J’allais suivre scrupuleusement ce qu’on m’avait indiqué en arrivant ici : aller s’asseoir à la table numéro 1 et attendre que quelqu’un vienne s’installer en face de moi. Depuis le temps que j’entendais parler de speed dating et toutes ces soirées de célibataires auxquelles se rendaient Nicolas, je n’avais pourtant jamais franchi le pas. Je trouvais toujours ça d’un cliché sans nom et je pensais que c’était ennuyant à mourir, et pourtant, me voilà à présent assise à cette table, regardant la salle se remplir petit à petit. Il y avait étonnement plus de monde que ce que j’avais pensé et je commençais sérieusement à me demander pourquoi j’avais accepté la proposition de Loan quand elle a voulu m’inscrire ici. Elle était persuadée que ça allait m’aider à réellement tourner la page Andy de mon livre. Moi qui pensait qu’elle était déjà tournée, il semblerait qu’elle ne soit pas vraiment du même avis et ses arguments m’avaient laissé hésitante aussi : un bracelet qui lui appartient est toujours posé sur mon bureau et n’a pas bougé d’un centimètre depuis  notre séparation, les photos qu’il a pris de mois qui sont posées sur ma table de nuit, le restaurant mexicain où j’ai emmené Loan en lui expliquant que c’était ici que tout avait commencé avec le latino et lui racontant pour la quatrième fois cette fameuse soirée et bien d’autres encore. Ok miss, je plaidais coupable ! et pourtant, j’étais bien décidée à passer à autre chose !
Tout le monde semble être à son poste, autant d’hommes que de femmes se retrouvent assis à leurs tables devant une chaise vide. Il fallait attendre le signal d’alarme si j’avais bien compris pour lancer les hostilités. Une sonnerie signalera que toutes les personnes qui attendent debout de l’autre côté de la pièce devront aller s’installer sur ces chaises vides… C’était légèrement gênant, puisque nous avions le temps de nous regarder et nous analyser pendant ce temps. Je jugeais dans un premier temps les coupes de cheveux, que ce soit pour un homme ou pour une femme, il fallait avoir les cheveux propres, chose implacable pour moi, je m’occuperai de regarder l’état des ongles ensuite, bien trop loin pour en faire mon affaire, mais de belles mains et des ongles bien entretenus c’était aussi la base !
« Mesdames Messieurs, j’annonce ce speed dating ouvert ! » qu’est ce que c’est d’un serieux, protocolaire… mais bon, puisque j’étais là, j’allais jouer le jeu. Une vague humaine arriva vers ce côté de la salle, comme si chacun savait pertinemment où il devait aller, je scrutais chaque personne qui se dirigeait vers moi et je priais pour que la femme aux cheveux rouges et bleus ne viennent jamais s’asseoir en face de moi. Doigts croisés sous la table, j’allais fermés les yeux pour appuyer mon vœux lorsqu'elle passa son chemin une fois mon pupitre passé. Ouf ! et alors que je regarde dans la mauvaise direction, je sens la chaise se reculer et une présence en face de moi. Je relève les yeux et me voilà face à un homme plus âgé que moi mais MON DIEU, qu’est ce qu’il est sexy. Ok, souffle Noa. « Salut ! » sourire à peine forcé, j’suis surtout très gênée ! « Je suis Noa et j’ai a peu prêt aucune idée de ce qu’il va se passer ensuite ! Enchantée, en tout cas ! » et je suppose que je suis censée attendre qu’il se présente à son tour. « C’est marrant, les questionnaires qu’on doit remplir à la fin… » mes yeux se baissent doucement vers la feuille qui se trouve au coin de ma table : physique, charisme, humour et centre d’intérêt… suis-je donc censée faire des blagues pendant l’entrevue ?  « Je noterai bien 10/10 pour le charisme, mais parfois, il suffit d’ouvrir la bouche pour qu’un petit charme s’envole aussitôt. » et si j’le laissais en placer une ?

Je ne sais pas trop ce que je fous là, mais je trouve ce concept plutôt marrant : apparemment, sept minutes suffisent pour savoir si une personne peut nous correspondre. Correspondre physiquement, je n'en doute pas une seule seconde, mais au point de savoir si deux êtres sont compatibles émotionnelle ment, en si peu de temps, je n'y crois pas trop. J'espère que mon jugement ne se voit pas à travers mes expressions faciales, mais mon haussement de sourcil agrémenté de ce sourire moqueur face aux différentes personnes présentes ce soir-là ne doivent pas paraître inaperçus. Ceux qui sont là en recherche du grand Amour sont bien trop visibles par nous autres qui ne sommes pas tout à fait sûrs de la raison de notre présence ici, et j'espère sincèrement ne pas tomber sur cette grande dame aux cheveux bleus qui porte un sac poubelle en guise de robe. Quoi que, ca peut être drôle. Les organisateurs s'affolent un peu en coulisse, et cela m'étire un autre sourire amusé. On nous a distribué un plan de la salle pour nous faire patienter pendant qu'ils fignolent les quelques derniers détails, ainsi qu'un questionnaire à rendre à la fin de chaque rencontre. Que d'encombrement pour simplement repartir avec quelqu'un à son bras, c'est bien plus facile d'entrer dans un bar, de choisir sa cible avant d'en ressortir avec.

La sonnerie annonce le début de la première rencontre. Allez, c'est parti. cet aspect organisationnel m'a un peu foutu la pression, alors que je n'ai habituellement aucun mal à obtenir ce que je souhaite dans ce domaine. J'inspire un bon coup, gratte machinalement ma barbe en guise de réassurance, et me décide à suivre la foule qui se dirige vers l'autre salle pour rejoindre ma table. C'est une brune aux yeux verts qui m'attend à la table 1. Son visage me paraît doux, bien que relativement ferme ? Stressée ? Elle scrute chaque personne qui passe à côté d'elle, et je la vois supplier intérieurement pour que la dame aux cheveux bleus et rouges ne s'arrête pas à sa table. Sa réaction m'arrache un petit rire discret, ça nous fera au moins un point commun sur lequel rebondir. Je remarque rapidement ses dents blanches dévoilées par ses lèvres retroussées en guise de sourire gêné, presque forcé, lorsqu'elle comprend que je suis le premier qu'elle rencontre. Son regard, bien que timide, m'intrigue. Première impression : elle est mignonne, pas mal, vraiment pas mal en fait, plutôt à mon goût, oh oui. Elle m'accueille en parlant vite, et beaucoup, elle essaie déjà de combler le vide alors que ça vient de commencer. « Je suis Noa et j’ai a peu prêt aucune idée de ce qu’il va se passer ensuite ! Enchantée, en tout cas ! » Je ris doucement, par politesse, et surtout pour essayer de la mettre en confiance. Je me prépare à me présenter à mon tour, mais elle m'interrompt rapidement « C’est marrant, les questionnaires qu’on doit remplir à la fin… » Ses yeux lâchent les miens pour se concentrer sur la feuille « Je noterai bien 10/10 pour le charisme, mais parfois, il suffit d’ouvrir la bouche pour qu’un petit charme s’envole aussitôt. » Oh, elle me trouve attirant. Ça ne m'étonne pas, mais je ne pensais pas qu'elle le sortirait aussi rapidement sous le stress. Elle me laisse finalement parler, et de ma voix grave et taquine, je rebondis sur ce qu'elle me dit « Espérons que le charme ne s'envole pas alors. Gregory, enchanté. » Mes iris ne quittent pas les siens, un léger sourire étant venu se tracer sur mes lèvres. La séduction commence déjà, et ma main se tend vers elle pour lui proposer un poignée de main. « 10/10 pour le charisme alors ? Tu aurais mis autant pour la dame aux cheveux bleus et rouges ? », que je dis en montrant du menton la femme qui s'est assise deux tables plus loin. Je lance une première plaisanterie, tâte le terrain pour savoir si elle est plutôt premier degré ou plutôt deconnade.

@Noa Jacobs

J’ignorai où cette soirée allait m’emmener. Loan était persuadé que j’allais finir par repartir avec quelqu’un pour un soir ou pour la vie. Elle connaissait ma capacité à avoir des coups de foudre pour n’importe qui mais elle savait aussi bien que moi que ce choc électrique ne durait aussi qu’un temps. Que jusqu’à présent, mes relations dites sérieuses ont toutes démarré de la pire façon possible : que ce soit par charité pour Swann par exemple ou après de longs mois à se déchirer dans une colocation avec Andy, rien n’était prédis à ce que ça se passe bien entre nous et que je finisse par ouvrir réellement mon cœur. Et pourtant. Alors quand on me parle de coup de foudre, j’ai tendance à me méfier. Quand on me dit qu’en quelques minutes il est possible de trouver son âme sœur, là encore, je me méfie. Mais pour passer une bonne soirée, je dis oui. J’espère qu’elle le sera.
Il est devant moi, le premier avec qui j’allais échanger quelques mots. Nous n’étions que des inconnus l’un pour l’autre et il aurait tout à fait raison de prendre peur en voyant ma réaction lorsqu’il s’installe en face de moi. Je bafouille, je parle bien trop vite et mes joues pourraient virer doucement au rose. J’espère qu’il ne m’en tiendra pas rigueur car cet homme qui se présente comment étant Gregory pourrait faire partie de ceux qui justement, provoque une onde électrique dans mon corps avec un simple regard. Et quand je dis 10/10 sur le charisme, je n’exagère pas. J’aurai pu lui mettre des points bonus. Moi aussi, j’espérais que le charme ne s’envole pas à vrai dire. « 10/10 pour le charisme alors ? Tu aurais mis autant pour la dame aux cheveux bleus et rouges ? » bien vu, je souris à cette remarque, je n’étais pas la seule à l’avoir vu. « J’ai bien cru qu’elle allait s’assoir face à moi… j’aurai sans doute passé le moment le plus long de ma vie. Sept minutes… le temps peut paraitre relatif en fonction des circonstance… » je lui agrippe enfin la main et ce premier contact me ferait presque frissonner. Qu’est-ce qu’il peut bien avoir de si spécial. « Je sais pas réellement par quoi commencer… c’est ta première fois ? » il doit bien y avoir des habitués des speed dating dans la salle, c’est sûr. « Je suis sûre que le brun à notre gauche est un habitué. Il a l’air bien trop à l’aise et on dirait qu’il est chez lui ici ! » j’me détends, doucement. « L’idée c’est peut être de commencer par se présenter… j’ai 36 ans. » bientôt 37… mon dieu. « Je suis directrice de l’association Beauregard… » je tente de voir dans son regard s’il sait de quoi il s’agit et en même temps, je me demande si c’est pas un peu prétentieux de se présenter directement comme directrice… je sais toujours pas comment me positionner face à ça !

Un premier vrai sourire vient éclairer son visage suite à ma remarque sur la femme aux cheveux bleus. Il est différent du sourire poli de façade de quand elle m’a accueilli, et je préfère largement celui qu’elle vient de m’offrir. Mes lippes s’étirent à leur tour, et ses traits à elle se détendent un peu. « J’ai bien cru qu’elle allait s’assoir face à moi… j’aurai sans doute passé le moment le plus long de ma vie. Sept minutes… le temps peut paraitre relatif en fonction des circonstance… » Elle est plutôt dans la team second degré, ça me rassure. Un petit rire s’échappe de ma gorge avant qu’elle ne se saisisse de ma main, enfin, qu’elle s’y agrippe plutôt. Sa poigne est ferme, bien qu’un peu moite et tremblotante. Sa main dans la mienne me procure une sensation étrange, comme si cette connexion semblait naturelle et pourtant si déroutante. Une brève expression d’un Gregory déstabilisé traverse mon faciès, mais je me raccroche à sa réponse. « Sept minutes de challenge durant lesquelles il faut tout faire pour ne pas garder ton attention focalisée sur sa robe sac poubelle et ses cheveux aux couleurs de la France, ça peut être drôle non ? » que je sors un peu trop fort. J’ouvre grand mes yeux, j’espère qu’elle ne m’a pas entendu. « Elle regarde vers nous ? Dis moi qu’elle ne regarde pas vers nous et que j’ai pas parlé trop fort » Je prends une mine faussement affolée, mais en vérité je trouverais la situation d’autant plus drôle si ma voix avait porté jusqu’à sa table.

Je m’assois enfin face à mon date de sept minutes, et elle entame la conversation. « Je sais pas réellement par quoi commencer… c’est ta première fois ? » Je ne sais pas trop quoi répondre, je ne suis pas fier d’être là, mais jouer les machos ne me rapporterait aucun point. « Je suis sûre que le brun à notre gauche est un habitué. Il a l’air bien trop à l’aise et on dirait qu’il est chez lui ici ! » Sourire en coin, je tourne la tête sur ma gauche. Elle me fait signe que c’est en fait vers sa gauche. Petit rire lâché, à nouveau. On dirait des adolescents qui gloussent, mais je me sens autorisé à le faire avec elle. « Y’a même son nom inscrit sur sa chaise j’suis sûr. » Mes incisives viennent emprisonner ma lèvre inférieure, un air moqueur fixé sur mon visage. Je détourne à nouveau mon attention pour la focaliser sur Noa. « Yup, c’est ma première fois. Toi aussi, je suppose ? » Elle acquiesce avant d’enchaîner sur les réelles présentations, les banalités en tout genre. « L’idée c’est peut être de commencer par se présenter… j’ai 36 ans. Je suis directrice de l’association Beauregard…» Je ne sais pas si elle a terminé sa phrase ou pas, mais elle me fixe. J’en déduis que… C’est à mon tour de parler ? Je souris, nerveusement. J’évite la question de l’âge, elle doit se douter que je suis plus âgé qu’elle de toute façon. « L’association Beauregard ? J’en ai entendu parler oui, c’est l’association pour les personnes atteintes du cancer non ? » Je ne suis pas très sûr de moi, mais je tente tout de même. J’ajoute, surpris et admiratif à la fois : « Directrice alors ? T’es plutôt jeune pour ce poste ! » Le parcours de Noa m’intrigue. « Comment ça se fait ? » Je m'intéresse réellement à elle, à ce petit bout de femme qui semble timide en l'apparence mais qui a déjà tout d'une grande dame.

@Noa Jacobs

« Sept minutes de challenge durant lesquelles il faut tout faire pour ne pas garder ton attention focalisée sur sa robe sac poubelle et ses cheveux aux couleurs de la France, ça peut être drôle non ? » en vrai, il sait pas, mais j’suis bien capable de faire abstraction d’elle si c’est pour porter mon attention sur lui, parce qu’ai aucun problème à poser mes yeux sur son visage, à regarder un peu plus bas s’il le faut même. Ce mec est juste un dieu vivant et si j’dois faire semblant de pas me laisser distraire par une nana baillé d’un sac poubelle, en étant obligé de ne regarder que lui, y a pas d’problème, challenge accepted. « Elle regarde vers nous ? Dis moi qu’elle ne regarde pas vers nous et que j’ai pas parlé trop fort » je tourne doucement la tête, j’ai pas forcément l’impression qu’elle ai grillé quoi que ce soit… « J’crois que si… elle a pas l’air contente… Merde ! elle arrive ! » je tourne la tête, comme si de rien n’était mais j’éclate surtout de rire juste là. « Nan, elle a rien capté ! » c’était tentant et j’attends sa réaction pour voir s’il m’en tien rigueur ou pas. Mais je reprends mon sérieux. « Promis, j’vais rester concentrer sur toi… » est-ce que j’suis pas déjà entrain de passer la deuxième vitesse là ?
Il me met à l’aise, je sais pas dire comment il peut autant me détendre, autant m’apaiser et me faire profiter de cet instant, mais c’est magique et petit à petit, je sens ma tension redescendre, même si mon cœur bat toujours aussi vite lui et que j’suis sûre que ça s’voit sur mes tempes. Et je sais pas depuis combien de temps il est déjà là mais j’crois que ces 7 minutes vont passer à une vitesse folle et que j’regretterai de pas poursuivre cette conversation ensuite.
Il me confirme que c’est sa première fois, alors dans ce cas, on sera deux. « Une vraie noob ! » tellement noob que j’pourrai faire semblant de pas entendre la sonnette lorsqu’elle avertira qu’il est temps de changer de partenaire. Tellement noob que j’pourrais le suivre et changer de table avec lui pour pas qu’on s’arrête là. Mais avant de poursuivre, ce serait quand même bien de poser les bases, de se présenter. J’commence, j’lui laisse champ libre ensuite. « L’association Beauregard ? J’en ai entendu parler oui, c’est l’association pour les personnes atteintes du cancer non ? » et j’en ai presque les yeux qui brillent qu’il sache de quoi il s’agit ,qu’il en ai déjà entendu parlé, alors mon sourire s’étend sur mon visage et je hoche la tête pour confirmer. « Directrice alors ? T’es plutôt jeune pour ce poste ! » je me redresse sur ma chaise, pas si jeune que ça quand même ! « Comment ça se fait ? » j’vais éviter d’expliquer en détail comment et pourquoi j’étais arrivée à l’association, pourquoi j’avais quitté mon ancien taf surtout. Pourquoi James avait eu réellement envie de me confier les reines de l’association, comment il avait peut être eu pitié de moi aussi. Comment mon passage en prison il y a un an et demi m’a également permis d’avoir cette place et comment j’en reviens toujours pas d’être là aujourd’hui. « Une belle opportunité. L’association s’est étendue, l’ancien directeur à Brisbane a eu des responsabilités plus importante, il a fallu laisser sa place… il m’a fait confiance. » ca suffira pour le moment. « Et toi, tu fais quoi alors ? » qu’il parle aussi de lui, qu’est ce qui se cache derrière ce regard si mystérieux Greg ? si j’peux me permettre de l’appeler Greg.

Elle s'amuse avec moi, se prête au jeu. Son regard est pétillant et son sourire sincère, elle est réceptive et attrape les perches que je lui tends. « J’crois que si… elle a pas l’air contente… Merde ! elle arrive ! » J'inspire exagérément de façon à ce qu'on entende l'air rentrer dans mes poumons, la bouche entrouverte et les yeux grands ouverts sous mes sourcils relevés. Mon expression faussement affolée s'efface rapidement pour laisser un large sourire apparaître sur mon visage quand elle m'annonce qu'elle se foutait juste de moi. Je sais pas comment je me serais sorti de cette situation si cette dame aux cheveux bleus était réellement venue à notre rencontre, j'aurai certainement balbutié un 'excusez-moi madame, je vous trouve très belle dans cette tenue adaptée pour la soirée, ne tenez pas compte de ma remarque que j'ai sortie pour impression la jolie brune aux yeux verts qui me fait face' de mon air le plus sérieux, un regard neutre et poli. « Promis, j’vais rester concentrer sur toi… » Oh, du genre entreprenante ? « Oh pas la peine de faire celle qui aura du mal pour ça, je sais que tu n'as d'yeux que pour moi. » J'ose sortir cette phrase bateau, et je lui fais une danse de sourcils, lippes étirées en un sourire taquin, pour qu'elle comprenne que je plaisante.

La conversation débute réellement quand elle me parle d'elle, et je pense que ma réponse sur l'association est juste au vu de sa réaction. Elle confirme d'ailleurs d'un sourire et d'un mouvement de tête, avant de répondre à mes questions. « Une belle opportunité. L’association s’est étendue, l’ancien directeur à Brisbane a eu des responsabilités plus importante, il a fallu laisser sa place… il m’a fait confiance. » Elle reste volontairement vague, elle aurait très bien pu expliquer comment elle avait connu cette association, l'importance que cela prend dans sa vie, la raison pour laquelle c'est à elle que l'ancien directeur a cédé sa place. Noa aurait pu me dire quelque chose de plus personnel, son histoire à elle, mais elle préfère rester dans le flou. Bien que ma curiosité me démange, je la ravale pour ne pas poser davantage de questions. En sept minutes, je n'ai aucune raison de vouloir la braquer, ou de les perdre sur des tentatives pour découvrir ce qu'il y a vraiment derrière, sans qu'elle ne veuille m'en parler d'elle-même. Je me contente de rebondir sans l'interroger sur son passé : « C'est top ça ! J'espère que tu t'y plais au moins. Tu fais ça à plein temps ? » Je reste raisonné dans ma question, elle m'en dira plus quand elle le voudra.

« Et toi, tu fais quoi alors ? » Ma main se porte machinalement vers ma barbe comme à chaque fois quand je suis gêné ou déstabilisé. Je ne sais pas si elle fuira quand elle saura que je suis lieutenant, ou si c'est le genre de nana à fantasmer sur les uniformes. Je n'ai pas pour habitude de dévoiler cette part de moi quand je ne suis pas certain de connaître la réaction de mes partenaires, et je décide de tâter le terrain. « À ton avis, qu'est ce que je fais de mes journées ? » Mes yeux plongés dans les siens, je sens qu'elle cherche à découvrir la vérité. Ce soir, mon métier et le potentiel lien qui nous unira dépendront de ce qu'elle répondra.

@Noa Jacobs

C’est assez drôle de voir sa tête paniqué à l’idée que cette nana pourrait effectivement se diriger vers nous en mode furie. Mais qu’il se rassure, je suis incapable de tenir une vanne aussi naze très longtemps et il se rend bien compte rapidement, que je n’ai fais que le faire marcher. Il a l’air tout de suite plus soulagé. Et maintenant, c’est à lui de rire, à moi d’être gênée. « Oh pas la peine de faire celle qui aura du mal pour ça, je sais que tu n'as d'yeux que pour moi. » ca m’agacerait presque, parce qu’il plaisante, mais il a bien raison aussi ! Et j’ai l’impression de n’avoir déjà plus aucun secret pour lui. Je ne sais d’ailleurs même pas quoi répondre à par fendre un rire retenu entre mes lèvres, un rire gêné qui trahie bien mes pensées.
Enfin dans le vif du sujet, j’explique comment j’en suis venue à être directrice, en passant les détails, après tout en sept minutes, il n’y avait pas forcément le temps d’en dire plus et je n’allais pas passer tout ces secondes à ne parler que de moi. Je n’en avais pas envie, le sujet était encore bien trop épineux et je ne savais pas à qui j’avais vraiment à faire. Greg pouvait m’avoir tapé dans l’œil et dans le cœur en deux secondes, ce n’était pas suffisant pour me livrer à plus de confidence. Si jamais, le brun voulait en savoir plus, il fallait aussi me donner monnaie d’échange. « C'est top ça ! J'espère que tu t'y plais au moins. Tu fais ça à plein temps ? » je hoche la tête. « A temps plein, et plus que ça même. » loin de compter mes heures, je passais à présent plus de temps à l’association Beauregard que ça ne pouvait l’être avant ma promotion, normal après tout, j’avais les responsabilités et le salaire qui suivaient heureusement. Et rien ne m’empêchait mon rituel de détour au DBD pour embrasser Matt lorsque j’en ressentais le besoin, ni le passage chez Isaac pour prendre de ses nouvelles, tristes nouvelles d’ailleurs ces derniers temps… Je préférais ne pas y penser ce soir. J’avais songé à aller passer quelques jours chez lui pour lui apporter tout mon soutien. Enfin, à présent, il était temps d’en savoir plus à propos de lui. Gregory, qui es-tu ? « À ton avis, qu'est ce que je fais de mes journées ? » mystérieux à son tour, question piège, j’étais mauvaise pour les devinettes, j’étais mauvaise pour deviner l’âge de quelqu’un, encore plus pour trouver ce qu’il pourrait faire comme métier. Je l’observais un moment, faisant mine de réfléchir sérieusement, mais je n’avais surtout pas envie de me planter. « En réalité, j’te vois bien avec un costume de super héros à aller faire rire les gosses malades dans les hopitaux. » j’attends un instant. « Je dirai même Batman ! » avec sa machoire carrée, le masque lui irait plutôt bien. « J’suis sûre que j’vise à peu prêt juste, monsieur le justicier ? » que je lance, en plaisantant. « En réalité, j’en ai aucune foutu idée. Et tu pourrais aussi bien être avocat qu’éboueur, j’te laisse éclairer ma lanterne ! » à mon tour de jouer des sourcils, le laissant prendre la parole, pour avoir un bout de réponse cette fois ci. « Et j’ai rien contre batman, si jamais, j’ai visé juste. »

C’est toujours intéressant de voir ce que les autres pensent de nous lorsqu’ils ne nous connaissent pas. Est-ce que cette facette de charmeur pouvait renvoyer à celle que j’avais quand j’étais au commissariat ? Une fois mon badge rangé, je ne suis plus ce lieutenant exigeant qui tire toujours la gueule, au contraire, je m’efforce d’être bien plus aimable en rencontrant des nouvelles personnes. « En réalité, j’te vois bien avec un costume de super héros à aller faire rire les gosses malades dans les hôpitaux. » Je lâche un rire étonné, je ne m’attendais absolument pas à cette réponse. Je ne savais pas que j’avais la gueule d’un clown, et je pensais encore moins qu’on pouvais croire que je puisse faire rire des gamins. J’ai toujours voulu en avoir des mioches, mais j’ai jamais pu. Et puis de toute façon, je ne suis franchement pas certain que j’aurai fait un bon père. Même si je ne sais pas si elle le pense sincèrement, sa réponse me touche vraiment : que quelqu’un puisse penser ça de moi, c’était pas habituel. « Sérieusement ? » que je lui dis dans un sourire incertain. Elle renchérit, s’enfonce un peu plus loin dans son délire. « Je dirai même Batman ! » Elle me dévisage, maintient son regard un peu plus appuyé sur ma mâchoire que je contracte pour retenir un rire. « J’suis sûre que j’vise à peu prêt juste, monsieur le justicier ? » Elle n’a pas tout à fait tort au fond, sauf sur le fait de travailler dans un hosto. Et de faire rire des gosses. Et d’être un super héros. Ah, quoi que, ce dernier point se discute. Je secoue lentement ma tête de droite à gauche en riant doucement, je suis flatté, mais je suis bien loin d’être le gentil gars qu’elle pense. Je fais de mon mieux pour essayer de sauver des vies, oui, mais j’ai absolument aucune humilité, et je mérite pas d’avoir le même respect que des gars qui font tout pour rendre plus soutenable le quotidien des gamins malades. « En réalité, j’en ai aucune foutu idée. Et tu pourrais aussi bien être avocat qu’éboueur, j’te laisse éclairer ma lanterne ! » Elle veut pas s’avancer sur mon boulot en fait, elle tâte elle-aussi le terrain. « Ca va, t’as visé large dans tes propositions. Comédien, super héros, avocat, éboueur, ta liste est pas du tout longue. » que je lui sors en riant. « Bon, pour tout te dire, t’as pas tout à fait tort. » Je me lance finalement, elle aime bien Batman non ? « Je suis bien un justicier. Plutôt lieutenant en fait. » Ma main se dirige machinalement vers l’arrière de mon crâne pour descendre jusqu’à ma nuque que je frotte presque nerveusement. « Bon, j’ai pas les mêmes tablettes que Batman, mon chocolat à moi est carrément en train de fondre progressivement au fur et à mesure que j’avance dans les années, mais sinon j’ai les mêmes oreilles que lui. » Ma main qui était sur ma nuque se lève lorsque je vois un serveur passer, mon alcoolémie est beaucoup trop basse pour que je passe cette soirée sereinement. Pendant que le pingouin serré dans son costard se dirige vers nous, j’en profite pour regarder Noa et ses beaux yeux verts avant de lui demander : « Tu veux boire quelque chose au fait ? Moi je vais me commander un whisky, histoire de venir rembourrer mes abdos bétonnés. »

@Noa Jacobs

Au moins, ma proposition le fait rire, bien qu’elle soit pas serieuse, bien que j’ai pas voulu trop me mouiller, parce que j’ai pas voulu le vexer non plus. J’en sais rien, ce qu’il peut faire dans la vie. J’ai tendance à me dire qu’avec son humour, il est pas comptable, qu’il passe pas ses journées coincé dans un bureau à parler à personne et être en tête à tête avec un écran, ou alors, ce serait du gâchis. J’ai envie d’en savoir plus, j’suis intriguée, il m’intrigue vraiment. Qu’est ce qu’il fait alors, qu’est ce qui occupe son quotidien ? « Ca va, t’as visé large dans tes propositions. Comédien, super héros, avocat, éboueur, ta liste est pas du tout longue. » j’ai ratissé large, au moins, tout peut y passé, j’suis grillée, je souris en hochant la tête, même pas désolée. Aller, qu’il crache le morceau. Je sens que c’est bientôt la fin, j’regarde autour de nous pour vois comment ça s’passe chez nos voisins, même si j’me moque bien d’eux mais j’me demande déjà qui sera le ou la suivante. Si on pouvait mettre pause là, ce serait pas mal non ? « Bon, pour tout te dire, t’as pas tout à fait tort. » je repose mes yeux sur lui, étonnée, ou pas, je sais pas, il est pas entrain de dire que j’ai mis le doigt sur le bon bouton non plus. « Je suis bien un justicier. Plutôt lieutenant en fait. » outch. Là j’avoue, c’est la douche froide. Lieutnant, relation avec la police et compagnie, faut dire que j’ai un mauvais passif avec la justice, que si en réalité, j’ai rien contre les forces de l’ordre par principe, j’ai mon expérience qui me fait frissonner à chaque fois que j’peux les croiser. Comme un traumatisme encré en moi, c’est pas rien, d’avoir subit des interrogatoires, c’est pas rien d’avoir été arrêtée en pleine rue, humiliée sur la place publique, c’est pas rien d’être allée en prison, c’est pas rien d’avoir été victime d’une erreur judiciaire plus grosse que moi. Mon sourire s’est effacé d’un coup et pourtant, j’lui en veux pas à lui, en particulier, pas à lui personnellement, j’lui en veux peut être pour ce qu’il représente. « Bon, j’ai pas les mêmes tablettes que Batman, mon chocolat à moi est carrément en train de fondre progressivement au fur et à mesure que j’avance dans les années, mais sinon j’ai les mêmes oreilles que lui. » mais cet humour étire à nouveau mes lèvres, je souris, timidement, mais je garde en tête ces mauvais souvenir qui me reviennent alors que j’ai rien demandé à personne. Alors que tout ça c’était derrière moi et que j’ai pas envie de me prendre le retour du boomerang. J’crois que j’ai envie que ça s’arrête maintenant, que j’m’en aille maintenant, que j’me lève et que ce soit fini, disparaitre maintenant.
« Tu veux boire quelque chose au fait ? Moi je vais me commander un whisky, histoire de venir rembourrer mes abdos bétonnés. » et je lève la tête vers le serveur qui s’approche, mes yeux se posent sur Greg, c’est comme si ma vision était brouillée, comme si j’avais des acouphènes. Je réponds pas, j’ai soif si, j’pourrais prendre un truc à boire, ca m’ferait passer tout ça. « Je te suis. » en deux secondes, j’venais peut être de faire chuter mon score sur cette foutu fiche qu’il allait remplir sur moi.

Son sourire s'efface presque immédiatement quand je lui dis que je suis lieutenant, quand je lui annonce que je suis bel et bien un flic et pas un super héros. Elle s'était amusée à m'imaginer en batman, et elle m'avait dit qu'elle l'appreciait d'ailleurs. Elle n'était pas sérieuse, évidemment que je le savais, mais avec cette analogie je pensais que les métiers qui appartiennent aux forces de l'ordre ne lui feraient pas peur. La suranalyse n'était peut-être pas si bienvenue ce soir à notre table, et j'avais mal vu, j'avais foutu en l'air la possibilité de repartir avec elle. Noa est clairement mon type, et j'aurai pas dit non pour passer davantage de temps avec elle, mais je suis certain que je trouverais quelqu'un d'autre sur qui jeter mon dévolu. Les couples assis sur les tables à côtés de nous accélèrent le rythme, checkant leur montre toutes les 30 secondes par peur d'avoir oublié un énième indice sur leur personnalité qui pourrait les faire passer au-dessus des autres. Les sept minutes sont bientôt écoulées, et je regrette presque les quelques mots que j'ai sortis durant ces dix dernières secondes. La brune se terre dans un silence que je juge malaisant, et j'essaie de relancer la conversation sur le ton de l'humour, qui semble marcher ? À moins qu'elle ne veuille juste être polie, mais ne penser qu'à passer à la table suivante au final. Voilà pourquoi je n'aime pas amener mon métier dans les conversations, je me retrouve bien trop souvent face à des nanas complètement fermées et flippées, ou alors face à des femmes qui fantasment sur l'uniforme, et ça, ça ne me fait pas rêver non plus. Je finis par lui proposer un verre, qu'elle accepte. Je sais pas si c'est de la politesse, ou la volonté de noyer cette conversation dans de l'alcool, mais elle décide de prendre un whisky elle-aussi. L'ambiance se fait plus lourde alors que tous les autres couples autour de nous se dépêchent de terminer leurs anecdotes, j'entends la dame à ma droite qui parle de ses cinq chats et le demi adolescent sur ma gauche qui raconte comment il a reussi à vendre sa voiture, c'est bizarre comme tout à coup je me focalise un peu plus sur les autre tables pour fuir cette situation qui était bien partie mais qui s'avère finalement être un échec. Elle s'est complètement fermée à l'idée de savoir que je suis flic, au final tant pis pour elle. Le serveur se dirige vers nous en apportant nos verres, mais le gong nous indique que c'est la fin du premier rendez-vous. Je me lève et tends ma main en direction de celle de Noa. "J'aurai passé un bon moment quand même, même si le fait que je sois flic semble t'effrayer. Je suis désolé qu'on n'ait pas pu être compatibles, parce que tu aurais carrément pu être mon type." Je lui sors ça en toute honnêteté, parce qu'il est inutile de mentir à présent. "Eh bien Noa, bonne continuation" que je lui lance en lui offrant un grand sourire. "J'espère que tu trouveras ce que tu cherches en venant ici en tous cas !" Et je me dis que cette soirée risque d'être plus compliquée que prévue finalement, parce que je sais même pas ce que je recherche en fait. Est-ce que je me suis vexé à cause de sa réaction, ou parce qu'elle me plaisait vraiment ? Est ce que je serais pas en train de vraiment chercher quelqu'un avec qui je pourrais tenter à nouveau une relation, inconsciemment ? Non, non, c'est juste une histoire de cul. C'est mon ego qui parle. Le serveur apporte nos boissons, je règle, et je me dirige vers ma deuxième table, déterminé à ne pas me faire rembarrer cette fois.

@noa Jacobs

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