17 Mars 2020
Cette date que tu connais plus que par coeur. Cette date qui te rappel le dernier souffle de Rosa dans tes bras. Cette date qui montre que la vie continue malgré tout, car l’année a pris un digit de plus au compteur. Cette date… le 17 mars. La St Patrick. Cette date qui est fêté en Irlande surtout mais que toute la Terre reprend en choeur pour avoir une excuse de plus de faire la fête. Cette date qui est affiché partout dans les newsletters que tu reçois. Cette date qui est juste impossible de passer à côté quand elle arrive. Mais en même temps, ça te dérange pas, parce que ça fait juste une raison de plus de penser à elle. Pas comme si c’était déjà le cas à quasi tous les instants de tes journées quasiment. Il se passe pas un jour sans qu’elle soit dans tes pensées. Il est vrai que ça t’a fait bizarre la première fois que c’est Murphy que tu as eu en tête au réveil.

Mais aujourd’hui c’est le 17 mars et t’as rien de spécial de prévu alors tu es allé passer la journée chez Maria. Dans l’après midi t’as envoyé un SMS à Jacob s’il veut venir boire un verre avec toi ce soir. C’est pas anodin. C’était même prévu depuis le début de la journée que tu lui envoies ce message. Vous avez fait ça l’année dernière déjà. Apparemment ça devient une tradition silencieuse. Cette journée qui marque un si grand virage dans ta vie comme la sienne. Rien à voir avec ta maison. Vos liens ont changé depuis ce jour là. Depuis mars 2018. Une éternité et hier en même temps. Dans ce bar ce soir, vous prenez place sur la terrasse parce qu’il fait bon malgré l’été qui touche à sa fin. T’es en jeans avec un hoodie. Relax.

« Je paie la première tournée. » Parce que y’en aura certainement plus qu’une. T’es pas du tout dérangé de te mettre la mine. Vous êtes à Fortitude Valley, t’habite pas loin. Il le sait. Il connait aussi bien ta maison que toi. Il sait aussi que y’a une chambre d’amis s’il a besoin de crasher. Il est le bienvenue. Pas besoin de le dire. Pas besoin de dire grand chose en vérité, tout est implicite entre vous. Tout est simple. Tout est lié à la mort aussi. L’histoire de ta vie encore et toujours. Y’a une chanson de Cindy Lauper qui passe en fond et ça te fait sourire. « Fun fact. Quand j’étais petit on m’a fait croire qu’une de mes tantes était Cindy Lauper. Genre elle avait eu trop de succès avec Girls just want to have fun et elle a arrêté la chanson. Je l’ai cru longtemps. Cindy Lauper c’est ma tante pour toujours dans mon coeur. » Ca te fait marrer mais c’est la pure vérité.

@Jacob Copeland

Le vert. Une couleur que Jacob a toujours portée dans son cœur : c’est celle des uniformes des militaires, celle des sapins que l’on décore à Noël, celle des pommes acidulées. Enfant, il aimait à dire que c’était sa préférée, et il était toujours content de lui-même quand il portait une tenue dans ces tons-là. Il disait que l’on ne voit pas le monde en noir et blanc uniquement pour cela : parce que les couleurs parlent, transmettent des émotions. Le rouge exprimait sa colère, le noir retranscrivait ses plus gros doutes, le bleu lui donnait un côté rêveur et le vert, lui, le faisait se sentir vivant. Vivant, il ne l’est plus. Plus depuis deux ans. Plus depuis que cette couleur est portée par toutes les personnes qu’il croise, le seul jour où il aimerait que le monde se plonge dans l’obscurité. Du noir, du blanc, du gris, quelques tâches par-ci, par-là. Pas de vert, pas de rose, rien de pétillant, rien de festif, et surtout pas de fête célébrée mondialement. Et pourtant, le dix-sept mars, il y a la saint patrick. Il y a toutes ces personnes avides de bières, de musiques et de vert. Du vert, partout. Il y a deux ans de cela, quand tout le monde trouvait sa part irlandaise en lui dans les rues de Brisbane, Jacob était à l’hôpital. Jacob apprenait la plus triste nouvelle de sa vie, celle qui l’a fait voir le monde de manière un peu plus terne chaque jour. Celle qui a laissé place aux mauvaises herbes dans son jardin fleuri, là où y avait du vert dans tous les recoins. Celle qui l’a détruit, et qui année après année continue de le hanter. Il a perdu sa fille, sa princesse, la deuxième femme de sa vie. Peut-être la première, l’amour d’un père surpasse tout ; comme l’amour d’une mère. Si Olivia ou lui avaient dû choisir entre sauver l’un ou l’autre et June, June serait toujours de ce monde, et l’un des deux élèverait leur enfant en solitaire. Sauf que le choix, ils ne l’ont pas eu. Il n’a pas été le seul, ce jour-là, à perdre l’une des femmes de sa vie. Jordan a fait face à la faucheuse lui aussi, et les deux hommes ont su se soutenir au fil des années. C’est la deuxième fois qu’ils se retrouvent à cette date, pour continuer de se souvenir, bien qu’ils ne puissent jamais l’oublier. Pour lutter contre les fêtards, pour que la commémoration soit éternelle. Oui, il reste avec Olivia un maximum de temps durant cette journée, mais elle ne veut pas de sa présence et il n’a pas besoin de son absence. Alors, il fuit avec Jordan, loin de tout, loin d’elle : ils vont boire un verre, puis deux, puis trois. Brûler une heure, puis deux, puis trois. Ils ne parleront pas de June, ni de Rosa. Ils ne parleront pas des larmes qui menacent de tomber au coin de leurs yeux, ils ne parleront pas de l’entaille qui s’est agrandie dans leur poitrine. Ils trouveront tous les sujets du monde, et peut-être même qu’ils regarderont un défilé de la saint patrick sur la télévision du bar. C’est une messe silencieuse, une présence qu’ils s’apportent l’un à l’autre sans jamais le mentionner. Je paie la première tournée. Il a pas une soif légendaire, mais il paiera les prochaines sans rechigner. Parce qu’il a les moyens, et qu’il n’a pas envie de compter, ce soir. Fun fact. Quand j’étais petit on m’a fait croire qu’une de mes tantes était Cyndi Lauper. Genre elle avait eu trop de succès avec Girls just want to have fun et elle a arrêté la chanson. Je l’ai cru longtemps. Cyndi Lauper c’est ma tante pour toujours dans mon coeur. Un aveu de la part de Jordan, qui lui prouve une fois de plus que Rosa ou June ne franchiront pas leurs lèvres. Cyndi Lauper, c’est bien mieux. Il sourit en entendant son anecdote, avant de hausser ses épaules. À ta place j’aurai cherché son numéro sur internet et j’aurai insisté en lui disant que ça peut être que vrai. À tous les coups tu gagnes un bel héritage à la fin, si tu te la joues suffisamment groupie. Il secoue sa tête. On a tous envie d’avoir des liens avec Cyndi Lauper, non ? Sûrement. Il attrape son verre, le premier de la soirée, et le tape légèrement dans celui de Jordan. À Cyndi Lauper. Ils ne sont pas là pour trinquer, ni pour fêter, mais c’est vrai que c’était tentant.

@Jordan Fisher

Sourire sur les lèvres de Jacob. Ca te fait plaisir de voir que tu lui as arraché. Au fond de toi tu te dis toujours que c’est plus compliqué pour lui que pour toi. De base, tu te dis que t’es pas à plaindre, mais si. T’as juste eu plus de temps pour gérer la situation dans laquelle tu te trouves maintenant. T’as eu un avant goût pendant huit années avant que ta Rosa ne s’éteigne complètement après s’être réveillé le temps d’un mois. C’est pas facile, mais tu gères plus que très bien à ton sens. Tu continues à vivre et à profiter des moments. Tu te le permets. À ta place j’aurai cherché son numéro sur internet et j’aurai insisté en lui disant que ça peut être que vrai. À tous les coups tu gagnes un bel héritage à la fin, si tu te la joues suffisamment groupie. Tu lâches un gros rire en l’entendant. Tu sais clairement quoi faire pour jouer les groupies.À Cyndi Lauper. Il fait tinter son verre avec le tiens.

« A Tante Cyndi. » Tu dis ça tout aussi solennellement que lui avant de boire une gorgée de ton verre. Tu te fais rire tout seul avec tes conneries. Il t’en faut peu vraiment. T’es bon public. Tu regardes les gens qui vont et viennent sur la rue piétonnes. Tu aimes tellement cette rue pleine de vie, pas de voiture. Ca c’est un point important. T’aimes tellement pas ces machines là. Tout ce qui a des roues qui servent à se déplacer, si tu peux éviter, tu le fais.

« J’ai faillit me retrouver dans une embrouille y'a quelques jours… » Et tu lui racontes ce gars qui est entré en volant des billets de spectacle à un couple. « Clairement un pro pickpocket le gars. » Tu dis pas ça pour l’accablé. Nope. T’es plutôt très impressionné par ses capacités. T’en es incapable alors que ça t’aurais bien arrangé à certains moments de galériens de ta vie. T’essaies d’ignorer que la chanson qui vient de suivre c’est 'Wherever you will go'. Nope. Nope. On va pas expliquer à Jacob que ce n’est pas une chanson d’amour, mais une chanson sur quelqu’un qui est mort. Alors tu continues ton histoire, lui racontant que le gars t’as dragué ouvertement - t’aimes bien cette partie là.

« C’est parti en couilles quand on est sorti. » Tu fais un facepalm parce que vraiment, t’en reviens pas comment les galères viennent à toi comme des abeilles sur du miel. Tu en arrives au moment où y’a deux gars bien baraqué qui vous ont arrêté dans une ruelle. « Il avait un couteau putain… » Sérieux, comment tu fais pour te retrouver dans ces plans Jordan ? Poissard. « Mais attend attend, c’est pas ça le plus drôle. » Drôle ? A quel moment c’est drôle ça Jordan ? « Le plus drôle c’est que le gars, Ash quelque chose. Il les connaissait !! Ils ont commencé à se demander des nouvelles sur leurs familles je te jure. J’ai halluciné. Une blague le truc. » Tellement fou que si tu avais voulu l’inventer, tu n’aurais même pas pu. Aucune idée où tu voulais en venir avec ça. « Enfin bref… Je pensais à ça parce que c’était au Music Hall qu'il nous a fait rentrer. » Qui est juste à quelques mètres de votre terrasse là.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, Jacob n’a jamais cessé de sourire. Il souriait avant que son accident se produise, quand il a emmené sa fille au cinéma, voir un film dont il ne se rappelle que quelques scènes. Il lui souriait quand ils sont arrivés à l’hôpital, pour la rassurer, pour lui faire comprendre qu’il était avec elle et que tout irait pour le mieux. Il souriait à Olivia quand ils sont rentrés de ce même hôpital – leur fille en moins – peut-être pour la rassurer, elle aussi, pour qu’elle comprenne que tout irait pour le mieux. Même si ce n’était pas le cas. Et il a continué de sourire ainsi ; à tout le monde, tout le temps. C’était une façade, une protection, un signal d’alerte qui hurlait à qui voulait l’entendre « je vais bien, laissez-moi tranquille ». Et n’importe qui pouvait l’entendre, et tout le monde finissait par le comprendre. C’était le cas il y a deux ans, ça n’a pas changé depuis. Il lui arrive pourtant de sourire avec sincérité. Ses lèvres s’étirent en un sentiment plus joyeux, et tout semble légèrement plus coloré ; il est toujours vivant. Il était un bon vivant avant la mort de sa fille, il se contente d’être un survivant depuis son départ. Mais en vie, il l’est, et il se sent l’être aux côtés de Jordan. Il n’a pas besoin de faire semblant, il n’a pas besoin de se forcer : ce garçon lui apporte une dose de bonheur qu’il ne saurait s’expliquer. Peut-être parce qu’ils partagent la même tristesse, peut-être parce qu’ils sont là uniquement pour se relever mutuellement. Il ne sait pas, mais il sourit, et c’est sincère. À tante Cindy. Et les verres s’entrechoquent – les premiers d’une longue liste. Ce qui est bien avec Jordan, c’est qu’en sa compagnie, le silence n’a jamais le temps de s’installer. Et que si Jacob n’a rien à dire de particulier, le jeune homme à ses côtés semble avoir une multitude d’anecdotes à raconter à chaque fois qu’ils se voient. Et ça plaît à Jacob, ça. Parce qu’il sait que c’est lié à leur différence d’âge : onze années, ce n’est pas rien. Même s’il lui reste beaucoup à vivre et même s’il a déjà beaucoup vécu, il n’a plus la même nécessité de raconter tout ce qu’il s’est passé ces dernières semaines, ces derniers mois, ces dernières années. C’est quelque part au plus profond de sa mémoire, et les questions mèneront à des réponses. Le silence, ça s’apprend, et Jordan est encore loin d’avoir acquis cette aptitude. Mais ça fait du bien. Il lui raconte une rencontre, une altercation. Tout s’est bien terminé, mais tout aurait pu être différent. Il a eu de la chance. Il a toujours de la chance, quand il lui raconte une histoire. À chaque fois, sauf concernant Rosa, parce que s’ils sont là tous les deux, c’est que la roue a tourné un jour et que leur bonheur s’est fait la malle. Enfin bref… Je pensais à ça parce que c’était au Music Hall qu’il nous a fait rentrer. Coup d’œil en direction de la salle de spectacle, puis il se reporte vers Jordan. T’as déjà pensé à écrire des scénarios de films ? Il sait qu’il est dans le domaine de la musique, pas dans celui du cinéma. Avec tout ce qui t’arrive, tu pourrais être le prochain Hitchcock. Il hausse ses épaules, c’est juste une idée comme ça. Je sais qu’il y a des gars qui font des rêves et qui s’imaginent faire un film avec ça, mais toi ce serait encore mieux, tu pourrais écrire au début : issu d’une histoire vraie. De quoi faire vendre. Enfin, je dis ça, je dis rien. Nouveau sourire, et il boit dans son verre. Avec des « si » on refait le monde, lui, il veut lui refaire sa carrière.

@Jordan Fisher

Ton regard qui reste plus longtemps que nécessaire sur le Music Hall de l’autre côté de la rue piétonne. Tu penses toujours au jour où peut être tu joueras là bas en ton nom mais tu n’oses pas croire en toi à ce point là. Tu ne sais pas si tu serais capable d’assurer un show de la sorte seul. Tu ne sais même pas si les gens payeraient pour venir te voir. Pourrait être en première partie. Vrai. Mais tu sais pas si tu franchirai le pas si toute fois l’opportunité se présentait à toi. T’as déjà pensé à écrire des scénarios de films ? Tu sors de tes pensées en l’entendant. Tu refais focus sur Jacob. Tu te demandes pourquoi il dit ça d’un coup. Avec tout ce qui t’arrive, tu pourrais être le prochain Hitchcock. Oh. Ok tu comprends un peu mieux mais t’avais jamais pensé à écrire quoi que ce soit sur ta vie.  Je sais qu’il y a des gars qui font des rêves et qui s’imaginent faire un film avec ça, mais toi ce serait encore mieux, tu pourrais écrire au début : issu d’une histoire vraie. De quoi faire vendre. Enfin, je dis ça, je dis rien.

« Hmmm… Pas sûr que mes histoires intéressent beaucoup de monde. T’es juste poli et tu me connais alors ça te fait rire en imaginant ma gueule au milieu. » Ca te fait rire aussi. Tu te fais souvent rire. Tu te fais souvent halluciner quand tu repenses à des trucs qui te sont arrivés. Des trucs assez incroyable. T’as pas mal voyagé dans ta vie. Le milieu de la musique réserve plein de surprises parfois. Jacob n’en connait pas le dixième de toutes les histoires que tu pourrais lui raconter. Peut être qu’il a raison. Tu le regardes, pensif.« C’était quand tes dernières vacances ? » Tu marques une brève pause avant de reprendre. « Des véritables vacances où tu prends l’avion ou tu roules pendant au moins sept heures. Pas juste des jours de congés où tu restes chez toi sans travailler. » Quelque chose te dit que même sans être en congé il doit avoir quelques jours où il reste chez lui sans travailler pour autant. « Parce que je te parie que si on file quelque part ensemble, tu vas en avoir aussi des histoires à raconter. » T’as quelques idées de destinations déjà, mais tu n’exposes pas toutes tes idées déjà. Tu veux pas qu’il prenne peur à toute l’inspiration qui te vient là. Un trip avec lui ça peut être méga fun. Histoire de vous changer encore plus les idées. Surtout lui. Parce que ouais, t’as un genre de vacances en tête qui ne sera rien qu’il a déjà connu dans sa vie. Ce sera quitte ou double.

@Jacob Copeland

Il lui dépeint des rêves qui ne sont pas les siens : devenir producteur, scénariser ses histoires, ses rêves, tout ce qui lui arrive d’inédit, tout ce qu’il lui raconte toujours avec la même passion, comme s’il revivait l’instant à chaque fois qu’il mettait des mots dessus. Des rêves qui ne seront jamais les siens, d’après sa réponse. Hmmm… Pas sûr que mes histoires intéressent beaucoup de monde. T’es juste poli et tu me connais alors ça te fait rire en imaginant ma gueule au milieu. Il a peut-être raison, mais ce n’était pas l’idée de Jacob au départ : s’il a dit ça, c’est qu’il le pense. Tant pis s’il ne prend pas l’opportunité, après tout, il peut se contenter de conter ses histoires, il trouvera toujours l’oreille attentive de son nouvel ami. Il hausse ses épaules, finalement, avant de sourire. T’as peut-être raison. Il baisse les armes, n’insistera pas. Il n’y voit pas l’intérêt, ils ont mieux à faire que de discuter de projets qui ne verront pas le jour. Même s’il vaut mieux tirer des plans sur la comète et prévoir le futur plus qu’ils ne peuvent se le permettre, plutôt que de briser un moment de silence pour s’aventurer vers le passé et ce qu’ils ressentent tous les deux. C’était quand tes dernières vacances ? Il fronce les sourcils face à cette question : il n’en a aucune idée. Des véritables vacances où tu prends l’avion ou tu roules pendant au moins sept heures. Pas juste des jours de congés ou tu restes chez toi sans travailler. Eux aussi, ils sont rares. Très rares. Inexistants depuis deux ans, il ne voit pas l’intérêt de rester chez lui quand il se sent mieux ailleurs. Ça doit faire sûrement plusieurs années. Il n’est jamais parti en voyage avec June, il n’a pas pris l’avion avec elle, ni le train, ni la voiture durant de longues heures. Il y avait des vacances chez ses parents, chez le père d’Olivia, il y avait quelques regroupements avec Lex et Marius, mais rien de plus. Ses dernières grandes vacances doivent dater du début de sa relation avec Olivia, avant que son travail ne prenne une ampleur mondiale et avant que les responsabilités de sa compagne ne deviennent trop importantes. Parce que je te parie que si on file quelque part ensemble, tu vas en avoir aussi des histoires à raconter. Une phrase lui suffit pour se mettre à rêver, pour se mettre à y croire : lui et Jordan, loin de tout, loin des problèmes, loin du malheur de l’Australie. Une semaine, peut-être deux. Ou quelques jours seulement. Juste un peu de temps pour oublier, pour se créer des souvenirs et arrêter de penser qu’il a perdu sa fille, arrêter de penser que Jordan a perdu sa femme. Tu voudrais aller où ? Il demande, comme si c’était acté, comme s’ils prévoyaient réellement de partir tous les deux, quelque part. Il a largement les moyens, Jacob, et se séparer quelque temps d’Olivia lui ferait du bien. Pour mieux revenir. Quand on s’en va, c’est toujours pour mieux retrouver sa place après. Et tu voudrais y faire quoi ? C’est important, ça aussi : les activités. Est-ce que Jordan est du genre à vivre au jour le jour, en vacances, ou est-ce qu’il suit un programme bien précis ? Jacob a beaucoup trop l’habitude de tout prévoir pour se laisser vivre le parfait inconnu, mais remis entre les mains de Jordan, il en serait peut-être capable. Il est curieux, et ça se voit dans son regard : le sujet l’intéresse réellement, cette fois-ci, plus que les deux autres évoqués quelques minutes auparavant.

@Jordan Fisher

T’as peut-être raison. La vérité c’est que toi même tu sais pas non plus. T’es toujours du genre à pas croire en toi malgré ce que tu as réussi à faire de ta vie. Jacob tient peut être là l’idée d’une nouvelle tangente de ta vie qui pourrait être intéressante à exploiter. Mais tu n’y penses pas. Ta vie est déjà bien remplie et tu t’accroches à un rêve que tu vis déjà. Un vie professionnelle que tu n’aurais jamais pu espérer. Qui est là et pourtant, t’y crois pas. Par contre un truc que tu veux bien croire c’est des vacances à tous les deux. Ça doit faire sûrement plusieurs années. Il n’avait même pas besoin de répondre tu le savais déjà. Tu comprends tout à fait. C’est normal. Alors t’as envie de lui changer les idées comme tu peux. En mélangeant ce qui pourrait lui faire du bien à ton avis. Toi et tes conneries avec un voyage ailleurs. Lui changer son environnement complètement. Le faire devenir partie intégrante de ces histoires de fou que tu lui racontes de temps à autre. Tu voudrais aller où ? Tu as piqué sa curiosité. Tu essaies de ne pas sourire trop largement. Tu veux juste que ce soit normal. Que ce soit un plan comme un autre. No big deal. C’est un big deal. La vie de Jacob a besoin d’un grand vent d’air frais. Et tu voudrais y faire quoi ?

« Y’a beaucoup de possibilités de pays et de villes. » T’as quand même une idée derrière la tête. C’est pas non plus toutes les villes. « En Europe principalement ça peut être très bien. Y’a quelques festivals qui me font de l’oeil qu’on peut caser au milieu de notre voyage. » Tu ne dis pas que t’as des potes qui participent à ces festivals. Ils ne seront pas le centre du voyage. Ils seront juste un stop, une soirée, un weekend avec Jacob et toi. Tu ne comptes pas le lâcher du tout. Ce voyage c’est pour vous deux, pas juste pour toi.« On peut même faire plusieurs pays. Tout est possible. » Tu sais que Jacob n’est pas en manque d’argent et qu’il peut si il veut. « Mes derniers voyages c’était tout pour le boulot. Cette fois j’ai bien envie de prendre le temps de visiter genre l’Italie ou l’Irlande. » Tu bois une gorgée avant de reprendre la parole. « T’as une destination qui te fait rêver? » T’espères vraiment qu’il va oser dire, qu’il va se laisser entraîner dans ton idée assez folle quand on y pense mais que ni lui ni toi n’allaient regretter, c’est sûr. C’est déjà le meilleur voyage de 2020 dans ta tête et vous avez encore rien mis sur papier.

@Jacob Copeland

Y’a beaucoup de possibilités de pays et de villes. Ce n’est pas un secret pour Jacob, ça. Il sait que la Terre est grande, immense. Et qu’il faut bien plus d’une vie entière pour visiter le monde et ses recoins, les villes et ses secrets, les patelins et ses habitants plus originaux les uns que les autres. Il rêverait de se plier à la coutume de peuples qu’il n’a pas l’habitude de côtoyer, de se transformer en un véritable habitant d’une autre nation le temps de quelques jours. Mais il n’a pas le temps pour tout ça, habituellement : ses voyages à l’étranger sont pour les affaires, et il reste dans un hôtel où l’on parle sa langue la plupart du temps, entouré d’hommes qui viennent du même milieu que lui. Il ne se mélange jamais aux autres et, avec du recul, il se rend compte qu’il a perdu quarante ans de sa vie à faire la même erreur. En Europe principalement ça peut être très bien. Y’a quelques festivals qui me font de l’œil qu’on peut caser au milieu de notre voyage. Et tu as des exemples ? Demande-t-il, curieux. L’Europe, il ne connaît pas très bien. Il n’y a rien qu’il connaît vraiment très bien, en fait. Il n’y a que Brisbane et les villes aux alentours, parce que c’est ici qu’il a bâti son empire, pas ailleurs. On peut même faire plusieurs pays. Tout est possible. La perspective de milliards de possibilités plaît à Jacob. Il s’imagine se téléporter d’un endroit à un autre, de boire un coup quelque part et de prendre son café à l’autre bout du monde. Évidemment, c’est impossible. Mais c’est l’effet que ça lui fera, s’ils partent vraiment tous les deux : les maîtres du monde, pour quelques jours. Mes derniers voyages c’était tout pour le boulot. Cette fois j’ai bien envie de visiter genre l’Italie ou l’Irlande. Il sourit en pensant à l’Irlande. Il paraît qu’il y a de belles choses à voir en Irlande. En Italie aussi, ceci dit. Il y a tellement à découvrir passé les frontières australiennes. C’est une remarque qu’il se fait à lui seul, à haute voix. T’as une destination qui te fait rêver ? Il regarde Jordan un instant, comme s’il n’avait pas le droit de répondre à cette question. C’est ce que son père lui aurait dit quelques années plus tôt, lui interdisant de mettre des mots sur son envie, bien enfouie au plus profond de lui-même, interdite à tout jamais : il a pourtant aujourd’hui des agences implantées là-bas, mais il n’y est jamais allé par lui-même. C’est pas l’Europe, tu m’excuseras. Je rêve d’aller à New York. Il hausse ses épaules. Je sais que ça fait cliché mais… Il soupire légèrement. Je suis né là-bas. J’ai grandi et j’ai toujours vécu à Brisbane mais mes parents sont américains, à la base. Ils ont voulu déménager à ma naissance pour me protéger et j’ai jamais eu le droit d’y aller en étant jeune, et j’ai toujours gardé l’interdiction en tant qu’adulte. Mais je veux voir d’où je viens. C’est un peu bizarre, parce que Jacob sait qui il est, il ne recherche pas ses racines, n’a pas de problème dans sa tête ou dans son corps. Il veut juste voir sa ville natale, les gens, ceux avec qui il aurait grandi s’il n’y avait pas eu toutes les menaces liées au métier de son père. Je suis très loin du rêve américain, j’ai pas envie d’avoir tout ce qu’ils disent posséder dans les pubs ou à la télé. Mais ça me plairait bien, si vraiment je dois te donner une destination, ce serait là-bas. Il le regarde un instant. Mais l’Irlande ou l’Italie, ça m’irait très bien ! Peu importe, tant qu’ils partent loin d’ici, tant qu’ils profitent et qu’ils oublient un peu la vie qu’ils ont ici. Une semaine, une petite semaine pour refaire le monde et l’envisager sous de nouveaux angles. Cette idée lui plaît bien trop pour ne pas se mettre à la considérer sérieusement, il ne rigole plus, là. Il parle comme si c’était un véritable projet, acté, comme s’ils allaient le faire sous peu.

@Jordan Fisher

Tu mentionnes quelques pays et il réagit d’un sourire. C’est parfait, ça continue bien. Il a l’air d’aimer ce que tu exposes. Il paraît qu’il y a de belles choses à voir en Irlande. En Italie aussi, ceci dit. Il y a tellement à découvrir passé les frontières australiennes. Ah oui ça c’est sûr. Tu hoches la tête pour confirmer ses dires. T’as pas mal voyager dans ta vie mais y’en a encore tant que tu n’as jamais vu. T’as très envie de t’incruster sur toutes les futures tournées de Bring Me The Horizon. T’as faillit le faire l’année dernière. T’aurais dû. Mais t’avais quelques projets qui te prenaient du temps. Le boulot passe avant. Peut être qu’il faudrait que tu bosses un peu plus sur une station mobile Jordan, afin de bosser même sur la route. Yep… C’est pas l’Europe, tu m’excuseras. Je rêve d’aller à New York. Tu souris en l’entendant. Tu comprends bien l’attrait. La première fois que t’y as mis les pieds tu t’en souviens parfaitement. L’impression d’un rêve. Ce pays qui est impressionné mais qui quand on y réfléchit un peu plus, est carrément terrifiant. Sûrement pour ça que ça te plaît. L’amour du risque. T’es fucked up. Je sais que ça fait cliché mais… Je suis né là-bas… Tu l’écoutes narrer son histoire dont tu n’avais aucune idée. Ca fait plaisir de l’entendre raconter des trucs lui aussi. Y’a des chances que ce soit le plus paragraphe qu’il t’ait jamais dit d’un seul coup depuis que vous vous connaissez. Tu kiffes. Je suis très loin du rêve américain, j’ai pas envie d’avoir tout ce qu’ils disent posséder dans les pubs ou à la télé. Mais ça me plairait bien, si vraiment je dois te donner une destination, ce serait là-bas. Tu comprends carrément ce besoin qu’il a d’aller à New York.  Mais l’Irlande ou l’Italie, ça m’irait très bien ! Un léger rire sort de tes lèvres.

« Je regarde les billets pour New York ce soir. En juin y’a le Warped Tour à Atlantic City, c’est pas loin. On fera un tour sur la côte, tu conduis ? Parce que moi je conduis pas. On prendra un Uber sinon. En plus ils roulent de l’autre côté là bas. » T’as déjà beaucoup de trucs qui te viennent en tête.« Combien de temps t’es prêt à quitter Brisbane? Faudrait au moins deux semaines ou dix jours pour pas qu’on ait à se presser. Le festival c’est juste une journée. Ca te fera un aperçu tranquille, pas un weekend ou trois jours complet avec camping. » Tu ris en parlant de camping. « Je plaisante on aurait pas fait de camping de toute façon. » T’es peut être devenu une petite princesse avec tes sous Jordan. Nan. Mais ouais c’est relou le camping. « On peut compter trois jours pour le passage à Atlantic City. Plus si tu veux visiter ce coin là. Et le reste à New York. » Tu hoches la tête, tu t’y vois bien déjà à te balader en ville avec Jacob, vous arrêtez boire un coup en terrasse pas loin d’un parc. Des vacances chill avec un bon pote. Ca te fait grave rêver. T’as aussi bien besoin de déconnecter de ta routine.

C’est vrai que contrairement à Jordan, Jacob n’expose pas trop sa vie. Il raconte peu de choses sur lui, peu d’histoires extravagantes comme les siennes. Des deux, il est loin d’être le plus loquace. Il a ses moments où il aime bavarder, évidemment, mais quand il est en compagnie de cet homme, il se retient : pour le laisser parler, parce qu’il semble toujours avoir quelque chose à raconter. À croire qu’il déteste le silence, il ne sait pas. Il lui avoue donc quelle aurait été la destination de ses rêves s’il avait réellement le choix : New York, parce qu’il est né là-bas et qu’il n’y a jamais mis les pieds. Ils ont déménagés peut-être un mois après sa naissance, il a construit toute sa vie à Brisbane et se sent pleinement Australien, mais pourquoi pas aller y faire un tour. Je regarde les billets pour New York ce soir. En juin y’a le Warped Tour à Atlantic City, c’est pas loin. On fera un tour sur la côte, tu conduis ? Parce que moi je conduis pas. On prendra un Uber sinon. En plus ils roulent de l’autre côté là-bas. Il n’avait pas pensé à ça. Il hausse ses épaules. Je suppose que je peux prendre le pli rapidement. Ce sera d’autant plus amusant si on va nous-mêmes d’une destination à une autre, je pense. C’est fait, c’est décidé : ils vont partir. Reste plus qu’à parler des petits détails, du temps qu’ils vont passer là-bas, du prix qu’ils sont prêts à payer, de toutes les choses qu’ils aimeraient voir. Ils vont s’en aller un peu, profiter et revenir. Combien de temps t’es prêt à quitter Brisbane ? Faudrait au moins deux semaines ou dix jours pour pas qu’on ait à se presser. Le festival c’est juste une journée. Ça te fera un aperçu tranquille, pas un weekend ou trois jours complet avec camping. Il tente de visualiser tout ça dans son crâne : et ça se passe plutôt bien. Il ne sait pas combien de temps il est prêt à partir. Il ne s’inquiète absolument pas pour ses agences, il sait très bien que ses employés peuvent gérer en l’absence du patron. Ce qui l’inquiète, c’est Olivia. Elle est indépendante et forte, mais il n’aimerait pas la laisser trop longtemps. Deux semaines, grand max. Dit-il alors, décision prise, sans la consulter auparavant. Il fait ce qu’il veut, pour une fois. Je me vois déjà jouer au grand touriste et profiter de times square la nuit, de central park la journée. Et aller faire un tour pour voir la statue de la liberté. Il y a tellement de choses à faire, je suis assez impatient. En juin, il se répète ce mois dans sa tête comme si c’était demain. Ça l’est un peu, en vérité. Deux petites semaines en Juin, rien de plus. Ils en ont besoin tous les deux, personne ne va les blâmer d’avoir fait un tour pour voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Donc on le fait vraiment, c’est plus des suppositions ? Il a besoin d’une confirmation, qu’il le dise à voix haute : oui, Jacob, on se casse de là.

@Jordan Fisher

Je suppose que je peux prendre le pli rapidement. Ce sera d’autant plus amusant si on va nous-mêmes d’une destination à une autre, je pense. Tu hoches la tête, ravi de voir qu’il est opérationnel pour conduire. Il a assez confiance en lui même s’il faut rouler de l’autre côté. C’est un parent après tout. Pour toi tous les parents savent gérer leurs peurs parce qu’ils doivent montrer l’exemple à leurs enfants. She dead. Ouais mais il n’en reste pas moins un père pour autant. Maybe he could be my dad. Il est pas si vieux. Deux semaines, grand max. Noté. Deux semaines ce sera parfait. Fin juin début juillet. Je me vois déjà jouer au grand touriste et profiter de times square la nuit, de central park la journée. Et aller faire un tour pour voir la statue de la liberté. Il y a tellement de choses à faire, je suis assez impatient. Toi aussi. Visualiser tout ça te fait grave kiffer et ça se voit sur le sourire que tu affiches. Tu bois une gorgée de ta bière quand il reprend la parole. Donc on le fait vraiment, c’est plus des suppositions ? Tu poses ton verre.

« On le fait vraiment. » Tu aimes trop qu’il soit entrer dans ton idée folle. Faut dire que de choisir la ville qu’il veut visiter a aidé. Ca va être trop bien, tu t’y vois déjà. Tu es déjà en train de regarder ton agenda pour voir ce que t’as prévu ce weekend. Tu vas inviter Jacob chez toi pour que vous vous posiez afin de mettre en place le plus gros du voayge. Les dates de décollage et d’atterrissage. « En juin à nous New York. » Tu vas faire tinter ton verre avec le sien pour sceller tout ça comme il se doit. Tu sais d’avance que ça va être des supers vacances. Ca fait bien longtemps que tu n’en as pas fait des comme ça. Sans travail au passage. Pourquoi t’as l’impression que c’est les vacances avec ton père que tu n’as jamais eu ? N’importe quoi. Ouais ouais.