait toujours donné de savoir précisément dans quelle direction elle voulait aller, et ce qu’elle souhaitait faire de sa vie. Cette ambition au sens plus large du terme que lui ne possédait pas, et qui lui donnait encore aujourd’hui cette impression de voguer dans des eaux qui, sans être problématiques, ne répondaient à aucun projet et aucune envie profonde. Toujours est-il que c’était donc plus par politesse que par réel intérêt pour ce qui se tramait du côté d’ABC que le brun avait questionné sa sœur à ce sujet, mais le ton léger sur lequel elle lui avait répondu « Tout va bien. C’est une boîte qui tourne bien tu sais. D’ailleurs, c’est rassurant au niveau de la sécurité de l’emploi. Tu sais comme c’est important pour moi … Et puis je me sens bien là-bas. J’aime ce que je fais. » lui avait en revanche arraché un sourire sincère, bien qu’empreint de son habituelle réserve. « Alors c’est ce qui compte. » lui avait-il alors assuré avec calme, sans toutefois creuser plus loin à ce sujet car il ne comprenait pas suffisamment en quoi consistait son travail pour pouvoir la questionner plus en détails. La discussion s’étant ensuite brièvement interrompue le temps que l’un et l’autre arrêtent leur choix sur leur boisson, le brun n’avait pas résisté longtemps à l’envie de mentionner Moïra, atteint comme tous les parents de cette tendance à faire de leur progéniture leur sujet principal de conversation. S’agissant de sa nièce toutefois Elizabeth ne semblait jamais s’en formaliser, et la façon dont elle s’était exclamée « Sacrée Moïra ! » sonnait on ne peut plus sincère. C’était pour ce genre de choses que Tommy savait, en dépit du fait que le Canada lui manquait, qu’il avait pris la bonne décision en décidant de rester à Brisbane avec sa fille. Moïra méritait de créer des liens avec sa famille malgré les liens parfois distendus que Tommy entretenait avec eux. « C’était son premier amour alors, tu penses ? Faudra que je la cuisine pour savoir. » Dodelinant la tête de manière incertaine, le terme « premier amour » lui semblant un peu fort pour l’adapter aux émois d’une enfant de dix ans – ou bien était-ce lui qui se voilait la face ? – il avait répondu « Premier amour je ne sais pas, mais disons au moins un petit béguin … Mais hey, si tu lui en touches un mot je ne t’ai rien dit. Elle m’a juré que c’était pas le cas. » Le tout en rougissant jusqu’aux oreilles, ce que son père n’avait bien entendu pas pu s’empêcher de trouver terriblement mignon, quand bien même il s’était gardé de tout commentaire supplémentaire pour ne pas froisser l’humeur de la fillette. « C’est bien que tu aies identifié qu’elle n’était pas bien et que tu lui aies proposé d’inviter une copine. » lui avait en tout cas assuré Elizabeth, avant d’ajouter « Et tant mieux si ça a suffi pour lui remonter le moral. Elle grandit si vite … Bientôt les peines de cœur seront plus importantes. » et de provoquer au passage une légère grimace de la part de son frère, qui n’avait absolument pas hâte de voir arriver cette période. « C’est totalement utopique d’espérer qu’elle y échappe, pas vrai ? » La question était purement rhétorique, Tommy savait bien qu’il n’y avait rien qu’il puisse faire pour enrayer ce phénomène, qui n’illustrait qu’une chose très simple : sa fille grandissait. « Quand je pense qu’à mon retour elle trépignait d’impatience à l’idée d’apprendre à lire … Et maintenant j’entre dans cette phase où elle me réclame un portable. » Sa dernière lubie, avec bien sûr l’argument que tous les enfants avaient déjà utilisé un jour, à savoir que Machin ou Bidule en avaient un, eux. La remarque en tout cas avait arraché au brun un soupir songeur, l’époque où il avait retrouvé Brisbane, les Warren mais surtout sa fille lui semblant à la fois remonter à hier et à des siècles. « Je m’en veux d’avoir loupé autant de choses de ses premières années … » avait-il finalement avoué en baissant les yeux. Moïra venait à peine de fêter ses quatre ans lorsqu’il avait dû la confier à Marius, et presque six lorsqu’il l’avait récupérée à sa sortie de prison. Une année et demi qui pouvaient sembler bien peu de choses mais qui à l’échelle de ce qu’il avait manqué dans la vie de sa fille lui semblait être une éternité. Une punition finalement bien plus douloureuse à vivre que les dix-huit mois d’enfermement en eux-mêmes, auxquels il avait été condamné sans broncher car conscient de les mériter. @ELIZABETH WARREN
|
| | | | (#)Jeu 23 Avr 2020 - 9:12 | |
| « Premier amour je ne sais pas, mais disons au moins un petit béguin … Mais hey, si tu lui en touches un mot je ne t’ai rien dit. Elle m’a juré que c’était pas le cas. »Elizabeth était touchée et amusée en même temps de voir son petit frère prendre des pincettes sur ce sujet-là. « Evidemment, ça sera notre petit secret »Elle lui fit un clin d’œil. Wow, cela faisait tellement longtemps que Tommy et Elizabeth n’avaient pas partagé quelque chose juste entre eux deux. C’était un progrès n’est-ce pas ? « C’est totalement utopique d’espérer qu’elle y échappe, pas vrai ? »Tommy fit une grimace adorable. C’était peut-être là un des seuls points communs entre Tommy et Elizabeth : ne pas arriver à parler de sentiments. Déjà que pour un père lambda c’est difficile d’aborder le thème de la vie amoureuse de sa fille alors pour quelqu’un qui n’est pas branché discussion émotions....Tommy devait déjà s’imaginer le challenge qu’il allait devoir surmonter pour parler de garçons avec cette pauvre Moïra. « Désolée petit frère mais oui, c’est complètement utopique. Mais tu sais, Scarlett et moi on pourra t’aider concernant le sujet des garçons…On n’est peut-être pas des modèles de réussite dans ce domaine mais on a quand même cette touche féminine. Et puis c’est quand même plus facile de parler de ça à ses tantes qu’à son père… »Ce fut au tour d’Elizabeth de grimacer. Effectivement, elle ne se serait jamais vu parler à son père de sa vie privée de quand elle était ado. Mais encore une fois, les Warren était très loin d’être un modèle de communication. « Quand je pense qu’à mon retour elle trépignait d’impatience à l’idée d’apprendre à lire … Et maintenant j’entre dans cette phase où elle me réclame un portable. »Il est certain qu’être père célibataire cela était loin d’être facile. Surtout que Moïra approchait de la période de vie la plus difficile pour un parent : l’adolescence. Il était donc tout à fait normal que Tommy ait quelques appréhensions, bien que cela n’avait jamais effleuré Elizabeth étant donné qu’elle voyait Tommy tellement à l’aise avec Moïra. Elle était vraiment fière du père qu’il était devenu. « Tu feras comme tu as fait jusqu’à présent : un pas après l’autre. Et même si on n’est clairement loin d’être des meilleurs amis, j’espère que tu sais que tu peux compter sur nous tous »Normalement Tommy le savait mais après ce qu’il s’était passé avec son départ, une piqûre de rappel ne faisait pas de mal. Et même si Tommy voudrait probablement se passer de l’aide de Marius, ce « nous » incluait également Elizabeth et Scarlett. « Je m’en veux d’avoir loupé autant de choses de ses premières années … »Elizabeth connaissait bien cette sensation. Elle aurait tellement aimé être plus présente pour Tommy. Peut-être alors aurait-elle réussi à l’empêcher d’agir contre la loi. Savoir son frère en prison lui avait déchiré le cœur, elle avait le sentiment d’avoir échoué à son rôle de protectrice. Elle était venue le voir, lui avait donné des nouvelles de Moïra malgré l’interdiction de Marius. Mais ce n’était pas suffisant. Elle aurait du être là avant, l’empêcher de commettre les actes qui l’ont amené tout droit derrière les barreaux. Comment avait-elle pu le laisser autant s’éloigner ? Tommy avait toujours été celui avec lequel elle était le moins proche en étant jeune, elle et Marius étant liés par leur caractère ressemblant et la petite Scarlett lui prenait beaucoup de son temps et de son énergie. Pour au final ne pas avoir réussi à l’aider aussi....Elizabeth avait cette impression d’échec quand elle pensait à sa fratrie. Même avec Marius tout s’était dégradé suite à son départ en France. Elle avait un pincement au cœur en ayant ces pensées négatives. « Tu ne peux pas revenir sur le passé Tommy. Personne ne peut. On ne peut que faire en sorte d’aller de l’avant »La philosophie Elizabetienne : toujours continuer à avancer (et de préférence en mettant les émotions de côté…). Un silence s’installa. Tommy savait très bien qu’Elizabeth ne parlait pas que de Moïra mais aussi de leurs liens à eux tous. Oui, c’est certain, personne ne pouvait retourner en arrière et changer ce qui s’était passé. @Tommy Warren |
| | | | (#)Sam 2 Mai 2020 - 14:14 | |
| Le temps passait donc si vite, pour qu’il en soit déjà là ? Quelques semaines auparavant Norah et lui avaient eu une discussion similaire, leurs filles avaient le même âge, étaient amies, et les problématiques qu’ils rencontraient l’un et l’autre en tant que parent célibataire étaient sur de nombreux points les mêmes. Norah se questionnait sur les futures difficultés qu’elle aurait à faire face aux questionnements de son fils, qui n’aurait pas de souvenirs de son père, et Tommy lui se questionnait de la même manière concernant Moïra, avec la crainte que l’absence d’Alice ne lui pèse encore plus à mesure que leur fille cesserait d’être une enfant. Et si face à Beth il en plaisantait pour l’instant, il avait conscience du challenge que représenterait pour lui le fait d’aborder certains sujets avec sa fille, lui d’un naturel si taiseux, et elle tenant assurément ce trait-là de son père dans une moindre mesure. « Désolée petit frère mais oui, c’est complètement utopique. » lui avait en tout cas confirmé sa sœur, un brin amusée. « Mais tu sais, Scarlett et moi on pourra t’aider concernant le sujet des garçons … On n’est peut-être pas des modèles de réussite dans ce domaine mais on a quand même cette touche féminine. Et puis c’est quand même plus facile de parler de ça à ses tantes qu’à son père … » La grimace avait été commune, et probablement provoquée par la même incongruité à imaginer la situation transposée à leur propre adolescence, et leur propre père. L’austérité de Warren senior, bien que pas entièrement dénuée de bienveillance pour autant, n’avait pas accompli de miracles quant à la manière qu’avaient ses enfants de gérer leurs émotions et leur capacité à communiquer ; Les chiens ne faisaient pas des chats, après tout. « Je saurais te rappeler cette promesse dans les pires moments, sois en sûre. » avait-il finalement répondu d’un ton taquin, avant de se laisser aller à un soupir en songeant à la manière dont ses problématiques de père avaient évolué depuis son retour en Australie. Il regrettait presque tous les jours sa vie canadienne, mais à mesure que Moïra grandissait il se faisait à l’idée qu’une grande ville comme Brisbane avait bien plus à offrir à une adolescente que Kenora, son centre-ville de campagne et ses scieries. « Tu feras comme tu as fait jusqu’à présent : un pas après l’autre. Et même si on n’est clairement loin d’être des meilleurs amis, j’espère que tu sais que tu peux compter sur nous tous. » Sentant sa gorge se serrer un peu, il avait acquiescé en silence. Il le savait, il avait maintes fois eu l’occasion de s’en rendre compte, et si les agissements de Marius avaient réveillé ses craintes et écorné sa confiance, il n’avait en revanche jamais douté de pouvoir confier Moïra à ses sœurs les yeux fermés. Elles avaient toujours été là alors que rien ne les y obligeait, elles ne lui avaient pas entièrement tourné le dos alors qu’il n’avait pas eu le moindre regret à fuir à l’autre bout du monde pour vivre son histoire avec Alice – parfois il se demandait si elles lui en voulaient, pour Scarlett il pensait croire que oui quand bien même ils n’en parlaient jamais. Pour Elizabeth il n’en savait rien, et craignait trop la réponse pour se risquer à poser la question. « Tu ne peux pas revenir sur le passé Tommy. Personne ne peut. On ne peut que faire en sorte d’aller de l’avant. » Parlaient-ils toujours uniquement de Moïra ? Laissant le silence planer quelques instants Tommy avait fixé sa sœur dans les yeux, chose qu’il faisait rarement, plutôt habitué à détourner le regard et à baisser la tête. « J’ai jamais voulu que ça se passe comme ça … Tu le sais, pas vrai ? » C’était facile à dire après coup, bien sûr. « J’veux dire, je … j’ai jamais voulu être ce gars-là. Un voleur. » Mais c’est ce qu’il était malgré tout, il fallait peut-être un casier judiciaire étranger pour le prouver, mais les faits restaient les mêmes. Et bien qu’elle ait toujours plané au-dessus d’eux jamais le brun n’avait jusqu’alors trouvé le courage d’aborder les choses avec sa sœur aînée, pour tenter de lui délivrer sa version. « Je savais juste plus comment m’en sortir. Entre le crédit pour la maison, celui pour les funérailles d’Alice … j’ai cru que je pourrais gagner un peu de temps avec le poker, mais ça a été pire, et après ça … » Après ça il avait dégringolé, perdu plus d’argent qu’il n’en avait gagné, cumulé des dettes toujours plus importantes et rien d’autre n’avait plus compté que le fait de trouver de l’argent, peu importe le moyen. « Je sais que ça a l’air stupide, dit comme ça. » Elizabeth était un modèle de droiture et de raison, elle n’aurait jamais enfreint la loi … Mais tout lui réussissait toujours, elle ne connaissait pas l’échec, elle ne savait pas l’effet que cela faisait. Ou du moins Tommy le pensait-il.
|
| | | | (#)Ven 8 Mai 2020 - 20:32 | |
| Tommy se mit à fixer sa sœur dans les yeux. C’était très déroutant pour Elizabeth qui n’avait clairement pas l’habitude d’avoir en face d’elle un homme assuré mais plutôt un petit garçon qui fuit son regard et semble impressionné. Elle n’en avait jamais touché un mot à Tommy car elle savait ce qu’elle dégageait et elle avait parfaitement conscience que cela pouvait impressionner les autres. Bien sûr, elle espérait que ça ne soit pas le cas dans sa propre famille mais étant donné le peu de proximité qu’elle partageait avec Tommy, elle ne pouvait pas lui en vouloir. Scarlett et Marius, c’était une tout autre histoire. Avec Marius lorsqu’ils étaient plus jeunes c’était plutôt à celui qui baisserait le regard en premier, comme une bataille de deux coqs fiers. Quant à Scarlett, elle cherchait toujours la confrontation dans le regard et c’était plutôt Elizabeth qui évitait le sien car elle cherchait à contourner le conflit avec sa sœur, sachant très bien que ça ne les menait à rien. Mais à cet instant, voir Tommy la fixer enfin droit dans les yeux, ça n’avait pas de prix. Elle était si fière de lui, de l’homme qu’il était devenu. Il avait appris de ses erreurs. Il n’était pas parfait, mais qui l’était vraiment ? Et surtout, il se battait tous les jours pour sa fille, la prunelle de ses yeux. « J’ai jamais voulu que ça se passe comme ça … Tu le sais, pas vrai ? J’veux dire, je … j’ai jamais voulu être ce gars-là. Un voleur. »Tommy ne s’ouvrait jamais sur cette période. Personne ne parlait de ce sujet considéré comme tabou. Elizabeth était prise au dépourvu. Ne sachant encore comment réagir, elle le laissa s’exprimer. Et de toute façon, cela semblait être la bonne décision, de ne pas l’interrompre dans son élan de courage. Car elle savait bien ce que cela lui demandait de s’ouvrir. Ils étaient peut-être différents mais ils provenaient de la même famille et les Warren n’étaient pas connus pour leurs logorrhées verbales émotionnelles… « Je savais juste plus comment m’en sortir. Entre le crédit pour la maison, celui pour les funérailles d’Alice … j’ai cru que je pourrais gagner un peu de temps avec le poker, mais ça a été pire, et après ça … »Elizabeth était une personne très droite, elle faisait toujours en sorte de respecter la loi. Elle n’aurait jamais pris une décision comme celle-ci mais elle avait appris en grandissant que tout n’était pas aussi simple que ce qu’elle pensait naïvement en étant jeune. Elle avait pris conscience que parfois, les émotions pouvaient prendre le dessus. « Je sais que ça a l’air stupide, dit comme ça. »Le serveur apporta les plats. Timing parfait, cela laissait un temps de répits à Elizabeth pour savoir quels mots choisir. Mais les premiers qui lui vinrent étaient évidents. « Tu n’es pas stupide Tommy. Tu es humain. Tout le monde fait des erreurs. »Oui, même miss Warren en faisait. Alors, certes, pas de quoi aller en prison mais elle faisait tout de même quelques écarts à son niveau de temps en temps. « J’aurais juste aimé que tu te tournes vers moi. Surtout si cela concernait l’argent. Je ne dis pas ça pour me vanter mais tu sais que je gagne bien ma vie. J’aurais pu t’aider. J’aurais pu t’empêcher de faire cette bêtise... »Si seulement elle avait pu être là pour lui. Si seulement elle avait trouvé la force de courir après lui. Si seulement elle avait réussi à dépasser la tristesse de son départ, ce sentiment d’abandon et de colère. Si seulement…Mais ce n'était pas arrivé et Elizabeth devait vivre avec le poids de sa culpabilité. Elle ne pouvait que faire en sorte que cela ne se reproduise plus à l'avenir. Surtout qu'il y avait désormais Moïra dans l'équation. « J’espère que tu sais que tu pourras toujours compter sur moi. Je ferais tout ce que je peux pour cette famille tu sais. Vous êtes tout pour moi. »Et voilà, c’était dit. Clair et limpide. Impossible d’interpréter ça autrement. Elle les aimait. @Tommy Warren |
| | | | (#)Mer 3 Juin 2020 - 9:39 | |
| Il était rare que Tommy soit d’humeur à se justifier de quelque manière que ce soit sur les actions ayant mené à son incarcération. Il estimait n’avoir de comptes à rendre à personne, et la seule dont il aurait sans broncher accepté le jugement était celle dont la disparition l’avait mené à perdre totalement pieds en premier lieu. Pour autant cela ne signifiait pas que la crainte du jugement d’autrui n’existait pas, et si le brun n’avait pas attendu cet événement pour se savoir être une source de déception pour ses parents, une source de mépris pour Marius, l’idée d’être l’une ou l’autre de ces choses aux yeux de ses deux sœurs lui serrait presque autant le cœur que l’idée de l’être aux yeux de sa fille. Consciente peut-être que l’occasion d’écouter ce qu’il avait à dire à ce sujet ne se reproduirait sans doute pas de sitôt, Elizabeth l’avait donc laissé parler sans l’interrompre, et sans le savoir le serveur était arrivé avec leur repas juste au moment où Tommy s’était retrouvé bête, avec l’impression que ce qu’il disait n’avait aucun sens et s’excusait déjà à demi-mot d’importuner sa sœur avec tout cela. Pesant ses mots le temps qu’ils se retrouvent à nouveau seuls, Beth avait objecté « Tu n’es pas stupide Tommy. Tu es humain. Tout le monde fait des erreurs. » d’un ton mesuré, et bien que son cadet lui soit reconnaissant d’essayer d’arrondir les angles ni elle ni lui n’étaient dupes sur le fait qu’elle comparait un peu l’incomparable … Tout le monde faisait des erreurs, certes, mais tout le monde n’en faisait pas de suffisamment grosses pour terminer dans une cellule de prison. « J’aurais juste aimé que tu te tournes vers moi. » avait-elle finalement repris. « Surtout si cela concernait l’argent. Je ne dis pas ça pour me vanter mais tu sais que je gagne bien ma vie. J’aurais pu t’aider. J’aurais pu t’empêcher de faire cette bêtise ... » Et Tommy n’en doutait pas un instant, qu’elle ne cherchait pas à se vanter … Elizabeth était ambitieuse, mais elle n’était pas vénale. Malgré cela, un rictus amer avait étiré ses lèvres et un soupir lui avait échappé tandis qu’il secouait la tête. « J’ai pas ce niveau d’opportunisme, Beth. » Mais il ne lui reprochait pas la suggestion, elle essayait simplement maladroitement de lui faire entendre qu’elle aurait été de son côté et il ne la blâmait pas pour cela. « Je me suis barré à l’autre bout du monde comme un voleur pour vivre ma vie, et je te mentirais si je te disais que je le regrette parce que même avec le recul ça reste la meilleure décision que j’ai jamais prise … » Probablement parce qu’elle avait été guidée par l’amour, et aussi cliché que cela puisse paraître le brun y croyait dur comme fer. Mais il n’était pas dupe, il savait bien qu’aux yeux de sa sœur comme aux yeux du reste des Warren il avait fait preuve d’un égoïsme dont Marius s’était retrouvé éclaboussé plus qu’il ne le méritait, et plus que Tommy lui-même ne l’aurait voulu, quoi qu’on en pense. « Ça aurait été hypocrite de ma part de demander de l’aide à toi ou à qui que ce soit après tout ce temps. » Cela lui aurait peut-être évité la prison, c’est vrai … Mais au fond le brun préférait se dire qu’il en avait eu besoin, que les choses devaient se dérouler ainsi, et qu’il n’aurait peut-être pas retenu la leçon de la même manière si ses erreurs ne lui étaient pas revenues en pleine figure avec une telle violence. Tout comme sa rédemption n’aurait probablement pas la même saveur sans cette promesse qu’il s’était faite de rembourser jusqu’au dernier centime de ce qu’il avait volé même si cela devait lui prendre tout le reste de sa vie – et compte tenu du peu d’argent qu’il parvenait à économiser chaque mois sur ce salaire qui leur permettait tout juste de vivre à Moïra et à lui, il lui faudrait effectivement encore des années avant d’avoir payé sa dette, au propre comme au figuré. « J’espère que tu sais que tu pourras toujours compter sur moi. » avait en tout cas repris sa sœur, dont la voix était devenue un brin fébrile lorsqu’elle avait ajouté « Je ferais tout ce que je peux pour cette famille tu sais. Vous êtes tout pour moi. » Plus que les mots en eux-mêmes, c’était de savoir l’effort que cela demandait à sa sœur pour les prononcer qui attendrissait Tommy, mais le sourire qu’il lui avait offert était malgré tout empreint d’une certaine tristesse. « Je ne suis pas certain qu’on le mérite vraiment, pour être honnête. » Il était même certain du contraire, en réalité. « Mais c’est ce qui fait que tu es la meilleure d’entre nous, je l’ai toujours dit. » Pour la forme il avait ponctué sa remarque d’un clin d’œil, mais si le ton laissait à penser qu’il plaisantait il était en réalité on ne peut plus sérieux. Elizabeth arrondissait les angles, elle se faisait l’avocate des conflits intrafamiliaux et la défenseuse d’une paix familiale qui n’avait probablement jamais existé – quelque part Tommy l’admirait, à défaut de tout à fait la comprendre.
|
| | | | (#)Dim 21 Juin 2020 - 16:46 | |
| « J’ai pas ce niveau d’opportunisme, Beth. »Au fond d’elle, Elizabeth savait qu’elle n’aurait pas pu sauver son frère de lui-même mais malgré cela, elle s’accrochait à l’idée de vouloir sauver sa fratrie en toutes circonstances. Tommy et Scarlett avaient eu tellement de soucis avec leur propre mère, tellement d’accrochages et de disputes…Elizabeth avait été bien plus une mère de substitution qu’une grande sœur. Et elle ressentait la même chose. Telle une maman lionne, elle voulait protéger ses petits coûte que coûte. Mais elle comprenait Tommy. Il n’était jamais évident de demander de l’argent. Elle ne pouvait pas lui reprocher de ne pas avoir pu mettre son ego de côté. Mais elle avait le cœur serré à l’idée que Moïra ait été séparée de son père pendant tout ce temps. C’est bien pour cela qu’Elizabeth avait décidé de tenir tête à Marius et de donner des nouvelles de sa nièce à Tommy. Et elle n’avait jamais regretté sa décision. Même si elle se demandait parfois si elle n’avait pas participé au départ de Marius. « Je me suis barré à l’autre bout du monde comme un voleur pour vivre ma vie, et je te mentirais si je te disais que je le regrette parce que même avec le recul ça reste la meilleure décision que j’ai jamais prise … »Partir à l’autre bout du monde…Pourquoi l’histoire se reproduisait-elle chez les Warren ? Tommy, Marius…Elizabeth s’était senti complètement délaissée par ses frères et pourtant elle avait continué coûte que coûte à les défendre et à les aimer. Elle n’avait jamais rien exprimé sur la peine qu’elle avait pu ressentir. « Ca a été dur pour moi tu sais. J’ai eu l’impression de te perdre. »Elizabeth avala sa salive. C’était très difficile pour elle d’admettre ne serait-ce qu’un dixième de ce qu’elle avait ressenti. Car si Tommy apprenait réellement ce qu’elle avait vécu à l’intérieur d’elle, il ne s’en remettrait pas. Elizabeth était faite pour être la figure forte de cette famille. Le volcan qui l’avait enseveli à l’époque était désormais éteint…mais allait-il se réveiller plus tard ? Elizabeth ne savait pas combien de peine elle pouvait endurer. « Je ne suis pas certain qu’on le mérite vraiment, pour être honnête. »Elizabeth attrapa son verre pour boire un coup. Elle n’en revenait pas d’entendre la confession de son jeune frère. Elle, qu’on avait tellement critiqué dans sa famille d’être une tête de mule à qui on ne pouvait rien faire entendre. Elle, qu’on engueulait lorsqu’elle essayait de faire des repas de famille. Elle, qu'on remballait tellement de fois quand elle proposait son aide...C'est certain, sa famille n'avait pas toujours été tendre avec elle. Mais à l'inverse, elle aussi avait été exigeante. Peut-être même un peu trop et cela avait contribué à construire un pont entre elle et Tommy et Scarlett de l'autre côté. Elle en avait conscience aujourd'hui mais elle était bien trop fière pour admettre quoique ce soit. « Mais c’est ce qui fait que tu es la meilleure d’entre nous, je l’ai toujours dit. »Et là, ce fut la cerise sur le gâteau. Mais qu’avait mis le serveur dans le plat de Tommy ? Elizabeth n’avait jamais entendu son frère s’ouvrir comme ça... Etait-ce le fait d’être devenu père qui le faisait avancer sur ses sentiments ? Il était certain que Moïra poussait son père dans ses retranchements mais de là à ce qu'il confie ouvertement une pensée aussi intime...Et maintenant, que pouvait-elle faire si ce n’est se pousser à y répondre de façon honnête et ouverte ? « Je te remercie pour ces mots Tommy. Ca me va droit au cœur. Je ne sais pas si j’arriverais un jour à nous réparer mais c’est certain que je n’ai pas encore envie d’arrêter d’y croire »Elle savait que c'était à son tour d'ouvrir une brèche... « J’ai bien conscience que je n’ai pas toujours été très douce avec toi et Scarlett…mais j’espère que tu sais que c’est parce que je veux ce qu’il y a de mieux pour vous. Je pense que je me disais que je préférais que vous me détestiez mais que vous avanciez dans vos vies. Aujourd’hui, je me demande si je n’aurais pas du y aller plus doucement avec vous. J’ai parfois peur que l’on n’arrive jamais à retrouver une relation saine et stable ».Elizabeth, la main de fer de la famille Warren…Mais pour être tout à fait honnête, même elle se demandait parfois où elle trouvait cette volonté et cette ténacité qui lui donnaient chaque jour l’énergie pour avancer. @Tommy Warren |
| | | | (#)Jeu 6 Aoû 2020 - 12:47 | |
| Bien qu’il ait été intimement persuadé du contraire, Tommy n’était pas encore entièrement un adulte lorsqu’il avait décidé, de manière un peu folle, de laisser l'Australie derrière lui avec la certitude de ne plus vouloir vivre ne serait-ce qu’une minute dans un pays où Alice ne serait pas à ses côtés. À Brisbane leur amour n’aurait jamais pu se débarrasser de la tâche disgracieuse que représentait l’histoire entre la jeune française et Marius, et la discorde qui en avait découlé entre des Warren déjà pas en reste pour ce qui était des reproches à se faire. À Kenora Alice et lui n’étaient que les deux expatriés tentant timidement de se faire une place dans la communauté ; Cela n’avait pas toujours été sans difficultés, mais l’un et l’autre partageaient au moins à part égale le poids de leurs doutes et de leurs incertitudes. À Brisbane ils n’auraient jamais été que les deux mauvaises graines cultivant leur bonheur au dépend d’un Marius à qui le rôle de victime aurait été comme un gant – on ne leur aurait jamais souhaité que du mal l’un à l’autre, on aurait spéculé sur la durée de leur relation, sur la sincérité de leurs sentiments, et qui sait si ce climat n’aurait pas eu raison de leur histoire … Mais les choses ne s’étaient pas passées ainsi, alors à quoi bon spéculer sur un malheur qui n’avait pas eu lieu. Un autre avait pris sa place, bien plus tragique celui-là. « Ça a été dur pour moi tu sais. J’ai eu l’impression de te perdre. » avait de son côté fini par confier Elizabeth avec une pudeur manifeste. Alors qu’il baissait les yeux, la culpabilité de Tommy s’était néanmoins teintée d’une pointe d’amertume que la tristesse était venue enrober. « Vous m’aviez déjà perdu. Il a simplement fallu que je traverse la moitié du globe pour que vous vous en rendiez compte. » Alice, au fond, n’avait fait figure que de coupable idéale aux yeux de ceux que son départ avait pu froisser … Sans doute parce qu’il était plus simple d’envisager Tommy comme victime des manigances d’une ensorceleuse à qui un seul Warren n’avait pas suffi, plutôt que d’admettre que ses velléités de fuite prenaient leurs racines ailleurs. Mais au bout du compte cela avait sans doute été pour le mieux, pour que chacun se cherche et se trouve, et si cela ne s’était pas fait sans embûches et sans désillusions Tommy s’était effectivement trouvé en tant qu’adulte loin des autres Warren, de leurs attentes trop élevées pour lui, de leurs jugements trop rapides. Il avait cessé d’en vouloir à Beth voilà longtemps pourtant, bien qu’elle ne l’ait jamais réellement compris elle avait toujours cru bien faire, et usé à son égard d’une patience que ni leurs parents ni leur frère aîné n’avaient jamais cultivé. Parfois il continuait de la trouver austère, trop sérieuse, mais la plupart du temps il admirait en silence son intelligence et la patience dont elle faisait preuve à leur égard … Des qualités qu’elle semblait être la seule à posséder dans leur famille, malheureusement pour eux tous. Et des vérités que Tommy, homme de peu de mots, n’avait pas pour habitude de verbaliser. Un des rares points communs qu’il partageait avec sa sœur aînée contre toute attente, à peine plus âgée que lui mais aussi différente de lui que l’on pouvait l’être – plus encore qu’il ne l’était de Marius, peut-être, car les deux hommes possédaient moult défauts communs. « Je te remercie pour ces mots Tommy. Ça me va droit au cœur. Je ne sais pas si j’arriverais un jour à nous réparer mais c’est certain que je n’ai pas encore envie d’arrêter d’y croire. » Lentement, le brun faisait glisser le bout de ses doigts sur les rebords de son verre, l’oreille écoutant avec attention mais le regard peinant à s’ancrer dans celui de sa sœur, par pudeur. « J’ai bien conscience que je n’ai pas toujours été très douce avec toi et Scarlett … mais j’espère que tu sais que c’est parce que je veux ce qu’il y a de mieux pour vous. Je pense que je me disais que je préférais que vous me détestiez mais que vous avanciez dans vos vies. Aujourd’hui, je me demande si je n’aurais pas dû y’aller plus doucement avec vous. J’ai parfois peur que l’on n’arrive jamais à retrouver une relation saine et stable. » La fin de sa phrase lui avait arraché un rictus involontairement amer – construire une relation saine et stable nécessitait déjà de l’être soi-même, et à ce jeu-là il doutait qu’au bout du compte Elizabeth s’en sorte mieux que lui. Elle pourrait bien prétendre le contraire tant qu’elle voulait, elle ne respirait que pour son boulot et ce n’était pas plus sain que lui qui s’enterrait dans le sien sans s’y épanouir. « Je sais, Beth. Que tu pensais pas à mal, et que tu as envie de bien faire. Et Scarlett le sait aussi, seulement … faut que tu comprennes que ce qui est le mieux pour toi n’est pas forcément ce qui est le mieux pour elle ou pour moi. » Passant finalement une main un peu lasse dans ses cheveux, il s’était laissé retomber contre le dossier de sa chaise. Si à une époque de sa vie opposer des arguments concrets à sa sœur pour lui prouver qu’il se débrouillait très bien tout seul auraient pu se faire valoir, aujourd’hui il peinait à en rassembler même un ou deux, englué dans un quotidien qui ne lui convenait pas mais dont il ne savait pas comment se défaire. Son travail ne le passionnait pas, mais après tout ma tranche de la population qui travaillait avec plaisir et enthousiasme était minoritaire et il s’était fait une raison à ce sujet. Sa vie de famille lui convenait, son quotidien seul avec Moïra le comblait, mais parfois la solitude lui pesait un peu et le manque d'Alice n’en était probablement plus le seul responsable. Et puis il s’ennuyait. Il n’avait ni véritable passion, ni aspiration pour le tirer vers le haut – ses seules raisons de s’émouvoir provenaient de sa fille, et la voilà qui grandissait de plus en plus vite. Un jour elle n’aurait plus besoin de lui. « Finalement j’aurais dû prendre une bière. » avait-il fini par maugréer d’un ton devenu maussade. « C’est drôle, je croyais que le McTavish m’en avait dégoûté. À force de respirer les relents de houblon et de passer mon temps à nettoyer le comptoir et la couche de poisse qu'y laissait le trop-plein de mousse … et puis c’était toujours la boisson des gros lourds qu’il fallait foutre dehors à la fermeture. Ça vient chouiner pour de la bière sans gluten – alors qu’elle a le goût d’eau – mais ça ne sait pas passer à l’eau avant que la bière ne leur monte à la tête. Pourtant c’est supposé te coller mal à l’estomac avant de te faire tituber, la bière c’est pas ce que j’appelle un alcool sérieux. » Réalisant qu’il recommençait à déblatérer des inepties pour tenter de noyer son malaise – ce qui au bout du compte produisait l’effet totalement inverse – il s’était éclairci la gorge avec gêne et avait accueilli d’un œil presque soulagé le retour de la serveuse pour s’enquérir du reste de leur commande.
|
| | | | | | | | It's a simple meal with my brother, isn't it ? (ft Tommy Warren) |
|
| |