Love, it will get you nowhere. You are on your own. Lost in the wild. So come to me now. I could use someone like you. Someone who'll kill on my command. And asks no questions. I'm gonna make you a fucking psycho (Muse, Psycho )
☆ Yelahiah & Eve ☆
Avec la pandémie qui se répandait à une vitesse folle, j’avais décidé de confier les enfants à ma belle-mère. Histoire qu’il soit au grand air. Bien que je ne sois plus sur le territoire, je suivais avec un intérêt particulier la situation en Allemagne. Confinement. De même pour la France. Le monde partait en vrille et je voulais que mes enfants soient à la campagne au cas où cela risquait d’arriver. Avec Jacob qui est à risques, je ne pouvais pas l’exposer alors que je travaillais dans les écoles une fois par semaine. Souvent, le matin, je restai au musée avec ma musique dans les oreilles à refaire les œuvres anciennes et l’après-midi, j’allais dans diverses écoles. Privées, publiques, peu m’importait. De même que l’argent, je m’en fichai un peu. J’avais la pension de mon défunt mari ainsi que mon maigre salaire mais je savais que j’arrivais toujours à joindre les deux bouts. Et mes enfants n’étaient pas habillés comme des clochards. Bien au contraire, ma fille avait les plus belles salopettes -elle était dans sa phase sans robes- et mon fils était toujours à la pointe de la mode. On ne pourrait pas en dire de même pour moi. Avec la couleur de mes cheveux qui était aussi changeante que mes humeurs, je ne m’habillais pas à la dernière tendance. Souvent, je prenais les premiers vêtements dans mon armoire et je les enfilai sans me soucier du regard des autres. Ce n’est pas comme si je visais à attirer l’attention de toute manière. Étant petite -trop minuscule- mon ambition dans la vie était de me rendre transparente. Et j’étais plutôt douée. Personne ne me remarquait et c’était tant mieux.
Seulement aujourd’hui j’allais devoir sortir car j’avais par mégarde pris le carnet de dessin d’un gamin, l’un des plus doués, je serai forcée de le rendre à sa mère tôt ou tard. Le carnet, pas l’enfant. J’en avais déjà assez de deux et le troisième n’était pas prévu pour de suite. de toute manière, les prétendants ne se bousculent pas au portillon. Même si la mère de Jacob Sr me pousse à faire de nouvelles rencontres et de croire que je serai capable de rencontrer un autre homme, je n’en avais aucune envie. Car déjà il y avait fortes probabilités pour que ledit prétendant file à l’anglaise en apprenant que j’étais mère. Et ensuite parce que je risquai par mégarde l’émasculer avec ma profonde maladresse. Et on rajoute un soupçon d’agoraphobie, j’avais une meilleure relation avec mon ordinateur que les grenouilles qui peuplaient ce monde. Ou les géants. Je ne me suis jamais sentie aussi petite qu’en Australie. J’aurai dû m’exiler en Irlande, au pays des fées et des farfadets. Pas dans celui des serpents et des araignées plus grandes que moi.
Quoiqu’il en soit, je décide de me rendre à pied à la galerie de la jeune femme. Ginny si j’ai cru bien lire. Joli prénom. Il me rappelle Harry Potter. Et son fils est si adorable que je ne risquai pas de me heurter à Mamadzilla bis. L’autre chose du parc m’a bien marquée. Je soupire avant d’arriver devant l’endroit. Ok. Ce n’est pas si compliqué d’entrer dans un endroit. Je suis soudain prise d’une crise de panique mais je pouvais le faire. Sautiller sur place comme une future perchiste -mais bien sûr- je sors un kiki de ma poche pour attacher mes cheveux en semi-queue avant de me décider à aller toquer. Je ne suis pas très douée au contact des gens. Et alors que la porte s’ouvre, je me fais l’effet d’être Jack au sommet du haricot. Sauf que c’est un immonde salopard et moi non. Je me retrouve face à un homme beaucoup trop grand. Eve au pays des géants, chapitre trois. Pourquoi faut-il que les mecs dépassent-ils toujours le mètre soixante-dix ? Je reste donc figée sur place avant de regarder en face de moi, carnet en main. Ok donc j’ai trois choix. Soit, je pars très vite en courant. Mais je risque de tomber et ça serait humiliant. Soit, je lui colle le carnet dans la main et je tourne les talons comme un robot. Soit je choisis ma solution de base. Après tout, j’ai la voix de mon psy qui résonne dans ma tête : socialisez-vous. Je décide donc lever le visage vers le monsieur. Un visage très étrange. Grand nez, petits yeux. Il a un visage étonnament féminin pour un homme de cette carrure. Et il est fin comme du papier à cigarette. Si je lui souffle dessus, il tombe. Mais comme avec toutes les personnes du sexe masculin que je rencontre, il doit faire trente centimètres de plus que moi. « Hallo ! » Merde, je parle encore en allemand. Ça m’arrive fréquemment. Allez, on va cacher le malaise avec un sourire supplément blancheur -merci à mon dentifrice. « Je cherche Frau Ginny McGrath. J’ai le carnet de son fils et je me demandai si elle était là. » Sans me départir de mon sourire, je plonge dans le regard obscur de mon interlocuteur. « Bitte… euh pardon… s’il vous plaît. »
Et c’est à ce moment-là que solitude a rejoint malaise et s’est assise avec lui pour siroter un thé en attendant que le mec n’opte pour les deux options qui s’envisageaient à lui. Un, me claquer la porte au nez ou encore me rendre mon sourire pour prendre le carnet et me claquer la porte au nez. Défaitiste moi ?
Il devait dormir Yelahiah. Ça faisait trois jours qu'il avait pas dormi plus de 2 heures en une nuit. Alors il a cédé, il a marché jusqu'à l'atelier, et il est entré par la fenêtre que Ginny lui avait montré. Celle qui était vraiment ouverte quand il l'a un peu poussé. Et il y avait une couverture et un coussin dans un coin, il les a attrapé en souriant. Peut-être qu'il arrivera à lui dire merci un jour. Et il est épuisé là. Il sort rapidement son téléphone, envoie un texto a Ginny et s'allonge sur le canapé. Il risque de dormir longtemps, vraiment longtemps. Parce qu'il en a terriblement besoin. Peut-être qu'il croisera Ginny, peut-être pas, mais en tout cas, il essaiera de la remercier un jour, pour tout ce qu'elle a fait.
Ça toque, trop fort, trop longtemps. Et ça le réveille. Il ne sait pas l'heure qu'il est, il ne sait pas qui ça peut être et il met même quelques secondes pour se rendre compte qu'il est dans l'atelier de Ginny. Il grogne, le soleil est levé mais il n'a pas assez dormi. Il rage, c'est une très mauvaise idée de le réveiller. Et apparemment l'atelier est vide puisque personne ne va ouvrir cette putain de porte. Il respire bruyamment et va ouvrir. Il tombe sur une fille minuscule, qui est là on ne sait pas pourquoi mais qui va en prendre pour son grade parce qu'elle l'a vraiment mis de mauvaise humeur. Respire Yele, ne crie pas dès les première secondes.
Elle parle une langue étrangère pour certains mots et ça aussi ça l'énerve, en fait rien que la tonalité de la voix de cette blonde l'horripile. « Et pourquoi tu vas pas chez elle ? » Non il dit pas bonjour, il ne sourit pas, son regard est noir et ses cheveux en bataille. Il n'arrivera jamais à se rendormir et il la maudit à cause de ça cette foutue blonde. « Et tu peux pas envoyer des textos au lieu de toquer 100 fois alors que personne ouvre ? » Elle a l'air fragile et timide la blonde mais il n'en a rien à faire, elle n'avait qu'à pas le réveiller, elle n'avait qu'à pas venir là, elle avait qu'à aller faire chier quelqu'un d'autre. « Et qu'est ce que tu veux que je foute avec le carnet de son fils ? » Il soupire et serre les dents.
Love, it will get you nowhere. You are on your own. Lost in the wild. So come to me now. I could use someone like you. Someone who'll kill on my command. And asks no questions. I'm gonna make you a fucking psycho (Muse, Psycho )
☆ Yelahiah & Eve ☆
Souvent quand on pense à moi, on pense trop gentille. Et c’est vrai que j’évite le conflit. Face aux enfants, j’essaie d’être bienveillante, ferme et conciliante. Et les étrangers, je les évite comme la peste. Je dodeline de la tête avant d’hésiter à frapper. En effet, je n’ai pas l’adresse de la jeune femme et Nate m’a confiée que sa mère travaillait ici. Je ne suis pas trop douée pour sortir. Parler aux enfants, me socialiser. Je soupire avant de frapper et de voir qu’on ouvre la porte à volée. Ok donc je tombe sur un très grand monsieur. Qui semble tout droit sortir du sommeil. Je n’ose le regarder, me balançant d’avant en arrière. « Et pourquoi tu vas pas chez elle ? » Je grimace avant de pencher la tête sur le côté. Quelque chose me gêne. Déjà le bonjour. Ensuite, il semble pressé de venir me prendre la tête. Je soupire avant de passer une main dans mes cheveux. « Bah je n’ai pas son adresse, balbutiai-je en passant une main dans ma nuque, donc comme son fils m’a dit que sa maman travaillait ici alor… » je n’ai même pas fini ma phrase qu’il vient me couper la parole. Pour les bonnes manières, on repassera. Je souris tout de même. Et tu peux pas envoyer des textos au lieu de toquer 100 fois alors que personne ouvre ? » Des textos ? Il est con ou quoi ? A venir me parler de textos alors que je suis la prof du fils de ladite demoiselle ? Sérieux ? Il croit quoi qu’on se fait des nattes dans les cheveux tous les soirs en sirotant des cosmo et en lisant Vogue le tout vêtues de sous-vêtements dignes de chez Victoria Secret. Je ne rétorque rien me contentant de croiser les bras sur ma poitrine. « Et qu'est ce que tu veux que je foute avec le carnet de son fils ? » Alors, là c’est à moi de serrer les dents. Je déteste la vulgarité. Etant mère de deux enfants, je fais la guerre aux gros mots.
Je lève les yeux au ciel avant de secouer la tête par dépit. « C’est bon vous avez fini ? » J’en doute. Parce qu’il semble m’avoir pris pour un punching-ball. Sauf que sombre connard, je sais maitriser les caprices de mes gosses tout en faisant une omelette. « Déjà, on commence une conversation par bonjour. Si vous n’êtes pas capable de le faire, je vous conseille d’aller remettre votre… » Je cherche le mot. Shnauze. Shnauze. « Votre muselière. Parce qu’à part des aboiements, je n’ai rien entendu. » Je lui fais mon sourire colgate extra-blancheur. « Ensuite, je pense que c’est typique d’un surplus de testostérone, mais vous avez oublié quelque chose, je suis la professeure du fils de votre… freudin, amie, bref ce que vous voulez.Et donc, je n’ai ni son adresse, ni son numéro de téléphone. » Ensuite, je le jauge de haut en bas. « Vous êtes aussi hässlich à l’intérieur que séduisant à l’extérieur. Un visage assez fin, des yeux somme toutes trop rapprochés, un nez trop long, des lèvres trop fines. J’aime bien les cheveux cependant. » Je viens soupirer bruyamment. « Alors allez-y faites votre crise d’adolescent verzögert sur moi. J’en ai rien à faire. Parce que je sais que dans le fond, vous n’êtes pas profondément mauvais juste un gamin qui ne sait pas gérer ses émotions et qui pense que parce que je mesure 1m52, je suis un bon défouloir. » Je viens sourire de contentement. Je viens regarder autour de moi avant de venir m’asseoir sur le muret en face de moi et croiser mes jambes. « Allez feu mon grand. Déverse ta haine sur moi. La bave de la grenouille n’atteint pas la blanche colombe. » Je continue d’avoir un petit sourire sur les lèvres sans le quitter des yeux, carnet en main.
Et sur le coup, je devrais être en train de culpabiliser mais je ne me suis pas sentie aussi vivante depuis des années. ça fait du bien de se défouler sur un parfait inconnu qui semble tout droit sorti d’un film de Stanley Kubrick mais qui a l’esprit aussi vif que celui qu’un petit pois. Quoique non. Ce n’est pas gentil pour les petits pois.
Il est fatigué Yele, il est de mauvaise humeur, à cause d'elle. À cause de cette petite blonde qui se ramène à l'atelier beaucoup trop tôt pour que ce soir acceptable. Pour un carnet, un putain de carnet alors que Ginny en a des centaines dans cet atelier. « Bah trouves là ! » Il statut un faux sourire aux lèvres. Il n'a pas envie de la laisser entrer, pas envie de contacter Ginny pour qu'elle vienne si elle n'avait pas prévu de le faire. Il a juste envie de retrouver le canapé sur lequel il dormait profondément il y a encore quelques minutes. « Envoies le par la poste la prochaine fois ! » Il grogne, il serre les dents, il aurait bien envie de lui faire assez peur pour qu'elle la ferme et qu'elle s'en aille pour ne plus jamais revenir. Mais elle est coriace la petite, elle parle, elle parle, elle ne s'arrête pas. Comme si ça intéressait quelqu'un de l'entendre déblatérer un nombre incalculable de mots allemands à minutes. Oui il connait l'allemand, ou il parle plusieurs langues parce que ça l'a toujours amusé de les apprendre mais il fronce un peu plus les sourcils à chaque fois qu'elle en utilise un nouveau.
« C'est toi qui viens me faire chier alors que je dors et c'est à moi que tu demandes si j'ai fini ? » Elle l'énerve, terriblement. Il regarde autour de lui, personne dans l'atelier, aucun témoin si il décidait de laisser trainer un cadavre dans un coin pendant quelques heures, le temps de finir sa nuit pour qu'elle arrête enfin de jacasser « blablabla...C'est bon t'as fini ? » Non il ne dira pas bonjour, ni merci, ni au revoir, il a juste envie qu'elle se casse de devant la porte. Il réutilise un ton condescendant, hautain, parce qu'il est comme ça Yelahiah après tout. Elle le décrit, pourquoi elle fait ça, mais y'a une partie de sa phrase qui le fait tiquer et sourire, un sourire encore plus mauvais que celui qu'il a eu avant. « Je dois être un sacré canon alors ! » Il lève les yeux au ciel, comme si c'était nouveau qu'il était aussi insupportable que beau, elle ne lui apprend rien la petite blonde. « Si t'es sage et que t'arrêtes de gueuler devant la porte t'auras peut-être le droit d'avoir mon numéro ! » Un faux numéro très certainement, mais si grâce à ça elle finit par se taire il aura tout gagné. « Et toi une gamine qui sait pas parler français correctement apparemment, tu veux qu'on joue aux comparaisons longtemps encore ? Ou peut-être que tu veux continuer à jouer à la psychologue à deux balles avec tes théories pourries ? » Elle ne connait rien de lui, d'où elle se permet de venir juger sa capacité à gérer ses émotions ? « Je t'emmerde, et si t'es pas contente, t'as qu'à trouver un autre endroit pour rendre ses trucs à Ginny, je suis pas son assistant, et j'ai aucun compte à te rendre. T'as cru quoi ? Que parce que t'as l'air d'une petite blonde fragile j'aurais pitié ? Désolé mais t'es pas tombée sur le bon gars gamine. » Il n'a pas prévu de gérer une hystérique aujourd'hui, alors il soupire et continue de la fixer avec son regard noir en replaçant légèrement ses cheveux.
Love, it will get you nowhere. You are on your own. Lost in the wild. So come to me now. I could use someone like you. Someone who'll kill on my command. And asks no questions. I'm gonna make you a fucking psycho (Muse, Psycho )
☆ Yelahiah & Eve ☆
Je n’ai jamais été une grande fan d’altercation. Mais quand on grandit dans un orphelinat, on apprend à se défendre. Les autres filles étaient des pestes et il faut savoir utiliser de ses talents pour s’en sortir. Les premières années furent difficiles car je n’avais pas la carapace faite pour supporter les affronts. J’étais soit trop petite, trop gentille. De ma fenêtre où j’étais continuellement perchée je demeurais spectatrice de l’adoption des autres avec le vieux chat pour me tenir compagnie. et mes dessins. Jamais personne ne s’est arrêté sur moi car je suis trop quelconque. J’ai bien conscience que les gens peuvent soit me haïr soit m’apprécier au premier regard. mais quand on a ma pathologie, on apprend à se foutre du regard des autres. Et ce n’est pas ce géant mal réveillé qui allait me faire plier. J’en ai maté des plus grands que lui alors je me contente de le regarder avec un sourcil haussé. Pour qui se prend t-il à la fin ? « Vous m’avez pris pour un chien policier ? » J’insiste bien sur le vous pour instaurer une distance convenable entre nous. Même s’il pense qu’à me descendre et à passer ses nerfs sur moi, je me secoue la tête par dépit.
« ça tombe sous le sens. Car c’est vous qui m’avez agressé verbalement en premier et non l’inverse. » Suis-je actuellement en train de me foutre de sa gueule ? Mais complètement. Il se prend pour qui ce microbe afin de me juger ? Je me colle donc sur le muret en croisant mes petites jambes sans le quitter des yeux. Un véritable duel à lieu entre lui et moi sans que je ne connaisse son identité. Et à vrai dire je m’en moque. Je vais juste l’appeler Fils de Satan. Ou Monsieur désagréable. « Hm. Sans doute. » Je n’ai pas écouté un traître mot de ce qu’il était en train de me dire. je me voyais déjà lui planter mon talon dans l’œil. Sauf que je ne possède ni talons et que j’ai la jambe trop petite pour atteindre son visage. Quoi ? Il parle d’un numéro ? Je ne peux m’empêcher de rire. Retenons ce bon vieux éclat de rire moqueur. « Chéri, je n’en veux pas de votre numéro. Je préfère encore dîner avec un cobra plutôt que d’avoir à nouveau affaire à quelqu’un comme vous. » Puis, je tire sur mon collier avant de montrer les plaques militaires qui ornaient mon cou ainsi que mon alliance. « Femme mariée. Enfin veuve pour être exact. Mais j’ai déjà deux gamins et je n’ai pas besoin d’en avoir un troisième dans ma vie. » Je soupire d’agacement en espérant que la madame arriverait bientôt. « Masochiste. » Je lève les yeux au ciel. Je ne vois pas ce que cela peut lui apporter ce genre de disputes. Soit ça finit par un coup dans la figure (ou les testicules) ou dans le sexe. Et il me fait autant d’effet que lorsque je pêche un bar sur Animal Crossing. D’ailleurs à bien y réfléchir, il en avait la tête. Je vois ses lèvres bouger mais je n’en écoute pas un traître mot. Un autre gros défaut : je m’éloigne trop dans mon monde imaginaire quand la situation devienne insoutenable. « Je sais parler votre langue, dis-je en admirant mes ongles, j’utilise juste les mots allemands pour les insultes. Car contrairement à mon interlocuteur, je suis bien élevée. Même si je n’ai jamais eu de parents pour veiller sur moi, je n’ai pas une attitude d’un sale gamin en pleine crise de pré-adolescente. » Je baisse la main avant de feuilleter le carnet du petit. « Oh le langage. Monsieur devrait songer à se laver la bouche avec du savon en plus de s’acheter une vie. » Je parle plus pour moi-même que pour lui. « Petite blonde fragile ? On aura tout vu. Ma seule aspiration dans la vie est de me rendre transparente. » Je le vois replacer ses cheveux comme s’il était un mannequin d’une pub l’Oréal. « Vous pouvez replacer vos cheveux tant que vous voulez, ça n’empêchera que vous n’êtes immonde à l’intérieur. » Je le fixe du regard alors que de mentionner la mort de Jacob m’a profondément ébranlé. Je savais d’avance quelles attaques il allait me lancer. Alors, je lance un profond soupir de dépit avant de jeter le carnet à ses pieds. Puis, je tourne les talons pour m’en aller. Sauf que je perds l’équilibre et que je me mange le sol comme une abruti. Pour la sortie théâtrale c’est râpé. Je reste donc au sol avant de pousser un soupir résigné. « Et dire que ça aurait dû être une belle journée. Charmant pour une agoraphobe de tomber sur la progéniture de Satan à chaque fois qu’on met le pied dehors. » Eh oui, je l’ai bien insulté de progéniture de Satan mais il devait déjà avoir claqué la porte et c’était tant mieux. Qu’ils aillent tous se faire foutre.
J'ai couru entre l'école de Noah et la maison, j'ai couru entre l'atelier et les fournisseurs, j'ai couru entre deux artistes qui vont être exposés à un prochain vernissage, et j'ai couru vers la pâtisserie du coin parce que toute cette course m'avait définitivement donné très, très (très) faim.
La galerie est censée être vide quand j'y abouti, après la journée la plus haute en cardio de l'année jusqu'à maintenant ; c'est pourtant hyper étonnée que j'entends des voix au fond complètement de la salle. Et pas des voix qui chantent comme celle de Lola ou de Robin, et pas des voix qui grognent et qui soufflent comme celle de Aude. Non, là, ce sont des voix que je connais à peine ou du moins, y'en a une et une seule que je reconnais et sachant à qui elle appartient, pour sûr que je presse le pas, que je réduis en vitesse rapide la distance entre lui et moi.
Yele parle pas, Yele parle peu et je ne lui en ai jamais tenu rigueur parce que règle générale quand il vient dans le coin, il dort et je parle pour deux. Mais pourtant c'est bel et bien lui que j'entends et il semble tout sauf reposé, il semble tout sauf calme et il semble surtout tout sauf lui-même quand je finis par tourner le coin du couloir et tomber nez à nez avec une petite blonde qui lance un carnet au sol avant de tituber dans l'élan.
Ma main libre s'allonge pour tenter de la rattraper au vol, mais je suis trop lente et surtout trop inutile quand elle termine sur le carrelage et que je retiens une exclamation d'horreur pour lui éviter de supporter ça en plus du reste. « Tu t'es fait mal? » je me penche à sa hauteur, essaie d'un coup d'oeil rapide de repérer de potentielles blessures, avant de redresser le menton vers Yelahiah et ses mèches hirsutes qui précisent qu'il était bel et bien endormi y'a une poignée de minutes déjà. « J'ai ramené des scones et de la confiture, c'est à l'entrée de la galerie. Qu'est-ce qui s'est passé? »
« Peut-être bien. » Elle se trouve des comparaisons qui pourraient marcher alors autant la laisser s'emballer toute seule dans son coin. « J'ai agressé personne, c'est pas de ma faute si madame monte sur ses grands chevaux parce que je l'ai pas accueilli avec un grand sourire. » Parce qu'il n'accueille jamais personne avec le sourire même quand il est de bonne humeur, et là, il est vraiment de mauvaise humeur. Il lève les yeux au ciel et ricane. Si il n'avait pas été aussi hostile elle aurait certainement mis moins de cinq minutes avant de tomber raide dans ses bras. Il pourrait jouer avec ça Yele, mais il est bien trop fatigué pour avoir des idées aussi machiavéliques, même si cette blonde est particulièrement insupportable. Elle raconte sa vie, sans que ça intéresse Yelahiah bien évidemment. Alors il regarde ses ongles, joue avec les manches de son tee-shirt et se demande plusieurs fois pourquoi il reste encore là. « Mais qui a dit que je voulais entrer dans ta vie ? » Il fronce les sourcils, elle s'emballe assez vite la demoiselle inconnue. « Et moi je sais parler la tienne donc renseigne toi sur les gens que tu veux insulter avant de le faire, même si c'est dans une langue étrangère. » Il est certainement bien plus intelligent qu'elle et il le fait savoir, parce que c'est Yele, parce qu'il est imbu de lui même et c'est comme ça. « T'es plus jeune que moi je suis sûre alors redescends de ton piédestal ! » Il fronce encore les sourcils, elle s'énerve toute seule dans son coin et elle parle sans jamais s'arrêter, comment il va pouvoir se débarrasser de ça ? « Le plus important c'est d'être beau à l'extérieur ! » Un clin d’œil surjoué parce que plus il est confiant et plus elle est hors d'elle, c'est amusant, et peut-être qu'elle partira plus vite si il est assez insupportable. « Progéniture de Satan j'aime bien ! » Il va peut-être même changer son pseudo instagram pour ça, il réfléchit une seconde avant de voir le carnet de Noah jeté au sol et quelques secondes plus tard c'est la blonde qui s'étale. Il pouffe de rire Yele, bien évidemment qu'il rigole. Mais il aperçoit Ginny qui court pour l'aider, il grogne, parce qu'à tous les coups elle va la laisser entrer et la blonde va encore parler des heures sans s'arrêter. Super programme. « Elle a pas dû se faire mal elle est pas tombée de très haut ! » Elle est minuscule par rapport à lui. « Y'a vraiment des fois où t'es parfaite Gin. » Il oublie la blonde et il part en direction des scones et de la confiture. « Je t'ai envoyé un texto pour te dire que je dormais là, et elle te cherchait pour te donner un carnet, et elle m'a réveillé à cause de ça. Après elle a beaucoup parlé et elle a finit par s'étaler sur le sol, je t'ai à peu près résumé la situation. »
Love, it will get you nowhere. You are on your own. Lost in the wild. So come to me now. I could use someone like you. Someone who'll kill on my command. And asks no questions. I'm gonna make you a fucking psycho (Muse, Psycho )
☆ Yelahiah & Eve ☆
« oh parce qu’élever la voix sur des inconnus est dans une habitude alors. » Personne détestable. Un grondement monte dans ma gorge alors que je le fusille du regard. Je n’ai jamais été du genre à hurler sur les gens. Mais ce mec a le don de me faire sortir de mes gonds. On le sait dès le premier coup d’œil si on va apprécier une personne ou pas, et lui je pense que je vais le haïr jusque dans les tréfonds de mon cœur. « Vous en voulant me donner un faux numéro. Vous êtes d’un pathétique. » Je pourrais lui vomir au visage mais je me retiens. A la place, j’essaie de ravaler la baffe qui me démange. Je viens me percher sur un muret pour fuir son regard un instant. Parler de Jacob n’a rien de très agréable. « je n’ai aucune intention de me renseigner sur vous. » Et c’est la pure vérité. Qu’il aille pourrir en Enfer avec Hitler et Mussollini. Je n’ai jamais voulu de mal à personne. bien au contraire, je suis la douceur même et la gentillesse incarnée. « je ne sais pas ce que je vous ai fait pour que vous soyez aussi odieux mais sachez monsieur qu’il n’est pas dans mes habitudes de parler de la sorte à des étrangers. » Je tente de relever le menton. Je sens les murs devenir étroits. Pour la pauvre agoraphobe que je suis, cette situation est trop toxique alors je viens déglutir. « Tant mieux si vous vous trouvez beau et si votre compagne aussi. » Je pourrais répondre à son clin d’œil mais je suis blessée. Alors, je me contente de lui balancer le carnet aux pieds. J’avais du respect pour le petit pour lequel je m’étais prise d’affection mais c’était ça ou une baffe dans la figure. Seulement, je peux tenter toutes les sorties théâtrales du monde, ça n’empêche que je m’étale sur le sol. Une jeune femme vient me porter secours et je relève le visage avant de sentir les larmes couler sur mes joues de manière abondante tant je suis humiliée. Je savais que je n’aurai jamais dû sortir. C’était pour cette raison que je me terrais chez moi comme un rat parce que je ne supportais pas ce pays infâme ni même ses habitants. Je viens sécher mes larmes avant de me relever. « Danke. » Je tourne la tête vers le mec qui s’est désintéressé de moi. « Je suis… je suis la professeure d’arts de votre fils et il a oublié son carnet de croquis donc… enfin laissez tomber. Je vais vous laisser. Merci encore. Votre ami m'a fait comprendre que je... enfin je ne suis pas la bienvenue. Bonne journée, madame et bonjour à votre fils.» Je n’ose la regarder avant de m’éloigner. Je n’ai jamais ressenti une telle honte en présence d’étranger. Et il n’en faut pas plus pour mon petit cœur fragile de se mettre à culpabiliser sévèrement et de fondre en larmes. Une fois à l’extérieur, le monde me semble si vaste, les gens sont trop nombreux. ça recommence. Je connais les crises de panique quand elles se profilent à l’horizon. Devant l’homme désagréable, je pouvais me donner de grands airs mais dans le fond, il avait raison sur toute la ligne. Je n’étais personne. Un grain de sable sur l’étendu du monde. Mes jambes se dérobent à nouveau alors que je ferme les yeux pour tenter de calmer les battements de mon cœur. J’aurai dû venir avec mes chiens. N’était-ce pas pour ça que je les avais acheté ? Pour me protéger. « Plus jamais, je sors de chez moi. C’est décidé. » Je prends une profonde inspiration avant de passer une main sur mon front poisseux avant de voir que je m’étais ouverte la tête. Pauvre imbécile. Et pauvre con aussi.
« Danke. » « Elle a pas dû se faire mal elle est pas tombée de très haut ! » mes prunelles attrapent celles de Yele au vol quand je tente de lui dire sans le moindre mot de faire attention. Il a un humour particulier le Blythe, un humour que je comprends et qui me fait rire la grande majorité du temps ; mais à voir l'état dans lequel la petite blonde se trouve, je doute qu'elle ait le moindrement la tête à rire. « Y'a vraiment des fois où t'es parfaite Gin. » et elles rougissent mes joues, au fil de ses pas qui commencent à s'éloigner d'elle et de moi. J'ajoute rien au sens où c'est lui, de nous deux, qui les aime les compliments. Il le sait aussi bien que moi que le simple commentaire gentil à mon égard me scotche dans le silence le plus bourré de malaise possible, il s'en amuse je sais, je pouffe de rire aussi. « Gardes-en pour les autres, quand même. » parce que je les vois, ses doigts, qui flirtent avec les desserts et la confiture. Ce n'est pas parce qu'on est les deux seuls anglais présents qu'il doit s'en donner à coeur joie pour vider les stocks par allégeance à notre couronne. « Je t'ai envoyé un texto pour te dire que je dormais là, et elle te cherchait pour te donner un carnet, et elle m'a réveillé à cause de ça. Après elle a beaucoup parlé et elle a finit par s'étaler sur le sol, je t'ai à peu près résumé la situation. » je l'entends qui explique, j'apprécie sa franchise et il le sait Yele, il s'y applique depuis le premier jour et je ne lui en serai jamais assez reconnaissante.
Et elle reprend doucement la parole, la gamine, les joues rougies et les yeux brillants d'une émotion qui semble la secouer beaucoup trop. « Je suis… je suis la professeure d’arts de votre fils et il a oublié son carnet de croquis donc… enfin laissez tomber. Je vais vous laisser. Merci encore. Votre ami m'a fait comprendre que je... enfin je ne suis pas la bienvenue. Bonne journée, madame et bonjour à votre fils. » elle s'explique et elle se justifie et je lui laisse toute la place de le faire, ma main se tendant simplement vers elle pour prendre le carnet de Noah qu'elle me tend. Je tente un coup d'oeil rassurant, je tente un sourire qui l'est tout autant, je tente même de la remercier, de tout calmer avant qu'elle ne recule de plus belle, mais la seconde suivante déjà elle s'est envolée.
Mes pas se précipitent à sa suite, Yele reste dans l'angle alors que je pique une bouchée de scones en lui tirant la langue de voir qu'il a déjà entamé presque la moitié des rations tout seul sans rien dire de plus. Elle est dehors, la blonde, elle est dehors et sa silhouette est secouée de tremblements. Ses iris se cachent derrière des larmes et ses mots me font bien plus mal qu'elle ne pourrait le croire. « Plus jamais, je sors de chez moi. C’est décidé. » ma tête se secoue doucement, imperceptiblement de la gauche à la droite, comme si c'était important, comme si c'était essentiel qu'elle sache que ça, c'est tout sauf une bonne solution. Je ne sais pas du tout ce qui a bien pu se dire pour la bousculer à ce point mais je suis persuadée que ça ne vaut pas la peine de se laisser détruire ainsi, de s'isoler tout autant. Ma paume s'avance vers elle sans jamais la toucher, la distance de quelques centimètres que je garde entre son bras et ma main suffit à ce qu'elle me voit approcher, à ce qu'elle ne sursaute pas à mon arrivée.
« Un thé? » j'ose, de la voix la plus douce que j'ai en banque. « C'est délicieux avec les scones. » un argument comme un autre pour la ramener à l'intérieur, pour l'aider à souffler un peu, le temps d'une gorgée ou deux. « Et ça aide à tout réparer. » elle n'aura même pas besoin de parler ni à moi ni à quoi que ce soit. Je la laisserai libre de se poser sur l'un des canapés de la grande salle le temps de retrouver ses esprits, le temps qu'il faudra.
Il regarde Ginny s’approcher et s’intéresse tout de suite au sachet qu’elle ramène. Elle ramène souvent du café ou de la nourriture la McGrath, et il a appris à tout repérer Yele maintenant. Il arrive régulièrement à piquer quelques gâteaux, même les jours où elle ne s’annonce pas quand elle arrive. Il arrive même, des fois, rarement, que ce soit lui qui ramène un café. Mais là il détourne rapidement son attention de la blonde qui est tombée, comment elle a bien pu tomber d’ailleurs ? Yelahiah l’a peut-être trop bousculé avec ses mots, mais il s’en fiche. Elle n’avait qu’à pas le réveiller, elle n’avait qu’à pas parler sans s’arrêter, elle avait qu’à trouver Ginny ailleurs que dans son atelier. Ginny demande ce qu’il s’est passé alors Yele explique rapidement. Mais il est bien trop occupé à manger tous les scones pour n’avoir ne serait-ce que l’idée d’essayer de calmer la jeune femme.
Elle pleure. Dommage pour elle, tant mieux pour lui, elle ne mangera peut-être rien si elle est trop triste. “Comme si t’avais le choix.” Bon ok il écoute un peu quand même parce qu’il ne va pas laisser Ginny seule dans cette galère, oui c’est elle la galère. Elle a dit qu’elle était professeure de dessin non ? Alors comment elle va bien pouvoir faire pour ne pas sortir ? Mais peut-être qu’il l’a assez terrorisée pour qu’elle ne veuille plus s’approcher de l’atelier quand il dort. Ginny lui tire la langue et bien évidemment qu’il répond, c’est un enfant dans sa tête Yelahiah. “T’as pris du café ou il faut en faire?” Non il n’ira pas faire son thé si la blonde en veut. Il veut bien faire un café pour Ginny mais il ne faut pas abuser de sa bonté non plus. Elle se balade un peu partout avec la blonde, un coup à l’intérieur, un coup dans la rue mais Yele la garde encore un peu à l’oeil. “Oups y’a presque plus de scones.” Il bat des cils en captant le regard de Ginny. Il se lève et s’étale dans le canapé derrière lui. “En attendant j’ai toujours pas fini ma nuit.”
Love, it will get you nowhere. You are on your own. Lost in the wild. So come to me now. I could use someone like you. Someone who'll kill on my command. And asks no questions. I'm gonna make you a fucking psycho (Muse, Psycho )
☆ Yelahiah & Eve ☆
Sortir de chez soi. Ça n’a rien de compliqué en soi. On met un pied devant puis on passe le seuil. Mais l’agoraphobie est sournoise. Elle fait ressortir nos pires tourments, nos pires craintes. Celle de mourir. et pourtant, nous demeurons éphémères, nous ne sommes que des brindilles dans le confins de cet univers. Alors pourquoi est-ce si difficile de sortir de chez soi ? De respirer un air qui est pollué ? De traverser une rue et de faire face à un inconnu ? Un inconnu. Un inconnu. Un inconnu.
Je fais face à la fille. Elle n’a pas l’air beaucoup plus vieille que moi. Un visage assez harmonieux, des lèvres fines, des sourcils fins et de beaux cheveux. Les gens d’ici ont tous de beaux cheveux. Elle doit me surplomber d’une tête alors que sa voix se veut douce et que son sourire semble contagieux. Mais le comportement néfaste de son compagnon me porte ombrage. Je sens le regard de l’homme sur moi, je sens sa haine qui évacue par tous les pores. Et je sens les ténèbres noircir mon cœur. Mon cœur qui a pourtant bien souffert par le passé. Je ne sais pas si cette personne est dépourvue d’empathie, profondément vile mais le fait que la mère de mon élève soit ami avec un telle personnage me pousse à prendre la fuite. C’est si simple de prendre la fuite. De refuser une main tendue afin de précipiter une chute un peu plus rapide. Car dans le fond, pourquoi tombons-nous ? Je déglutis alors que la nouvelle arrivante fait la navette entre nous deux. Je pars du principe que ma dispute avec le fils de Satan ne regarde que nous. Mais visiblement, cette espèce de dramaqueen en puissance ne semble pas en avoir fini. Je serre donc la mâchoire avant de m’éloigner, confuse.
Dans le fond, l’intervention de la brune tombe à pic car j’étais sur le point d’asséner un coup violent dans les testicules du jeune homme. Je n’ai jamais été très douée pour les disputes, pour le conflit. Ayant grandi dans un orphelinat, j’ai passé ma vie seule. J’ai pourtant cru par deux fois pouvoir fonder la famille que je n’ai jamais eu. Mais la première tentative fut un échec par le départ précipité du sujet masculin tandis que la seconde fut avortée par le décès prématuré de la personne qui partageait ma vie. Je tente donc de me calmer, assise à l’extérieur où la morsure du soleil tente de me redonner un peu de couleurs. La mère de Noah ne tarde pas à me rejoindre. Sa voix est douce, apaisante. Un peu rauque pour une femme de sa constitution mais je ferme les yeux pour en dessiner les mélodies alors que mes doigts bougent légèrement pour marquer la tonalité de sa diction. Elle me propose un thé. Et j’ai bien envie de saisir cette offre mais je ne le peux. Je sens qu’elle essaie d’établir un contact avec moi ce qui ne fait qu’affluer l’eau qui dévale le long de mes joues. Je ferme un instant les yeux pour tenter de calmer les battements de mon cœur. De me laisser bercer par la voix de la jeune femme, de tenter de ne pas me laisser prendre par mes sentiments négatifs. Cinq choses. Je tente mentalement d’ériger mes cinq pensées positives de la journée, de construire ce palais de verre dans lequel je me terre. Mais l’homme décide de le détruire avec sa voix désincarnée, vide d’émotions comme s’il n’en avait pas conscience. Comme s’il oubliait que les mots pouvaient à la fois nous blesser ou nous caresser. Je tourne la tête vers lui. Mais quel genre de monstre es-tu jeune homme pour te ficher du regard des autres ? Quelle personne malsaine trône dans cette pièce pour se ficher éperdument des pleurs d’une femme ? Je me redresse comme si j’avais été piqué par une décharge.
Ne pas céder à la panique. Ne pas céder à la panique. Ne pas céder à la panique.
Je vois les tremblements qui redoublent d’efforts sur mes mains. Ne pas faire de crises devant les inconnus. Contrôler ses émotions. Contrôler ce que l’on ressent. Ne jamais commettre de débordements. Se contenter de sourire. « Non. » Ma voix est plus rauque que je ne l’aurai voulu. Mon interlocutrice ne mérite pas ma frustration, ni même ma colère. Je passe donc une main nerveuse dans mes cheveux. Telle un raz de marée, la crise d’angoisse me coupe la respiration. Je sens le mal vriller mes tempes alors que la voix raisonne, moqueuse. Qu’il se moque de mon état. « Etouffez-vous avec, murmurai-je malgré moi. » La colère, elle me menace. Elle veut me clouer sur place. Ne pas céder. Résister. Tenter de trouver cinq choses mais le visage anguleux de l’inconnu s’impose dans mon esprit alors que mon petit poing se serre. Je me mords l’intérieur de la joue en sentant la morsure de mes ongles contre ma paume. Je tente de vriller mon regard sur un point lointain. Je devrais disparaitre. Oui, disparaitre. M’en aller et prier pour ne plus jamais recroiser le regard ténébreux du démon qui a élu domicile sur le canapé de la galerie. « Veuillez m’excuser le comportement qui va suivre, miss. Il ne vous concerne pas mais la personne néfaste que vous hébergez sur votre canapé. » Je tourne donc les talons.
On dit souvent que l’on voit rouge lorsque nous sommes en colère. On dit souvent que la colère est un vecteur, qu’elle pousse les personnes dans leurs retranchements. Qu’elle fait ressortir le pire en chaque être humain. Je fouille dans mon sac pour en sortir un sachet métallique. Sans doute cette protection est-elle périmée depuis le temps qu’elle prône au fond de mon sac. « Allez donc vous faire sauter, sombre connard. Et au passage étouffez-vous avec vos scones. » Puis, je projette le préservatif qui retombe sur le long corps de l’être de sexe masculin présent dans la pièce. Puis, je me tourne vers la femme qui tente tant bien que mal d’arranger les choses. Je tends malgré moi ma carte. « Amenez donc Noah au musée. Nous pourrons aisément discuter sans… » Je m’autorise un regard vers l’espèce chose semblable à un être humain. « parasite. Je suis d’ordinaire plutôt douce et je vous offrirai volontiers un thé. » Puis, je resserre ma prise sur mon sac. « Il a du talent. Votre fils. » Je vins avoir un maigre sourire. Essayer du moins. C’est difficile quand on est rongé par un sentiment que l’on contrôle mal. « Et excusez-moi pour cette conduite indigne. » Le restant ne regarde que moi. Mon agoraphobie, mes enfants, mes chiens. Ma vie. « Merci encore pour la proposition. Je pense qu’une personne étrangère est de trop dans… » Avec des personnes qui sont amies et ne se comprennent que par un seul regard. « Bonne journée, miss. » Puis j’incline la tête sur le côté avant de traverser la galerie. Je me stoppe néanmoins sur le seuil. « Votre galerie est très jolie. » Puis, je sors pour consulter mon téléphone. L’heure est encore tôt et je n’ai aucune envie de traîner dehors. Je décide donc de continuer ma routine. Et de me rendre au musée. Laissant la rixe précédente sur le seuil de cette galerie où je ne remettrais plus jamais les pieds. Et où j’espérerai ne plus jamais croiser le regard ombrageux de cet homme si nocif. Deux personnes séduisantes. L’une solaire, l’autre ténébreuse. Le ying et le yang.
HRP:
Je suis désolée Ce n'est pas terrible mais je pense que vous pouvez le clôturer ou le continuer sans moi