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 J'ai vu le soleil bas

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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyDim 5 Avr 2020 - 14:10

C'était l'heure de fermer la galerie.
L'ambiance y avait été pesante dernièrement, et Lola ne tenait pas particulièrement à s'attarder après 18h. Elle vérifia que le téléphone fixe renverrait bien les appels sur son portable et éteignit les diverses lumières, avant de quitter les lieux. C'était là qu'elle avait rencontré Lennon, quelques semaines auparavant, alors que celle-ci cherchait des toiles pour habiller les demeures de ses clients. C'était là qu'elles avaient sympathisé, et que Lola avait été à la fois amusée et impressionnée par le fort caractère de Lennon, qui marchait et parlait avec une confiance qu'elle lui enviait. Elles avaient parlé des autres lieux où trouver des artistes prometteurs, en devenir, et en étaient bien vite venues à la rue piétonne de Fortitude Valley. Elles s'y étaient donné rendez-vous dans des textos enthousiastes, et Lola espérait que ça allait bien se passer. Elle avait besoin d'un peu de légèreté.

Lorsqu'elle arriva au Brunswick Street Mall, elle eut un grand sourire. Elle adorait ces arbres recouverts de guirlande, les familles qui parcouraient les lieux, les stands d'artistes qui montraient leur travail. Elle repéra assez vite Lennon, qui était au téléphone mais lui fit un signe de la main. Lola attendit poliment à quelques mètres, afin de ne pas écouter sa conversation, et observa pendant ce temps les aquarelles d'une jeune hippie qui proposait aussi des infusions pour quelques dollars. "Une infusion, s'il-vous-plaît", elles échangèrent un sourire, "Ce sont des portraits ?", les petites toiles étaient abstraites, mais elles faisaient penser à des êtres humains, à des émotions. "Oui, ce sont des gens que j'ai croisés en voyage à travers l'Inde." Lola scruta d'autant plus les oeuvres, en y cherchant l'inspiration pour elle aussi parcourir le monde. Ca n'avait rien à voir avec ce qu'elle peignait, mais ça lui plaisait.

Lennon la rejoignit, "Regarde, ce sont des portraits abstraits d'indiens que l'artiste a rencontrés pendant un voyage".

@Lennon Warner
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyDim 5 Avr 2020 - 15:00

Vraiment pour vivre la vie que menait désormais Lennon depuis quelques temps, il ne fallait pas être flemmard parce que la jeune femme vivait à 400 à l'heure. Ce matin, tôt très tôt, elle était dans son bureau les yeux rivés sur ses deux écrans d'ordinateur à fignoler un plan de réaménagement de l'appartement d'un client. Puis, elle a passé toute sa matinée dans les studios d'ABC à tourner les séquences "d'interviews". Ces fameux passages où elle et Mila commentent des moments de leur émission et donnent leurs avis sur les restaurants à sauver. Et autant vous dire que passer la matinée sur un tabouret très peu confortable à parler dans le vide face à une caméra n'était pas une partie de plaisir. Puis elle passa la pause déjeuner avec Mila à parler travail avant de passer ensuite toute l'après midi en tournage dans deux restaurants en faillite de Brisbane. Elle ne s'en était pas rendue compte qu'il y avait autant de restaurants en crise. Depuis les débuts de l'émission, le nombre de candidatures grimpaient en flèche, comme les audiences d'ailleurs. Bref, cela faisait plusieurs semaines que Lennon n'avait plus une minute pour elle.

C'était d'ailleurs au téléphone, encore en train de discuter boulot qu'elle rejoignit Lola au Brunswick Street Mall. Elle avait quand même mis un point d'honneur à faire en sorte que d'autres rendez-vous ne prennent la place de sa petite virée shopping artistique avec Lola. Même si c'était d'un côté encore pour son boulot, c'était l'occasion aussi de passer du temps avec une autre personne, une autre tête que celles qu'elle voyait tous les jours. Et Lola avait d'ailleurs réussi à susciter son intérêt, elle s'y connaissait dans le domaine et elle était très cultivée et curieuse. Lennon adorait s'entourer de personnes comme elle. C'était pour cela qu'elle n'avait pas hésité à lui filer son numéro de téléphone pour programmer une sortie afin de trouver  des petits chefs d'oeuvre  parmi les artistes à en devenir de la rue piétonne de Fortitude Valley. "Regarde, ce sont des portraits abstraits d'indiens que l'artiste a rencontrés pendant un voyage". Lennon arriva à hauteur de Lola, et se pencha vers les portraits. « Je voudrais bien une infusion moi aussi, s'il vous plaît. » La jeune femme analysait les portraits de la jeune hippie pendant que cette dernière lui servait son infusion.  « C'est très coloré, j'aime beaucoup. Il y a beaucoup d'émotions qui ressortent de ces portraits. » C'est vrai que ces portraits n'étaient pas mal, mais malheureusement ce n'était pas ce que cherchait un client de Lennon. Il avait plutôt envie de toiles plus contemporaines, ou de photographies. D'ailleurs c'est ce qu'elle devra trouver dans cette rue, une ou un photographe. La jeune hippie lui donna son gobelet d'infusion, en échange de quelques billets.  « Alors Lola, comment tu vas ? Désolée si je t'ai fait attendre mais j'étais pas dans le coin.  » Elle but une gorgée de son infusion.   « Elles sont intéressantes ces toiles. Tu veux en prendre une ou on continue ?  »

@Lola Wright


Dernière édition par Lennon Warner le Mar 21 Avr 2020 - 14:27, édité 1 fois
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyMer 8 Avr 2020 - 17:27

"Je voudrais bien une infusion moi aussi, s'il vous plaît. C'est très coloré, j'aime beaucoup. Il y a beaucoup d'émotions qui ressortent de ces portraits." Lola eut un sourire envers Lennon, qui arrivait toujours à être si présente malgré le million d'activités qu'elle menait par jour. Elle avait beau être débordée et sous pression constante, elle était là corps et âme, et elle regardait vraiment les toiles. Quant à savoir si elle disait toujours la vérité, Lola était loin de le savoir, mais déjà l'énergie de son interlocutrice lui plaisait.

"Alors Lola, comment tu vas ? Désolée si je t'ai fait attendre mais j'étais pas dans le coin."
"Je viens d'arriver ! Ecoute, ça va, un peu débordée, je suis en train d'organiser ma toute première exposition... Je t'inviterai, évidemment. Mais ça va, la galerie est assez calme, en ce moment, les peintres n'organisent pas de grand événement là tout de suite, donc c'est tranquille. Et toi, la vie à mille à l'heure ?"

Lennon eut un dernier regard vers le stand. "Elles sont intéressantes ces toiles. Tu veux en prendre une ou on continue ?" "On continue pour le moment. Merci beaucoup pour l'infusion, au revoir !" La hippie leur fit un sourire, et les deux femmes s'éloignèrent. "Je n'achète jamais au premier tour de stands. Je m'imprègne du travail de chaque artiste, et puis je fais confiance à mon instinct, sur ce qui m'a le plus émuée, et j'y retourne, parfois après quelques jours. C'est risqué, parce que ça peut avoir été déjà vendu, mais j'ai un rapport très émotionnel à l'art. J'imagine que pour toi ça doit être très différent, non ? Tu cherches quoi principalement, aujourd'hui ?"

Tout en buvant l'infusion, elles s'approchèrent d'un stand de cartes du monde revisitées en fonction de différentes approches géopolitiques et thématiques. Il y avait une carte #metoo, avec le nom de femmes qui s'étaient ouvertes sur leur expérience, un nom par ville. Il y en avait une qui remplaçait les noms des pays par le régime politique en place : démocratie, dictature, monarchie, etc. Lola les observa avec attention, appréciative de la démarche.

@Lennon Warner
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyMer 15 Avr 2020 - 13:08

« Je viens d'arriver ! Ecoute, ça va, un peu débordée, je suis en train d'organiser ma toute première exposition... Je t'inviterai, évidemment. Mais ça va, la galerie est assez calme, en ce moment, les peintres n'organisent pas de grand événement là tout de suite, donc c'est tranquille. Et toi, la vie à mille à l'heure ? » Lennon sourit à l'idée que Lola souhaitait l'inviter à sa toute première exposition. Ce serait un honneur pour Lennon d'assister à l'évolution de Lola dans le monde très fermé de l'art. En quelques heures passées avec elle, elle avait su déceler chez l'assistante galeriste sa passion pour la peinture. Et elle méritait de réussir. Tous les passionnés qui se donnaient corps et âmes dans leur domaine de prédilection méritaient de réussir. Mais pudique et fière comme elle l'était, elle gardait ses pensées pour elle. « Ce sera avec plaisir d'assister à ta première exposition. D'ailleurs, je pourrais être accompagnée d'un ou deux clients à moi. Ça pourrait te rendre service. » Dans ce monde très sélectif, les coups de pouces et le bouche-à-oreille étaient des facteurs essentiels à ce business. Peu importait si vous étiez talentueux ou un dieu de l'impressionnisme. Ce qui importait dans cette histoire, c'était les contacts. Et Lennon en avait certains. Au fil des années, grâce à un travail assidu et sérieux, elle avait sur se créer un petit réseau. Elle avait rencontré des hommes d'affaires, des desperates housewives voulant redorer leurs immenses villas de Spring Hill. Bref, elle avait plus de riches clients dans son répertoire qu'autre chose, et peut-être que cette clientèle-là pouvait aider Lola dans son ascension. Elle but une gorgée de son infusion encore chaude.  « Sinon la vie à mille à l'heure : éreintante. Je sais pas comment je fais pour tenir debout, mais c'est ce qui me tient en haleine. Depuis que je travaille pour ABC, j'ai pas une minute à moi, mais j'aime bien.  »

« Je n'achète jamais au premier tour de stands. Je m'imprègne du travail de chaque artiste, et puis je fais confiance à mon instinct, sur ce qui m'a le plus émuée, et j'y retourne, parfois après quelques jours. C'est risqué, parce que ça peut avoir été déjà vendu, mais j'ai un rapport très émotionnel à l'art. J'imagine que pour toi ça doit être très différent, non ? Tu cherches quoi principalement, aujourd'hui ? » Les deux jeunes femmes avaient salué la hippie avant de continuer leur chemin. Lennon écoutait attentivement les paroles de Lola tout en hochant la tête. Lola était une vraie artiste. Elle vivait sincèrement pour ce qu'elle aimait. Et Lennon adorait ce genre de personne. Lola gagnait rapidement des points dans son estime, et pas tout le monde avait se privilège aux yeux de Lennon. « Je te ferais confiance les yeux fermés le jour où je te demanderais de me choisir un tableau. Tu es très sensible à l'art, j'aime beaucoup. » Lennon était pour une fois juste sincère. « C'est vrai que pour moi, c'est un peu différent. Je ne peux pas faire en fonction de mes goûts, ni même proposer autre chose à un client. Ça pourrait le froisser et il aurait l'impression que je critique ses choix, ses préférences. Donc, je me plie à ce que souhaite le client. Par contre, pour l'émission c'est différent. Je peux prendre plus de décisions. » Lennon soupira. Même si elle n'avait pas cette marge de choix dans l'achat d'une toile ou d'une photographie, elle adorait quand même son boulot. « Un client aimerait une toile contemporaine pour son bureau, dans le style de Basquiat. Mais comme j'ai la meilleure assistante galeriste avec moi, je suis sûre que je vais trouver la toile parfaite. » Elles s'arrêtèrent devant un stand proposant des cartes du monde représentant différents régimes politiques et des mouvements politiques qui ont fait la Une ces dernières années. Comme le mouvement #metoo qui avait ébranlé le monde du cinéma hollywoodien et la planète entière par la suite. « Malheureusement, je pense qu'un tableau #metoo risquerait de froisser mon client. Je ne pense pas qu'il ait envie de soutenir les femmes devant tous ses collègues. Et toi, tu cherches quoi aujourd'hui ? » Lennon se penchait sur les cartes, afin de les scruter minutieusement. Un sourire se dessina sur ses lèvres lorsqu'une des cartes attira son attention. C'était une carte composée seulement des pays de l'hémisphère nord, principalement l'Amérique du Nord et l'Europe. L'Australie était représentée dans un petit coin car faisant techniquement partie de l'hémisphère sud. L'échelle des États-Unis n'était pas correcte, mais le but était de les faire paraître dominants face au Canada, au Mexique, l'Australie et aux autres pays européens. Sur le territoire américain, "Néolibéralisme" était inscrit en rouge. Chaque état américain portait le nom d'une multinationale ou de grands groupes économiquement puissants. Les pays plus petits, quant à eux, avait tous pour nom "Sheep". Mouton en anglais. Et c'était la vision que Lennon se faisait du monde, aujourd'hui. Elle prit la carte dans ses mains et l'analysa. « Voilà, celle-là c'est ma préférée. Même s'il y a des choses à rajouter à mon goût. » Elle aurait plus tôt mis les États-Unis en "Sheep" ou en "Dumb". Et au dessus des pays, elle aurait mis "Lobbies" ou même "Bilderberg" et des flèches "Globalization" en direction de tous les pays. Lennon passait pour une folle quand elle parlait de ce sujet, mais elle y croyait.

@Lola Wright


Dernière édition par Lennon Warner le Mar 21 Avr 2020 - 14:27, édité 1 fois
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyMer 15 Avr 2020 - 20:12

"Ce sera avec plaisir d'assister à ta première exposition. D'ailleurs, je pourrais être accompagnée d'un ou deux clients à moi. Ça pourrait te rendre service." Lola eut un large sourire intimidé. Elle ne s'habituait toujours pas au virage à 360° que sa vie avait connu dans la dernière année. Elle était passée de petits boulots divers à un travail dans la galerie, et maintenant elle allait exposer, et soudain elle connaissait une femme qui non seulement avait des contacts, mais proposait de les partager avec elle. Pendant la majorité de sa vie, notre peintre n'avait même pas considéré la possibilité de vivre de son art, car ses parents lui avaient répété mille fois que ce n'était ni réaliste, ni convenable. Et puis, elle s'était lancée quand même, en se comparant sans cesse aux talents de ses patrons. Maintenant, le monde semblait lumineux de possibilités et d'espoir. "Sinon la vie à mille à l'heure : éreintante. Je sais pas comment je fais pour tenir debout, mais c'est ce qui me tient en haleine. Depuis que je travaille pour ABC, j'ai pas une minute à moi, mais j'aime bien." Lola eut un sourire. Elles étaient si différentes. "Je t'admire. Je ne pourrais pas être constamment sur le qui-vive. J'ai trop d'émotions et de pensées à la seconde ; je m'effondrerais vite."

"Je te ferais confiance les yeux fermés le jour où je te demanderais de me choisir un tableau. Tu es très sensible à l'art, j'aime beaucoup." Lola eut deux réactions en même temps : elle rougit, car compliment, et elle acquiesça, car elle adorerait aider Lennon à choisir des tableaux ; c'était beau de partager cette quête, de dialoguer sur ce qui faisait la valeur d'une toile par rapport à une autre, de sonder les intentions de l'artiste lors de la création. "C'est vrai que pour moi, c'est un peu différent. Je ne peux pas faire en fonction de mes goûts, ni même proposer autre chose à un client. Ça pourrait le froisser et il aurait l'impression que je critique ses choix, ses préférences. Donc, je me plie à ce que souhaite le client. Par contre, pour l'émission c'est différent. Je peux prendre plus de décisions." Ca devait être tellement étrange de s'adapter au goût de quelqu'un d'autre, de ne pas se fier uniquement au ressenti premier qu'on avait en voyant une oeuvre, d'observer tout à travers le prisme d'un autre - quoique, se dit Lola, ce n'était pas si loin de ce qu'elle faisait en thérapie. Elle se mettait dans la peau d'un autre pour comprendre sa vision du monde, ses valeurs, ses choix, et le travail qu'il restait à accomplir.

"Un client aimerait une toile contemporaine pour son bureau, dans le style de Basquiat. Mais comme j'ai la meilleure assistante galeriste avec moi, je suis sûre que je vais trouver la toile parfaite." "Ce sont les plus difficiles à trouver, ceux-là. Tout le monde essaye, et la plupart échouent." Elle en avait vu, des expositions de jeunes artistes, des posts Instagram, des illustrations, qui tentaient d'imiter Basquiat en vain. Il fallait s'approprier le style, le changement dans l'art, tout en y mettant sa propre vérité. "Mais on va essayer", ajouta-t-elle avec un sourire espiègle : elle aimait le défi. Ses yeux parcouraient déjà tous les stands à la recherche de quelque chose qui correspondraient. Mais elle fit un arrêt d'abord face à des cartes qui révolutionnaient la façon dont on regardait le monde et ce qu'on pensait en connaître. "Malheureusement, je pense qu'un tableau #metoo risquerait de froisser mon client. Je ne pense pas qu'il ait envie de soutenir les femmes devant tous ses collègues. Et toi, tu cherches quoi aujourd'hui ?" La remarque fit penser Lola à Jamie, mais elle se concentra sur la question de Lennon. "Je cherche des portraits. Je travaille beaucoup ce domaine-là en ce moment, et j'aimerais voir ce qui se fait. Avec les selfies, la façon de représenter les gens a encore changé, et ça se sent dans le peinture contemporaine."

"Voilà, celle-là c'est ma préférée. Même s'il y a des choses à rajouter à mon goût." Lola eut un sourire, et acquiesça. Elle sentit qu'elles pourraient être d'accord en politique, mais préféré ne pas aborder le sujet : c'était toujours délicat, et elle ne tenait pas à gâcher le moment agréable qu'elle passait avec Lennon. Elles continuèrent leur promenade, et cette fois, Lola ne s'arrêta pas tant qu'elle ne voyait pas d'art contemporain. Elle passa devant quelques toiles qui correspondaient au style recherché, mais dont elle voyait déjà, de loin, que ce n'était pas au niveau. Et puis, elle en vit une qui l'intrigua. "Là." Elle s'accroupit pour se mettre à la hauteur de la toile, dont les éclats verts et noirs laissaient de la place à la couleur originelle de la toile. Il y avait une violence dans la technique qui était contrebalancée par la composition. C'était intéressant, et Lola leva les yeux vers l'artiste qui la regardait avec un sourire. "Bonjour, je m'appelle Lola, et voici Lennon." Elles se serrèrent toutes les mains, et Lola reprit : "Vous pourriez nous parler de cette toile ?" "Je ne préfère pas, car chacun a sa propre interprétation, et je trouve ça plus important que de coller ma vision et ma vérité par-dessus." Lola hocha de la tête, comprenant parfaitement ce choix que d'autres artistes faisaient aussi.

@Lennon Warner
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptySam 18 Avr 2020 - 16:21

« Je t'admire. Je ne pourrais pas être constamment sur le qui-vive. J'ai trop d'émotions et de pensées à la seconde ; je m'effondrerais vite. » Lennon baissa le regard, faible sourire sur les lèvres. Flattée par le fait que Lola pouvait admirer son endurance face à son nouveau style de vie. Mais ce n'est qu'une question d'habitude, puis il ne faut laisser s'effondrer une seule fois, sinon on ne se relève plus. Ça arrive parfois à Lennon d'être de mauvaise humeur à cause de la fatigue, mais tant qu'elle tenait le rythme c'était ça qui était bon. De plus, c'était devenu une pro des micro-siestes de 15 minutes dans le bureau. « Ce sont les plus difficiles à trouver, ceux-là. Tout le monde essaye, et la plupart échouent [...] Mais on va essayer. » Lennon se pinçait les lèvres, se touchant le menton, en pleine réflexion. Elle avait bien peur que ce ne soit pas une mince affaire et elle n'avait surtout pas envie de faire perdre du temps à Lola. Mais cette dernière avait totalement raison. C'était impossible d'imiter Basquiat, puis le but n'était pas d'acheter une imitation. Mais quelque chose qui s'en inspirait tout en faisait ressortir quelque chose de nouveau. Il fallait que ce soit dans le style de Basquiat sans qu'on se dise "hé, mais ça ressemble à du Basquiat". « Je cherche des portraits. Je travaille beaucoup ce domaine-là en ce moment, et j'aimerais voir ce qui se fait. Avec les selfies, la façon de représenter les gens a encore changé, et ça se sent dans la peinture contemporaine. » Lennon scrutait les différentes en écoutant d'une oreille attentive Lola. « Les selfies et les différentes applications qui permettent d'en faire, créent énormément de complexes, en particulier chez les jeunes qui n'ont rien connu d'autres. Les selfies, avec les filtres Snapchat etc, reflètent un idéal de beauté commun à tous. Le nez fin, peau claire, yeux en amandes... Faudrait essayer de trouver quelqu'un qui joue de l'importance des filtres aujourd'hui. » En effet, les filtres étaient comme un maquillage virtuel en supplément de celui que l'on se tartinait sur la gueule. Comme si on cachait notre vrai reflet aux yeux du monde, et que l'on portait des masques virtuels pour se montrer sur internet, et y faire face. Rien n'est plus faux qu'un selfie.

Lennon pourrait en parler des heures. Mais Lennon était trop concentrée sur la carte qui avait attiré son attention pour continuer le débat. Au sourire discret de Lola, Lennon pouvait penser qu'elle et la jeune femme était sur la même longueur d'ondes. Mais ce n'était ni le moment ni l'endroit pour échanger leurs arguments sur la politique mondiale, même si ce serait un plaisir pour Lennon d'échanger sur ce sujet avec l'assistante galeriste. Elle reposa la toile avant de remercier l'artiste et suivit Lola dans leur quête d'une toile contemporaine. D'ailleurs la jeune femme ne tarda pas à trouver ce qui pourrait correspondre au client de Lennon. Elle sourit en voyant autant d'implication chez Lola. C'était ce genre de personne que Lennon appréciait, qu'elle voulait à ses côtés, avec qui elle aimait discuter et travailler.
Du peu qu'elle voyait, elle savait déjà que Lola était une personne sincère, honnête, ouverte d'esprit et sensible. Elle méritait vraiment de réussir. Son téléphone sonna, une notification instagram d'une amie. Lennon répondit à son message avant de scroller automatiquement son feed. Sa mâchoire se serra lorsqu'elle tomba sur une photo de Jordan publiée il y a quelques heures. Les sourcils froncés, le cœur serré, elle scruta cette photo quelques secondes. Tout de suite agacée d'avoir vu quelque chose le concernant, elle ferma l'application et reporta son attention sur Lola mais en ayant toujours Jordan dans un coin de sa tête. « Bonjour, je m'appelle Lola, et voici Lennon. Vous pourriez nous parler de cette toile ? » Les mains serrées et les présentations faites, Lennon s'accroupit également pour analyser de plus près cette toile. Mais d'avoir vu cette photo de Jordan, l'avait quelque peu perturbée et elle n'arrivait plus à réfléchir correctement.   « Je ne préfère pas, car chacun a sa propre interprétation, et je trouve ça plus important que de coller ma vision et ma vérité par-dessus. » Elle jeta un coup d'œil à Lola, avant de reposer ses yeux sur la toile pour s'en faire sa propre interprétation. Grâce à Lola, elle avait sans doute trouvé la toile qui correspondait, et rapidement en plus. Elle invitera sans doute Lola à diner pour la remercier de son aide. Mais sa réflexion était biaisée par ses pensées qui se tournaient vers Jordan et la tournure que prirent leur relation en moins de 24 heures. Lennon était encore énervée contre lui, et ses expressions du visage le faisaient ressentir.   « Je vais envoyer un texto à mon client, et lui dire qu'on a sans doute trouvé ce qu'il faut.  » Lennon n'arrivait pas encore à trouver sa vérité à travers cette toile, mise à part le fait que ce mélange violent de couleurs lui faisait étrangement penser aux tatouages ignobles qu'avait Jordan sur le torse. Elle divaguait totalement, mais tout ce qui se rapportait à Jordan lui tapait sur le système, et voyait tout chez lui de façon négative. Leur dernière conversation par messages lui avait laissé un goût amer. Elle qui avait réussi à ne pas penser à ça de la journée, était en train de cogiter sur son compte désormais.   « T'en penses quoi toi Lola ? Perso, je trouve que ça peut correspondre à ce que cherche mon client. T'as l'oeil. » À vrai dire, la toile était pour son client, donc il n'en avait rien à carrer de quel type de vérité pouvait ressentir Lennon à travers cette toile. Comme l'avait soulevé plus tôt Lola, c'était différent pour Lennon. Elle ne choisit pas pour elle, donc elle ne pouvait pas faire en fonction de ses coups de cœur propres. Elle avait des consignes, des styles des noms, et avec ça elle se débrouillait pour trouver ce qui correspondait parfaitement aux attentes.   « Je vais le prendre, j'te fais confiance, t'es douée. » En réalité, plus les secondes passaient et plus la tête de Jordan squattait son esprit. Sa réflexion était brouillée et essayait de jauger cette toile relevait de l'impossible. Puis, elle décidait de faire confiance à Lola en la prenant sans réfléchir. C'était indirectement une sorte de test aussi, si ça plaisait à son client, il y avait des chances pour qu'elle associe Lola à ses affaires. C'était une idée à développer. « Elle vaut combien votre toile ? D'ailleurs Lola, ça te dit qu'on se pose un moment histoire de boire un verre ? Et après on ira chercher des portraits, à moins que tu veuilles faire l'inverse ? » Sa tisane n'était pas finie mais juste le fait de repenser à Jordan lui donnait envie de boire un verre de vin afin d'être plus détendue, mais aussi de se changer les idées en apprenant à connaître Lola.

@Lola Wright


Dernière édition par Lennon Warner le Mar 21 Avr 2020 - 14:26, édité 1 fois
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyLun 20 Avr 2020 - 19:44

Quelque chose avait changé sur le visage de Lennon. Lola n'aurait pas su dire ce qu'elle éprouvait exactement, parce qu'il y avait clairement confusion et tumulte. Il y avait de la colère, mais aussi des relents d'autres émotions, et comme elle essayait de tout dissimuler et enfoncer loin, loin, ça n'en ressortait que plus brouillé. C'était comme essayer de lire les lignes de la main en voyant flou. Lola se força à arrêter de tenter, car elle ne voulait pas poser des questions personnelles dans un contexte professionnel (comme si ça l'avait arrêtée avant). Elle se concentra sur la toile contemporaine, que Lennon acceptait de prendre, et déjà elle marchandait avec l'artiste, et c'était une partie qui désintéressait complètement Lola - alors qu'elle devrait s'y intéresser à ces négociations, aux prix, si elle voulait réussir elle aussi dans ce domaine. Si seulement l'aspect marketing et financier lui parlait plus, elle aurait déjà pu percer, elle en était certaine. Mais savoir se vendre n'avait jamais fait partie de ses envies.

"D'ailleurs Lola, ça te dit qu'on se pose un moment histoire de boire un verre ? Et après on ira chercher des portraits, à moins que tu veuilles faire l'inverse ?"

Il n'y eut pas une seconde d'hésitation : Lola hocha de la tête avec un sourire. "Allons prendre un verre, ça va nous faire du bien à toutes les deux." Elle croisa les doigts pour que l'alcool n'ouvre par son robinet à questions de façon trop brutale. Elle ne voulait pas heurter Lennon, qui avait soudain l'air vulnérable. Le tableau sous le bras, elles partirent donc à la recherche de la meilleure terrasse, que Lola connaissait par coeur pour y avoir déjà passé du temps. Elle la pointa du doigt et elles s'installèrent à une table. "Un Spritz, s'il-vous-plaît." Oui, la tendance avait fini par l'influencer, et elle attendait son cocktail coloré avec plaisir. "Tu as raison pour les selfies. J'ai dû calmer le jeu sur les réseaux sociaux, parce que ça devenait beaucoup trop obsédant. C'est difficile d'être à la fois serein par rapport à son image et en constante compétition avec les représentations des autres. En tout cas, moi j'ai du mal." Elle se dit que peut-être Lennon n'avait pas ce problème, car elle avait l'air d'être constamment soignée et radieuse. Sauf devant le stand du peintre. Lola, don't. "Est-ce que tout va bien ? Tu as l'air préoccupée." Lola eut un soupir, car vraiment, elle n'arrivait jamais à se contrôler. "Si tu ne veux pas répondre, il n'y a aucun problème. Je pose souvent trop de questions, donc tu peux ignorer celles qui te dérangent."

@Lennon Warner
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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyMar 21 Avr 2020 - 14:25

 « Un Spritz, s'il-vous-plaît. » Lennon secouait la tête face au choix de Lola, un sourire taquin sur les lèvres. À vrai dire, Lennon détestait les Spritz. Elle avait pourtant succombé à la tendance du cocktail joliment présenté dans son verre Apérol. Le côté instagrammable était présent, mais le goût n’y était pas. Et la jeune femme ne pouvait vraiment faire semblant d’aimer sous prétexte que c’était le nouvel accessoire buvable qu’il fallait avoir en terrasse. C’était le Schweppes Tonic qui lui laissait un goût amer, et qui faisait qu’elle était réticente à goûter ce cocktail une deuxième fois. « Pour moi, ce sera un mojito, s’il vous plaît. » Basique, frais et habituel. Son cocktail préféré, ça sortait presque instinctivement de sa bouche. Rien ne pouvait surpasser les mojitos. Même si le caïpirinha n’était pas loin derrière.
« Tu as raison pour les selfies. J'ai dû calmer le jeu sur les réseaux sociaux, parce que ça devenait beaucoup trop obsédant. C'est difficile d'être à la fois serein par rapport à son image et en constante compétition avec les représentations des autres. En tout cas, moi j'ai du mal. » Lennon observa Lola, étonnée de ses confidences. Elle n’aurait pas pensé qu’une fille comme Lola pouvait se laisser influencer par les mauvais côtés des réseaux sociaux. Mais son côté sensible qui devait un rôle là-dedans. Enfin c’est comme ça que Lennon le percevait. « J’étais un peu pareil que toi moi aussi, à un moment donné. J’étais persuadée que je devais avoir un ventre plat pour être belle sur les réseaux sociaux. Jusqu’à ce que je croise une célèbre influenceuse, à la Melbourne sur la plage. Et je me suis rendue compte que photoshop faisait des merveilles. » La jeune femme avait longtemps été obsédé par son poids. Pas au point de souffrir de troubles de l’alimentation, mais plutôt au point de se regarder à chaque fois qu’elle croisait un miroir. Pour analyser l’épaisseur de ses cuisses, de ses bras, l’apparence de son ventre. Il lui a fallu des années avant d’accepter ses petites rondeurs et le travail ne fut pas aisé à l’air du selfie et des jolies feeds instagram. Mais le jour elle avait croisé cette fameuse jeune femme, elle fut bizarrement soulagée d’un poids, et que les photos sur les réseaux sociaux ne reflétaient en aucun cas la réalité. C’était fou à quel point internet nous oppressait de ses standards de beauté. Parler de ça avec Lola la soulageait encore plus. Elle avait beau être fière et toujours bien présentable, elle restait toujours un être humain avec ses complexes.
« Est-ce que tout va bien ? Tu as l'air préoccupée. » Lennon avait beau vouloir contrôler constamment son apparence mais quand quelque chose la contrariait, on pouvait lire en elle comme un livre ouvert. Les sourcils froncés, lèvres pincées. Que d’indices montrant qu’à cet instant présent quelque chose lui trottait dans la tête. Lola semblait donc l’avoir remarqué depuis qu’elle avait acheté la toile. Elle lâcha un petit rire nerveux, mais elle n’allait pas se laisser ébranler par une simple question. Calme, elle ouvrit la bouche pour répondre que ce n’était rien de grave mais Lola enchaîna. « Si tu ne veux pas répondre, il n'y a aucun problème. Je pose souvent trop de questions, donc tu peux ignorer celles qui te dérangent. » Elle excusait sa curiosité. Mais Lennon ne lui en voulait pas de lui avoir posé cette question. La curiosité semblait être un des traits principaux de Lola, et il était indispensable de l’être quand on travaillait dans le monde de l’art. Inutile de se lancer dans la peinture ou en tant que galeriste si on n’est pas un minimum attentif et curieux de ce qui nous entoure, ou si on éprouve aucun intérêt aux œuvres des artistes les plus connus. Un faible sourire sur les lèvres, sa main touillant sa paille dans mojito, jouant avec les feuilles de menthe. Elle hésitait à raconter ses histoires. « Oui, oui… Je vais bien. C’est juste une petite histoire de rien du tout, ni plus ni moins. Tu sais comment sont les hommes… tous un peu débiles. » C’était sans doute réducteur pour la totalité de la gente masculine, mais c’était le cas. Jordan était débile de l’avoir embrassé alors que ses pensées allaient vers quelqu’un. « J’ai juste vu un truc, sur Instagram d’ailleurs, et ça m’a contrarié. Je trouve ça dingue que d’apercevoir une simple photo de lui puisse m’atteindre à ce point. » Un petit rire s’échappa de ses lèvres. Elle était encore agacée de la liste qu’il lui avait faite par texto. C’était juste humiliant. Elle souffla un bon coup. « Tu fais autre chose à côté de la galerie ? » Par autre chose, elle entendait un hobby, une autre passion que la peinture, quelqu’un ?


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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyLun 27 Avr 2020 - 12:04

"J’étais un peu pareil que toi moi aussi, à un moment donné. J’étais persuadée que je devais avoir un ventre plat pour être belle sur les réseaux sociaux. Jusqu’à ce que je croise une célèbre influenceuse, à la Melbourne sur la plage. Et je me suis rendue compte que photoshop faisait des merveilles." "Le contraste entre les attentes et la réalité, ça marche à chaque fois ! Ce qui me tue, c'est que j'adore Photoshop, donc clairement je suis au courant des filtres qu'ils utilisent, des outils, de tout. Et pourtant je tombe dans le panneau à chaque fois." C'était comme regarder quelqu'un inventer un conte de fée, et puis croire mot pour mot que c'était la vérité historique. On pouvait expliquer à Lola un tour de magie, puis le jouer devant ses yeux, et elle continuerait à trouver que ça relevait du surnaturel. Bon. Ca faisait partie d'être une enfant-adulte.

Le Spritz en terrasse faisait du bien. Lola sentait toute la pression récente retomber, même si elle restait sur ses gardes par rapport à Lennon, qu'elle ne connaissait pas encore beaucoup. La foule autour d'eux, c'était des artistes ou des familles, donc rien de bien méchant, et Lola savait qu'elle ne croiserait personne qu'elle connaissait ici. D'habitude, elle venait seule, mais elle était heureuse de faire découvrir les lieux à Lennon. Elle s'inquiéta en revanche de son air préoccupé. "Oui, oui… Je vais bien. C’est juste une petite histoire de rien du tout, ni plus ni moins. Tu sais comment sont les hommes… tous un peu débiles." Lola fit un mouvement de tête qui ne voulait dire ni oui, ni non, car elle n'était évidemment pas d'accord avec le postulat, mais quelque chose lui disait que Lennon non plus, au fond, et qu'elle était simplement blessée. "Mon meilleur ami est un garçon, et il n'est pas débile", offrit-elle avec un sourire réconfortant, à moitié car c'était vrai, et à moitié pour détendre l'atmosphère.

"J’ai juste vu un truc, sur Instagram d’ailleurs, et ça m’a contrarié. Je trouve ça dingue que d’apercevoir une simple photo de lui puisse m’atteindre à ce point." Lola eut un rire complice : been there, done that. "J'ai eu un crush en début d'année." Elle se souvenait les sourires mutins, les plaisanteries, les selfies pris à la volée. "Et on a vécu une soirée extraordinaire, une seule, et après plus rien." Bon, ce qu'elle ne disait pas, c'est qu'après il avait épousé sa meilleure amie, dans un vrai mariage organisé par une émission à laquelle il s'était inscrit. C'aurait été trop compliqué à expliquer. Sauf si elle connaissait l'émission en question. "Tu connais Mariés au premier regard ? Il était dedans." Mais on s'éloignait du sujet. Elle revint à ses moutons. "Bref, et les semaines qui ont suivies, à chaque fois que je voyais sa tête d'imbécile sur Instagram, ça me mettait dans tous mes états." Elle grimaça. A chaque fois qu'elle pensait que la rancoeur était passée, elle recevait une preuve que non, elle était toujours bien là, sagement posée sur son coeur.

"Tu fais autre chose à côté de la galerie ?" Lola sourit à cette tentative de changer le sujet, et acquiesça. "Je suis bénévole à l'hôpital psychiatrique, je donne des ateliers d'art thérapie depuis des années. Ce qui reste lié à la peinture. Tout ce que je fais est lié à l'art d'une façon ou d'une autre, j'avoue." Elle était un peu monomiaque, dans ce sens-là, mais une fois qu'on l'accepte, tout va bien. "Et toi, t'as le temps d'avoir des hobbies ?" Elle sirota son Spritz, tout en gardant en tête le visage débile de Matt sur certains selfies qu'elle avait encore. Enough. "Qu'est-ce qui te plaît, dans tout ça ? Si ce n'est pas indiscret. Est-ce que c'est l'argent ? La célébrité ? Le pouvoir ?" Elle demandait sans jugement, elle cherchait à comprendre ce qui rendait Lennon aussi dynamique, ce qui la passionnait au point de la rendre apparemment infatigable.

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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyJeu 30 Avr 2020 - 3:07

« Mon meilleur ami est un garçon, et il n'est pas débile. » Lennon baissa les yeux, un sourire en coin. Elle avait peut-être tort de mettre tous les hommes dans le même panier. Ce n’était peut-être par fairplay, mais Lennon était juste blessée dans son égo. Une femme comme Lennon blessée dans son égo ce n’était pas bon. « Désolée je ne voulais pas faire une généralité. J’suis juste contrariée. J’aimerais que ce mec-là soit comme ton meilleur ami. » Elle but une gorgée de son mojito, les épaules affaissées. Le sujet Jordan la rendait si vulnérable au point de presque tomber le masque devant Lola. C’est ça qu’elle n’appréciait pas dans son lien avec Jordan. Il lui faisait perdre ses moyens, son self-control. Elle n’arrivait toujours pas à comprendre comment. Lola aussi se prêta à la confidence. Et Lennon l’écoutait silencieusement.  Une soirée extraordinaire, une seule et après plus rien. Plus rien. Le néant après cette soirée extraordinaire était effrayant. Et si après ce baiser avec Jordan, il ne se passait plus rien ? Les messages échangeaient récemment laissaient entendre que c’était fort possible. « Tu connais Mariés au premier regard ? Il était dedans. » La voix de Lola l’extirpa de ses pensées et Lennon reporta son attention sur elle. « Euh, non… Enfin, j’ai pas trop le temps de regarder la télé. » C’est vrai que ça faisait un bail qu’elle ne s’était pas posée sur son canapé devant la télé à regarder des télé-réalités avec de la bouffe. Être une working girl ça inclus aussi des sacrifices à faire. «  Bref, et les semaines qui ont suivies, à chaque fois que je voyais sa tête d'imbécile sur Instagram, ça me mettait dans tous mes états. » Lennon hochait la tête, comme si elle comprenait tout à fait ce que Lola voulait exprimer. Elle voyait très bien l’effet qu’une photo instagram de son crush pouvait faire ressentir comme émotions. Tantôt la joie, tantôt la haine selon le contexte. Une espèce de jalousie ou d’amertume particulière, c’était difficile à expliquer. Mais c’était comme si ça faisait juste chier que le dit crush poste une photo sur instagram. « Je vois exactement ce que tu veux dire. C’est insupportable comme sensation. »

« Je suis bénévole à l'hôpital psychiatrique, je donne des ateliers d'art thérapie depuis des années. Ce qui reste lié à la peinture. Tout ce que je fais est lié à l'art d'une façon ou d'une autre, j'avoue. » Lennon appréciait la tournure que prenait leur petite promenade à Brunswick. Elles prenaient le temps de discuter, d’apprendre à se connaître. Et même si elle ne la connaissait que très peu, les discussions avec elle étaient fluides et Lennon se sentait à l’aise avec Lola. « C’est parce que l’art est pour toi une réelle passion alors. Pas seulement une passion pour dire que tu as une passion. Mais l’art ça te prend aux tripes ça se voit. Je trouve ça honorable que tu mettes ta passion au profit des autres. » Peut-être qu’elle pouvait l’aider avec ses problèmes de psychorigidité, qui sait ? Enfin, elle ne se qualifiait pas elle-même ainsi mais elle reprenait mot pour mot les mots de Julian, qui prenait un malin plaisir à la caractériser de psychorigide. « Et toi, t'as le temps d'avoir des hobbies ? » Elle n’avait même pas le temps de regarder le bachelor ou même le replay. Sa vie c’était : boulot, boulot, boulot, dodo, resto de Mila (parce qu’il fallait bien se nourrir), boulot. Mais entre temps, elle avait ses cours de yoga. Elle-même avait réussi à caler inopinément Jordan dans son agenda. Enfin, c’était plutôt le destin qui s’était chargé de le faire. « À vrai dire pas trop, j’ai pas vraiment de vie sociale. Mais je fais des séances de pilates et de yoga. Ça permet de rester calme et de pas craquer. Ça détend beaucoup, si un jour ça te dit de tenter. » Ça pouvait énormément la détendre, mais Lennon n’y mettait pas vraiment du sien pendant les séances, trop occupée à penser à son agenda ou à sa to do list au lieu d’ouvrir ses chakras. « Qu'est-ce qui te plaît, dans tout ça ? Si ce n'est pas indiscret. Est-ce que c'est l'argent ? La célébrité ? Le pouvoir ? » Lennon ne put retenir un petit rire. On lui posait souvent cette question lorsqu’elle parlait de son nouveau job chez ABC. Ça pouvait paraître étonnant, Lennon ne faisait ni ça pour la célébrité ni pour le pouvoir. D’abord pour l’argent on ne va pas se mentir, mais aussi pour donner un nouveau tournant à sa carrière. Elle voulait quelque chose de nouveau et cette proposition de contrat était arrivée comme par magie à ce moment-là de sa vie. Rien n’était fait au hasard. « Je vais être franche avec toi. L’argent a été une des raisons pour lesquelles j’ai signé. J’ai le crédit de mon appartement à payer et ça m’est bien utile. Puis pour être honnête, ce n’est pas tant pour la célébrité, parce que l’émission est seulement diffusée dans le Queensland donc avec mon binôme, on n’est pas très exposée médiatiquement. C’est plus pour l’expérience professionnelle et pour me faire connaître un peu plus en tant qu’architecte d’intérieur. C’est un coup de pouce on va dire. » Son petit monologue fini, elle prit une longue gorgée de son mojito. Ça pourrait paraître paradoxal de se dire que Lennon avait accepté d’être animatrice télé, sans être attirée par la célébrité. Mais, c’était le directeur de la chaîne qui avait insisté. Il avait eu un coup de cœur professionnel envers Lennon quand elle était chargée de la décoration de sa maison. Sa créativité et son professionnalisme lui correspondait au profil qu’il recherchait pour le poste d’animatrice de la future émission.
Le serveur devait être en train de connecter sa playlist en bluetooth car de la musique se fit entendre des enceintes accrochées aux parasols du bar. Même si l’automne avait déjà pointé le bout de son nez, le soleil était suffisamment présent pour ouvrir les parasols. Lennon serra la mâchoire quand les premières notes de Sweet Escape vinrent lui caresser les oreilles. Pas cette musique. Elle finit son mojito, plus vite que prévue. « Tiens, comme par hasard. Il fredonnait cette musique le jour où… En fait, je crois que je ne pourrais plus jamais apprécier cette chanson. Tu sais, c’est le genre de type grand, blond, tatoué, musicos. Qui chante tout le temps. Trop de chansons me rappellent lui, je vais devoir faire un tri sur spotify… » Soupira-t-elle d’exaspération en scrollant vaguement ses musiques dans son téléphone.  

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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptyVen 1 Mai 2020 - 15:26

"Désolée je ne voulais pas faire une généralité. J’suis juste contrariée. J’aimerais que ce mec-là soit comme ton meilleur ami." Lola eut un sourire compréhensif et acquiesça. Loin d'elle l'envie de juger Lennon : elle comprenait parfaitement qu'on fasse des généralités quand on avait le coeur perturbé ; mais elle trouvait que c'était réconfortant de penser à tous les gens chouettes qu'il y avait dans le monde, tous les autres finalement. Pas Matt, et pas l'homme-mystère de Lennon. C'est pour cela qu'elle s'ouvrit sur son propre échec sentimental de l'année. Elle avait l'espoir que son interlocutrice ait vu l'émission pour savoir de qui elle parlait exactement, mais ce n'était pas le cas. "Je vois exactement ce que tu veux dire. C’est insupportable comme sensation." Etonnamment, il y eut un moment de compréhension et de paix entre elles : Lola était venue sur un élan purement professionnel, mais bien sûr, elles en venaient à échanger sur leur vie personnelle, et ça se passait bien, fluidement.

"C’est parce que l’art est pour toi une réelle passion alors. Pas seulement une passion pour dire que tu as une passion. Mais l’art ça te prend aux tripes ça se voit. Je trouve ça honorable que tu mettes ta passion au profit des autres." Lola réfléchit. C'était vrai qu'elle se posait de moins en moins la question du statut d'artiste dernièrement. Elle vivait d'art dans tout ce qu'elle faisait : la galerie, l'hôpital, ses toiles ; elle passait son temps à créer ou soutenir les créations des autres ; mais c'était de moins en moins une volonté de prouver quoi que ce soit ou une lutte pour s'assumer en tant qu'artiste. Elle ne l'avait pas réalisé jusque là, et elle eut un grand sourire. Elle se dit furtivement que parler avec Lennon lui faisait du bien, et elle se sentit rassérénée.

"Et toi, t'as le temps d'avoir des hobbies ?"
"À vrai dire pas trop, j’ai pas vraiment de vie sociale. Mais je fais des séances de pilates et de yoga. Ça permet de rester calme et de pas craquer. Ça détend beaucoup, si un jour ça te dit de tenter."
"Avec plaisir !"

Elle était d'habitude trop intimidée par les corps magnifiques des autres femmes dans les cours collectifs pour aller au yoga, mais l'idée d'y aller avec Lennon l'encourageait. Elles iraient pour se faire du bien, trouver de la sérénité, pas pour se mesurer aux standards impossibles de la beauté normée.

Ce qui vint comme une surprise, ce fut l'honnêteté de Lennon quant à son travail chez ABC. Lola avait posé la question sans savoir si elle s'aventurait trop loin, et elle recevait une réponse dénuée de tout politiquement correct. "L’argent a été une des raisons pour lesquelles j’ai signé. J’ai le crédit de mon appartement à payer et ça m’est bien utile." Lola comprenait cela mieux que personne. Certes, elle n'avait jamais acheté d'appartement, mais elle avait depuis longtemps accepté l'importance de l'argent dans un monde où la sécurité compte plus qu'on n'aimerait l'admettre. "Puis pour être honnête, ce n’est pas tant pour la célébrité, parce que l’émission est seulement diffusée dans le Queensland donc avec mon binôme, on n’est pas très exposée médiatiquement. C’est plus pour l’expérience professionnelle et pour me faire connaître un peu plus en tant qu’architecte d’intérieur. C’est un coup de pouce on va dire." La peintre hocha de la tête avec un sourire admiratif. "Tu sais ce que tu veux et tu te bats pour l'obtenir." Lennon dégageait quelque chose d'unique : de la simplicité. Elle se fixait des objectifs et était cohérente dans son comportement et ses décisions. Lola aurait aimé être aussi assertive et passer moins de temps à retourner les questions cinq mille fois dans sa tête.

Il y eut soudain de la musique, et Lola était sur le point de se mettre à dodeliner de la tête sur Sweet Escape, lorsqu'elle vit l'expression de Lennon. "Tiens, comme par hasard. Il fredonnait cette musique le jour où… En fait, je crois que je ne pourrais plus jamais apprécier cette chanson. Tu sais, c’est le genre de type grand, blond, tatoué, musicos. Qui chante tout le temps. Trop de chansons me rappellent lui, je vais devoir faire un tri sur spotify…" Lola pencha la tête vers la droite, le sourcil légèrement froncé. Comme elle venait de parler de Jordan à Lennon, elle ne pouvait que s'étonner du fait que la description lui aille comme un gant. Mais il n'aurait jamais été muffle avec une femme, donc elle balaya la coïncidence. "Dans ce date dont je t'ai parlé, on avait écrit une sorte de comédie romantique ensemble, et on en avait joué une scène, mais pas jusqu'au bout. Et je ne sais pas pourquoi, ça s'est cristallisé sur Notthing Hill." Ce n'était pas très compliqué de savoir pourquoi : c'était la comédie romantique qu'elle avait regardé avec Lily, qui était maintenant mariée à Matt. Mais les capacités de déni de Lola étaient magiques. Elle aurait pu gagner un diplôme de reine du déni. "Et je ne supporte plus la bande-originale de ce film, alors que je l'adorais avant."

Lola termina son verre, demanda l'addition, et invita Lennon à quitter la terrasse. "Je dois rentrer, il faut que je retouche l'une des toiles pour l'exposition, ça m'obsède. Je reviendrai regarder les portraits une autre fois."

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Message(#)J'ai vu le soleil bas EmptySam 2 Mai 2020 - 13:30

« Tu sais ce que tu veux et tu te bats pour l'obtenir. » C’est vrai, et Lola l’avait apparemment bien cerné. Depuis toujours, ses parents lui avaient depuis toujours inculqué des valeurs comme la détermination et l’obstination qui lui ont valu les meilleurs résultats pendant toute la durée de sa scolarité. Mais malheureusement, avoir le nez constamment dans les bouquins avait aussi sa part de sacrifices. Lennon se disait bien trop souvent qu’elle était passée à côté de sa jeunesse, qu’elle avait manqué quelque chose. Elle était quand même sortie pendant ses études supérieures, certes. Mais elle regrettait de ne pas avoir assez profiter, ou de ne pas avoir fait le tour du monde par exemple. Bien qu’elle ait des regrets concernant sa jeunesse, elle était reconnaissante de sa place dans la société. « Dans ce date dont je t'ai parlé, on avait écrit une sorte de comédie romantique ensemble, et on en avait joué une scène, mais pas jusqu'au bout. Et je ne sais pas pourquoi, ça s'est cristallisé sur Notthing Hill […] Et je ne supporte plus la bande-originale de ce film, alors que je l'adorais avant. » Lennon ne put s’empêcher de laisser un petit rire s’échapper. Lola devait parfaitement comprendre ce que Lennon ressentait avec la musique de Gwen Stefani. C’était dingue comme une musique, un film, un lieu pouvaient nous écœurer parce qu’ils étaient associés à un mauvais moment ou une personne en particulier. Peut-être que Lennon et Lola avaient des petits cœurs trop fragiles pour passer au-dessus de ça ?
« Je dois rentrer, il faut que je retouche l'une des toiles pour l'exposition, ça m'obsède. Je reviendrai regarder les portraits une autre fois. » Elles se levèrent, Lennon n’oubliait pas le tableau qu’elle venait d’acheter, choisi par Lola et œil de lynx. « Tu m’envoies un texto pour l’exposition. Promis, je serais présente. » Dit-elle avant de se séparer de Lola, interpellant un taxi pour se rendre au Red, le restaurant de Mila. Cette dernière l’attendait pour l’organisation de la journée de demain.

Rp terminé
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