| | | (#)Dim 12 Jan 2020 - 9:18 | |
| Just know you're not alone, Cause I'm going to make this place your home...
Quelle jolie chanson que celle-ci; Philip Philips avait fait preuve d'une excellente fibre artistique en l'écrivant, en la chantant. Au point même qu'une jolie petite blonde en avait fait son hymne favori, à chaque fois qu'elle revenait en Australie après un passage au Texas. Son coeur battait pour un endroit, un seul réellement; cela pouvait sembler égoïste, mais cette localisation, ce point géographique sur la planète, cet entrecroisement de méridien et de parallèle qui la rendait toute chose n'était pas la maison de ses parents, celle où elle avait grandi et passé la majeure partie de sa jeune vie. Non, Sixtine ne se sentait chez elle qu'à un seul endroit en ce vaste monde: à Brisbane, dans l'appartement qu'elle partageait avec son frère aîné. Non, elle ne squattait pas chez lui, pas plus qu'il ne l'hébergeait en tant que grand frère charitable - quoi que, si ça ne tenait qu'à lui, sa cadette ne paierait probablement aucune autre charge que les courses - ils étaient tous simplement deux égaux vivant sous un même toit, se partageant le quotidien comme beaucoup l'imagineraient d'un couple. A ceci près qu'ils étaient liés par le sang, et que ce style de vie leur convenait très bien jusque-là. L'étudiante en droit-communication y trouvait la proximité physique avec Camil qui lui avait manqué pendant tant d'années, en plus des avantages si évidents qu'ils n'ont pas besoin d'être décrits, comme le fait d'avoir un très bel appartement en plein coeur de la ville alors qu'elle n'était qu'étudiante, même en alternance. Quant à lui, que dire ? Il avait toujours chéri sa cadette, en tout cas il ne s'était jamais privé de lui montrer, même éloignés de plus de 13 000 kilomètres. Ce rapprochement réclamé corps et âme par la cadette dès ses quinze ans, et devenu réalité peu après, leur convenait pleinement, et ce même si cela faisait déjà cinq ans qu'ils vivaient ensemble. Les iris vert émeraude de l'australio-américaine se posèrent sur Brisbane qui était de plus en plus proche, chaque seconde passant. Son coeur se mit à battre la chamade, alors qu'elle savait les minutes la séparant de son chez elle de moins en moins nombreuses. Tiens, changement de mélodie. "Can I have this dance", de la comédie musicale High School Musical, troisième film. Pourquoi pas; le rythme était doux, la voix de Vanessa Hudgens agréable et bien assez joyeuse pour coller à son état d'esprit. A la fois surexcitée et apaisée, la petite brune commanda un café pour achever son état d'hébétude, et tant pis s'ils étaient à moins de cinq minutes de l’atterrissage proprement dit. Elle leva un sourcil inquisiteur lorsque le stewart lui amena de mauvaise grâce, semblant franchement agacé par son comportement. Sans sucre, j'espère, commenta-t-elle d'un air d'impératrice. Elle le goûta, du bout des lèvres. Bon, ça fera l'affaire en attendant d'être à Spring Hill. Les vingt-et-une heures de vol avaient un chouilla entamé sa patience, mais pas au point de renvoyer un café qui somme toute, n'était pas si mauvais que cela.
Finalement, l'engin qui ayant permis de traverser l'océan Pacifique se posa au sol, et la demoiselle se faufila parmi les autres passagers, le diable au corps. Première à sortir, et à récupérer sa valise. Hors de question d'attendre plus longtemps; la caféine coulant dans ses veines lui avait rendu un aplomb lui donnant de vrais ressorts sous les talons. Passant aux toilettes rapidement, elle en profita pour se recoiffer rapidement et remettre un trait de liner sur ses paupières, ainsi qu'un peu de rouge-à-lèvres plus rosé qu'autre chose; hors de question d'apparaître négligée alors qu'elle venait juste d'arriver sur sa terre d'adoption. Chemisier ré-ajusté, ouvert au deuxième bouton, le faux-sage. Une main passée sur le pantalon pour le lisser un peu. Ok, c'est parti. Après quelques centaines de pas, la jeune femme arriva dans l'immense hall d'accueil de l'aéroport. Elle avança, d'un pas vif, cherchant des yeux Camil. Personne en vue, captain'. Peut-être que la rapidité devenait précipitation ? Changeant de stratégie, la cadette des Smith ralentit l'allure, scrutant la foule de son mètre soixante-trois. Où es-tu, grand frère ? @Camil Smith |
| | | | (#)Mer 15 Jan 2020 - 9:13 | |
| Il n’avait pas encore officiellement repris le travail mais, officieusement, il travaillait déjà comme un acharné. Le nombre vertigineux d’emails qu’il avait reçu en son absence lui avait donné envie de faire l’autruche et de plonger la tête dans le sable, mais il en était tout bonnement incapable : qu’on le veuille ou non, Camil était un véritable bosseur. Il aimait ça : avoir l’esprit occupé, être sur tous les fronts, l’adrénaline des moments forts. Mais aujourd’hui, malgré l’intérêt réel qu’il avait pour son métier et ses perspectives d’avenir, il n’était pas fichu de se concentrer. Il jetait un coup d’oeil sur sa montre tous les quarts d’heure, et soupirait d’agacement, convaincu que les aiguilles étaient plus lentes que d’ordinaire. Même la voix empressée de Nolan, qui lui annonçait une bonne nouvelle, ne parvint pas à accaparer toute son attention. Son fidèle conseiller ne s’en offusqua pas ; il connaissait suffisamment bien Camil pour savoir que ce n’était qu’une passade, une distraction momentanée dû à un événement particulier. Il trépignait d’impatience à l’idée de revoir sa soeur, qui était restée aux États-Unis plus longtemps que lui. Et aujourd’hui était le jour où elle devait rentrer, le jour où il avait prévu d’aller la chercher à l’aéroport. D’où son manque de concentration des dernières heures.
Le politicien sursauta lorsqu’il entendit son téléphone vibrer, et se redressa aussitôt en voyant qu’il s’agissait de son alarme. Il laissa tout en plan, ne souhaitant pas être la moindre seconde. Sans compter qu’être en retard à l’aéroport était tout bonnement inenvisageable : il avait trop envie de serrer sa petite soeur dans ses bras. Il sauta dans sa voiture, et traversa la ville de Brisbane à toute allure, faisant fi de la circulation et limites de vitesse. Il se gara dans le parking souterrain de l’aéroport, et se hâta de monter dans le hall des arrivées. Là, il fit les cent pas pendant de longues minutes. Et ne put retenir un sourire lorsque le vol de sa soeur se posa sur la terre ferme. Il patienta encore — trop longtemps à son goût — avant de voir apparaître la tignasse blonde de sa petite soeur. « Devine qui c’est ? » Demanda Camil, alors que ses mains venaient se poser sur les yeux clairs de sa petite soeur. Il ne tint pas longtemps sa position, et retira rapidement ses mains pour mieux prendre Sixtine dans ses bras. Il respira profondément, et fût ravir de sentir l’odeur fleurie qui émanait de sa soeur. C’était une sensation apaisante, un moment dans lequel il trouvait un véritable réconfort. Il ne l’expliquait pas, mais la présence de Sixtine à ses côtés avait un réel bienfait sur lui et son comportement. Elle était comme une part de lui-même. Cette relation fusionnelle et exceptionnelle, ils l’avaient bâtie ensemble, dès le retour de Camil de New York. En septembre 2001, quelques jours à peine après l’effondrement des tours jumelles, il était rentré au Texas. « Miraculé » était un mot qui avait longtemps été utilisé pour le décrire, et pour parler de son cas. Il n’en était rien, en réalité : sa survie, il la devait juste à une erreur humaine — la sienne. Il avait oublié d’activer son réveil la veille au soir, et voilà comment un simple bouton non-activé lui avait épargné de figurer parmi une longue liste de victimes. Alors que tout le monde le regardait avec peine et pitié, seule Sixtine avait eu un comportement différent avec lui. Sa jeunesse et sa naïveté l’avaient empêchée de comprendre les événements dramatiques que vivaient les États-Unis, et qui avaient failli directement impacter sa famille. La petite blonde avait sautillé autour de son frère aîné, indifférente aux bouleversements qu’il traversait alors. Elle l’avait abreuvé de paroles, d’activités, de tendresse. Elle l’avait forcé à sortir, à s’occuper l’esprit en lui faisant faire tout un tas d’activités. Pour la première fois de sa vie, Camil avait été utile à quelqu’un d’autre. Et ce quelqu’un d’autre n’avait pas porté le moindre jugement à son sujet. Il avait tout doucement renoué avec le goût de vivre, alors que les liens qu’il tissait avec sa soeur seraient éternels. Il garda un bras autour des épaules de Sixtine, et se recula légèrement pour l’observer. « Tu as bonne mine. » Constata-t-il avec douceur, presque soulagé. Et pourtant, il n'avait eu aucune raison de s'inquiéter. « Tu as fait bon voyage ? » Il s’empara de la valise de sa soeur, heureux de pouvoir la débarrasser de ses lourdes affaires. Ils se dirigèrent d’un pas vif vers le parking, où Camil avait garé sa voiture. « Est-ce que tout va bien ? Tu n’es pas trop fatiguée ? » Il la bombardait de question, curieux de tout ce qu’elle avait pu faire au cours des derniers jours. Il ne l’avait eue que très brièvement par téléphone, le décalage horaire n’aidant pas à converser pendant des heures. « Qu’est-ce que tu as fait de beau, depuis mon départ pour Aspen ? » Comme chaque année, les Smith étaient rentrés chez leurs parents, à Houston. L’emploi de temps de Camil aux États-Unis était toujours très chronométré : passer Noël, voir ses amis, passer du temps en famille, et aller skier dans la luxueuse station du Colorado.
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| | | | (#)Jeu 16 Jan 2020 - 9:23 | |
| Ah ! Un petit cri de surprise, un chouilla plus aigu que sa voix ordinaire, échappa des lèvres de Sixtine alors que celle-ci venait de se faire attraper par son aîné. La montée d'adrénaline disparut cependant bien vite, alors que la jeune femme répondit d'un rire chaleureux: Oh non Monsieur le Grand Méchant Loup ! Ne me mangez pas ! Je suis trop grasse actuellement pour que ma viande soit réellement bonne à manger ! Elle pouffa de rire à sa propre plaisanterie, sachant très bien que Camil serait décontenancé; le si sérieux grand frère avait souvent tendance à perdre le Nord lorsque sa petite soeur le taquinait, la seule fille à vraiment le faire tourner en bourrique en fait. La captive fut alors relâchée, et les deux âmes soeurs - notion qui n'a rien à voir avec celle de couple, or en Occident la confusion était souvent de mise, comme le lui avait expliqué son acupuncteur - se jetèrent dans les bras l'une de l'autre. De la hauteur de ses talons, la blonde n'eut pas de mal à l'enlacer, et huma doucement son parfum. Bleu, de Chanel ? Demanda-t-elle en français lorsqu'ils se lâchèrent, avec un sourire malicieux. Dernier cadeau qu'elle lui avait fait, pour Noël alors qu'ils étaient en famille, au Texas. Un parfum qui correspondait bien à Camil selon elle: une flagrance assez marquée, pas un "passe-partout" mais qui était plus qu'agréable à sentir. Autant dire qu'elle avait bien réfléchi pour les présents de chacun des membres des Smith. A leur père, elle avait offert de la viande maturée de manière artisanale par un éleveur de leur comté; à leur mère, une nouvelle machine à coudre, l'ancienne étant franchement en train de rendre l'âme. Pour Camil donc, un superbe parfum, dont elle savait à 200% qu'il apprécierait les nuances. Cette année, cependant, c'était pour Carlo qu'elle s'était le plus creusée les méninges. Il ne le disait pas, mais elle ressentait que son éloignement depuis plusieurs années en Australie lui faisait mal au coeur. Moins proche de lui que du premier des enfants Smith, Sixtine n'en restait pas moins attachée à lui, et avait voulu lui faire plaisir. Elle s'était alors attelée, dans le plus grand secret et ce plusieurs mois avant leur départ aux US, à un album photo de pas moins de vingt-cinq pages allant de sa naissance à l'année 2019, regroupant autant de photos que possible d'elle et de Carlo, et seulement eux. Quand il avait ouvert son cadeau, déchiré le papier et avait découvert la teneur de son présent de Noël, l'homme d'habitude d'attitude assez détachée, avait tout simplement fondu en larmes. Malaise de quelques minutes, regards échangés entre les trois autres aînés que Sixtine n'avait pas su décrypter. Finalement, tout s'était bien fini avec un gros câlin, et des remerciements réellement sincères de la part du cadet.
Le service dans les avions se dégrade, je trouve, déclara-t-elle d'un petit air suffisant, et totalement honnête. Si le stewart n'était pas content de son job, il n'avait qu'à en changer. Son minois s'adoucit cependant, alors qu'elle rajoutait: Mais sinon, tout s'est bien passé. J'avais hâte d'arriver... Son hyperactivité naturelle reprit le pas, alors qu'elle concluait, excitée comme une puce: Et maintenant, je ne peux plus attendre de rentrer chez nous ! Bien vite, les deux employés de la mairie de Brisbane sortirent du hall d'accueil, discutant joyeusement. La plus jeune, habituée à être traîtée comme une princesse par son aîné, ne protesta pas lorsqu'il prit la majorité de ses bagages, gardant simplement à la main son sac "fourre-tout" de fille. En bons citadins et sportifs, ils marchèrent d'un pas rapide jusqu'à la voiture de Camil; d'ailleurs, si lui préférait généralement aller au travail dans son bolide, la plus jeune y allait régulièrement en rollers ou à vélo. Elle eut un petit regard indulgent lorsque son frère lui demanda si elle n'était pas trop fatiguée: Je suis sûre de l'être moins que toi. En plus, j'ai encore trois jours de congés avant de reprendre le travail. Enfin, dans les faits théoriques; en réalité, comme son aîné, elle se plongerait dans ses mails au plus vite, dès le lendemain, se laissant juste la nuit à venir pour bien récupérer du décalage horaire. Eh bien écoute... La blondinette réfléchit quelques secondes. J'ai mangé, mangé, mangé et encore mangé. Elle soupira lourdement, un peu blasée. C'était cool hein, mais tu sais comment c'est, chez les parents. Faudrait se resservir quatre fois avant que maman ne déclare qu'on a fini. La jeune femme attrapa quelques petits centimètres de peau sur ses hanches, outrée, alors qu'ils marchaient toujours: Regarde-moi ça ! J'ai dû prendre au moins deux kilos, c'est sûr. Elle bougonna. Sixtine faisait toujours extrêmement attention à sa forme physique, et prendre du poids ne lui plaisait pas. Du tout. D'ailleurs, je me disais qu'on pourrait faire un tour au marché en rentrant, ou après comme tu veux, l'enthousiasme de sa proposition gommant instantanément ses quelques secondes de ronchonnerie. J'ai genre, vraiment besoin de plusieurs jours de légumes, de fruits, d'eau et de plats sains. Sur cela, les deux s'entendaient à merveille, et chacun cuisinait régulièrement, leur permettant de ne jamais avoir de monotonie dans leurs repas. Ils arrivèrent finalement à la voiture de Camil; la jeune femme le laissa ouvrir son coffre et y déposer sa valise, ajoutant. Sinon, je suis allée voir quelques anciennes copines de collège. Tu te souviens de Mary ? Mon Dieu, elle est déjà mariée et à trois grosses. Je n'avais pas eu le temps de la voir l'année dernière. Elle a mon âge, Jesus Christ ! qu'elle jura avec indignation. Autant elle avait trouvé les enfants plutôt mignons et bien éduqués, mais en avoir autant à vingt-deux ans... Une vraie Texane, quoi. Bien qu'éduquée dans les principes stricts voire austères de cet Etat américain, Sixtine avait toujours eu une franche tendance à la rébellion et à la remise en question des principes et traditions. Finalement, ils montèrent et la blonde s'attacha. Et toi alors ? Raconte-moi le reste de tes vacances, et le retour en Australie bien sûr. Je veux tout savoir ! @Camil Smith |
| | | | (#)Jeu 23 Jan 2020 - 7:40 | |
| Le temps était une notion bien mystérieuse, propre à chacun. Alors qu’il gardait inlassablement les yeux rivés sur sa montre hors de prix, il avait la désagréable impression que les maudites aiguilles ne tournaient pas. La pile était-elle dysfonctionnelle ? Ou brûlait-il simplement d’impatience à l’idée de revoir sa soeur, de la serrer dans ses bras ? Ils étaient séparés depuis trop longtemps à son goût. Pourtant, ils avaient passé plus d’années séparés que réunis. Mais depuis que Sixtine était arrivée sur le continent Australien, prête à conquérir cet autre monde et à vivre en compagnie de son frère aîné, ils avaient été inséparables. Il trépignait d’impatience dans le hall des arrivées de l’aéroport de Brisbane lorsque, finalement, il vit une tête blonde qui lui était familière apparaître. Aussitôt, un sourire sincère vint illuminer ses traits pâles. Sa protégée était de retour au pays, et ils pourraient bientôt rattraper le temps perdu. Il s’amusa de sa surprise, avant de la libérer. « Trop grasse ? » Répéta-t-il en fronçant les sourcils, le regard sombre. Il n’aimait pas l’idée que sa soeur se faisait d’elle. À ses yeux, elle était parfaite telle quelle, et le fait qu’elle puisse croire l’inverse lui serrait l’estomac. Bien sûr, tout le monde avait ses petits complexes et ses petits défauts ; le politicien le concevait. Mais tout de même… « C’est vrai que maman a tendance à nous gaver, mais… » Mais ce n’était pas si grave, ils mettraient tous les bouchées doubles pour perdre le petit kilo qui s’était installé sur leurs hanches lors des fêtes de fin d’année. Être en vacances n’était pas synonyme de farniente, concernant Camil ; ce dernier profitait d’avoir un emploi du temps moins rythmé pour faire davantage de sport. « Je t’amènerai courir avec moi pendant quelques temps, si tu veux. » Proposa le politicien, en toute sincérité. Elle ne suivrait probablement pas son rythme soutenu, mais qu’importe : il s’adapterait à elle, comme il l’avait toujours fait. Il l’entraînerait dans son sillage, et resterait à ses côtés. À peine l’avait-il entourée de ses bras que déjà, il sentait son étreinte se raffermir autour de ses épaules. Comment se pouvait-il qu’une demie portion, telle que Sixtine, puisse être en mesure de le serrer si fort contre elle ? À croire que tout sa présence décuplait ses capacités physiques. « Gagné. » Confirma Camil en souriant, relâchant sa jeune soeur. Bleu de Chanel, un choix audacieux mais purement logique, pour quiconque connaissait le tempérament de l’Américain. « Quelqu’un qui me connaît bien me l’a offert pour Noël. » Précisa-t-il, non sans une pointe d’humour. C’était le cadeau que sa petite-soeur lui avait fait, et il en avait été content. Pour sa part, il avait opté pour un foulard en soie bleu clair, d’une célèbre marque française. Un classique, mais efficace. Et il était sûr de ne pas tomber à côté, puisqu’il avait entendu sa soeur s’extasier au téléphone sur ce carré de soie qu’elle ne pouvait pas s’offrir. Ses parents avaient eu droit à un billet d’avion aller-retour pour l’Australie, pour qu’ils puissent venir rendre visite à leurs progénitures lorsqu’ils le souhaiteraient. Ils avaient été sincèrement émus par la démarche de leur fils aîné. Et puis, comme à chaque fois, le cas Carlo s’était présenté. Que pouvait-il offrir à quelqu’un avec qui il n’avait rien en commun, et surtout, avec qui les relations étaient fortement distendues depuis plus de vingt ans ? Son choix final n’avait rien eu d’audacieux.: il lui avait offert deux bonnes bouteilles de vin.
Le politicien s’empara des affaires de Sixtine, et tous deux se mirent en marche en direction du parking souterrain de l’aéroport. « Tu voyageais avec quelle compagnie ? » Demanda-t-il en fronçant les sourcils. Il émettait néanmoins quelques réserves, sachant pertinemment que Sixtine était comme lui — particulièrement exigeante, donc. Ils prirent l’ascenseur, et Camil maugréa en voyant de nombreux passagers se presser à l’instant même où les portes s’ouvraient. Il détestait ces attroupements inutiles, qui étaient sujets à conflit. « Trois jours ? Eh ben, on ne se refuse rien. » Il n’était pas surpris ; c’était lui-même qui avait signé les congés de sa petite soeur. Loin de lui l’idée de vouloir l’éloigner, bien au contraire ; seulement, il voulait qu’elle se préserve. Il lui avait naturellement proposé de venir travailler à ses côtés, lorsqu’elle lui avait fait part de sa recherche de stage en communication, quelques mois plus tôt. Et quand elle lui avait demandé s’il était possible de poursuivre, il n’avait pas pu le lui refuser. L’Australien n’ignorait pas que sa soeur avait été qualifiée de « pistonnée » à plusieurs reprises, mais il n’en avait rien eu à faire : elle faisait du bon travail, et sa présence dans son équipe était parfaitement justifiable et justifiée. « Tu ne serais pas de retour des États-Unis, toi, par hasard ? » S’amusa le politicien en souriant, alors que sa soeur réclamait à grands cris de la nourriture saine. Il passa un bras autour de ses épaules, et planta un rapide baiser sur sa tempe. Ils sortirent finalement de l’ascenseur, et firent quelques pas dans le parking. « Mary ? » Il fronça légèrement les sourcils, avant d’acquiescer. « Trois ?! Mais pourquoi faire ? » Demanda-t-il en levant les yeux au ciel. « Ça me fait bizarre. La dernière fois que je l’ai vue, elle devait avoir dix ans… » Fit remarquer Camil en faisant la moue. La différence d’âge entre Sixtine et le politicien étant grande, ils n’avaient jamais fréquenté les mêmes cercles. « Rassure-moi, tu ne vas pas me vieillir davantage en m’annonçant que tu souhaites prochainement fonder une famille ? » Camil commençait seulement à envisager que sa soeur puisse avoir un jardin secret, et une vie sexuelle active. Alors un bébé ? Non, vraiment, elle pouvait attendre. Il déposa la valise de sa soeur dans le coffre de sa voiture, et donna un premier argument de réponse à sa question. « Comme tu vois, j’ai profité de mon retour en Australie pour changer de voiture. » Adieu la Porsche 911 qu’il aimait tant, bonjour la Porsche Cayenne nettement plus familiale. « Et j’ai une copine. » Confia l’Américain en refermant la portière de sa voiture. En voyant l’air interloqué de Sixtine, il précisa son propos. « T’emballes pas, c’est juste pour la presse. Regarde d’ailleurs, ça n’a pas mal fonctionné. » Fit remarquer le directeur du cabinet du maire de la ville. Il sortit du parking de l’aéroport, et s’engagea sur les routes bondées de la périphérie de Brisbane. « Elle s’appelle Deborah. T’as déjà dû la croiser, c’était la community manager de mon équipe jusqu’à la fin de l’année. Je te la présenterai officiellement, à l’occasion. »
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| | | | (#)Jeu 23 Jan 2020 - 20:23 | |
| La jeune fille pouffa de rire lorsque Camil lui proposa en toute sincérité de l'amener courir avec lui. Les deux étaient très sportifs, mais sur des aspects différents, et si la blonde n'était clairement pas à la ramasse, elle était loin d'égaler son aîné lorsqu'ils faisaient un footing. Elle, sa passion, c'était avant tout la danse. Les nombreuses autres activités sportives qu'elle pratiquait aussi, régulièrement, n'incluaient pas le fait de courir; ou du moins, pas seulement. Elle répliqua alors, pas moins motivée pour autant: Tu courras, et je serai en rollers ! La solution magique pour que chacun d'entre eux soit satisfait au maximum: lui pourrait courir au meilleur de ses aptitudes, et elle ne traînerait pas derrière lui; elle le devancerait même, probablement, mais n'aurait qu'à réguler son rythme grâce à ses fameuses chaussures à roulettes. Ce serait vraiment parfait. Pour quand as-tu prévu ta prochaine session de footing ? Autant se renseigner tout de suite, car entre leurs deux emplois du temps, caser une heure de temps libre commune pour faire du sport pouvait certaines semaines relever du miracle. Rien qui ne les freinerait, cependant; ils savaient toujours se dégoter un peu de temps pour faire des choses ensemble, et ce qu'importe qu'ils vivent sous le même toit et qu'ils travaillent dans les mêmes bureaux. Sautillant, Sixtine exprima tout son contentement naissant à cette idée: En tout cas, c'est une chouette idée ! Ca fait une é-ter-ni-té que je n'ai pas fait de rollers ! Le temps, cette notion là aussi toute relative...
La jeune femme marchait auprès de son aîné en direction des parkings; ou du moins, elle avançait. Sa démarche dansante ne pouvait pas être tout à fait qualifiée de "marcher". Elle était comme ça, Sixtine. Quand elle était heureuse, elle ne pouvait s'empêcher de le montrer, que ce soit en chantonnant ou en dansant, un peu comme une enfant, et qu'importe ce qu'en pense le commun des mortels. Là, elle n'était pas seulement joyeuse, elle était euphorique, ni plus ni moins: l'effet du retour en Australie, auprès de Camil, tout simplement. Plusieurs fonctionnaires, à la mairie, y avaient vu dans un premier temps un moyen de se moquer d'eux, pour essayer d'amoindrir l'aura du directeur du cabinet de la mairie de Brisbane, ou bien pour y déstabiliser la nouvelle assistante fraîchement arrivée qu'était Sixtine. Autant dire que ceux qui avaient osé se frotter à l'un d'eux de manière frontale s'en mordaient les doigts encore aujourd'hui; les autres ragots qui persistaient encore et autres bruits de couloirs, étaient trop insignifiants pour s'y intéresser. Lorsqu'ils parlèrent de Noël, la demoiselle s'arrêta brusquement, marqua un temps d'arrêt car elle venait de se rappeler de quelque chose d'important: Oh, au fait ! Papa et Maman demandent à ce que tu les préviennes pour les dates auxquelles ils pourront venir, de préférence sur des vacances qu'on aurait tous les deux en même temps. Puis ils reprirent leur chemin.
Arrivant vers les parking, leur bonne humeur était toujours aussi rayonnante, et leurs discussions allaient bon train. American Airlines, répondit Sixtine en haussant les épaules, d'un air de dire "on s'en fiche, c'est déjà du passé". Souvent capricieuse, un peu peste et très exigeante, la blonde était cependant peu rancunière - selon la faute commise bien évidemment - ce qui lui permettait de ne pas ressasser tout et n'importe quoi. La blonde rit de bon coeur lorsque son frère lui parla de ses congés, et elle reprit, sur le même ton que Camil avait utilisé quelques minutes plus tôt: Quelqu'un qui m'aime beaucoup m'a octroyé des congés supplémentaires. Sympa, non ?
Elle ferma les yeux, savourant le bref mais doux bisou que son frère venait de déposer sur sa tempe. Ils étaient très tactiles entre eux, et ce n'était pas pour déranger Sixtine, qui avait cruellement manqué de contact physique pendant son enfance. Carlo n'était absolument pas de ce bord-là, trop renfermé sur lui-même pour ça. Il tenait ceci probablement de leur mère, qui n'avait jamais été très câlins et bisous. Quoi qu'étrangement, elle semblait l'être plus avec ses fils que sa fille... Quant au père de la petite tribu, il préférait souvent la compagnie de ses chiens - chasseur invétéré, au grand dam de sa benjamine - que celle des humains. Autant il s'agissait de choses pouvant être perçues ponctuellement, autant Sixtine n'avait jamais parlé au plus âgé de ses frères de ce manque de contact qui l'avait marquée pendant toute sa jeune vie. Pourquoi ? Elle n'en voyait pas spécialement l'intérêt, et avait grandit dans ce cadre, donc n'en était pas spécialement choquée. Elle crut mourir d'une crise cardiaque lorsque son frère se mit à lui parler de bébé. Tu m'as bien regardée ? Répliqua-t-elle d'un air faussement outré, mais surtout morte de rire intérieurement. Elle nota le changement de voiture avec une moue désabusée: Je préférai la version sport. D'ailleurs, pourquoi Camil venait-il d'acheter une familale ? En plus, il avait parlé de bébé... Bon, c'était elle qui avait commencé avec Mary mais... Dix mille scénarios s'élaborèrent instantanément dans le cerveau de la plus jeune, alors qu'elle ouvrait sa portière et montait en voiture. Camil avait un truc à lui dire, il n'y avait aucun doute.
C'est alors qu'il lâcha "la bombe". Il avait une copine. Sixtine blêmit de surprise et le fixa, éberluée, s'attendant à une suite du type "et elle est enceinte". Mon Dieu, dans quoi son frère s'était-il embarqué ? Elle resta muette - fait considérable - tout le temps qu'il lui expliqua la situation, et elle eut bien raison de le faire. Doucement, son teint rosé revint sur ses joues aux pommettes arrondies par une enfance pas si lointaine, et elle éclata d'un rire franc. Oh... bon sang... Qu'elle articula entre quelques soubresauts d'hilarité. Entre ta question... la voiture... J'ai cru que tu allais m'annoncer que TU voulais fonder une famille ! Ce qui aurait été totalement incroyable au vu de la personnalité de son frère et de ses ambitions, de son carriérisme qui en aurait fait fuir plus d'une, mais après tout, on peut tous changer, non ? @Camil Smith |
| | | | (#)Jeu 30 Jan 2020 - 9:35 | |
| Camil était complètement dépassé par la passion rollers de sa petite-soeur. Ça avait commencé il y a des années de cela, alors que ses parents avaient eu la brillante idée de lui offrir ce cadeau pour son anniversaire. Sixtine était déjà, à l’époque, sans crainte et curieuse de découvrir quelque chose de nouveau. Elle les avait enfilés, et ses premières tentatives s’étaient toutes soldées de la même façon : une belle gamelle, plus ou moins douloureuse. Camil se souvenait avoir écarquillés les yeux en voyant les chutes se succéder. Combien de fois s’était-il dit que cette fois-ci, elle ne s’en relèverait pas ? Combien de fois avait-il subitement abandonné ce qu’il faisait, pour se précipiter à la hauteur de sa soeur ? Il s’était accroupi, l’avait relevée, consolée — et elle était repartie, déterminée à dompter cette invention du diable. « Demain matin. » Répondit Camil, alors que sa soeur lui demandait à quel moment il avait prévu d’aller courir. Il essayait de faire un footing un jour sur deux, même si ses occupations l’obligeait parfois à faire l’impasse. Lorsque tel était le cas, le politicien s’arrangeait toujours pour rattraper sa séance manquée le temps de midi, en se rendant sur le ring de boxe. « Mais on peut y aller ce soir, si tu veux. » Concéda l’Américain. Ce n’était pas prévu dans son planning, mais il tâcherait de se rendre disponible pour sa frangine. Ils avaient été séparés pendant une (longue) semaine, et il avait envie de passer du temps avec elle. « Et après, on pourrait sortir et dîner ensemble. » Suggéra-t-il en souriant. Un tête à tête avec son soeur ? Si certains auraient pris cela pour une véritable corvée, Camil, à l’inverse, chérissait l’idée de pouvoir passer de tels moments avec Sixtine. « Et je te laisserai choisir le restaurant. » Ajouta-t-il, en sachant que cet argument ferait mouche. Et il n’avait pas tort : une fraction de seconde plus tard, les lèvres de la dernière des Smith s’étiraient en un large sourire.
« Des vacances ? » Répéta Camil en arquant un sourcil, surpris par les propos de Sixtine. Il rentrait à peine, et croulait déjà sous le travail. Ses parents avaient-ils perdu la tête, ou étaient-ils tout simplement inconscients des enjeux qui se préparaient ? Camil n’en serait pas surpris : ses géniteurs vivaient loin, sur un autre continent, et ne fréquentaient pas leur fils aîné régulièrement. Bien sûr, ils suivaient avec fierté chacune de ses avancées politiques et plus largement professionnelles — mais il n’empêche qu’ils restaient relativement étrangers et indifférents aux actions que Camil comptait entreprendre. Il ne leur en voulait pas ; ils n’avaient juste pas la même vie. « Je me lance en politique, et vise la chambre des représentants. Je ne serai pas en vacances avant d’être élu. » Déclara l’Américain avec une suffisance que ses détracteurs lui reprochait souvent. Il était sûr de lui, parfois arrogant, et avançait sans jamais se retourner. Camil regardait vers le futur, pas vers le passé. Un futur relativement proche, mais pas immédiat, puisque les prochaines élections pour la chambre des représentants auraient lieu en 2022. Deux ans, voilà ce qu’il avait pour être connu, reconnu, et apprécié du plus grand nombre. « Dis-leur ce qui t’arranges le plus. Je tâcherai de prendre un ou deux jours, quand ils seront là. » Concéda-t-il finalement, tout en sachant que cette promesse serait sans doute difficile à tenir. Mais il ne perdait pas de vue que la photo de famille, prise au détour d’une ballade, serait un excellent moyen de communiquer. Les Smith, ensemble, profitant d’un moment simple. Se ressourçant. Faisant front uni. Mais ça, c’était déjà le cas depuis presque 22 ans. Depuis la naissance de Sixtine. Ils n’avaient pas le choix. Ils étaient liés par un secret. « Trop sympa. » Répliqua le politicien en souriant, alors que sa soeur et lui venaient d’arriver sur le parking.
« Je préfère demander plutôt que d’avoir une mauvaise surprise dans quelques semaines. » Maugréa le politicien en haussant les épaules. Sa petite-soeur, enceinte ? Et puis quoi encore ? Il acceptait déjà à peine l’idée qu’elle puisse avoir une vie sexuelle, et priait intérieurement pour ne jamais tomber sur l’une de ses relations dans son appartement. Non pas qu’il soit naïf quant aux activités ayant pu être pratiquées — seulement, il se sentirait obligé de faire la morale (pour ne pas dire proférer quelques menaces) à cette pièce rapportée. « Ne me fais jamais ça. » Ajouta-t-il finalement en secouant la tête. Ou alors, pas avant au moins dix ans. Le temps qu’il puisse se faire à l’idée. « Il faudra t’y faire. » Répondit l’Australien en faisant la moue. Ce changement avait été décidé il y a quelques semaines, suite à la clarification de ses ambitions professionnelles. Être un personne publique qui menait de front une carrière qui se voulait exemplaire impliquait vraisemblablement quelques sacrifices — mais si tel était le cas, l’Américain était prêt à jour le jeu. Ça en valait la peine. « J’ai un électorat à séduire, et cela implique quelques sacrifices. » Et encore… Passer d’une Porsche à une autre, il y avait pire, comme sacrifice. Il relativisait, et se donnait bonne conscience en se félicitant de ce choix, puisqu’il avait opté pour un modèle hybride, moins polluant. Il grimpa derrière le volant, et sortit du parking avant de prendre la direction du centre ville. Il profita du trajet en voiture pour parler de Deborah à Sixtine, et clarifier immédiatement les choses. « Moi ?! » S’offusqua l’Américain en secouant la tête. « Et puis quoi encore ? » S’il rejetait vivement cette idée pour le moment, il n’était pourtant pas foncièrement contre. Avoir une femme, un enfant, et une belle maison — mais pour cela, il fallait rencontrer la bonne personne. Et Camil n’avait encore jamais eu l’honneur de ne serait-ce que la croiser. À moins qu’il n’ait pas été en mesure de la reconnaître — ce qui n’était pas non plus à exclure. « Non, elle serait juste là pour être souriante et jolie à mes côtés, lors des événements publiques. » Expliqua-t-il. « Et je continuerai à mener ma vie comme je l’entends — mais simplement plus discrètement. » Adieu, les rapprochements évidents en public avec de sublimes créatures. Adieu, les débordements hormonaux dans des endroits où il pouvait être surpris. La vigilance était de mise ; il s’y tiendrait donc. |
| | | | (#)Lun 2 Mar 2020 - 9:41 | |
| Sixtine fit la moue lorsque son frère lui dit avoir prévu son footing pour le lendemain matin. Elle aurait voulu y aller dès que ses affaires auraient été rangées dans leur appartement ! Quoi, le décalage horaire ? Comment ça, la fatigue ? Elle aurait bien le temps d'être fatiguée lorsqu'elle serait morte, voilà son credo. Le jour où la demoiselle se plaindrait de vouloir son lit - autrement qu'en une jérémiade destinée à amadouer X personne, généralement son frère - c'est qu'elle serait sacrément malade. En attendant, comptez sur elle pour être de toutes les sorties possibles, et encore plus si il s'agit de faire du sport, de se dépenser ou d'aller dîner ! Alors qu'elle allait proposer de reporter la séance de Camil au soir-même (et élaborant d'ores et déjà son 15 893e plan "faire craquer mon grand-frère chéri en lui faisant des yeux de chien battu complété par des battements de cils de biche et une moue de petite fille triste" ) celui-ci la devança, déclarant qu'il pouvait s'aménager un créneau d'ici quelques heures. Elle aurait presque été vexée de ne pas pouvoir caser son plan de mignonnerie pour obtenir ce qu'elle désirait, mais le quarantenaire lui porta le coup fatal. Un restaurant, juste après. Forcément, il ne put qu'obtenir qu'un gros bisou sur la joue de la part de la benjamine de la famille. Tu es décidément le meilleur grand frère de l'univers entier ! La demoiselle n'avait aucun complexe à l'affirmer, sauf en présence du cadet, Carlo, qui était déjà bien assez renfermé ainsi. Pas la peine de lui remettre dans la figure que sa petite soeur était bien plus proche de leur aîné commun que de lui. Pour le reste du monde, en revanche... Chacun connaissant un minimum le frère et la soeur Smith savaient qu'ils se damneraient sans hésiter l'un pour l'autre. Fusionnels, c'est là le mot. Déjà, la plus jeune commençait à réfléchir au restaurant: Je suis super partante pour le resto, mais rien de trop gras. Ni de trop sucré, sinon je vais forcément craquer sur un dessert.
La petite blonde haussa les épaules lorsque Camil répondit d'un ton surpris et presque dédaigneux, ou disons du moins pincé. Elle savait bien qu'il y avait un monde entre leur milieu d'origine et celui dans lequel l'aîné des Smith évoluait désormais, mais justement, il pourrait mesurer un peu plus le gouffre le séparant de sa situation de naissance. L'étudiante se doutait bien de la raison de ce manque de réflexion de la part du directeur du cabinet du maire de Brisbane: autant il aimait les siens, autant il ne supportait pas d'être issu d'une classe aussi modeste que la leur. Parfois, ses réactions étaient donc, ou semblaient en tout cas, pincées sans qu'elles ne semblent justifiées. Heureusement, Sixtine veillait. Je ne pense pas qu'ils imaginent leur fils être élu à un si haut grade. Ils te le souhaitent, bien sûr, mais ça leur semble sûrement très lointain, d'autant plus que ce n'est pas aux Etats-Unis. Alors que la chipie des Smith était habituellement celle la plus prompte aux colères, aux caprices et aux remarques venimeuses, elle pouvait pourtant faire étonnamment tampon entre les différents membres de leur pourtant pas si grande famille. D'ailleurs, elle avait parfois cette étrange impression que sans elle, certains ne se parleraient même plus, ou encore plus difficilement. Ce malaise persistait, et la blonde détestait cela; mais le sujet n'était pas à aborder ce jour. Elle reprit: Je leur expliquerai, et leur donnerai des dates en fonction.
Lorsque son frère lui annonça qu'elle n'aurait pas vraiment le choix au sujet de cette nouvelle voiture, et qu'il ne l'avait clairement pas choisie par goût mais par décision politique, elle demanda avec sarcasme: Laisse-moi deviner... La ménagère de quarante ans qui a entre deux et trois enfants, c'est ça ? Ah, ces préconçus et préjugés qui se révélaient pourtant être si vrais... Ils montèrent donc dans le nouveau "bolide" du politicien et ce-dernier le démarra. La plus jeune sortit immédiatement son portable et partit à la recherche du meilleur restaurant pour leur soirée. Merci Trip Advisor. Elle se retint de lever les yeux au ciel lorsque Camil lui dit qu'il continuerait à mener sa vie personnelle en privé. Autant elle se fichait bien des aventures de son frère, autant la "gamine" n'était pas dupe: il avait une libido débordante, qu'il avait bien du mal à contenir. Plus d'une fois, elle l'avait aperçu en train de faire du charme à telle ou telle fille, et ce même s'il essayait d'être discret quand il savait sa soeur dans les parages. Elle répondit du tac-au-tac: Je ne te donne pas six mois avant qu'on te trouve une liaison avec une autre fille. Dur, direct, mais honnête. Pas fait pour blesser cependant, et ce fut bien pour cela qu'elle précisa: Sois prudent, Camil. Je ne voudrais pas qu'on te fasse du mal. Or cela, les tabloïds en étaient spécialistes. La douleur n'était pas que physique, et cela, les paparazzis s'en fichaient comme d'une guigne, tant que leur lectorat suivait. Soudainement, la jeune fille trouva ce qu'elle cherchait, alors que ses doigts défilaient à la vitesse de la lumière sur son écran. C'est décidé! On ira au "Libertine" ! Ce n'est pas très loin de chez nous en plus. Je réserve pour vingt heures ?
(si tu veux voir le resto : https://www.tripadvisor.com.au/Restaurant_Review-g255068-d2086758-Reviews-Libertine_Restaurant_Cocktail_Bar-Brisbane_Brisbane_Region_Queensland.html ) - Spoiler:
Désolée pour le retard Je reviens pour de bon !! @Camil Smith |
| | | | (#)Mar 10 Mar 2020 - 9:10 | |
| Sa soeur avait toujours eu une énergie débordante. Elle était toujours partante pour tout, et élaborait sans cesse des projets. L’ennui était un mot qu’elle ne connaissait pas, et l’hyper-activité un état plus ou moins constant chez elle. Elle pouvait parfois être difficile à suivre, mais Camil aimait réellement cet aspect de sa personnalité. Sixtine était une personne entière, impliquée, dévouée, et qui mettait un point d’honneur à vivre l’instant présent à fond. Un sourire sincère glissa sur ses lèvres, alors que sa soeur la qualifiait de meilleur grand frère au monde. « Et toi la meilleure des soeurs. » Ajouta-t-il en serrant légèrement ses doigts, sans quitter la route des yeux. L’aîné et la cadette avaient toujours été proches, très proches, trop proches : leur relation très fusionnelle, avait parfois été source de tensions au sein de la famille Smith. Carlo, bien qu’il soit resté silencieux à ce sujet, avait mal vécu cette bonne entente. Les deux frères avaient eu de nombreuses disputes, et le gouffre s’était progressivement creusé. « Six, tu craques toujours pour le dessert. » Répondit l’Américain en levant les yeux au ciel, fasciné d’entendre sa petite-soeur croire encore qu’elle aurait un peu de volonté face à la carte des mets sucrés.
« Je ne leur en veux pas, tu sais. » Déclara Camil en souriant, alors que sa petite-soeur défendait le point de vue de ses parents. L’Américain était parti depuis tellement longtemps de sa terre natale… Il ne pouvait pas en vouloir à ses géniteurs d’être quelque peu éloignés des soucis et autres projets qu’il avait ici, à Brisbane. « C’est juste que nous n’appartenons plus au même monde. » Finit-il par dire, après quelques secondes d’hésitation. Leurs centres d’intérêts étaient différents. Les gens qu’ils fréquentaient étaient différents. La catégorie sociale à laquelle ils appartenaient était différente — et c’était précisément ça, qui creusait parfois un fossé dans la famille. Camil avait gravi les échelons rapidement, et gagné beaucoup d’argent grâce à quelques placements bien pensés. Il avait filé de bons tuyaux à sa famille, qui lui avait pleinement fait confiance — à juste titre. Ils s’étaient enrichis, suffisamment pour appartenir à la classe moyenne haute. Ils avaient abordé la vie avec plus de facilité et de sérénité. Mais Camil était allé plus loin. Bien plus loin. « Je sais que tu feras au mieux. » Confia le politicien en souriant. Parce qu’elle était comme ça, Sixtine : toujours à ménager les gens, à trouver la meilleure des solutions pour que chacun soit satisfait.
« Ça va pas ou quoi ? » Répondit Camil en écarquillant les yeux. Une ménagère avec deux enfants ? Et puis quoi encore ? Endosser le rôle du beau-père n’était pas fait pour lui ; il avait déjà suffisamment de choses à gérer. Sa soeur lui fit finalement remarquer qu’il n’avait jamais su se tenir, sur un plan privé. Même si elle avait raison, il était piqué au vif par ses propos. « Merci ! » S’exclama l’Australien en sortant du parking souterrain. La circulation était dense, et il eut tout le loisir d’échanger avec Sixtine au sujet de sa vie privée. « Ton soutien me va droit au coeur. » Ajouta-t-il avec ironie. En même temps, il pouvait comprendre pourquoi sa petite-soeur était aussi sûre d’elle. Elle en avait vu défiler, des filles : des blondes, des brunes, des rousses, des grandes, des petites, des fines, des voluptueuses, des jeunes et des moins jeunes. Camil se laissait volontiers tenter par les plaisirs de la vie, et il avait un goût particulièrement prononcé pour les femmes. « Je serai discret. » Promit-il en voyant l’air contrarié de Sixtine. Il se pencha vers sa soeur, et embrassa sa joue. « T’en fais pas. Tout ira bien. » Assura-t-il d’une voix douce, sincèrement touché par l’inquiétude que Sixtine manifestait. Elle qui travaillait dans la communication savait à quel point les médias pouvaient être impitoyables. « Je serai vigilant. » Ajouta-t-il en voyant que sa soeur faisait la moue. A juste titre : elle connaissait bien son frère, et son goût tout particulier pour les challenges, pour les prises de risques inconsidérées. Camil vivait pleinement, et flirtait parfois avec les limites. La faute à ce onze septembre deux mille un, et à son réveil qu’il avait machinalement éteint, éreinté par sa soirée de la veille. « Et je te demande de l’être aussi. » Il aurait aimé la préserver du déferlement médiatique qui risquait de se produire ; malheureusement, il en était incapable — et ça le bouffait de l’intérieur. Il savait que sa petite-soeur était son point faible, et qu’une attaque contre elle risquait d’être dévastatrice. Il doutait de pouvoir se contenir, de pouvoir garder son calme. En attendant, il lui fit une énième faveur en la laissant choisir le restaurant de ce soir. « Au Libertine ? Tu me parles de mon incapacité à avoir une relation stable et tu veux qu’on aille dîner au Libertine ? » Fit remarquer Camil en arquant un sourcil, non sans s’amuser de l’ironie de la situation. La presse s’en donnerait probablement à coeur joie, s’il s’avisait de ramener une autre femme que sa soeur à dîner dans ce restaurant. « Heureusement que c’est toi, et pas une autre. » Grommela-t-il, alors que Sixtine affichait une moue à laquelle il ne pouvait pas résister. Sa petite-soeur le manipulait dans les grandes largeurs, il en avait pleinement conscience, mais qu’importe : il se montrait toujours aussi mielleux et coulant avec elle. « Vingt heures, c’est parfait. » Confirma le politicien en freinant brutalement, alors qu’un piéton traversait au milieu de nulle part. Il pesta et klaxonna, avant de redémarrer.
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| | | | (#)Mer 11 Mar 2020 - 3:29 | |
| C'est même pas vrai ! se rebiffa la jeune adulte, en plissant les lèvres dans une moue enfantine lorsque Camil lui dit qu'elle ne savait pas résister à un dessert. Sauf au dernier resto', quand elle a mangé un tiramisu. Et la fois d'avant, une crème brûlée à la française lui avait fait de l'oeil. La précédente sortie, il y avait une mousse au chocolat qui faisait envie dès la lecture de la carte, c'était le destin ! Et puis ... Oh, zut, hein. Faussement vexée, elle répliqua d'un air plus décidé que jamais, croisant les bras sous sa poitrine alors que son frère démarrait: Tu verras, ce soir. Je serai forte. Cependant, sa petite bouderie ne dura pas bien longtemps, s'effaçant à l'instant même où la voix de Camil résonna dans l'habitacle. Elle sourit avec compréhension - elle savait être à l'écoute, quand elle le voulait bien - et répondit: Oui, je vois ce que tu veux dire. Même pour moi, ça fait une éternité que j'ai quitté le Texas ! Alors dans ton cas... L'étudiante hocha simplement la tête lorsque son aîné lui dit qu'il savait qu'elle ferait au mieux pour que tout se passe bien; cependant, il lui en fallait un peu plus que ça pour prévoir quoi que ce soit. Ouvrant le calendrier de son téléphone portable, elle demanda en scrutant les jours de l'année: Y-a-t'il des périodes en particulier où il ne faut AB-SO-LU-MENT pas que j'organise ça ? A part mars bien sûr, vu que tu quitteras la mairie à ce moment-là. La jeune fille avait été mise au courant du projet de Camil dès le premier jour de sa réflexion; pour sa part, elle resterait encore quelques temps à la mairie de Brisbane, au moins jusqu'à la fin de son Bachelor. Après, elle suivra les vents de la réussite, se fiant à son flair et à l'expérience de l'homme auprès d'elle. Combo gagnant.
Elle pouffa de rire devant sa tête totalement choquée lorsqu'elle lui parla de la ménagère aux bambins. Apparemment, il y avait quiproquo. Non ! Réfuta-t-elle dans un éclat, je n'ai pas supposé que tu sois avec une femme comme ça; je dis que c'est le public cible - enfin, un parmi d'autres - de tes prochaines élections. D'où la voiture, par exemple. Ils sortirent finalement du parking, et dès qu'ils furent insérés sur la route, la longue file des embouteillages les happa. Misère et désespoir, les gens ne pouvaient-ils pas leur foutre la paix un seul instant ? Elle revenait des Etats-Unis, zut ! Tout ce à quoi elle aspirait en cet instant, c'était de boire un café bien serré, et meilleur que celui de l'avion, de croquer dans un bout de melon et d'aller faire du roller avec Camil afin de dépenser toute l'énergie accumulée pendant le trajet. Au moins, elle avait la chance que ce soit lui dans la voiture à ses côtés, ce qui lui permit de passer le temps en parlant d'un sujet plus qu'intéressant: le côté Dom Juan de son frère, et les risques médiatiques auxquels il s'exposait. Elle fit la moue devant ses tentatives d'apaisement, ne croyant qu'à moitié que tout se passerait bien. Non pas qu'elle ne lui fasse pas confiance, loin de là; seulement, la politique et les médias étaient un monde de charognards, et on ne ferait aucun cadeau à l'Américain qui ose briguer un siège à la chambre des Représentants. Comme toujours pourtant, il finit par la détendre, et elle lui offrit un large sourire, assez vicieux d'ailleurs lorsqu'il lui retourna le conseil: Tu m'as déjà vue me laisser impressionner ? Tête brûlée, ça on pouvait dire qu'elle l'était. Avant de lui faire peur pour quoi que ce soit, il fallait y aller.
Le restaurant enfin trouvé dans la longue liste de ceux proposés à Spring Hill, elle l'annonça à son frère, qui lui fit la remarque qu'il était de circonstance. La blonde ricana et dit: C'est pour rester dans le thème. Sentant qu'il avait comme un moment d'hésitation, elle lui sortit le plan qu'il avait avorté lui-même un peu plus tôt, lorsqu'elle voulait le convaincre de reporter sa session de sport du lendemain matin au soir même. Allez, s'il-te-plaît... Ils proposent plein de trucs qui ont l'air trop booons... Y a de la revisite de Vietnamien, de Français, des salades... Quelques secondes plus tard, le politicien acceptait sa requête. Victorieuse, la jeune femme s'exclama: Youpi ! Cri partant un peu plus dans les aigus lorsque Camil pila à cause d'un idiot de piéton. Se retenant de peu pour insulter l'énergumène qui s'était en plus permis de les regarder d'un drôle d'air, demoiselle crispa sa main gauche sur l'accoudoir. Elle grogna, à la fois pour Camil et pour elle-même: C'est bien parce que tu vises haut que je me retiens d'insulter tous les idiots qui foulent cette Terre. Que les gens sont débiles ! La blondinette se leva les yeux vers son frère, voyant qu'il n'avait pas non plus vraiment apprécié. Elle l'observa quelques instants, et finit par commenter, entre pensive et rêveuse: C'est drôle, je suis plus proche de toi en caractère, mais j'ai l'impression de ressembler plus à Carlo physiquement. Comme quoi, la troisième est toujours le mix des deux premiers !
@Camil Smith |
| | | | (#)Lun 16 Mar 2020 - 11:21 | |
| « Ne sois pas trop dure avec toi-même. » Commenta l’Américain en souriant, alors que sa soeur admettait avec difficulté être accro aux desserts. Elle n’avait pas de quoi rougir ; aux yeux de son aîné, elle était la plus belle. Il la regardait avec une tendresse réelle, et avait pour elle un amour inconditionnel. Irrationnel, aussi. Il s’était accroché avec véhémence à cette petite bouille blonde, qui lui avait apporté une joie incommensurable. La réciproque avait été vraie ; Sixtine avait aussitôt établi un lien fort avec l’aîné des Smith. Elle le suivait partout, grimpait sur ses genoux dès qu’elle en avait l’occasion, le traînait jusqu’au parc — bref, elle lui faisait lentement reprendre contact avec la réalité. Mais malgré l’amour de cet enfant, la peur de Camil avait été grande, trop grande, au point de devenir dévorante. Il avait déménagé en Australie le coeur gros, mais avec l’espoir de se reconstruire. Loin du tumulte, loin des hauts buildings, loin des États-Unis. « Ça ne veut pas dire que je renie tout, tu sais. » Confia le politicien, qui évoquait pourtant rarement les moments qu’il avait passé sur l’autre continent. Comme si, dix-neuf ans plus tard, le souvenir des attentats restait plus fort que tout. Comme s’il avait effacé tout le reste — sa famille, les moments heureux, ses années d’école. « En Août. Je compte partir un peu en vacances. » Prévint Camil, qui projetait de quitter l’Australie pendant au moins deux semaines. Il n’avait pas encore clairement défini ses projets, mais il avait déjà quelques idées — à commencer par Hawaï. Des vacances entre farniente et visites naturelles ; un combo idéal pour se ressourcer. Il espérait que Deborah approuverait son choix — maintenant qu’elle s’affichait officiellement à son bras, il était inenvisageable pour Camil de partir en célibataire. Tous deux s’appliqueraient à donner le change, comme ils l’avaient si bien fait dernièrement — et quand l’attention serait détournée, ils pourraient s’en donner à coeur joie. « Mais Juillet me semble être une bonne période pour leur dire de venir. » Son agenda serait forcément moins chargé, et il aurait un peu de temps à leur consacrer. Il libérerait volontiers Deborah de ses fonctions pendant quelques jours, et profiterait de la présence de ses géniteurs pour être aperçu avec eux. Il savait pertinemment que la famille était un élément important pour les électeurs. Et Sixtine le savait aussi.
« Tu me rassures ! » S’exclama le politicien en soupirant de soulagement. Comment aurait-elle u s’imaginer que Camil se serait lancé dans une histoire avec une femme ayant des enfants ? Il avait déjà suffisamment à faire avec lui-même, et avec son ancienne collaboratrice avec qui il jouait la comédie. « Mais effectivement, elles sont une cible. » Une cible difficile à conquérir. Mais il ferait de son mieux.
Camil leva les yeux ciel, offusqué par les propos de sa soeur. Malgré cela, il lui était difficile de lui jeter la pierre, puisqu’elle était complètement dans le vrai. Sans en faire un outrageux étalage, Camil n’avait jamais été discret sur ses conquêtes. Sixtine en avait croisé certaines, deviné d’autres ; mais elle n’en avait jamais fait état. Elle avait bien vite compris que Camil se lassait vite, et aimait le changement, en matière de femme. « Je peux faire ce que je veux sans que ma petite soeur décide de me juger ? » Demanda-t-il en roulant des yeux, peu enclin à l’idée que sa petite-soeur lui fasse la morale. Il essayerait de lever le pied sur les conquêtes le temps que durerait sa petite mascarade avec Deborah. « Tu seras mignonne de tenir le cap jusqu’à nouvel ordre. » Précisa l’Américain en posant un regard amusé sur sa soeur. Cette dernière possédait une personnalité marquée, entière. Jamais dans la demi-mesure, Sixtine assumait tout ce qu’elle pouvait penser et ressentir — même lorsqu’elle faisait preuve de diplomatie. Cette qualité était rare, et Camil était fier de savoir sa petite soeur être suffisamment maligne et intelligente pour être capable de tirer son épingle du jeu. « C’est vrai. » Commenta le politicien, après avoir gardé le silence pendant deux secondes qui lui parurent être une éternité, mais qui pouvaient tout à fait passer pour un moment d’observation. Un court moment au cours duquel Camil, qui n’approuvait pas les mensonges de sa famille, avait craint que sa prétendue petite-soeur ait découvert la vérité. Il comprit rapidement que sa remarque était tout à fait naïve, et sans arrière pensée. Jusqu’au jour où… lui rappela un e petite voix qu’il essayait de faire taire depuis plus de vingt ans. « C’est dommage, quand même, parce que je suis vachement plus beau. » Fanfaronna Camil, amusé. Mais le mal était fait ; une pierre était tombée au fond de son estomac. Carlo avait montré un signe évident de faiblesse à Noël, que la famille Smith avait eu du mal à justifier. Sixtine était loin d’être une idiote, et elle avait cet art de savoir appuyer là où ça faisait mal. « Heureusement pour toi, tu as hérité de mon esprit vif et de mon charisme légendaire. » Il en faisait des tonnes ; c’était la seule chose à faire, s’il voulait garder la face.
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| | | | (#)Sam 28 Mar 2020 - 8:49 | |
| Revêche et surtout malicieuse, Sixtine déclara: J'espère bien que tu ne renies pas tout. Je t'ai beaucoup trop fait tourner bourrique quand j'étais petite, là-bas, pour te permettre de l'oublier de sitôt. La petite blonde fit une moue désapprobatrice lorsque son frère lui dit qu'il envisageait de prendre des vacances en Août. La tête et surtout, le coeur encore infantile de Sixtine se serrait déjà à l'idée du sous-entendu de cette phrase. Avait-elle bien entendu ce ton, légèrement différent de celui qu'il aurait employé habituellement pour parler des vacances d'été ? Se faisait-elle des films, ou bien le sentiment qui étreignait douloureusement sa poitrine était-il véritable, et sensé ? Était-ce une fausse hypothèse que celle soufflée insidieusement à son oreille que, maintenant que Camil était "sérieusement" en couple - et ce, même si ce n'était probablement que stratégie politique - elle allait devoir céder de son territoire plus qu'elle ne l'aurait voulu ? Autant la blonde pouvait être mature pour bien des choses, mais son quotient émotionnel restait celui d'une enfant, et ce tout particulièrement en ce qui concernait son frère aîné. Pourtant, elle ne posa pas de question directe, ni ne démarra une simili-scène, art dans lequel Sixtine était plutôt experte. Non, car elle savait bien qu'il fallait se faire une raison, même si c'était douloureux. Camil méritait qu'elle cède un peu de son confort sentimental pour faciliter ses manoeuvres, il le valait plus que quiconque au monde, aux yeux de sa soeur. Elle demanda simplement, avec une légèreté qui n'était vraie que d'apparence: Ah ? Tu as déjà une destination en tête ? Par contre, lorsqu'il annonça que le mois de Juillet serait idéal pour planifier la visite de leurs parents, Sixtine n'hésita pas à exprimer le fond de sa pensée, qui devint d'ailleurs franchement taquin et qui se trouvait être sincère, cette fois-ci: Tu sais qu'il faudra que tu présentes ton amie aux parents ? Maman va être folle, elle va te har-ce-ler. La blonde ricana, amusée d'avance, et cette diversion de conversation l'arrangeait bien, ne souhaitant pas dévoiler à son frère le trouble qui l'avait émue quelques instants plus tôt. Elle conclut sur le sujet, tout en pianotant un SMS à leurs parents: J'ai hâte de voir ça.
Alors que la voiture venait de démarrer, une conversation pour le moins décalée se déroula dans l'habitacle, sur les habitudes plutôt coureuses de jupon de Camil. Celui-ci semblait prendre avec un rechignement certain le fait que sa benjamine le mette devant ses réalités, ce qui fit briller les yeux de la blonde d'amusement. Elle ne tenait cependant pas à ce qu'il interprète ses paroles en mal, et elle l'assura de son soutien: Je ne te juge pas; je t'expose les faits, et me prépare à assurer tes arrières. Elle dévia les yeux vers le futur représentant - aucun doute qu'il le deviendrait - et le scruta un instant, en silence. Puis, elle dit d'un ton qui ne réclamait pas réponse: Je compte bien jouer un rôle dans tout ça, Camil. J'y serai forcée, de toute façon, que tu le veuilles ou non. Alors autant que je veille, autant que possible.
Le sujet dévia ensuite sur la fratrie Smith; la plus jeune n'était jamais dérangée de parler de Carlo au plus âgé d'eux trois, même si elle avait bien pu constater, depuis son enfance, qu'ils avaient bien du mal à se supporter. Elle en faisait fi, voilà tout; après tout, elle était là pour les bousculer, ces deux grands dadets dont elle avait parfois le sentiment qu'ils faisaient les coqs devant elle. Malgré ses efforts, la blonde n'arrivait pas à en saisir les raisons et les implications; dans un sens, elle tenait autant à le découvrir qu'elle s'en moquait dans l'autre. Le tout était qu'ils restent assez proches pour pouvoir tous se parler, juste ça. Alors oui, même si elle était bien plus proche du résident australien, elle affectionnait son frère vivant en Amérique, et ne se gênait pas pour parler de l'un à l'autre, et vice-versa. Sixtine laissa échapper une exclamation faussement outrée lorsque l'homme lui dit que malheureusement pour elle, elle n'avait pas prit du plus beau des deux. Il était vrai que le plus vieux des Smith était un vrai canon, alors que le second, se laissant plus aller dans sa morosité, faisait bien moins éclatant. Elle ne fit même pas attention aux compléments de compliments de son frère, balançant ses cheveux au vent avec sa main droite, comme dans une pub l'Oréal: Heureusement pour moi, j'ai su réunir le meilleur de chacun de nos parents. L'aura de papa, l'intelligence de maman, et un caractère qui n'appartient qu'à moi ! Une véritable star. Jetant un nouveau coup d'oeil vers Camil, elle lui tira la langue comme une gamine avant d'éclater de rire.
Soudain, elle vit se dessiner le relief bien connu de leur rue. Chouette ! Alors dis-moi, il est... quinze heures. On part faire notre séance à dix-huit heures, ce qui nous laisse largement le temps d'être au resto' à vingt ? J'ai dix mille choses à faire entre temps ! Elle eut un temps d'arrêt, avant de demander, presque hésitante, avec une légère grimace en guise d'ornement sur son petit minois: Dis... Tu comptes la faire emménager chez nous, ta conquête électorale ? Joli jeu de mots pour désigner la femme par laquelle Camil saurait séduire un public plus vaste que celui qu'il aurait pu initialement toucher.
@Camil Smith |
| | | | (#)Sam 4 Avr 2020 - 2:18 | |
| Est-ce qu’elle l’avait fait tourner en bourrique quand elle était jeune ? Bien sûr que oui. Elle l’avait mené par le bout du nez, lui avait fait faire tout et n’importe quoi. Il ne comptait plus le nombre de fois où il s’était déguisé, le nombre de fois où il l’avait aidée à se relever après une chute. Ou quand il lui avait appris à nager à la piscine municipale. Ou quand il la portait sur ses épaules, pour qu’elle puisse voir plus loin. Ou quand elle réclamait qu’il lui raconte une histoire, avant qu’elle ne soit obligée d’aller se coucher. Ou quand elle venait se réfugier à ses côtés la nuit, parce qu’elle avait fait un cauchemar et qu’elle ne voulait plus dormir toute seule. Contre toute attente, le léthargique et traumatisé Camil s’était réveillé à son contact, jusqu’à en devenir carrément dépendant. Dans les moments les plus durs, c’était le fait de voir la bouille de Sixtine qui parvenait à le tirer du lit. C’était de voir son sourire, alors qu’elle l’entraînait jusqu’au parc à quelques pâtés de maisons de chez eux, qui l’aidait à mettre un pied devant l’autre. Et c’était d’entendre ses éclats de rire et de la voir heureuse qui lui donnait la force de s’accrocher. Il lui devait beaucoup, et même s’il le lui avait parfois dit, il doutait qu’elle en soit pleinement consciente. « Tu as été la meilleure des soeurs. Et tu l’es toujours. » Confia-t-il avec un sourire léger, mais franc. Il profita d’un feu rouge pour se pencher vers elle, et poser ses lèvres sur sa joue. Il fit ensuite état de son programme de l’été qui, d’un point de vue professionnel, s’annonçait chargé. Il n’avait pourtant pas hésité à planifier des congés, avant une reprise tonitruante dès le mois de Septembre. « Hawaï, je pense. » Il y réfléchissait depuis quelques semaines, et son choix s’était finalement arrêté sur cet état américain qu’il n’avait encore jamais pris le temps de découvrir. Il partagerait son temps entre les randonnées dans les parcs naturels, le surf sur les emblématiques plages de l’archipel, et le snorkeling dans les baies les plus reculées. Le mot d’ordre serait le même qu’à l’accoutumée : détente. Il en aurait bien besoin ; la bataille qu’il comptait mener n’était pas de tout repos. « Et toi, tu as prévu quelque chose ? » Demanda-t-il. Sa soeur débordait toujours d’activités et de projets ; que ce ne soit pas le cas cette fois-ci le surprendrait. Et, au pire, si elle le souhaitait, elle pourrait toujours l’accompagner aux États-Unis avec Deborah — si cette dernière acceptait, évidemment, sa proposition de vacances. « Il est bien évident qu’il n’en est pas question. » Répondit Camil sur un ton parfaitement calme, douchant immédiatement l’enthousiasme évident de sa petite soeur. Présenter Deborah à ses parents ? Certainement pas : son père se montrerait sans doute, comme à son habitude, parfaitement indifférent à cette nouvelle. Il n’avait jamais été particulièrement curieux au sujet de la vie privée de son fils aîné, et le simple fait de savoir qu’il était heureux et qu’il profitait de la vie lui suffisait. Sa mère, en revanche, risquait de s’emballer et de le questionner pendant des heures. Son nom, son âge, son métier, ce qu’elle aimait faire, quelles étaient ses qualités, quels étaient ses rêves, si elle voulait fonder une famille et s’il comptait bientôt lui passer la bague au doigt… Camil la voyait déjà, une lueur brillante dans les yeux, s’extasier sur cette bru qu’elle ne connaissait pas encore mais qu’elle avait déjà adopté. À l’inverse de son père, sa mère s’impatientait de le voir trouver la femme qui lui conviendrait. « Et on va même aller plus loin : tu vas tenir ta langue, histoire de m’assurer une paix certaine. » Ajouta le politicien en posant un regard appuyé sur Sixtine. Il la connaissait bien, et savait qu’elle aurait du mal à tenir sa langue. « Ce n’est pas une histoire sérieuse. Ça ne mènera à rien. Je ne veux pas les décevoir, tu comprends ? » Demanda-t-il, expliquant plus en détail à sa soeur les raisons qui le poussait à rester discret à ce sujet. S’il le lui demandait, Deborah n’aurait aucun mal à jouer le jeu. Ses parents étaient des gens généreux, qui accueilleraient l’Irlandaise à bras ouverts. Mais que se passerait-il dans quelques mois lorsque, inévitablement, Camil leur dirait que cette histoire avait été montée de toutes pièces ? Qu’ils avaient joué la comédie pour assurer au politicien l’image d’un homme stable et intègre ? La déception serait grande, et il préférait leur épargner ça. « Tu n’auras qu’à leur parler de ton dernier coup de coeur. » Suggéra Camil, gentiment moqueur. Si la vie privée de Camil n’avait pas réellement de secret pour Sixtine — il répondait volontiers aux questions qu’elle pouvait lui poser — l’inverse n’était pas réciproque. L’aîné s’était toujours montré pudique, et avait toujours préféré occulter le fait que sa petite-soeur avait bien grandi.
Il leva aux yeux lorsqu’elle lui parla de faits. Il n’avait techniquement pas trompé Deborah, puisqu’il n’était pas en couple avec elle. « Je sais que tu n’as pas l’habitude d’écouter ce que je te dis, mais… Je t’en prie, ne te lance pas dans des choses inconsidérées. » Réclama le politicien en s’engageant dans la rue perpendiculaire à celle où ils habitaient. Il connaissait sa soeur, et savait qu’elle pouvait faire preuve d’un acharnement et d’une fougue démesurée. « Si je suis dans un quelconque marasme, laisse-moi me débrouiller. Il n’est pas question de t’entraîner dans ma chute. » Sa soeur était jeune, et avait une carrière prometteuse devant elle. Leur affiliation ne devait pas être un obstacle ; Camil ne le permettrait pas. Ça lui serait tout bonnement insupportable.
Elle ne pouvait pas savoir à quel point elle se trompait. L’aura de son père ? Ça faisait bien longtemps que Carlo avait laissé la morosité et le remord envahir son âme. Quand à sa mère, Camil se souvenait à peine de qui elle était ; il préférait penser que sa grossesse résultait d’une bêtise d’adolescent que d’une volonté affirmée. « Ma star. » Confirma le politicien en souriant. Il entra dans le parking sous-terrain de leur immeuble. Il croisa l’un de ses voisins, qu’il salua d’un signe de tête poli. « Mais oui, effectivement, on peut s’estimer heureux : on a de bons gênes. » Là-dessus, au moins, il ne mentait pas. À chaque fois que Sixtine évoquait ses parents, l’Américain sentait un poids tomber dans son estomac. Plus le temps passait, et plus le secret était lourd à porter. N’aurait-ce pas dû être l’inverse ? Après tout, les Smith le gardait depuis si longtemps… Il enviait la facilité, presque déconcertante, avec laquelle ses parents gérait la situation.
Il sortit de la voiture, et se dirigea vers le coffre. Il en extirpa les bagages de Sixtine, et lui tendit simplement son sac à main. « Ou trouves-tu toute cette énergie ? » Demanda le politicien, amusé par l’engouement de sa petite soeur. « Le commun des mortels est épuisé après un tel vol, et souhaite se reposer. T’en as conscience, quand même ? » Ils sortirent de l’ascenseur au dernier étage, et firent quelques pas dans le couloir. Il n’y avait que deux appartements à cet étage, et le second était celui d’un homme qui vivait à Sydney. « Cela dit, ça me permettrait de terminer ce que j’avais commencé pour la mairie. » Réflexion faite à voix haute, mais plus pour lui-même qu’autre chose. Il ouvrit l’appartement, et y suivit Sixtine. Elle jeta un rapide coup d’oeil, comme si elle s’attendait à ce que les choses soient différentes d’avant son départ. « Emménager ? Et puis quoi encore ? » Demanda-t-il en levant les yeux au ciel. Il ne serait pas contre l’idée d’inviter Deborah à passer de temps à autre, notamment parce qu’ils s’entendaient bien ; cependant, il n’avait jamais été question qu’elle pose ses valises dans son appartement. « Je ne compte pas l’épouser, non plus ! » S’exclama-t-il, outré par les sous-entendus très peu sous-entendus de sa petite soeur. « Je te dépose ça où ? » Demanda-t-il, alors que son imposante valise était restée dans l’entrée. |
| | | | (#)Sam 4 Avr 2020 - 22:43 | |
| Son frère avait toujours été si particulier dans sa vie. Toute petite, elle ne l'avait que peu connu, lui qui était parti à New-York. Bien sûr, il revenait de temps à autres, pour Noël et quelques anniversaires quand il pouvait se libérer, mais qu'est-ce-que c'était pour une enfant d'un, deux ou trois ans ? Heureusement pour tous, la petite n'avait pas été du genre à méconnaître son frère aîné, et même si au début elle était un peu perdue lorsqu'elle le revoyait, et timide en sa présence, bien vite son naturel enthousiaste revenait au galop. Alors, quand Camil était revenu vivre au Texas, dans la maison familial, la petite blonde en avait profité, rattrapant auprès de lui les quatre premières années de sa vie passées sans ce brillant grand frère. En seulement quelques très courts mois, ils avaient tissé un lien inébranlable. L'aîné était revenu après les tristement fameux attentats du 11 septembre 2001, et était parti, à la base pour des vacances, en décembre de la même année. Dans le laps de temps entre les deux, Sixtine n'avait cessé d'être accrochée à lui. Elle le harcelait, littéralement. Sauf dans quelques rares cas où son instinct d'enfant et son sens de l'observation, déjà plutôt bien développés pour une gamine de quatre ans seulement lui soufflaient de le laisser tranquille. La plupart de temps, elle ne se gênait cependant pas pour le bousculer. Elle était trop petite à l'époque pour vraiment se rappeler de tout désormais, mais elle lui en avait fait, des tours roublards, mais tellement mignons, pour le tirer de l'état de catatonie et de paranoïa dans lequel il était brusquement tombé après les attentats. Plusieurs fois, elle était allée le rejoindre dans son lit, alors qu'il n'était même plus une heure décente pour se lever. Ses parents avaient bien essayé de la retenir à chaque fois, mais peine perdue: le petit diablotin parvenait toujours à ses fins. Elle l'avait câliné, bisouté, chatouillé, avait parlé pour le réveiller. Les fois où ça ne suffisait pas, elle le mordillait, le poussait de toutes ses forces d'enfant, le tirait par la manche de son tee-shirt de pyjama; quoique la plupart du temps, c'était par le bas du pantalon de cette même tenue, bien plus simple à attraper que les manches courtes que portait généralement Camil. Oui oui, la gamine était du genre tenace, dès cet âge. Dans la journée, elle lui demandait de lui tresser les cheveux; comme leur mère ne voulait pas qu'elle se maquille, elle avait décidé de grimer son frère, qui s'était docilement laissé faire, comprenant bien que ses protestations seraient vaines au final. Ils jouaient ensemble à cache-cache, au loup, et même parfois, elle avait réussi à faire s'allier ses deux frères pour qu'elle puisse jouer à l'élastique, les deux grands servant de piliers à chaque extrémité, ou alors à la double-corde-à-sauter. Vraiment, ça avait été une sacrée veine pour la blonde, l'entrée de Camil dans sa vie. Carlo était trop effacé et morose au quotidien pour qu'elle puisse vraiment s'entendre avec lui; elle l'affectionnait beaucoup, mais trop distant, elle n'avait jamais pu, malgré toute sa détermination, à vraiment faire en sorte qu'il joue avec elle, parle avec elle, se confie à elle. Les occasions étaient maigres et rares. Quant aux parents... La relation que la petite avait avec eux était particulière. Pas dénuée d'amour, certainement; mais quelque chose semblait avoir toujours cloché. C'est mon retour à Brisbane qui te rend sentimental comme ça ? Demanda Sixtine avec humour lorsque Camil lui dit qu'elle avait toujours été la meilleure sœur possible, et que cet état de fait était encore d'actualité. Ses yeux brillants, le léger rouge pigmentant ses joues, son large sourire et un trémolo dans sa voix indiquaient cependant comme un texte écrit en taille 36, surligné, italique et gras qu'elle était touchée par ses mots. Il ne s'en rendait peut-être pas tout à fait compte, car il était parti seulement trois mois de Houston après être venu y vivre, Camil avait été pour sa soeur aussi, une bouée de sauvetage. L'affection dont il avait fait preuve envers elle, sa patience, sa tendresse, son amour: tout ça avait été un ouragan de sentiments si bénéfiques pour l'enfant. Qui ne s'était d'ailleurs pas arrêté suite à son départ, vu qu'ils s'étaient appelés quasi-quotidiennement, ayant toujours quelque chose à se dire.
Par moment, en grandissant, elle s'était demandée si elle avait vraiment été désirée, dans cet Etat américain où l'avortement était interdit. Par peur - oui, même elle pouvait craindre des choses, parfois - elle n'avait jamais demandé. Peut-être en trouverait-elle le courage, ou simplement l'impatience face à ce qu'elle ressentait de plus en plus comme un non-dit, un jour, de poser la question.
J'ai des examens mi-juillet, déclara la blonde d'un air concentré. Ce seraient les derniers qu'elle aurait à passer, et après, à elle le bachelor en poche ! Son attention étant vraiment portée sur ce deuxième semestre, elle n'avait donc pas encore fait de plans sur la comète pour le reste de l'été, d'autant plus qu'elle devrait s'occuper des démarches pour continuer ses études, toujours en alternance, dans un cadre de type master. On a nos rattrapages à la fin de ce mois-là, dit-elle d'un ton plus détaché; sa moyenne actuelle lui assurait largement la réussite, et elle était bien trop travailleuse pour accepter ne serait-ce que l'éventualité de devoir passer aux examens de seconde main; mais les dates étaient tout de même inscrites dans son petit cerveau actif, au-cas-où. Du coup non, je n'ai rien pour une fois ! Mais mes amis commençaient à en parler, alors, je te redirai, dit-elle pour faire oublier son instant de trouble passé une fois pour toutes. La discussion dériva inévitablement sur la femme que Camil avait choisi pour se faire bien voir aux yeux du monde. Sa réponse fut brute, presque sentencieuse: il ne comptait certainement pas parler d'elle à leur famille, notamment à leurs parents. Sixtine roula des yeux face à ses explications. Bien évidemment, c'était tout à l'honneur de son frère de vouloir les préserver; mais il serait temps qu'il se rende compte qu'au XXIe siècle, tout finissait par se savoir, d'autant plus lorsqu'on avait une popularité telle que la sienne. Elle leva les mains au ciel, répondant: Ok, ok, je ne dirai rien aux parents ! En revanche, elle n'avait pas dit son dernier mot face à son frère. Il lui manquait un élément essentiel du puzzle, auquel il ne semblait pas avoir réfléchi. Ils l'apprendront donc par le biais de la presse, ou bien par les réseaux sociaux. Elle lui lança un regard évocateur: autant leur père était à des milliers de kilomètres de ces préoccupations, mais pas leur mère. Australienne de naissance, elle avait toujours gardé un lien avec son pays d'origine, notamment en se tenant au courant des nouvelles; alors maintenant que deux de ses enfants y vivaient... Leurs parents avaient beau avoir plus de soixante ans, certains de cette classe d'âge s'adaptaient petit à petit à cette nouvelle ère informatique. Tu sais que maman a pris des cours pour savoir naviguer sur Facebook, Instagram, Twitter ? Elle finira forcément par être au courant, et je ne suis pas sûre qu'elle appréciera la blague. Sixtine s'arrêta là, laissant son frère méditer là-dessus.
Lorsqu'il la supplia de l'écouter - pour une fois - et argumenta qu'il était hors de question qu'en cas de chute, il l'entraînât avec elle, la blonde soupira. Ils pouvaient être aussi têtus l'un que l'autre, parfois. Enfin non. Elle l'était plus que lui, définitivement. Pourtant, mieux valait sembler battre en retraite, en certains cas. Désinvolte, elle répliqua: Oui, oui... Je vais jouer mon rôle de petite soeur, promis. La phrase semblait vouloir dire qu'elle lui obéirait; mais le double-sens dans sa caboche était bien ancré. En cas de problèmes, hors de question qu'elle soit la première à déserté. Ils étaient une famille, et ça, ce n'était pas une notion à prendre à la légère. Regardant par la vitre la plus proche d'elle, Sixtine ne vit pas le voisin que son frère salua, mais remarqua en revanche que le gardien de la résidence n'était pas le même qu'habituellement, celui portant l'uniforme de travail ne lui disant rien. Tiens, Kuparr n'est pas de service ? s'étonna-t-elle à voix haute, dans une réflexion aussi personnelle que partagée. Ils descendirent finalement de voiture, et la jeune fille récupéra son sac à main, laissant son frère être le gentleman qu'elle appréciait en lui. Aussitôt, elle se mit à sautiller, la perspective de n'être plus qu'à quelques mètres de leur lieu de vie lui donnant un regain d'énergie positive; assez pour faire tiquer son frère, qui lui fit remarquer son débordement de dynamisme. La blonde haussa les épaules, répliquant: Je ne sais pas d'où elle sort, mais je le vis très bien ! Elle sourit, ajoutant: Carpe Diem. Ou "saisir le jour", littéralement traduit. Si elle devait avoir un credo, ce serait sans aucun doute celui-ci. Après les nombreux étages montés par ascensceur, Sixtine entra enfin dans son El Dorado personnel: leur appartement. Toute joyeuse, elle jeta un coup d'oeil furtif aux lieux, alors qu'elle demandait à son frère ce qu'il prévoyait avec celle qu'elle venait de joliment surnommer sa "conquête électorale". Aussitôt, elle entendit une expression outrée de la part du politicien, et elle ricana; en son fort intérieur, elle n'en demeurait pas moins éminemment rassurée. Elle pointa du doigt un fait: Je ne sais pas jusqu'à quel point ta campagne électorale doit être crédible, notamment au niveau de la relation que tu as avec cette femme. Alors je fais des suppositions, je propose des hypothèses, je te fais part de mes interrogations... Et j'attends que tu me serves les réponses sur un plateau d'argent. Elle lui servit un sourire carnassier en guise de conclusion, puis alla immédiatement se coller - ou peu s'en faut - le nez sur la grande baie vitrée qui donnait une vue incroyable sur la ville. Brisbane, me revoilà enfin ! qu'elle s'exclama avec un immense plaisir. Camil la ramena à la réalité en lui parlant de sa valise. Sur mon lit, s'il-te-plaît, déclara la demoiselle, et elle le suivit à la trace. Elle entra dans sa chambre avec un large contentement, retrouvant cet environnement si familier. Le bagage posé, elle l'ouvrit et dit à son frère: Attends une seconde, avant d'aller bosser. Elle fouilla dans le large contenant, et attrapa quelque chose dans chacune de ses mains. Ferme les yeux et tends les mains; attention, c'est fragile. Une fois qu'il se fut exécuté, elle sortit ce qu'elle avait cherché, et le lui posa dans les mains. Cadeau ! Il s'agissait de deux gros pots de beurre de cacahuètes, de la marque américaine préférée de Camil.
@Camil Smith |
| | | | (#)Mar 14 Avr 2020 - 6:34 | |
| « Mi-juillet ? C’est tard cette année, non ? » À moins que ce soit dû à son stage, qu’elle effectuait à la mairie depuis quelques mois maintenant. Avant de définitivement lâcher son poste de directeur de cabinet, il s’assurerait que la convention de Sixtine soit signée pour qu’elle puisse prolonger son stage si elle le souhaitait. Son choix était personnel, égoïste, et il ne voulait aucunement entraver les ambitions de la cadette de la famille. « Rattrapages ? C’est vraiment quelque chose que tu envisages ? » Demanda-t-il en arquant un sourcil, surpris par les propos de sa soeur. Sixtine ne lui avait jamais rapporté être en difficulté scolaire — bien au contraire. Élève sérieuse, appliquée et studieuse, l’Américaine avait toujours franchi les étapes de la scolarité les unes après les autres, toujours haut la main. « Tu me le dirais, si tu avais des soucis avec l’école, hein ? » Même si Camil était occupé par la nouvelle dynamique qu’il voulait donner à sa carrière, il n’en restait pas moins attentif au bon déroulement de la scolarité de sa petite-soeur. Pour convaincre ses parents de laisser Sixtine quitter Houston alors qu’elle n’était pas encore officiellement majeure, l’Australien avait longuement plaidé sa cause. Il avait promis qu’il prendrait soin d’elle, qu’il s’assurerait qu’elle travaillerait bien et, plus généralement, qu’il veillerait sur elle. Il avait appliqué ceci à la lettre, ce qui lui avait longtemps été reproché par ses amis. Trop protecteur, trop intrusif, trop étouffant… Les mots avaient été clairs, durs, et tranchants. Camil ne leur avait pas tenu rigueur, parfaitement conscient que ses détracteurs ne connaissaient rien de la relation unique qu’il partageait avec Sixtine. Loin d’être atteint par les racontars qui circulaient sur son compte, l’Américain proposa à sa cadette de s’envoler avec lui pour Hawaï. « Si tu n’as rien de prévu, tu pourras toujours te joindre à nous. » Proposa Camil en souriant. L’idée qu’elle reste seule à Brisbane et qu’elle s’ennuie pendant ses vacances était, pour lui, inconcevable. Il n’aurait pas pu profiter dignement de ses propres congés, s’il laissait derrière lui la cadette, inoccupée. Pourtant, il était sûr que sa soeur finirait par décliner sa proposition : nul doute que, d’ici peu, elle croulerait sous les choix de destination ou autres projets. « Mais j’aimerais que tu me le dises assez vite, si possible, histoire que j’en tienne compte pour les réservations. » Ajouta-t-il, préférant se montrer prévoyant. La présence de Sixtine ne bouleverserait pas ses projets, simplement la taille de son lieu de villégiature. « Merci. » Lâcha-t-il, avant d’aller titiller la joue de sa soeur du bout de l’index. Elle lui avait beaucoup manqué, au cours des derniers jours. L’embêter faisait partie de ses activités favorites, et il n’avait malheureusement pas pu s’y adonner au cours des derniers jours. Il comptait bien rattraper le temps perdu. « C’est une plaisanterie ? » Grommela le politicien en levant les yeux au ciel. Ça, pour le coup, il ne l’avait pas vu venir : sa mère se plongeant dans les méandres de l’internet, et cherchant à comprendre son fonctionnement. « Twitter va la mettre dans tous ses états. » Fit-il remarquer, alors qu’il savait pertinemment que sa génitrice ne tolérerait pas les immondices et autres vulgarités qui circulaient régulièrement sur ce réseau social en particulier. « Et fais-moi penser à verrouiller mon profil Instagram. » Plaisanta-t-il. C’était le seul profil qu’il gérait directement ; sa page Facebook et son compte Twitter étaient administrés par le community manager de la ville de Brisbane — et, bientôt, par Skylar Whitaker. « Je songerai à les prévenir, si cette histoire prend trop d’ampleur. » Promit-il en haussant les épaules. Il espérait ne pas avoir à en arriver là ; il ne se voyait pas présenter sa (fausse) compagne à ses parents. Mieux valait éviter toute situation gênante.
« Non. Il a pris quelques jours de repos. » Expliqua Camil, alors que sa soeur notait l’absence et le remplacement de leur gardien de résidence habituel. Kuparr occupait déjà ce poste lorsque, vingt ans plus tôt, l’Américain avait acheté cet appartement. Il avait été l’une des premières personnes avec laquelle il s’était lié. Il était ce visage familier qu’il croisait quotidiennement, et ça avait un côté rassurant. « Je ne dis pas que tu ne la croiseras pas à la maison… » Précisa le politicien. Parce que oui, ce n’était pas un secret : Camil avait quelques ambitions qui se situaient sous la ceinture, avec Deborah. « Mais pas dans l’immédiat. » Ils devaient, aux yeux de tous, en être au début de leur relation ; qu’elle s’installe chez lui n’aurait donc pas été judicieux. Et puis, ils s’étaient mis d’accord sur un point : leur relation ne devait pas être étouffante. Chacun avait droit d’avoir sa vie, son jardin secret, sa tranquillité. Il s’amusa de voir sa soeur être visiblement satisfaite de son retour en Australie, dans cette ville qui leur avait tant apporté. Il avait prévu de s’éclipser, mais Sixtine le retint pendant encore quelques secondes. Il ne se fit pas prier, curieux de découvrir ce qu’elle lui réservait. « Merci. » Souffla-t-il, déposant les deux pots de beurre de cacahuète sur le lit de sa soeur. Il la serra contre lui, et fit durer cette étreinte un peu plus longtemps que nécessaire. Il l’embrassa sur le sommet du crâne, et lui rendit finalement sa liberté. « J’ai pas mal de choses à faire, avant notre dîner. » Admit le politicien en faisant la moue. Il s’en voulait, de l’abandonner alors qu’elle venait tout juste de rentrer en Australie. Malheureusement, il devait désormais rattraper le retard qu’il avait accumulé, au cours des quelques jours de repos qu’il s’était octroyé. « Je serai dans le salon, si tu me cherches. » Avec les deux pots de beurre de cacahuète et une petite cuillère pour picorer, évidemment. |
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