Ce matin-là, Nolan se leva avec la sensation que ce serait une journée complètement merdique. Il y avait des jours avec et des jours sans.
S’il l’avait su bien plus tôt, il aurait pris la décision de rester chez lui et de ne pas aller bosser. Quoi que de mieux que de profiter de sa villa, avec ce beau ciel bleu et cette chaleur.
Mais hélas, il ne pouvait pas. Il avait un rendez-vous assez important à dix heures et il ne pouvait le manquer, d’autant plus qu’il s’agissait de mettre en place les prochains plans de communication pour la nouvelle année. Et forcément, le responsable de ce service était LA personne qui ne pouvait rater cette réunion.
Cependant, la destinée était parfois une amie cruelle. Et la malchance commença dès le réveil, caractérisé par l’absence de ce dernier. Probablement qu’il décida de ne pas fonctionner mais Nolan n’entendit pas la sonnerie de ce dernier, dormant paisiblement. Ce ne fut que lorsqu’il s’extirpa avec une langueur inhabituelle qu’il percuta très vite, qu’il ne lui restait qu’une demie heure avant le commencement de la réunion.
« Merde, merde, merde ! » Pesta-t-il en se redressant soudainement, parfaitement réveillé. Il était rare qu’il soit en retard. Bien sûr, les pannes de réveil arrivaient souvent. Mais pas aujourd’hui non. Pas ce jour-là.
« T’as pas entendu mon réveil sonner ? » Demanda-t-il au corps endormi se trouvant à côté de lui, mais il n’eut qu’un grognement en guise de réponse. Sa femme se trouvait encore dans les bras de Morphée et n’était pas prête à lui répondre.
Poussant un juron, Nolan se leva de son lit et descendit vers la cuisine où il alluma la machine à café. Il n’avait pas le temps de déjeuner mais le café du matin, c’était l’essentiel de son existence.
Jamais sans son café et sa cigarette. Puis, le brun remonta en direction de la salle de bain où il prit la douche la plus rapide du monde. L’eau fut presque froide mais l’aida à se réveiller. En revanche, il se savait tendu et se précipiter ainsi n’aidait en rien à se calmer. Y compris sous l’eau devenue chaude.
Il se sentait nerveux à l’idée d’arriver en retard et hésiter encore à envoyer un message à un collègue pour prévenir.
Regardant l’horloge se trouvant dans la salle de bain, Nolan comprit qu’il ne restait que vingt cinq minutes avant le début de l’entretien.
Se démenant comme un beau diable, l’australien se sécha rapidement et enfila la tenue élémentaire pour bosser à un poste haut placé au sein de la Mairie. Un costume de marque ayant été fait sur mesure. Nolan ne se refusait jamais rien et il était hors de question, pour lui, de s’habiller au rabais.
Aussi, costume noire, chemise blanche, chaussures cirées, il était impeccable et une fois rasé, parfumé, il se rendit vers la cuisine où il actionna la machine à café, se faisant couler la caféine pour affronter une journée qui commençait déjà mal.
Mais… Parce qu’il y avait un mais. Ce fut sans compter le karma qui se révéla à lui. En prenant son café en main, Nolan fut un peu trop brusque et se le renversa sur sa belle chemise blanche. « Mais c’est pas vrai !! » S’exclama-t-il, plus dépité qu’en colère contre lui-même.
Il restait quinze minutes avant le début de la réunion.
Mais il était hors de question de partir sans être impeccable. Il n’avait pas le choix et remonta en courant tout en s’enlevant sa chemise et en enfilant une nouvelle.
Il était en pétard, tout ceci lui faisait perdre un temps précieux et il il allait devoir bombarder sur la route.
Qu’à cela ne tienne, les vieux et les gosses avaient intérêt à ne pas traverser au moment où il arrivait, Nolan ne comptait pas s’arrêter.
Une fois prêt, il partit et fonça dans sa voiture. Ce fut au moment de mettre le contact qu’il constata que son café n’avait pas été bu.
Une. Journée. Pourrie. Avait-il pensé.
Et il démarra en trombe, sortit de son garage au volant de son petit bijou : une luxueuse Porsche qui accélérait comme un véritable avion de chasse.
Et il sortit du quartier chic dans lequel il vivait avec sa femme, roulant un peu trop vite et priant pour qu’un flic ne le repère pas.
Il restait cinq minutes. Et c’était l’angoisse maintenant. Il était en train de regarder son téléphone (à ne pas reproduire hein) et il la remarqua trop tard.
Enfin… Disons que s’il roulait moins vite et ne regardait pas son portable, il aurait freiné à temps. S’il roulait moins vite et qu’il regardait son portable, il aurait pu en faisant un écart ne pas toucher la voiture qui était en train de s’engager dans une voie non prioritaire pour elle.
Hélas, il la remarqua trop tard, freina comme un damné mais ce fut sans succès. Le choc arriva, moins violent qu’ils s’y attendait parce qu’il avait posé le pied sur la pédale de frein.
Quand il entend il le bruit de la carrosserie qui se plie, Nolan lança une flopée de jurons, ne pensant plus à la réunion mais uniquement à sa voiture, son bijou, son bébé. Et il sortit, avançant vers l’endroit où les deux voitures s’étaient rejointes. « Vous n’avez pas vu le panneau « pas de priorité pour ceux qui arrivent de cette route » ?! » Répondit-il d’un ton sec à l’attention de la femme qui conduisait le véhicule responsable.

@Leah Baumann  

Spoiler:

Sa voiture était bien amochée, notamment sur l’avant droit. Tout le pare choc semblait avoir pris un coup, peut-être la roue aussi mais il n'était pas très sûr. Lui qui était si fier de sa voiture, son bijou adoré, offert par Skylar en Noël 2018 (« petit » cadeau qui avait été grandement apprécié), il était vraiment dégouté.
Et de surcroit, cet accident ne l’aidait à arriver à l’heure pour son rendez-vous. Il ignorait même si la voiture pouvait rouler encore. Celle de la femme aussi avait bien pris et pourtant, le choc n’avait pas été si brutal au point d’en être blessé.
Forcément, il se montra sous un aspect assez agressif, ne cherchant même pas à savoir si la femme était blessée ou non. C’était le cadet de ses soucis.
Et pour l’heure, Nolan ne pensait qu’à son rendez-vous, son bolide… Et visiblement, il allait devoir remplir un constat. Cette perte de temps le mettait dans une colère froide et il ne fut pas tendre d’emblée.
Cependant, elle lui répondit et en guise de réponse, dans un premier temps, Nolan lui jeta un regard noir tout en dégainant son téléphone portable. Il prévoyait d’appeler sa secrétaire pour au moins prévenir et pendant qu’il faisait défiler son répertoire assez rempli, qu’elle-même le questionnait au sujet d’un constat, l’australien lui rétorqua avec hargne « N’essayez pas de me faire porter le chapeau, vous n’étiez pas prioritaire, point barre. L’allure à laquelle je roule, ne vous regarde pas. » Il trouva enfin le numéro et appela aussitôt tout en dévisageant la brune. « Et je ne roulais pas vite. » Ajouta-t-il sur le ton de la parfaite mauvaise foi.
Il roulait bien évidemment trop vite. Et fort heureusement pour lui, ça n’avait pas été un enfant qui traversait brusquement la route sans regarder. D’ordinaire, il anticipait mais avec ce rendez-vous et son retard, Nolan se sentait particulièrement nerveux.
« Je passe un coup de fil et je vous réponds ensuite. N’en profitez pas vous enfuir. » Ajouta-t-il, attendant que sa foutue secrétaire réponde enfin. Il avait un constat dans la boite à gants. Mais pour l’heure, il devait traiter en priorité ce rendez-vous qu'il ne pouvait honorer à temps.
Bien sûr, leurs véhicules gênaient légèrement mais il s’en moquait un peu.
Son souci devait être réglé en priorité, les autres attendraient.
« Ah enfin ! » Aboya-t-il quand sa secrétaire répondit enfin. Il s’empressa bien vite de lui faire passer la commission, ne s’arrêtant de parler que pour l’écouter, sourcils froncés, et fixant les dégâts de sa voiture. Cette vision lui était intolérable. « Pouvez-vous prévenir Monsieur Johannson que j’aurais du retard s’il vous plait… ? J’ai eu un accident et je… Non, ça va je ne suis pas blessé, merci … Mais je dois remplir le constat… Oui… Oui c’est ça… Donc prévenez-les... Merci... A tout à l’heure. » Et il raccrocha, revenant vers la brune.
« Bon, le constat, maintenant… Faisons-vite. Je suis pressé. » Et elle avait intérêt à manier l’art d’écrire rapidement tout en espérant qu’elle n’était pas un docteur parce que lui-même n’était pas foutu de lire les ordonnances que son médecin lui éditait parfois.
Et il alla prendre son constat vierge dans la boite à gants et revint vers la fille. Toutefois, ils furent, très vite, alpagués par un camion qui avait besoin de plus d’espace pour pouvoir tourner. Il est vrai qu’ils gênaient mais Nolan était de mauvaise foi. S’il avait pu le faire, l’australien se serait mis à insulter tout le monde. C’était quelqu’un de nature assez calme. Mais aujourd’hui était un jour bien trop important pour être pris à la légère. « Il a trouvé son permis poids lourd dans une pochette surprise, lui… » Bougonna-t-il encore plus de mauvais poil. Mais il n’avait pas le choix et elle, non plus. Le constat attendrait. Ils devaient se déplacer.
Aussi, Nolan reprit place dans son véhicule, ne la lâchant pas d’une semelle au cas où elle aurait décidé de s’enfuir. Cela arrivait assez souvent et il avait eu de tristes échos à ce sujet par des amis. Malheureusement, il n’était pas au bout de ses peines.
Et ce fut en démarrant pour se garer dans les places vides de la rue d’à côté que Nolan se rendit compte des dégâts de sa voiture. Il y avait un bruit affreux comme quelque chose qui frottait contre la carrosserie, sans parler du fait que son volant avait trinqué puisque la voiture ne roulait même pas droit.
Putain de merde qu'il pesta intérieurement tout en sortant et rejoignant la brune.
« Vous n’y êtes pas allée de main morte… Il va falloir que j’appelle une dépanneuse. » Il était moins agressif dans le ton de sa voix mais il demeurait toujours autant agacé. « Tenez. » Et il lui tendit le constat afin qu’elle commence à le remplir dans un premier temps. « Je pourrais en profiter pour appeler un remorqueur. N’oubliez pas de préciser que vous m’avez coupé la priorité. » Parce qu’il était, bien entendu, hors de question qu’il puisse avoir une quelconque responsabilité dans cet accident.
Elle était responsable, point à la ligne.  

@Leah Baumann

Il avait, visiblement, affaire à une imbécile.
Et ça ne lui plaisait guère, d’autant plus qu’il appréciait peu le ton ironique avec lequel, elle rappela qu’il l’avait heurté et non elle. Mais il se garda de rétorquer et continua de vaquer à ce qu’il y avait de plus important. Prévenir la secrétaire. Et remplir un constat.
Et bouger sa voiture afin de laisser passer ce guignol de camion. Il songeait que sa journée aurait pu commencer d’une meilleure manière. Mais non. Il avait dû traverser une échelle ou bien, il avait croisé le chemin d’un chat noir… Nolan n’en savait rien, il n’était pas superstitieux. Mais pressé… Oh ça oui. Il l’était grandement.
Et il le rappela de manière significative afin que ça rentre bien dans son crâne, qu’ils puissent faire l’administratif, le dépannage et se casser à son rendez-vous. Et surtout ne plus jamais revoir la tronche de cette femme. Parce qu’en plus de lui être rentré dedans, il fallait qu’elle soit aussi une grande gueule, répondant avec un affront qui lui donner envie de noyer des chatons. Ce prince n’avait pas l’habitude qu’on lui réponde ainsi. Et s’il avait l’habitude d’affronter Skylar ou de devoir faire face à une famille intrusive, il fallait reconnaître qu’il n’était pas habitué à ce qu’on lui manque ainsi de respect.  
Il fut piqué au vif lorsqu’elle le traita de « pauvre type égoïste et prétentieux », fronçant les sourcils alors qu’il était en train de chercher sur internet le nom d’un dépanneur se trouvant à proximité. « Moi, égoïste ?! » Lui répondit-il d’une voix hargneuse. Il relevait déjà la tête et l’observait d’un mauvais œil. « Vous ne me connaissez pas, je ne vous connais pas alors je vous interdis de m’insulter de la sorte, ok ?! Ce n’est pas de ma faute si vous aussi, vous avez eu votre permis dans une pochette surprise. Faites comme tout le monde, mettez votre poubelle à la casse et achetez-vous une trottinette électrique.  »
Il était toujours autant de mauvaise foi sur sa propre conduite mais il était incapable d’admettre qu’il avait commis une faute en roulant trop vite. Nolan avait, trop souvent, une conduite brusque et sportive, Skylar le lui avait déjà dit mais à ses yeux, il était persuadé de bien conduire ayant toujours appris à conduire ainsi avec son père ou son frère. Ça et l’amour des voitures puissantes, c’était de famille. Il n’y avait que Rose, la plus jeune de ses sœurs qui était convaincue que rouler à vélo était bien mieux pour l’environnement.
Il valait mieux donc ne jamais monter en voiture avec lui, si la personne avait le mal des transports.
« C’est bien ma veine… » Ajouta Nolan tout en continuant sa recherche Google. Il avait cessé de regarder les dégâts de sa voiture et également la brune. Sa seule vue lui donnait des envies de violence qu’il préférait se centrer sur comment arriver au plus vite au bureau. Quand il eut trouvé le numéro, il rappela à sa compagne de mauvaise fortune qu’elle lui avait coupé la priorité.
Sauf que bien entendu, il fallait qu’elle l’ouvre encore. Nolan n’était pas prêt d’avoir un dépanneur en ligne et encore moins de partir de suite. Au contraire, elle se moquait ouvertement de lui, tenant le stylo pour écrire le constat entre ses mains.
Elle l’insupportait et ça le mettait dans une rage sourde.
« Et comment allez-vous prouver que je roulais vite ? Vous avez un radar dans votre voiture ? Vous êtes flic ? Non, je ne crois pas. Alors, vous ferez mieux d’écrire la vérité. Dans tous les cas, ils ne vous croiront pas. En attendant, vous aviez un panneau qui ne vous rendait pas prioritaire. Les assurances ne retiendront que ça ! » Il alla vers la jeune femme, rompant ainsi la distance et lui arracha le constat des mains sans aucune forme de cérémonie ou de politesse. Puis plaquant le feuillet à plusieurs volets sur le capot lustré et brillant de sa Porsche, Nolan sortit un stylo, aussi griffé et couteux que sa voiture, de sa poche intérieur et regarda  les cases à cocher. « Voilà, je coche pour vous « refus de priorité » et pour moi, dans les observations « Je… Roulais… à …. Allure…. Normale… » Et il laissa le constat, observant la femme avec un air satisfait et teinté d’une ironie à en décocher des gifles et lui glissant même un sourire effronté. « Maintenant, vous pouvez remplir votre partie, la signer pendant que j’appelle la dépanneuse. » Il était prêt à enclencher l’appel quand il jugea bon d’user de la menace. « Et n’écrivez pas n’importe quoi. Je n’hésiterai pas à vous coller un procès au cul. » Et avec un frère avocat, Nolan savait de quoi il parlait.
Il était rare qu’il s’avoue vaincu.
Elle allait payer son insolence.

@Leah Baumann  

Elle le mettait dans une rage sourde, il ne savait pas ce qui l’agaçait le plus : le fait qu’elle ne sache pas conduire ou qu’elle soit aussi insolente.
Certes il n’avait pas été agréable de prime abord, il avait été agressif mais quand bien même, il y avait de quoi l’être. Sa voiture était cassée et non roulante. Il se retrouvait à pied et sans aucun moyen de locomotion pour aller au travail.
Et le pire dans tout cela, c’est qu’il réalisait que si aucune voiture de remplacement ou de taxi, n’étaient trouvés, il lui faudrait utiliser… Non … Il ne pouvait y croire… Il en avait déjà des palpitations à l’idée de se voir… monter dans … un bus.
C’était au dessus de ses forces, il avait trop pris l’habitude d’être libre d’aller là où il le souhaitait, en sécurité dans sa voiture de luxe. Et savoir qu’il allait, sans doute, devoir se trouver au milieu du tiers monde, lui était tout bonnement intolérable.
Enough is enough ! Il n’était pas d’un naturel violent mais il admettait que cette nana lui faisait péter quelques câbles.
Pourtant, elle avait raison sous certains points. Notamment quand elle le qualifiait d’égoïste. Il reconnaissait, en son for intérieur, qu’il s’était surtout emporté, avait constaté ses dégâts mais n’avait pas cherché à savoir si elle était blessée. Bien sûr quand elle était sortie, il n’avait pas vu trace de sang nulle part et dès lors qu’elle avait ouvert la bouche pour lui répondre, Nolan en avait déduit qu’elle allait très bien.
Un peu trop même.
Et c’était terriblement agaçant. D’où le fait de la menacer d’un procès si elle n’obtempérait pas. Ce genre de phrases était typique de ceux qui avaient les moyens de se payer un avocat.
Et même si, au fond de lui, ça l’emmerdait royalement de devoir faire appel aux services de son frère – qui allait en parler jusqu’à la fin des temps – Nolan reconnaissait qu’il n’avait pas le choix. De toute façon, il croyait maîtriser la situation.
Il avait déjà rectifié le constat en inscrivant ce qu’il pensait être juste avant qu’elle ne marque n’importe quoi. Toute personne normalement constituée se serait tut, aurait accepté la faute et la signature du constat.
Mais Nolan découvrait Leah. Et s’il avait l’habitude de se confronter à sa femme, elle, c’était une autre paire de manches.
D’ailleurs, il n’avait toujours pas fait appel à un dépanneur et il n’arrivait pas à le faire parce qu’à chaque fois, il reposait le téléphone dans sa poche, occupé à essayer de rester calme et de ne pas péter de câble.
« Mais n’importe quoi !!! Je ne vous ai pas menacée ! » S’exclama-t-il la mine choquée. « Vous coller un procès, c’est une manière de vous faire comprendre que quoi qu’il arrive, j’aurais raison. Je ne vous ai pas menacée de vous casser la gueule quand même ! » La voix de Nolan en était même agressive. Il fallait dire qu’avec le scandale Harvey Winstein, les hommes avaient tout intérêt à rester docile et à ne pas trop se la jouer avec la gente féminine. Surtout si elles émettaient l’idée d’un harcèlement.
Nolan, bien que l’entrevue était déplaisante, respectait bien trop les femmes pour se voir avoir une telle disgrâce sur lui. Néanmoins, il commençait à reconnaître qu’il était, un poil, sur les nerfs. Toutefois, elle se foutait de sa gueule et il ne pouvait pas laisser passer tout ça. Et il revint vers le capot de sa voiture, sortit son stylo et se rapprocha de la femme. Puisqu’elle en était à remplir SA partie à lui, autant faire la même chose. « Et puisque je vois que Madame en est là… »
Il remarqua assez vite que chacun, en bon élève, avait déjà rempli la partie des adresses, des assureurs mais il restait juste à faire le croquis, les cases et les observations (sa partie à lui était presque illisible). Il était un peu trop près de la jeune femme et ça aussi, c’était un problème. Nolan se mit à écrire « Je … Suis… Agressive… Et j’ai… Besoin … de lunettes… » POOOOWWWW POOOOWWW POWWWW, il avait véritablement l’impression d’avoir jeté le coup de grâce.
Ce fut sans compter une grand-mère qui s’approcha d’eux, promenant un yorkshire affublé d’un nœud rose dégueulasse. Il songea à ses deux chiens et notamment … Le bouledogue en se promettant de ne jamais laisser Skylar avoir aussi peu de goût. « Vous rouliez très vite, Monsieur ! J’ai vu la scène de mes propres yeux ! » Il eut soudain très envie de raccourcir sa fin de vie à celle-là. Nolan lui lança un regard meurtrier et lui rétorqua d’une voix sèche. « Je vous ai demandé votre avis ? Non alors, allez dans votre dispensaire pour vieux !! » Il ignora la mine outrée de la vieille, s’occupa de cocher plein de cases pour la fille. Cette Leah Baumann. Même si ça voulait rien dire parce qu’à force, tout le constat détonait. Il avait remarqué le croquis qu’elle avait dessiné et maugréa « Je vois qu’on était une chef en Arts Plastiques… » Murmura d’une voix que la colère faisait légèrement trembler.

@Leah Baumann

Parce qu’en plus de cette pimbêche, il fallait maintenant qu’il se tape la vieille avec son maudit clébard. Vraiment, c’était une journée de merde comme il n’en avait jamais connu auparavant.
Il ne comprenait pas pourquoi le destin s’acharnait autant sur lui, pourquoi aujourd’hui, pourquoi maintenant. POURQUOI CE JOUR-LA ?
Non, vraiment… Nolan ne comprenait pas. Et il se retenait d’en tuer un bien que l’envie ne manquait pas. Il se retrouvait, ainsi, complétement piégé puisqu’en l’occurrence, la vieille dame n’allait pas dans son sens et le fixer d’un œil mauvais. Sans doute une ancienne féministe ou alors une mamie qui avait été plaqué lors de son soixante anniversaire de mariage par René, époux fidèle mais désireux de vivre une seconde jeunesse.
Dans tous les cas, il était sacrément dans la merde, ne savait pas trop comment il allait s’en sortir, à moins d’émettre des excuses qu’il n’était pas prêt de prononcer. Trop de fierté voyons ! Au lieu de cela, il continuait à s’enfoncer, réalisant que si tout avait été fait sur le ton de la gentillesse, le constat aurait été signé depuis longtemps, elle aura probablement reconnu ses torts et tout se serait réglé comme sur des roulettes.
Mais non.
Non et non. C’était bien trop simple. Et rien ne se règlerait dans la simplicité. Elle continuait de manier l’ironie et de se foutre de lui autant qu’il la considérait avec une condescendance terrible. « La réalité prouve le contraire… » Lui dit-il d’une voix méprisante quand elle lui confirma qu’à l’école, elle était première de sa classe. De toute façon, quand bien même, c’était le cas, il n’était pas prêt à la croire, ni même à en être impressionné.
En vérité, cette idiote était juste une idiote doublée d’un imbécile qui ne regardait pas les panneaux. Peu importe qu’il roulait vite, il avait des réflexes en voiture et ne se laissait pas intimider de la sorte.
Cependant, il était en situation de faiblesse face à ces deux femmes qui s’unissaient pour le faire chuter. La vieille s’approcha, invitée par la coupable l’incitant à remplir ses coordonnées afin de témoigner que LUI était un danger public au volant. Il ignorait le regard noir de la grand-mère et ajouta d’une voix froide. « Donc si je comprends bien. Vous allez raconter n’importe quoi, histoire de retourner la situation et prouver, par des mensonges, que je suis responsable ! Parfait. Amusez-vous bien, bande de bahamuts. » Il s’éloigna de quelques pas, dégainant son téléphone.
Il avait des problèmes urgents et de toute façon, Nolan était en train de réaliser que cette histoire n’allait pas le sauver, alors il songeait à la possibilité de pouvoir s’en aller. Ici, il n’en tirerait rien de bon.
Quand tout à coup… « Céleste ?! » Nolan se tourna, combiné à l’oreille et attendant que le dépanneur réponde et vit un papi, traverser la rue, tenant en laisse un Yorkshire avec un nœud bleu, qui jappait comme un fou furieux en direction du Yorkshire au nœud rose que possédait la vieille dame.
Nolan haussa un sourcil pendant que le témoin releva la tête et s’écria soudain. « Jack ?! Oh quel plaisir de te voir !! » Elle délaissa le constat raturé, stylo en main et planta la conductrice afin de saluer son ami. La scène fit sourire Nolan qui était toujours au téléphone. Il entreprit même d’adresser à l’autre tâche un sourire des plus moqueurs. Elle n’était pas prête d’avoir son témoignage…
« Comment vas-tu Céleste ? Et Miss Cutie Pie ? » S’exclama le vieil homme d’une voix un peu forte, typique des personnes un peu dure d’oreille, au même moment où quelqu’un décrocha enfin au téléphone.
Nolan put expliquer qu’il avait eu un accident, que sa voiture était morte. Il donna l’adresse de où il se trouvait et le dépanneur lui confirma arriver d’ici une bonne dizaine de minutes. Nolan se crut obligé d’élever la voix tant les vieux criaient à ses côtés pour s’entendre.
C’était insupportable d’autant plus qu’il saisissait des bribes de conversations avec des mots telles que « cholestérol, prostate, fuites urinaires, docteur, vétérinaire, inspecteur Derrick », que des trucs de vieux et bien chiants… et il ne put s’empêcher d’afficher une mine dégoutée et se reporta vers la brune.
« Alors ça avance ? » Lança Nolan, d’une voix moqueuse, en s’approchant de la conductrice, toujours en attente du témoin qui était occupé à raconter sa vie médicale avec beaucoup de cœur, ne remarquant pas les chiens qui se grognaient dessus, prêts à se bouffer.  « Ceci dit… » Et Nolan dégaina son stylo afin de revenir vers le constat et à la case témoin, il ajouta en gros, en travers la mention « aucun témoin ». « Voilà, comme ça, c’est mieux. »
Et il s’en sentait extrêmement satisfait.
@Leah Baumann  

Le constat ne ressemblait plus à grand-chose. Céleste avait du diabète et Jack énumérait la liste des médicaments qu’il prenait mais qui lui donnait pas mal d’incontinence…
Et avec tout ça, Nolan avait envie de fuir. De s’en aller, de se rendre à son travail et de pouvoir enfin se lancer dans cette journée folle. Il fallait croire que tous les démons s’étaient réunis en ce jour afin de lui rendre sa journée insupportable.
Et cette fille… Cette Leah Baumann, il avait envie de lui faire sauter le dentier pour tout l’affront dont elle faisait preuve à son égard.
La situation n’avançait pas, en dehors du fait qu’il avait rectifié la case témoin, la rendant caduque. Il se sentait bien mieux, puis de toute manière, Céleste semblait avoir complètement zappé la brune. Elle était bien trop occupée à raconter tous les déboires de sa fin de vie, ce qui le faisait grandement sourire. Et il ne manquait pas de l’afficher sur son visage, de le faire ressentir par le poids de ses mots.
Elle ne pouvait que s’en prendre à elle-même tant il détestait ce genre de situation. Rappelons que Nolan était persuadé d’être blanc comme neige, et que toute la faute revenait donc à cette écervelée.
Cependant, il reconnaissait une chose : elle était incroyablement têtue. C’était à un point qu’il la soupçonnait d’avoir des liens familiaux avec sa femme. Et surtout, elle ne capitulait pas. Et si Nolan avait, par expérience, l’habitude d’abdiquer pour ne pas avoir de conflits avec Skylar… avec la brune il ne se gênait pas pour se montrer encore plus gougnafier qu’elle.
Mais c’était mal juger la bête qui s’empara encore du style et ratura les observations la concernant, ajoutant qu’il était agressif et qu’il refusait de laisser le témoin remplir le constat.
« Voyez votre témoin par vous-même, imbécile. » Lui rétorqua le brun d’une voix froide et désignant Céleste toujours en grande conversation avec son ami, Jack.
Dans tous les cas, le constat fut séparé en deux, non sans avoir un nombre imposant de ratures et d’un trou dans le feuillet causé par la prose enflammée de cette folle. Elle le lui donna non sans le poser avec force contre son torse et en l’envoyant chier. « Et bien sûr.. JE suis agressif, hein Baumann !? » Sa voix vibrait d’une rage sourde et lui aussi pouvait l’appeler par son nom de famille. Il avait se gêner avec cette pouilleuse bien sûr ! « C’est l’hôpital qui se fout de la charité et allez vous faire voir également ! » Il garda le constat entre ses doigts – le pouce et l’index – comme s’il était en possession d’un objet infecté par le Coronavirus.
Pile à ce moment-là, le dépanneur arriva, signifiant la fin de cette entrevue déplaisante. Ce dernier s’adressa à Nolan et lui demanda quelle voiture il fallait remorquer. Le brun lui montra sa magnifique Porsche à l’avant complètement défoncé. « oh putain, vous vous êtes pas loupé, Monsieur ! » S’exclama le gars d’une voix forte, ce qui fit réagir le directeur des communications. « Rectification. Cette… Imb… Personne ne m’a pas loupée. » Grogna Nolan en désignant Leah d’un signe de la tête.
Pendant ce temps Céleste et Jack continuaient toujours de parler tranquillement, évoquant les soucis de dentier.
Ce fut à ce moment-là que Nolan se décida à prendre congé de tout ce beau monde. Il n’allait pas regarder la dépanneuse partir avec sa voiture toute cabossée et sentir son cœur se briser face à cette vision d’horreur.. Il avait fort à faire : comme arriver au travail, aller voir son assurance ensuite. Et le réparateur pour qu’il lui remette en état son bolide.
Il plia soigneusement puis rangea le constat troué, raturé dans la poche intérieure de sa veste et entrepris d’appeler un taxi, non sans jeter un regard dédaigneux sur la fille. « Je ne vous souhaite pas une bonne journée. » Et sans un autre mot, sans se retourner à ce qu’elle répondrait – sans aucun doute – Nolan préféra s’en aller de cette route, se rendre vers une station de taxi la plus proche et espérer trouver quelqu’un de libre assez rapidement pour l’amener à son rendez-vous. Il était hors de question qu’il se tape le chemin à pied. Il n’en demeurait pas moins en rogne : sa journée était foutue.

@Leah Baumann