Il est plus d’une heure du matin lorsque je me laisse lourdement tomber sur mon lit. La représentation s'est terminé tard, je me suis retrouvé à boire une bière en compagnie de certains danseurs pour éviter de penser au fait que Clément a fuit le théâtre avant même que je sorte de scène. J’ai traîné pour ne pas me retrouver seul chez moi avec mes pensées et on a fini par retourner sur la scène pour danser un peu en riant comme si on n’était pas assez fatigué. Une fois chez moi, j’ai pris une bonne douche et je ne rêvais que d’une chose, m’allonger. Mon plan se déroulait à merveille jusqu’à ce que mon téléphone se mette à sonner alors que je cherche une position confortable pour dormir. Je soupire et préfère ignorer la sonnerie qui reprend quelques secondes plus tard. Je me redresse et attrape mon portable pour y remarquer un numéro inconnu. Curieux de savoir qui pourrait bien m’appeler à cette heure-ci, je finis par décrocher. J’ai la joie d’entendre la voix de meilleur ami qui me demande sans détour de venir le sortir de garde à vue. « Va te faire Martin, j’veux dormir. » Et je raccroche. Ce n’est pas le moment… Je n’ai clairement pas envie de me retrouver avec Martin ce soir. Je sais d’avance pourquoi il s’est retrouvé au commissariat et ça m’énerve déjà. L’Allemand ne sait pas rester calme lorsqu’il se mêle à des manifestations. Non Martin ce n’est pas celui qui suit le mouvement un petit panneau à la main. On le retrouve très généralement au premier rang en train d’insulter toutes les autorités de nom d’oiseau plus originaux les uns que les autres. Et bien entendu, il est toujours le premier à lancer la confrontation avec lesdites autorités. Je soupire et me rallonge prêt à démarrer ma nuit.
Après avoir tourné pendant près de vingt minutes dans mon lit, je capitule et finis par me lever. Il m’énerve, mais je sais que je ne vais pas dormir si je le laisse passer la nuit dans une cellule minuscule probablement accompagné par une bande d’ivrognes. Je jette un coup d’œil sur mon compte banque persuadé que je vais devoir payer une caution pour le laisser sortir et finis par aller enfiler un short et un débardeur. C’est en bougonnant tout seul que je finis par aller voler les clés de la voiture de mon père afin de me rendre au commissariat. Lorsque j’arrive sur place, je réalise que Martin n’est pas le seul des manifestant à s’être fait coffrer et pourtant lorsque je rentre dans le bâtiment, c’est le premier que j’entends gueuler. « Ta gueule Murphy ! » Je lève les yeux au ciel et me dirige vers l’agent à l’accueil. « Je viens chercher celui qui braille le plus. » Et je crois que je regrette déjà.
J'aurais pu le tuer. J'aurais sincèrement pu étriper ce connard mais la police ne m'a pas laissé. En vrai, lorsque je lui ai sauté à la gueule, c'était la fin de la manifestation pacifiste et ça a dégénéré. Je ne dis pas que lui et moi étions les seuls fautifs (toutes manières les premiers fautifs sont les sales connards de politique qui dont les empruntes de leur gros cul plein d'huile de palme sont visser sur le cuir de leur chaise dans leur tour d'ivoire) mais je pense que nous somme l'étincelle qui a déclenché le feu. Feu qui a été atteint avec une pluie de violence physique (mes côtes et mon genou ainsi que ma lèvre s'en rappelleront) et à coup de jet d'eau. Mais ce n'est que lorsque la police à sorti le gaz poivré pour nous arroser la gueule que je me suis enfin calmé. Sans plus résister, j'ai fini par me faire embarquer dans un fourguons avec d'autres manifestants -dont l'ordure qui a déclenché cette colère noire en moi.
Une fois au poste de police, on nous a foutu dans une piètre cellule où nous étions tous entasser. Un des commissaire à eu la gentillesse de me filer un torchon propre et de la glace pour essayer de minimiser les dégâts sur mes yeux et nous avons attendu. Longtemps. Nous sommes passé chacun notre tour pour expliquer notre point de vu et pour apprendre les charges qui sont retenu contre nous. Mon inter vue a sans doute duré une bonne heure et c'est dans un soupire las que je me réinstalle sur le banc. Penchant la tête en arrière contre le mur, je remet la pochette de glace sur mon visage et souffle de soulagement...lorsque j'entends un bruit sourd à mes côtés. Rouvrant les yeux, mon regard se pose sur Jessica, une amie, qui, allongé au sol, inconsciente est brusquement saisie de tremblements.
« putain … HEY ! Hey on a besoin d'aide ici !!» hurlais-je en me levant pour me placer à côté de Jessica. Je l'attrape de manière à la placer en position latéral de sécurité «HEY GROS TAT ! » hêlais-je le garde «JE TE CAUSE PUTAIN ! » sous la panique, je perds ma politesse. Cette même politesse que je perds tout le temps lorsque je suis en compagnie des forces de l'ordre «C'est que du cinéma de toute manière» ose-t-il prétendre. « mais t'es complètement con ma parole !» je me lève brusquement et me dirige vers les barreaux qui me séparent de l'homme « Si tu l'aide pas et qu'elle y passe tu te rends compte que tu peux être juger comme non assistance à personne en danger ?» « dit celui qui est jugé pour casse de bien d'autrui, coup et blessure, foutage de trouble et ...» «Mais on parle pas de moi là ! » m'emportais-je «Elle a besoin d'assistance médical ! Putain mais t'es pas sensé être là pour nous protéger ?! Vous la police vous êtes là pour nous défendre ou vous êtes seulement là pour faire chier le m...» je me tais brusquement lorsqu'il frappe les barreaux d'un gros coup de matraque « FERME TA GUEULE MORVEUX !» «JE LA FERMERAIS SEULEMENT LORSQUE VOUS AUREZ ENFIN REAGIT ET QUE …. » je me tais brusquement en entendant la voix tonitruante de mon meilleur ami qui me dis de me la fermer.
Je fronce les sourcils puis soupire doucement et me pince l'arrête du nez. Avec toute l'excitation concernant Jessica et le reste, j'avais complètement oublié que j'avais appelé Loan pour lui demander de me sortir de là. Je fini par me reculer lorsque la porte s'ouvre afin qu'une équipe paramédicale puisse aider Jessica et retourne à ma place.
Place que je n'occupe pas plus de quelques minute que le garde revient « c'est ton jour de chance, Murphy» crache-t-il en ouvrant la porte. J'hésite un instant avant de me redresser et m'avancer en boitant vers la porte « allez magne toi sinon ton petit ami aura payer pour rien !» je grogne légèrement et sort de la cellule, non sans un dernier coup d’œil vers mes amis, leur promettant silencieusement qu'ils seront sauvé. D'une manière ou d'une autre. Arrivé dans la salle, le garde me pousse -littéralement- vers Loan et j'avoue que si mon genou ne se plaignais pas d'avoir du rattraper tout mon poids, je me serais retourner et je lui en aurais foutu une, quitte à foutre en l'air la caution payé gracieusement par Loan et totalement risquer ma liberté.
Passant à côté de mon meilleur ami, je me dirige vers l'accueil où je récupère mon portable -ou plutôt ce qui a survécu de mon portable qui n'a pas réellement apprécié les coup de massues qui ont plut sur lui- avant de sortir. Une fois à l'air libre, je prends une profonde inspiration et lance un coup d'oeil vers Loan «merci d'être venu » soufflais-je finalement avant de descendre lentement les escaliers, autant à cause de mon genou qui se plaint à chaque pas qu'à cause de ma vue encore pas mal brouillée par le spray poivré que je me pris dans la gueule.
Ce n’est pas la première fois que je dois me rendre dans un commissariat pour aller chercher Martin. La toute première fois, on vivait encore en Allemagne, c’était quelques mois avant que l’on parte pour la Nouvelle-Zélande. C’est arriver une fois ou deux là-bas et je ne compte plus le nombre de fois où je l’ai fait à Brisbane. Il est déjà arrivé que l’on ne se soit pas parlé pendant des semaines et que Martin m’appelle pour que je vienne payer sa caution. Il sait parfaitement que quoiqu’il arrive entre nous, je viendrais toujours le chercher. La plupart du temps, ça m’énerve et je laisse une heure de plus juste pour le faire réfléchir, mais je finis toujours par aller payer la caution. Et bien entendu, Martin ne réfléchit jamais bien longtemps. Je crois que c’est plus fort que lui. Il a besoin d’assister à toutes les manifestations pour se sentir vivant, pour donner une raison à tout ce qu’il défend dans sa vie. Je peux le comprendre dans le fond, je suis le premier à toujours me rendre aux différentes manifestations pour le mouvement LGBTQ+, mais je ne me fais jamais arrêter. Martin est du genre à ne pas savoir se taire, à vouloir défendre ses opinions de la manière le plus bruyant possible et bien entendu, il n’a pas froid aux yeux.
Je ne suis donc pas vraiment impressionné de l’entendre hurler sur un flic à la seconde où je pénètre dans le commissariat. Il veut se faire entendre et bien entendu, il emploie tous les noms d’oiseaux possible. Comme si cela allait aider son cas. Je crois qu’un jour, on va me refuser de lui payer sa caution et il sera directement envoyé dans une prison d’état. Ce sera l’étape suivante, ça paraît inévitable vu son casier. Le policier à l’accueil m’informe que Martin a été arrêté pour obstruction de la voie public, destruction de biens publics et privés et bien entendu outrage à agent. Je lève les yeux au ciel et tends quand même l’argent. Je vais pas laisser mon meilleur ami ici alors qu’il est clairement sur les nerfs, il a besoin qu’on le laisse tranquille.
Quelques minutes, plus tard, un agent vient me jeter Martin à la figure et je remarque de suite ses yeux rougis par les sprays utilisés par les flics. « Hey… » Je ne dis rien de plus et me dirige vers la sortie en compagnie du jeune homme qui est soudainement bien plus silencieux. J’écrase un bâillement et remarque que Martin a du mal à descendre les escaliers. Je lève les yeux au ciel et viens passer mon bras autour de ses hanches. « Tu m’expliques ? » Je veux pas paraître comme un moralisateur, mais c’est bien la première fois que je le récupère dans un piteux état. Il a toujours un peu des bleus et tout ça, mais jamais une jambe aussi douloureuse. On se dirige vers la voiture et je cherche mes clés avant de le laisser s’asseoir. « Bière ? »
Ce serait mentir que de dire que je ne suis pas soulagé du soutient physique que m'offre Loan lorsqu'il se rend compte mes difficultés à me déplacer. Soupirant doucement, je m'appuie sur lui et me laisse guider vers sa voiture. Sur un ton doux et calme, il me demande finalement si je compte lui expliquer ce qui s'est passer avant de me proposer d'aller boire une bière «Plutôt whisky » soufflais-je tandis qu'un sourire amusé vient étirer la commissure de mes lèvres. Je laisse Loan ouvrir sa voiture avant de m'installer -non sans difficulté et en grimaçant- sur le siège passager. Mains droit soutenant mes côtes, je recule la tête contre le dossier du siège et ferme un instant les yeux, me concentrant sur ma respiration pour essayer de contrôler les douleurs.
Ce n'est que lorsque Loan prend place derrière le volant que je rouvre les yeux. Déglutissant, je pose mon regard sur la route et attend encore quelques instants avant de prendre la parole «Ce qui devait être une manifestation pacifiste s'est transformé en enfer» soufflais-je «Comme tous les vendredi partout dans le monde il y a des manifestations pour faire comprendre aux autorités que le réchauffement climatique est réel et qu'il faut des actions de leur part. Comme tous les vendredi j'étais dans le cortège de front et je scandais mon mécontentement. Jusque là, rien de grave. Mais ... » ma voix se brise alors que je laisse échapper un râle de douleur lorsqu'en me redressant une douleur aigüe irradie mes côtes « ...j'ai eu la mauvaise idée d'engager la conversation avec un manifestant que je n'avais jamais vu et qui ...je sais pas, ne me donnais pas l'impression de réellement croire à ce qu'il disait» je secoue doucement la tête «échauffé par la colère qui m'animait déjà de base face à l'inaction des autorités, le fait qu'ils soient pas foutu d'ouvrir les yeux sur le monde et tout ça, il n'a pas fallut longtemps que j'en vienne aux mains avec ce mec» je ferme les yeux « J'ai aucune idée pourquoi, je veux dire il ...enfin il a rien fait de grave et en vrai chaque voix et chaque personne qui gonfle nos rangs est la bienvenue et devrait être accueillie les bras ouverts mais lui ….je sais pas, il y a des gens que tu détestes sans réellement savoir pourquoi et il en fait parti» je dévie mon regard sur le côté «Donc voilà … ça a commencé avec un coup de poing et ça a fait dégénérer toute la manifestation. Les policiers sont intervenu à coup de matraque et de spray poivré » je remet ma tête droite et lance un coup d’œil en coin à Loan «J'ai hésité entre t’appeler toi ou Jameson » avouais-je après un instant de silence «Jameson m'aurait laissé pourrir dans la cellule jusqu'à nouvel ordre » je laisse échapper un rire que je regrette instantanément étant donné que les douleurs ne font qu'augmenter.
« En tout merci, vraiment, de t'être déplacé. Je pense que j'aurais fini par faire un meurtre si j'étais resté encore plus longtemps» rayais-je finalement, toutefois parfaitement sincère dans mes remerciements qui viennent du fond du cœur.
Cela fait bien longtemps que je n’avais pas retrouvé Martin dans un tel état. Il a les yeux rougis par ce que je suppose être les fumigènes, des ecchymoses qui commencent déjà à apparaître sur ses bras et surtout une démarche bien trop douloureuse à mon goût. Je n’ai pas besoin qu’il me fasse un récit détailler pour déjà comprendre qu’il a dû se prendre quelques sérieux coups de matraque sur les jambes. Je n’ai jamais réellement participé à des manifestations sous haute tension comme peu le faire Martin, mais j’ai déjà vu quelques marches des fiertés virer à la violence policière malheureusement. Je n’ai jamais été impliqué personnellement, mais c’est quelque chose qui me met dans un état de colère inexpliqué. Je ne comprends pas ce plaisir de frapper sur du manifestant. D’accord, les policiers ne connaissaient pas Martin comme je peux le connaître moi, et encore, mais ils doivent bien savoir que ce n’est pas en les frappant que les choses vont s’apaiser. Martin ira gueuler plus fort dès la prochaine manifestation, c’est certain malheureusement. Juste pour les emmerder, juste pour dire merde aux entreprises polluantes et tout le reste. Un soupir s’échappe d’entre mes lèvres tandis que je viens donner un peu de soutien à mon meilleur ami afin de descendre les marches qui mènent à ma voiture. Il fait le fier, mais je vois bien qu’il est en train de douiller en silence. « Sérieux Martin… » Je soupire à nouveau et l’aider à monter en voiture. J’ai beau être légèrement soûlé, je lui propose immédiatement qu’on aille boire un verre et bien entendu, il accepte.
Alors que je me glisse derrière le volant Martin commence à parler. Je sais que rester à l’observer n’arrangera rien alors je démarre la voiture et commence à rouler tout en l’écoutant attentivement. Donc il s’est fait coffrer pour s’être battu avec un manifestant. Je sais à quel point Martin est impliqué dans ce genre d’action, il prend tout cela très à cœur, mais en venir aux mains pour une divergence d’opinion ? « La prochaine fois, tu gardes ton poing dans la poche. » Je sais que je sonne presque paternaliste avec lui, mais je pense à tout ce qui aurait pu se passer en réalité. Un flic qui ne comprend pas réellement son geste et qui tire. Un manifestant plus énervé que les autres et qui s’en prends à lui de manière bien plus violente. J’envisage souvent le pire lorsque je sais que Martin s’engage dans un nouveau combat, parce que je sais que rien ni personne ne l’arrêtera. « Fait attention à toi un peu. » Juste un peu. De temps en temps quoi.
Lorsqu’il évoque le fait que Jameson l’aurait probablement laisser pourrir dans sa cellule, je me retiens d’exploser de rire. Je crois qu’il n’a pas tort sur ce point-là. « J’ai été très tenté de t’y laisser pour la nuit, je venais de me mettre au lit quand t’a appelé. » Je n’ai pas besoin de dire que ceci n’était qu’une pensée et que je serais tout de même venu le chercher. Je n’ai pas besoin de le dire parce qu’il le sait déjà parfaitement. Quoiqu’il arrive, il sera toujours mon meilleur ami et il n’y a rien que je ne ferais pas pour lui et sa gueule cassée. « Et donc vu que je me retrouver alléger de 200 dollars, c’est toi qui vas payer la tournée. » Je me tourne vers lui en souriant de toutes mes dents alors que je me gare devant un bar que l’on fréquent assez souvent. J’arrête le moteur et fais le tour pour m’assurer que Martin n’a pas besoin d’aide pour sortir du véhicule. Une fois assis au bar, je jette un nouveau coup d’œil au visage de mon ami. « Ajoutez un sac de glaçon à tout ça, on va tenter de sauver sa belle gueule. » Je suis fatigué, mais si Martin a besoin de moi, je resterai éveiller toute la nuit avec lui.
Je suis le premier à regretter ce qui s'est passé. J'aurais, comme le dit si bien Loan, du garder mes poings dans ma poche. Je n'aurais pas du commencer une dispute et en venir aux mains avec cet homme qui ne le mérite pas de toute manière. Je ne dis pas que je suis le seul responsable de la dégénération de la manifestation, mais je pense que sans mes poings et moi elle n'aurait peut-être pas dégénéré aussi rapidement. La seule chose que je ne regrette pas c'est d'avoir mit la raclée à cet homme qui s’insupportait par sa seule présence. Lorsque Loan me dit de faire un peu plus attention à moi, je roule des yeux et soupire discrètement mais ne répond rien et laisse le silence s'installer entre nous.
Ce même silence s'étire encore jusqu'à ce que nous sommes installé à la table du seul bar encore ouvert à cette heure tardive. Là je commande un whisky, évitant de regarder le serveur dans les yeux mais accepte volontiers le sachet de glace qu'il m'offre en emmenant nos boissons « Merci» soufflais-je en l'appliquant sur mes yeux, soupirant doucement de soulagement. «J'ai déjà fait des manifestations violentes, mais j'ai toujours réussi à m'en sortir sans trop de dégâts » reprenais-je, mes coudes posés sur la table pour soutenir ma tête «Je sais pas comment j'ai fait mon compte mais ...bref, ça ira mieux dans quelques minutes » ou plutôt jours voire semaines «ça va toi sinon ? Tu faisais quoi avant que je ne t'appelle ? Je veux dire, à part dormir » je relève la tête vers Loan et rouvre les yeux en prenant une gorgé de mon whisky « T'étais de sortie ? Et d'ailleurs … ça se passe comment avec Clément ?» c'est un sourire malicieux qui s'affiche sur mon visage «tu a conclu maintenant ou pas encore ? »
je fais tout pour essayer de changer de sujet, autant parce que ça m'intéresse réellement que parce que je n'ai pas envie d'épiloguer encore d'avantage sur ce qui s'est passé et que Loan me fasse encore la morale.
Je connais Martin depuis assez longtemps pour savoir qu’il regrette que ce soit aller aussi loin. Dans le fond, il n’a jamais été du genre à prôner la violence. Il se laisse juste emporter par ses émotions surtout lorsque l’on touche à des causes qui lui tienne à cœur. Et c’est bien pour cela que je n’arrive jamais à lui en vouloir, il se bat tellement pour les choses auquel il croit. C’est rare des gens aussi passionnés que Martin. On devrait en avoir bien plus surtout dans notre société actuelle. Il a juste du mal à faire les choses calmement parfois. Et bien entendu, je lui demande de faire attention à lui. Je n’ai juste pas envie de le trouver en prison pour le rester de sa vie parce qu’il aura été trop loin une fois de trop. Martin ne serait pas lui s’il ne levait pas les yeux au ciel en m’entendant dire cela. Je ne peux pas lui en vouloir. C’est comme cela depuis des années. Je suis celui qui s’inquiète, il est celui qui vit sa vie pleinement sans se prendre la tête. Parfois, je suis le parent et il est le gosse dans l’équation. C’est comme ça. On ne change pas une équipe qui gagne.
Je lui ai promis un verre et on se retrouve dans un vieux rade qui pue la clope et la transpiration, mais qui représente le cliché parfait du bar où l’on vient uniquement pour se bourrer la gueule et oublier ses soucis du quotidien. Parfait pour terminer la nuit en soit. Je commande deux verres auprès du vieux barman et me retrouve à une table minuscule avec mon meilleur ami qui semble encore prendre doucement conscience de tout ce qui a pu lui arriver aujourd’hui. Et comme j’aurai pu m’en douter, il détourne assez rapidement la conversation pour m’interroger sur ma vie. Il change de sujet et je ne lui en veux pas. Il a dit tout ce qu’il avait sur le cœur, il a besoin d’un peu de temps pour prendre le reste en considération. Alors je me plie au jeu des multiples questions. « Je venais à peine de me mettre au lit, j’avais une représentation ce soir. » Je lui souris un peu pour lui rappeler que je ne lui en veux pas de m’avoir tiré du lit même si j’ai râlé tout à l’heure. Et quand il me demande à propos de Clément, je perds rapidement mon sourire. « Ça se passe pas du tout avec Clément. » Je hausse les épaules et bois une longue gorgée de mon verre. « On a couché ensemble le soir de ma première représentation, je pensais que ça allait bien et en fait il a juste disparu à l’autre bout du monde sans me donner de nouvelles. » Repenser à tout cela me donne une certaine rage. « Et maintenant qu’il est revenu, il m’évite comme la peste. Donc bon, clairement, je me sens comme une merde. » Et une nouvelle fois, je hausse les épaules. « Rien de passionnant, tu vois, au final un verre avec mon boxer de meilleur ami s'est parfait. » Je ris un peu pour dédramatiser et parce que j’avais décidé de ne plus me prendre la tête avec Clément. Ou tout du moins pas ce soir. « Bon et toi à part sauver le monde et finir en prison ? Quoi de nouveau ? »
Suis-je violent ? Possiblement. Suis-je impulsif ? Sans aucun doute. Suis-je idiot ? Bien sûr que oui. Dans tous les cas, je regrette amèrement de m’être laissé emporté. Même si, au final je ne peux, malheureusement, rien y changer. Je ne pense pas non plus être à l’origine du fait que la manif ait dégénérée mais je me sens bien con quand même. C’est pour cela que je décide de changer de conversation, détournant le sujet vers Loan afin de m’intéresser un peu plus à son cas. Que faisait-t-il ? Mais surtout a-t-il déjà conlut avec Clément ?
Il m’apprend avoir eu une représentation aujourd’hui - ce qui me fait me sentir encore plus con parce qu’il doit sans être super crevé là - et que ça se passe super mal avec son partenaire. Je fronce les sourcils et incline légèrement la tête sur le côté, l’interrogeant silencieusement du regard. Les explications finissent par arriver et me font grimacer. Ils ont couché ensemble, c’était magique mais voilà que Clément joue au connard fini et disparaît sans lui donner de nouvelles avant de l’ignorer à son retour. «Mais non...» soufflais-je «Ah quel con » l’insultais-je en secouant la tête « T’as essayé de le chopper et de pas lui laisser le choix que de te parler ? Rah, j’espère qu’il va se rendre compte qu’il est entrain de gâcher une superbe opportunité» et je le pense sincèrement, mon meilleur ami étant le mec le plus génial de la terre.
Ce même mec qui fini par vouloir, à nouveau, changer de sujet, me demandant ce que je fais, moi, à part me faire emprisonner. «Pas grand-chose. Tu sais bien que mon but c’est de visiter toute les prisons du monde de l’intérieur » rayais-je avec un humour de merde « Enfin… j’ai participé à une action pour bloquer les trains qui réapprovisionnent les machines sur le chantier de Clermont où ils creusent la plus grande mine de charbon du monde » je pince les lèvres, affichant une moue de réflexion «Sinon j’ai rien d’autre à raconter … ma vie est pas si palpitante que ça » j’hausse les épaules « Je pense que maintenant je vais d’abord rentrer me coucher et dormir pendant 48h, ensuite j’aviserais» dis-je, demi sourire sur les lèvres.
J’étais déterminé à lui en vouloir pendant un moment, à bouder un peu comme j’ai si souvent l’habitude de le faire avec lui. Pourtant, lorsque on se finit par s’éloigner de l’ambiance survolté du commissariat, lorsque l’on se retrouve rien que tous les deux au bar, je vois qu’il n’es pas spécialement fier de lui. Il ne le dira jamais vraiment à haute voix, mais il n’aime pas en venir aux mains, ce n’est pas son genre malgré son impulsivité lorsque l’on s’attaque aux causes qui lui sont chères. Je le connais par cœur Martin et finalement, je ne lui en veux pas. Il s’est laissé emporter par ses croyances et qui pourrait bien lui en vouloir. Il fait tout en son pouvoir pour protéger notre planète. Son combat est tout ce qu’il y a de plus admirable. Il faudrait juste qu’il apprenne à gérer ses réactions parfois. Et encore… Je serais toujours là pour venir le chercher, quoiqu’il arrive, quoiqu’il fasse.
Alors on oublie un peu le sujet de son arrestation. On retrouve nos habitudes et je réponds à ses questions. Je vois bien qu’il semble gêner de m’avoir sorti du lit et je m’empresse de le rassurer. « T’en fais pas, pas de représentation demain. » Je lui souris un peu et bois une gorgée de mon verre. Avant de me lancer sur le sujet de ma relation avec Clément. Je n’ai parlé de tout cela avec personne, mais je dois avouer que cela fait du bien de vider mon sac. Je ne sais plus vraiment sur quel pied danser avec le jeune homme. Il est parti sans donner de nouvelles et depuis, je suis plongé dans un véritable flou artistique. « Tu me connais, j’ai rien dit et je suis resté dans mon coin. » Je n’aime pas imposer un choix, une décision. « Je voulais lui laisser de l’espace, visiblement il a décidé que mettre des milliers de kilomètres entre nous, c’était mieux. » Je hausse les épaules et bois une nouvelle longue gorgée de ma bière. « Tant pis pour moi, hein. » Je ne suis pas du genre à me plaindre, mais je dois dire que le déroulement des choses avec Clément m’a réellement attristé.
Alors rapidement, je change de sujet pour m’intéresser à la petite vie de mon meilleur ami. C’est bien plus simple de l’interroger plutôt que de parler de moi et de mes déboires sentimentaux. Je ne sais absolument pas ce qui va se passer dans l’avenir avec Clément et je n’ai pas vraiment envie de me prendre la tête avec cela. Pas ce soir. J’écoute Martin avec attention. Encore une fois, il justifie son action du jour et je lui souris quelque peu. « Tu as fait ce que tu pensais juste. » Et c’est tout à son honneur après tout. Il me parle de rentrer ce coucher et je m’empresse de lui proposer. « Tu veux venir dormir à la maison ? » Ça me rassurera un peu de le garder près de moi jusqu’à demain en vrai. Pour surveiller ses blessures et pour m’assurer qu’il a pu s’apaiser également, mais je n’impose rien. Un léger silence s’installe entre nous, on prend juste le temps de se remettre de la soirée, de respirer un peu. Puis j’ai cette idée qui revient trotter dans ma tête comme depuis plusieurs jours. « Dit… J’aimerais bien retourner en Allemagne, tu viendrais avec moi ? »