tell me your secrets, and ask me your questions, oh lets go back to the start. - @lex hamilton
Les dernières semaines avaient été on ne peut plus étranges. Le temps avait paru long, et Diana s’était surprise à plus d’une reprise à devoir consulter par deux fois le calendrier pour être sûre de la date qui s’y inscrivait. Mais depuis le jour où Julian lui avait annoncé l’accident de voiture de Lex, depuis qu’elle restait sur le carreau, avec le peu de nouvelles que le jeune homme réussissait à subtiliser aux proches de la jeune femme, elle s’inquiétait, Diana. Il y a quelques temps encore, tout aurait été bien différent. Lex et elle s’étaient rencontrées des années plus tôt, alors qu’une passion commune avait animé toute une nuit durant, dans une chambre d’hôtel à l’autre bout du globe, leurs conversations. Rhodes avait toujours été impressionnée par la carrière de celle qui avec le temps deviendrait son amie, et c’était avec le plus grand respect et la plus grande admiration que leur relation avait débuté. Depuis, elles avaient parcouru un bout de chemin - mais c’était dans les derniers mois, les dernières années, que tout s’était accéléré. Si bien qu’aujourd’hui, être dans l’attente de nouvelles quant à l’état de santé de Lex était devenu un supplice. Alors, quand il lui avait dit qu’elle était rentrée, qu’elle était sauve chez elle - Diana n’avait pas hésité très longtemps avant de faire un détour à la sortie du boulot. Si la demoiselle était rentrée chez elle, c’était que sa santé n’était plus en danger et qu’elle pouvait, théoriquement, voir de nouveau du monde. Diana ne voulait pas s’embarrasser avec un appel téléphonique ou quelque-chose de ce genre là, leur amitié avait toujours été construite à base de discussions en tête à tête de toutes façons. Deux lignes, voire trois peut-être - elle ne prêtait même pas attention au trajet qui se déroulait au delà de la fenêtre - lignes de bus plus tard, et elle descendait à l’arrêt au coin de la rue où habitait Lex. La sensation était étrange, les émotions circulant en son sein également. Elle avait hâte de pouvoir voir, en chair et en os, la jeune femme en vie et en santé, mais quelque-chose lui criait que ce n’était pas juste, que ce n’était pas droit et qu’un élément était perturbé. Elle avait décidé d’ignorer cette petite voix au fond d’elle pour se concentrer sur le positif exclusivement. Marchant d’un pas décidé en direction de l’appartement de Lex, une rare brise de fin d’été venant soulever par accours ses cheveux dans ses yeux, le coeur de Diana battait un brin plus vite qu’à l’accoutumé. Elle espérait juste ne pas déranger et que la Hamilton serait ravie de la voir en retour. Diana se rappelait bien, de son côté, comment elle s’était sentie lorsqu’elle avait eu son accident de voiture. Elle se rappelait de cette sensation, à la suite, de peur constante lorsqu’elle déambulait en centre ville, lorsqu’elle entendait le moindre bruit de moteur. Elle se rappelait voir certains images, d’autres même plus marquantes que les premières, lorsqu’elle fermait les yeux le soir - et de se réveiller en sursaut, en sueur, au milieu de la nuit. Rien que de s’accorder un instant pour ce genre de pensées et la chair de poule, ainsi qu’un vilain frisson à l’échine, vinrent la parcourir tout du long. Ce n’était pas le moment de repartir sur ce chemin là, elle venait aujourd’hui pour voir comment la jeune femme se portait. Quelques minutes plus tard, et elle se tenait devant la porte du loft de Lex. Inspirant, expirant - répétant ces gestes une ou deux fois supplémentaires, juste pour être sûre, pour peser une dernière fois le pour et le contre qui allait avec, ordonner à son coeur d’adopter un comportement plus serein, et Diana vint porter trois coups sur le dos de la porte d’entrée. Aux aguets du moindre bruit à entendre derrière cette dernière, d’avoir le moindre signe de vie, le moindre signe avant-coureur qu’elle faisait une erreur également. Julian n’avait su lui dire si Lex désirait être dérangée ou non, après cette épreuve. La seule information qu’elle avait eu, c’était qu’elle était vivante, sortie d’affaire et qu’elle était rentrée chez elle l’avant-veille. C’était maigre comme informations, mais c’était amplement assez pour donner à Diana le besoin urgent d’aller rendre visite à cette femme qui comptait comme un modèle pour elle.
Je pousse un soupir face aux énormes cernes violacés que me renvoie le miroir. Les cernes d'une femme que le sommeil fuit depuis de longues nuits et qui s'endort seulement au petit matin, épuisée. Une femme hantée par les rires d'une enfant, aussi doux que la réalité est cruelle. Car cette enfant, elle ne pourra plus jamais la prendre dans ses bras, ni la bercer contre elle en lui racontant le ciel et les étoiles. Elle ne la verra pas devenir une adolescente rebelle, ni une adulte épanouie. June. Je sens les larmes monter, ma gorge devenir douloureuse. Ma filleule avait pourtant tout son avenir devant elle. Un avenir radieux, plein de belles promesses. Mais la vie en avait décidé autrement et l'avait violemment arrachée au monde. A sa famille. Je serre le rebord du lavabo aussi fort que possible afin de ne pas m'écrouler sur le carrelage froid. Lorsque mes jambes peuvent à nouveau me porter, je me glisse sous la douche et laisse mes sanglots se mêler à l'eau chaude, évacuant mon chagrin de la seule manière possible, répétant son prénom dans ma tête comme un mantra, comme s'il s'agissait d'une formule magique capable de la ramener. June. June…
Je refuse de laisser mes sombres pensées vagabonder et me paralyser. Alors en attendant mon retour à la BSA dès lundi prochain, toutes les idées sont bonnes pour occuper mon esprit. Je passe donc la matinée sur le sofa en compagnie de mon ordinateur portable. Entre la lecture de divers articles sur les avancées dans mon domaine et une grosse commande de magazines scientifiques couvrant les quatre dernières années, le temps file à vitesse grand V. Il est presque treize heures lorsque mon estomac crie famine. Je me fais réchauffer un plat au micro-ondes, mange sur le pouce, passe un coup de fil à mes parents et prépare mon sac de sport. Mon médecin m'a autorisée à reprendre le cardio sous réserve de ne pas trop forcer. Je dois bien admettre que quelques efforts physiques ne me feront pas de mal, et il est évident que reprendre le contrôle total de mon corps est l'une de mes principales priorités. J'ai pu dire adieu à la canne qui me donnait un air de mamie, mais il reste encore quelques étapes avant de pouvoir recommencer à courir normalement et sans qu'aucune douleur ne me force à arrêter.
Il est dix-sept heures trente lorsque je reviens au loft, les muscles fatigués et des courses dans les bras, mais heureuse d'avoir pu me dépenser un peu. Je range le contenu des sacs puis fais un peu de ménage et me mets sur ma paperasse. On ne réalise pas le nombre de démarches administratives à effectuer après un accident de voiture et un séjour prolongé à l'hôpital. Mes parents m'ont offert leur aide mais je préfère me débrouiller de mon côté et ne les solliciter qu'en cas de besoin. Je suis en train de glisser le dernier dossier à renvoyer par la poste dans son enveloppe kraft lorsque des coups de font entendre contre ma porte. N'attendant personne, je fronce aussitôt les sourcils et rejoins l'entrée à pas de loups. Je n'ai pas envie de trahir ma présence tant que je ne sais pas de qui il s'agit. Mon regard transperce l'oeil de boeuf. Diana. Je suis étonnée. Perdue. Comment est-elle ici ? Dans mes derniers souvenirs après mon retour sur Brisbane, on s'était vues… une ou deux fois il me semble, et toujours à l'université. Avais-je fini par lui donner mon adresse ? Certainement. On s'entendait bien, elle et moi. Elle avait dû apprendre ce qui m'était arrivé (ce qui nous était arrivé) et venait prendre de mes nouvelles.
Je me sens hésitante. Je suis trop éreintée pour avoir envie de me lancer une énième fois dans des explications sur mon amnésie. Et je ne suis pas sûre d'être de bonne compagnie. D'un autre côté, sa présence me ferait penser à autre chose. Ce serait une victoire de plus sur ma peine. Et elle a fait le déplacement jusqu'ici pour me voir. Je serais la pire des personnes sur Terre si je lui faisais croire à une absence et la laissais rentrer bredouille. Sans compter que concrètement, je ne sais pas comment elle va. Je ne sais plus rien de sa vie. A-t-elle quelqu'un pour partager son quotidien ? Est-elle devenue maman ? Il peut s'en passer des choses en plus de mille quatre cent jours. J'ouvre finalement et laisse un sourire étirer mes lèvres. « Bonsoir Diana. Ça me fait plaisir de te voir. » Je me décale légèrement afin de la laisser passer le seuil du loft et referme aussitôt. Une chose est sûre : son expression inquiète ne laisse plus aucun doute sur la raison de sa visite…
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Elle espérait que ce ne soit trop tôt, et qu’elle ne vienne pas déranger la jeune femme. De ce que lui avait dit Julian, Lex était sortie de l’hôpital quelques jours plus tôt, mais l’accident qu’elle avait eu avait été assez grave. Elle était sortie d’affaires, mais Diana savait mieux que ça. Elle savait qu’il était compliqué après un tel incident d’être sûr pieds si facilement, si rapidement. Plutôt de façon figurative que littéralement d’ailleurs. Il était compliqué de remettre son esprit dans le corps de celle qu’on avait été avant le drame, et elle ne pouvait savoir à quel point encore elle avait raison lorsqu’elle vint déposer les trois coups, secs et sûrs, sur le dos de la porte de chez Lex. Diana vint prendre, à la suite, une bonne inspiration. Elle eut le temps d’en prendre une seconde - et si elle n’était pas chez elle ? Après tout, elle avait peut-être d’autres affaires à régler, surement d’autres personnes à aller voir. Et avoir passé quelques temps hospitalisée n’avait pas du l’aider dans son boulot. Diana savait à quel point le boulot était important pour la jeune femme. Elle aurait du appeler avant de venir pour s’assurer qu’elle ne dérangerait pas et que Lex serait effectivement chez elle. Il n’y avait que dans les films où il était raisonnable de se pointer chez les autres de la sorte, elle était dans la vraie vie là. Où les accidents de voiture avaient d’autres conséquentes que simplement une jambe cassée. Soupirant, cette fois ci, elle vint tirer une petite moue. Le temps était long, et elle se devait de faire demi-tour. Elle enverrait un message à Alexa une fois de retour chez elle pour lui indiquer qu’elle était passée et qu’elle pouvait venir la voir quand elle désirait, dès qu’elle le sentirait. Ce serait le plus sage dans cette affaire. La demoiselle fut cependant arrêtée nette dans sa décision, dans ses pas, lorsqu’un bruit se fit entendre au niveau de la porte. Elle revint faire face à cette dernière, alors qu’elle avait commencé à tourner le dos. Rhodes retint sa respiration une seconde, avant que ses yeux ne vinrent à l’encontre de ceux de Lex. Thank God - elle se maudit d’avance d’avoir encore ce genre de réflexe ancrés en elle, de ceux résultat d’un long travail au corps de la part de ses parents. Un fin sourire s’afficha sur les lèvres de Hamilton, alors que le coeur de Diana vint s’accélérer quelque peu. Elle avait eu une peur bleue lorsque Julian lui avait annoncé qu’il était arrivé quelque-chose à la jeune femme, et elle était plus que soulagée de la voir en un seul morceau là, sous ses yeux. De pouvoir constater qu’elle l’était, en un seul morceau. « Bonsoir Diana. Ça me fait plaisir de te voir. » Et alors qu’elle aurait elle-même détesté qu’on vienne lui faire ça, et alors que les explications de Julian n’étaient que trop maigres pour se permettre de la sorte, et alors qu’elle savait qu’elle aurait du se retenir quelque peu mais qu’elle n’y fit pourtant rien, Diana fit un pas en avant pour venir prendre Lex dans ses bras. Elle l’avait repéré, cette lueur dans le regard de son amie. Elle était différent, elle était distordue - mais elle avait choisi de l’ignorer. Elle imposait sa présence physique à Lex, mais elle en avait besoin. Car Diana savait également ce que c’était de perdre quelqu’un qui nous est cher, de près ou de loin, et elle ne savait pas si elle aurait pu réussir tenir si jamais Julian lui avait annoncé une nouvelle bien plus funeste que celle qu’il avait apporté à connaissance de Diana. « Lex, je suis si contente de te voir. » Les semaines à se demander si ce projet était si important que ça pour que Lex ne lui réponde plus - était-elle de nouveau partie dans l’espace sans la prévenir, sur un projet top-secret, recrutée une fois de plus par les Etats-Unis ? Sois pas idiote Diana, elle se l’était dit un million de fois et encore une fois de plus en venant dans la voiture pour être sûre qu’elle ne faisait pas de bêtise aujourd’hui. Les quelques heures depuis que Julian lui avait annoncé l’accident, à se retourner le cerveau à savoir si elle serait bienvenue à se pointer devant chez elle. Il était vrai qu’elle avait tout envoyé valser en voyant Lex sur le pas de la porte, parce-que ça faisait du bien de savoir qu’une personne à qui nous tenions était toujours là, à portée de bras. Diana finit par se reculer, par plonger l’espace d’un instant ses yeux dans celle de la jeune femme. La lueur étrange était toujours là, mais elle avait toujours décidé de ne pas y porter la moindre attention. « J’étais super inquiète ! Je savais pas ce qu’il t’était arrivé… »
Je voudrais pouvoir étirer mon sourire davantage encore, pour lui faire comprendre que mes mots ne sont pas uniquement de la politesse, pour lui faire sentir qu'elle est la bienvenue et que cette visite me touche. Mais de trop nombreuses questions me tourmentent face à sa simple présence ici, sur le pas de ma porte. Avait-elle eu mon adresse par mes propres soins ? Ou une tierce personne la lui avait-elle donnée ? Comment avait-elle su pour mon accident ? Parce qu'elle est au courant, c'est une certitude. Son regard sombre et inquiet en est la preuve indiscutable. Et surtout, par extension, pourquoi s'est-elle déplacée ? Diana et moi nous connaissons depuis de nombreuses années cependant, la distance nous avait plus ou moins forcées à nous contenter du téléphone ou des mails afin de nous donner des nouvelles, et échanger à propos de notre passion commune. Je lui avais rendu visite à plusieurs occasions en revenant sur Brisbane pour les vacances, toujours sur le campus. A l'exception de l'année 2015 où mes contacts sociaux avaient été quasiment réduits à néant, ayant besoin de temps (et de solitude) pour me reconstruire. En conclusion, nous sommes de bonnes connaissances, elle et moi. Je la vois un peu comme une protégée compte tenu de notre différence d'âge, et étant passée par un cursus similaire au sien. J'apprécie beaucoup Diana et je suis persuadée qu'il en est de même pour elle, toutefois notre relation ne va pas nécessairement plus loin. A la lumière de ces faits, elle aurait pu - aurait dû - se contenter d'un appel. Pourtant, Diana est bien dans le couloir de mon immeuble, son regard brillant, à la fois peiné et soulagé, scrutant le mien. Et moi, je me sens plus démunie que jamais.
Je lui laisse la place de se frayer un chemin à l'intérieur et elle s'exécute sans plus attendre. Mais au lieu de se diriger au coeur de l'entrée, elle s'arrête à ma hauteur et me prends dans ses bras. Je la sens me serrer fort, comme si nous étions deux vieilles amies se retrouvant enfin après une douloureuse séparation. « Lex, je suis si contente de te voir. » Je ne veux pas la blesser. Ce n'est pas sa faute s'il me manque autant de détails. Si, manifestement, Diana fait partie de mes souvenirs rendus inaccessibles. Alors, je détends mes muscles et accueille son étreinte avec douceur. Lorsqu'elle se recule légèrement, elle ajoute. « J’étais super inquiète ! Je savais pas ce qu’il t’était arrivé… » Je suis toute disposée à la croire. Car l'expression gravée sur son visage parle pour elle. Et c'est à cet instant précis que je mesure toute la difficulté de notre échange à venir. On s'était rapprochées. C'est logique quand on y pense. On était enfin toutes les deux sur Brisbane… Que je le veuille ou non, il me faudrait lui dire la vérité. Mais chaque chose en son temps et pour l'heure, je préfère la rassurer. « Je vais bien. Et c'est vraiment gentil de ta part de passer me voir. » Je me retourne un court instant pour refermer la porte, et lui indique le canapé d'un geste tout en rejoignant l'espace ouvert de la cuisine. « Tu veux boire quelque chose ? Vin, bière, soda ? » J'énumère en ouvrant le frigo. « Oh et j'ai aussi des bières sans alcool. » J'en attrape une pour moi au passage, retenant une grimace. Je n'ai pas le choix : je suis encore sous médicaments et comme tout un chacun le sait, ce genre de mélange n'est pas recommandé.
Près de Diana, l'écran de mon PC portable affiche toujours la dernière page que j'ai consultée : un article datant du début d'année 2016 sur la Falcon 9 de SpaceX. Je pousse l'appareil afin de faire de la place sur la table basse, puis dépose nos deux boissons ainsi qu'une coupelle de chips nature avant de m'installer près de mon invitée surprise. Je ne sais pas vraiment par où commencer mais à mon sens, des excuses s'imposent. « Je suis désolée de ne pas t'avoir fait prévenir. Je… » Je ne me rappelais pas qu'on était aussi proches, toi et moi. Je n'avais aucune idée que je comptais autant pour toi. « Comment as-tu appris ? » J'interroge finalement, cette question étant, par le fait, légitime. J'ai beau réfléchir, la réponse reste un véritable mystère. De ce que je peux en dire, Diana et moi n'avons aucune connaissance en commun. Et seul un entourage restreint (incluant, par obligation, mes collègues de travail) savent pour mon accident. L'une de ces personnes lui avait forcément parlé, sinon comment serait-elle ici ?
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L’éteinte qu’elle vint donner à Lex, elle s’en serait surement passée en temps normal. Même si elle ne disait jamais non à une façon ou une autre de montrer son attachement à autrui, lorsque cette personne avait réussi à passer les barrières qu’elle imposait, elle n’aurait jamais imposé une telle présence physique à une autre personne. Mais aujourd’hui, tout était quelque peu différent. Elles ne se trouvaient pas en temps normal, et aux grands maux les grands moyens, comme on pouvait dire. Ce fut à ce moment là que Diana aurait prêter davantage attention aux détails. Elle aurait du sentir l’hésitation de la jeune femme, à venir resserrer l’étreinte qu’elle lui offrait. Les deux femmes n’étaient surement pas assez proches pour se permettre ce genre de geste affectueux tous les quatre matins, mais dans une situation comme celle qui se présentait à elles, Lex n’aurait pas hésité à venir serrer ses bras autour de son corps à son tour. Elle n’aurait pas attendu deux, trois secondes, un instant de trop clairement, pour venir lui retourner la pareille. Mais comme si les détails s’échappaient volontairement à la vigilance de Diana, comme s’ils allaient aujourd’hui de paire avec le déni, elle n’y vit rien. Elle sentit simplement que l’étreinte était donnée en retour et son coeur se fit quelque peu plus léger l’instant d’après. Car même si les nouvelles que Julian lui avait apporté n’étaient guère plaisantes, Lex était en bonne santé dans ses bras et c’était la seule chose à retenir de tout ça. Finalement, ne voulant pas abuser de la patience de la jeune femme, Diana vint se reculer quelque peu, scrutant toujours les prunelles de son amie. Elle tentait d’y déceler les brides de ce qui l’avait traversé, les restes d’un incident qui marquerait pour sûr la suite de sa vie. En cet instant, Diana pensait - et c’était d’une logique implacable - naïvement qu’elle pouvait comprendre ce que Lex traversait. Elle connaissait les conséquences que pouvait avoir un te accident de voiture sur une personne. Elle en avait malheureusement payé les frais d’elle-même, quelques années auparavant. Rhodes était cependant loin d’imaginer à quel point elle avait raison et tellement tord à la fois, à quel point toute la ligne ne serait pas claire, limpide, comme elle s’autorisait encore à y croire. Les informations dont elle disposait étaient simples, étaient maigres mais l’avaient simplement poussée à faire le premier pas. Le reste découlerait naturellement de tout ça, pour le meilleur, pour le pire. « Je vais bien. Et c'est vraiment gentil de ta part de passer me voir. » Un léger sourire vint épier le coin des lèvres de la jeune femme, alors qu’elle se reculait de quelque pas, avant d’entrer définitivement dans l’appartement de Lex. Il était tel que dans ses souvenirs, et cela lui fit du bien de se sentir dans un endroit familier. Si fut un temps, les deux jeunes femmes ne se seraient jamais mis dans un contexte aussi personnel, les derniers mois avaient prouvé qu’il n’était pas rare qu’elles discutent théories et inventions autour d’un verre de vin, une fois leurs journées de travail respectives terminées. Ce type de souvenir semblait remonter à mille années, désormais. « Tu veux boire quelque chose ? Vin, bière, soda ? Oh et j'ai aussi des bières sans alcool. » Retirant sa veste pour la poser sur le dossier du canapé, elle releva son regard vers Lex. « Un verre d’eau suffira, ne t’en fais pas. » En temps normal, elle n’aurait pas dit non à une bière ou un verre de vin blanc bien frais, mais elle avait encore du travail qui l’attendait à la suite de sa visite chez la jeune femme et elle se devait de garder un esprit totalement clair. Elle contourna finalement le canapé pour venir s’y installer, attrapant le verre d’eau que son hôte du moment lui dépose sur la table basse - qu’elle vient à l’instant de débarrasser. Diana pouvait clairement voir qu’elle ne tombait pas au meilleur moment, mais pour une fois elle fit passer le besoin de prendre des nouvelles de son amie au dessus de cette gêne à l’idée de s’imposer. Plusieurs semaines s’étaient écoulées depuis l’accident de Lex, et malheureusement elle n’avait pu être présente pour elle à ses côtés que maintenant. « Je suis désolée de ne pas t'avoir fait prévenir. Je… Comment as-tu appris ? » Buvant une petite gorgée de la boisson fraiche, Diana vint tirer une petite moue presque désolée, à son tour. En effet, si Julian lui avait fourni des informations concernant l’état de santé de Lex, c’était uniquement parce-qu’ils se connaissaient d’avant et qu’il savait pertinemment que l’inquiétude de Diana n’étaient pas infondée - il avait fait partie du peu de personnes au courant quand à l’accident de Lex, étant un de ses collègues à la BSA. « Ne sois pas désolée, voyons. C’est plutôt à moi de m’excuser de m’imposer à toi comme ça… » Le soulagement de pouvoir voir de ses propres yeux Lex avait désormais laissé place à la culpabilité de déranger la jeune femme alors qu’elle se remettait encore des suites d’un accident qui aurait pu lui ôter la vie. Le regard de la jeune Rhodes se perdit quelques secondes, peut-être un instant ou deux, à travers le salon qu’elle connaissait et qu’elle semblait pourtant redécouvrir. « Et ne lui en veux pas, mais c’est Julian qui m’a tenue au courant pour ton état de santé. Julian Hudson. » Elle vint ajouter la précision car, après tout, Julian était un prénom courant en Australie et en langue anglophone de façon plus générale; la BSA était une grosse entreprise qui ne devait pas contenir qu’un seul Julian comme employé. « Je suis passée à la BSA pour voir sur quoi tu travaillais, comme je n’avais pas de nouvelles, et il m’a mis au courant. » Ses pupilles finirent par se relever vers celles de la jeune femme, et au travers on pouvait y lire toute la compassion qu’elle éprouvait envers celle se tenant de l’autre côté du canapé. « Je suis désolée pour toi, Lex. Comment vas-tu ? Vraiment ? » La demoiselle était, en cet instant, loin de se douter qu’elle discutait en réalité avec une version antérieur de Lex, qu’elle avait connu quelques années plus tôt, et à qui elle n’aurait surement pas formulé sa question comme elle venait tout juste de le faire.
Peu importe ce que nous sommes devenues en quatre ans, elle et moi. La route commune que nous avons empruntée. Peu importe que mes souvenirs soient encore inaccessibles, me poussant à rester plus ou moins sur mes gardes. Seul le présent compte et dans ce présent, Diana est venue ici avec un seul but : prendre de mes nouvelles. N'est-ce pas une réelle marque d'affection que d'avoir sonné à ma porte directement au lieu de passer un simple coup de fil ? Alors quand des excuses franchissent ses lèvres, mon regard sincère accroche le sien. « Au contraire. Je suis contente que tu sois là. » Même si les prochaines minutes seront dures à entendre, comprendre et assimiler, pour l'une comme pour l'autre. Rassurée sur le point de sa visite inattendue, la chercheuse reprend. « Et ne lui en veux pas, mais c’est Julian qui m’a tenue au courant pour ton état de santé. Julian Hudson. » Ma main s'arrête au-dessus du bol de chips et la surprise se lit aisément sur mes traits tirés. Julian, vraiment ? Quoique, tout bien réfléchi, ce n'est pas un hasard si rocambolesque, considérant leurs domaines professionnels respectifs ainsi que leurs âges plutôt rapprochés. Étaient-ils amis ? « Non, bien sûr que non. » Je n'aurais pas apprécié qu'il mentionne mon accident à n'importe qui, c'est certain. Mais Diana n'était déjà pas n'importe qui avant les années oubliées, et il devient de plus en plus limpide qu'elle compte davantage encore à mes yeux aujourd'hui. Julian est peut-être au courant, d'ailleurs. Et si nous avions fini par trouver un terrain d'entente, lui et moi, à force de devoir bosser main dans la main ? « Je suis passée à la BSA pour voir sur quoi tu travaillais, comme je n’avais pas de nouvelles, et il m’a mis au courant. » J'attrape finalement deux chips et les pose près de ma bouteille de bière sans alcool. Diana en avait-elle fait une habitude au fil du temps ? Se retrouvait-on souvent sur le lieu de travail de l'une ou de l'autre, s'échangeant des informations sur nos recherches et avancées ? La jolie brune avait-elle obtenu son doctorat ?
Tant de questions et si peu de réponses. Je me sens tellement confuse depuis mon réveil. Je suis comme perdue au cœur d'une forêt embrumée, errant sans arriver à atteindre le chemin de la sortie. Parfois, à certains endroits, le voile disparaît, me permettant d'entrevoir un morceau du paysage dissimulé derrière. Il peut être doux, agréable, neutre. Ou bien terrible. June. Je bois une gorgée de ma boisson fraîche, essayant de ne pas me laisser emporter par cette vague de détresse. La voix de Diana, inquiète, me parvient à nouveau. « Je suis désolée pour toi, Lex. Comment vas-tu ? Vraiment ? » Ce dernier mot porte à lui seul une signification particulière. La preuve que nous nous étions rapprochées, sans doute au point d'aborder des sujets plus personnels lors de nos conversations. Elle pense sûrement que ma force n'est qu'apparente. Qu'avec elle, je peux m'ouvrir sans avoir peur, sans retenue. Je peux pleurer sur son épaule, lui dire combien j'ai mal d'avoir perdu la femme que j'aimais. Comment réagira-t-elle en apprenant que cette femme n'est plus qu'une inconnue, désormais ? En apprenant qu'elle-même n'est plus l'amie qu'elle voudrait être pour moi ? Elle mérite de savoir. Outre le fait que ce serait un immense manque de respect envers elle, envers notre lien (quel qu'il soit), faire semblant ne me ressemble pas.
Je me décale légèrement afin de pivoter dans sa direction. « Diana… » La Lex de 2020 aurait serré sa main dans la sienne à l'approche d'une telle nouvelle, en un soutien bienveillant, nécessaire. Mais celle que je suis maintenant, la Lex de 2016, ne sait pas s'y prendre. Je me contente alors de plonger mon regard dans le sien et de garder une voix normale, en dépit de l'émotion qui me submerge seconde après seconde. Car je sais que la vérité ne la laissera pas indifférente. « Julian ne t'a pas tout dit. Il n'est lui-même pas au courant. » A la BSA, seul le patron a besoin de savoir. En ce qui concerne mes collègues, ce sera à moi de décider et d'aviser le moment venu. « J'ai eu… un choc à la tête pendant l'accident. Ce choc a endommagé une petite partie de mon cerveau. Ce n'est rien de grave physiquement parlant, la blessure va se remettre petit à petit. Mais elle a eu des conséquences. » J'omets volontairement son association avec le PTSD dont je semble souffrir selon le Dr. Evans. Ça n'apporterait rien et je ne souhaite pas alarmer Diana outre mesure. « J'ai… oublié les quatre dernières années. Depuis début Mars 2016. » En parler est toujours une épreuve. J'ai cependant conscience que l'entendre est tout aussi difficile. « Selon le médecin, l'amnésie est temporaire. Une question de semaines, de quelques mois maximum. » Je conclus sur une note plus positive avant de me taire enfin, appréhendant la réaction de Diana.
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« Au contraire. Je suis contente que tu sois là. » Ca lui faisait du bien, à Diana, d’entendre ces paroles franchirent les lèvres de la jeune femme. Elle ne venait pas en ce lieu ce jour pour déranger qui que ce soit, elle voulait simplement s’assurer que Lex se portait bien. Les quelques explications que lui avait donné Julian - comme elle vint préciser à son amie - n’avait pas réussi à soulager son coeur suffisamment pour qu’elle patiente chez elle d’avoir des nouvelles de la jeune femme en question. Elle avait préféré prendre les devants et venir directement aux nouvelles. Même si sa visite semblait être une surprise de taille pour Lex, Diana ne regrettait pas d’être venue voir comment elle se portait et l’entendre dire qu’elle était contente de la voir lui faisait du bien. Parce-que la demoiselle s’inquiétait réellement de l’état de santé de Lex, depuis que le Hudson lui en avait parlé. Elle s’inquiétait de savoir ce qu’il s’était passé, les dégâts qui avaient été marqués au passage, les cicatrices que le temps tentait déjà de guérir. La Alexa qu’elle connaissait n’hésiterait pas à lui partager son ressenti et les détails qui lui échappaient encore à l’heure actuelle. Elle ne lui en voudrait pas d’être un brin trop curieuse quand à son état de santé, quand à ses mésaventures. Et Diana ne voyait pas que son regard était différent, que ses gestes étaient bien plus mesurés que d’ordinaire. Elle ne remarquait pas que la tension dans la pièce n’était pas seulement due à la gravité de l’accident mais bien aux conséquences que ce derniers avait ancré dans la réalité. « Diana… » Alors que son attention était portée ailleurs, bien plus loin, jusque maintenant, Lex vint se décaler légèrement sur le canapé et plonger ses yeux dans ceux de la demoiselle. Diana vint d’ailleurs sentir une petite décharge électrique qui se glissa le long de son échine, qui vint hérisser ses poils, remuer son instinct. Quelque-chose était sur le point de changer, de tourner. Elle pouvait le sentir au plus profond d’elle-même, dans ses entrailles, sans pour autant être apte à mettre le doigt dessus. Elle le voyait également dans les yeux de Lex que la suite de cette conversation ne serait en rien agréable ni habituelle. « Qu’est-ce qu’il y a, Lex ? » Ses sourcils commencèrent à se froncer un brin, ses yeux à s’assombrir. La jeune femme n’avait pas besoin de lui en dire davantage que le stress courrait dans ses veines. « Julian ne t'a pas tout dit. Il n'est lui-même pas au courant. » Rien ne sonnait bon ou juste dans cette affirmation. « J'ai eu… un choc à la tête pendant l'accident. Ce choc a endommagé une petite partie de mon cerveau. Ce n'est rien de grave physiquement parlant, la blessure va se remettre petit à petit. Mais elle a eu des conséquences. » Qu’importe la suite de la phrase, cette dernière semblait déjà presque se suffire à elle-même. Elle était bien plus chargée de sens que quiconque pourrait s’en douter. Parce-que si jusque maintenant, les signes avant-coureurs n’avaient pas fait sens aux yeux de Diana, elle avait désormais l’impression qu’ils repassaient devant ses yeux et que les paroles de Lex servaient de sous-titres. « J'ai… oublié les quatre dernières années. Depuis début Mars 2016. » J’ai oublié les quatre dernières années et toutes les conséquences qui s’en découlaient s’imposèrent de façon brutale à Diana. Sans qu’elle ne l’ait cherché, sans qu’elle n’y ait pensé. Parce-que son cerveau avait toujours été bien plus rapide que ses émotions, parce-qu’elle avait un esprit d’analyse qui à certains moments dépassait l’entendement. Parce-que son coeur battait tout de même la chamade alors qu’elle comprenait les conséquences des paroles de Lex, en second temps, au ralenti. Les quatre dernières années et alors qu’elle n’apportait pas d’autres précisions sur ce point, Diana comprenait ce que cette partie de phrase particulièrement impliquait. « Selon le médecin, l'amnésie est temporaire. Une question de semaines, de quelques mois maximum. » « Les quatre dernières années ? » La demoiselle ne vint pas relever les nouvelles du médecin que Lex avait fini par lui apporter, en dernier lieu, comme tendant de mettre une touche positive sur cette histoire. Sa voix était quelque peu altérée, un brin plus rauque, alors qu’elle se rendait compte des répercutions de la phrase prononcée initialement par Lex, répétée par ses soins à la suite. « Ce qui veut dire… » Ce qui veut dire que tu ne me connais pas réellement, ou pas totalement, pas correctement - tant de mots qui pourraient entre tant dans la forme que dans le fond de cette phrase. Parce-qu’il y avait quatre ans de cela, jamais Diana n’aurait osé se pointer à l’improviste chez Lex, dans de telles conditions, à une heure pareille. Jamais elle n’aurait imaginé pouvoir être si proche de la jeune femme, de façon générale. Elles avaient des occasions de discuter boulot, de prendre quelques nouvelles succinctes mais leur relation n’allait guère plus loin que ça. Alors, Diana vint se reculer quelque peu dans le canapé. Elle était une étrangère dans la maison de celle qu’elle considérait comme son amie. Une larme, singulière et rebelle, vint se glisser le long de sa joue. « En mars 2016, tu ne me connaissais pas, Lex. » Enfoncer une porte ouverte, certes, mais pointer du doigt l’évidence était plus que nécessaire aux yeux de la jeune femme présentement.
Son prénom franchit mes lèvres et le silence reprend sa place entre nous. Ma gorge nouée par une vive appréhension ne me permet pas d'aller plus loin. Pas encore. Je m'accorde quelques secondes de plus afin de rassembler mes idées - ainsi que mon courage. Face à moi, les traits de Diana expriment une inquiétude manifeste, et son regard s'est assombri. « Qu’est-ce qu’il y a, Lex ? » Elle me presse. Et elle a raison. Parce qu'elle mérite des réponses aux mille et une questions qui doivent tourner dans son esprit depuis qu'elle a senti mes doutes, ma propre défaillance. Je ne la laisse pas dans le flou plus longtemps. D'une voix neutre au possible, je lui explique les conséquences inattendues (et tout aussi particulières) de mon récent accident de voiture. Une palette d'émotions se succèdent sur son visage, et ses yeux finissent par se détourner des miens. Elle est en train d'engranger l'information, de l'évaluer, d'en définir les répercussions sur ce que nous étions devenues, elle et moi.
Je devrais être habituée, pourtant. Diana n'est pas la première proche à laquelle il me faut annoncer cette nouvelle si déstabilisante. Ce qu'elle ressent, la succession de changements dans son attitude indiquant le cheminement du choc initial à la réelle compréhension, j'ai déjà tout vécu avec d'autres. Oui, je devrais être rodée, limite détachée. Mais il n'en est rien. « Les quatre dernières années ? » Elle répète mes propres mots avec une certaine prudence, comme si elle avait du mal à croire au diagnostic. Ce qui doit être le cas, j'imagine. Là encore, la jeune astrophysicienne ne serait pas la première, loin de là, à me demander si je suis sérieuse. Elle n'en fait rien et, à la place, se plonge dans ses réflexions - à en juger par ses sourcils qui se froncent. « Ce qui veut dire… » Je reste silencieuse, me contentant de l'observer, inquiète de la suite. Il me faut lui laisser le temps dont elle a besoin. Lui laisser le temps d'admettre que cette Lex-là n'est pas la sienne. Et qu'il n'y a rien que je puisse faire contre ça.
Elle se recule dans le canapé et enfin, son attention se pose de nouveau sur moi. La façon dont elle me dévisage me terrifie, et j'aperçois une larme perler au coin de son œil, juste avant qu'elle ne roule lentement sur sa joue. Étions-nous si proches, toi et moi ?« En mars 2016, tu ne me connaissais pas, Lex. » Elle aurait pu le dire dans un souffle qui aurait marqué sa tristesse. A la place, elle l'a asséné telle une vérité implacable. Et moi, impuissante, je réalise dans ce choix toute la douleur que mon amnésie provoque en elle. Oui, on était si proches que ça. « Je sais. » Je murmure alors en baissant la tête. Je la relève néanmoins très vite et, cette fois, n'hésite pas à attraper sa main pour la serrer dans la mienne. « C'est temporaire. » Je lui rappelle, passant outre le fait qu'en ce qui me concerne, la réintégration de mes souvenirs ne m'inspire pas autant d'impatience que chez mon entourage. « Les cas d'amnésie comme les miens sont déjà rares, et ceux dont la mémoire ne revient pas après une poignée de semaines au maximum, quasiment inexistants. » Le Docteur Evans avait été clair à ce sujet, même s'il avait émis des réserves, liées à l'importance d'un certain traumatisme psychologique sur mon état de santé physique actuel. En somme, tant que ma tête n'ira pas bien, mon corps (et par conséquent, la partie de mon cerveau retenant certains morceaux de mon passé) ne guérira pas en totalité.
Un soupir m'échappe. L'espace d'un instant, je ne sais plus quoi dire ni quoi faire, incertaine de la suite que Diana souhaite donner à notre conversation. Néanmoins, je suis sûre d'une chose : je n'ai pas envie qu'elle parte. Que les derniers événements prennent une place trop importante entre nous. Qu'ils nous éloignent plus qu'ils nous resserrent. Car après tout, ce n'est pas sensé durer. La Lex que Diana a côtoyée les quatre dernières années n'est pas morte. Elle est juste endormie et bientôt, elle se réveillera, prête à reprendre du service. « Tu as quelque chose de prévu, ce soir ? » J'interroge, le ton plus enjoué. Puis, avant que Diana ne puisse répondre quoi que ce soit, je renchéris. « Tu pourrais rester manger avec moi. Pizzas ? » Je presse encore un peu plus sa main que je n'ai toujours pas lâchée, et avoue avec un sourire presque contrit. « Je sais que la situation est étrange pour toi mais… En attendant que ma mémoire ne me fasse plus défaut, j'aimerais vraiment… essayer de rattraper le temps perdu. Réapprendre à te connaître. » Je marque une très courte pause, et mon expression finit par devenir plus légère. « En tout cas, je suis contente qu'on se soit rapprochées. Vraiment. Je n'en attendais pas moins de nous. » Et mon regard, plongé dans le sien, ne laisse planer aucun doute sur ma sincérité.
tell me your secrets, and ask me your questions, oh lets go back to the start. - @lex hamilton
Peut-être que cela était une évidence aux yeux de Lex, peut-être que cela représentait même la seule et unique évidence dans cette relation qui était désormais à sens unique, mais Diana avait besoin de poser des mots sur les maux qu’elle découvrait. Si la jeune femme sous ses yeux souffrait de cette dite-amnésie, il n’y avait aucune chance qu’elle puisse se rappeler d’elle - réellement. En mars 2016, elles étaient encore que deux jeunes femmes passionnées par leur travail, qui s’échangeait quelques commentaires et dialogues de temps à autres. Mais rien de plus. Rien qui ne pouvait ressemblait à une visite presque nocturne de la part de la Rhodes pour prendre des nouvelles de son amie. « Je sais. » Et c’était justement ce qu’elle essayait de lui faire comprendre avec les formes et les mots qui faisaient le moins de mal. Même si, présentement, le coeur de Diana se fissurait assurément, lentement. Lex n’y était pour rien, loin de là, mais ce n’était pas pour autant que la douleur chez la jeune femme n’était pas réelle. Et alors qu’un silence s’était quelque peu installé entre elle, et alors que le malaise était clairement palpable du côté de Diana ne sachant trop comment réagir, Lex vint attraper sa main, vint plonger son regard dans le sien. « C'est temporaire. Les cas d'amnésie comme les miens sont déjà rares, et ceux dont la mémoire ne revient pas après une poignée de semaines au maximum, quasiment inexistants. » Elle voudrait venir sourire, Diana, plus que tout. Elle voudrait venir montrer à Lex qu’elle croyait ses mots et qu’ils faisaient du bien à entendre, lui montrer qu’elle entendait ce qu’elle lui disait et qu’elle intégrait chaque éléments, chaque information parfaitement. Que le choc était passé, que ça irait et que d’ici à quelques semaines, tout repartirait comme sur des roulettes, sans séquelles restantes. Elle voulait plus que tout que toutes ces informations soient formulées par des mots, des phrases concrètes pour répondre à son amie - cependant, Diana restait muette. L’émotion était trop forte, le choc trop présent. Elle faisait partie de ces personnes qui ressentaient tout en grand, et présentement son coeur restait comme pressé et enserré dans sa poitrine. La seconde larme qui vint s’échapper de ses yeux fut, elle et contrairement la précédente, balayée par le revers de sa main. « Je… » Je quoi, au juste ? Sa voix avait à peine murmuré ce mot et pourtant, elle ne savait lui donner suite. Je suis désolée lui semblait incohérent étant donné qu’elle n’y était pour rien, dans cette situation qu’une des deux femmes n’y était pour rien. Je comprends portrait un sens bien trop important pour la situation actuelle et ne saurait refléter la vérité qui s’infiltrait au sein de la jeune Rhodes. Je vais y aller ne lui semblait pas une option à envisager, même si sa réalité lui faisait présentement mal. Car, justement, sa réalité n’allait pas mal, à elle - mais celle de Lex devait être un véritable enfer. Et alors qu’elle se murait dans un pseudo-silence, qu’elle tentait de venir formuler les mots lui plus justes et adaptés, ce fut finalement l’autre jeune femme qui devança la situation. « Tu as quelque chose de prévu, ce soir ? Tu pourrais rester manger avec moi. Pizzas ? » La paume de la main de Lex qui vint exercer une pression rassurante sur la sienne, là où elle ne s’était même pas aperçue avoir refermé ses doigts contre la peau de son amie. Tentant au mieux d’esquisser une petite moue à mi-chemin du sourire, Diana vint opiner du chef. Elle n’avait rien de prévu pour la soirée, ou plutôt tous les autres plans qu’elle aurait pu avoir ne lui importaient désormais plus et pourraient être reportés sans soucis aucun. L’important, c’tait de pouvoir être celle qu’elle avait été auprès de Lex ces quatre dernières années, même si cette dernière ne s’en rappelait pas encore - son amie. « Je sais que la situation est étrange pour toi mais… En attendant que ma mémoire ne me fasse plus défaut, j'aimerais vraiment… essayer de rattraper le temps perdu. Réapprendre à te connaître. En tout cas, je suis contente qu'on se soit rapprochées. Vraiment. Je n'en attendais pas moins de nous. » Là, et pour la première fois depuis que cette conversation un brin trop sérieuse avait commencé, Diana réussit à esquisser un sourire. Un vrai, pas cette pâle copie représentée par sa moue s’accrochant désespérément à ses lèvres. Lex avait raison sur un point, dans tout ça. Elle ne s’attendait pas à moins de leur part quand à leur rapprochement au fil du temps et Diana non plus. Elle qui était admirative de loin du travail de Lex avait pu avoir la chance, après quelques années, de devenir son amie - et ce n’était pas rien à ses yeux. « Je n’en attendais pas moins de nous non plus. » Sa voix était quelque peu rauque, un brin mal assurée mais au moins, elle se faisait de nouveau entendre. Le mutisme ne pouvait continuer et il fallait qu’elle se ressaisisse rapidement. Elle vint alors inspirer une bonne bouffée d’air, fermant les yeux un instant, avant de venir reposer ses iris dans ceux de la jeune femme à ses côtés. « Je suis désolée. » Elle avait fini par opter pour cette version là de l’encaissement des faits. « De ce qu’il s’est passé. Et de réagir si pauvrement… » Elle le reconnaissait, Diana. Elle avait des défauts mais elle savait reconnaître ses tords et se remettre en question lorsque la situation lui prouvait que cela était nécessaire. Présentement, elle vivait l’une de ces situations là. « Je m’attendais à beaucoup de choses en arrivant ici ce soir, mais pas à ça… Comme tout le monde, je pense. » Lex la première avait du être surprise en se réveillant de son accident et en comprenant qu’elle évoluait dans un monde quatre ans en avance sur ses souvenirs. Diana n’osait imaginer à quel point cela pouvait être éprouvant comme épreuve. « Mais une pizza pour commencer à reprendre le chemin des discussions, ça m’irait très bien. » Elle vint hausser les épaules, mouvement à peine perceptible, avant de venir serrer de façon rassurante à son tour la main de Lex dans la sienne. Il lui faudrait du temps pour comprendre tous les tenants et aboutissants exactes de la situation, et son esprit de logique commençait déjà à tenter de comprendre jusqu’où la situation pouvait prendre racines. Mais pour commencer, juste une pizza, rien qu’une pizza, ça pouvait être bien. « Et je pense que la partie où tu auras le plus à apprendre en dehors de ma propre personne, c’est surtout niveau boulot, non ? » Parce-que ça, c’état un terrain neutre. Un terrain qui leur permettrait à toutes les deux d’évoluer de nouveau en sécurité et, Diana en était certaines, d’apprendre de nouveau l’une sur l’autre. Leur point de vue respectif avait toujours été quelque-chose d’important dans l’évolution de leur duo, elle ne voyait pas pourquoi cela devrait désormais changer.