| a hard day's night (jacob) |
| | (#)Lun 20 Avr 2020 - 5:46 | |
| Installé à ton bureau à l’université, tu poses ton stylo avant de laisser ta tête reposer entre tes mains. La journée avait bien commencé mes tes étudiants avaient décidé tous le même jour de tester tes nerfs. Il y avait des jours comme ça, tu le savais mais tu n’étais vraiment pas d’humeur à supporter leurs conneries aujourd’hui. Entre les milliers de questions, les élèves voulant toujours plus de temps pour leur projet, les demoiselles qui semblaient ne pas comprendre que coucher avec son élève ne soit pas un fantasme et un doctorant qui n’avait rien à faire de tes conseils et voulait continuer sur sa mauvaise voie, tu étais épuisé. D’habitude, cela ne te dérangeait pas de répondre à toutes les exigences de tes élèves. Tu avais même fini par considérer que c’était normal qu’ils t’en demandent autant et cela faisait parti du métier d’enseignant. Mais en ce moment, tu avais pas mal de choses à gérer personnellement et tu n’avais pas la patience nécessaire pour les laisser te bouffer à petit feu. Et ils l’avaient compris car tu avais perdu ton calme. Cela n’arrivait jamais en général mais aujourd’hui, tu avais perdu ton calme et rappelé tout le monde à l’ordre sans plus de cérémonie. Te faire respecter n’avait jamais été un problème, tu avais des fois besoin de leur rappeler que tu n’étais pas à leur service, peu importe ce qu’ils payaient pour venir étudier dans cet établissement. Fermant ton stylo, tu décidais d’arrêter les corrections pour ce soir. Personne ne t’en voudrait si tu prenais un jour supplémentaire pour corriger ces devoirs et tu étais actuellement en train d’enchaîner des devoirs de mauvaise qualité qui ne te motivaient pas du tout à continuer. Quand cela t’arrivait, ton cerveau divaguait et en ce moment, il pensait souvent à Evelyn. C’était ridicule parce que tu étais à peu près certain de ne jamais recroiser la jeune femme de ta vie ou alors brièvement dans des galeries d’art mais vous ne fréquentiez pas les mêmes cercles alors tu doutais que cela soit un problème. Evelyn qui avait été une femme importante pour toi, à qui tu pouvais envisager ouvrir ton coeur mais qui avait préféré mettre un terme à tout ce qui vous unissait. Elle n’avait pas eu besoin de te le dire, tu pouvais lire dans son regard qu’il y avait quelqu’un d’autre. Il y avait toujours quelqu’un d’autre. Tu en avais voulu à ton frère et tu lui en voudras toujours d’avoir été cette autre personne pour Alice mais avec les années, tu t’étais demandé si tu n’étais pas destiné à perdre toutes les personnes qui t’étaient chères au profit de quelqu’un d’autre. Même en restant en France, comment aurais-tu pu être sûr d’être assez pour qu’Alice reste à tes côtés ? Ridicule, totalement ridicule …
Eteignant la lampe installée sur ton bureau, tu rangeais les devoirs dans un tiroir avant de quitter les lieux veillant bien à fermer le bureau à clé. Sans grande surprise, tu étais le dernier à quitter les lieux, une habitude désormais. Le silence qui régnait dans les couloirs de l’université ne te faisait plus peur, il était même devenu rassurant. Te dirigeant vers la voiture, tu pris la direction de ton appartement. Pourtant, tu n’avais aucune envie de passer ta soirée seul. Et tu n’étais peut-être pas la seule personne ayant besoin de compagnie ce soir. C’est presque machinalement que tu pris la direction de l’agence immobilière de Jacob. Malgré l’heure, tu savais que tu avais de grandes chances de l’y trouver, lui qui n’aimait pas rentrer dans cette maison vide tous les soirs. Tu connaissais Jacob depuis votre enfance et la situation qu’il vivait aujourd’hui te déchirait le coeur. Tu essayais de lui offrir le maximum de soutien, malheureusement, cela ne sera jamais suffisant. Te garant devant l’agence immobilière, tu traversais rapidement la rue et te faufilais entre les passants. Malgré la fermeture de la plupart des commerces pour la soirée, une certaine animation était palpable dans les rues et cela te fit sourire. Poussant la porte de l’agence, tu saluais la personne qui se trouvait à l’accueil : « Bonjour ! Tu vas bien ? Jacob est dans son bureau ? » Tu passais régulièrement voir Jacob et tu avais été toi-même client à plusieurs reprises de ton ami qui avait trouvé le loft où tu habitais actuellement tout comme il avait trouvé la petite maison que tu avais louée quand tu avais Moïra avec toi et ton appartement avant. Oui, faire travailler tes amis te faisait plaisir. Vu qu’elle te répondit par l’affirmatif, tu pris la direction du bureau de ton ami et tu trouvais ce dernier derrière son écran à chercher les meilleures offres à visiter et à ramener à l’agence certainement, tu ne connaissais vraiment rien au monde de l’immobilier. Frappant légèrement à la porte de son bureau, tu lui dis : « Bonsoir monsieur Copeland. » Un sourire en coin était dessiné sur tes lèvres, tu cherchais à le taquiner. « Je venais voir si tu te laisserais kidnapper pour un verre ce soir. » Lui dis-tu en entrant dans son bureau. « La seule excuse que j’accepte c’est si ce bien a plus de charme que moi mais je doute que cela soit possible. » Tu plaisantais bien entendu car tu étais tout sauf une personne qui avait confiance en elle et en ses dons de charmeur … Tu espérais toutefois que Jacob voudrait bien t’accompagner, tu avais besoin de retrouver ton ami ce soir. |
| | | | (#)Mer 6 Mai 2020 - 15:54 | |
| Devant son écran d’ordinateur, Jacob souffle longuement. Il n’a pas jeté de regards à sa montre depuis de longues heures. La luminosité de son bureau a considérablement baissé, lui donnant quelques indications sur l’heure qu’il pourrait être : il est suffisamment tard pour qu’aucun client vienne ne le déranger, pas assez tard pour qu’il ne reste plus un seul employé dans l’agence. C’est une chose dont il est fier, en tant que patron ; de voir ses employés se démener, faire des heures supplémentaires s’ils en éprouvent le besoin et venir avec le sourire, aimer ce qu’ils font. Il n’utilise personne, c’est quelque chose qui l’horripile. Soit les gens apprécient de travailler pour lui et fournissent les efforts nécessaires pour faire partie de sa compagnie, soit ils s’en vont. Il refuse que qui ce soit vienne le tirer vers le bas, il a toujours su s’entourer des bonnes personnes, voilà pourquoi ses agences ont connu un tel succès à Brisbane et partout dans le monde. Il jette un coup d’œil à travers la baie vitrée de son bureau pour se rendre compte de l’état des lieux : la plupart des lumières sont éteintes, il serait l’heure d’arrêter tout ce qu’il est en train de faire et de rentrer chez lui. Ses yeux dérivent sur la petite photo encadrée à côté de l’écran de son ordinateur, là où brillent les deux femmes de sa vie. Liv et son sourire, toujours plus sublime d’année en année. Et June, leur petite princesse qui a pris son envol il y a deux années de cela. Son cœur se serre, et il n’a pas envie de rentrer ; il ne retrouvera ni l’une, ni l’autre, s’il décide d’aller à sa maison maintenant. Il y aura très certainement le chien. Juste lui et le chien. Non, il ne rentrera pas maintenant. Il préfère se concentrer sur son travail, sur la maison qu’il a repérée pour le couple qu’il vient de rencontrer. Deux personnes charmantes qui ont envie d’acheter quelque chose de moderne, de grand, avec comme projet « fou » d’y rester jusqu’à la retraite. Ils se voient déjà repeindre toutes les chambres, refaire les sols, retaper la douche. Entre autres, il doit leur trouver un terrain où la perle rare est à moitié construite, là où des travaux sont nécessaires, là où eux et ses agents immobiliers feront tout pour qu’ils y construisent le nid de leur amour. Quand il tombe sur des gens comme eux, il ne peut s’empêcher de repenser à lui et Olivia quand ils étaient jeunes, quand ils ont emménagé pour la première fois ensemble. S’il savait ce que le futur leur réservait, à cette époque-là. Aujourd’hui, tout ce que Jacob peut faire pour ce couple, c’est prier qu’ils n’aient jamais à connaître ce qu’il a connu, et s’atteler à sa tâche, la seule qu’il maîtrise vraiment : leur trouver une maison, leur maison.
Après avoir fait le tour une cinquième fois de tous les biens semblants correspondre à ce qu’ils veulent, il a trouvé la perle rare. C’est ce qu’il pense. C’est à chaque fois sur celle-ci qu’il s’arrête. Il sait d’avance que les négociations seront dures avec le vendeur, et qu’il aura besoin d’une bonne dose de café demain matin pour gérer tout ça. Mais c’est cette maison, pas une autre. Quelques bruits à sa porte l’interpellent, alors qu’il allait envoyer un mail au jeune couple. Bonsoir monsieur Copeland. Marius. Jacob sourit grandement à la vue de son ami. Salut vous. Il ferme la page qu’il regardait précédemment, ça pourra attendre un coup de fil demain matin. Je venais voir si tu te laisserais kidnapper pour un verre ce soir. Il le regarde entrer, la réponse déjà fixée dans sa tête. Évidemment qu’il va y aller. La seule excuse que j’accepte c’est si ce bien a plus de charme que moi mais je doute que cela soit possible. Un sourire en coin se dessine sur les lèvres de Jacob. Ah, tu crois ? Il se lève de sa chaise, s’étire légèrement. Voyons voir si tu as plus d’arguments que lui. Dit-il, signe d’acceptation pour ce soir. Il ne voulait pas rentrer tout de suite, et travailler jusqu’à pas d’heures n’est pas la meilleure solution. Marius le sauve d’une soirée qui aurait pu être catastrophique, bien qu’il aime son travail plus que tout. Il n’a pas besoin de se noyer là-dedans. Il n’a pas besoin de ne pas compter ses heures. C’est lui le patron, il devrait seulement faire acte de présence et encaisser les chèques. Et pourtant, pourtant, il passe bien plus d’heures à se creuser les méninges que le plus volontaire de ses stagiaires. C’est le monde à l’envers, mais son ami vient de l’aider à retrouver un certain équilibre, au moins pour ce soir. Je te suis, mais on prend ta voiture. J’ai une petite soif. Un clin d’œil, et il sort déjà de son bureau. Jacob n’est pas le genre d’homme à boire à l'excès, mais c’est vrai que de temps en temps il se plaît à se laisser aller aux plaisirs de l’alcool. Chez lui, c’est plutôt Liv qui vide les bouteilles. Donc ce soir, il a envie de se faire plaisir, de rentrer sans avoir conscience du temps qui est passé et de se coucher sans être triste de la place vide à côté de lui, dans le lit conjugal. Ils arrivent à l’accueil, Jacob s’approche du comptoir pour parler à la jeune femme se tenant derrière. J’y vais, je te laisse fermer. Pars pas trop tard, demain est une grosse journée. Tous les jours sont des grosses journées, selon Jacob. Son agente d’accueil le sait, et elle se contente de hocher la tête de haut en bas avant de leur souhaiter une bonne soirée. Jacob sort sur le parking, emboîtant cette fois-ci le pas à Marius. C’est lui qui conduit, c’est lui qui prend les devants. Tu as envie d’aller quelque part en particulier ? L’argent que gagne Jacob et toutes ces années passées à Brisbane fait qu’il connaît un peu tous les coins et recoins de la ville, toutes les bonnes places où aller. Pour lui, tant qu’il y a de la bonne bière, quelques types qui s’énervent dans le fond et une musique assourdissante à certains endroits, c’est un endroit recommandé et recommandable. Mieux vaut ne pas l’écouter, donc, Marius le sait depuis le temps, et Jacob suivra les indications de son ami sans rechigner. Après tout, ce n'est pas lui qui conduit.
@Marius Warren |
| | | | (#)Lun 11 Mai 2020 - 5:57 | |
| C’est sans surprise que tu trouvais Jacob installé à son bureau, derrière l’écran. Tu ne comptes plus le nombre de fois où tu l’as trouvé à cet endroit précis depuis la mort de sa fille. Tragique accident qui leur a enlevé une partie d’eux-mêmes bien trop tôt. Tu te souviens de la famille qu’ils avaient créée, tu te souviens de leur bonheur et tu te souviens de ce qui s’est passé ensuite. Ta vie n’a pas été de tout repos, tu es le premier à le reconnaître mais malgré la trahison de ton frère, la perte de l’amour d’Alice et tout ce qui en avait découlé, tu avais été chanceux. Parce que tu ne pouvais pas imaginer ce que c’était que de perdre si soudainement sa petite fille. Tu avais vu comment cet évènement avait détruit Olivia, avait détruit leur mariage et avait détruit Jacob. Alors tu avais fait de ton mieux, tu avais été là le plus possible, essayant d’apporter ton soutien à ton ami sans trop en faire non plus car il ne l’apprécierait pas. Tout comme toi, il n’aimait pas être le centre d’une attention qui venait de bonnes intentions mais qui était difficile à supporter. Se plonger dans son travail pour oublier le reste, c’était une technique que tu avais presque développée. Tu le faisais sans t’en rendre réellement compte depuis des années, te cachante derrière ton ambition et l’envie d’une carrière bien remplie. Mais tu n’étais pas assez aveugle pour te mentir à toi-même, toi aussi tu restais tard à l’université pour que la solitude de ton loft ne te père pas trop sur les épaules. Toi aussi, tu cherchais dans le travail ce que ta vie personnelle n’avait jamais pu t’apporter. Tes raisons étaient toute autre que celles de Jacob et tu espérais pour ton ami qu’Olivia et lui finiraient par se retrouver. Mais cela ne te regardait pas et tu doutais que Jacob ait envie d’en parler. S’il voulait le faire, il savait qu’il le pouvait bien entendu. Tu n’étais pas la meilleure personne pour donner des conseils mais tu savais écouter si c’était ce dont il avait besoin. Alors pour oublier ta solitude et lui faire oublier la sienne, tu étais venu le chercher pour lui proposer d’aller boire un verre. Quand il t’avait entendu lui faire ta proposition qui n’en était pas vraiment une, tu avais pu lire comme une sorte de soulagement dans son regard. Tu n’avais aucune intention de commenter, tu préférais te concentrer sur l’air amusé de ton ami. « Ah, tu crois ? Voyons voir si tu as plus d’arguments que lui. » Chacun sa passion, chacun son boulot. L’idée d’observer des biens toute la journée pour les comparer et trouver le meilleur pour chaque client ne te faisait pas rêver. Rien que l’idée d’avoir des clients à satisfaire te donnait la nausée. Tes élèves étaient en quelques sortes tes clients mais pas vraiment non plus. Tu avais une liberté dans ta manière d’enseigner, dans ce que tu choisissais d’enseigner, dans ton métier de chercheur que tu chérissais énormément. Mais observer des biens immobiliers, les disséquer, c’était un peu ce que tu faisais avec des oeuvres d’art. Tu avais fait le parallèle quelques fois alors que Jacob t’en parlait. En tout cas, tu lui étais très reconnaissant de t’avoir trouvé le loft dans lequel tu habitais actuellement. « Je te suis, mais on prend ta voiture. J’ai une petite soif. » Tu hoches la tête, lui montrant les clés que tu as dans ta main en disant : « Je m’engage à te ramener en une pièce après avoir pansé ta soif. » Lui dis-tu amusé. Pourtant, tu ne l’étais pas complètement. Tu ne voyais pas Jacob assez souvent pour savoir s’il consommait régulièrement de l’alcool mais tu savais à quel point ce genre d’habitude était nocive, tu y avais toi-même été sujet quelques années plus tôt. Cet épisode te poussait aujourd’hui à regarder de près ta consommation d’alcool. Et Jacob était dans une situation où il serait compréhensible qu’il cherche à noyer sa peine dans une bouteille … Tu n’aborderas peut-être pas le sujet ce soir et tu ne comptes pas refuser des verres à ton ami mais tu t’inquiètes un peu. Tu laisses Jacob passer en premier le suivant dans l’entrée de l’agence où il salue la personne à l’accueil. Tu fais de même en lui souhaitant une très bonne soirée ne manquant pas le regard soulagé qu’elle vous lance. Comme tu t’en doutais, Jacob passait beaucoup trop de temps à l’agence le soir … Une fois dehors, il te demanda : « Tu as envie d’aller quelque part en particulier ? » Tu déverrouilles la voiture et vous rentriez à l’intérieur. Tu vas amener Jacob dans le bar que tu préfères fréquenter à Brisbane. Oh tu sais que Jacob préfèrerait un autre type de bar mais si c’est toi qui choisis. « Allons au Canvas, ils ont un bon stock de bières et ils sortent les billards en semaine. » Lui dis-tu si l’envie vous prenait de faire une partie après quelques verres. Tu démarrais la voiture et pris la direction du bar laissant le silence s’installer dans l’habitacle. Ce n’était pas un silence gênant, tu connaissais trop bien Jacob pour que ces silences soient pesants. Alors que tu te garais à quelques rues du Canvas, tu finis par lui demander : « Quoi de neuf ? T’as vendu de belles maisons ces derniers temps ? » C’était une alternative comme une autre au ‘Comment vas-tu ?’ qui ne faisait aucun sens dans sa situation car vous saviez tous les deux qu’il n’allait pas bien, ce n’était pas la peine de remuer le couteau dans la plaie. Par contre, tu étais intéressé de savoir ce qu’il avait fait depuis votre dernière rencontre te comme il passait son temps au boulot, autant commencer par là. Passant la porte du Canvas, vous vous dirigez vers le bar et tu lui dis : « La première tournée est pour moi. » Tu n’en boiras pas d’autres de toute manière, pas si tu veux vous conduire sans te faire arrêter.
@Jacob Copeland |
| | | | (#)Dim 17 Mai 2020 - 15:30 | |
| Boire pour oublier, c’est un concept étranger à Jacob. Réellement. Il n’a jamais eu l’alcool suffisamment joyeux pour se perdre là-dedans. Lui, il passe plutôt son temps à réfléchir et à faire comme s’il n’était pas ivre, lorsqu’il l’est. Et il n’a pas de temps à perdre dans ces futilités-là. C’est vrai, peut-être qu’il serait capable d’oublier le temps d’une cuite. Oublier pourquoi il a commandé une bouteille. Oublier ce qu’il avait à oublier. Oublier, jusqu’à ce que l’alcool ne fasse plus effet et que la douleur du deuil revienne remplacer celle du mal de crâne. Il est plus tout jeune, Jacob, et ça, il en a bien conscience. Il prendrait trop de risques à sombrer dans l’alcoolisme, il le sait. Il préfère mourir à petit feu du manque qu’il ressent, du vide constant qui l’assaille. Pas de ça. Mais un petit verre de temps en temps ne fait pas de mal, d’autant plus s’il est accompagné par une personne en qui il a une totale confiance. Je m’engage à te ramener en une pièce après avoir pansé ta soif. C’est ce qu’affirme Marius, et c’est tout ce que Jacob voulait entendre. Pas besoin d’en rajouter. Ils quittent l’agence après avoir salué l’agente d’accueil qui ne tardera pas, elle aussi, à s’en aller. Elle sait très bien qu’elle peut le faire sans l’aval de Jacob, qu’il est au courant des heures qu’elle fait et qu'à cette heure-ci, ce sont largement des supplémentaires ajoutées à son planning. Après avoir lancé un dernier regard à l’intérieur de l’agence – c’est toujours difficile de partir d’ici – Jacob demande à son ami où est-ce qu’il veut aller. Il pose la question pour se sortir du travail, pour se vider la tête, pour se faire comprendre à lui-même que la journée de boulot est terminée et que le moment de détente est enfin arrivé : et que ce soir, il ne doit pas s’inquiéter, il ne doit pas se prendre la tête, il ne doit tout simplement pas penser. Allons au Canvas, ils ont un bon stock de bières et ils sortent les billards en semaine. Il hoche vivement sa tête. Fallait me le dire plus tôt que tu voulais juste une raclée ! Une affirmation, accompagnée d’un léger rire, alors qu’il monte dans la voiture de son ami. Il n’aime pas trop le billard, en vérité. Il préfère largement le baby-foot ou les fléchettes, mais il ne dit pas non à une partie de temps en temps. C’est vrai qu’il y prend du plaisir quand il y est convié, bien que s’il avait le choix, son attention ne se porterait pas sur ce jeu en premier. Une fois dans la voiture, le silence s’installe entre les deux hommes. Il ne dure pas longtemps, parce qu’il n’est pas pesant : il a l’habitude de ne pas forcément parler à l’excès avec Marius. Les silences suffisent depuis des années. Cet homme, c’est le frère qu’il n’a jamais eu, c’est le seul capable de le comprendre en un regard. En un silence. Les rues défilent sous ses yeux, il regarde les lumières, les gens, les voitures de ceux qui rentrent chez eux, le ciel, la lune qui semble n’être qu’une tâche, petite et impuissante. Il regarde tout, et finalement, ses yeux se portent sur la devanture du Canvas, ils sont arrivés. Quoi de neuf, t’as vendu de belles maisons ces derniers temps ? Son regard se porte sur Marius quelques instants, il sait qu’il ne va pas lui demander comment il va. Il sait aussi qu’il s’intéresse à son travail qu’en apparence, car il n’y comprend pas grand-chose et qu’il ne rêve absolument pas de mettre un pied là-dedans. Mais il est réellement concerné par la réponse et ça, ça le touche. Ça va. J’ai une de mes agences qui bat un peu de l’aile ces temps-ci, le directeur a changé et il gère pas très bien. Ça m’énerve de devoir ramasser les pots cassés, mais j’imagine que c’est mon rôle. Il ne fait pas référence qu’à son travail, le sous-entendu est tellement grand qu’il aurait été la même de le dire à voix haute. C’est son rôle avec Olivia également. Avec ses parents, aussi. C’est son rôle avec tellement de monde que de le faire à son travail, ça devient une corvée énervante, alors que justement, là, c’est réellement ce qu’il doit faire. Et toi alors, comment ça se passe avec les jeunes ? Ils sont motivés ? Les études, ça remonte à loin pour Jacob : il en est bien content. Il n’aurait pas aimé enseigner. Il adore apprendre à ses stagiaires les bases de son métier, parce que ce sont des codes qu’il a presque inventés lui-même. Il aurait détesté apprendre quelque chose qu’on lui aurait appris auparavant. Il préfère que ça vienne de lui, et il n’est pas assez un génie pour inventer des formules mathématiques ou une nouvelle langue, alors enseignant, ça n’est vraiment pas fait pour lui. La première tournée est pour moi. Et les dernières pour moi. Il répond tout aussi vite et pourtant, c’est lui qui prend l’initiative de marcher jusqu’au bar. Deux bières, s’il vous plaît. Il passera à un cocktail un peu plus fort quand la soirée sera plus avancée, ce n’est qu’une mise en bouche. Il s’assoit sur un des tabourets, pose un coude sur le comptoir et maintient sa tête à l’aide d’une main, le regard posé sur Marius. Ça me fait plaisir de te voir, ça faisait un petit moment. Ça fait un petit moment avec à peu près tout le monde dans l’entourage de Jacob. Il avait l’habitude de voir ses amis beaucoup plus souvent, avant l’accident. Ça lui arrivait seul ou avec Olivia, mais les sorties étaient nombreuses et ordonnées.Aujourd’hui, il n’arrive plus à se fixer de rendez-vous, il a du mal à se sentir obligé d’aller voir quelqu’un. Parce qu’il ne peut pas prédire qu’un samedi après-midi il se sentira suffisamment en forme pour aller faire un jogging avec Byron, ni s’il ne sera pas trop triste le mardi soir pour aller manger chez Marius. Alors, il préfère faire quand l’envie lui vient : il appelle à la dernière minute, rend des visites à l’improviste ou vient se faire chercher sans l’avoir demandé. C’est comme ça que ça fonctionne, et en deux années, Marius n’a pas eu de mal à le comprendre. Et ça lui fait sincèrement plaisir de le voir, sa soirée s’est déjà bien améliorée ces dernières minutes, rien que par sa présence.
@Marius Warren |
| | | | (#)Ven 22 Mai 2020 - 5:17 | |
| Il y a des amitiés qui marquent une vie. Celle que tu partageais avec Jacob étaient de celles-là. La distance, les bons moments, les mauvais, rien ne l’avait ébranlée. Malgré tout ce que tu reprochais à tes parents, grandir à Logan City avait été agréable et tu y avais fait de très bonnes rencontres. Quoi que légèrement plus jeune que toi, Jacob était rapidement devenu le petit frère que tu ne pensais jamais avoir. Et puis quand tu avais fini par avoir un petit frère, il avait rapidement été clair que tes relations avec lui ne seront jamais très bonnes et cela ne s’était que dégradé avec le temps. Jacob avait été la constance, cet ami vers lequel tu pouvais te tourner peu importe la tempête que tu traversais. Ces dernières t’avaient semblé énormes et bouleversantes mais ce n’était rien comparé à ce qu’avait vécu Jacob il y a deux ans. Alors tu essayais de lui rendre la pareille, d’être là sans trop en faire non plus. Ta soeur aimait te rappeler que tu n’étais pas le meilleur pour comprendre les signaux que l’on t’envoyait et tu ne voulais pas trop en faire avec Jacob. Alors tu attendais qu’il appelle et s’il ne le faisait pas pendant un moment, c’était toi qui prenais ton téléphone et qui passais le voir. L’un de vos points communs était votre passion pour votre métier. Ils n’avaient strictement rien à voir mais vous étiez des professionnels impliqués. Dans ton cas, trop impliqué depuis bien longtemps car tu avais laissé ta carrière devenir presque complètement ta vie au fil des années. Mais Jacob avait su bien doser les choses. Le voir se plonger corps et âme dans son travail n’était pas une bonne chose à tes yeux. Vous quittez l’agence, laissant l’employée de Jacob fermer les lieux et tu proposais à ton ami de se rendre au Canvas. « Fallait me le dire plus tôt que tu voulais juste une raclée ! » Un sourire amusé se dessina sur ton visage alors que tu lui répondis : « Ça c’est ce que l’on va voir ! » Tu n’étais pas un grand joueur de billard. Tu te débrouillais mais tu n’excellais pas dans cette discipline. Pourtant, tu aurais pu si tu avais suivi ton père lors de ces multiples soirées ‘entre hommes’ comme il aimait les appeler. Non, tu préférais dessiner dans un coin, l’attrait du jeu n’avait jamais été pour toi. Mais ce n’était pas pour cela que tu comptais laisser Jacob gagner. Tous les deux dans la voiture, vous rouliez vers le Canvas. Le fait que tu n’aies pas besoin de parler plus que nécessaire, de combler un silence qui en toute autre circonstance aurait pu être pesant était un soulagement. Tu n’aimais pas parler pour ne rien dire alors tu préférais te taire quand tu n’avais rien à demander. Et Jacob le savait, il te connaissait assez désormais pour ne pas s’en vexer. Lui non plus n’étaient pas des plus loquaces, souvent perdu dans ces pensées. Tu finis par l’en sortir pour savoir s’il avait vendu des maisons ces derniers temps. Tu ne connaissais pas l’état du marché immobilier de Brisbane mais tu doutais qu’il ait ralenti son allure. C’était une manière comme une autre de prendre des nouvelles de l’empire immobilier qu’avait construit ton ami au fil des années. « Ça va. J’ai une de mes agences qui bat un peu de l’aile ces temps-ci, le directeur a changé et il gère pas très bien. Ça m’énerve de devoir ramasser les pots cassés, mais j’imagine que c’est mon rôle. » L’intonation de ces derniers mots et la lueur que tu aperçois dans son regard te laissent deviner qu’il ne parle peut-être pas uniquement de son agence. Parce que ton but est de lui changer les idées, tu ne vas pas rebondir sur ces paroles pour savoir comment les choses avancent ou reculent avec Olivia. C’est compliqué, certainement bien plus que ce que Jacob te laisse entrevoir. Il se bat pour son mariage, il se bat comme un acharné et dans une époque où la moindre dispute est devenue la cause d’un divorce, tu l’admires énormément d’avoir encore cette force. « Il n’y a pas moyen de déléguer une partie de ce rôle ? Est-ce qu’un autre directeur ne pourrait pas le former et rattraper une partie de ses erreurs ? » Le travail n’est jamais mieux fait que quand il est fait par vous, c’est quelque chose que tu as tendance à partager. Mais tu sais aussi que la journée ne compte pas assez d’heures pour tout faire tout seul et si Jacob est lassé de ce rôle, il peut peut-être demander de l’aide à d’autres personnes dans son réseau d’agence ? « Et toi alors, comment ça se passe avec les jeunes ? Ils sont motivés ? » Motivés, ils l’étaient toujours plus ou moins. Tout dépendait de l’importance qu’ils donnaient à ton cours. Les seuls élèves qui pouvaient se permettre de ne pas être motivés étaient ceux dont le prix d’une année à l’université ne les endettait pas. Il y en avait mais bien moins que ce que l’on pouvait penser. « Certains sont motivés, d’autres semblent subir leur sort mais se distraient avec leurs téléphones. Je suis soulagé que les premiers mois soient passés, c’est toujours ceux où certaines étudiantes s’octroient le droit de flirter avec leur professeur dès que l’occasion se présente. C’était déplacé quand j’avais la vingtaine mais compréhensible. Maintenant que j’ai l’âge d’être leur père c’est juste … » Tu frissonnais rien que d’y penser. Tu savais que pour certains hommes c’était une bonne chose, cela leur plaisait et les flattait. Pour toi, c’était tout l’inverse. Mais tous les ans, de jeunes femmes tentaient leur chance jusqu’à ce que le message passe clairement pour toutes et que tu sois tranquille jusqu’à la prochaine rentrée. Une fois au Canvas, vous prenez la direction du bar où tu annonces que tu paieras la première tournée. « Et les dernières pour moi. Deux bières, s’il vous plaît. » Tu t’installes sur le tabouret à côté de celui de Jacob, dans l’attente de vos bières. « Ça me fait plaisir de te voir, ça faisait un petit moment. » Toi aussi cela te fait plaisir de le voir. c’est une manière de t’assurer qu’il ne va pas plus mal que la dernière fois, qu’il tient encore debout. Tu espères qu’il ne tombera jamais dans une dépression comment tu l’avais fait et tu en guettes les premiers signes à chacune de vos rencontres. Tu ne le laisseras pas tomber dans les travers qui te hantaient toujours. Beaucoup pensaient que tu étais parfait mais tu étais loin de l’être, tes démons étaient simplement bien cachés. « On est les rois du dernier moment et de l’improvisation, il faudra le faire plut tôt la prochaine fois. » Lui dis-tu un sourire amusé sur les lèvres. « Moi aussi ça me fait plaisir de te voir. » Ajoutas-tu sincèrement. Les moments passés avec Jacob étaient toujours de bons moments où tu pouvais être toi-même, c’était très agréable. Résistant à l’envie de lui demander s’il y avait du mieux dans sa vie personnelle, tu pris une autre direction qui n’avait rien à voir, du moins en apparence. « J’ai rencontré une de tes clientes dernièrement. Tu lui as vendu ou tu vas lui vendre une maison à Logan City. » Devant le regard perdu de ton ami que tu comprenais très bien, tu ajoutais : « Elle s’appelle Colleen Sainsbury, monsieur je-vends-trop-de-maisons-pour-savoir-de-qui-tu-parles. » Tu le taquinais bien entendu. Tu ne connaissais pas le nom de tous tes élèves non plus. Colleen était, sans le savoir, un lien entre ta vie privée et la vie professionnelle de Jacob, un premier sujet parfait pour entamer cette soirée sans aborder des sujets qui fâchent.
@Jacob Copeland |
| | | | (#)Mar 26 Mai 2020 - 15:39 | |
| C’est ce que l’on va voir ! Il sourit, ne réplique rien. Les deux hommes ont toujours été en compétition – il l’a d’ailleurs été dans presque toutes ses amitiés, l’ambition le guidait sûrement. Avec lui, ça n’a jamais été malsain : toujours pour rigoler, toujours pour s’amuser, sans chercher à dépasser l’autre pour le blesser ou le frustrer. Des jeux avec un ballon, des courses, des arbres à grimper – celui qui grimpait le plus haut, celui qui s’écorchait le plus le genou en retombant bêtement, il y avait de quoi faire. Et puis les jeux vidéo un peu plus tard, en grandissant. Se sont ajoutés à cette liste les jeux plus matures, d’hommes : le billard, les fléchettes, le baby-foot, un bowling de temps en temps. Ils passaient des après-midi ensemble qui se sont transformées en soirées au fil des années, mais ça n’a toujours été que dans ce but précis : s’amuser et se dépasser, se pousser mutuellement vers l’avant. Et aujourd’hui, Jacob peut dire que ça fonctionne : oui, ça a marché, car depuis toutes ces années, leur amitié n’a pas bougé. Et de ça, il en est on ne peut plus fier. Ils arrivent au Canvas, lieu de toutes les festivités, là où le monde ne se fait jamais rare. Et pourtant, ils trouvent toujours une place, un endroit où se caser, presque à l’abri des regards et des oreilles trop attentives. Ils n’ont pourtant rien à cacher, ni l’un, ni l’autre. Et c’est sans se préoccuper de qui que ce soit qu’ils se lancent dans leur discussion, comme s’ils étaient chez l’un ou chez l’autre, une bière à la main, posés sur le canapé. Il lui demande s’il a vendu de belles maisons en ce moment, Jacob se plaint du directeur de l’une de ses agences : et finalement, ça fait du bien de se confier à quelqu’un. Ce n’est pas grand-chose. Ce n'est même rien, avec du recul, rien qui devrait le contrarier une fois rentré chez lui. Mais vu qu’il ne parle plus trop de ce qu’ils font au cours de leurs journées avec Olivia, il n’a personne avec qui discuter, il ne vide que très rarement son sac. Alors ce soir, il en profite pour se plaindre, pour mettre des mots sur ce qui l’agace depuis quelque temps – avec tous les sous-entendus qui se cachent derrière. Il n’y a pas moyen de déléguer une partie de ce rôle . Est-ce qu’un autre directeur ne pourrait pas le former et rattraper une partie de ses erreurs ? Il hausse ses épaules. C’est mon travail. Il lui lance un regard. Je n'ai rien à faire dans mon bureau à épier des biens pour des clients. J’ai des centaines d’employés qui font ça certainement mieux que moi. Je dois gérer l’administration, gérer mes employés, gérer mes agences. C’est la seule chose que ma fonction me demande réellement, c’est ce qui m’embête le plus. Il souffle longuement. Je l’ai sermonné il y a quelque temps, j’attends de voir s’il y a une évolution avant de m’y attaquer plus sérieusement. Il paraît que tout le monde a droit à une seconde chance. Il sourit faiblement, conscient que ce qu’il dit pourrait ne pas avoir de sens auprès de quelqu’un qui le connaît bien. Il n’est pas un homme très clément : c’est vrai qu’il peut punir dès le premier avertissement, tout comme il peut laisser d’innombrables chances à la même et unique personne. Ça se confirme dans ses relations personnelles, ça se voit de temps en temps à son travail. C’est à la tête du client, souvent, bien qu’il ne doive pas faire ça. Il le sait, mais il est déraisonnable à ce sujet-là et ne risque pas de changer après quarante ans à agir de la sorte. Il lui demande à son tour comment ça se passe avec ses élèves. Il est curieux de savoir l’avis d’un professeur, lui qui a toujours été de l’autre côté, dans une classe. Il a toujours été entre deux mondes : soit il adorait ses professeurs, soit il les détestait. Il se demande s’il l’aurait aimé, lui, en tant qu’enseignant. Certains sont motivés, d’autres semblent subir leur sort mais se distraient avec leurs téléphones. Je suis soulagé que les premiers mois soient passés, c’est toujours ceux où certaines étudiantes s’octroient le droit de flirter avec leur professeur dès que l’occasion se présente. C’était déplacé quand j’avais la vingtaine mais compréhensible. Maintenant que j’ai l’âge d’être leur père c’est juste… Il le regarde quelques secondes avant de se mettre à rire, l’imaginant face à une étudiante qui lui fait du rentre-dedans : sévère, mais intérieurement complètement désemparé. Ça t’a jamais tenté ? Demande-t-il, avant de poursuivre pour ne pas qu’il le pense étrange. À l’époque, je veux dire. Quand t’avais pas le double qu’elles en âge. T’as jamais eu envie d’en profiter ? Il fronce les sourcils. En profiter sans que ce soit malsain, je veux dire. Il ne sait pas comment se sortir du pétrin dans lequel il s’est mis tout seul. Bon, je dis ça, mais j’ai jamais profité de la détresse immobilière de mes clientes, donc t’as raison, oublie. Il secoue son visage avant de rigoler bêtement dans sa barbe. N’empêche que je t’y vois bien, là, en train de te faire draguer par des gamines dont tu te fiches royalement. Ça doit être beau à voir. Il aime bien le taquiner, preuve en est. Ils s’installent sur les tabourets, la place qu’il avait repérée dès qu’ils sont rentrés dans le Canvas, et commande deux bières qui ne tardent pas à arriver. Il lui dit que ça lui fait plaisir de le voir, que ça faisait un petit moment – en vrai, trop longtemps. Mais il ne le dira jamais de cette façon-là. On est les rois du dernier moment et de l’improvisation, il faudra le faire plus tôt la prochaine fois. Moi aussi ça me fait plaisir de te voir. Il sourit, sincèrement, avant de boire une gorgée de sa bière après avoir trinqué avec son ami. On fera ça plus tôt, c’est promis. Et les promesses, Jacob tente de les tenir à chaque fois qu’il en fait. Un homme d’affaires se doit d’être un homme avec qu’une seule parole, et Jacob n’a encore jamais failli à cette mission : sauf celle où il avait promis à sa fille qu’il la protégerait de tous les dangers, mais qu’est-ce qu’il en peut, maintenant ? Rien. J’ai rencontré une de tes clientes dernièrement. Tu lui as vendu ou tu vas lui vendre une maison à Logan City. Il fronce les sourcils, cherchant au fond de sa mémoire qui est-ce que ça pourrait bien être. Elle s’appelle Colleen Sainsbury, monsieur je-vends-trop-de-maisons-pour-savoir-de-qui-tu-parles. Il ne peut s’empêcher de rire à cette remarque, avant de hocher vivement sa tête de haut en bas. Je vois c’est qui, oui ! Et tu l’as connu d’où ? Il me semble pas qu’elle ait repris des études, si ? Il est sincèrement curieux, ça lui fait plaisir quand Marius lui parle de femmes qui entrent dans sa vie. Même si, pour le coup, il ne lui a rien dit de suspect pour le moment, mais rien que le fait qu’il lui en parle semble être un bon point. Après tout, Jacob a l’impression d’avoir vendu des maisons à tout Brisbane : pourquoi lui parler uniquement d’elle ? Elle est gentille, je l’apprécie bien. Dit-il, en lançant un regard à son ami. Il est vrai que Jacob a le don pour sympathiser avec ses clients, surtout ceux comme Colleen, qui savent ce qu’ils veulent sans prendre de haut l’agent qui s’occupe d’eux. Tu m’en parles pour une raison en particulier ? Ça lui brûlait la langue, fallait bien que ça sorte.
@Marius Warren |
| | | | (#)Sam 30 Mai 2020 - 4:21 | |
| Le Canvas était certainement le bar dans lequel tu te rendais le plus souvent à Brisbane. C’était devenu un peu ton repère en quelques sortes même si tu ne t’y rendais pas aussi souvent qu’à une époque. C’était bien mieux comme cela, tu préférais oublier les mois difficiles où l’idée de noyer tes problèmes dans l’alcool avait été si attrayante. Accompagné de Jacob, c’était différent de te rendre dans ce bar parce que vous alliez pouvoir faire une partie de billard ou de tout autre jeu qui sera sorti ce soir là dans une partie du bar et cela vous permettra de passer un peu de temps ensemble. Même si tu prenais régulièrement des nouvelles de ton ami, le voir c’était une toute autre chose car en l’ayant devant toi, il ne pouvait pas prétendre aller bien quand ce n’était pas le cas. Au moins, tu offrais ce soir à Jacob une soirée loin de cette grande maison vide dans laquelle il habitait avec Olivia qui n’y habitait plus vraiment. La situation dans laquelle se trouvait le couple était très compliquée depuis deux ans et même si tu aurais aimé que les choses s’arrangent par magie pour qu’ils puissent surmonter cette épreuve tous les deux, tu savais que ce n’était pas si simple que cela. Une fois vos bières à la main, tu commençais par prendre des nouvelles du boulot de Jacob où se dernier rencontrait quelques difficultés. Enfin, il rencontrait quelques imprévus. « C’est mon travail. Je n'ai rien à faire dans mon bureau à épier des biens pour des clients. J’ai des centaines d’employés qui font ça certainement mieux que moi. Je dois gérer l’administration, gérer mes employés, gérer mes agences. C’est la seule chose que ma fonction me demande réellement, c’est ce qui m’embête le plus. » Tu avais du mal à réaliser que Jacob était à la tête de dizaines d’agences immobilières à Brisbane mais aussi en Australie et dans le monde. Pour toi, Jacob sera toujours ce gamin qui t’accompagnait dans toutes les conneries que vous aviez pu faire gamins, ton complice et ton très bon ami. Carriériste tous les deux, c’était agréable de ne pas être jugé sur ses ambitions et ce désir de réussir. « Je l’ai sermonné il y a quelque temps, j’attends de voir s’il y a une évolution avant de m’y attaquer plus sérieusement. Il paraît que tout le monde a droit à une seconde chance. » Tu fronces les sourcils à ces paroles parce que ce n’est pas le genre de Jacob de laisser des secondes chances, pas quand elles peuvent impacter son entreprise. Encore une fois, tu te demandes si vous parlez uniquement de ce directeur incompétent ou si ton ami fait un parallèle avec sa vie à lui, une seconde chance dont il aurait droit ? Ou peut-être Olivia ? Chassant cette pensée de ton esprit, tu finis par lui dire : « Si tu penses qu’il la mérite, pourquoi pas. Si l’enseignement m’a appris une chose, c’est d’accepter que l’on ne peut pas sauver tout le monde. » Cela avait été dur pour toi au début car tu voulais que tous tes élèves réussisses. Tous sans exception. Mais bien sûr cela n’avait pas été le cas et il fallait accepter que tes efforts ne soient pas toujours récompensés. « J’ai bien conscience de ne pas savoir comment gérer une entreprise mais si tu t’es lancé dans l’immobilier c’était d’abord pour le plaisir de trouver le bien parfait pour tes clients n’est-ce pas ? » Tu marquais une courte pause avant d’ajouter : « Tu pourrais peut-être essayer de t’occuper personnellement de quelques recherches pour te changer les idées et renouer avec ce qui t’a poussé dans cette direction. S’occuper de l’administratif sera plus simple ensuite. » C’était comme ça que cela fonctionnait pour toi. Tu détestais l’administratif, tu voulais enseigner avant tout. Ce n’était qu’une proposition, Jacob fera comme il l’entend bien entendu. Vos métiers n’avaient rien à voir, vous aviez choisi des branches bien différentes mais cela ne vous empêchait pas de toujours comprendre l’autre même si ce que vous faisiez réellement dans la journée échappait à l’autre. Jacob te demanda ensuite comment se passait ton boulot, en particulier avec les étudiants. « Ça t’a jamais tenté ? À l’époque, je veux dire. Quand t’avais pas le double qu’elles en âge. T’as jamais eu envie d’en profiter ? En profiter sans que ce soit malsain, je veux dire. » Tu regardais ton ami amusé en le voyant s’embourber tout seul. La question n’était pas mal placée et ce n’était pas la première fois qu’on te la posait. Tu pouvais comprendre pourquoi car quand on est jeune et que de très belles jeunes femmes vous proposent de les retrouver dans leur chambre ou s’invitent dans la tienne, c’est tentant bien entendu. « Bon, je dis ça, mais j’ai jamais profité de la détresse immobilière de mes clientes, donc t’as raison, oublie. N’empêche que je t’y vois bien, là, en train de te faire draguer par des gamines dont tu te fiches royalement. Ça doit être beau à voir. » Cette fois, tu laissais échapper un petit rire en secouant la tête. Le spectacle devait valoir le coup en effet parce que tu détestais ces situations et même si tu faisais tout pour ne pas montrer que cela te gênait, tu savais que cela devait se voir d’une manière ou d’une autre. « Je t’aurais invité pour assister au spectacle mais ma détresse te ferait bien trop plaisir. » Lui dis-tu à ton tour sur le même ton taquin. « Ma carrière a toujours été bien plus importante pour moi que d’assouvir une passion brûlante avec une étudiante, même à l’époque. Tout ce qu’elles cherchent c’est quelques heures dans mon lit et tu sais que j’ai besoin d’une connexion avec une femme pour lui permettre l’accès à mon lit. » C’était peut-être vieux jeu et ringard mais tu ne pouvais tout simplement pas fonctionner autrement, c’était impossible pour toi de l’envisager. « Mais je ne suis pas aveugle non plus, certaines étaient très attirantes, elles le sont toujours. » Bien sûr que tu l’avais remarqué et que tu continuais à le remarquer. Ce serait mentir que d’affirmer le contraire mais une femme attirante ou plutôt une jeune femme, ne te faisait pas perdre la tête. Entre vos emplois du temps professionnels et vos vies personnelles, Jacob et toi ne trouviez pas toujours beaucoup de temps à passer ensemble mais quand vous vous retrouviez, c’était toujours avec un immense plaisir. « On fera ça plus tôt, c’est promis. » Tu espérais que vous alliez tenir cette promesse parce que Jacob faisait parti des personnes avec qui tu étais totalement en confiance et avec qui tu savais que tu pouvais tout partager. Votre amitié de longue date te permettait ce luxe que tu n’avais pas avec tout le monde. Changeant de sujet, tu parlais ensuite à ton ami de Colleen qu’il avait aidée personnellement dans sa recherche immobilière. « Je vois c’est qui, oui ! Et tu l’as connu d’où ? Il me semble pas qu’elle ait repris des études, si ? » Effectivement, ce n’était pas à l’université que tu avais rencontré la jolie brune même si deux de vos rencontres s’y étaient déroulées. Tu peux voir que tu as piqué la curiosité de Jacob et cela te fait sourire. « Elle n’a pas repris ses études, elle a par contre une fille qui a commencé les siennes. Et je l’ai rencontrée quand elle a emménagé en ville, je l’ai aidée à monter quelques cartons. » Il t’avait semblé naturel de proposer ton aide à la jeune femme que tu avais trouvée désemparée au milieu de lourds cartons posés sur le trottoir. Cela te semblait bien loin aujourd’hui … « Elle est gentille, je l’apprécie bien. Tu m’en parles pour une raison en particulier ? » Oui, il y avait bien une raison pour laquelle tu avais abordé ce sujet. La première c’était que tu avais envie de parler de Colleen à Jacob parce que cela te semblait important et parce qu’il fallait que tu mettes des mots sur ta relation avec la demoiselle. Mais tu avais aussi besoin que Jacob te file un coup de main pour la surprise que tu préparais pour le cadeau d’anniversaire de Colleen. « J’ai besoin d’une faveur. » Demandas-tu à ton ami en prenant une inspiration. Tu savais qu’une fois cette faveur sur la table, Jacob comprendrait certainement que Colleen était plus pour toi que la mère d’une élève et une femme que tu avais aidée à emménager. Prenant une inspiration, tu lui dis : « J’aurais besoin que tu me donnes l’adresse de la maison que tu as vendue à Colleen. Ou si tu peux pas, que tu me donnes une photo de cette dernière. » Devant le regard ébahi de Jacob, tu fronçais légèrement les sourcils avant de te rendre compte qu’il pouvait s’imaginer beaucoup de choses bien moins innocentes que ce que tu prévoyais de faire. « Je ne sais pas ce que tu es en train d’imaginer mais je préfère te dire que je compte peindre cette maison et lui offrir comme cadeau d’anniversaire, rien de plus. » Jacob savait que tu faisais des aquarelles, il comprendrait facilement ce que tu entendais par peindre. Toutefois, s’il ne voulait te donner ni l’adresse, ni une photo parce qu’il n’en avait pas le droit par rapport à une confidentialité avec ses clients, tu comprendrais, il faudra juste que tu trouves une autre idée.
@Jacob Copeland |
| | | | (#)Jeu 4 Juin 2020 - 11:46 | |
| Les secondes chances sont rares, quand elles viennent de Jacob. Il aime pourtant aller vers son prochain et essaie d’être bienveillant au possible, mais ça, ça n’a jamais été son fort. Il pense avoir changé de point de vue après son accident, car il avait l’impression que le monde entier n’était qu’une main tendue, une aide pour qu’il se relève et qu’il reparte à zéro. Il n’a jamais su le faire, il n’a jamais réussi à faire son deuil : mais survivre à un accident de voiture, être d’ailleurs le seul survivant, c’est avoir une seconde chance, non ? Offerte par la vie, par la mort. Un peu des deux, un cadeau empoisonné qu’il aurait préféré pouvoir refuser en disant « mais non, fallait pas », car il ne fallait vraiment pas. Aujourd’hui, s’il peut laisser des chances plus que de raison à certaines personnes, il le fait. Preuve en est avec ce directeur qui ne le mérite aucunement, mais qui peut le juger ? Sûrement beaucoup de gens, mais Marius, lui, ne le fera pas. Si tu penses qu’il la mérite, pourquoi pas. Si l’enseignement m’a appris une chose, c’est d’accepter que l’on ne peut pas sauver tout le monde. Il lance un regard à son ami, il est d’accord avec lui. Mais le problème avec Jacob, c’est qu’il n’a pas su se sauver lui-même : rongé par la culpabilité. Et il n’a pas su sauver Olivia, à qui il reproche encore tant de choses, alors qu’il aimerait savoir passer l’éponge. S’il peut essayer d’en sauver d’autres, sans que ça l’implique de trop, il se doit d’essayer. Mais ça, il ne voit pas comment le dire à Marius. Il ne veut pas l’embêter avec toutes ces histoires autour de l’accident, pas encore, pas ce soir. T’as raison. Je vais voir. Il se contente de dire ça, mais sa décision est prise : une seconde chance, peut-être une troisième, une quatrième… cet homme n’est pas prêt de se faire renvoyer. J’ai bien conscience de ne pas savoir comment gérer une entreprise mais si tu t’es lancé dans l’immobilier c’était d’abord pour le plaisir de trouver le bien parfait pour tes clients n’est-ce pas ? Il fronce les sourcils, cherche à savoir où Marius veut en venir. Tu pourrais peut-être essayer de t’occuper personnellement de quelques recherches pour te changer les idées et renouer avec ce qui t’a poussé dans cette direction. S’occuper de l’administratif sera plus simple ensuite. Il boit une gorgée de sa bière avant de secouer son visage doucement. Justement, j’ai peut-être un peu trop essayé de renouer avec tout cela. Il hausse ses épaules. J’avais pas le choix, c’était soit le travail, soit la déprime. Et c’est étrange de l’avouer ainsi, à voix haute, face à quelqu’un d’autre que son reflet dans le miroir. Je ne sais plus ce que c’est un jour de repos. Je ne sais plus ce que sont des horaires normaux. Je passe mon temps au bureau, en visites, partout sauf à la maison. Et je gère à la fois l’administratif et les visites, mais j’ai toujours eu un penchant pour ce dernier et gérer mes vraies responsabilités est de plus en plus contraignant. Il soupire. Mais c’est la vie, que veux-tu. Et le sujet est plus ou moins clos, parce que dans tous les cas le problème ne va pas pouvoir se résoudre ce soir. Il doit apprendre à gérer son emploi du temps et les deux hommes ne travaillant pas dans le même secteur, tous les conseils de Marius – aussi agréables soient-ils – sont inutiles. C’est au tour de son ami de lui parler un peu de ce qu’il se passe à son travail, et rapidement, il lui dit être content de ne plus être la proie de ses nouvelles étudiantes. La curiosité – peut-être mal placée – de Jacob le pousse à se perdre dans ses propres propos, sous le regard de plus en plus amusé du professeur. Il le regarde s’embourber, et il ne lui viendrait pas à l’esprit de l’aider à se sortir de cette situation. Alors il tente de retourner la situation à son avantage : il dit qu’il aurait adoré assister à la scène, pour le voir paniquer en direct. Je t’aurais invité pour assister à la scène mais ma détresse te ferait bien trop plaisir. Il marque un point, mais c’est de bonne guerre. Ma carrière a toujours été bien plus importante pour moi que d’assouvir une passion brûlante avec une étudiante, même à l’époque. Tout ce qu’elles cherchent c’est quelques heures dans mon lit et tu sais que j’ai besoin d’une connexion avec une femme pour lui permettre l’accès à mon lit. Il le sait, oui. Il connaît Marius par cœur, et il sait comment il fonctionne. Tout comme Marius sait comment Jacob fonctionne. Lui, à l’époque, ça le gênait pas d’aller de lits en lits, jusqu’à ce que son cœur se heurte à celui d’Olivia. Depuis l’amour prime, et la fidélité aussi, bien que ça soit à sens unique. Mais je ne suis pas aveugle non plus, certaines étaient très attirantes, elles le sont toujours. Il est content qu’il lui fasse remarquer, ça n’aurait servi à rien de jouer à l’homme fort qui ne pose jamais ses yeux quelque part : ils le font tous, même avec la bague au doigt. Il y a une différence entre remarquer la beauté d’une femme et ressentir du désir pour elle, et il sait que Marius ne fantasme pas sur ses étudiantes. Loin de là. Et le sujet dérive de jeunes femmes à une autre femme, que Marius et Jacob connaissent tous les deux, d’un contexte qui se veut différent. Une cliente pour l’agent immobilier, qui donc pour l’enseignant ? Elle n’a pas repris ses études, elle a par contre une fille qui a commencé les siennes. Et je l’ai rencontrée quand elle a emménagé en ville, je l’ai aidée à monter quelques cartons. Un véritable gentleman, ce Marius. Il hoche doucement sa tête, assimilant l’information. Mais il a besoin d’en savoir plus : pourquoi est-ce qu’il lui en parle ? Pourquoi elle, pourquoi maintenant ? J’ai besoin d’une faveur. Jacob bouge légèrement sur son siège, l’air légèrement plus sérieux, il est suspendu aux lèvres de Marius. S’il peut l’aider, il l’aidera avec grand plaisir, comme il l’a toujours fait. J’aurais besoin que tu me donnes l’adresse de la maison que tu as vendue à Colleen. Ou si tu peux pas, que tu me donnes une photo de cette dernière. C’est assez bizarre, comme demande. Ça le serait d’autant plus si elle venait de quelqu’un d’autre que lui, mais il sait que ses intentions ne sont pas mauvaises : il veut malgré tout comprendre pourquoi. Il ne le fera pas s’il ne juge pas que ce soit utile, comme beaucoup de métiers, il est tenu au secret professionnel. Alors oui, tout le monde peut trouver l’adresse de tout le monde, mais il a le droit de garder le silence quand on lui demande l’adresse de telle ou telle personne, évidemment. Je ne sais pas ce que tu es en train d’imaginer mais je préfère te dire que je compte peindre cette maison et lui offrir comme cadeau d’anniversaire, rien de plus. Et la raison est là : Marius se veut romantique. Enfin, c’est l’impression qu’il donne à Jacob. Elle te plaît ? C’est indiscret, direct : comme toujours quand ils abordent le sujet de l’amour, et de tout ce qui s’ensuit. Car son ami a droit au bonheur, tout comme Jacob. Et que c’est trop dommage de s’en priver quand ça nous pend au nez, alors il ne veut pas qu’il laisse passer sa chance. Il sort un papier de la poche de sa veste et écrit quelques mots dessus, l’adresse de Colleen. Je te fais confiance, tu le sais, ça. Ça sonne comme un avertissement, c’en est un. Il a sa confiance, et il l’aura toujours s’il ne joue pas avec celle-ci. Mais dis-moi ce que tu ressens pour elle. Il dit ça, avant de songer à lui passer le papier. Comme une récompense qu’il lui donnera quand il aura eu les informations qu’il veut. J’imagine que c’est un peu tôt pour parler de sentiments mais ta démarche n’est pas innocente. Et ça fait longtemps que je ne t’ai pas vu porter de l’attention sur une femme, alors je veux tous les détails. Il ne sait pas s’il est toujours le quarantenaire – ancien – père de famille ou s’il est subitement devenu une adolescente en quête de potins, mais il se sent un peu dans les deux rôles. Un conseiller avec une expérience sur des années, mélangé à un ami qui rêve de voir le sien heureux. Il garde le papier sous ses doigts, toise Marius. C’est le moment d’ouvrir son cœur, et Jacob ouvrira le poing pour lui permettre d’accéder à l’information tant désirée.
@Marius Warren |
| | | | (#)Lun 8 Juin 2020 - 4:16 | |
| Rencontrer quelques difficultés au boulot, c’était tout à fait normal. Une carrière ne pouvait pas être un long fleuve tranquille, c’était impossible. Vu ce que Jacob traversait à côté du boulot, il aurait été plus agréable que les choses se passent bien pour lui dans son empire immobilier mais ce n’était apparemment pas aussi simple que ça. Un nouveau directeur ne faisait pas bien son travail et cela affectait donc l’image des agences de ton ami ainsi que le bénéfice de cette dernière très certainement. Tu n’étais pas habitué à réfléchir en termes de bénéfices, dans ton boulot, c’était plutôt en termes de réussite des élèves. Voir Jacob donner à ce directeur plus d’une chance était réellement une surprise car il avait pour habitude d’être intransigeant mais les épreuves que l’on traverse nous changent et Jacob, même s’il était toujours au fond le même gamin que tu avais rencontré, avait changé depuis son accident. Tu préférais tout de même lui faire remarquer qu’il ne pouvait pas sauver tout le monde et que ce directeur n’apprendrait peut-être jamais de ses erreurs. « T’as raison. Je vais voir. » Tu essayais de proposer ensuite à Jacob des solutions pour essayer de le motiver à travailler sur les sujets administratifs. Mais tu n’étais pas le mieux placé pour le faire et les paroles de ton ami te le rappelèrent : « Justement, j’ai peut-être un peu trop essayé de renouer avec tout cela. J’avais pas le choix, c’était soit le travail, soit la déprime. Je ne sais plus ce que c’est un jour de repos. Je ne sais plus ce que sont des horaires normaux. Je passe mon temps au bureau, en visites, partout sauf à la maison. Et je gère à la fois l’administratif et les visites, mais j’ai toujours eu un penchant pour ce dernier et gérer mes vraies responsabilités est de plus en plus contraignant. Mais c’est la vie, que veux-tu. » S’il y avait bien une personne qui comprenait ce que c’était que de se plonger tête baissée dans son boulot pour échapper à tout le reste c’était toi. Tu avais passé plus de dix ans à le faire et la position de professeur respecté que tu avais aujourd’hui, tout comme la possibilité d’aller enseigner à Paris, tu le devais à cet acharnement sans faille. Tu savais que ce n’était pas sain tout comme Jacob était en train de te le décrire mais cela avait été un moyen de ne pas plonger complètement en dépression. Oh tu n’y avais pas échappé complètement mais cela aurait pu être bien pire, tu t’en rendais compte aujourd’hui. C’était plus facile de se plonger dans les problèmes de tes élèves, dans les milliers de tâches administratives, dans des dizaines de projets pour éviter de penser à Moïra que tu ne voyais plus à l’époque et à tout ce qui se passait dans ta vie. Posant un bras sur l’épaule de Jacob, tu lui dis : « Ce n’est pas facile de trouver un rythme et de sortir la tête de l’eau. Je me fais encore éjecté de l’université par les gardiens de nuit la plupart du temps. » Lui dis-tu avec un petit sourire. « Faudra qu’on se fasse ces petites soirées plus souvent, c’est un bon compromis entre la maison et le bureau. » Ajoutas-tu avec un clin d’oeil. Si voir Jacob plus souvent lui permettait de travailler moins, cela ne te dérangeait vraiment pas. Et puis cela te forcerait à partir plus tôt également. Suite à la question de ton ami sur l’envie que tu avais pu avoir de coucher avec tes étudiantes à l’époque où tu n’avais pas l’âge d’être leur père, tu lui répondis honnêtement que cela ne t’avait jamais tenté plus que ça mais que tu ne pouvais pas nier avoir eu et avoir toujours des élèves attirantes. Il faudrait être aveugle pour ne pas le remarquer et ce serait de mauvaise foi que de ne pas reconnaître que tu savais apprécier la beauté de ces étudiantes. Pour toi, apprécier et reconnaître la beauté d’une jeune femme ne voulait rien dire de plus que cela. Jacob n’ajouta rien sur le sujet mais semblait plutôt amusé malgré tout. Tu lui parlais ensuite de Colleen et de la maison qu’il lui avait vendue. Il ne semblait pas comprendre où tu voulais en venir mais tu avais piqué sa curiosité, ça c’était sûr et certain par contre. Tu avais besoin d’une faveur de la part de ton ami et tu ne savais pas s’il allait accepter de te la donner mais pour mettre toutes les chances de ton côté, tu savais que tu allais devoir t’expliquer et plus que ce que tu venais de faire. Ta demande le surprit et tu ne fus pas étonné de ton côté quand il te demanda : « Elle te plaît ? » La réponse à cette question était plus ou moins dans ta demande et tu savais que Jacob s’en doutait. Il voulait te l’entendre dire à tous les coups et même s’il n’y avait pas d’hésitation à avoir, l’idée de le dire à haute voix était légèrement perturbante. « Oui, elle me plaît. » Simple mais direct, tout comme la question de ton ami. Tu sentis tes joues se colorer car tu n’avais vraiment pas l’habitude de parler de ce sujet. En général c’était toi qui questionnais les autres vu que ta vie amoureuse était inexistante depuis des années. Mais cela était peut-être en train de changer, tu ne voulais pas trop t’avancer … « Je te fais confiance, tu le sais, ça. Mais dis-moi ce que tu ressens pour elle. » Tu regardes Jacob inscrire une adresse sur un bout de papier mais il ne te le tend pas, pas encore en tout cas. « J’imagine que c’est un peu tôt pour parler de sentiments mais ta démarche n’est pas innocente. Et ça fait longtemps que je ne t’ai pas vu porter de l’attention sur une femme, alors je veux tous les détails. » Jacob a raison, il est bien trop tôt pour parler de sentiments. Du moins, de sentiments amoureux. Mais tu étais attiré par Colleen, tu avais envie d’apprendre à la connaître, de passer un peu plus de temps avec elle. Tu lui faisais assez confiance pour lui confier ton histoire et ça c’était un très grand pas en avant pour toi. « Je … » Tu passes une main sur ton visage en soupirant. La vérité c’est que tu ne sais pas vraiment par où commencer et comment présenter la chose de la meilleure manière possible à Jacob. « La dernière fois que j’ai vu Colleen, elle a exprimé l’envie de voir une de mes aquarelles. Alors quand sa fille est venue me demander un délai supplémentaire pour son devoir à cause de l’anniversaire de sa mère, je me suis dit que ce serait une bonne idée. » Ce serait partager avec la belle brune une nouvelle facette de la personne que tu étais. Et tu étais attentif aux détails, tu les retenais, tu espérais que cela ferait plaisir à Colleen. « En l’aidant à porter ses cartons, je ne pensais pas que je serai un jour en train de lui préparer une aquarelle mais … Je ne sais pas vraiment comment l’expliquer. Elle est magnifique, elle est intelligente, elle sait ce qu’elle veut mais le plus important c’est qu’elle a réussi à me mettre en confiance. C’est quelque chose qui n’arrive pas souvent et ce serait idiot de ma part de ne pas au moins essayer. » Essayer quoi au juste ? De la séduire ? Oui, très certainement. Ce n’était pas ce que tu avais envie d’avouer mais c’était malgré tout ce que tu étais en train de dire.
@Jacob Copeland |
| | | | (#)Mar 9 Juin 2020 - 11:30 | |
| Ce qui est bien avec Marius, c’est que Jacob peut s’exprimer sur tous les sujets du monde : il aura toujours de bons conseils. C’est très certainement pour cela qu’il est bien plus qu’un meilleur ami aux yeux de l’agent immobilier, il est son grand frère, celui sur qui il pourra toujours compter, celui qui acceptera toujours de l’écouter, celui qui lui donnera toujours les meilleurs conseils – même si, neuf fois sur dix, ils ne seront pas appliqués. Là encore, il tente de l’aiguiller concernant la démarche à avoir avec son nouveau directeur : ne pas être trop clément, il ne peut pas sauver tout le monde. Et il a raison, et Jacob va garder cette information dans un coin de sa tête. Tant qu’il n’aura pas décidé de lui-même qu’il est temps de mettre un terme à cette mascarade, il ne le fera pas. Il a eu des plaintes de clients, d’autres de ses employés, il est même encouragé par Marius, mais il ne fera rien. Et Jacob n’est pas un patron irréprochable, cet homme n’aurait jamais été engagé s’il avait plongé tête première dans l’administration plutôt que de se faufiler à droite et à gauche pour des visites dont il ne devait pas s’occuper à la base. Ce n’est pas facile de trouver un rythme et de sortir la tête de l’eau. Je me fais encore éjecté de l’université par les gardiens de nuit la plupart du temps. Il ne peut s’empêcher de rigoler face à cette remarque, qu’il sait pourtant vraie : Marius est comme lui, il perd rapidement la notion du temps quand il s’agit de son travail. Mon agente d’accueil attendait patiemment que je m’en aille durant les premiers temps, pour pouvoir partir aussi. Maintenant elle vient me voir et me dit qu’elle a une vie et envie de mourir ailleurs qu’ici, puis elle s’en va. Elle me fait bien rire, et en général, ça marche pour que je m’en aille aussi. Marius a cependant eu la preuve que parfois, elle n’a pas le courage de le faire et qu’ils tardent jusqu’à beaucoup trop tard : elle était encore derrière son comptoir d’accueil quand il est arrivé pour récupérer Jacob, et elle a été la dernière à partir. Jacob est chanceux de travailler avec une femme aussi compréhensive et qui aime autant son travail, il en a parfois trop peu conscience. Faudra qu’on se fasse ces petites soirées plus souvent, c’est un bon compromis entre la maison et le bureau. Il hoche vivement son visage suite à la proposition de Marius. Si on peut s’extirper de tous les autres mondes pour se retrouver entre nous avec une bonne bière, je ne dis pas non. Il n’y a aucune proposition plus alléchante que celle-ci. Et ils le feront, il n’en doute pas. S’ils ne se sont pas vus dernièrement, c’était surtout à cause de Jacob : il veut se rattraper, il veut que cette soirée marque la fin d’un cycle et que leur amitié renaisse, inlassablement. C’est une promesse qu’il se fait à lui-même, qu’il a envie de faire au monde entier, bien qu’il ne sache pas encore s’il parviendra à la tenir : il veut être là, il veut recommencer à vivre pour lui, arrêter de se morfondre silencieusement en affirmant que tout va bien. Tout ne va jamais bien, et il doit apprendre à composer avec cela. Pour l’heure, il n’est pas question de promesses faites sans le moindre mot, le sujet se porte sur une femme que les deux hommes connaissent : Colleen. Marius semble l’apprécier, suffisamment pour demander son adresse à Jacob. C’est particulier, comme demande, et c’est pour ça que l’agent immobilier cherche à creuser. Oui, elle me plaît. Bien sûr qu’il va lui donner le bout de papier, il n’a aucune raison de lui cacher l’adresse : après tout, il connaît suffisamment Marius pour savoir qu’il n’a pas des penchants étranges – voyeur, par exemple – et qu’il n’ira pas la tuer avec une tronçonneuse. Alors il peut lui donner ce papier l’esprit tranquille, s’il doit avoir peur, c’est plutôt pour l’issue de la démarche. Il espère réellement que Colleen réagira positivement et que Marius vivra enfin quelque chose à la hauteur de l’homme qu’il est. Il a toujours été affecté par les échecs sentimentaux de son ami, parce qu’il ne comprend pas comment un type aussi génial que lui n’arrive pas à trouver une femme qui pourrait lui convenir. Il a tout pour lui, et elles, elles n’ont que de mauvaises choses à lui offrir. Pas Colleen. Ce qu’il sait d’elle le conforte dans l’idée qu’elle peut lui correspondre et qu’elle mérite de le fréquenter. Il lui demande tous les détails : il est curieux. Et bizarrement, l’écouter le fait oublier ses problèmes à lui. Il va vivre cette histoire par procuration, en attendant que son mariage se dégage des débris causés par son accident de voiture deux ans plus tôt. Je… Il n’a pas les mots, il rougit, même. Ça le fait sourire. La dernière fois que j’ai vu Colleen, elle a exprimé l’envie de voir une de mes aquarelles. Alors quand sa fille est venue me demander un délai supplémentaire pour son devoir à cause de l’anniversaire de sa mère, je me suis dit que ce serait une bonne idée. Il hoche doucement son visage, même s’il se dit qu’il va devoir l’avertir sur quelque chose. Il le laisse poursuivre, ça peut attendre. En l’aidant à porter ses cartons, je ne pensais pas que je serai un jour en train de lui préparer une aquarelle mais… Je ne sais pas vraiment comment l’expliquer. Elle est magnifique, elle est intelligente, elle sait ce qu’elle veut mais le plus important c’est qu’elle a réussi à me mettre en confiance. C’est quelque chose qui n’arrive pas souvent et ce serait idiot de ma part de ne pas au moins essayer. Jacob le regarde longuement, et il voit toute la sincérité dans les yeux de Marius. Il est réellement attiré par elle, il peut lire l’innocence des premiers échanges, la nervosité, tout ce qui s’ensuit. C’est très certainement le début d’une grande relation – amicale ou amoureuse, seul l’avenir le dira, et Jacob est assez fier d’être l’un des premiers à qui son ami en parle. Il ne doute pas qu’il l’aurait fait même s’il ne cherchait pas à avoir son adresse, et c’est bien pour ça qu’il l’écoute avec autant d’attention, il n’est pas en train de lui en parler que par intérêt. Fais attention à ne pas trop avantager sa fille uniquement parce que sa mère te plaît, mh ? Il dit ça, mais il ne sait pas s’il lui a donné ce temps supplémentaire. Je sais que ça ne me plairait pas de savoir que l’on favorise mon enfant par rapport à moi, tu vois ce que je veux dire ? Il parle rarement en se mettant dans le rôle d’un père : dire « mon enfant » à voix haute lui fait très bizarre, et il boit une gorgée pour ne plus penser à ça. Tu mérites d’être heureux, Marius. Peu importe avec qui, peu importe comment. Et je te confirme ma première impression sur Colleen : cette femme est géniale, et tu aurais tort de ne pas essayer, en effet. Il lui tend le papier avec un léger sourire. À toi de jouer, maintenant. Tu me raconteras comment ça s’est passé. Il espère que l’issue de tout cela sera positive, bien qu’au fond, il n’en doute pas vraiment. Il sait qu’elle pourrait aussi prendre peur et refuser le cadeau, mais il n’imagine pas Colleen réagir de cette manière. Enfin, après tout, il ne la connaît pas suffisamment pour être sûr de ce qu’il se passera. La suite au prochain numéro, c’est un peu ce qu’il se dit. On se fait une partie, alors ? Dit-il en lançant un regard vers l’un des billards qui vient de se libérer.
@Marius Warren |
| | | | (#)Dim 14 Juin 2020 - 5:44 | |
| Ta passion pour ton métier était la seule chose qui t’avait permis de traverser les différentes épreuves rencontrées depuis ton adolescence. C’était tes parents qui t’avaient communiqué ce besoin maladif de réussir car c’était ce qu’ils attendaient de toi. Une belle carrière et une belle famille. Bon, pour cette dernière, tu n’avais pas réellement suivi leur schéma mais tu avais déjà la première partie et tu ne comptais pas t’arrêter là. Ton père n’avait pas encore mis le sujet sur la table mais cela n’allait pas tarder à venir. Il te voyait déjà doyen de l’université, un poste que tu auras peut-être un jour la chance d’acquérir mais l’ascension serait longue et périlleuse et surtout purement politique. Tu n’étais pas encore certain de vouloir jouer à ce jeu et ton père avait dû le sentir car il n’avait pas amené le sujet sur la table pour l’instant. Ta remarque sur tes habitudes de travail nocturne firent rire ton ami ce qui fit disparaître de son visage les traits inquiets qu’il arborait depuis que tu l’avais lancé sur le sujet. Il était le seul à pouvoir régler son problème, tu ne présumeras jamais lui donner une quelconque solution mais des fois, parler de son travail avec une personne très loin de son domaine permet d’acquérir un nouveau regard sur ses habitudes. « Mon agente d’accueil attendait patiemment que je m’en aille durant les premiers temps, pour pouvoir partir aussi. Maintenant elle vient me voir et me dit qu’elle a une vie et envie de mourir ailleurs qu’ici, puis elle s’en va. Elle me fait bien rire, et en général, ça marche pour que je m’en aille aussi. » N’ayant pas d’employés, ton comportement n’impactait que toi. Cela ne te surprenait pas que l’employée de Jacob reste pour lui tenir compagnie mais qu’elle ait fini par se lasser. C’était des remarques que tu avais souvent de tes doctorants mais chacun sa vie, chacun ses raisons. Pour avoir souvent croisée la jeune femme à l’accueil, Jacob avait de la chance de l’avoir dans son agence et il le savait, cela pouvait se lire sur son visage. « C’est bien qu’elle n’ait pas peur de te remettre un peu à ta place, tu dormais sur le canapé de ton bureau sinon. » Dis-tu pour taquiner ton ami. Normalement c’était le genre de remarque à éviter avec son employeur mais au bout d’un certain temps à travailler avec la même personne, les relations changent et peuvent devenir plus amicales. Savoir que son agent d’accueil le virait de sa propre agence était une bonne chose à tes yeux. Tu fis ensuite remarquer à Jacob que s’il voulait éviter de rentrer trop tôt chez lui, il faudrait que vous fassiez ce genre de soirées plus souvent au lieu de le laisser derrière son écran. « Si on peut s’extirper de tous les autres mondes pour se retrouver entre nous avec une bonne bière, je ne dis pas non. Il n’y a aucune proposition plus alléchante que celle-ci. » Non, il n’y en avait vraiment pas. Avec Jacob, il n’était pas question de se prendre la tête, de réfléchir pendant des heures à tel ou tel geste, telle ou telle action. C’était rafraichissant pour toi qui avais l’habitude de trop réfléchir de peur de blesser les autres. En particulier quand tu étais avec ta famille. N’était-ce pas paradoxal ? Tu avais souvent entendu les gens te dire qu’ils ne pouvaient être qu’eux-mêmes avec leur famille … Ce n’était pas ton cas. La conversation se tourna ensuite vers un tout autre sujet qui n’était autre que Colleen que tu avais rencontrée plusieurs mois plus tôt mais que je revoyais de plus en plus souvent depuis trois mois seulement. Tu avais bien conscience que la faveur que tu demandais à Jacob mettait en lumière les sentiments que tu commençais à éprouver pour Colleen mais s’il y avait bien quelqu’un en qui tu avais confiance avec cette information, c’était ton ami. Sa vie amoureuse avait été bien plus stable que la tienne et depuis des années. C’est avec un pincement au coeur que tu l’avais vu se marier et devenir papa mais tu étais heureux qu’il puisse vivre tout cela. Depuis deux ans toutefois, les choses avaient radicalement changer et il t’arrivait de te demander comment ton ami pouvait être toujours marié. Tu espérais qu’ils arriveraient à surmonter leur douleur, à se retrouver mais tu ignorais si c’était possible. Tu l’espérais de tout ton être en tout cas. Tu comptais donc à Jacob ta relation avec Colleen sans trop entrer dans les détails non plus : « Fais attention à ne pas trop avantager sa fille uniquement parce que sa mère te plaît, mh ? Je sais que ça ne me plairait pas de savoir que l’on favorise mon enfant par rapport à moi, tu vois ce que je veux dire ? » Tu comprenais très bien ce qu’il voulait dire et tu n’avais nullement envie de faire des faveurs à Lou pour gagner des points avec sa mère. Parce que tu savais que cela t’en ferait perdre plus qu’autre chose auprès de la mère tout en donnant de très mauvaises idées à la fille. Maintenant que Lou semblait avoir décidé que te draguer n’était plus sa priorité en histoire de l’art, tu comptais profiter de ce moment de répit. « Tu ne penses pas que je lui ai accordé un délai supplémentaire n’est-ce pas ? » Demandas-tu à ton ami un sourire amusé sur le visage avant de prendre une gorgée de bière. « Je ne compte nullement jouer au favoritisme, ce serait contreproductif à tous les niveaux. De un parce que Colleen le prendrait mal je pense et de deux parce que je n’ai nullement l’intention de donner de mauvaises idées à sa fille. » Quand Jacob te regarda les sourcils froncés, tu ajoutais : « Sa fille a fait parti des étudiantes qui pensaient que c’était une bonne idée de flirter avec leur professeur. Et quand je dis flirter, je pèse mes mots. » Tu ne doutais pas que ton ami allait trouver cette situation des plus cocasse. Tu espérais que tes explications avaient suffi pour convaincre Jacob de te donner ce bout de papier qu’il tenait entre les doigts. Et la réponse fut oui car il te le tendit en disant : « Tu mérites d’être heureux, Marius. Peu importe avec qui, peu importe comment. Et je te confirme ma première impression sur Colleen : cette femme est géniale, et tu aurais tort de ne pas essayer, en effet. À toi de jouer, maintenant. Tu me raconteras comment ça s’est passé. » Les mots de Jacob en plus du fait de te donner ce morceau de papier voulait tout dire pour toi. Tu savais que si tu faisais une connerie, il risquait gros. Alors cela te touchait énormément qu’il prenne ce risque. Attrapant le bout de papier, tu le glissais dans ton portefeuille avant de lui dire : « Je t’enverrai une photo du résultat final et je te tiendrai au courant. Son anniversaire est mi-juin donc ne soit pas trop impatient. » Dis-tu à ton ami avec un clin d’oeil. Ce n’était pas pour tout de suite cette surprise mais avec ton emploi du temps, mieux valait t’y prendre à l’avance. « Merci pour tes mots encourageants. On verra bien comment les choses vont se passer ! » Dis-tu en haussant les épaules. Tu ne voulais pas trop espérer non plus de la part de Colleen car tu pouvais te faire des idées ou les choses pouvaient mal tourner mais pour une fois, tu avais envie d’être optimiste. Jacob se tourna ensuite vers le billard avant de te demander : « On se fait une partie, alors ? » Tu hoches la tête et te lèves en attrapant ta bière. « Que le meilleur gagne. » Te contentas-tu de répondre alors que vous arriviez devant le billard. Tu attrapais de queues de billard pendant que Jacob disposait les boules pour lancer la partie. Alors que tu lui tendais l’objet, tu ne pus t’empêcher de lui demander : « Comment ça va avec Olivia ? » Tu ne voulais pas le forcer à parler mais tu ne pouvais pas continuer à faire comme si de rien n’était non plus. Si Jacob te répondait sèchement, tu n’insistera pas mais tu te devais de poser la question. « A toi l’honneur ! » Lui dis-tu en désignant les boules parfaitement disposées.
@Jacob Copeland |
| | | | (#)Mer 1 Juil 2020 - 13:14 | |
| Les deux hommes sont ambitieux, acharnés. Ils se ressemblent sur énormément de points, tant dans le domaine professionnel que privé. S’ils se supportent depuis autant d’années, c’est bien parce qu’il y a des similitudes qui priment sur les différences et qu’ils peuvent se lire, se voir dans l’un et dans l’autre. Il lui parle de son agente d’accueil qui n’hésite plus à le mettre à la porte de sa propre agence. Ça fait sourire Jacob, de lui raconter cette histoire : cette femme est une tempête. Elle sait ce qu’elle veut, elle sait lui parler, elle sait le maîtriser. En y réfléchissant bien, il avait plus besoin de quelqu’un avec cette compétence-là que de quelqu’un d'apte à accueillir du public. Si elle parlait mal à ses clients, il n’en aurait rien à faire : il a la belle vie depuis qu’elle est à son comptoir, et il n’en changerait pour rien au monde. C’est bien qu’elle n’ait pas peur de te remettre un peu à ta place, tu dormais sur le canapé de ton bureau sinon. Il ne peut s’empêcher de sourire à cette idée, parce qu’il l’a déjà fait. Bien plus d’une fois, mais il préfère ne pas le dire à Marius : celui-ci doit s’en douter, et mieux vaut ne pas s’en vanter. Même si Olivia et lui ne sont plus ce qu’ils étaient autrefois, il ne doit pas découcher de la sorte, il doit rester chez lui et assumer. Assumer l’accident, assumer son deuil, assumer son mariage qui vole – petit à petit – en éclats. Assumer que ça ne va pas, que ça n’ira pas, et qu’il continuera encore longtemps à dormir dans des draps froids. Non, il ne le dira pas à Marius. Il préfère appuyer sur les mots de son presque frère, confirmer qu’ils devront faire ça plus souvent, se voir plus souvent, s’écouter plus souvent. Cette soirée lui fait du bien et même s’il n’a pas encore le recul suffisant sur celle-ci pour le savoir, au fond de lui, il doit le sentir. Parce que ça lui fait toujours du bien d’être avec Marius, car lui, il le comprend, il ne le juge pas. Finalement, ils parlent de Colleen, de sa fille, de ses notes. Tu ne penses pas que je lui ai accordé un délai supplémentaire n’est-ce pas ? Le regard complice qu’ils s’échangent parle plus que les derniers mots de l’enseignant. Non, il ne lui a rien donné du tout, et ça rassure Jacob. Et si ça ne suffisait pas, il préfère le confirmer de vive voix. Je ne compte nullement jouer au favoritisme, ce serait contre-productif à tous les niveaux. De un parce que Colleen le prendrait mal je pense et de deux parce que je n’ai nullement l’intention de donner de mauvaises idées à sa fille. Sa fille a fait parti des étudiantes qui pensaient que c’était une bonne idée de flirter avec leur professeur. Et quand je dis flirter, je pèse mes mots. Un rire s’échappe de la gorge de Jacob, qu’il tente pourtant de contrôler. Je ne m’y attendais pas, à celle-là ! Il avoue, alors qu’il secoue sa tête doucement. J’espère qu’elle a abandonné l’idée. Ce serait bête qu’elle pense avoir perdu face à sa propre mère, ça peut créer des querelles inutiles. Et les drames familiaux autour de l’amour, Marius s’y connaît très bien, et Jacob se doute qu’il ne veut pas avoir à revivre cela, peu importe dans quel rôle il se trouve cette fois-ci. Et c’est exactement parce qu’il connaît le passif de son ami qu’il se lance dans un discours chaleureux : il veut son bonheur, il le mérite, et Colleen semble être faite pour lui. Il doit se lancer, le faire. Il vaut mieux vivre avec des remords qu’avec des regrets, seul un homme ambitieux peut le savoir : mieux vaut avoir la certitude de s’être trompé que de se demander chaque jour s’il aurait fallu le faire ou non. Je t’enverrai une photo du résultat final et je te tiendrai au courant. Son anniversaire est mi-juin donc ne soit pas trop impatient. Il secoue son visage doucement, il aura très certainement oublié d’ici-là. Merci pour tes mots encourageants. On verra bien comment les choses vont se passer ! Et à cette phrase, Jacob lève son verre et boit une énième gorgée. L’idée de faire une partie lui revient ensuite en tête : ils l’ont mentionné en début de soirée, et il refusera catégoriquement de s’en aller tant que ce n’est pas fait. Que le meilleur gagne. C’est la réponse qu’il voulait entendre, ça. Les deux hommes s’approchent d’un billard libre, et Jacob rassemble les boules entre elles tandis que Marius attrape de quoi jouer. Comment ça va avec Olivia ? Il entend la question, il la comprend, il n’a pourtant pas envie d’y répondre. Il vérifie une dernière fois les boules et retire le triangle délicatement, tandis qu’il se retourne vers Marius pour attraper la queue. À toi l’honneur ! Le blond se penche sur la table, prépare son coup, frappe : rien ne rentre dans les trous, mais il a fait un sacré massacre sur la table. Le blond soupire en se redressant, hausse ses épaules. C’est le même résultat chez moi. Des efforts, de la précision, des envies : pas le moindre résultat, que des sentiments et envies éparpillées. Il ne sait pas s’il parle seulement de lui-même ou s’il est en train d’inclure Olivia dans ce constat. J’ai envie d’elle. Il regarde Marius. Et je ne te parle pas que du plan physique, même si j’en ai envie à ce niveau-là également. J’ai envie de la retrouver. J’ai envie de lui parler. J’ai envie d’entendre son rire, j’ai envie de la voir sourire, j’ai envie de voir ses yeux briller face à une bonne nouvelle. Il passe une main sur son visage en faisant le tour de la table pour lui laisser sa place, histoire qu’il tire à son tour. On dit que le pire, c’est l’absence. Je crois que les personnes qui disent ça n’ont jamais eu à supporter une présence, tout en faisant face à une absence. Elle est là physiquement, elle est loin mentalement. Et je ne sais pas quoi faire. Il est perdu, depuis deux ans. Et même s’ils ont pu discuter le soir de leur anniversaire de mariage, l’évolution n’est pas choquante depuis : il n’y a rien. Les silences ont la même amertume, les absences la même sensation de soulagement. Tu penses que je suis égoïste ? Il aimerait mettre un nom sur ce qu’il ressent, savoir si c’est normal, ou si ça ne l’est pas. J’ai besoin de retrouver ma femme. Celle dont je suis amoureux, celle avec qui je passais de longues heures avant que June ne naisse. Je suis loin de renier ma fille et d’ignorer sa mort, mais je ne suis pas qu’un père. Je suis aussi un mari, et je crois que Olivia… Il haussse ses épaules, pas certain. Olivia n’est plus qu’une mère qui pleure son enfant. Et je suis en train de dire des bêtises… Dernière phrase avouée, pourtant il ne la pense pas : ce qu’il pense, c’est ce qu’il vient de dire. Il regrette de l’avoir mentionné à haute voix mais encore une fois, il sait que Marius ne le jugera pas, lui. Qu’il saura trouver les bons mots, qu’il saura le rassurer, même s’il n’a pas les solutions à leur problème, même si personne ne les aura jamais.
@Marius Warren |
| | | | (#)Sam 11 Juil 2020 - 13:28 | |
| Il arrivait que tu trouves, dans le regard de ton ami, ce sentiment de solitude qui l’envahissait. Il était principalement dû à Olivia, tu le savais mais tu ne pouvais t’empêcher de te dire que Jacob devait ressentir cette solitude pas seulement dans son couple mais de manière générale. Parce que personne ne pouvait réellement comprendre ce qu’il était en train de traverser, même quand vous essayiez tous de vous l’imaginer. Pourtant, même si cela ne pouvait pas changer, Jacob était entouré. Déjà dans son boulot par des employés qui veillaient sur lui même quand il devait tout faire pour les en dissuader et aussi dans sa sphère amicale où tu faisais ton maximum pour être présent pour lui et où d’autres s’évertuaient également à veiller à ce que Jacob garde la tête hors de l’eau. Il t’était souvent arrivé de te demander s’il craquerait et un jour et si oui, jusqu’où il pourrait aller. Tu évitais de trop y penser en te rassurant en te convainquant que Jacob était bien trop fort pour craquer mais tu savais que c’était n’importe quoi. Tout le monde avait son point de non-retour. Toi, tu te souviens parfaitement du moment où tu as passé les bras et où la bouteille est devenue l’amie réconfortante dont tu pensais avoir besoin. L’alcool et ta dépression naissante n’ont pas fait bon ménage … Tu n’étais pas fier de repenser à ces mois-là aujourd’hui mais ils faisaient partis de ton histoire. Mais Jacob n’avait pas été faible comme toi. Alors qu’Olivia s’éloignait un peu plus tous les jours et que la réalité de la perte de leur enfant devenait de plus en plus réelle, il avançait, droit dans ses bottes et se battait pour retrouver ce qu’il avait perdu, du moins ce qu’il pouvait retrouver. C’était admirable mais tu te demandais de plus en plus si ce n’était pas légèrement malsain. Au lieu de lancer Jacob sur ce sujet, tu le laissais te questionner sur Colleen et par extension, un peu sur Lou également, en particulier après qu’il t’ait donné l’adresse de la jeune femme pour que tu commences à mettre en place ton cadeau d’anniversaire. Le temps t’était compté, la deadline ne pourrait pas bouger. Ton ami fut très amusé de ce que tu lui confias sur le comportement de Lou ce qui ne te surprit pas. Mais il fit une remarque qui ne t’avait pas traversé l’esprit : « Je ne m’y attendais pas, à celle-là ! J’espère qu’elle a abandonné l’idée. Ce serait bête qu’elle pense avoir perdu face à sa propre mère, ça peut créer des querelles inutiles. » Cette idée ne t’avait jamais traversé l’esprit parce que tu n’avais pas envisagé la possibilité que Lou puisse réellement éprouver des sentiments pour toi. Déjà parce qu’elle ne te connaissait pas vraiment et fantasmerait sur la personne que tu étais plus qu’autre chose et parce que … Un frisson te parcourut le corps, elle était vraiment très jeune, trop jeune. Mais Jacob avait raison, ce n’était pas un scénario à exclure totalement et tu notais dans un coin de ton esprit d’en toucher deux mots à Colleen qui était celle qui avait discuté de la situation avec Lou. Même si aucun de vous deux n’était prêt à définir ce que vous étiez l’un pour l’autre et encore moins en discuter avec la fille de Colleen, mieux valait anticiper les choses car on ne sait jamais les surprises que la vie vous réserve. « Je n’y avais pas pensé mais tu soulèves un point. Elle m’a donné l’impression de chercher de l’attention plus qu’autre chose mais il ne faut pas sous-estimer nos jeunes adultes. » Ou adolescents dans le cas de Lou, tu ne savais trop quoi en penser. En tout cas, tu comptais t’assurer que la place que tu prenais dans la vie de Colleen ne viendrait pas mettre en péril sa relation avec sa fille, c’était la dernière chose que tu souhaitais. Il ne fallait pas connaître Colleen ou sa fille très longtemps pour comprendre le lien qui les unissait. Si ta famille était irréconciliable, tu ne comptais pas briser celle de la jolie brune. Tu promis ensuite à ton ami de lui envoyer une photo de ton aquarelle une fois que tu l’auras terminée. Il te proposa ensuite de commencer cette partie dont vous aviez parlé sur le chemin et c’est vers le billard que vous vous dirigiez accompagnés de vos boissons. Alors que vous prépariez le jeu, tu ne pus t’empêcher de lui demander comment les choses se passaient avec Olivia. Sa réaction ne se fit pas attendre, tu entendis son soupir mais tu n’insistes pas alors qu’il tire le premier la boule blanche au milieu des boules de couleur. Aucune ne rentre mais au moins, le jeu est ouvert. « C’est le même résultat chez moi. Des efforts, de la précision, des envies : pas le moindre résultat, que des sentiments et envies éparpillées. J’ai envie d’elle. Et je ne te parle pas que du plan physique, même si j’en ai envie à ce niveau-là également. J’ai envie de la retrouver. J’ai envie de lui parler. J’ai envie d’entendre son rire, j’ai envie de la voir sourire, j’ai envie de voir ses yeux briller face à une bonne nouvelle. On dit que le pire, c’est l’absence. Je crois que les personnes qui disent ça n’ont jamais eu à supporter une présence, tout en faisant face à une absence. Elle est là physiquement, elle est loin mentalement. Et je ne sais pas quoi faire. » Tu avais l’impression que le constat n’avait pas beaucoup évolué depuis la dernière fois que vous avez abordé le sujet. Parce que tu n’aimes pas le mettre sans cesse sur la table, tu avais veillé à ne pas l’aborder lors de vos dernières rencontres donc tu n’avais pas pris le pout de la situation depuis près de deux mois. Tu savais que Jacob faisait des efforts, essayait mais qu’Olivia ne répondait jamais présente. C’était plus simple de comprendre pourquoi pour toi maintenant que tu avais renoué avec Olivia et que vous aviez discuté mais cela ne voulait pas dire que tu trouvais son comportement justifié. Bien au contraire même … Avant que tu ne puisses répondre, Jacob ajouté : « Tu penses que je suis égoïste ? J’ai besoin de retrouver ma femme. Celle dont je suis amoureux, celle avec qui je passais de longues heures avant que June ne naisse. Je suis loin de renier ma fille et d’ignorer sa mort, mais je ne suis pas qu’un père. Je suis aussi un mari, et je crois que Olivia… Olivia n’est plus qu’une mère qui pleure son enfant. Et je suis en train de dire des bêtises… » Jacob ? Egoïste ? Tu manquais de t’étouffer à cette idée. Vous n’aviez décidément pas la même définition du mot ou alors vous ne regardiez pas la situation de la même manière. Comment est-ce qu’il pouvait penser être égoïste alors qu’il passait son temps à réprimer ses envies pour qu’Olivia puisse réaliser les siennes ? Non, cela n’a décidément aucun sens. C’est à toi de jouer et tu tires un premier coup, rentrant une boule dans le coin droit du billard. Ton deuxième coup est bien moins chanceux et quand tu te relèves, tu dis à ton ami : « Tu n’es pas égoïste Jacob. Au contraire, à mes yeux tu es bien trop altruiste et conciliant. Tu n'as jamais forcé Olivia à quoi que ce soit, il est normal que toi aussi tu aies besoin de certaines choses. » Sans être un mari autoritaire qui donnait des ordres à sa femme pour la garder à la maison, peu de maris accepteraient le comportement actuel d’Olivia. C’était elle qui abandonnait petit à petit le navire mais sans jamais le lâcher complètement comme si elle y était bien trop attachée pour cela. « C’est normal que tu aies besoin de retrouver Olivia et que tu aies toutes ces envies. Qui ne les aurait pas ? Retrouver une dynamique de couple après avoir été trois et après un accident comme celui-ci, ce n’est pas facile. Tu arrives à parler à Olivia ou elle s’évapore encore dans la nature ? » Lui demandas-tu curieux. S’ils se parlaient de nouveau, c’était à tes yeux un pas en avant dans cette situation. Si Olivia continuait ainsi, elle allait finir par le perdre car malgré la force de caractère de Jacob, il ne tiendrait pas pour toujours sans résultat. « Je t’admire tu sais ? » Dis-tu à Jacob très sérieusement. Jamais tu n’aurais eu la force qu’il avait, jamais tu n’aurais pu tenir aussi longtemps dans cette situation dans perdre espoir. En temps que grand pessimiste, c’était dans ton ADN.
@Jacob Copeland |
| | | | (#)Sam 8 Aoû 2020 - 10:45 | |
| Ce que Jacob apprécie particulièrement avec Marius, c’est qu’il peut être lui-même dans n’importe quelle situation. Il peut user de son humour décalé et être sérieux la minute d’après, sans pour autant le perdre au fil de la discussion, là où d’autres auraient abandonné depuis longtemps. Et mieux encore, il peut lui donner son avis sans devoir utiliser de pincettes, sans passer par quatre chemins – et inversement. Alors, il lui dit ce qu’il pense de toute cette histoire entre lui et Colleen, Lou au milieu, il lui conseille même de faire attention à ce que ça ne créer pas d’histoire malsaine entre la mère et l’adolescente ; mieux vaut prévenir que guérir. Je n’y avais pas pensé mais tu soulèves un point. Elle m’a donné l’impression de chercher de l’attention plus qu’autre chose mais il ne faut pas sous-estimer nos jeunes adultes. Un simple hochement de tête confirme les propos de Marius, Jacob pense la même chose – de quoi conclure ce chapitre-là, et l’agent immobilier ne doute pas que son ami lui racontera les prochaines péripéties, en commençant par ce fameux cadeau d’anniversaire. Ça lui fait sincèrement chaud au cœur de voir Marius parler d’une femme avec un tel intérêt : au moins l’un des deux hommes a une chance d’être – enfin – heureux en amour. La première partie de la soirée et les premiers sujets clos, Jacob lui propose d’enfin faire cette partie de billard, il ne partira pas d’ici tant qu’il ne l’aura pas battu – donc jamais, mais ça, il ne faut pas le dire. Une fois autour de la table, il ne faut que quelques secondes à Marius pour aborder le sujet qui fâche, prononcer le prénom presque maudit entre Jacob et ses amis : Olivia. Tout le monde sait désormais qu’il est préférable de ne pas en parler avec lui, que c’est peine perdue, qu’il n’y a presque plus aucun espoir pour son mariage – bien qu’il ne cessera jamais d’y croire, au fond, qu’il continuera toujours inlassablement de le sauver. Il fait le sourd le temps de tirer son premier coup et lui avoue ses derniers ressentis : ils ont une amertume persistante, car ils peuvent être comparés mot pour mot à ses premiers, il n’y a aucune évolution depuis près de deux ans, ou alors, elle va dans le mauvais sens. C’est au tour de Marius de jouer, Jacob s’éloigne d’un pas et le regarde faire, accroché à son jeu, suspendu à ses lèvres également car il attend une réponse. Est-ce qu’il lui semble égoïste, à lui ? Aux yeux des autres, est-ce qu’il l’est ? Aux siens, oui. Aux siens, il aura toujours tous les défauts du monde, il endossera toujours les pires responsabilités ; car ce n’était pas Olivia, dans la voiture. Tu n’es pas égoïste Jacob. Au contraire, à mes yeux tu es bien trop altruiste et conciliant. Tu n’as jamais forcé Olivia à quoi que ce soit, il est normal que toi aussi tu aies besoin de certaines choses. Ces quelques mots ne sont pas un réel soulagement, pour lui, c’est plutôt un pansement à moitié arraché, dont il reste une grande partie. Une solution douloureuse et finalement inefficace, il aurait préféré que Marius l’accable, plutôt qu’il cherche à le rassurer. C’est normal que tu aies besoin de retrouver Olivia et que tu aies toutes ces envies. Qui ne les aurait pas ? Retrouver une dynamique de couple après avoir été trois et après un accident comme celui-ci, ce n’est pas facile. Tu arrives à parler à Olivia ou elle s’évapore encore dans la nature ? Il regarde Marius un court instant avant de détourner son regard vers le jeu, c’est à son tour et cette fois-ci, il est un peu meilleur – ou un peu plus chanceux – que tout à l’heure, car il rentre une boule. Son deuxième coup est inefficace, cependant, et c’est à nouveau à son aîné de jouer. Je t’admire tu sais ? Il se pince les lèvres et secoue son visage, doucement. Tu peux pas dire ça… à un gars qui a tué sa propre fille ; des mots silencieux qu’il aimerait dire, mais Marius lui ferait un véritable sermon là-dessus. Il se racle la gorge et le regarde une nouvelle fois, plus fixement, avec un peu plus d’aisance que tout à l’heure. Le soir de notre anniversaire, oui, on a un peu parlé. Elle n'a pas voulu de notre dîner, finalement. Il avait raconté à Marius ce qu’il organisait, que ça l’étonnait qu’elle ne veuille pas l’annuler – elle l’a finalement fait, en direct cette fois-ci, en arrivant une heure en retard. J’ai appelé son ami pour qu’il s’occupe d’elle et elle m’a rejoint dans la soirée, on a pu se parler, un peu. Ça n'avait rien d’une discussion, rien d’une dispute, c’était… à notre image. Il hausse ses épaules, Olivia et lui n’ont jamais rien fait dans la norme. Un pas en avant, deux pas en arrière. Je n'ai pas envie de me projeter et de me dire que c’était une réelle avancée, je le saurai que dans quelques jours.. ou semaines. Il esquisse un léger sourire, comme pour dire que de toute manière il ne contrôle rien, et tourne autour de la table pour mieux voir les angles, bien que ça risque de bouger après le tour de Marius. Mais ne parlons pas de ça, il y a trop à dire et on a dit qu’on passait une bonne soirée. Et pour Jacob, une bonne soirée ne rime plus du tout avec son mariage, quand à une époque il était le sujet principal, car à une époque il n’y avait rien de plus heureux et inspirant qu’eux.
@Marius Warren |
| | | | (#)Dim 16 Aoû 2020 - 4:40 | |
| Depuis deux ans, depuis ton retour à Brisbane et cet accident de voiture, tu avais l’impression de ne pas toujours être un très bon ami pour Jacob. Tu faisais de ton mieux mais peut-être que ce mieux d’était pas suffisant. Tu étais là le plus possible, pour lui changer les idées tout en essayant de l’aider à avancer dans ce magma dans lequel il semblait s’enfoncer un peu plus chaque jour. Le comportement d’Olivia ne semblait pas s’améliorer, elle aussi s’enfonçait dans des ténèbres desquelles il devait être de plus en plus compliqué de sortir. La plupart du temps, tu évitais de parler d’Olivia sachant très bien que ton ami était peu enclin pour en parler mais ce soir, tu lui avais demandé des nouvelles malgré tout. Parce que tu ne savais pas s’il en parlait à quelqu’un de cette situation et tout garder pour lui n’était pas bon non plus. Mais à chaque fois que le sujet était abordé, tu pensais aux tromperies de la jeune femme qui devaient sans doute se poursuivre et dont tu n’avais jamais touché un mot à personne. En voyant le regard abattu de Jacob quand tu parlais de sa femme, tu n’avais vraiment pas envie d’aggraver la situation. Pour quoi faire ? Les éloigner un peu plus l’un de l’autre ? Est-ce que des tromperies à répétition viendraient changer la situation dans laquelle ils se trouvaient ? Et puis Jacob devait s’en douter, tu ne voyais pas comment il pouvait être aveugle à ce point. Il y avait toujours une différence entre se douter et savoir mais ce n’était pas à toi de le lui dire, c’était à Olivia. Pour avoir été l’amant d’une femme mariée, lors d’un week-end quand tu étais en France, tu savais que ce n’était pas aussi simple que certains voulaient le penser. Margot était heureuse dans son mariage, dans sa famille mais elle avait eu besoin de succomber à ce désir qui vous bousillait de l’intérieur. Cela n’avait été qu’une parenthèse dans vos vies mais depuis, tu ne jugeais pas aussi sévèrement que beaucoup l’adultère car il avait souvent des racines bien plus complexes que prévu. Et c’était à Olivia de lui en parler. Quand tu disais à Jacob que tu l’admirais, ce n’était pas une blague, c’était la pure vérité. Sa détermination à sauver son mariage, le fait qu’il ne baisse jamais les bras alors qu’il souffrait tous les jours un peu plus, c’était admirable à tes yeux. A sa place, tu n’aurais jamais tenu aussi longtemps. Ta fuite en France au retour de ton frère en Australie en était la preuve. Tu n’étais pas fait pour affronter les situations difficiles même si tu t’améliorais à ce niveau-là. « Tu peux pas dire ça… » Bien sûr que si tu pouvais le dire. Tu savais pourquoi Jacob t’avait répondu cela mais il s’était retenu d’en dire plus parce qu’il savait déjà ce que tu lui aurais répondu. Il n’avait pas tué sa fille, c’était un accident. Il devait en exister des dizaines d’accidents ainsi dans le pays toutes les semaines, c’était tragique mais cela ne faisait pas de lui un assassin. Et tu en voulais à Olivia de faire peser sur ses épaules ce poids, peut-être inconsciemment d’ailleurs. Tu joues de nouveau parce que c’est ton tour alors que Jacob te dit : « Le soir de notre anniversaire, oui, on a un peu parlé. Elle n'a pas voulu de notre dîner, finalement. » Tu ne peux retenir une petite grimace. Tu te souviens de l’étonnement de Jacob que sa femme n’annule pas le dîner et de l’espoir que tu avais vu naître en lui. Un espoir qui était mort dans l’oeuf apparemment puis qu’Olivia n’en avait encore fait qu’à sa tête. « J’ai appelé son ami pour qu’il s’occupe d’elle et elle m’a rejoint dans la soirée, on a pu se parler, un peu. Ça n'avait rien d’une discussion, rien d’une dispute, c’était… à notre image. Un pas en avant, deux pas en arrière. Je n'ai pas envie de me projeter et de me dire que c’était une réelle avancée, je le saurai que dans quelques jours.. ou semaines. » C’était aussi ça le problème avec Olivia, c’était que son comportement était irrationnel, il était impossible à comprendre pour une personne hors de son cerveau et Jacob ne pouvait pas se projeter, jamais. Pour toi qui aimais bien prévoir des choses à l’avance, ce serait une frustration supplémentaire. « Je suis vraiment désolé Jacob. » Lui dis-tu le plus sincèrement du monde alors qu’il reprenait sa place pour jouer à son tour. Une fois qu’il eut joué, il ajouta : « Mais ne parlons pas de ça, il y a trop à dire et on a dit qu’on passait une bonne soirée. » Tu hoches la tête alors que tu joues à ton tour, manquant ton coup. Effectivement, mieux vaut changer de sujet de manière définitive, ce sera bien mieux. Laissons Olivia hors de ce bar. « Et nous allons en passer une très bonne. A ton tour. » Lui dis-tu en désignant le billard. Pas de doutes, vous allez enchaîner les parties tout en rigolant et en parlant de tout et de rien. Il n’y avait rien de mieux pour se changer les idées !
@Jacob Copeland |
| | | | | | | | a hard day's night (jacob) |
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