| just gals being pals (ginger&irina) |
| | (#)Lun 13 Avr 2020 - 23:53 | |
| Un refuge animalier. Pas le genre de scène habituelle d’Irina, qui préférait globalement ses animaux de compagnie assez petits pour rentrer dans des vivariums et s’entrebouffer (ou se faire bouffer par plus gros que soi). Mais soit, elle s’était promise d’y aller, d’y mettre toute sa curiosité, et elle l’avait fait. Le samedi, jour tant attendu, était enfin arrivé, et elle s’était apprêtée du mieux possible pour donner l’illusion à la fois que les retrouvailles étaient complètement fortuites et absolument pas calculées, tout en donnant l’impression d’être propre sur elle et assez jolie pour pouvoir se rendre à un date, si la rencontre débouchait sur ça - on pouvait toujours rêver... “Tu viens, toi ?” Allongé en un majestueux sploot sur le carrelage du salon, Caillou l’observe se démener de ses deux grosses billes bleues, se réveillant lentement d’une sieste d’une heure et demie après une longue course après un lézard dans le jardin. Sa propriétaire sort le collier et l’agite devant elle, signal instinctif et automatique qu’une balade l’attend : le berger australien commence par battre frénétiquement la queue sur le sol, puis s’en relève et vient trouver sa maîtresse. Pas de fuite urinaire, cette fois : il se fait congratuler d’un ébouriffement de poils sur le haut du crâne.
Le duo quitte la maison en voiture, la boule de poils toute de bave faite confortablement installée à l’arrière en machouillant son os en plastique fétiche. Au rythme des couic-couic et de l’album de Gwen Stefani, Irina tente tant bien que mal et sans franc succès de ravaler la nervosité qui l’accapare depuis sa décision prise. Ce n’est pas la première fois, qu’elle part volontairement recroiser quelqu’un qui lui plaît ; en revanche, c’est bien la première qu’elle y va sans être sûre d’y avoir été invitée. Elle repense à son sourire, ses grands yeux bruns, les sourires et les mimiques qui se multipliaient quand elles se sont vues pour la première fois et qu’elles ont parlé de son art : Ginger l’a séduite, incontestablement. Le souci, c’est qu’elle n’a foutrement rien à faire dans un refuge animalier, un samedi après-midi, avec son chien d’un an et demi qui se pisse dessus dès qu’il voit un congénère, un humain, ou un animal de moindre taille après lequel courir.
Et arrivée devant le portail de l’entrée, elle n’est toujours pas plus avancée. La bénévole qui vient lui ouvrir, tout sourire, se retrouve face à une grande Russe complètement muette. Vite, une excuse : “Je- je- je viens pour adopter un deuxième chien.” Tout bêtement. La plus facile des excuses, et aussi la plus embarrassante : elle n’a aucune intention d’adopter un deuxième chien. Regard en biais en direction de Caillou, qui s’est allongé devant l’entrée pour gratter ses coussinets avec ses dents : un canidé à la compréhension et au contrôle urinaire déficients lui donnait déjà autant de travail qu’un nouveau-né. “En plus de celui-ci ?” lui retourne la bénévole, visiblement sceptique - comment lui en vouloir ? Irina, sans se départir de sa conviction nouvellement trouvée, hoche la tête avec aplomb. Elle réglerait ce détail minime plus tard. On la laisse entrer, laisse à la main et Caillou sur ses talons, appréhensif face à toutes ces nouvelles têtes, et sûrement inquiet de les rejoindre. Sa maîtresse le gratifie distraitement d’une caresse, le gardant près d’elle pour le rassurer - ne manquerait plus qu’il pisse en plein milieu des cages, aussi. “On va vous confier à Caleb, c’est lui qui vous guidera pour l’adoption de votre nouveau compagnon.” Légère grimace : elle ne sait pas trop qui est Caleb, mais ce n’est pas lui qu’elle vient voir.
“Vous avez quelqu’un qui s’appelle Ginger, qui travaille ici, non ? C’est une amie. J’aimerais la voir. Je lui fais confiance en terme de… de choix de chiens.”
Elle s’apprête à tout, y compris à ce qu’on lui réponde que Ginger s’occupe en fait des poissons rouges ou des animaux sauvages récupérés par la police chez des particuliers trafiquants. Rien de tout ça : la jeune femme hoche la tête rapidement, expédie Caleb dans l’autre direction et abandonne Irina et Caillou à leur sort. Elle repartirait presque tête baissée, honteuse de sa tentative, si l’objet de son attention n’avait pas poussé la porte à son tour pour la fixer avec des yeux ronds. “Salut”, qu’elle lance en resserrant la laisse de Caillou entre ses doigts, bien consciente que c’est le moment où elle est censée ajouter un waow, quelle surprise, c’est incroyable de te recroiser ici, je ne savais même pas que tu faisais du bénévolat. “Ca va ? Je viens voir les chiens. Et aussi toi.”
Promis, elle travaille ses entrées. |
| | | | (#)Mar 14 Avr 2020 - 13:52 | |
| Les journées ne se ressemblent jamais au refuge animalier. Malheureusement, on aura toujours des nouveaux venus, mais j'ose encore espérer qu'ils trouveront tous un ou plusieurs foyers. Il m'est encore insensé de penser que l'on puisse être encore aussi cruel envers de pauvres animaux. Si cela ne tenait qu'à moi, je les adopterai tous, mais pas sûre qu'Aaron soit en accord avec cette proposition. Alors, à défaut de ne pas pouvoir les prendre sous mon aile, je fais de mon mieux pour qu'il vive leur meilleur samedi. Travailler bénévolement dans cet abri animalier m'aide aussi à m'échapper de tout contact humain. Loin de moi d'être associable, je trouve particulièrement les animaux plus intéressants et mignons que la race humaine. Alors, aujourd'hui, et comme à mes habitudes, je leur donne à manger, je joue avec eux tout en essayant de ne pas trop vite m'attacher avant de faire une connerie non-regrettable cependant. Ce passe-temps pourrait facilement s'apparenter à un simple loisir, mais je n'oublie pas de rester concentrée et assidue dans ce que je fais.
Mais voilà, quoique je fasse, quoique je pense, mon esprit se trouve aisément embrouillé par ce visage qui a décidé de hanter mon cerveau. Je fais tout pour ne pas penser à elle, mais à quoi bon, mon cœur préfère me jouer des tours pour me faire ressentir des ascenseurs émotionnels, plutôt désagréable sur le coup quand on se souvient de mon niveau de stress qui augmente facilement. Sa taille de guêpe, son assurance, ses yeux en amande dont je jurerai m'y être noyée plus d'une fois et son léger accent qui me fait penser qu'elle non plus n'est pas d'ici. Je peine à savoir ce qui m'arrive, comprendre pourquoi mon cœur se chamboule rien quand je repense à son prénom et déceler tous les mécanismes de mon corps qui ont eu la grande idée de me faire perdre tous mes moyens. Cependant, je reste focalisée dans mes tâches et, si mes collègues ont bien remarqué que quelque chose n'est pas net, je fais semblant que tout va bien pour le meilleur des mondes.
“Ginger, tu es demandée à l'accueil.” Je renverse une dernière fois le sac de croquettes pour la vieille Trésor et me hâte rapidement vers là où on m'attend. Naïvement, j'entrevois déjà la bonne tête d'Aaron qui, encore une fois, est venu pour me demander si j'étais libre pour manger un bout avec lui durant ma pause. Il est vrai que son boulot ne lui permet pas aussi souvent ces visites non-déplaisantes, mais je m'y attendais, au fond. Évidemment, la vie me réserve encore son lot de surprises en voyant devant moi la même silhouette que je pensais ne voir que dans mes songes les plus secrets. Elle glisse directement un "salut" que j'agonise à répondre dans un même ton de voix. Bordel, qu'est-ce qu'elle fait là ? Je dois sûrement avoir de la terre plein la gueule ! Ginger, respire, fais comme si de rien était. Reste cool. Je ne cache quand même pas ma joie et mon visage surpris de la voir ici, dans ce refuge, un samedi. “Irina, c'est ça ?” C'est ça, fais semblant de ne pas avoir répéter son prénom dans ta tête toute la semaine. “Quelle surprise de te voir ici ! ” Tu en fais peut-être un peu trop là. Irina me demande si je vais bien avant de me dire le pourquoi sa venue surprise dans le même refuge où je bosse, et je l'admets, mon petit cœur a fondu en entendant ses dernières paroles. “Oh, c'est trop gentil ! Je suis contente de te revoir aussi.” Irina est beaucoup trop gentille, je ne pensais pas qu'elle voudrait revoir une fille aussi lambda que moi, mais à croire que la connexion s'est bien passée entre nous et qu'elle m'apprécie autant que moi pour que l'on devienne amie ? Puis je remarque finalement son berger australien à ses côtés, bien dresser pour rester aussi sagement assis, mais qui ne manque pas de s'agiter quand il voit que je m'accroupis pour lui dire bonjour. “Il est beaucoup trop mignon, comment il ou elle s'appelle ?” Elle me donne automatiquement avant que je me relève, lui indiquant de me suivre sans plus attendre. “Suis-moi, je t'emmène voir les toutous du coup !” C'est aussi un bon moyen de passer devant, qu'elle puisse que voir mon dos et moi, de mon côté, je peux essayer de garder mon calme et ma respiration stable. “Tu-tu as des préférences en particulier ? En terme d'âge, de tailles tout ça ?” @Irina Nesterova |
| | | | (#)Mar 14 Avr 2020 - 17:43 | |
| Et voilà, elles se retrouvent, de la façon la plus inattendue possible, parce qu’il y avait à peu près cinq milles raisons pour lesquelles le plan d’Irina aurait pu foirer en cours de route. Mal entendu l’adresse, mal saisi le quartier, ou le jour auquel Ginger se rendait au refuge, ou plus simplement son refus de voir Irina. C’est presque, en fait, inespéré de croiser Ginger, au point où son coeur bondit un peu plus vite quand leurs regards se croisent, parce que les étoiles semblent s’être alignées, et qu’elle est si jolie avec ses fringues pleines de terre et de poils d’animaux et ses cheveux légèrement décoiffés qu’elle lui en ferait presque un compliment. Sur le coup, ça ne lui semble pas aussi stupide que ça l’est. “Irina, c'est ça ?” Irina opine du chef par réflexe, à demi vexée à l’idée que Ginger n’ait qu’une idée si vague de son prénom, à demi ravie qu’elle l’ait retenu malgré tout. L’intéressée ajoute qu’elle est surprise de voir la grande Russe ici, et la jeune femme rétorquerait presque qu’elle aussi, est parfaitement surprise, parce que ça finirait de couvrir ses traces, mais elle ne l’est absolument pas, et le mensonge de politesse n’est pas du tout dans ses qualités.
“Oh, c'est trop gentil ! Je suis contente de te revoir aussi.”
Cette fois-ci, le visage d’Irina se fend d’un léger sourire : la voilà, la confirmation absolue qu’elle n’allait pas se faire virer, du moins pas tout de suite, elle était invitée à rester un petit moment, même sous le faux prétexte qu’elle avait brandi en arrivant. Ginger prend rapidement intérêt pour la boule de poils multicolore qui lèche sa patte à ses côtés : “Il s’appelle Caillou”, répond-elle spontanément, comme en déclinant la carte d’identité du canidé. “Il a un an et demi, maintenant. Fais attention, il ne sait pas trop contrôler sa vessie.” Elle préfère prévenir, parce que le nombre d’amis qui lui en veulent toujours parce que l’énergumène a pissé sur leur jambe est assez impressionnant et toujours en expansion.
Le tour du refuge commence. Irina suit Ginger distraitement, la laisse de son chien lâche dans sa main. Pendant que Caillou profite de cette liberté soudaine pour renifler le moindre coin de sol, le regard d’Irina se perd indéfiniment sur le dos de la jeune femme devant elle : elle a toujours eu un truc pour les dos, sans qu’elle se l’explique trop. A moins que ce ne soit pour Ginger en entier, qu’elle a un truc inexplicable. “Hmm ?” Eternellement tête en l’air, son attention lui fait défaut une nouvelle fois. Elle a besoin que la jeune peintre répète la question, de resituer son cerveau dans la langue anglaise pour arriver à formuler une réponse cohérente : “Non, je - pas vraiment.” Ce qui n’avance pas davantage le schmilblick. “J’aimerais un chien assez mature. Pas vieux, mais plus âgé que Caillou. Qui ait une personnalité, qui puisse lui apprendre à bien se comporter, par exemple en se retenant de pisser partout.” Ca aussi, sort à peu près spontanément, parce qu’elle n’a pas vraiment réfléchi à une réponse avant d’être mise au pied du mur. Un simple n’importe quoi, j’attends d’avoir le coup de coeur aurait suffi, se dit-elle ensuite, mais la réponse sort du coeur au point où elle se sent intimée de poursuivre : “Un chien qui puisse défendre une maison, aussi.” Fallait-il rappeler qu’elle n’était pas du tout venue ici pour rencontrer des animaux ?
“Mais je suis ouverte aux propositions”, ajoute-t-elle tout de go, détestant l’idée d’être une de ces clientes super-chiantes qui viennent avec l’idée la plus précise du monde et qui appellent le manager si celle-ci est en rupture de stock.
Et maintenant qu’elle y pense, peut-être que l’idée d’un chien de garde n’est pas si absurde. Peut-être que la simple idée que ce qui est arrivé à Jessica lui arrive à elle, d’une manière qu’elle refuse d’imaginer ou de tenter d’expliquer, suffit à l’effrayer suffisamment pour qu’elle considère l’adoption d’un deuxième chien, même si le gros bébé qui l’accompagne lui fournit déjà une dose de travail conséquente. Comme s’il l’entendait penser, ledit gros bébé lâche un soupir ébranlé tout droit sorti des tréfonds de son être : il sent la peur des autres animaux et n’aime pas l’idée d’être laissé ici. “Il a un peu peur de ses congénères”, précise-t-elle en se demandant de quoi il n’a pas peur, au juste. “L’important, c’est qu’il trouve un chien avec lequel il s’entendra bien.” La voilà, l’excuse parfaite pour repartir bredouille. A moins que le nombre de requêtes d’Irina ait déjà refroidi Ginger, qui veut peiut-être déjà se débarasser d’elle en lui envoyant un bénévole soi-disant plus compétent.
“Tu travailles souvent ici ? En fait, je ne sais même pas dans quoi tu travailles.”
Vite, recentrer le sujet pour que Ginger ne l’envoie pas bouler. @Ginger Mayfair |
| | | | (#)Sam 18 Avr 2020 - 16:57 | |
| Irina, elle possède ce petit côté qui m’intimiderait presque. À chaque fois qu'elle daigne poser son regard contre le mien, c'est toute ma colonne vertébrale qui se hérisse. Je ne dirais pas qu'elle me fait peur, non loin de là, mais elle doit certainement être au courant de cette impression qu'elle donne aux gens dés la première rencontre. Dans sa manière de déambuler, de se tenir toujours aussi droit, elle domine là où elle pose son pied. L'assurance qu'elle propage est tout aussi admiratif que j'en jalouserai facilement. Irina, c'est un peu la femme que j'aspire devenir, celle qui s'assume rien que dans sa façon de tenir, qui est aussi belle que les déesses et qui sent divinement bon. Je viens réellement de penser ça ? Ressaisis-toi Ginger ! C'est ironique, au fond, de penser ainsi quand on ne connaît rien de la personne devant nous. Elle a l'air aussi mystérieuse qu'un livre à l'intrigue passionnant aux histoires plus folles les unes que les autres. Je remercie les cieux qu'elle ne puisse pas voir mon visage à ce moment-là, lui qui se plie dans tous les sens tandis que mon cerveau se tord pour imaginer mille choses sur Irina. Je ne sais pas ce qu'il adviendra une fois sa visite surprise terminée, si nous nous reverrons un jour, mais je n'aimerais pas lui inventer continuellement une vie qui n'est certainement pas la sienne.
J'arrête la marche devant la porte du quartier des chiens, la main sur la poignée, prête à l'emmener voir les canidés, elle me fait part de ses envies pour avoir un nouveau chien. À sa façon de faire elle me semble encore indécise sur ce qu'elle recherche réellement, ne prononçant aucun détail bien chiant qui nous fait toujours regretter d'avoir posé cette fâcheuse question et sa dernière remarque sur son chien me fait doucement rire. “Je vois, je pense que tu puisses trouver ton bonheur !” Je laisse d'abord passer Irina devant avec son berger australien qui, si on oublie son problème de vessie, suit son maître au pied. Je me demande si c'est assez ironique de prêter mains fortes dans un grand refuge animalier quand on ne possède aucune compagnie chez soi. Aaron n'est sûrement pas très bête en tout genre, même si je le vois bien avec un Siamois constamment sur ses jambes comme un grand méchant de film James Bond. Rien qu'à la nouvelle odeur qui pénètre les lieux, les chiens s’agitent, aboient et sautillent dans leur cage. Certains sont encore plus timides et peureux que les autres, préférant rester dans leur coin quand ils ne connaissent pas la personne et les plus jeunes ne savent plus se tenir en place. Ils pourraient bien se pisser dessus à cause de l'excitation maintenant que j'y pense. JJe m'agenouille, disant bonjour à ceux qui ne m'ont pas encore vu de la journée tandis qu'Irina et son cher Caillou parcoure les dizaines de cages remplis de canidés. “Il a un peu peur de ses congénères. L’important, c’est qu’il trouve un chien avec lequel il s’entendra bien.” La queue entre les jambes, Caillou ne doit pas se sentir la bienvenue dans une horde qu'il ne s'attendait pas. Il me fait un peu la peine, mais le voir renifler la truffe de l'un me rassure un peu plus dans l'idée qu'il doit juste s'habituer. La grande blonde me questionne sur ce métier, à croire qu'elle veut un peu plus savoir sur moi et, étonnement, cela m'enchante bien plus que je le pensais. "Je viens seulement les samedis, du moins quand je peux, quand mon agenda me le permet." Ne comprenant certainement pas où je veux en venir, je continue de préciser tout en me prenant d'assaut de plusieurs léchouilles sur ma main. "Je suis étudiante aux Beaux-Arts, alors j'ai plus au moins beaucoup de boulot la semaine, tout dépend de la clémence des profs surtout." Son regard persistant contre le mien, comme si à tout moment, je pouvais prendre feu sur place, me gêne, mais j'essaie de garder mon sang-froid. Je me relève, essuie ma pauvre main et remarque d'un coin d’œil son berger australien qui, d'après ce que l'on peut voir, s'est fait peut-être un ami. "On dirait que Caillou à l'air d'apprécier Touco. On pense qu'il est croisé avec un Boxer vu sa gueule, mais il n'est pas grand ni musclé pour autant." Elle jette un œil sur Touco et j'en profite pour me mettre droite, d'assurer à mon tour ma posture tout en m'adossant contre le mur derrière nous. "Et toi, tu fais quoi ?" Son regard cette fois-ci est perplexe et je m'en mordrai presque les lèvres de ne jamais aller droit au but. "Comme métier, je veux dire ? Ou alors, des études ?" Bizarrement, je m'attends à être surprise, moi qui me suis déjà imaginée une Irina politicienne ou taxidermiste. "D'ailleurs, je remarque un certain petit accent, tu n'es pas d'ici ?" C'est peut-être trop indiscret pour le coup.
@Irina Nesterova |
| | | | (#)Dim 19 Avr 2020 - 23:05 | |
| Il y avait quelque chose de franc et d'innocent à la fois dans la personne de Ginger, et cette simplicité l'intriguait autant qu'elle l'attirait. Irina aimait la simplicité, qui pourtant elle l'affectionnait si peu, lui tournait toujours le dos. Elle aspirait à la tranquillité sans jamais l'avoir complètement ; l'apaisement qu'elle ressentait avec Ginger, sa voix calme, son sourire doux la laissaient frôler cette envie constante. Frôler seulement – les gens comme elle n'ont pas le droit à plus. “Je vois, je pense que tu puisses trouver ton bonheur !” Et merde. La multiplicité de critères qu’elle avait imposés ne semblent pas faire reculer Ginger, toujours volontaire et dans la bonne humeur qu’elle lui avait déjà entraperçue la dernière fois. Comment lui expliquer, alors ? Comment faire passer ça sous autre chose qu’un simple caprice pour la revoir ? Dans d’autres circonstances, Irina aurait sûrement assumé ; elle l’aurait fait sans problème avec Ginger, si celle-ci eût été plus réceptive et moins cryptique face à ses avances. “Parfait”, se contente-t-elle de répondre. On verra plus tard… Caillou reste farouchement collé à son mollet tandis que la grande Russe passe devant, et les chiens du refuge ne tardent pas à repérer le jeune chien qui, lui, n’en mène absolument pas large. Irina non plus, parce que plus elle pose de nouveaux critères, moins ceux-ci semblent poser problème. Au contraire, Caillou semble même s’enhardir de la présence de sa maîtresse et se montre amical envers ses congénères.
Diversion : c’est le seul moyen qu’Irina trouve pour revenir à ce qui l’intéresse vraiment ; même si, en soi, la diversion, c’est entièrement le simple fait de “venir pour un chien”. "Je viens seulement les samedis, du moins quand je peux, quand mon agenda me le permet." Irina feint de comprendre, hoche la tête - ça ne doit pas être si crédible que ça, puisque Ginger enchaîne, toujours agenouillée près des chiens, et Irina se demande si elle doit l’imiter. Pour l’instant, elle reste debout, jette un regard entendu à Caillou, lequel agite immédiatement la queue en repérant le regard de son humaine. “Ah, aux Beaux-Arts. J'aurais dû m'en douter.” Elle se fend d'un demi-sourire, honnête mais jamais à l'aise. Elle aurait dû s’en douter, parce que Ginger faisait partie de ces gens qui revêtaient une fibre artistique qu’elle ne pouvait même pas rêver de caresser un jour, cet espèce de sentiment intrinsèque du beau, de l’important, et du touchant. Irina l’enviait - elle savait reconnaître le joli, mais jamais l’interpréter et y fournir un sens. “Tu y apprends la peinture ?” Rappel de leur première rencontre à cette toute petite galerie où la jeune femme avait exposé. Comme toujours, Irina avait laissé sa naïveté parler, s’était laissée expliquer les toiles, faute de les comprendre, pour mieux apprendre à les apprécier. Elle s’était demandée maintes fois après ça comment Ginger avait fait pour ne pas se sentir insultée par son ignorance et l’envoyer paître sur le coup.
Pendant que l’humaine essaie maladroitement de flirter, le chien le fait ouvertement. Caillou lèche allègrement le museau d’un compère. Touco, lui présente Ginger, et Irina répète le prénom à voix basse, pour elle-même. La carrure du boxer, le museau du pitbull, nul doute que le chien trapu impressionnerait, si jamais on en venait à la menacer… Elle se surprend elle-même à y penser sérieusement, cette fois-ci, sans avoir besoin de prétendre. Peut-être qu’elle a vraiment besoin d’une protection. Elle n’aime pas l’idée, mais elle aime encore moins l’idée d’y penser ce soir dans son lit avec pour toute protection un berger australien incontinent et aucun voisin à moins de cinq cent mètres. “Quelle est son histoire ?” demande-t-elle, essayant de faire rentrer autant de questions que possible en une : d’où vient-il ? Pourquoi a-t-il été laissé à un refuge ? Quel caractère, comment s’entend-elle, elle, avec lui ? Les critères rentrent encore et encore mais cette fois, ils lui semblent moins superflus, presque nécessaires.
"Et toi, tu fais quoi ? Leurs regards se retrouvent, Ginger s’adosse au mur et Irina se retrouve vidée de toute la contenance qu’elle avait rassemblée quand la jeune femme lui tournait le dos. Ginger semble le comprendre : Comme métier, je veux dire ? Ou alors, des études ?" Elle peste intérieurement, gênée de sa propre absence. “Je suis entomologiste médico-légale”, répond-elle tout de go cette fois, comme pressée de prouver qu’elle n’était pas partie trop loin, ni complètement sénile. “J’étudie le comportement des insectes sur des cadavres, conjointement avec la police.” Elle se sent parfois comme le grand mec au gros nez dans la série que les anglophones aime bien, Friends, à tanner tout le monde avec une passion qu’elle est seule à comprendre. C’est sûrement le cas. “Ca sert beaucoup sur les scènes de crimes.” C’est normalement le moment où elle étaye avec un exemple bien saugrenu et où elle perd toute son audience. Face à Ginger, elle s’abstient. Surtout parce que la deuxième question la prend à nouveau de court et qu’elle se sent bêtement rougeoyer. “Je suis née à Saint-Pétersbourg, j’ai grandi à Baku. En Azerbaïdjan. Mais ça fait longtemps que je suis là.” Si bien qu’elle ne se rappelait qu’à peine de la Russie, tout juste plus de la ville morne et grise qui l’avait accueillie jusqu’à l’adolescence. “Et toi ?” L’idée qu’elle soit deux étrangères sur un sol lointain lui plaît. “Britannique, non ? J’ai appris l’anglais britannique avant de venir ici, je crois que je reconnais.” Elle lui sourit et, relâchant un peu la pression sur la laisse de Caillou pour le laisser apprendre à connaître Touco, elle se rapproche de Ginger, vient s’adosser à côté d’elle. “Tu es à Brisbane depuis longtemps ?” @Ginger Mayfair |
| | | | (#)Mar 21 Avr 2020 - 22:53 | |
| Elle me regarde, elle ne fait que ça, même que j'ai le dos tourné, quand mon attention est portée sur les chiens, je peux très bien sentir ses yeux sur ma personne. Il s'agit peut-être de mon imagination, un semblant d'hallucination que mon cerveau s'amuse à me procurer, en tout cas, lorsque mes yeux atterrissement sur elle, Irina me regarde. Dois-je me sentir gênée ou flattée ? J'en sais trop rien. Mon cœur, lui, bat fort à n'en plus s'arrêter et ça je le sais. Je jurerai presque d'engloutir à chaque fois ma salive quand nos yeux se croisent, à croire que je suis toujours prête à ce qu'elle me dévore entièrement en un temps record. Alors, je fais comme si tout allait bien, j'essaie, du moins, je ne veux absolument pas qu'elle remarque que quelque chose cloche. Même moi, j'en ai aucune idée de ce dont il m'arrive et je n'aimerais pas qu'Irina se sente mal pour une quelconque raison. La sensation est bizarre, l'atmosphère est palpable, comme si à tout moment tout pouvait s'arrêter autour de nous et on entendrait plus que le bruit sourd de notre respiration.
Irina ne semble pas surprise quand elle apprend pour mes études, en clair, j'aurais presque cru y voir un certain sourire de mécontentement sur son visage si parfait. “Ah, aux Beaux-Arts. J'aurais dû m'en douter.” Ah bon ? Ai-je vraiment la tête du métier ? D'après mon accoutrement d'aujourd'hui, il n'y a rien qui aurait pu lui donner comme indice pour mes études. Il y aurait-il réellement quelque chose sur mon visage qui en déduirait facilement les autres ? Ah, en y réfléchissant, c'est certainement à cause de mes doigts, il doit encore y avoir des marques de mes heures passés sur une œuvre. “Tu y apprends la peinture ?” Cette fois-ci, c'est moi qui lui souris en repensant à notre première rencontre hasardeuse. Je semblais plus professionnelle, ce jour-là, et assurais une posture beaucoup plus fière. La galerie restait modeste, je n'étais pas la seule à exposer cette journée-là, mais elle est quand même venue voir mes tableaux tout bizarres en posant des questions plus pertinentes les unes que les autres. “Non, j'y apprends l'animation que ce soit du 2D ou 3D. J'aimerais créer des films d'animation ou y contribuer au moins.” Irina pourrait s'en foutre totalement de mon rêve encore enfantin. "La peinture est une simple passion que j'ai découvert il y a peu. Je suis loin d'être douée, mais je m'amuse." Mes tableaux ne se vendront sûrement jamais, mais j'aime cette émotion d'émoi quand des passants inconnus s'arrêtent devant une œuvre qui porte mon nom et qui s'y intéressent. Si l'animation reste encore académique, la peinture est un moyen de m'évader et de représenter mes sentiments aussi farfelus soient-ils. De son côté, Caillou fait connaissance avec le boxer qu'Irina demander sans plus tarder son histoire. Il est vrai que j'ai omis de préciser, ce n'est pas dans mes habitudes et je peine à croire que je sois trop intimidée par elle à faire mal mon boulot. " À peu près comme tous les autres dans ce refuge : abandonné. Ses maîtres l'ont laissé au bord de la route alors qu'il partait en vacances. Des enfoirés quoi." À croire que je venais de dire tout haut ce que je pensais tout bas sans m'en rendre compte. Un autre sourire se dessine sur mes lèvres charnues tout en essayant d'effacer ce que je venais de sortir de mon fort intérieur. Cette fois-ci, c'est moi qui n'arrive pas à détacher mon regard sur elle. J'en profite pendant qu'elle jette un œil sur les deux chiens pour trouver les moindres petits détails sur sa peau qui paraissait si douce comme de la soie, mais elle fit si volte-face vers moi que je n'ai pas eu le temps de faire semblant d'admirer les alentours. Je ne perds pas mon sang-froid pour autant, lui questionnant sur sa vie active, voulant à tout prix fuir cette situation embarrassante.
“Je suis entomologiste médico-légale” Qu'elle dit sans bégayer tout en joignant son dos contre le mur afin d'être plus proche. Ce métier m'est encore énigmatique et je n'ai pas le temps de lui poser mille questions qu'Irina m'explique davantage. Si Irina s'en doutait pour mes études, de mon côté, j'en tomberais presque des nues en apprenant son métier. C'est assez glauque et intriguant à la fois. C'est difficile de l'envisager de travailler avec des macchabées toute la journée, mais j'imagine que cela colle parfaitement avec son côté mystérieux qui me tendait tant. Elle enchaîne rapidement sur ses origines, mettant enfin un nom sur son léger accent mignon et, encore une fois, j'apprenais l'existence d'un pays qui, pour une âme d'artiste, pouvait sortir d'un endroit inventif. "C'est exact, je viens de la capitale plus précisément. J'ai aussi des origines indiennes, c'est pour ça que ma carnation ne colle pas aux clichés britanniques." Cette information n'est assurément pas cruciale, mais qui sait, Irina se demandait d'où venait cette peau foncée. "Non, cela fait quelques mois à peine. Je suis ici grâce à mes études qui ont pu me procurer un VISA." Je pourrais très bien lui parler d'Aaron, que ma visite à Brisbane n'est pas anodine, que c'est aussi un moyen de renouer des liens familiaux, mais je m'abstiens pour l'instant, pensant naïvement que ma petite vie banale ne l'intéresse pas. "Tu m'apprends quelque chose de nouveau avec ton métier si peu commun. Je t'avoue que je t'imaginais plus politicienne que de bosser avec des cadavres, tu dégages cette assurance qui aurait pu très bien servir pour des campagnes électorales." Me voilà à lui raconter n'importe quoi, oubliant la raison première de sa visite, oubliant que je suis censée l’aiguillier dans ses choix, faire mon boulot entre autres. "Nous sommes deux étrangères en Australie, ça nous fait un point commun." Parmi tant d'autres, j'ose espérer. "Pourquoi tu es partie de Baku ? Pour des raisons professionnelles aussi ?" Cela deviendrait-il notre deuxième point en commun ? @Irina Nesterova |
| | | | (#)Jeu 23 Avr 2020 - 1:27 | |
| “Non, j'y apprends l'animation que ce soit du 2D ou 3D. J'aimerais créer des films d'animation ou y contribuer au moins.” Donc pas du tout de la peinture, au final. Irina se demande à quel point la jeune femme face à elle est pleine de surprise et varie les domaines, mais ce n’est pas une question qu’elle pose ouvertement : on lui a appris que c’était bizarre, de demander aux gens pourquoi ils faisaient autant de choses alors qu’elle aurait très bien pu vivre de sa passion pour les insectes sans jamais discontinuer, et que d’ailleurs, ça ne se faisait pas, comme question. “Comme Shrek et Peppa Pig ?” demande-t-elle d’une voix naïve, presque empreinte d’un bonheur enfantin. Parce que cette question, par contre, semble parfaitement sensée. Ses références en matière de films d’animation n’étaient pas énormes : les cartoons occidentaux n’avaient été empruntés à l’Occident qu’en fin des années 1990, et les dessins animés russes de l’époque avaient, malgré leurs ressemblances à s’y méprendre avec certains de leurs cousins occidentaux, eu du mal à séduire le plus jeune auditoire. Même le Roi Lion, succès international, était passé inaperçu au-delà du Caucase, au point où Irina ne l’avait d’ailleurs jamais vu. “Je pourrais voir comment tu fais, un jour ?” Aucune gêne à s’inviter, aucune tentative de flirt non plus : une sincère curiosité à assouvir si possible au plus vite. Elle ne se rappelle même pas de contredire Ginger sur le bilan qu’elle dresse de sa peinture, tant l’idée l’emballe.
" À peu près comme tous les autres dans ce refuge : abandonné. Ses maîtres l'ont laissé au bord de la route alors qu'il partait en vacances. Des enfoirés quoi."
Focus : Touco. Les chiens. La soi-disant raison de sa présence ici. Aurait-elle seulement le courage de dire à Ginger qu’elle était là pour la voir, elle, et pas pour rencontrer des animaux, tout adorables soient-ils ? Sans sous-estimer sa verve et son direct, elle voyait mal comment se sortir de ce faux-pas. “Sûrement parce qu’il est devenu trop gros. Les gens prennent un chiot et ne se disent pas qu’ils vont grandir.” L’intérêt de prendre un animal de compagnie sans égard pour celui-ci et pour l’abandonner quelques mois plus tard la dépassait. Les pitbulls et boxers étaient particulièrement ciblés dans ce domaine : mignons petits, menaçants adultes, on les abandonnait s’ils faisaient peur. Ou l’inverse : on les prenait pour protéger la maison, et on s’en lassait dès qu’ils ne faisaient pas le job correctement.
Repasser à des conversations plus personnelles la soulage : elle aurait redouté une question directe quant à l’avenir de Touco. L’air peiné et plein d’espoir du chien la pousse à s’interroger : peut-être qu’elle devrait l’adopter. Peut-être qu’un tel coup de tête est complètement stupide. Elle n’est pas prête à en faire part à Ginger. "C'est exact, je viens de la capitale plus précisément. J'ai aussi des origines indiennes, c'est pour ça que ma carnation ne colle pas aux clichés britanniques." La Russe sourit : les Britanniques tout blancs qui ne voyaient jamais le soleil. Un peu comme les Russes, mais avec l’avantage d'un accent classe et posch. “Je doute que tu correspondes à des clichés, en général.” Ginger regorgeait de surprises, après tout : elle n'était sûrement pas au bout. “Tu as déjà été en Inde ?” Peut-être que son pays lui manque, comme l’Azerbaïdjan lui manque. Comme la Russie, qu’elle n’a connue que par entrecoupements, lui manque via l’imaginaire qu’elle s’en est construite. Au final, pas besoin d’avoir été dans son pays d’origine pour qu’il nous manque. Puis Ginger embraye naturellement : elle est à Brisbane pour les études. “Ca veut dire que tu repars après ?” Le ton sur lequel ça sort est un peu plus précipité que ce qu’elle aurait pensé. Idiote.
"Tu m'apprends quelque chose de nouveau avec ton métier si peu commun. Je t'avoue que je t'imaginais plus politicienne que de bosser avec des cadavres, tu dégages cette assurance qui aurait pu très bien servir pour des campagnes électorales."
Là, c’est surtout Ginger, qui lui apprend quelque choses. Irina s’imagine politicienne quelques secondes et grimace : impossible de ne pas voir Camil, séducteur froid aux valeurs aux antipodes des siennes, ou le gouvernement qui avait chassés les Stepanovitch de leur pays pour se gagner l’opinion publique ; un peu comme tous les politiciens qu’elle avait connus d’ailleurs... “La politique, c’est trop de jeux de manipulation. Avec les insectes, pas besoin de tout ça. C'est beaucoup plus simple.” Beaucoup plus simple que les interactions humaines, aussi. Elle ne s’est jamais penchée sur une liste de toutes les raisons pour lesquelles elle aimait tant les insectes, mais elle était sûre qu’elle serait extrêmement longue. Elle hoche la tête, discrète : oui, ça leur fait un point commun. Et pour Irina, qui ne trouve jamais sa place nulle part, même après seize ans, ça signifie déjà beaucoup. Nouvelle question de Ginger : les motifs de son départ d’Azerbaïdjan. Pendant que Caillou s'allonge et grogne sur Touco pour s'amuser avec lui, Irina se tourne pour lui faire face, appuie sa tempe contre le mur pour la détailler pendant qu’elle parle : “Un peu, en fait.” Et en même temps pas vraiment : à l’époque, pour elle, il n’y avait pas de professionnel. Ou de politique, ou de moral, juste un sentiment profond d’injustice et d’être chassée de sa maison. “C'était surtout la catastrophe dans le pays quand on est partis. Mon père a été chassé dans le cadre d'un programme politique, justement.” D’où la fameuse aversion. Et encore, son père avait eu la chance d'être un des rares officiers du MGB vus comme traîtres à garder sa tête après la chute du régime. “L’Australie l’a accueilli, parce que c’était un entrepreneur et qu’il pouvait contribuer au développement du pays. On est venus comme réfugiés. Maintenant, on est nationaux australiens.” Elle n'aime pas trop en parler, parce que d'expérience les gens ne comprennent que rarement. L'occident, surtout, se fie à une image usée de la Russie comme éternelle ennemie des valeurs prônées par USA et autres anglo-saxons. On perçoit la chute de l'URSS comme la promesse d'un monde uni et le renouveau de valeurs érigeables par tous – pas comme un désastre qui a mis à genoux des pays entiers et ses habitants, sans parler des morts, de la naissance d'un système encore plus inégal et de la pauvreté endémique qui s'en ressent… Elle n’ose pas détailler davantage ; la chute de l’URSS a été suffisamment mentionnée et débattue par tous pour qu’elle ne vienne y ajouter sa vision personnelle. Soucieux du manque d'attention, Caillou vient quémander des caresses. Irina le remercie secrètement du minuscule réconfort.
“Et toi, pourquoi tu as choisi Brisbane, entre toutes les villes du monde ?”
Que Ginger ne s’y méprenne pas : elle est absolument ravie de ce choix, mais si elle l’avait eu, il y aurait énormément d’endroits qui seraient passés avant la ville côtière sur sa liste. @Ginger Mayfair |
| | | | (#)Lun 11 Mai 2020 - 18:29 | |
| Si dans un premier temps la remarque d'Irina sur ses études auraient pu me donner un certain regard amer, c'est dans mon expression sincère, mais tout aussi naïve que je me dis qu'elle ne le pensait pas à mal, pas comme bons nombres qui aiment bien se moquer gentiment comme ils le disent si bien de mon futur métier. Je n'ai pas le temps de répondre dans la même sincérité quand, d'un ton plus sérieux, mais à la fois qui me prendrait la gorge tellement ses yeux m'envoûtent, en vrai, tout me fait tourner la tête chez Irina. Alors, quand elle me demande un peu par surprise qu'elle aimerait que je lui montre comment j'anime, le style de mes coups de crayon, c'est un sourire, je le sens, si enfantin qui m'en ferait presque rougir tant je sais que j'ai l'air d'une idiote. Irina compte me revoir, aimerait même que l'on se retrouver un jour ou l'autre et mon cœur fait des bonds si vertigineux dans ma cage thoracique que j'en oublierais de reprendre mon souffle. D'un hochement de la tête où j'essaye de cacher mon sourire qui ne veut plus partir en le mordillant, j'accepte sans hésiter un moment à sa requête. “Et oui, comme, je me racle légèrement la gorge pour ainsi reprendre mes esprits et arrêter de paraître pour une folle, comme Shrek et Peppa Pig en effet !”
Les aboiements soudains des chiens autour de nous me ramène sur terre, je me souviens petit à petit de mon job que je suis censée faire et mes sens me tirent à jeter un œil sur Caillou et Touco qui sont assis face à face, à se renifler la truffe s'ils peuvent. “Sûrement, parce qu’il est devenu trop gros. Les gens prennent un chiot et ne se disent pas qu’ils vont grandir.” Irina a raison, après tout, c'est ce que l'on répète sans arrêt quand des familles veulent adopter un chiot pour faire plaisir à leurs gosses comme ils aiment le dire d'un sourire quasi-hypocrite. “On essaie de leur faire vivre une belle vie ici, du mieux que l'on peut, mais beaucoup y rentrent pour ne plus jamais en ressortir.” Ah ? Qu'est-ce que je fais ? Me laisser emporter par la situation. J'suis pathétique. Irina doit me trouver pathétique ! Fort heureusement pour moi, la discussion tourne dans un autre sens où je peux essayer de ne plus être aussi tendu que je le suis. Mais ce n'est guère de ma faute, c'est vrai, quand elle plonge son regard dans le mien, lorsqu'elle se rapproche un peu plus de moi où j'en arrive à sentir son doux parfum, mon cerveau ne communique plus avec mon cœur et moi dans tout ça ? Je panique, du moins, intérieurement. La belle blonde me questionne sur le pays de mon paternel, ou la seule chose qui me lie encore avec ce chien. “Non, mais j'aimerais tellement y aller. Pour voir de la famille, bien entendu, mais surtout me balader dans les rues de mes ancêtres.” Je m'emporte encore un peu trop, arrête d'être aussi sentimentale et niaise. “Et je ne sais pas quand je rentrerai à Londres, peut-être à la fin de mes études, peut-être jamais.” Jouer la mystérieuse n'est pas mon fort, préférant laisser ce rôle à des personnes comme Irina, mais je dois l'avouer que le ton, l'expression sur mon visage à ce moment-là, ont-il eu l'effet escompté ?
Puis la tension redescend, une sensation plus lugubre vient s'installer entre nous deux quand Irina commence à me parler de son passé, sans pour autant me donner le plus de détail possible, non, il fallait garder une part de mystère que je devais résoudre. Je l'écoute d'une oreille plus attentive qu'auparavant, devant presque curieuse d'en savoir encore plus sur ce qu'elle autorise à me partager, je reste néanmoins distante pour ne pas trop l'écraser dans une précipitation. M'imaginer à sa place, dans ce moment-ci de sa vie, m'en est impossible et c'en est évident. Pour autant, je ne cache pas mon empathie dont regorge mes pensées. Irina choisit les bons mots, sans jamais en trop mettre pour décrire cette dite catastrophe qui leur est arrivée, à croire qu'elle a pris l'habitude de raconter cette partie de son enfance encore et encore. À la fin, on ne dit rien, il y a seulement le geste affectueux de Caillou pour sa maîtresse qui dépeins parfaitement tous ces émotions ressentis. “Pour revoir mon demi-frère. Il y est aussi mais depuis un certain temps maintenant, alors quand j'ai appris l'opportunité d'aller étudier ici, j'ai directement sauté le pas. On a pas mal de choses à rattraper lui et moi.” Je glisse cette information un peu trop indiscrète sur moi, comme ça, sans redouter un seul instant qu'Irina me mitraille d'interrogations. “Ce n'est pas si différent de Londres, j'veux dire, on roule à gauche aussi, l'accent, quoique assez étrange, se ressemble au mien. Je n'ai pas eu de mal à m'intégrer, c'est surtout ça que j'essaie de te dire.” Encore ce sourire espiègle sur mes lèvres dont une mèche de mes cheveux arrive à cacher. “J'en déduis que tu es ici depuis plus longtemps que moi, tu penses que tu pourrais me montrer des alentours que je ne connais pas encore ?” S'il te plaît, accepte. @Irina Nesterova |
| | | | (#)Sam 16 Mai 2020 - 23:48 | |
| Ce n’est pas commun pour elle, et c’est rarement quelque chose qu’elle remarque ou cherche à obtenir, d’ailleurs ; mais la conversation est aisée, avec Ginger. Celle-ci ne rit même pas lorsqu’Irina lui demande si l’animation consiste à créer des dessins animés à la Peppa Pig, et elles arrivent à complètement oublier les chiens et y revenir sans qu’elles ne s’y sentent forcées. A vrai dire, les chiens sont la dernière chose à laquelle la jeune Russe pense ; et à la manière dont Caillou tire sur la laisse et s’y entortille avec une force presque névrotique, ça en dit long. Discrète, soucieuse de l’être en tout cas, Irina observe son interlocutrice du coin de l’oeil, de ses yeux expressifs et brillants à son sourire qui apparaît par intermittence selon le rythme de la conversation. “On essaie de leur faire vivre une belle vie ici, du mieux que l'on peut, mais beaucoup y rentrent pour ne plus jamais en ressortir.” Jusqu’au pli qui se creuse entre ses sourcils, signe de contrariété rapidement effacé par une expression qu’elle espère plus neutre. Irina ne commente pas, se contente de hocher la tête. Elle voudrait lui dire que c’est pareil, à son laboratoire, que des gens viennent souvent les voir pour savoir quel insecte adopter, avant de leur larguer une tarentule deux semaines après parce que c’est trop gourmand, ça bouge trop, ça fait trop peur au gamin ; et une tarentule, ce n’est même pas un insecte. Mais elle n’est pas sûre que le sujet ramène un sourire sur le visage de Ginger, et c’est tout ce qu’elle a envie de voir.
“Non, mais j'aimerais tellement y aller. Pour voir de la famille, bien entendu, mais surtout me balader dans les rues de mes ancêtres.”
Succès - du moins en partie. Elle relève une certaine nostalgie de l’inconnu dans ces yeux, la même que celle qu’elle se surprend parfois elle-même à ressentir - un besoin incommensurable de connaître mieux quelque chose qui nous a été retiré trop tôt. Bannie à vie de ses pays natals, Irina n’a revu ni la Russie ni l’Azerbaïdjan depuis l’aune de ses onze ans ; probablement ne les reverra-t-elle sûrement jamais et malgré le peu de souvenirs qu’elle a eu le temps d’y forger, elle n’a qu’une envie, c’est d’avoir l’opportunité de reprendre contact avec ses origines, rien que pour la symbolique. “Je comprends. J’aimerais beaucoup, aussi.” Elle se mord la lèvre, ses sourcils se froncent : “Me balader dans mon pays, je veux dire.” Elle avait sûrement compris. “Mais tu avais sûrement compris.” Mais l’Inde, c’était sympa, aussi. “Mais j’aimerais bien visiter l’Inde aussi, un jour.” Tout est clair : avançons. Irina n’avait jamais eu la fibre voyageuse : les livres suffisaient à la transporter, son laboratoire contenait bien assez de mystères pour qu’elle n’ait envie de changer de continent pour en découvrir encore d’autres. Petite déjà, la gamine n’avait rien d’une aventurière, qualifiée par sa discrétion et son envie flagrante de se faire oublier dans un coin.
“Et je ne sais pas quand je rentrerai à Londres, peut-être à la fin de mes études, peut-être jamais.”
Elle hoche la tête, appréhensive, pas forcément rassurée. Peut-être, c’était tout ou rien. Ca faisait aussi un bon paquet de temps avant qu’un possible retour se concrétise. “Il te reste combien d’années d’études ?” Peut-être des mois, voire des semaines, peut-être qu’elle était là pour un semestre, même. Irina fait de son mieux pour donner le change et ne pas laisser filtrer trop d’inquiétude, mais l’échec est cuisant. Puis le sujet revire, de nouveau. La jeune femme se retrouve à s’épancher sur ses pays d’origine, sur le rejet de son père, sur le risque que comportait la simple idée d’y retourner. Les Stepanovitch étaient loin d’être recherchés par le gouvernement russe, qui avait bien mieux et bien plus important à faire pour l’heure, mais elle le savait : un retour ne serait pas sans conséquence. Et arrêter sa carrière en tant que telle n’était pas une option pour son père. Elle s’aperçoit au fur et à mesure de ses mots qu’elle se sent déracinée, elle aussi. Tout autant que Ginger. Elle qui n’a jamais vraiment pris ses aises en Australie, ni dans rien de ce qu’elle entreprenait, trouve un tout petit peu de confort auprès de la jeune femme. Elle lui demande, toujours timide, ce qu’elle vient faire à Brisbane, alors, elle qui avait sûrement un chez-elle à l’autre bout du monde : qui aurait la présence d’esprit de l’abandonner sciemment ? “Pour revoir mon demi-frère. Il y est aussi mais depuis un certain temps maintenant, alors quand j'ai appris l'opportunité d'aller étudier ici, j'ai directement sauté le pas. On a pas mal de choses à rattraper lui et moi.” Deux chez-elle, alors ; dont un ici. “Ce n'est pas si différent de Londres, j'veux dire, on roule à gauche aussi, l'accent, quoique assez étrange, se ressemble au mien. Je n'ai pas eu de mal à m'intégrer, c'est surtout ça que j'essaie de te dire.” Ca tire un sourire à la jeune femme, qui aimerait poser un millier de nouvelles questions, recevoir ses conseils sur comment faire pour s’intégrer, alors, parce qu’elle n’avait jamais réussi.
“Tu ne trouves pas Brisbane étrange ?” C’est tout ce qu’elle arrive à formuler. “Je trouve que cette ville est très ouverte, et pourtant les gens sont très individualistes. C’est paradoxal.”
Un choc pour elle : même à l’heure où les citoyens soviétiques étaient à la méfiance extrême, ils avaient gardé un esprit de solidarité millénaire. Les traditions les liaient au-delà de tout et au mépris des dissidences politiques - ici, tout le monde était agréable et disait ce qu’il voulait sur soi à voix haute sans que ça ne porte à conséquences, tout en paradoxalement se renfermant sur une intimité précieuse et presque méfiante. “J'en déduis que tu es ici depuis plus longtemps que moi, tu penses que tu pourrais me montrer des alentours que je ne connais pas encore ?” Sauf pour Ginger, qui manifestement n’a aucune envie de se renfermer face à elle. Les yeux de l’entomologiste s’écarquillent sous la surprise ; les rôles sont manifestement renversés : face à la plus jeune, Irina a perdu absolument toute assurance. C’est celle-ci qui tient toutes ses cartes en main, maintenant. “Absolument. Qu’est ce que tu ne connais pas encore ?” Très vaste, très vague ; surtout impossible à répondre, parce qu’on ne connaissait pas les endroits qu’on ne connaissait pas, par définition.
“Ne me dis pas, en fait. Je vais faire une liste de choses que tu ne connais sûrement pas.”
Elle planche déjà mentalement sur les endroits un peu plus secrets et moins touristiques de Brisbane où elle pourrait emmener Ginger, tout en se demandant lesquels méritaient l’appellation d’endroit parfait pour un premier rendez-vous. Mettre la charrue avant les boeufs ne lui pose d’un coup plus aucun souci. “Tu es libre la semaine prochaine ? Le week-end.” Elle pourrait très bien lui dire que la semaine marche aussi, que ça n’a aucune importance parce qu’elle est suspendue au travail jusqu’à la semaine d’après, de toute façon, mais ça impliquerait lui dire pourquoi et elle ne tenait pas spécialement à s’aventurer sur ce terrain-là. “Je passerai te prendre.” Caillou est complètement absorbé par la patte que Touco essaie de passer sous son petit grillage comme pour le rejoindre, et ses minuscules jappements rauques ne réveillent qu’à peine sa propriétaire. “Enfin, si tu veux bien.” Ses joues se sont empourprées. C’est-à-dire qu’elle ne pensait pas que Ginger lui proposerait d’emblée, comme ça. A moins qu’elle ne se trompe complètement. D’ailleurs, elle n’a ni son numéro, ni son adresse, ni d’excuses pour partir comme une voleuse sans prendre Touco. Surtout qu’elle se sentirait mal de repartir sans le pauvre chien, maintenant. Ginger lui a trop bien vendu son cas.
“Tu penses qu’on pourrait programmer une deuxième visite avec Touco ?” demande-t-elle timidement.
Au moins, si Ginger refuse la première proposition, elle aura une autre occasion de la revoir. Et de s’accorder du temps à réfléchir quant à l’adoption du canidé duquel s’est entiché Caillou. @Ginger Mayfair |
| | | | (#)Mar 26 Mai 2020 - 19:01 | |
| Tout est allé si vite. Irina qui me rassurait dans notre envie partagée de marcher sur les traces de nos ancêtres jusqu'à organiser notre deuxième rendez-vous. Pourquoi j'appelle ça un rendez-vous ? J'en sais, ce mot m'est venu si naturellement dans la tête et pourtant au plus j'y pense et au plus il ne convient pas à ce qu'on fait actuellement. On fait quoi d'ailleurs ? À la base, je devais simplement la renseigner sur son choix d'adoption, mais je tends à me rendre compte que les chiens n'ont jamais été sa priorité de la journée. C'est certainement bête de songer ainsi, à croire qu'Irina voulait tout juste me revoir, discuter avec moi, mais qu'elle devait trouver une excuse toute pétée sans se faire remarquer. Oui, c'est certainement con et prétentieux de ma part. Je me revois encore toute chamboulée à l'idée de la revoir si soudainement, son si beau visage qui a subitement brouillé ma vision et celle de mes pensées, mais au plus nous parlons et au plus mon attitude se libère laissant presque place à une maîtrise décontractée.
“Absolument. Qu’est-ce que tu ne connais pas encore ? Ne me dis pas, en fait. Je vais faire une liste de choses que tu ne connais sûrement pas. ” La voilà être trop mignonne et déjà si surexcitée à l'idée qu'on se revoit rien que toutes les deux, sans les chiens, sans l'atmosphère pesante du boulot. Me voilà déjà un peu paniquée rien que d'y penser. Mon cerveau essaie de me cajoler en me rassurant que nous sommes que deux amies sortant dans les rues de Brisbane sans ambiguïté aucune tandis que mon cœur préfère me jouer des tours à résonner le mot "rencard" dans tous les sens. Je pourrais aisément y mettre un terme à ce combat intérieur à me questionner réellement sur la signification de cette deuxième retrouvaille avec Irina, mais à quoi bon, je suis déjà déçue d'en apprendre le contraire de sa bouche. “Oh, donc ce sera de surprises en surprises ? C'est excitant comme programme à travers Brisbane la ville étrange.” Je fais étonnement écho à ce qu'Irina m'a confié un peu plus tôt, sur sa sensation que cette grande ville est quelque peu bizarre et moi, je n'ai pas réellement répondu tant cela fait à peine un petit mois que j'ai posé mes pieds sur le sol australien. Irina a sûrement raison sur ce qu'elle me raconte et je devrais peut-être arrêter d'avoir une si grande confiance en elle dès les premiers jours, mais c'est plus fort que moi, cette aura autour d'elle, qui entoure si bien sa taille du guêpe me pousse à faire le contraire. Qu'est-ce que je sais sur elle ? Pas grand chose. Irina est encore un coffre scellé à clef que je dois tenter tant bien que mal d'ouvrir pour mieux la dissimuler et comprendre. Je n'ai jamais vraiment appris à draguer alors quand je me surprends à lui jeter des piques, à reprendre ses phrases et mots, je me dis que j'ai encore du chemin à faire pour la séduire ne serait-ce qu'un peu. L'émotion est encore nouvelle, précoce, à ne jamais savoir comment se tenir en face d'une femme. Puis bon, la draguer pour quoi faire ? J'essaie de prouver quoi en faisant ça ? Irina n'est sûrement pas intéressée par moi, étant plus jeune qu'elle, la blonde doit certainement avoir pitié de moi qu'autre chose. Me voilà à jouer les pessimistes, mon dieu, quand est-ce que mon cœur va cesser de me faire chier autant ? “Tu es libre la semaine prochaine ? Le week-end.” Je hoche simplement de la tête à la seconde qui suit sa proposition, sans me demander si j'avais du boulot pour l'université. Ma spontanéité me fait défaut et je sais déjà que cela me portera préjudice. I hate myself.
“Volontiers pour que tu passes me prendre. On devrait s'échanger nos numéros pour que je puisse t'envoyer l'adresse, non ?” Et nous voilà à sortir nos deux téléphones respectifs, notant soigneusement le numéro de l'autre sans se tromper et en inscrivant sobrement le prénom avant de s'enregistrer. Ce n'est qu'un petit pas sur ce que je ne saurais pas décrire et pourtant j'essaie de ne pas sourire comme une tarée. “Bien évidemment qu'on pourra programmer une deuxième visite pour la belle, tu me diras tes disponibilités, dans tous les cas, je suis là pratiquement tous les samedis si je n'ai pas trop de devoirs à rendre. Il me reste à peu près deux ans d'étude, c'est encore incertain, je ne sais pas si je continue dans la recherche. ” Je parle un peu trop, mais ne voulant pas la laisser sans réponse à sa question, j'en ai rajouté en tentant de ne pas trop déborder dans les informations. Côte à côte, nous nous dirigeons vers le même accueil où nous nous sommes entrevus si hasardeusement qu'ironiquement. À mi-chemin, je m'arrête aux côtés des bordures de la réception, caressant une dernière fois la bonne tête de Caillou qui est toujours si proche de sa maîtresse, mes grands yeux ronds retrouvent les siens toujours aussi perçant que magnifique. “C'était un plaisir de te revoir Irina. ” Sincère “J'ai déjà hâte de voir que tu nous auras concocté pour cette visite guidée.” Non j'ai pas dit rencard “Rentre bien toi et Caillou.” C'est à chaque fois dans ces moments-là qu'on ne sait pas quoi faire. Un câlin ? Une accolade ? Un bisou sur la joue ? En réalité, j'ai préféré ne pas trop interférer dans notre bulle d'intimité, préférant lui adresser un sourire tendre tout en secouant ma main de gauche à droite avant de ne plus apercevoir sa silhouette de mannequin. @Irina Nesterova |
| | | | | | | | just gals being pals (ginger&irina) |
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