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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyVen 13 Mar 2020 - 7:51

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so it's over,
this time i know it's gone, salt water tasted it too long, i only know i'm wrong, now i know it's gone
La thérapie par le vide. Yasmine s'y était souvent essayée et étonnamment, elle qui savait se montrer réfractaire à l'idée de prendre ses pensées en mains, tourmentée par tant de choses à la fois que le chantier lui semblait impossible à déminer sans en ressortir avec plus que quelques égratignures, elle y trouvait une paix certaine. A trifouiller dans les méandres d'un passé pas si lointain, mais nettement plus glorieux, le nez picotant, pris dans les tourbillons de poussières que les cartons qu'elle déballait soigneusement avec dans l'âme, les mêmes envies qu'une chercheuse de trésors. Ça l'aidait de se raccrocher à ce qui ronflait dans les combles de la maison dans laquelle elle avait grandi ; les vieux dessins mal assurés qu'elle offrait à qui voulait croire en ses talents d'artiste excentrique, les colliers de coquillages qu'elle semait comme un gage immense d'affection chez tout ceux qui faisait vibrer son petit cœur de petite-fille timide, les cadeaux pour les fêtes de ses parents, confectionnés avec un amour infini, et ses vieux déguisements cousus par une maman assez compétitive pour que sa benthi n'arrive jamais dernière au concours du meilleur costume à l'école. D'ailleurs, Fatima avait tenu elle aussi à l'accompagner dans sa quête de vacuité, aussi s'extasiait-elle face aux vestiges d'une unité familiale autrefois si forte qu'aucun membre de la famille Khadji n'aurait pu s'imaginer la voir éclater en millions de fragments. Aussi apaisant que cette expédition dans le grenier fût à ce moment-là, il y avait des silences qui ne trompaient pas – quand soudain, la quiétude était perturbée par la lourdeur d'un souvenir trop fort que sa mère espérait rendre moins douloureux en usant de sa rhétorique pour rejouer la scène avec le théâtralisme qui la caractérisait, son petit accent rendant les choses plus savoureuses encore, même si elles étaient, au fond, trop pénibles pour qu'on s'en amuse tout à fait. Elles réussissaient à en rire cependant, lorsqu'elles oubliaient un instant que finalement toutes les familles du monde en étaient rendues au même point.
La paix était un concept difficile à mener sur le long terme ; les points de vue divergeaient, les gens changeaient et les personnalités, aussi bienveillantes qu'elles puissent être, n'étaient pas toujours compatibles avec des idéaux ancrés sur plusieurs générations… c'était un regret qui s'ajoutait à la peine que Yasmine ressentait profondément quand elle pensait au gâchis que représentait la brouille entre ses parents et Sohan et devant laquelle elle se sentait impuissante. Comme face à tant de choses en vérité, qu'elle en venait à constamment douter de son utilité.

"Oh benthi, regarde." Retenant un éternuement, la jeune femme releva doucement la tête en faisant la grimace. Se frottant le bout du nez, elle se pencha sur le côté pour jeter un œil à ce que Fatima dépliait sur le parquet du grenier "Attends, je vois pas d'ici." fit-elle en se levant et en grognant un peu, laissant de fait derrière elle la pile de ses vieux livres d'enfant un peu rêveuse qu'elle avait mis de côté pour les distribuer à droite et à gauche – quelques-uns pour les Lindley, d'autres pour les Price, et le reste pour le service de pédiatrie du St-Vincent. C'était avant tout pour cette raison qu'elle était grimpée jusqu'ici d'ailleurs, lorsqu'elle avait promis à Emma Price de faire le tri dans la pile de livres que ses parents avaient gardé par attachement plus que par réelle nécessité "Je me souviens bien du jour où tu m'as demandé de te coudre une blouse. Je crois que les accessoires doivent être dans ce carton là-bas, tu veux bien regarder pour moi ?" lui demanda sa mère alors que Yasmine marquait un stop aussi bien physique que mental à l'instant où ses yeux devinèrent la forme du costume qu'elle venait de déplier.
C'était ça le plus dur avec le fait de replonger dans son passé, celui de retomber sur des rêves si prégnants qu'ils avaient fait partie intégrante de votre vie pendant longtemps sans jamais réussir à se frayer un chemin dans la réalité. Elle ravala la boule qui lui était montée dans la gorge en repensant à toute ces fois où elle avait enfilé sa panoplie de docteur, aux bobos qu'elle avait soigné avec tant de conviction, persuadée qu'un bisou suffirait à régler la moindre contrariété, qu'elle ne saurait les compter – et au mal que ça lui faisait d'avoir été forcé d'admettre qu'elle avait été trop rêveuse en effet, et que se contenter du peu resterait sa seule option au cours de ces prochaines années. Personne ne semblait mesurer sa déception, personne ne semblait non plus s'inquiéter de son manque d'assiduité, de motivation et d'intérêt pour son travail… mais tout le monde avait ses propres soucis, une constante qu'elle gardait ancrée dans son esprit parce que vraiment, ce n'était pas elle la moins bien lotie.
"Tu trouves, chérie ?" insista Fatima, laissant un instant à sa fille pour qu'elle se décide enfin à rabattre le couvercle d'un carton mal fermé et à plonger les mains dans l'imbroglio de faux flacons, de fausses seringues et de stéthoscopes mâchouillés qu'elle finit par lui tendre avec un sourire légèrement emprunté ; un sourire emprunté que sa mère remarqua et qu'une main tendue rendit un peu plus authentique, surtout quand elle la laissa poser sa tête sur son épaule une fois qu'elle s'assit à ses côtés, laissant tout son bazar tomber à leurs pieds "Je pourrais la rafraîchir un peu, ajouter plus de détails ici, ou bien ici." fit-elle et Yasmine laissa un rire filer "Mais je suis trop grande pour la porter, maman." Le regard qu'elles échangèrent, la fille les yeux levés vers sa mère dont le menton se rentra pendant qu'elle contenait son rire, fût chargé d'une complicité qu'elles n'avaient pas partagé depuis la gifle malheureuse qui s'était abattue sur sa joue comme une trahison injuste, il y avait quelques mois de ça. Yasmine savait où elle voulait en venir cependant, et c'est presque timidement qu'elle tendit la main pour caresser l'encolure de cette blouse d'enfant qu'elle avait beaucoup trop de fois enfilée – comme celle qu'elle enfilait tous les matins depuis près d'une dizaine d'années et qui avait le malheur de ne pas être de la bonne couleur à ses yeux "Je sais pas trop. Je trouve que c'est trop de pression de faire porter sur les épaules d'un enfant autant de rêve et d'espoir. J'y ai vraiment cru, on voit où ça m'a menée." Là encore, elle se laissa aller à un tout petit rire qu'un hochement de tête chassa bien vite alors qu'elle se levait déjà, le cœur battant si fort dans sa gorge qu'elle sentit le besoin immédiat de s'échapper de l'étreinte maternelle pour ne pas la contaminer avec la tristesse qu'elle ravala tout de go en lui disant "Vaut mieux la jeter. Je vais devoir y aller, Norah m'attend."
Elle s'éloigna de quelques pas, clignant furieusement des yeux pour se donner un peu de courage et alla rassembler les piles de livres qu'elle glissa dans des cartons sans demander son reste ; un pour les Lindley, un pour les Price, l'autre pour le service de pédiatrie du Saint-Vincent. Tout y était.

Quand elle se pencha sur elle pour l'embrasser deux fois sur le front, il lui sembla que Fatima lui indiqua qu'elle avait préparé une assiette de pâtisseries pour sa visite chez Norah. Mais Yasmine ne l'écouta pas, et s'échappa par l'escalier amovible du grenier en répondant rapidement à son besoin de s'en aller d'ici pour s'engouffrer dans sa Jeep qu'elle chargea, puis démarra en direction de chez Norah qu'elle avait prévenu de sa visite imminente la veille dans la soirée.
Ce n'était pas très loin de chez les Khadji, le trajet fût néanmoins suffisant pour la remettre dans un bon état d'esprit qui l'exempta de se forcer à sourire quand la porte de chez les Lindley s'ouvrit devant son nez qu'elle gratouillait encore une fois, la poussière du grenier s'y étant infiltrée pour un paquet d'heures visiblement.
"Comme promis." s'annonça-t-elle en remuant sa queue de cheval haute. Son carton de livres dans les bras, son regard se posa sur le visage constellé de taches de rousseur de Norah. Elle était épuisée, ça se ressentait non seulement du fait des marques qui dardaient sur son visage de poupée, mais surtout du fait du voile épais sur son regard transperçant qui l'intimidait davantage ces derniers temps, un peu comme si elle redoutait qu'il ne se lève pour laisser éclater tout ce qu'elle s'obstinait à laisser derrière ; elle savait de quoi elle parlait, combien de fois ne s'était-elle pas reconnue en croisant son reflet dans le miroir ?
Tendant son carton à deux mains vers la jeune femme, Yasmine lui dit "Ma mère avait préparé des petites choses pour grignoter, mais j'ai été prise par le temps et j'ai oublié de les emmener. Tu me pardonnes ?" mentit-elle un tout peu afin de détendre l'atmosphère malgré la tension dans ses épaules, mais aussi dans sa voix, et de faire passer le carton de livres qu'elle lui tendait pour une offrande de rechange qu'un léger sourire accompagna quand elle fit son premier pas sur le seuil de la maison "Il y en a pour Julie et pour Aidan. En fonction de leur âge, je crois qu'ils trouveront de quoi s'occuper. Oh, et le contenu a été validé par maman et papa Khadji à l'époque." Elle n'avait donc aucun souci à se faire, c'était ce que sa boutade voulait dire.


Dernière édition par Yasmine Khadji le Mar 24 Mar 2020 - 9:37, édité 1 fois
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyMer 18 Mar 2020 - 12:51

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so it's over, this time I know is gone
Dès lors que les lumières s'étaient tamisées et que les enfants allaient au lit, Norah culpabilisait de ressentir un tel sentiment de soulagement. De savoir qu'elle avait réussi à traverser cette nouvelle journée, qu'elle n'avait plus à être sollicitée par qui que ce soit pour les prochaines heures. Elle fermait d'un geste discret et habitué la porte de la chambre d'Aidan avant de se permettre à lâcher un soupir de répit. Migraineuse depuis quelques heures, elle se massait les tempes à l'aide de quelques doigts avant de se décider à rejoindre le rez-de-chaussée et s'installer sur le canapé. Sans le moindre bruit, sans faire quoi que ce soit, elle s'était confortablement installée et regardait là, dans le vide. Son coeur ne fit qu'un bon quand son téléphone retentit. Le message de Yasmine qui la prévenait qu'elle passerait la voir le lendemain. Demain. C'était une éternité et parfois l'équivalent d'un battement de cils. Les distensions temporelles, elle n'en avait cure. Il y avait bien peu de choses dont elle pouvait se soucier dernièrement. Il était vrai que la belle brune lui avait promis de lui ramener des livres pour les enfants. De quoi faire scintiller davantage les yeux de Julie et d'essayer d'attirer l'attention d'Aidan ne serait-ce que pour une dizaine de minutes. Quoi qu'il se montrait un peu plus amateur d'histoires, afin d'étoffer encore plus son imagination déjà débordante. Norah avait supposé que Yasmine avait besoin de s'occuper l'esprit, d'avoir à penser à autre chose qu'à la lettre envoyée par l'universitié, qui refusait poliment de la prendre dans la prochaines promotion des futurs médecins. La Lindley faisait partie de celle qui avait du empirer sa chute à la lecture de ces quelques mots, car elle y croyait dur comme faire, que son amie allait réussir. Et puis elle avait insulté de quelques noms d'oiseaux ceux qui avait refusé son dossier, car pour elle ils se tiraient une balle dans le pied en ne la comptant pas parmi ses futurs internes. Mais elle ne pouvait plus y faire grand chose, si ce n'était de constater l'impact que cela avait eu sur Yasmine. Un à un, les piliers qui maintenaient sa vie plus ou moins la tête hors de l'eau, semblaient s'effondrer et tout ce qui pouvait la rendre enthousiaste devenait de plus en plus terne. C'était épuisant, de s'accrocher sans voir de véritable résultats. Les motivations pour reprendre une nouvelle journée s'amoindrissaient à vue d'oeil, tout comme le flux vital qui l'animait d'habitude. Parfois, elle se questionnait; à quoi bon ? La tête appuyée contre le dossier de son canapé, Norah se surprenait à se le demander de plus en plus. Elle ne serait pas contre une nuit de sommeil, une vraie. Sans rêves, juste quelques heures de repos et de répit complet. Mais elle en était tout bonnement incapable. La belle Khadji avait fini par arriver au seuil de la porte de sa maison, les mains bien chargées. Elle aussi, semblait bien éteinte. L'une comme l'autre n'abordait pas vraiment le sujet. Bornées comme elles étaient, ce serait une conversation sans fin et avec beaucoup trop de non-dits. "C'est vraiment gentil d'avoir pensé à eux." dit-elle malgré toute sa reconnaissance alors qu'elle réceptionnait le carton déjà bien rempli. "Merci beaucoup." lui souffla-t-elle en l'invitant d'un signe de tête à rentrer à la maison. Elle déposait le carton sur la table basse du salon pour libérer ses bras, se disant qu'elle aurait tout le loisir de voir ce que Yasmine lui avait généreusement donné. Il y avait largement de quoi faire. "Il y a rien à pardonner. T'en fais pas." lui répondit-elle avec un léger rire lorsque Yasmine demandait pardon de ne pas avoir rapporté les gourmandises amoureusement faites par sa mère. "Je ne leur aurais pas fait honneur." admit-elle sans détour, en songeant au peu d'appétit qu'elle avait depuis quelques temps. Elle aimait toujours cuisiner ou pâtisser, mais c'était pour ses enfants, surtout. Par principe, elle se laissait des restes qu'elle ne faisait que picorer au bout du compte. "Si c'est approuvé par les parents Khadji, je peux être sûre que je ne trouverai rien de compromettant ou qui pourrait les faire cauchemarder." Un sourire traversait son visage rapidement. Norah savait dans quel contexte Yasmine avait grandi et elle savait qu'elle pouvait se fier à l'accord de ses parents. C'étaient des gens bien, bien ancrés dans leurs traditions, mais des plus adorables. L'infirmière ramenait rapidement deux grands verres de sa cuisine ainsi qu'une citronnade qu'elle avait préparé pour la venue de sa collègue. Elle remplissait les verres et en tendait un à Yasmine. Lui demander comment elle allait n'était pas de grande nécessité, selon elle. Elle se doutait de la réponse qu'elle lui donnerait, qu'elle mentirait, et qu'elle prétendrait autant qu''elle. "Comment ça se passe aux urgences, en ce moment ? Ca fait un moment que je n'y ai plus mis les pieds." A défaut, elle faisait dernièrement ses heures supplémentaires dans son service habituel (et préféré). Pas parce qu'elle en avait assez des urgences, mais qu'elle avait toutes ses raisons pour ne pas quitter la réanimation. "On croirait presque que certains de mes amis se sont passés le moit pour faire un petit séjour en réa." résuma-t-elle d'un air presque blasé. Alfie et Rhett n'avaient aucune raison de se connaître et désormais ils partageaient le point commun d'avoir fait un séjour dans le service dans lequel leur amie infirmière travaillait. Norah était certes douée d'un grand professionnalisme, mais voir les deux hommes alités, scopés, branchés à une multitude de perfusions dans le but de normaliser le bilan sanguin, de soulager les douleurs, de prévenir les infections, avait indéniablement eu un impact psychologique important. On l'en empêchait, mais elle aurait été tout à fait capable de prendre soin d'eux. Elle en aurait pris un coup, mais c'était un moindre mal à ses yeux si c'était pour s'assurer qu'il soit bel et bien pris en charge. "A croire qu'on veuille mettre mes nerfs à rude épreuve." ironisa-t-elle avec un léger rire alors que son regard se glissait sur son amie. A se demander qui avait la moins bonne mine entre elles deux, mais Norah était profondément inquiète pour elle. Elle avait le mauvais pressentiment que le refus de la faculté de médecine était comme un point de non retour.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyMar 24 Mar 2020 - 10:43

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this time i know it's gone, salt water tasted it too long, i only know i'm wrong, now i know it's gone
Au cours des douze derniers mois, Yasmine n'avait pu s'empêcher de constater à quel point elle ressemblait à Norah. Elles avaient toujours été des collègues qui s'appréciaient beaucoup, travaillant parfois ensemble et formant une équipe du tonnerre, aussi douée l'une que l'autre pour ce métier qu'elles exerçaient avec une passion viscérale. Mais des épreuves les avaient rapprochées, et tandis que ces derniers temps, la jeune femme avait perdu des repères familiers – notamment Clara, avec qui sa relation s'était étiolée pour devenir quasi-inexistante, la petite blonde ayant choisi de reprendre sa vie en mains sans juger bon d'y inclure Yasmine –, elle en avait gagné d'autres : Norah en faisait définitivement partie. Elle avait tout à gagner à être au contact de quelqu'un comme cette mère-courage qu'elle respectait en tant que collègue, mais en tant que femme aussi, tant est si bien qu'elle l'avouait sans mal, elle s'était inquiétée de la succession d'épreuves qu'elle avait connues ces derniers temps. C'était en ça qu'elle se sentait proche d'elle, plus que jamais. Yasmine n'étant pas sans avoir deviné qu'elle était aux prises de difficultés qu'elle faisait toujours en sorte d'amenuiser, convaincue qu'elle saurait gérer l'impossible et se refermant comme une huître chaque fois qu'elle lui posait la moindre question à propos de son ressenti, elle avait toujours soupçonné qu'un jour où l'autre, Norah craquerait. Et là encore, ça lui rappelait quelqu'un, aussi aurait-elle était une abominable hypocrite de la juger de ne pas admettre que quelque chose la tourmentait et qu'elle était incapable de le gérer toute seule comme la femme indépendante qu'elle était.  Elle pouvait juste lui permettre de s'échapper de ses pensées quelques fois, quand au détour d'une garde éprouvante, elles se retrouvaient pour partager une boisson chaude en discutant de tout et de rien, évitant l'éléphant dans la pièce avec une agilité qui leur était propre tandis que chacune à leur manière, elles donnaient le change pour ne pas s'effondrer.
Alors aujourd'hui, elle était venue ici dans l'espoir de lui apporter un peu de réconfort, mettant sa bienveillance au service de ses enfants qu'elle aurait bien aimé saluer, mais qui devaient probablement vaquer à leurs occupations de leur côté. Ce n'était pas grave, elle savait qu'une fois qu'ils auraient mis le nez dans ce qu'elle leur avait apporté, ils voudraient la remercier comme les petits bien élevés qu'ils étaient. La promesse d'un moment passé en leur compagnie la fit sourire timidement, s'engouffrant à pas de loup dans la charmante petite maison des Lindley. Resserrant sa queue de cheval haute par l'élastique, elle toupilla sur ses talons pour suivre le trajet de Norah et s'avança jusqu'au salon ; anticipant l'invitation de la jeune femme à s'installer, elle s'assit sur le canapé, posant un regard distrait sur tous les détails de la pièce dans laquelle elle s'était déjà rendue plusieurs fois au cours de l'année précédente, mais qui lui paraissait chaque fois un peu plus jolie. Elle avait tellement d'admiration pour Norah qui menait tout de front, entre son travail et la vie à la maison, qu'elle se demandait parfois si elle n'avait pas une double-identité de superhéroïne qu'elle lui enviait gentiment, emplie d'une estime infinie, voire un peu enfantine, pour sa collègue.

"Merci." fit-elle lorsqu'elle lui tendit un verre de citronnade dont elle prit une gorgée rapide avant de soupirer un peu en l'entendant la questionner sur les urgences. Si elle apprécia sincèrement l'égard de la brunette à ne pas la questionner sur son état d'esprit, elle dut avouer qu'entamer la conversation sur la crise qui faisait trembler les urgences la rendait un peu nerveuse – parce qu'elle faisait tout pour s'en détacher, lasse que sa vie ne tourne qu'autour de ce qui s'y passait alors qu'on lui avait coupé toute l'envie de s'y investir comme à son habitude, interdite d'envisager son parcours professionnel sous un tout nouveau jour et couvant de plus en plus l'envie de tout arrêter, de passer à autre chose "Et je te conseille d'éviter de le faire dans les semaines qui arrivent. J'ai l'impression que plus le temps passe, plus les choses deviennent ingérables." Fallait-elle qu'elle avoue ouvertement qu'elle mûrissait un départ de son poste, perturbée par l'attention décuplée que l'échec à son examen avait dirigé droit sur elle, entre toute autre chose ? Certainement pas aussi vite, pas maintenant.
Pour s'y tenir, elle plongea son nez dans son verre de citronnade, soucieuse de donner à sa rhétorique un goût moins amer. Puis elle releva ses grands yeux verts en direction de Norah chez qui le ton blasé la fit très doucement opiner "J'ai appris pour Rhett. J'étais pas très loin quand il a été admis aux urgences… Hassan était mort d'inquiétude. Tu tiens le coup ? Et ton autre ami, comment va-t-il ?" lui demanda-t-elle avec gentillesse, prenant soin de ne pas ouvertement lui demander, elle non plus, si elle allait bien. Elles étaient faites de la même façon, elle voulait lui éviter de mentir en lui disant que oui alors qu'elle voyait très bien que non – ça rendait service à tout le monde, et même si elles étaient têtues, elles avaient depuis longtemps cessé de se mentir à propos de leur état d'esprit. Il n'était jamais très bon, surtout en ce moment, de toute façon, alors à quoi bon ?
Yasmine marqua un temps de silence, baissant la tête sur ses mains, ses longs doigts vernis d'un bleu pâle faisant ressortir son teint caramel, qui tenaient son verre. La fraîcheur du liquide se diffusa à l'intérieur de ses paumes pour mieux lui procurer un frisson qu'elle retint, se laissant doucement basculer en arrière pour s'enfoncer dans le canapé et méditer sur le témoignage d'accablement que laissa poindre sa collègue. Il lui semblait que c'était la première fois qu'elle lui faisait part aussi ouvertement de ses difficultés, et elle ne sut pourquoi, ça lui porta un coup à son cœur qui manqua un battement.
Tout en laissant sa tête reposer sur le renflement du canapé, Yasmine lui dit "Tu sais, j'aimerais te dire que ça va s'arranger. Mais c'est comme pour l'ambiance aux urgences ; plus les jours passent, plus j'ai l'impression que les choses ne font qu'empirer." Ce n'était pas tout à fait vrai, il y avait des fois où elle avait la satisfaction de se dire que tout était plus facile – surtout quand Edge n'était pas loin ; dans ces moments-là, elle se détestait de ressentir une espèce de dépendance muette à propos de sa présence qui lui faisait du bien, toujours un peu plus. Elle battit des cils un instant, laissant un léger rire sans joie rompre la ligne charnue de sa bouche qui s'étira doucement quand elle reprit, abattant une main sur l'une de ses cuisses qu'elle fit tressauter nerveusement "Et j'arrive pas à comprendre pourquoi, j'arrive pas à savoir ce qu'on fait de mal pour mériter tout… ça." Elle n'avait jamais été très friande de l'auto-apitoiement, mais il y avait un début à tout, et parce qu'elle n'était pas la seule à connaître les semaines les plus difficiles de son existence, ballottée entre plusieurs états qui faisaient vaciller son humeur, elle s'autorisa à remettre en doute le bien-fondé de ces épreuves qui leurs tombaient dessus comme les Dix Plaies d'Egypte.


Dernière édition par Yasmine Khadji le Ven 27 Mar 2020 - 11:09, édité 1 fois
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyMer 25 Mar 2020 - 16:45

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Si le manque de rangement était un des signe de la dépression, l'ordre qu'avait Norah dans ses affaires démentait ce symptôme avec brio. Si ce n'est les jouets parfois éparpillés par Aidan dans le salon, on ne pouvait pas reprocher à la mère célibataire de ne pas bien entretenir sa maison. Elle était toujours dans cette optique d'être toujours prête à accueillir quelqu'un. Car elle avait toujours dit à ses proches qu'en cas de besoin, ils pouvaient venir à n'importe quelle heure. Ils seraient toujours la bienvenue. Comme pour ces fois où Anwar et Frank rentraient tardivement d'une de leurs journées de travail et qu'Annie restait dormir à la maison. Ou quand il préférait aussi fuir son ex et trouver un havre de paix au sein de la famille Lindley. Sa maison rangée n'était vraiment pas le reflet de son état d'esprit actuel. Et même si sa santé mentale était sur le point de se détruire, elle consacrait le peut de force qu'il lui restait pour les autres. Ca devait être un truc d'infirmière. Un point commun qu'elle partageait avec son amie et collègue de longue date. Car aucune des deux n'avait eu la vie facile ces derniers temps, elles en avaient chacune parfaitement conscience et c'était peut-être pour cela qu'elles n'abordaient pas le sujet. Elles le savaient, elles peinaient peut-être juste à le mesurer véritablement. Elles ne misaient pas non plus sur l'insouciance ou l'ignorance des faits. Ils étaient là, ils étaient omniprésents et pesaient sur leur conscience respective. Mais on n'abordait pas ces sujets fâcheux. Ou du moins, pas encore. Les deux infirmières semblaient désirer profiter de cet instant en suspend, un moment de légèreté qui était très appréciable. Installées sur le canapé, boisson en mains, le sujet du boulot restait néanmoins inévitable. Un grand classique chez les soignants, mais très nécessaire. "Ca se répercute en réa aussi, on n'a pas trop le temps de se poser en ce moment, mais c'est pas plus mal." Norah aimait les moments d'accalmie, mais quand c'était trop calme, elle avait tendance à tourner en rond comme un lion en cage, à trouver quoi faire. Alors elle s'occupait de ranger du matériel, de le trier, de nettoyer ce qui n'avait jamais le temps d'être nettoyé. Et si vraiment il y avait très peu de patients (ce qui était assez rare dans un service de réanimation), Norah allait voir s'il y avait besoin d'un coup de main dans les services voisins. Même si ce n'était que pour poser une perfusion ou aider à changer un patient. Son regard se leva sur Yasmine lorsqu'elle mentionnait Rhett. Elle esquissait alors un sourire triste. Jamais n'aurait-elle voulu le revoir dans un lit d'hôpital. Pas qu'elle n'aimait pas s'occuper de lui, loin de là, mais le blond était d'une telle gentillesse qu'il ne méritait certainement pas ce qui lui était arrivé. "Rhett est du genre à beaucoup minimisé la douleur, mais il me la fait pas à moi." Norah savait, il pouvait faire son sourire charmeur comme il le voulait (même si son sourire était vraiment très beau), il n'allait pas pouvoir berner la soignante si facilement. Yasmine avait bien évidemment eu vent de l'hospitalisation d'Alfie. Elle n'avait pas du l'apprendre par le biais de Saït, ils devaient encore être en froid tous les deux. "Mais ça va, oui. C'est jamais franchement plaisant de voir des amis se faire hospitalisé dans son service." A croire que Brisbane était une ville minuscule. Ou que Norah n'avait que des proches étrangement attirés par les spots constamment allumés de l'hôpital. Un peu comme une mouche attirée par ces lumières bleues. Alfie se remettait difficilement de son "accident" et en avait encore de nombreuses séquelles qui l'énervaient plus qu'autre chose. Son état devait s'améliorer trop lentement pour lui. Or, en soi, il était déjà un miraculé d'avoir survécu à autant de blessures. Alors, est-ce qu'il allait bien ? La véritable réponse était pas vraiment. Et Norah y était très sensible, un peu trop même. Mais Alfie avait horreur de s'admettre vulnérable. "On peut dire que ça va." relativisa-t-elle. "Comme on pourrait aller après un tel traumatisme." Ca prendrait du temps et ça demanderait beaucoup de patience. Une qualité que le bel homme n'avait pas trop et Norah espérait que Jules sache garder son sang froid face aux frustrations de son compagnon. "Mais ils sont tous les deux solides. Sensibles, mais très solides." dit-elle avec un fin sourire. Ils avaient chacun leur corde sensible, Norah ne se gênait pas vraiment pour appuyer dessus quand elle le jugeait nécessaire. Mais ils étaient de grands gaillards, Norah avait confiance. Ils s'en remettraient. Yasmine prenait plus ses aises, comme prise par un élan de lassitude qui l'incitait à utiliser le moins de muscles possible. "Je ne me fais plus vraiment d'illusions." répondit-elle avec une certaine évidence. Elle ne s'attendait pas à un miracle du jour au lendemain. Que les jours lui semblent plus colorées, les nuits plus sereines, et le chagrin évaporé par la chaleur de nouveaux jours joyeux. Yasmine semblait s'être plongée dans tout un tas de questions existentielles, au point de se demander ce que le monde (ou un être supérieur, selon les croyances de chacun) pouvait bien leur reprocher pour devoir subir un tel acharnement. Tout en l'écoutant, Norah déposait son propre verre –à peine entamé– sur la table basse tout en écoutant son amie se questionner. "Je me pose pas ce genre de questions." reconnut-elle. "C'est à se bousiller les neurones de se demander ce genre de choses." Norah parlait en connaissance de cause. "Tous ces pourquoi qui restent éternellement sans réponse. Ca bouffe l'esprit." Et à la longue, ça drainait toute son énergie. Pourtant Norah était loin d'être la plus touchée par cette injustice. Son stoïcisme sidérait son frère aîné qui, par procuration, restait outré de la lenteur des procédures. "C'est bien la première fois que je te vois aussi abattue." lui dit-elle finalement. Elle savait pourquoi, mais elle ignorait pour combien de temps. "Qu'est-ce que tu as en tête ?" lui demanda-t-elle finalement. Soudain apparut une Julie qui avait certainement du sentir l'odeur des livres qu'avait ramené Yasmine. Immédiatement, le visage de Norah semblait un peu plus lumineux. "Je me demandais combien de temps tu allais prendre pour descendre et venir voir ce qu'il se passe." lui répliqua-t-elle avec un sourire amusé. Julie saluait d'un geste enthousiaste de la main Julie avant son regard curieux ne vienne observer ce qui se trouvait dans ce carton. "C'est pour qui ?" lui demanda-t-elle, le regard gavé d'espoir. "Devine." lui répondait sa mère en lui faisant un clin d'oeil. "Pour de vrai ?" "Pour de vrai." Julie masquait son enthousiasme évident par un sourire timide. "Tu peux remercier Yasmine, c'est elle qui  les a ramené." "Elle nous les prête ?" Julie était trop mature pour son âge. Car Norah savait qu'elle le demandait pour savoir si elle devait se hâter de les lire afin de lui rendre dans le temps qui lui était imparti. "Je pense qu'elle vous les donne." La jeune fille regardait alors d'un regard reconnaissant Yasmine et la remercia vivement. Tout comme sa mère, Julie était de nature plutôt calme et impassible. Cela ne l'empêchait cependant pas d'approcher de la belle brune pour l'enlacer en plus avant de demander à Norah si elle avait le droit de monter le carton pour pouvoir déjà feuilleter et ranger les bouquins qui lui étaient destinés. "Déjà qu'elle t'adore parce que tu es trop belle, là tu as une nouvelle fan pour la vie." lui dit-elle avec un rire amusé alors que la petite grimpait avec prudence les escaliers, mais non sans un certain enthousiasme. Sa mère la regardait d'un air attendri pendant quelques secondes avant de se reconcentrer sur son amie. "T'as rien fait de mal, Yas." lui assura-t-elle finalement. "Frank aimait croire qu'il y avait une loi de juste de retour. Ca devait être son côté justicier qui le conciliait là-dedans. Il a pas eu une enfance facile et il n'avait jamais pu compter sur sa famille. Et il aimait dire que la vie le lui avait rendu au centuple dès que nos chemins s'étaient croisés." Il avait eu droit de fonder sa propre famille et de la faire vivre comme lui il l'entendait, et non comment il l'avait vécu. "On te le rendra au centuple aussi, Yas. Je sais pas où, je sais pas quand. Mais ça reviendra."
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyVen 27 Mar 2020 - 11:08

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S'enquérir des états de Rhett et d'Alfie permit à Yasmine de repousser l'échéance, mais aussi d'observer, dans l'intimité de ses pensées et sous un angle complètement nouveau, ce qui lui pesait si lourd sur le cœur. C'était dans sa nature d'envisager ses actions comme les conséquences des déboires qu'elle connaissait depuis quelques temps, et de se demander si agir d'une telle façon plutôt qu'une autre lui aurait évité de souffrir des répercussions qui s'accumulaient au fur et à mesure que les mois passaient, lui donnant de plus en plus le sentiment qu'au fond, quoi qu'elle ferait, rien ne pourrait véritablement la combler. Ça aurait été plus facile si ça cachait des travers d'éternelle insatisfaite… mais la vérité était qu'elle savait se contenter du peu, plus à l'aise face à la modestie que face à l'opulence. Alors pourquoi était-elle si difficile à contenter ces temps-ci ? Son échec à l'école de médecine l'avait plongée dans un bassin d'amertume au fond duquel elle se laissait couler de bon gré, au point que parfois, quand elle se mettait à ruminer sur la manière dont les choses s'étaient enchaînées ces derniers mois, elle se surprenait à ressentir une colère profonde contre l'institution qui l'avait tant fait rêver ; mais aussi contre celle qui l'avait accueillie depuis la fin de ses études et au sein de laquelle elle avait toujours pensée s'épanouir, persuadée de n'être bonne qu'à ça.
Et si ce n'était pas le cas, si elle était passée à côté d'une autre vocation simplement parce qu'elle était restée focalisée sur une idée qu'elle avait laissé germer dans son esprit par paresse – ou pire par arrogance ? Yasmine avait toujours été travailleuse, elle s'était toujours donné les moyens de réussir, bannissant l'idée d'acquis de ses valeurs et de sa façon d'évoluer dans la petite vie tranquille qu'elle avait choisie de mener. Mais n'avait-elle pas ruinée ses chances de se découvrir ailleurs, d'une autre façon, en prenant son rêve de petite-fille pour une réalité ? Il lui arrivait de penser à l'avenir que ses parents auraient aimé qu'elle suive, à leur manière si déconcertante qu'ils avaient toujours eu d'estimer qu'elle était la plus à même de fonder une famille dont elle saurait s'occuper à la perfection, son instinct maternel ne faisant aucun doute ; ce à quoi elle s'était toujours opposée en préférant devenir la plus active possible, en se dressant comme une fière défenseuse de son droit à vouloir devenir plus qu'un incubateur sur pattes – comment elle avait réussi à les en convaincre eux aussi, pour en fin de compte être incapable, par deux fois, d'aller au bout du projet de sa vie, et revenir à la case départ en essuyant les regards chargés de tristesse et de pitié, obligée de reléguer sa déception au second plan pour apaiser celle de ceux qui l'avaient tant encouragée.

S'inclinant légèrement en avant, elle posa son verre sur la table basse. Yasmine se risqua à laisser un petit sourire remonter l'une de ses pommettes quand elle répondit à Norah "Je pourrais te dire la même chose. On fait la paire, toi et moi." Une boutade à propos de cet accablement qu'elle partageait à ce moment-là. Toutefois, Norah le portait davantage sur son visage, avait-elle l'impression, l'observant au travers de ses longs cils qu'elle battit doucement en se préparant à répondre à sa question précédente. L'arrivée de Julie lui offrit une échappatoire qu'elle accueillit avec un grand sourire cette fois, ainsi qu'un léger froncement de nez qui témoignait combien elle la trouvait mignonne et combien la complicité qu'elle partageait avec sa mère la touchait. C'était le genre de tableau auquel elle ne résistait pas. A vrai dire, quand les enfants étaient impliquées, l'objectivité de Yasmine avait tendance à disparaître et à devenir un imbroglio de réactions les plus adorables les unes que les autres. N'empêche qu'elle savait y faire avec eux, c'était pour cette raison qu'on faisait appel à elle lorsqu'ils étaient admis aux urgences et qu'un peu de douceur et de considération étaient nécessaires pour calmer les gros chagrins en même temps que les gros bobos.
Elle cala ses coudes sur ses genoux, puis elle joignit ses mains sur lesquelles elle posa son menton, toujours émerveillée de voir à quel point les enfants de Norah pouvaient être matures et polis pour leur âge ; encore un secret qu'elle couvait soigneusement, et qu'elle aurait été prête à lui extirper, tellement il lui paraissait évident que, malgré les épreuves endurées par leur famille ces dernières années, sa collègue avait la meilleure des méthodes d'éducation et qu'elle avait réussi à ce que ses enfants restent les plus heureux du monde – ça se lisait sur leur visage, le doute n'avait pas lieu d'être "Ils sont à toi, oui. J'en ai aussi apporté quelques-uns pour ton petit-frère." lui dit-elle, penchant la tête pour répondre à l'interrogation qui avait fait ouvrir de grands yeux à la petite-fille "Tu t'en rendras sûrement compte en furetant dedans, j'ai fait deux piles pour t'éviter de devoir faire le tri. Je t'ai laissée tous ceux que je préférais à ton âge, tu vas voir, ils sont géniaux – oh." Le câlin que lui fit Julie pour la remercier ne la pris pas vraiment par surprise, mais il lui fit un bien fou. Un court instant, elle se laissa envelopper par sa spontanéité, en oubliant presque la portée de la conversation qu'elle entretenait avec Norah sur qui elle redirigea son attention une fois que sa fille eut rejoint l'étage, et que le compliment qu'elle rapporta la fit très légèrement rougir "C'est une chouette gamine, j'espère qu'elle trouvera son bonheur." fit-elle avant de prendre conscience que les choses ne s'arrêteraient pas là, et que Norah reprenait le fil avec une dextérité singulière, à l'image de celle avec laquelle elle traitait ses patients à l'hôpital.
Yasmine reporta son regard presque translucide sur le verre de citronnade qu'elle avait abandonné. Testant assise tout au bord du canapé, les mains pendant entre ses jambes qu'elle écarta très légèrement en l'écoutant attentivement, elle l'interrompit brièvement "Franck savait comment parler aux femmes. C'est la chose la plus mignonne que j'aie entendue de ma vie." Et peut-être qu'elle préféra s'arrêter sur les paroles du défunt mari de sa collègue, plutôt que sur le reste. Déjà, elle sentit que son cœur se mit à battre plus vite. Sans le vouloir, elle se dit que cette conversation était une mauvaise idée en définitive ; parce qu'elle les sentait, les larmes gonfler dans sa gorge et au raz de ses cils, avec tellement de perspicacité d'ailleurs, qu'elle finit par se frotter brièvement le visage, se laissant retomber en arrière en rebondissant immédiatement sur les certitudes de Norah "Je suis pas aussi pleine de sagesse que Frank et toi, Norah." Pas en ce moment en tout cas. Elle soupira "J'en sais trop rien, peut-être. Je crois que j'ai dépassé le stade où, considérer qu'attendre que ça me tombe dessus, c'est la meilleure méthode à adopter." Elle avait toujours été du genre impatient pour certaine chose, Yasmine. Alors quoi faire, par où commencer ? Elle soupira une seconde fois, faisant rouler ses lèvres l'une sur l'autre, chassant en même temps les restes de sucre et de citron qui enduisaient délicatement ses lèvres. Elle s'y reprit à deux fois avant d'ajouter, relevant doucement le regard vers sa collègue à qui elle finit par dire, avec une certaine détermination dans le regard, à défaut de l'avoir dans le ton "J'y ai beaucoup pensé ces temps-ci, je compte quitter l'hôpital." Aussitôt, comme anticipant la demande de justifications de Norah, elle poursuivit, se redressant dans le sens inverse "J'ai fait le tour de ce que je peux apporter au service. Je dois penser à moi aussi, et j'y arrive plus… à me lever tous les matins en ayant la confirmation que c'est tout ce à quoi je peux vraiment prétendre pour le restant de mes jours. Je sature de tout." De l'ambiance glaciale entre elle et Saït, des regards insistants et des questions posées l'air de rien ; mais surtout du poids de sa déception qui pesait chaque jour un peu plus lourd.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyDim 5 Avr 2020 - 12:26

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Il ne fallait pas être devin pour savoir que Yasmine ne venait pas uniquement pour gâter les enfants de bouquins qu'elle leur léguait avec générosité. Norah lui en était même très reconnaissante, imaginant déjà Julie compléter un petit peu plus la grande bibliothèque qu'elle avait demandé et reçu pour célébrer ses dix ans. Une demande peu courante, mais que Norah ne pouvait qu'encourager. Elle n'était pas du genre à limiter ou freiner les passions de ses deux bouts de chou, ni les forcer à aimer des choses qu'ils n'aimaient pas. Elle se montrait par contre plus stricte en terme d'alimentation et dans la réalisation des devoirs. Il semblerait que les deux infirmières étaient sur la même pente glissante, mais que leur futur prenait malgré des perspectives différentes, mais peu encourageantes dans les deux cas. Pour Norah, le poids de chaque journée était un peu plus éprouvant à chaque réveil, pour ces quelques fois où elle parvenait à fermer les yeux pendant quelques minutes. Et alors que tout le monde s'évertuait à lui dire qu'elle avait le droit d'avoir quelques jours de congés pour elle, qu'elle le devait, même. Elle en aurait apparemment besoin. Seulement, ce que chacun refusait de voir était ce que Norah craignait le plus. Que si elle lâchait prise, tout s'effondrerait. Un peu comme ces personnes qui ne tombent malades que lorsqu'ils étaient en vacances. Au moment où l'on acceptait d'accorder au corps et au mental un peu de répit, de baisse la garde, pour finalement laisser place à quelques bestioles qui finissent par nous laisser au fond du lit des jours durant. La belle brune craignait que le même schéma ne s'applique dès lors qu'elle n'aurait pas à aller au travail pour une raison ou pour une autre. Il fallait se demander si sa peur était totalement fondée ou pas. A priori, elle ça l'était. C'était un sujet qu'elle ne préférait pas aborder ou penser. Les questions existentielles n'étaient pas vraiment sa tasse de thé. Et de Norah ou de Yasmine, il fallait deviner qui était la plus mal en point entre les deux et il était bien difficile de les départager. Sauf que Norah peinait de plus en plus à le cacher, elle l'avait noté par le regard que lui lançait son amie. Elle simula un bref sourire à sa petite plaisanterie, tentative peut-être désespérée de détendre l'atmosphère. En revanche, celle qui y parvint avec brio n'était autre que Julie, par sa simple présence. Ce qui attristait le plus Norah dans toute cette mascarade, c'était que ses propres enfants commençaient à remarquer qu'elle était triste. Même Aidan, qui l'avait dit à Anwar. Et ça lui brisait le coeur de savoir qu'elle n'avait même plus la force de prétendre que tout allait bien quand elle était avec sa progéniture. "Elle le trouvera, ça je peux te le garantir." répondit-elle, au sujet des livres que Yasmine venait de donner  Julie. Tant qu'il s'agissait de livres, à vrai dire, la fillette était facilement comblée. Norah était extrêmement fière de ses deux enfants, alors entendre ses amis les trouver gentils, adorable, ou de tout autre qualificatif pour les décrire de façon positive, elle en ressentait une certaine fierté. Elle se disait qu'au fond, elle devait quand même bien faire son boulot. Leur discussion ne s'attardait malgré tout pas sur cette note de légèreté qui couvrait tout le reste. Et ce n'était pas Norah qui allait aborder ces sujets fâcheux en passant par quatre chemins. Elle esquissa un sourire certain lorsque Yasmine affirmait que Frank avait un don pour parler aux femmes. Elle n'avait vraiment pas tort. "Il a su comment me charmer moi, du moins." répondit-elle avec un rictus chargé de nostalgie. Son amie ne cachait l'admiration qu'elle avait pour le couple Lindley. Ils étaient tous les deux de nature très posée, rares étaient les mots plus hauts que d'autres. Il semblerait que Yasmine n'ait plus la patience d'attendre que le Destin vienne frapper à sa porte et de lui rendre ce qu'elle mérite d'avoir dans sa vie. Elle qui était d'habitude toujours armée d'une patience extrême et nécessaire au quotidien, la voilà désormais désarmée et plus abattue qu'elle ne le laissait voir. Mais Norah, elle, savait que ce n'était pas de bonne augure. "Même si t'as plus la patience pour certaines choses, il y en a d'autres que tu n'arriveras pas à provoquer par ton seul bon vouloir." souleva-t-elle avec bienveillance. Seulement, Yasmine semblait s'être bien conciliée à l'idée de forcer des choses et en y allant de manière particulièrement radicale. Les yeux de Norah s'écarquillèrent, avec désapprobation, lorsque son amie lâchait la bombe. Quitter l'hôpital. Pour de bon. Et vraiment, la Lindley était convaincue que c'était une très mauvaise idée. "Tu sais qu'il n'y a pas que les urgences, dans un hôpital. Rien ne t'empêche de demander une mutation." La plupart des infirmiers des urgences ont un égo surdimensionné et le font bien comprendre quand certains ne se gênaient pas pour dire que l'hôpital ne tournait qu'autour de leur service adoré, mais ce n'était pas le cas de Yasmine. "Il y a des services où tu pourrais être plus posée, où t'aurais pas à croiser Saït si c'est toujours lui qui te pose problème." Après ce n'était que des suggestions. Si Yasmine voulait partir, Norah n'allait pas la contraindre de rester non plus. "T'as quoi en tête, quand tu dis que tu dois penser à toi ? En dehors du fait de partir, je veux dire." lui demanda-t-elle afin d'avoir plus de précisions sur les perspectives d'avenir sur lesquelles elle souhaitait se pencher. Peut-être qu'elle avait une idée en tête, un nouveau chemin tout tracé où elle ne voudrait pas se risquer à une déception aussi grande que celle de son refus pour la faculté de médecine. A se demander si ce n'était tout simplement pas une crise de la trentaine, une prise de conscience aussi soudaine qu'encouragée par des événements négatifs et inopportuns. Norah comprenait mieux que personne à quel point Yasmine pouvait se sentir désespéré, mais de là à mettre une crois sur un métier et un service qu'elle adorait lui semblait presque excessif. Mais avant de partager sa désapprobation certaine ou peut-être même changé d'avis sur la question, elle tenait à s'assurer que sa collègue avait de la suite dans les idées et qu'elle ne se jetait pas dans l'inconnu le plus total. Et elle n'était pas certaine que fuir ses problèmes était une solution idéale pour elle, qu'importe si sa décision était mûrement réfléchie ou non. "Tu as déjà songé à ce que tu pourrais faire ensuite ?" la questionna-t-elle alors de façon plus directe. Le malaise était palpable, l’atmosphère s'était soudaine alourdie, que même une boisson rafraîchissante ou un échange de sourires ne saurait dissiper.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyJeu 9 Avr 2020 - 7:11

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Ça avait toujours été plus facile de parler à Norah. Peut-être parce que, malgré leur vie diamétralement opposée – l'une déjà veuve avec deux enfants à charge, l'autre célibataire avec un chat pour seule vraie responsabilité –, il y avait une part de sa collègue, la plus professionnelle donc, qui était capable de comprendre par quoi Yasmine était en train de passer. Alors dire à voix haute ce qu'elle mûrissait depuis quelques longues semaines ddéjà, ça la soulagea de quelque chose – plus encore que d'un poids, d'une masse maline qui la rongeait de l'intérieur, façonnée à partir de toutes ces choses qu'elle gardait consciencieusement pour elle par crainte de déranger, d'inquiéter. En même temps, elle ne pouvait pas nier que faire part de ses projets de démission à la jeune femme la mettait dans un état de nervosité qu'elle eut bien du mal à contrecarrer, s'agitant aussitôt pour apposer ses explications, les rendre plus dignes de la décision qu'elle lui exposa, peu sûre d'elle malgré tout. Elle avait toujours cru en elle, Norah. Parfois Yasmine en venait à se demander pourquoi, et comme avec Hassan qui semblait toujours si certain qu'elle était capable de tout et son contraire, elle soupçonnait un manque d'objectivité induit par leur lien si particulier. Pourtant, c'était si tentant de prendre les compliments d'une infirmière comme Norah pour argent comptant ; de les chérir pour ce qu'ils étaient, et de s'en repaître pour avancer… sauf qu'au-delà de sa gentillesse et de son abnégation, Yasmine était avant tout une jeune femme qui manquait cruellement de confiance en elle et les compliments des autres, elle n'avait jamais su quoi en faire.
Elle sentit qu'avec sa nervosité venait un léger changement d'atmosphère. Elle s'étira dans la pièce pour mieux les englober toutes les deux, allongeant ses longs bras pour les bercer sinistrement. Les yeux gris de Norah devinrent cobalt, accentuant les marques de fatigue violacées qui cernaient son regard. Yasmine baissa brièvement le sien, penaude.

"Je sais, oui." A une époque, pas si lointaine d'ailleurs, elle aurait vendu père et mère pour pouvoir rejoindre le service de pédiatre "Mais je…je veux pas changer de service. Je veux tout arrêter." explicita-t-elle et cet échange d'informations la fit se recaler dans le fond du canapé puis tourner la tête pour regarder partout ailleurs, sauf Norah "Les choses sont toujours un peu étranges avec Saït, c'est vrai. C'est pas vraiment ce qui m'a donnée l'idée de m'en aller. Surtout qu'il essaye de se faire pardonner depuis des jours et que je comptais lui accorder le bénéfice du doute." En d'autres termes : lui pardonner, pensa-t-elle en l'avouant à demi-mots à la brunette tandis qu'elle se remettait à triturer le bout de ses longs doigts bagués. Elle s'arrêta sur celle que ses parents lui avaient offerte pour son dernier anniversaire ; un anneau rose doré, gravé de vœux en arabe qui les rassuraient eux, plus qu'elle, et qu'elle fit tourner autour de la phalange de son index gauche et sur lequel elle se concentra comme pour dénicher la solution d'une énigme particulièrement corsée. Elle poursuivit doucement "J'ai jamais réussi à en vouloir très longtemps aux autres, et je sais que j'ai mes torts dans cette histoire." Elle se rappelait du bouquet de jasmin que son supérieur avait déposé dans son casier à la suite de l'annonce des résultats de son examen, et de sa carte aux ses jolis mots qui avaient coulé sur elle comme de l'eau sur une roche. Ça ne lui ressemblait pas d'être aussi pugnace, mais elle se souvenait aussi du regard qu'il avait posé sur elle lorsqu'il s'était aperçu que quelque chose n'allait pas chez elle et de ses rebuffades pour lui faire entendre que c'était lui le chef… et ça lui avait fait du mal.  
Elle soupira doucement, faisant papillonner ses paupières en amande quelques secondes en quittant ses doigts du regard pour le poser sur le plafond impeccable du salon, se raccrochant au bon-vouloir d'une entité qu'elle supplia silencieusement de l'aider à ne pas flancher ; lorsqu'elle répondit à Norah qui lui demandait à quoi elle songeait quand elle disait vouloir penser à elle "Prendre le temps d'aller mieux ? Je peux pas continuer à exercer une profession comme la nôtre alors que je vais pas bien. J'ai des progrès à faire, je dois…" Elle ne continua pas sa phrase parce que la suite des interrogations de sa collègue venait de la prendre de court.
Avait-elle des idées pour combler le temps qu'elle aurait devant elle après avoir quitté l'hôpital ? Yasmine marqua un long silence, et ça en disait plus long que les dizaines de réponses qu'elle aurait pu fabriquer en quelques secondes pour contenter la curiosité légitime de la jeune femme. Si elle avait l'impression d'être passée à côté de quelque chose en couvant le rêve qui l'avait mené à devenir infirmière, elle n'avait en revanche aucune idée de ce que c'était exactement. Peut-être que l'abandon de la blouse lui permettrait, justement, de mettre le doigt dessus ? Rien n'était moins sûr, et parce qu'elle avait toujours été honnête avec Norah, elle ne pouvait décemment pas prétendre avoir une vue éclairée de ce qui l'attendait au cours des prochains mois. Doucement, mais dignement, elle lui souffla d'une petite voix :
"Pas vraiment, Norah." Elle tourna la tête dans sa direction et la regarda longtemps. La bouche entrouverte, elle donnait l'impression de peiner à intercepter son propre train de pensées. Quand enfin elle y parvint, ce fût pour ajouter "Je suis peut-être pas faite pour tout ça finalement." Pour l'hôpital, ce monde aussi cruel que merveilleux dans lequel elle avait pourtant baigné longtemps, portée par ses espoirs et par sa volonté d'aider de la meilleure façon. Secouant très doucement la tête, ses yeux se glissèrent sur un point au-dessus de la tête de sa collègue. Il y avait quelques mois de ça, elle avait partagé avec elle son sentiment de ne pas être utile ; les choses avaient tellement changées depuis. Mais le fond du problème restait le même en vérité… il avait juste était corroboré par le rejet de la faculté, et ça la blessait tellement dans l'ego fragile qui était le sien que leur donner raison était le seul moyen pour elle d'avancer, de se reconstruire aussi. Mais comment ? "Peut-être qu'en me laissant le temps de réfléchir à mes options, je réussirais à trouver ce à côté de quoi je suis passée toute ces années ? Si ça se trouve, je réussirais jamais à mettre le doigt dessus… mais je dois essayer, non ? Je peux juste… plus continuer." Une nouvelle fois, elle fit papillonner ses paupières, chassant la sensation de picotement qui naquit dans le fond de ses iris comme des milliers d'aiguilles qui rentrèrent en action en même temps "Dis-moi que tu comprends…" conclut-elle, presque suppliante, la tête inclinée sur sa propre épaule et le regard plongé dans celui de Norah.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyMar 21 Avr 2020 - 15:06

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La décision de Yasmine était des plus surprenantes. Elle qui aimait pourtant ce métier, elle faisait partie de ces véritables passionnées dotés d'une humanité et d'un savoir-faire comme il pouvait parfois en manquer. Elle était faite pour ce métier et voilà qu'elle préférait renoncer à tout pour des raisons qui s'entendaient, mais que Norah n'était pas vraiment prête à cautionner. Ses yeux clairs tentaient de sonder l'esprit de son amie afin de comprendre quelle était l'origine d'un tel revirement de situation, pour prendre une décision aussi draconienne que d'abandonner le métier d'infirmières pour faire on-ne-savait-quoi. Dans un premier temps, la belle brune tentait de la faire relativiser, en lui suggérant de commencer peut-être par changer de service et ainsi s'éloigner de ce qui pouvait lui poser problème. Mais Yasmine balayait très rapidement cette idée en précisant qu'elle comptait en finir avec le métier de soignante et qu'elle ne laisserait ni rien ni personne ne la dissuader de son choix. "Et pourquoi tu ne lui pardonnes tout simplement, comme il te pardonne à toi le fait que tu ne l'aies pas écouté ?" C'était aussi simple que ça. Mais là, il devait y avoir une question de fierté qui entrait en jeu pour les deux partis. "Faut que ça vous passe à tous les deux, le temps fera le reste." Norah finirait par intervenir de toute façon si leurs différends se répercutaient sur l'équipe ou sur les patients car les deux-là mettaient sa patience à rude épreuve avec leurs conflits. Pourtant, elle les adorait tous les deux individuellement, mais le tout devenait trop électrique quand ils se trouvaient dans la même pièce. Remarque, elle n'aura pas à attendre que sa relation avec Saït ne se calme, car elle avait apparemment la ferme intention de faire une croix sur sa carrière dans le monde hospitalier. Quel gâchis, songeait Norah tout en continuant de prêt une oreille attentive à son amie. Le manque de perspectives d'avenir de Yasmine prouvait qu'elle n'avait absolument pas idée de ce qu'elle ferait par la suite. Elle ne s'en serait pas inquiétée si elle savait Yasmine intrépide et aventureuse. Et bien qu'elle ait un goût certains pour les épopées; avec pour preuve son voyage humanitaire; cela ne lui était pas suffisant pour se plonger dans la plus grande des inconnues qu'était devenu son avenir. Yasmine était totalement perdue. Elle se donnait des pistes toutes seules, espérant trouver la clé de son bonheur une fois débarrassée de sa tenue d'infirmière pour de bon. Elle voulait franchir une nouvelle étape et ne voyait que cette issue là pour y parvenir. Norah misait sur une sorte de crise de la trentaine et elle doutait que les récents événements survenus au boulot soient les seuls motivateurs d'une décision aussi soudaine qu'abrupte. "Et si t'arrives pas à mettre le doigt sur ce qui te correspondrait le plus ?" lui demanda-t-elle finalement. "Je veux pas me montrer pessimiste ou quoi, mais il faut se tenir prête à toute éventualité. Est-ce le cas ?" lui demanda-t-elle en gardant ses yeux vissés sur elle. Norah avait toujours aimé aborder une situation sous tous ses angles. Cela faisait partie des qualités d'une infirmières. Ne pas mettre d'oeillères et évaluer toutes les possibilités. Un point commun qu'elle partageait avec Frank, qu'il avait également utilisé durant toutes ses enquêtes. "Une partie de moi comprend." lui répondit-elle. "L'autre se demande vraiment si c'est la meilleure solution pour toi." Mais Yasmine était majeure, vaccinée. Avec une famille extrêmement protectrice et plongée dans les traditions. Finalement, cette pointe de rébellion n'avait peut-être rien d'étonnant. Sortir des sentiers battus et voir ce que la vie lui réserverait. "Je ne souhaite que le meilleur pour toi, sache-le." La franchise de Norah n'était un secret pour personne, et encore moins pour la brune. "Mais là, tu comptes démissionner de l'hôpital. Du jour au lendemain, t'auras plus de boulot, plus de revenus. Il faudra alors que tu trouves une motivation pour te lever le matin, avoir le courage de trouver cette nouvelle voie que tu veux tellement trouver." L'introspection était la tâche la plus difficile au monde. La preuve, même Norah ne s'y frottait  pas (bien que ça n'allait pas tarder). "Et ça peut être un travail bien plus épuisant et bien plus long qu'on puisse penser. Les jours où tu en auras marre, où tu auras un coup de mou, tu pourras plus dire je quitte et je fais autre chose, à ce moment-là." Ou sinon la brune s’inquiéterait véritablement pour son amie. "Je pense que ne pas avoir ne serait-ce la moindre idée de ce que tu voudrais faire par la suite alors que tu t'apprêtes à quitter ton job actuel est vraiment..." Elle soupirait alors qu'elle tentait de trouver le mot plus juste pour décrire sa pensée. "A mon sens, c'est te mettre en danger toute seule." résuma-t-elle dans un soupir. "Et c'est pas correct." Pas pour ce qu'elle se risquait de s'infliger sans le vouloir. La chute serait rude. "Je dis pas que t'en es pas capable, mais toi qui aimes les choses bien cadrées, tu te lances dans l'inconnu." Elle ne doutait pas de sa maturité; Norah savait qu'il y en avait encore trop qui avaient tendance à la prendre pour une enfant;  mais elle se demandait si ce choix était vraiment justifié. "Et si tu me sors que tu comptes refaire de l'humanitaire, ce sera moi qui t'empêcherais d'y aller." dit-elle avec plus de fermeté. Que Yasmine comprenne que cette voie-là n'était pas envisageable. C'était une cause qui lui tenait à coeur. Beaucoup trop, selon Norah. Sinon elle ne serait pas revenue aussi changée qu'auparavant. L'empathie était un atout difficile à manier. Un équilibre fragile qui pouvait virer soit dans l'attachement et l'atteinte de l'affect, soit à devenir un robot sans coeur, froid comme de la glace. Norah en avait vu, des infirmières qui abandonnaient leur métier. Mais ces personnes là avaient trouvé une alternative avant de remettre une lettre de démission à leur supérieure, ce qui n'était pas le cas de Yasmine. Et la brune aux yeux bleus craignait de voir ainsi son amie se perdre encore plus qu'elle ne l'était déjà.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyLun 27 Avr 2020 - 12:10

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Elle n'avait pas envie de revenir sur son conflit avec Saït. Ça remuait beaucoup trop de choses, et puisqu'elle avait la certitude que dans peu de temps, elle serait la première à enterrer la hache de guerre de façon plus officielle que les vaines tentatives du jeune homme de faire amende honorable, il n'y avait plus vraiment matière à débattre sur qui avait tort ou raison. En revanche, s'étendre sur la nouvelle qu'elle venait d'annoncer à sa collègue était plus que nécessaire, mais tout autant tortueux que de revenir sur les raisons de ses désaccords avec son supérieur direct. Yasmine sentait peser le regard de la jeune femme sur elle, et ça lui donna brièvement l'impression de revenir quelques années en arrière – à une époque pas si lointaine où se faire gronder par ses parents lui provoquait rougissements et larmes aux yeux qu'elle refoulait toutefois, et ce pour mieux leur dire pardon qu'importe si elle était en tort ou non.  
Son anxiété se réveilla assez pour la faire craindre de flancher face à l'expertise qu'elle lui déroulait avec le ton monocorde qui était le sien. Comment Norah faisait-elle pour toujours être maîtresse d'elle-même alors qu'en la regardant de plus près, on avait le sentiment qu'elle était à deux doigts de s'effondrer ? Ça la fascinait, cette manière qu'elle avait de tout rationaliser avec une sérénité qui contrastait avec les éclairs que lançaient ses yeux et qui, cette fois-ci, étaient entièrement dirigées contre elle. Au-delà de l'avis que quémandait Yasmine, la pointe d'irritation qui vint chatouiller ses côtes à l'instant où Norah se répandit en paroles lui fit comprendre qu'elle n'était pas d'accord avec ce qu'elle avançait pour défendre sa décision de démissionner. A vrai dire, elle ne s'était pas attendue au contraire, plutôt consciente de faire partie de éléments avec qui sa collègue préférait travailler, ne ratant pas une opportunité de lui rappeler qu'elle était faite pour ce métier-là. Et pourtant, elle reçut tout ce qu'elle lui dit avec la même violence que la gifle que lui avait donnée sa propre mère, il y avait près d'un an de ça.
Sur le coup, elle ne sut quoi répondre à tous les problèmes que soulevait Norah et qui lui firent réaliser, même si elle le savait déjà quelque part, qu'une fois qu'elle aurait raccroché sa blouse d'infirmière, fermant la porte de son vestiaire sur des années d'exercice et de travail acharné, elle avancerait dans un flou qui n'avait rien d'artistique. Mais n'était-ce pas plus tolérable que d'avancer avec la sensation de reculer constamment, les pieds maintenus au sol par tant de choses négatives, qu'elle avait bien du mal à trouver la motivation pour faire ce qu'elle avait toujours fait ? La question méritait d'être posée, aussi elle était la seule à pouvoir trouver la réponse… et finalement, il semblait qu'elle l'avait déjà dénichée à force de ruminer ; qu'importe ce que lui dirait Norah à ce moment-là, Yasmine savait qu'elle partirait.

"Attends, qu'est-ce que tu sous-entends ?" lui demanda-t-elle alors. Restée interdite en encaissant toutes ses interrogations, Yasmine se ranima en s'arrêtant sur quelque chose qui la blessa profondément. Qu'avançait-elle lorsqu'elle lui avait dit ; les jours où tu en auras marre, où tu auras un coup de mou, tu pourras plus dire je quitte et je fais autre chose, à ce moment-là "T'es en train de me dire que je choisis toujours la facilité pour m'en sortir, c'est ça ?" Et dans cette situation-là la facilité, c'était de tourner le dos à ce pour quoi elle avait travaillé des années entières. Et à cause de quoi ? D'une déception ? D'un mauvais ressenti ? De conflits persistants ? D'une accumulation de plusieurs choses qui lui pesaient tellement sur le cœur, qu'elle ne réussissait plus à envisager son métier comme quelque chose de positif dans sa vie ? Sa vie, la sienne, celle avec laquelle elle devait se débattre, même pendant son sommeil si difficile.
A ce moment, Yasmine se dit que Norah avait mal saisi ses arguments et que l'idée d'aller mieux pour avancer lui était totalement passé au travers. Elle se leva du canapé, frottant les paumes de ses mains sur le devant de son jean avec sur le visage, un très léger sourire sans joie "Qu'est-ce que je risque à faire une pause pour explorer ailleurs, hum ? Je te rappelle que mon diplôme d'infirmière est acquis, je m'efforcerais d'y revenir si jamais je stagne… mais je veux voir ce qui se passe ailleurs, j'ai besoin de voir ce qui se passe ailleurs" Elle avala sa salive à grande lampée. Yasmine se rendit compte qu'elle avait soif. Pendant une fraction de seconde, ça la frustra de ne pas savoir exactement si c'était à cause de la limonade qu'elle avait dévalé avec la maîtrise d'un pilier de bar, ou si c'était parce qu'elle retenait courageusement son envie d'éclater en sanglots.
Mais elle ne pleurerait pas, pas cette fois. Faisant saillir les tendons de son cou en prenant une grande inspiration, elle pencha la tête sur le côté. La main levée dans l'espace qui la séparait de Norah, elle poursuivit avec détermination "Je pars par pour me la couler douce. Je pars parce que je dois faire un travail sur moi et sur la manière de mieux encaisser toutes les horreurs qui nous tombent dessus tous les jours. Je vais pas te faire l'affront de les énumérer, tu sais de quoi je veux parler." Sa récente conversation avec Olivia l'avait faite réfléchir, elle l'avait menée à se convaincre qu'il y avait des choses qu'elle n'était plus capable de tolérer. Et son échec à l'école de médecine ? C'était peut-être la preuve irréfutable qu'elle devait viser moins haut, et se contenter de la bulle dans laquelle ses parents l'avaient mise dès sa naissance : elle y avait toujours évoluée avec une aisance que ses petits actes de rébellion avaient rendus satisfaisante, et jusqu'alors ça lui avait bien réussie… alors pourquoi aspirer à plus ? Non, Yasmine n'était pas faite pour la rudesse du monde qu'elle avait pourtant choisi, et il lui avait fallu un voyage humanitaire bouleversant, un échec retentissant pour enfin s'en apercevoir.
Comme toutes les leçons qu'elle avait apprises au cours de son apprentissage et qui l'avaient suivies tout au long de sa carrière, elle devait s'en servir pour mieux évoluer et se trouver ; et peut-être qu'au fond Norah avait raison, c'était la facilité qui lui seyait le mieux "J'ai pas ta force ni ton caractère. Je me sens plus capable de vivre avec certaines images et crois-mois, j'ai eu ma dose au cours de ces deux dernières années." conclut-elle, mais momentanément. Norah reprit la parole, aussi Yasmine leva doucement les mains de part et d'autre de sa silhouette, secouant la tête quand ses yeux qui brillaient fort menèrent une légère embardée vers le plafond qu'elle contempla sans le voir "Je sais pas ce que je vais faire, j'en sais rien. Mais il y a plusieurs façons de faire de l'humanitaire, comme il y a plusieurs façons d'être infirmière… c'est à moi de trouver celle qui me convient le mieux." Un nouveau sourire sans joie fendit son visage quand enfin, elle baissa le menton pour poser le regard sur la jeune femme. Yasmine lui dit ; sans doute un peu durement d'ailleurs, mais dans le vif du sujet, elle ne s'en aperçut pas tout de suite, trop concentrée sur la nouvelle blessure qui, pulsant sous l'afflux de sang provoqué par l'emportement relatif qui l'avait faite se lever du canapé et mettre un peu de distance entre elle et son interlocutrice, avaient causé ses sous-entendus "Et avec tout le respect que je te dois, qu'importe ce que je déciderais à la fin, c'est pas ta bénédiction que j'étais venue chercher, Norah." Juste un peu de soutien – ce qui, en définitive, était hors de la portée de la jeune femme. Et plus que tout ce qu'elle avait laissé échapper en pointant les failles du projet qu'elle avait partagé avec elle, cette prise de conscience soudaine lui brisa le cœur.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyJeu 14 Mai 2020 - 6:34

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L'impassibilité de Norah était presque légendairer. Il était bien difficile de faire perdre les moyens à cette tête brune, qui n'avait qu'à lancer un regard froid pour faire comprendre ses contrariétés et ses agacements. Cela avait toujours été comme ça et ça contrastait beaucoup avec ses trois frères. Ils n'étaient pas  non plus totalement opposés en terme de comportement; en effet, les Leckie étaient tous plutôt posés, mais la benjamine l'était le plus, à la surprise générale. On cherchait pas vraiment à l'énerver; ils ne voulaient pas vraiment voir ce que ça pourrait donner. Ils en avaient eu l'occasion, quelques très rares fois et ce n'était pas une expérience qu'ils désiraient franchement renouvelés. "Je ne sous-entends rien du tout." lui répondit-elle aussitôt, toujours avec cette même neutralité dans sa voix. "Là, c'est toi qui interprète mes paroles." Son regard clair droit dans les sien, Norah restait immobile, presque inexpressive. Parfois, ça pouvait devenir un peu effrayant. "J'ai jamais dit que quitter un boulot qu'on fait depuis des années est facile. Je te demande juste ce que tu feras si jamais tu es menée à te rendre compte que ta nouvelle vie ne te convient pas si c'est le cas." Ce n'était qu'un questionnement, une supposition comme une autre. Bien qu'elle désapprouvait son choix, Norah ne l'accusait en rien. Elle tenait juste à s'assurer que son amie ait songé à toutes les possibilités. "Bien sûr que tu as ton diplôme en poche." répliqua-t-elle. "Supposons que tu sois dans le pire des scénarios. Je dis pas que ça va arriver, ce n'est qu'une possibilité parmi plein d'autres. Mais imaginons que ça ne fonctionne pas, quoi que tu choisisse de faire. Il te reste ton diplôme d'infirmière, mais c'est un métier que tu ne veux vraisemblablement plus faire. Là, tu feras quoi ? Les hôpitaux sont en général peu tentés à reprendre des démissionnaires." Et le St. Vincent restait le plus gros employeur en matière de soignants dans tout Brisbane. Aussi, l'herbe n'était pas plus verte dans les plus petites structures du coin. "Je m'en voudrais si tu te retrouves au pied du mur  sans te faire questionner sur toutes les possibilités. Encore une fois, c'est pas pour autant que je pense que ça va se passer de cette façon là." Norah aimait toujours avoir un visuel sur l'éventail des possibilités qui se présentait à elle. Bien qu'elle gérait bien les imprévus de façon générale, elle n'aimait pas trop les surprises pour autant, les imprévus. Frank, encore moins. Alors que Norah n'avait fait que pointer du doigt certaines choses auxquelles Yasmine était susceptible de tomber dessus lors de ses recherches, celle-ci se braquait totalement, interprétant les moindres mots de son amie comme étant une agression. Norah ne s'opposait pas foncièrement contre sa démarche. Yasmine ressentit le besoin de se justifier, de faire face aux commentaires de Norah pour se prouver avant tout qu'elle prenait la bonne décision. Norah n'allait décemment pas décider à sa place. Elle aussi, en voyait des horreurs au quotidien, elle aussi se prenait le chou avec certains collègues. Elle avait sûrement un seuil de tolérance plus élevé que celui de la belle brune, qui elle, avait atteint son point de rupture. "Alors pourquoi tu es venue ?" lui demanda-t-elle, sans l'accuser, encore une fois. Norah observait son amie, qui avait jugé bon d'ajouter un peu de distance entre elles. "T'avais besoin d'en parler, t'avais aussi sûrement besoin d'entendre ce que j'avais à dire sur ta décision." Sinon, elle ne serait pas venue comme ça, à s'asseoir, prête à réceptionner le retour qu'elle avait à faire. Elle lui aurait donné le carton de livres, lui aurait annoncé la nouvelle et serait partie, ayant certainement d'autres choses à faire. "Je vais pas m'y opposer. Tu l'as dit toi-même, c'est ta vie, c'est ton choix." Tout comme elle ne se mettrait pas dans le chemin de ses enfants selon la voie qu'il s'agirait, à quelques exceptions près. Seulement, c'était son devoir de les guider, de leur faire voir toutes les possibilités, de prendre conscience de l'importance de leur décision. "Tu voulais entendre un avis autre que tes parents, que tes proches, que n'importe qui, j'en sais rien. Et je te l'ai donné. Et tout ce que je te dis, c'est que tu devrais penser à toutes les possibilités, avoir un tampon si jamais ça ne tourne pas comme tu l'aurais voulu. Je ne t'accuse et je ne t'agresse en rien, Yas." Norah n'était pas sûre d'apprécier que son amie se soit autant mise sur la défensive avec elle. La marocaine devrait pourtant la façon dont Norah fonctionnait et comment elle réagirait. "Tu as besoin de déverser une partie de ta colère et de ta frustration parce que je dis pas ce que tu avais envie d'entendre, c'est une chose. Que tu prennes mal des choses que tu as peut-être besoin d'entendre en est une autre." rétorqua-t-elle froidement. "Je t'oblige pas à prendre en compte ce que je t'ai dit non plus. " Elle pouvait comprendre qu'elle était à fleur de peau, que tout ce qui lui était récemment arrivé la bouleversait au possible et la poussait à changer radicalement de voie. Mais Norah n'y était pour rien. La Lindley  restait assise sur le canapé, il n'y avait pas un mot plus haut que l'autre. Elle avait sa manière bien à elle de gérer les personnes qui s'emportaient, comme le faisait Yasmine à cet instant précis. "Et si tu n'as pas ma force, sache que tu as la tienne, qui t'es propre. Ca demande un sacré cran et une bonne dose d'audace pour franchir le pas que tu venais de faire. C'est pas donné à tout le monde, mais toi, tu le fais." Une partie de Norah était fière malgré tout. Elle aimait pouvoir en dire lorsqu'elle songeait à sa vie amoureuse, au fait qu'elle restait accrochée envers et contre tout au fantôme de Frank. Les sentiments ne s'éteindraient certainement jamais. Elle avait peur de se perdre elle-même en se détachant de cela; et peut-être avait-elle peur que Yasmine ne se perdre en s'éloignant autant d'un métier qu'elle avait pourtant aimé pendant des années. A moins que son appréhension ne prenait une toute autre mesure quand elle se rendait compte que tout son entourage avançait d'une façon ou d'une autre, de manière positive ou négative, et qu'elle restait coincée entre ces murs de glace qu'elle ne saurait fendre.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyMar 26 Mai 2020 - 11:45

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L'air s'était épaissit. Yasmine le sentit très distinctement se charger lentement au-dessus de sa tête, le rendant de plus en plus palpable et irrespirable. Mais de quoi était-il chargé exactement ? Elle eut du mal à le déterminer, trop mal habile lorsqu'il s'agissait de déterminer de quoi un conflit est fait. Ce dernier, contre toute attente, était bien présent pourtant, éclatant sans prévenir, tel un orage en plein été, tandis que le regard fiché sur l'expression du visage que laissait poindre Norah, ses yeux ne la quittaient pas, pas même pour battre des cils. Dans l'intimité de ses pensées, elle réfutait l'idée d'être fâchée contre elle, cette collègue qu'elle appréciait tant et qu'elle pouvait même définir comme étant devenue une amie en dehors des murs de l'hôpital, mais en même temps les relents de leçons de moral qu'elle humait dans l'air du salon de la jeune femme lui hérissait le poil. Elle était à fleur de peau, elle ne dirait pas le contraire, aussi par-delà sa perception tronquée des propos de l'infirmière, il y avait quelque chose qui la dérangeait au point qu'elle eut du mal à considérer ses pseudo-conseils comme de la bienveillance. C'était la première fois que ça lui arrivait, et quelque part près de son cœur qui battait vite et fort dans sa poitrine, ça l'anéantissait profondément que ce soit Norah qui soit celle qui lui faisait ressentir ce genre d'émotions.
Sa position d'unique fille du couple Khadji lui avait valu d'être mise sous cloche très rapidement. Si petite et fragile, on avait craint pour ce qu'elle représentait, le genre de joyau rare sur lequel on ne tombe qu'une seule fois dans sa vie, au point que le sentiment de protection autour d'elle lui avait parfois donné l'impression d'étouffer. En aurait-il été autrement si ses parents n'avaient pas été de cette culture-ci, et si elle avait été à une autre place dans l'ordre de la petite fratrie qu'elle formait avec Sohan ? Yasmine ne s'était jamais posé la question. Restait cependant que le statut dont elle jouissait depuis sa naissance lui avait parfois permis, et ce sans effort, d'obtenir gain de cause auprès de ses parents. Elle n'avait pourtant jamais été de celle qui en profite, c'était tout le contraire. Loin d'être colérique et exigeante, son seul défaut avait été de vouloir se démarquer des attentes de ses parents qui avaient rapidement compris qu'il était inutile d'insister pour le faire entrer dans le schéma mari-musulman-bébés-une-fois-tous-les-deux-ans qu'ils auraient voulu qu'elle suive pour parfaire une tradition qu'eux-mêmes avait bafouée pourtant ; elle savait malgré-tout qu'ils avaient tendance à prétendre que sa parole était un trésor, comme elle, qu'ils avaient tant attendue. Est-ce que ça faisait d'elle la favorite du clan ?
Était-ce pour cette raison qu'elle prenait si mal le discours de Norah ce soir ? Parce que pour la première fois de sa vie, on ne lui disait pas ce qu'elle voulait entendre, et que si peu habituée d'ailleurs, elle ne savait pas comment le gérer sans se braquer comme une adolescente incomprise ? Non, Yasmine était ouverte à la critique et aux reproches, pas la dernière à en assumer les conséquences quand elles étaient méritées. Se montrant plus dure avec elle-même que quiconque dans son entourage proche, elle ne refusait jamais de tendre l'autre joue quand ils s'agissait de fustigations… mais la coupe était pleine, et ce depuis plusieurs longues semaines déjà. Elle cherchait du soutien qui, sans pour autant être complaisant, aurait au moins pu être réconfortant. Ce n'était pas le cas ici.

La froideur de Norah, elle l'avait toujours jugée à son avantage, elle qui lui permettait de faire son travail avec le talent qui lui était propre. Mais dans l'état actuel des choses, elle ne supporta pas l'impassibilité surjouée avec laquelle elle asséna ses soi-disantes vérités.
"C'était une mauvaise idée." siffla-t-elle en entendant Norah lui demander pourquoi elle était venue ici si elle prenait aussi mal ce qu'elle avait à lui dire. Déjà débout, Yasmine glissa une main dans l'arrière de son pantalon pour en dénicher les clefs de sa Jeep. Elle recula d'un nouveau pas en passant son index dans l'anneau de son porte-clefs, et s'apprêta à toupiller sur ses talons pour s'en aller, quand la suite des paroles de la jeune femme la fit revoir ses plants immédiats "Prendre mal des choses que j'ai peut-être besoin d'entendre ?" répéta-t-elle en léger décalé, la voix prenant des accents lointains que le regard qu'elle posa sur elle rendit plus ferme toutefois – de vert amande, ils passèrent à vert empire "Franchement, ça te réconforte de penser que t'as le pouvoir nécessaire de décider de ce que j'ai besoin d'entendre ou non ?" lui demanda-t-elle, et un nouveau sourire sans joie fendit son visage une fois qu'elle eut conscience de combien cette discussion tournait mal, et de combien elle resterait affectée par tout ce qui se disait. Une des raisons pour lesquelles elle s'obstinait à ne jamais parler de ses difficultés à autrui ; parce que récemment, tout le monde s'était senti assez à l'aise avec l'idée de lui retourner le boomerang en pleine figure quand elle émettait des doutes aussi prégnants que ceux-là.
Cette fois, un rire lui échappa. Il s'éteignit vite toutefois. Les sourcils levés, elle se tourna à nouveau vers Norah qu'elle fixa à nouveau "C'est facile de me dire ce genre de choses après avoir enfoncé le couteau dans la plaie." rétorqua-t-elle, s'abimant le doigt en poussant si fort sur les bords de l'anneau de son porte-clefs qu'une légère entaille entama la naissance de son ongle. Yasmine secoua la tête, et sa main vide vint remettre une mèche de cheveux derrière son oreille – cette main, elle la laissa marquer un point invisible dans l'air lorsqu'elle ajouta "A quoi ça va m'avancer de savoir à quel point je suis forte et audacieuse, alors que tu m'as clairement dit que ma décision de quitter l'hôpital est une mauvaise idée ?" Rhétorique, sa question fût ravalée quand elle décida qu'il était temps pour elle de lever le camp ; ce qu'elle annonça d'ailleurs en pivotant, le bout de sa langue niché dans une dent creuse, et lâchant un "Laisse tomber." plein de lassitude qui se perdit dans le chemin qu'elle emprunta pour rejoindre le vestibule de la maison des Lindley.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyDim 31 Mai 2020 - 14:38

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Norah commençait à être gentiment agacée par cette conversation qui ne menait absolument nulle part. Elle avait ses opinions et ne manquait pas de les partager quand elle en avait envie (en soin, c'était pas si courant que ça). Elle entendait l'avis des autres, cela changeait parfois son point de vue, mais il semblerait que ça n'allait que dans un seul sens entre les deux brunes et la Lindley finissait par conclure qu'elle n'arriverait définitivement pas à faire en sorte que Yasmine ne soit plus autant la tête dans le guidon. La Khadji prenait la mouche après chaque phrase que sa collègue pouvait prononcer, au point même où cette dernière en levait les yeux au ciel d'exaspération. Rien que ça, il fallait le faire. "C'est le cas là, non ?" lui demanda-t-elle alors qu'elle répétait la phrase que Norah venait tout juste de prononcer. "Et qui a dit que j'avais du pouvoir sur quoi que ça ?" Elle restait pourtant impassible, avec ce contrôle de soi qui était devenu légendaire chez elle. Cela n'empêchait pas la mère de famille d'adopter un timbre de voix un tantinet plus sec qu'à l'accoutumée. "C'est ce que j'estime que tu as besoin d'entendre. Après t'en fais ce que tu veux." répliqua-t-elle alors que les traits de son visage se durcissaient. "Interprète mal les choses que je te dis si ça te chante." Elle n'allait pas la caresser dans le sens du poil pour la réconforter et lui assurer que tout irait bien dans le meilleur des mondes. Cette naïveté dégoulinante, Norah en avait horreur. Yasmine prétendait toujours apprécié le fait que son amie joue carte sur table à chaque instant, mais il semblerait que ce ne soit pas tant le cas, finalement. "Je sais pas ce que tu attends de moi, là." fit-elle remarquer. "Tu aurais préféré que je sois mielleuse au possible en allant dans ton sens ?" Ce qui, en soi, aurait mené Norah à mentir, et ce n'était vraiment pas le genre de la maison. Leur discussion n'avait ni queue, ni tête, rebondissait sur des détails qui n'avaient pas lieu d'être. Une partie de Norah avait envie de l'abréger, histoire qu'elles y repensent chacune de leur côté après quelques nuits de sommeil et des journées à faire autre chose, avant qu'elles ne finissent par prononcer des paroles susceptibles de dépasser leurs pensées. "Parce que ça demande de l'audace de vouloir quitter un boulot comme ça. Grand bien te fasse si tu es persuadée que c'est la bonne décision." répondit-elle tout naturellement. "Et je respecterai ton choix. C'est pas pour autant que je vais le cautionner. Une partie de moi espère me tromper sur mes doutes." La différence était fine, difficilement perceptible, mais pour Norah elle était bien là. Et que si la voie qu'elle avait choisi allait mener la Marocaine vers une destination qu'elle n'aurait pas voulu atteindre, jamais Norah viendrait lui cracher au visage un "je te l'avais dit" cuisant. Elle serait dans tous les cas. C'était plus fort qu'elle, de la materner un peu. Quitter une vocation prometteuse et qui lui était indéniablement destinée pour un futur soudainement bien plus flou et incertain donnait toutes les raisons du monde à Norah de s'inquiéter pour elle. Certes, elle avait une drôle de façon de l'exprimer, une méthode qui braquait considérablement Yasmine, mais le souci était bel et bien là. Yasmine décida de se lever pour se rapprocher lentement mais sûrement de la porte d'entrée, préférant mettre un terme à une conversation qui venait de considérablement tourner au vinaigre. "Tu sais très bien que je ne laisserai pas tomber." dit-elle en se levant à son tour. "Mais pas là où tu peux le penser. Tu as mon avis sur ta décision, encore une fois, t'en fais ce que t'en veux." Elle croisait les bras, son pas était relativement lent. "Je suis pas contre toi, Yas. C'est pas une vendetta, ou que sais-je." dit-elle d'un ton un peu plus détendu. "C'est pas parce que je cautionne pas ta décision que ça veut dire que tu vas pas réussir dans ce que tu comptes faire. Il y a une seule chose que je t'empêcherai de faire envers et contre tout et tu sais très bien ce dont il s'agit." Ses yeux clairs fixaient son mal les prunelles claires de son amie, alors qu'elle pesait chacun de ses mots. "Si tu sais que pour toi, personnellement, c'est la meilleure chose à faire. Si c'est dans tes tripes, que ça vient d''une force que t'arrives pas à expliquer, alors ce que j'en pense devrait être le cadet de tes soucis. Si c'est le cas, montre-moi combien j'ai eu tort d'avoir des doutes et qu'il n'y avait aucune raison pour que je me fasse un sang d'encre pour toi. T'as rien à me prouver." Au fond, l'infirmière cherchait déjà à endurcir un peu davantage sa collègue. Cette dernière désirait se montrer forte. Elle l'était. "Je pense que tu voudrais surtout te prouver quelque chose à toi-même. Et j'espère très sincèrement que tu y parviendras." Difficile pour Norah de savoir si Yasmine parviendrait à se relever d'un nouvel échec. Pas qu'elle voulait se montrer pessimiste, mais vu à quel point le refus à la faculté de médecine l'avait abattue, la mère de famille craignait de la voir s'effondrer à nouveau si le nouveau projet dans lequel elle souhaitait s'engager de pied ferme, bien qu'elle n'avait aucune idée ce dans quoi elle comptait se lancer. "Prends soin de toi, d'accord ?" dit-elle dans un souffle, dans l'espoir faire tourner la conversation vers quelque chose d'un tant soit plus agréable. Il n'y avait que dans peu de situations durant lesquels Norah ravalait sa fierté (bien que cela semblait plutôt récurrent depuis quelques semaines), mais elle tenait à son amitié de longue date avec Yasmine et il lui semblait bien stupide de la gâcher de cette façon là.
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Message(#)(norasmine) up in flames EmptyJeu 4 Juin 2020 - 13:28

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D'une main déterminée, Yasmine déplaça sa longue chevelure ondulée pour qu'elle ne la gêne pas dans ses mouvements, même les plus brusques. Ces derniers, précipités, témoignèrent sans doute possible de son envie soudaine de déguerpir le plus rapidement de cette maison. C'était une mauvaise idée de s'être rendue ici, en effet, et prendre de la distance lui sembla soudain plus que nécessaire. Elle marcha jusqu'à l'angle du salon, n'attendant pas l'autorisation de Norah pour trouver le chemin qu'elle foula vite et bien pour échapper à l'orage qui menaçait de s'abattre dans la grande pièce qu'elle quitta enfin, et ce sans un regard en arrière. Son objectif était simple à cet instant précis : rentrer à la maison.
Yasmine n'avait jamais trouvé grand intérêt à forger le caractère de quelqu'un en le poussant dans ses retranchements. Certains se complaisaient dans l'éducation stricte et dure des petits nouveaux et des stagiaires qui, débarquant dans les couloirs étroits de l'hôpital St-Vincent les yeux brillants d'expectatives, s'attendaient à vivre leurs années de formation avec la fleur au fusil. Malheureusement, ils tombaient sur des roublards qui les forçaient à affronter le pire pour que ça les endurcisse. La jeune femme avait toujours trouvé ça extrêmement malsain et cruel de considérer la dureté comme une méthode d'apprentissage fiable. La fameuse légende du maître tout-puissant et de l'élève prêt à supporter toutes les humiliations, elle n'y voyait rien de glorieux bien au contraire – ça reflétait la perception biaisée d'une société qui considérait la soumission comme un facteur de réussite important, et puis quoi encore ? Tout comme avec les humiliations verbales, c'était contreproductif d'espérer le meilleur de quelqu'un à qui on trouvait tous les défauts du monde, ou qu'on espérait voir réagir face à l'horreur. Et puis la vérité c'était que c'était beaucoup trop facile d'asséner des vérités dérangeantes dans le but de faire réagir autrui – il fallait davantage de courage pour faire preuve de bienveillance et l'inculquer avec de la bonne volonté, c'étaient ses parents qui le lui avaient appris. Curieusement, alors qu'elle avait toujours considéré Norah comme une femme bienveillante, bien que dure sur certains aspects, aussi maîtresse de ses émotions que douée pour ce qu'elle faisait, elle lui trouva la même aura que ces petites brutes qui poussent les autres dans l'unique but de les faire craquer.
Ce fût cette hostilité qu'elle sentit émaner d'elle qui lui donna l'envie irrémédiable de s'en aller. Parce que dans le fond Yasmine sentait que ce sentiment résultait de la colère évidente qu'elle nourrissait pour elle à ce moment-là… et elle ne voulait pas de ça, elle ne voulait pas être fâchée avec elle sur la durée juste parce qu'elle n'avait pas su comprendre ce dont elle avait besoin en vérité. Et si Norah pensait au plus profond d'elle-même que c'était la complaisance qu'elle était venue quémander, ça prouvait combien elle ne la connaissait pas en réalité. Et qu'à ce stade, elle ne la connaitrait probablement jamais.
Yasmine s'enfonça dans le vestibule de la maison des Lindley pour retrouver la sécurité relative de sa vieille Jeep. Norah ne l'entendit pas de cette oreille, la rejoignant pour continuer à l'asséner de choses qu'elle n'avait pas besoin d'entendre, et qu'elle mettrait des jours à oublier tant elle les prononçait sur un ton mécanique, désincarné. Qu'est-ce qui n'allait pas chez elle ? Elle se posa davantage la question, elle qui avait déjà à de maintes fois redouté que sa collègue ne soit dans son état habituel, éprouvée par tant de choses qu'elle rompait avec ses habitudes pour devenir cette femme dont l'unique but à ce moment-là, songea-t-elle en posant son regard sur son profil, la fixant sans ciller, n'attendait qu'une seule chose : avoir le dernier mot.
Soit, elle l'aurait. Yasmine décida de ne rien dire de plus, de ne pas lui confirmer qu'effectivement, elle n'avait pas besoin de lui prouver quoi que ce soit, ou même de lui donner tort ; elle avait juste besoin de faire les choses en son âme et conscience, sans attendre de conseil ni de soutien de personne parce qu'au final, la seule personne sur qui elle pouvait compter, c'était elle, et elle seule. Pourquoi s'en remettre au jugement des autres quand ça avait du sens pour elle ? Pourquoi toujours chercher à rentrer dans les grâces de tout le monde et abandonner quand ça ne s'y appliquait pas assez pour qu'elle gagne le droit d'y entrer ? Yasmine en avait assez d'être magnanime, elle en avait assez de devoir faire passer ses avis de force quand elle osait enfin les exprimer.
Elle ne répondit rien à Norah. Elle n'en aurait pas été capable de toute façon. Sa gorge était contractée par l'émotion qu'elle retenait pour ne pas pleurer, fatiguée par ses précédentes démonstrations de faiblesses pour consentir encore une fois à les laisser percer. Elle avait assez pleuré ces dernières semaines, et elle ne le ferait sûrement pas face à quelqu'un en qui elle avait eu assez confiance pour s'attendre à ce qu'elle la soutienne, et pas qu'elle lui fasse la leçon comme si elle n'était pas assez construite pour avoir déjà songé à tout ce qu'elle lui avait dit. Pour qui se prenait-elle ? Yasmine lui accorda un dernier regard sec. Elle, elle n'était pas du genre à contenir sa fierté ; elle était souvent la première à faire le premier pas, à s'excuser, à supplier pour le pardon et à vouloir avancer dans la paix… pas cette fois, et elle s'y tiendrait. Elle lui de prendre soin d'elle ; c'était ce qu'elle lui avait dit vouloir faire tout à l'heure, avant qu'elle ne lui fasse entendre combien elle avait tort d'envisager sa démission comme une décision acceptable pour qu'elle puisse avancer… l'avait-elle déjà oubliée, ou n'entendait-elle, elle aussi, que ce qui l'arrangeait ?
Les yeux de la jeune femme la scannèrent une seconde de plus, et puis très doucement, elle se retourna. Gardant la bouche fermée, Yasmine actionna la poignée, et mit un terme définitif à la conversation une fois que la porte claqua derrière elle.
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