Elle avait faim, Lily. La soirée est déjà bien entamée et le soleil s’est couché depuis longtemps sur Brisbane mais cela n’a aucune incidence sur ce qu’il se passe dans son ventre. Et son ventre lui dit que là, maintenant, il est l’heure de manger et d’arrêter de réviser ; ou alors de manger en révisant et ça, ça voyez vous c’est la meilleure idée du monde. Le plan est connu depuis plusieurs semaines déjà et elle a eu le temps de le rôder et de le perfectionner. Il consiste à prendre la plus grande chemise disponible dans l’appartement (une de Matt, donc) et le premier jean allant avec, le tout couplé avec des chaussettes qui seront assorties si Lily a de la chance - elle n’en a pas, ce soir, et ça sera du bleu et du rose - avant de finalement se faufiler entre les clients du bar, un étage en dessous, pour filer le plus rapidement possible dans la réserve. Deklan l’observe généralement en levant un sourcil, Matt la supplie de lui laisser le dernier bout de fromage et elle elle ne fait que sourire encore un peu plus sans ne rien promettre, même si elle finit toujours par se plier à sa volonté.
La mécanique était bien huilée jusqu’à ce soir et tout filait toujours tout droit quand le pire obstacle qu’elle pouvait rencontrer c’est qu’il ne reste plus de son fromage préféré et qu’elle doive se rabattre sur un autre, beaucoup moins cool. Depuis qu’elle est arrivée ici, c’est sûrement la pire souffrance qu’elle ait eu à endurer, preuve en est que sa vie n’est pas si chaotique qu’elle serait tentée de le faire croire, entre deux éclats de rire. Alors ce soir elle oscille dans l’arrière boutique, elle laisse son index glisser entre les différentes bouteilles de vin et autres alcools entreposés là et elle laisse tout le reste de ses doigts laisser leur trace sur les autres meubles en parallèle. Elle se sent chez elle, la brune, ou en tout cas ça en a tout l’air maintenant qu’elle peut donner l’emplacement de tous les objets de mémoire et qu’elle connaît la mécanique de fonctionnement du bar par coeur. Elle aide autant qu’elle le peut quand elle en a le temps, tant pour passer un peu de temps avec Matt que pour partager un peu du poids avec le reste de l’équipe de jour ou de nuit. Enfin, elle aide, certes, mais pas assez pour connaître les derniers arrivés dans l’équipe et ça voyez-vous ça va rapidement devenir un problème.
« ... C’est pas ce que tu crois. » Prise la main dans le sac, la brunette qui s’était lancée dans une séance de dégustation de fromage, les coudes posées sur le comptoir de l’arrière boutique et ses pieds battant silencieusement la mesure en (quasi) rythme avec la musique diffusée dans le bar. Ses yeux se posent de partout, sa queue de cheval de misère ne ressemble déjà plus à grand chose et oui, elle a tout l’air d’une voleuse.
Il s'y plaisait bien dans ce bar, contrairement à ce qu'il avait pensé vivre en acceptant de se lancer dans l'aventure sur une idée de génie de Jill. Wren s'en rappelait fort bien de ces fameuses idées de génie qui les avaient amenés à vivre de nombreuses heures de colle à s'emmerder en faisant des avions en papier, le bon vieux temps. Là, il espérait tout de même que finir derrière le comptoir d'un bar n'allait pas le faire retourner vingt piges en arrière à supporter les remontrances de leurs idiots de professeurs, il n'avait plus la patience pour ce genre de conneries, mais est-ce qu'il avait de la patience pour quelque chose, Doherty? Pas pour les clients qui l'emmerdaient et il y en avait un paquet ce soir-là. Après avoir dégagé d'un coup de balai dans le cul un abruti qui avait dragué lourdement une pauvre cliente qui n'avait rien demandé, il s'était autorisé à lancer un regard noir empli de sous entendus violents pour qu'un autre décampe avant de créer une bagarre générale. Parfois, on ne savait plus s'il gérait les boissons ou les entrées inopportunes dans le lieu paisible habituel, sûrement qu'il faisait un peu des deux pour pallier à son sale caractère. Wren avait besoin de se défouler depuis qu'il avait quitté le corps des pompiers et faire des verres n'aidait en rien à le calmer quand il était de mauvais poil, il avait besoin d'un peu d'action. Il aurait pu s'excuser auprès de la pauvre clientèle qui devait être témoin de ce grand dadais aux manières de rustre quand il s'agissait de virer les lourdingues mais la plupart des gens le remerciaient d'oser dire tout haut ce que d'autres pensaient. Se prendre une petite pause en allant ranger deux ou trois bouteilles dans la réserve, c'était apaisant ça, non? Sur le papier, oui. En réalité, choper une fille habillée un poil bizarrement en train de se faire toute la garniture de fromage pour le service, c'était beaucoup moins dans le thème de ce que Doherty avait cherché en allant se mettre au calme trente secondes. "Ah mais je crois rien, moi. Je vois juste quelqu'un qui siffle le fromage pour le service là, faut payer pour ça m'dame et puis faut demander aussi. J'ai pas envie de virer quelqu'un d'autre ce soir, faites un effort, hein." Vraiment, il était las. C'était écrit sur son faciès et si on ne l'aidait pas à mettre au clair la situation en un temps record, il allait perdre patience et ça, c'était risqué gros certains soirs avec un Doherty.
"Ah mais je crois rien, moi. Je vois juste quelqu'un qui siffle le fromage pour le service là, faut payer pour ça m'dame et puis faut demander aussi. J'ai pas envie de virer quelqu'un d'autre ce soir, faites un effort, hein." Aïe. Les problèmes. S’ils avaient une odeur, ils auraient la sienne. S’ils avaient un visage, ils auraient désormais le sien aussi. Il mesure plus ou moins trois mètre cinquante et doit faire le double du poids de Lily donc oui, tout en lui résonne problèmes. Elle n’a rien de crédible, la trentenaire qui a tout d’une gamine des rues venue voler de la nourriture en cachette. ‘C’est pas ce que tu crois’, en plus, qu’elle ose dire, comme si ça allait la sauver de ce mauvais pas au lieu de l’y enfoncer encore plus rapidement, encore plus fort. Oh, stupide Lily. Tout dans son expression et sa réaction démontre qu’on ne lui a jamais rien reproché à elle, la gamine parfaite, celle à qui tout réussit. Comme quoi il faut une première à tout, même à trente quatre ans.
« J’ai pas d’argent. » est la seule excuse qu’elle trouve, celle qui à ses yeux semble la plus honnête possible et qui pourrait le plus aisément la sortir de cette situation. Autant dire que l’ordre des priorités inscrit dans l’esprit de la brune est totalement biaisé. Elle vient surtout d'aggraver son cas à vitesse grand V. Elle se redresse et suce le bout de ses doigts pour en retirer les derniers bouts de fromage (oh, quel glamour Lily) avant de déglutir aussi lentement que dramatiquement pour faire face à l’inconnu. Même droite, il la dépasse d’une tête. Pour une femme qui a toujours eu l’habitude d’être au dessus dans la foule, cela a le don de la déstabiliser. « Je ne suis pas une voleuse non plus. Je ne suis même pas une cliente. » Elle rame Lily, elle rame tellement. A contre courant. Sans pagaie. Sans même aucun radeau, à vrai dire. Juste ses petits bras pour faire face au torrent de reproches face à elle - autant dire qu’ils sont loin d’être suffisants. Dans un élan désespéré, elle finit par juger bon de refaire sa queue de cheval pour attacher convenablement chacune de ses mèches. Comme si ça allait réellement changer quoi que ce soit à la situation, à nouveau. « J’habite ici. » Ça sonne comme un aveux d’occupation illégale des lieux. Oh, Lily.
Pourtant les habitudes ont la vie dure et elle digère toujours aussi mal d’être prise pour cible. Sa seule défense devient rapidement l’attaque et elle n’a pas beaucoup d’armes en sa possession à l’heure qu’il est, elle fait donc au mieux (ou au pire, à votre guise). « Je ne te connais pas. T’es qui ? Tu ne travailles pas ici, qui me dit que ce n’est pas toi qui tente de voler des trucs ? » Il ne travaille pas ici parce qu'elle connaît tous les employés et parce que Matt lui dit toujours tout - sauf quand elle est perdue dans ses pensées et qu'elle n'écoute pas trop trop ce qu'il dit.
Il s'attendait certainement à un grand nombre de comportements déviants depuis qu'il occupait ce post au DBD mais Wren n'avait probablement pas envisagé l'occupation illégale de la réserve par une sans domicile fixe. Après tout, l'inconnue avait le profil: elle était habillée plus ou moins n'importe comment, elle lui narrait qu'elle n'avait pas un sou et par dessus le marché, elle lui avouait même qu'elle squattait dans la région. Pas besoin de faire de calculs arithmétiques de grande envergure pour en arriver à une (fausse) conclusion. Qu'allait-il faire d'elle, par contre? Là, on avait affaire à une véritable question parce que ce n'était pas écrit dans sa fiche de poste qu'il allait devoir gérer ce genre d'individus, comme quoi il allait peut être devoir négocier une augmentation de salaire avec Matt, c'aurait été une décision saine et logique pour le grand dadais qu'il était. "Sauf qu tu t'es gourée, il y a pas écrit Restos du Coeur sur le panneau à l'entrée. Ici, on paie quand on prend quelque chose et si tu veux dormir, il y a sûrement un refuge pour sans domicile fixe dans le coin. Renseigne toi." Il avait l'oeil vif, un poil mauvais et avec sa haute stature, Wren en imposait face à une Lily qui arrêtait enfin d'avaler la moitié de la réserve pour s'approcher, à pas de louve. Il y avait de quoi avoir peur quand on mettait un Doherty dans une telle position parce qu'il n'avait pas spécialement envie d'être méchant à l'heure actuelle mais son travail lui demandait expressément de gérer la situation d'une main de maître. Par dessus le marché, la petite brune osait remettre en cause son statut d'employé, à croire qu'elle voulait vraiment qu'ils partent sur de très mauvaises bases tous les deux. "Bon, tu vas pas me la faire à l'envers et décarrer vite fait. Au pire, le boss va gérer l'affaire parce que j'ai pas la patience. Ah merde, Matt est chez le fournisseur..." Il réfléchissait à haute voix, autant dire que c'était mal barré pour la suite des événements.
Il est grand et rien que ça énerve passablement Lily, elle qui doit lever le menton pour le regarder dans les yeux et lui faire face, avec son air plutôt crédible de jeune femme énervée. Wren est exaspéré et rien que de l’entendre, elle l’est encore plus. Il ne la prend pour quelqu’un qu’elle n’est pas, entre une mendiante ou une sans domicile fixe apparemment il n’a pas voulu faire de choix et a donc opté pour les deux. La belle affaire. Elle qui a passé sa vie à être la parfaite jeune fille, la parfaite ado et désormais la parfaite adulte ; le retour à la réalité est difficile. Il est un inconnu qui lui donne le rôle qu’elle a passé une vie entière à essayer d’éviter et quelque chose se serre dans la poitrine de Lily. « Oui demande au boss, super idée, tu lui dis que sa femme n’a même plus le droit de se balader tranquillement dans son bar. » Ses yeux roulent sur eux même et son souffle est long et profond. Cette fois-ci elle ne peut pas compter sur son sourire angélique pour la sauver puisqu’il n’a pas le mérite d’exister pour le moment. Au contraire, il fait face à ce 1% d’elle même de rage et de rancoeur qu’elle garde généralement pour son frère seulement mais voilà qu’il vient de gagner le gros lot à son tour.
Pourtant elle n’a pas pour intention de se laisser faire, la brune, encore moins s’il y a du fromage en lot et qu’elle n’a sûrement jamais eu aussi faim de toute sa vie entière. La fête bat son plein derrière elle et face à lui l’inconnu de deux mètres sorti de nulle part et s’auto proclamant roi des lieux. Tout en essuyant le restes de nourritures sur le bout des doigts, elle prend le temps de l’examiner le plus en détails pour savoir à quelle conclusion en venir. « Parce que ça se voit que t’es venu piquer de la nourriture, t’as de miettes là et si moi j’en ai le droit c’est pas ton cas et - ... » Et elle s’approche, Lily, naïve. Les miettes sur son bras, les tâches qu’elle en voit, les veines saillantes. Elle s’approche d’un pas et d’un autre puis en oublie toute notion de limite de sécurité, ses doigts venant déjà se loger autour du bras de l’inconnu. Les piqûres sont impossible à manquer d’aussi prêts. Elle ne connaît que trop bien ce genre de marques pour passer à côté. « Tu comptais te piquer ici ou quoi ? »
Wren n'était pas le genre d'employés à se mêler de ce qui ne le regardait pas, raison de plus pour qu'il n'interroge jamais ses patrons sur leur vie privée. Il avait eu vent de cette affaire de mariage en arrivant au DBD mais il n'avait pas porté plus d'intérêt que cela à cette histoire de télé-réalité, ce n'était vraiment pas sa tasse de thé. Il aurait peut être dû cela dit pour savoir si ce que disait la jeune femme était vraie: la femme de Matt en face de lui? Est-ce qu'il y avait des photos quelque part pour en témoigner? L'union était sûrement trop récente pour qu'il ait eu le temps d'en développer pour les mettre sur son bureau. Il allait sûrement devoir la croire dans ce cas, ou juste froncer les sourcils en essayant de se remettre sur les rails avant la catastrophe assurée. "Si t'as une preuve de ça, je t'emmerderai pas." Encore fallait-il qu'elle lui trouve l'argument rêvé pour que Doherty lui foute la paix car il pouvait être sacrément dur au mal quand il le voulait. Cela dit, Lily avait de la ressource, c'était indéniable, celle-ci s'approchant de lui en prétextant une histoire de miettes ridicules. Si Wren avait manqué quoique ce soit avant d'arriver ici, il s'en souviendrait pour sûr... Oups, effectivement, ce petit détail l'avait échappé au moment où elle s'emparait de son bras pour lancer son commentaire acerbe, de quoi le rendre nerveux ou juste l'énerver un peu plus. "Bien sûr, j'aurais choisi la réserve du bar pour ça. L'endroit le moins indiqué pour ça." Il y avait beaucoup trop de passage pour cela et puis, le suédois avait arrêté ses conneries depuis de nombreux mois, même s'il savait qu'il en garderait les stigmates pendant encore très longtemps. "Ouais, je me suis piqué à l'héro'. Puis j'ai arrêté et j'ai trouvé ce taf grâce à Jill. On est deux à juger sans connaître semble t-il, non?" Ils ne savaient strictement rien l'un de l'autre, du moins Lily savait quelque chose que peu d'individus avaient pu apprendre avec Doherty. "Et elle s'appelle comment la femme de Matt?" Histoire de se coucher moins bête ce soir-là parce que le nordique avait loupé une salve d'épisodes, comme à son habitude.
"Et elle s'appelle comment la femme de Matt?" « Lily. »
Ça devient de plus en plus facile à dire ça, c'est cool. Avant, j'aurais juste pouffé comme un con qui rêve éveillé, jetant un coup d'oeil à mon annulaire pour confirmer que c'était pas juste un autre pari perdu qui l'avait forcée à porter une alliance faisant écho à la mienne - et sa mood ring en plus. Y'a quelques semaines à peine, j'aurais presque été le dude qui était sûr qu'à la seconde où on aurait posé le pied à nouveau à Brisbane en revenant de Cuba elle aurait fini par mettre les freins parce que tout était trop vite et je lui en aurais absolument pas voulu. Quoi que soyons honnêtes, ça m'aurait démonté à un niveau de perdre celle que je considère maintenant comme bien plus que juste la femme de Matt. C'est bizarre à dire, mais ça fait du sens et ça me suffit.
J'entends pas ce qu'ils se disaient avant mais je me doute qu'avec ce que le Doherty lui demandait, j'arrive pile au bon moment pour officialiser les prénoms. « Lui, c'est Wren c'est un pote de Jill. » j'explique brièvement, slalomant à travers la réserve pour aller porter la caisse que je traîne du fournisseur du jour, les différentes bouteilles que je place machinalement pour pas avoir à me faire chier avec ça demain matin avant l'aube. Ils sont tous les deux derrière moi quand j'ai fini, le grand gamin fier aux paumes qui se plantent sur ses hanches et au coup d'oeil comblé de voir la panique évitée avec une tablette qui était complètement vide mais qui maintenant est organisée comme si Marie Kondo était passée dans le coin.
Et il retourne vers eux, le garnement fier de son rangement qui sera foutu à la seconde où Deklan entrera chercher une bouteille et qu'il en déplacera vingt. « J'ai pas fait les présentations, journée de merde, désolé. mon bras passe autour des épaules de Lily, mes sourcils se froncent de voir sur elle la chemise que je trouvais nulle part ce matin encore et qu'elle a subtilisée la fourbe. Tu cherchais quoi? à Wren d'abord, à qui j'offre un grand sourire prêt à aider, lui qui commence encore mais qui fait foutument bien ses marques au café pour un nouveau qui n'en a absolument plus l'air. T'as tout ce que tu voulais, toi? » mes lèvres se posent sur la joue de Lily la seconde d'après, si l'un l'autre sont ok je retourne bosser, sinon se la jouer chill dans la réserve me va aussi, y'a du fromage et du vin, on est bien.
Convaincue de ne pas être celle des deux à avoir quelque chose à prouver, Lily ne prend même pas la peine de chercher une quelconque preuve de son mariage avec Matt ni même de la relation qu'elle entretient avec le brun. Elle n'est ni une voleuse ni une menteuse, ce qui serait tellement un comble vu le caractère à double tranchant de la jeune femme dont Wren s'apprête à faire les frais. Elle reste un agneau la grande majorité du temps mais lorsqu'il est question de certains points sensibles, elle s'avère bien plus radicale et bien moins ouverte d'esprit. C'est ainsi qu'elle a grandi et qu'elle a appris à vivre, elle ne risquez pas de changer de sitôt.
"Bien sûr, j'aurais choisi la réserve du bar pour ça. L'endroit le moins indiqué pour ça." « C'est sûr que quand on se drogue on agit toujours passer outre logique, oui. » Ses mots font mal, son ton tout autant et les souvenirs allant avec encore plus. Elle a vu son frère sombrer et elle ne souhaiterait pas qu'il arrive la même chose même à son pire ennemi puisque de nouveau elle fuirait avant d'avoir à assister au pire. Ses doigts courent sur les marques blanches de piqûres et autres preuves sur sa peau du traitement sûrement infligé à ses propres veines explosées. Il n'a même pas su le faire bien et son corps continue d'en payer le prix même quand il n'a plus de drogue dans l'organisme (ou peut être qu'il en a encore justement ?). Ses grands yeux, eux, pourtant, ne se dérobent jamais des siens. Lui tenir tête ne lui fait en aucunement peur même s'il est sûrement deux fois plus lourd et deux fois plus grand qu'elle.
"Ouais, je me suis piqué à l'héro'. Puis j'ai arrêté et j'ai trouvé ce taf grâce à Jill. On est deux à juger sans connaître semble t-il, non?" Les gestes de l'infirmière se crispent quelques secondes, trouvant cela singulier et surtout totalement inconsidéré que la mom to be de la famille McGrath prenne le temps de recruter des drogués pour le café de son frère alors que chacun sait qu'il y tient comme à la prunelle de ses yeux. « On n'a rien de comparable toi et moi. » Elle tranche pourtant, bien incapable de lui céder quelque terrain que ce soit. Ils n'ont rien en commun, absolument rien, et elle continuera à tenter de le prouver et de s'en convaincre aussi longtemps que possible. Se trouver un point de comparaison avec lui reviendrait à en faire de même avec Joseph et cela semble inimaginable.
"Et elle s'appelle comment la femme de Matt?" « Lily. »
Son attention vrille, la suspicion qui commençait à monter en elle s’évanouit tout aussi rapidement qu’elle est arrivée. Ses yeux ne quittent pas le suédois quand bien même Matt occupe désormais l’espace de toutes les manières possibles et ce n’est que lorsqu’il se pose à ses côtés qu’elle se détend enfin. A son tour elle laisse sa main remonter dans le dos de son mari avant de finalement venir se loger dans sa nuque en jouant avec ses cheveux. Il a dit journée de merde et elle le retient pour plus tard, ça, parce qu’il demande toujours comment tout le monde va mais personne ne lui rend la pareille. « J’ai tout, maintenant. » Lily le rassure d’un sourire et la seconde qui suit sa tête vient se poser contre la sienne, presque délicatement. « On discutait un peu avec Wren mais je pense qu’on a terminé, hm ? »
Elle le jugeait très clairement pour un passé qu'il n'avait pas pu éviter, le suédois. Wren avait été faible au delà de toute raison et il méprisait chaque chapitre de ce qu'il avait vécu pour cette raison car il avait toujours voulu être l'invincible du lot, l'imperturbable, celui qui ne ressentait rien ou tout du moins qui s'en donnait l'air en tout cas. Échec cuisant et Lily lui renvoyait sa sensibilité en pleine figure parce qu'elle semblait avoir un passif avec les drogués, c'était inconcevable qu'elle ait une réaction aussi vive le concernant si cela n'avait pas été le cas. "T'as l'air de t'y connaître en endroits choisis pour se droguer. Quel junkie t'as fait du mal, hein?" Parce que ce n'était pas lui. Il ne lui avait rien fait, à part l'interrompre dans sa quête du Saint Graal qu'était le fromage mais ce n'était pas une raison suffisante pour avoir l'air d'autant haïr une personne qu'on connaissait à peine. Wren avait au moins encore un minimum de jugeote pour s'en rendre compte, ce qui n'était déjà pas mal. Ils n'avaient rien de comparable, oui, peut être et Doherty hocha la tête sans vraiment savoir sur quelles bases elle portait cette comparaison. De toute façon, ils n'avaient pas vraiment le temps d'en parler puisque Matt était arrivé en trombe pour poser les nouvelles arrivées du fournisseur dans un coin de la réserve. Au moins, cela lui permit de faire les présentations officielles et de prouver à l'un et à l'autre qu'il n'y avait pas eu de mensonges sur leur identité respective. "Yep. Terminé. Je retourne au taf. J'avais juste besoin d'un refill de rhum avant le rush." Il prit donc une bouteille entre ses mains avant de venir tapoter l'épaule de McGrath et faire une légère courbette à sa femme. Pour sûr, ils auraient d'autres moments pour discuter et faire en sorte que leur relation se détende... Ce n'était pas si grave après tout. Rien ne paraissait jamais l'être avec le suédois qui s'en alla en les laissant en tête à tête.