Je venais a peine de quitter Daniel après qu'il se soit excuser auprès de moi et que j'ai accepté ses excuses, que je me retrouve à tenter de me frayer un chemin à travers une foule qui est posté devant une tribune. Les gens ont du mal à se pousser et je crois avoir senti plus de trois pieds se faire écraser par mes roues. Tant pis pour eux, leur propriétaires avaient cas se décaler. Pour ma part, je souhaite simplement gagner l'autre bout et tenter ma chance au chamboule tout … mais le destin veut que je n'y parvienne pas.
Alors que je me retrouve presque au bout de la masse, j'entends le modérateur hurler qu'il veut voir le « jeune brun en fauteuil roulant sur scène pour représenter une équipe ». Je m'immobilise et, comme un con, regarde autour de moi. Il n'y a pas grand monde qui soit en fauteuil roulant. Je regarde vers la tribune d'un air hésitant puis me pince les lèvres et soupire lorsque l'homme me presse de le rejoindre «Allez vient, n'ai pas peur ! On est là pour s'amuser » Sentant tous les regards se poser sur moi, je n'ai qu'une envie: disparaître. Mais je ne peux pas ce faire. On m'a déjà remarqué.
Je suis donc bien obligé de m'avancer vers la tribune. Là, je lève mon regard vers le modérateur qui ne met qu'une seconde à comprendre. « Que quelqu'un vienne l'aider, bon dieu » s'exclame-t-il dans son micro. Instantanément, cinq hommes m'entourent, empoigne mon fauteuil et me transporte, assit sur la tribune. J'avoue me sentir un peu honteux mais les remercie quand même chaleureusement avant de rouler vers l'homme et me présenter à sa demande.
« Ce sera donc Nathan Potter qui va défier Jamie Keynes ici même, sur cette scène ! Un grand applaudissement pour ces deux courageux !»
Tandis que la foule explose en un bruit assourdissant, je me penche un peu en avant et croise le regard dudit Jamie. Je lui sourit et lui fait un signe de main tout en formant un « salut » silencieux avec ma bouche.
« En avant le brun ténébreux, grimpe sur scène ! » J'ai fort envie de simplement m'évaporer dans l'air. Disparaître. Mais Daisy est bien trop heureuse de voir mes joues virer au pourpre pour s'échapper avec moi. Mon assistante, malicieuse, arrache mes churros chéris de mes mains et me pousse dans le dos pour que j'avance vers la scène avec un large sourire innocent. Je la fusille du regard. Traîtresse. Elle sait à quel point j'ai ce genre de choses en horreur. Ce n'est pas la tribune, la foule ou les regards qui pourraient me faire peur. C'est ce petit rectangle noir débordant de câbles qu'on appelle une console. Moi, les jeux vidéos et les bonhommes en pixels, nous n'avons jamais été en bons termes. Je ne m'entends pas avec la technologie de manière générale, mais cette boîte, là, est la pire de toutes. Je ne lui ait jamais trouvé d'intérêt, même il y a dix ou vingt ans. A croire que j'ai toujours été vieux jeu, à préférer me noyer sous les pages des livres de l'époque Victorienne. De fait, je fais partie de cette catégorie de personnes qui, non seulement n'ont quasiment jamais touché une manette de leur vie, mais trouvent que cela rend abruti et légumineux. Daisy me pousse encore une fois, d'une pression de mouche entre les omoplates -mais le message passe quand même. Fort bien, j'y vais. Je grimpe sur l'estrade. J'ai même droit à des applaudissement de la part de tous ces gens qui ne voudraient surtout pas être à ma place. Dans le public, l'animateur choisit un adversaire et porte son dévolu sur un garçon en fauteuil roulant. Je le sens au moins aussi gêné que moi -mais sûrement pas pour les mêmes raisons. Laborieusement, on le fait monter sur la scène. Nous nous saluons silencieusement, pendant que l'animateur lance joyeusement ; « Et maintenant, les costumes ! » Mes yeux s'arrondissent immédiatement. Nope, je n'ai pas entendu ça. « Pardon ? » L'homme se met à rire, sachant très bien ce qu'il s’apprête à nous infliger -à son expression, il en jubile d'avance. « C'est le jeu ! Avant de commencer la partie, vous allez tous les deux enfiler ces très beaux costumes. » Il apporte les déguisements, toujours aussi fier. « Qui veut être Mario ? » Silence. Nathan et moi nous regardons du coin de l'oeil, loin d'être rassurés. Le déguisement m'est quasiment jeté dans les bras, et l'autre sur mon adversaire. Heureusement pour lui, rien de trop compliqué à enfiler ; une casquette grotesque, un faux nez surmontant une fausse moustache maintenus par un élastique autour de la tête, et un t-shirt en trompe l'oeil pour la salopette. Au point où nous en sommes. J'arbore le tout et, me voyant dans l'écran derrière nous, je retiens un rire. D'accord, c'est ridicule, mais drôle.
C'est dans ces moment là que je me dis que je donnerais vraiment ma vie pour pouvoir marcher. Je suis sûr que si j'avais été un bipède normal, ce modérateur ne m'aurait sans doute jamais choisi. Un fauteuil roulant c'est tellement pas discret. Enfin, peu importe. Maintenant que je me retrouve sur cette scène je ne peux tout simplement pas faire demi tour. De toute manière, je suis littéralement pris au piège, étant donné que je ne peux pas descendre de la tribune sans risquer de me briser le cou. Donc, voilà. En plus lorsque j'apperçois la console de jeu je suis quand même un peu plus à l'aise. Avec un peu de chance on va devoir se faire un parti de jeu, ce Jamie et moi.
Et effecctivement, lorsque le modérateur sort les déguisement, j'additionne 1+1 et sens un sourire se peindre sur mon visage. Console de jeu + déguisement de mario et Luigi. Obligé, Jamie et moi allons devoir se faire une partie de Mario Card. Ce serait tellement génial! Le seul qui arrive à me tenir tête c'est Daniel. Enfin, peut-être que Jamie est aussi du genre Geek qui joue en cachette? A sa tête, je ne pense pas. Mais les apparences sont souvent trompeuse. Enfin. Je me retrouve donc là, a devoir enfiler un t-short avec motif de salopette, un gros nez avec une moustache en dessous et un chapeau vert. Je lance un coup d'oeil à Jamie et sourit, amusé. Il est ringard en plombier rouge, lui. Mais je ne me moque pas, je ne suis pas bien mieux à vrai dire. D'ailleurs, un coup d'oeil en arrière et je nous apperçois sur un grand écran. Génial. Au moins tout le monde nous verra! Bref.
Le modérateur nous dit de nous avancé. Je roule vers eux et, arrivé devant Jamie je lui tend la main pour le saluer avec un sourire. « Mesdames et Messieurs ! Jamie et Nathan vont s'affronter sur une piste de Mario Card ! » il nous lance un coup d'oeil d'oeil. « Voici les règles: celui qui gagne les trois courses, gagne cette peluche donkey kong et la nouvelle Xbox avec le jeu qui va avec, évidement» Je regarde vers les cadeaux et me mordille sur la lèvre inférieure, essayant de cacher un peu ma joie. Mais mes yeux brillant doivent surement me trahirent. Soit.
Je regarde vers Jamie puis à nouveau vers le modérateur qui reprend la parole. « Je vais lancer une pièce pour savoir qui commence. Celui qui commence, pourra choisir la piste sur laquelle vous allez disputer la première course.» il nous regarde tous les deux. « près? Pile ou face?» je regarde la pièce puis hausse les épaules « Face » déclarais-je après une petite hésitation.
L'homme regarde vers Jamie qui n'a pas d'autre choix que je prendre pile, puis lance la pièce. Il vérifie le côté puis fait un pas en arrière. « Et c'est Nathan qui commence !» il se tourne vers moi «Alors mon graçon. Tu choisi quelle piste? Ah non, chut, ne dit rien, je veux garder le suspens ! » il désigne la console « Allez installez vous là et prenez une manette» je roule vers l'écran et attrape les deux manettes. J'en tend une à Jamie qui ne semble vraiment pas enchanté d'être ici. Boh, il s'amusera bien quand même. Je pense.
Je me place face à l'écran et commence à choisir. Evidement, je prend luigi, normal. De toute manière c'est celui que je choisi toujours donc mon déguisement me convient totalement. Puis je choisi la piste. Et je ne fait pas dans la faciliter. « Pfiouuuh! Nathan a donc choisi la Rainbow Bridge pour première piste! » s'exclame le modérateur « Il veut donc y aller directement avec force et non faire dans la facilité et assurer une première victoire? Eh bien, soit. » il se tourne vers mon adversaire « Près Jamie? Allez, installe toi, ce sera plus agréable que d'être debout» reprend-t-il en désignant une chaise.
Je regarde vers Jamie et lui fait un sourire désolé « sorry » soufflais-je. Je veux juste mettre toutes les chances de mon côté. Il me faut cette Xbox!
Gros nez et moustache sur le visage, je ne ressemble à rien. Le garçon non plus. Ce qui nous met sur un certain pied en matière de ridicule. Moi et mon allergie à la technologie faisons un effort pour nous prêter au jeu, l'air le moins réfractaire possible. Les prix m’intéressent bien peu. J'ai passé l'âge des peluches, et cette X-chose n'aurait pas la moindre utilité chez moi. Par principe, je préférerais gagner. Je suis mauvais joueur, mauvais perdant ; très mauvais compagnon de jeu de manière générale finalement. Je sais bien que je n'ai pas la moindre chance face au jeune homme, qui, comme tous les garçons de son âge, doivent passer des heures et des heures devant trois écrans en même temps -smartphone, ordinateur et télévision, le combo ultime-, paquet de chips d'un côté, pizza de l'autre. J'essayerai tout de même de faire de mon mieux. Ne serais-ce que pour éviter l’humiliation -comme si elle était évitable. Je reste légèrement en retrait, silencieux, alors que l'animateur lance une pièce pour déterminer qui choisira la piste de la première course. L'honneur revient à Nathan. Je m'assied à côté de lui, attrapant la manette qu'il me tend. Le temps qu'il choisisse le décor de la piste, j'inspecte l'objet entre mes doigts. Quatre boutons de chaque côté, quatre gâchettes, deux joysticks. Dix commandes en tout à apprendre dans la seconde pour espérer faire avancer mon personnage. Mission impossible. Le garçon jette son dévolu sur un décor déconseillé aux épileptiques, bourré de couleurs, la piste faisant bien mal aux yeux. Et d'après le commentaire de l'animateur, cette première course sera laborieuse. « Même pas un peu de compassion pour ton aîné ? » je lance à Nathan avec un sourire. Lui me jette un regard faussement désolé. Si seulement il savait à qui il a affaire, il ne se donnerait même pas ce mal pour avoir cette console. Je ne sais même pas sur quel bouton appuyer pour faire avancer ce minuscule bidule à roues. Mais d'abord, je dois choisir un personnage. Je reconnais le petit obèse dont j'ai hérité de la casquette et ne cherche pas plus loin. Ca sera donc Mario. Une bestiole donne le top départ. J'appuie complètement au hasard sur les touches de la manette, priant pour aller vers l'avant. Le kart recule d'un coup, passe par dessus bord et tombe dans un néant de couleurs fluo. J'appuie mon visage dans une main, riant. « Quelle calamité. » C'est peu de le dire. Mon véhicule réapparaît sur la piste. C'est reparti. J'enfonce la croix, et le kart s'avance. Amen. L'engin commence à filer, ce qui me contente déjà bien, même en dernière position. « Ok, c'est bon, je tiens le bon bout. » Une poignée de mètres plus tard, allant bêtement toujours tout droit, je sors à nouveau de la piste. Ah oui, tourner, ça peut être bien aussi. Abruti. J'ai mon permis depuis des années, et ça ne m'a même pas effleuré qu'il puisse y avoir des virages. Une course plate, oui, logique. Je secoue négativement la tête ; irrécupérable, Jay. « Eh bien, je sens que tu auras rapidement gagné. » dis-je à mon adversaire en pole position, loin devant. Ses doigts pianotent agilement sur la manette avec une précision et une maîtrise folle. Moi, à côté, je suis plus ou moins en train d'appuyer sur tous les boutons en même temps. Troisième essai. Forcément le bon. Je respire profondément. Je n'ai vraiment pas la patience naturelle nécessaire pour ce genre de choses. Cette fois, je réussis à prendre la main, aller relativement vite, et ne pas tomber dans les fossés. J'arque souvent un sourcil quand je vois une banane sur la route, un looping sortant de nulle part, des carapaces en orbite autour des autres personnages, et ce dinosaure vert pomme à la voix héliumisée. Tout ce jeu ressemble à un trip douteux d'une bande de jeunes sous hallucinogènes. Une licorne géante pourrait traverser l'écran que cela ne pourrait même plus me surprendre. Passant à travers un cube flottant -parce que les lois de la physique, la gravité, ce genre de choses, c'est vraiment surfait- je récupère un objet. Là encore, j'appuie sur tous les boutons en même temps. Un éclair frappe tous les concurrents, les rapetissant -aucune logique là-dedans, mais admettons. « Oh ! Ca, c'est intéressant ! » je m'exclame malgré moi, façon ermite venant de découvrir l'eau courante. Mon kart file, explose une nouvelle boîte ; mon personnage se met à briller -oui, à briller, traversé par une multitude de couleurs. Une comète arc-en-ciel qui écrase de tout petits ennemis, et vient ravir la première place à la casquette verte quelques mètres avant la ligne d'arrivée. « Jamie gagne ce premier round ! » Bah dis donc. J'hausse les épaules, n'ayant absolument rien compris à ce qu'il vient de ce passer. « La chance du débutant. » dis-je à Nathan avec un regard aussi perdu que désolé. « C'est à ton tour de choisir la piste ! » Pour ce que j'y connais, à mes yeux, tous les décors sont les mêmes. Mais je fais mine de réfléchir, histoire de ne pas passer pour le dernier des idiots choisissant une piste complètement au hasard. Je sélectionne finalement la première option qui m'inspire plus ou moins., sans grande conviction. « C'est parti sur la Route Clair de Lune ! »
Je n'ai jamais aimé être sur le devant de la scène. Je n'ai jamais aimé être ainsi exposé aux yeux d'un publique bien trop nombreu à mon goût. Encore plus depuis que je suis en fauteuil roulant. J'ai limite honte d'avoir besoin d'aide pour monter sur la scène. Mais bon, le ridicule ne tue pas, apparement, non? De toute manière, le ridicule est encore d'avantage mis en avant par nos costumes respectif. Mais, lorsque j'apprends ce qu'on peut gagner, je met de côté mon malaise. Une xbox avec un jeu ! Et une peluche en bonus. Si c'est pas trop magnifique ça, sérieux ! En plus j'adore ce jeu quoi. Ainsi donc, sans hésiter je choisi la piste Rainbow Bridge qui est sans doute la plus difficile mais que je maitrise bien, en général.
Je dis en général parce que là, aujourd'hui je me rétame méchament. Tout avait pourtant super bien commencé. J'ai été en première place pendant bien 3 tours. Mais au debut du 4ème tour j'enchaîne les fautes. Des fautes de débutants quoi. Je tombe 5 fois du pont, je ne prends pas les accélératoires et, pour finir, j'me prends un éclair dans la gueule qui rend mon kart tout petit. C'est grâce à ça que Jamie prend la tête et finit par gagner cette course. Je met assez longtemps à réagir fixant longuement l'écran comme si je n'arrivais pas à croire ce qui vient de se passer devant mes yeux. Moi, si assuré au début, je ne le suis, d'un coup, plus du tout. Bien au contraire. Je me suis fait ratatiné par jamie qui semble pourtant être le pire des débutants.
Je me reprend pourtant assez rapidement et sourit à mon adversaire en haussant les épaules lorsqu'il me dit que c'est la chance du débutant. « Possible. Mais c'était une belle course, bravo » je ne suis pas non mauvais joueur hein. Faut pas exagérer non plus.
Au final, c'est à Jamie de choisir une piste. Il choisi la Claire de lune. Une Piste qui a l'air assez simple au premier abord, mais qui, dans un second temps, montre pas mal de pièges quand même. Bref, challenge accepted. Nous gardons, évidement, les mêmes personnages et je me concentre. Je fais un mauvais départ et c'est, en jurant entre mes dents, que je me lance à la poursuite de Jamie qui, dès le départ prit la main. Et c'est grace au canon que je parviens le dépasser. Je reprend donc ma position normale et habituelle et fini la course en premier. Heureusement d'ailleurs, sinon je m'en serais horriblement voulu !
A la fin, je me redresse, prend une profonde inspiration et relâche la manette. C'est, en la posant sur mes genoux, que je me rends compte à quel point j'étais crispé. Mais peu importe. « 1 à 1 !» s'exclame le modérateur en se tournant vers le publique. « Alors les mec, près pour une revanche?» j'échange un coup d'oeil avec Jamie et nous hochant simultanément la tête [color=darkgreen « Aloooors ! C'est au publique de choisir une piste ! »[/color] il regarde un peu les têtes devant lui puis désigne une jeune fille, une blonde, debout devant la scène « Toi, viens nous rejoindre »
Timide comme pas possible, elle hésite mais, finalement, prends appuie sur la scène et, avant agilité, grimpe dessus. Elle s'approche doucement du modérateur, lui donne son nom et sourit, mal à l'aise « OK ! C'est donc Charlotte qui va dire à Jamie et Nathan sur quelle piste se déroulera leur dernière course »
Charlotte nous regarde tour à tour puis attrape ma manette. Je la lui laisse et l'observe choisir avec adresse la nouvelle piste. Le manoir. Un sourir se dessine sur mes lèvres. Bon choix. « Merci » souriais-je lorsqu'elle me rend la manette. Je regarde Jamie « T'es près pour la dernière course?»
Moi gagnant une course dans un jeu vidéo. On aura tout vu. C'est assez improbable, mais qu'importe, mon ego de parfait petit novice en la matière sait apprécier ce court moment de gloire. La chance du débutant, comme je le dis à Nathan. Rien de plus. Je ne m'attends pas à gagner une autre course, il faut être réaliste. Le garçon n'a pas eu de chance, mais il reprendra vite la main. C'est d'ailleurs ce qu'il prouve sur le seconde circuit. J'ai tout loisir d'amèrement regretter mon choix ; cette piste est semblable à une véritable route, bourrée d'autres voitures et de camions qu'il est nécessaire d'éviter tout au long de la course, tantôt dans une ville, parfois sur ds pans de route aussi sinueuses qu'en montagne, le tout en pleine nuit. Un véritable cauchemar. L'audience à de quoi se demander si je n'ai pas eu mon permis dans une pochette surprise (et de prier pour ne jamais me croiser en voiture un jour) tant j'enchaîne les fautes, les accidents, les collisions. Je redeviens la catastrophe naturelle que je suis en matière de jeux vidéos, terminant bon dernier, quelque chose comme trois minutes après tout le monde -de quoi montrer à quel point la course a été laborieuse pour moi. Je meurs de chaud sous cette casquette, ce nez en silicone et ce t-shirt supplémentaire. « Bravo ! » je lance à Nathan en passant mon avant bras sur mon front. Mon regard glisse sur les spectateurs. Je trouve mon assistante, Daisy, qui a su se glisser jusqu'au premier rang. Elle a dégainé son téléphone, histoire d'immortaliser ce moment de honte. Un large sourire étire ses lèvres. Je lui tire la langue depuis l'estrade. Vile petite brune. C'est la petite blonde à côté d'elle que l'animateur choisit de faire monter sur la scène pour sélectionner le prochain décor. Un manoir hanté. « Prêt à manger une pâtée supplémentaire. » je lui réponds en riant. Je ne me fais pas d'illusions. Au final, cette course s'apparente plutôt à une balade pour moi. Je ne fais pas de grosses erreurs, je me débrouille même plutôt bien, mais trop occupé à me dire que l'environnement en pixels est quand même fort joliment fait, je vais de peau de banane en peau de banane, tombant dans pas mal de pièges. Nathan gagne encore sans trop d'efforts, et, pour ma part, je défends une honorable troisième place. De quoi tenir en laisse l'éternel mauvais perdant qui sommeille en moi. « Et c'est Nathan qui gagne cette rencontre, 2 à 1 ! » Nous abandonnons les manettes et nous nous rejoignons auprès de l'animateur pour nous serrer la main -et, dieu merci, nous débarrasser de ces affreux accessoires. Je passe une main dans mes cheveux pour réduire un temps soit peu l'étendue des dégâts. Le garçon récupère ses prix, l'air absolument ravi. Sous quelques applaudissements, nous quittons l'estrade. J'aide quelques mains supplémentaires à descendre le fauteuil roulant de mon adversaire de la scène jusqu'à ce que les roues touchent à nouveau l'herbe. Daisy ne tarde pas à nous rejoindre, collant un baiser sur ma joue puis sur celle du garçon. J'attrape un churros du cornet qu'elle tient entre ses mains et le tends à Nathan. « Cadeau supplémentaire, du vaincu au vainqueur. » Je m'abstiens de lui dire que ce fut une belle partie, ou toute autre phrase pouvant me faire passer pour le geek que je ne suis pas. Mon assistante me fait remarquer qu'elle doit partir. Je me tourne vers Nathan et ses cadeaux jonchant ses cuisses. « Je raccompagne la demoiselle chez elle, je te dépose aussi ? »
Première course perdue. Deuxième course gagnée haut la main. J'ai subitement repris confiance en moi. Parce qu'être battu sur la piste Arc en ciel, m'a quand même mit un coup au moral. Jusqu'à présente, il n'y que Daniel qui a réussi à me battre sur cette piste. C'était ma piste de prédilection! Alors, tandis que Jamie choisi la nouvelle course, c'est une sacré remise en question qui s'est installé en moi. Mais peu importe. Je gagne la seconde et la troisième est aussi assez facile quand même. Du moins, est-ce ce que je pense. Je préfère ne pas m'avancer de trop de peur d'être à nouveau déçu.
Je me concentre donc tout au long de la course, j'ignore tout ce qui est autour de moi et ne fait qu'un avec mon kart. Et au final, c'est moi qui gagne. Encore. La seconde fois! Ce qui signifie donc que je gagne les prix! C'est avec un très large sourire totalement ravi qu'attrape les cadeaux avant de serrer la main du modérateur. Au final, on m'aide de nouveau à descendre de l'estrade. C'est là qu'une jolie blonde nous rejoint. Elle colle un bisou sur la joue de Jamie puis sur la mienne ce qui me fait un peu rougir. Je lui souris tout de même, reconnaissant, avant d'attraper le churros que l'homme me tend. « J'pourrais te donner la peluche si tu veux, mais je ne pense pas que ça t'intéresse» rigolais-je avant de mordre dans le churros. Je le garde en bouche et me tourne, tentant tant bien que mal d'attraper le sac qui est accroché aux poignets du fauteuil avant de soupirer doucement.
« Par contre, tu veux bien me rendre un service s'il te plait?» demandais-je à l'attention de Jamie en reprenant le churros en main « Tu veux bien essayer de fourer le tout dans le sac à dos là?» reprenais-je en désignant ledit sac à dos.
Je regarde, le désolé, avant qu'il ne me demande s'il peut me déposer quelque part. Je me mordille la lèvre inférieure, hésitant. Puis-je réellement lui demandé de me ramener à la maison? J'avoue que ça m'arrangerais fortement. J'hausse les épaules et me passe une main dans les cheveux « Hm … eh bien si tu passes par le quartier de Redcliff je veux bien » déclarais-je finalement « Mais sinon ce n'est pas grave hein! Je veux dire, je ne veux pas que ça te fasse un détour ou que ça te dérange ...» ne pouvais-je m'empêcher d'ajouter.
En échange du churros, Nathan propose de me donner la peluche gagnée avec la console de jeux -en sachant pertinemment que je n'en voudrais pas. Je ris doucement et prends la dernière gourmandise pour moi. Daisy jette le cornet un peu plus loin. « Non, c'est vrai. J'ai déjà une énorme peluche en forme de lion provenant de la fête foraine pour décorer mon salon. » dis-je en songeant au pauvre tas de coton déchiqueté que la pauvre bestiole deviendra quand Ben réussira à mettre la patte dessus. Mon chien est une inarrêtable boule d'énergie avec un certain attrait pour la destruction de tout objet à base de textile, dont les oreillers et mes vestes lorsqu'elles ont le malheur de tomber du porte-manteau. Je m'avais jamais trouvé le temps ou l'occasion de rendre la peluche à Joanne, et au final, je l'avais laissée chez moi. Comme un souvenir du superbe après-midi que nous avions passé ici, ainsi qu'une mémorable soirée dans un bar où elle avait enfin eu l'occasion de me voir bien alcoolisé. Nathan se contorsionne pour attraper le sac à dos qui orme les poignées de son fauteuil roulant. Le fronce les sourcils, interrogateur, jusqu'à ce qu'il formule sa demande et que je comprenne où il veut en venir. « Bien sûr, je m'en occupe. » A vrai dire, Daisy m'aide -l'utilité d'avoir son assistante avec soi. Je cale mon churros entre mes dents, et pendant qu'elle maintient le sac ouvert, je glisse la boîte contenant la X-chose ainsi que la peluche à l'intérieur. La fermeture éclair se fait un eu capricieuse, mais au bout de quelques secondes, je repose le sac plein à l'arrière du fauteuil. Le jeune homme accepte ma proposition de le raccompagner chez lui -bourrant sa phrase de marques de politesse de et de gêne à gogo. « Ne t'en fais pas, ça ne me dérange absolument pas. Daisy vit aussi à Redcliff. Tu m'indiqueras la route. » dis-je avec un clin d'oeil. La jeune femme, serviable, se propose de pousser le fauteuil de Nathan s'il le souhaite. La voiture se trouve à quelques mètres, sur le parking. Nous la rejoignons en un rien de temps. Installer le garçon est relativement laborieux, mais nous parvenons à caser le fauteuil dans le coffre, et lui sur le siège avant. Afin d'éviter le silence dans la voiture, j'allume la radio que je laisse à un niveau sonore très bas, avant de demander ; « Alors, tu nous viens de quel coin de l'Angleterre ? » Il ne doit pas être si surpris que ça par ma question, je suppose. Nous avons un accent assez similaire, et ce n'est certainement pas un accent typique du coin. « Je sais reconnaître un compatriote à son accent. Heureusement que le mien survit. » j'ajoute avec un sourire. Après tout, travailler dans une radio à destination d'un public australien pourrait m'obliger à m'adapter et faire disparaître le mien. Mais toute personne me connaissant sait que cela est absolument hors de question. « Tu es en Australie pour les études ? » A vrai dire, je n'ai pas la moindre idée de l'âge que peut avoir Nathan. Il m'a seulement l'air très jeune. En quelques minutes, nous arrivons au pied de l'immeuble de Daisy. Elle descends donc de l'Audi et nous adresse un signe de main à l'extérieur. « A demain ! » je lance à son intention avant que m'occuper du jeune homme.
J'ai gagné les deux courses et en plus ce Jamie me semble être quelqu'un de vraiment très gentil. Je ne crois pas qu'il soit du genre mauvais perdant car en plus de m'offrir un churros, il me propose de me déposer chez moi. Il est vrai que ça m'arrangerait pas mal je dois dire. Mais j'ai toujours peur d'être un boulet et que ça les dérange, au final. Mais, non. Pas Jamie. Après m'avoir aider de fourrer la peluche et la boite contenant la xbox dans mon sac à dos et l'avoir accrocher aux poignets, il me dit de le suivre. Daisy, le jolie blonde, se propose gentiment de pousser mon fauteuil mais je refuse poliment. J'ai beau ne plus pouvoir utiliser mes jambes, mes bras sont encore totalement fonctionnel et j'essaie au minimum de solliciter l'aide des gens.
C'est ainsi que je me roule à leur côté jusqu'à la Audi du monsieur. Une grande voiture. C'est parfait. M'installer sur le siège passager est assez simple. Mais Jamie et Daisy galèrent un peu à plier mon fauteuil, même sous mes explications mais au final il est rangé dans le coffre. La jeune femme prends place sur la banquette arrière. En route, Jamie décide de faire la conversation en me demandant de quel coin de l'angleterre je viens. Je lui lance un coup d’œil, étonné, avant de sourire quand il explique savoir reconnaître un compatriote. «L'accent, je suppose? » lui demandais-je «C'est ce qui me trahis toujours » expliquais-je en souriant, amusé «Je suis né et j'ai grandis à Cambridge. Je ne suis à Brisbane que depuis … 1 mois, plus ou moins » continuais-je.
Lorsque nous nous arrêtons pour laisser sortir Daisy, je la salue, la remercie encore une fois pour le churros et lui fait un signe de la main. En partant, Jamie souhaite savoir si je suis venu ici pour mes études. Je rigole doucement «Ah non, non loin de là. J'avais commencé des études de journalisme à Cambridge mais j'ai arrêté parce que ;.... enfin parce que la vie en a décidé autrement, dirons nous » je me tais, serrant un instant mes poings sur mes cuisses avant de reprendre contenance et relever le regard vers Jamie « Mais je commence un stage en tant que Webmaster chez ABC demain. Tu connais? J'en ai entendu que du bien je dois dire. J'ai surtout entendu que le rédac' en chef doit être assez cool comme gar ...» j'hausse les épaules « Enfin on verra bien demain » Et je suis loin de me douter que c'est justement ce gar là qui est entrain de rouler la voiture dans laquelle je me trouve. Jamie est un prénom assez commun, aussi, donc j'ai une bonne excuse.
Nathan m'annonce être né à Cambridge. Je ne peux pas m'empêcher de sourire largement. J'ai énormément de souvenirs de cette ville, l'université. J'y ai rencontré James, un ami qui m'est cher, ainsi que mon ex-femme, Enora. J'y passais la semaine, et rentrais à Londres tous les vendredis après-midi. A cette époque, Cambridge était là où je me sentais le mieux, et je descendais à la capitale à contrecœur pour retrouver mes parents, ma vie d'aristocrate. Je retrouvais Kelya aussi, ce que j'appréciais quand même. Et quand je le pouvais, je voyais Madison. C'était une période mouvementée, oui. Pleine de souvenirs. Puis Nathan m'explique qu'il n'est pas à Brisbane pour les études. Qu'il n'avait pas terminé ses étude de journalisme -je devine, à cause de l'accident qui l'a collé dans un fauteuil. Ne m'attardant pas sur son handicap, je continue de sourire. « C'est un sacré hasard. » dis-je, gardant mon attention sur la route. « J'ai moi-même fait mes études à Cambridge. Des études de journalisme également. » Je me demande combien de chances il pouvait y avoir de tomber sur un jeune ayant le même parcours universitaire que moi dans le même établissement dans une fête foraine à l'autre bout du monde. Non, plus encore. Combien y avait-il de chances pour tomber sur le futur stagiaire d'ABC que je dois accueillir demain dans la rédaction ? Je fais tout mon possible pour ne pas me mettre à rire, ou sourire trop largement afin qu'il ne se doute pas de mes pensées -et encore moins de mon identité. Ah ça, hors de question de lui dire qu'il se trouve actuellement dans la voiture de son futur patron. Je ne demande qu'à voir sa tête demain lorsque nous serons de nouveau face à face. « Je connais oui... » dis-je, l'air crédule. Qui ne connaît pas la plus grosse chaîne d'Australie, après tout ? Que ce soit pour la télévision ou la radio, ce sont trois lettres incontournables dans le paysage audiovisuel australien. Encore une fois, je m'empêche de trop sourire lorsque le jeune homme avoue avoir entendu parler en bien de moi. C'est diablement flatteur, à vrai dire. Je me mords la joue, faisant mine d'être particulièrement concentré sur la route lorsque je tourne à un carrefour. « Eh bien, j'espère que ce qu'on dit est vrai. » je réponds en haussant les épaules. « Tu as de la chance d'y entrer en tout cas, c'est une sacré chaîne. » j'ajoute, toujours aussi naïf, lui adressant un rapide sourire encourageant. Après quelques minutes, nous arrivons en bas de l'immeuble qu'il m'indique. « Nous y voilà. » Je remarque qu'il s'agit du même où vivent Madison et Sophia. Là aussi, sacré hasard. Je sors de la voiture en premier et sors le fauteuil roulant du coffre. Il est beaucoup plus simple à déplier, et je ne tarde pas à le présenter à Nathan qui se transfère seul hors du siège passager. Ce garçon doit en avoir dans les bras. Je referme la portière derrière lui et nous échangeons une poignée de main pour nous dire au revoir. J'hésite énormément à lui dire « à demain », mais j'ai peur de gâcher la surprise. Alors je me contente d'un ; « Ca a été un plaisir, Nathan. Bon courage pour ton stage. » avant de retourner derrière le volant de la voiture. Un dernier signe de main, et je redémarre, direction chez moi. Souriant encore face à tant de coïncidences.