Un pas en avant puis trois en arrière, voilà le mode de vie que Timothy avait la sensation de mener ces dernières années. A chaque fois qu'il faisait les efforts pour se sortir des situations les plus délicates, il se retrouvait dans une posture plus difficile encore parce qu'il n'était pas comme tous les autres garçons. Par la force des choses, il était plus fragile, plus sensible et si on le ménageait parfois beaucoup trop, depuis une bonne année, l'effet inverse s'amusait à s'appliquer pour le faire sombrer plus profondément encore. Tim n'avait pas eu l'occasion de vivre de la plus belle des manières: il frôlait à chaque fois du bout des doigts le vrai bonheur avant qu'on ne le lui arrache brutalement. Au final, il se retrouvait seul au beau milieu du désert qu'était son existence, ses émotions sans dessus dessous qu'il n'arrivait plus du tout à gérer. C'état à nouveau ce à quoi le jeune Decastel était confronté car la conversation avec Alex avait fini par dériver sur quelque chose de plus douloureux. Ils auraient pu, en effet, continuer de parler des mille manières que l'anglaise allait choisir pour le sortir de sa zone de confort mais Tim s'était contenté de sourire en attendant de constater le résultat car il savait que la vie de son amie allait grandement changer dans les semaines à venir et qu'elle ne serait pas toujours apte à l'emmener dans des soirées sans fin. Tim n'y pensait de toute façon plus du tout dès l'instant où la réalité des faits avait frappé son cerveau: Ariane et Alex, la drogue, le retour à la case départ. Il avait bien sûr conscience que sa soeur avait un passé tumultueux, elle ne lui avait franchement rien caché lorsqu'ils s'étaient vus la dernière fois mais Tim n'avait pas imaginé une seule seconde qu'elle avait pu côtoyer sa meilleure amie par le passé. Là, il comprenait tout, le grand brun, il saisissait à quel point Ariane avait eu des moments sombres, qu'Alex y avait été entraîné elle aussi et peut être, au final, qu'il ne savait rien du tout. Ni de sa soeur. Ni d'Alex. Ni de tout ce qui était dur à vivre pour les autres parce qu'on le faisait vivre dans une bulle. Tim était fatigué d'essayer de la percer, plutôt vainement à vrai dire mais c'était toujours la panique qui gagnait face à ses douloureux efforts. Celle-ci le fit se promener en long, en large et en travers durant quelques minutes jusqu'à ce qu'il s'abandonne à sa tragédie, sentant le regard pesant de Clarke sur lui. Elle allait s'en vouloir, il la connaissait suffisamment pour avoir conscience de cela alors qu'elle n'y était pour rien. Alex ne pouvait pas être fautive de tout, encore moins du désespoir de Decastel car il en était le seul instigateur au bout du compte. Il la regarda, sentant ses doigts se balader sur sa joue pour faire taire une larme capricieuse mais Tim avait quelque peu perdu le contact avec la réalité. "Le passé, c'est aussi mon avenir, Alex." Il avait cette sensation en tout cas, même si c'était sa voix chevrotante qui avait laissé ces quelques mots s'envoler, se perdant finalement entre les bras de l'anglaise, sans pouvoir rien dire ou rien faire d'autre que de pleurer et trembler. Tim était juste fatigué de ne jamais se sentir heureux, de perdre les quelques rayons lumineux qu'on lui offrait ça et là, surtout, il avait peur de ne pas être assez pour les gens qui comptaient sur lui désormais. Pour ses enfants.
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Quelques minutes plus tôt, elle partageait avec Tim la nouvelle de sa grossesse, elle le voyait heureux pour elle, et en quelques minutes, tout s'était obscurci. L'évocation des nouveautés dans la vie de Tim, ainsi que le passé tumultueux de sa demi-soeur avaient fait flanché le Français. Alex essayait de le soutenir mais elle avait bien du mal à contenir ses propres émotions alors elle ne pouvait pas vraiment contenir celles de Tim. Elle l'avait prit dans ses bras, voulant lui apporter tout le soutien qu'elle pouvait. Et, Tim dans ses bras, Alex le sentait trembler contre elle et elle avait beau l’étreindre de toutes ses forces, ça semblait bien insuffisant pour calmer toute la peine et la douleur de Tim. C’était un déchirement pour elle que de voir son ami ainsi. De le voir aussi fragile et de ne pas être à la hauteur pour le réconforter, pour le calmer. Lui, il savait comment faire quand l’inverse se produisait. Quand c’était elle qui avait besoin d’une épaule sur laquelle pleurer. Mais elle se sentait tellement démunie, ressentant le chagrin de Tim sans pour autant être en mesure de l’apaiser. Il craquait et elle constatait que les craintes qu’elle avait ressenti pour son ami quelques temps plus tôt étaient véridiques. « J’ai connu Ariane oui, mais ça ne veut rien dire. Regarde moi, j’ai changé. Je ne suis plus la même, et je n’aurais pas du t’en parler. » Elle savait bien au fond que cette discussion sur la demi-sœur de Tim n’était pas l’unique raison qui avait poussé Tim à s’effondrer dans ses bras, mais c’était pour le moment la seule chose sur laquelle Alex pouvait influer parce que pour le reste, il lui manquait beaucoup d’éléments pour comprendre tout ce qui tracassait Tim. Sa mère. Ses craintes liés à sa peur de ne jamais être heureux, sans doute un mélange de beaucoup de choses mais Alex avait déjà fait assez de mal en évoquant Ariane alors elle voulait surtout tenter de l’aider à se calmer avant de risquer de tirer d’autres leviers dangereux. Et pourtant, elle le sentait contre elle, elle l’entendait pleurer et elle se sentait tellement émue de voir son ami pleurer dans ses bras qu’elle sentait qu’elle devait dire quelque chose, faire quelque chose, elle ne pouvait pas rester silencieuse, à genoux sur le sol de son appartement. « Tim je ne suis pas d’accord. Le passé c’est le passé. » Elle avait mit du temps à l’accepter Alex. A accepter qu’elle n’avait aucune emprise sur le passé, qu’elle ne pouvait pas le changer, pas revenir dessus pour réparer ses erreurs et changer les choses. Parce que le passé n’appartenait qu’au passé. Et s’ils pouvaient tirer des leçons du passé, ils ne pouvaient pas intervenir dessus, du moins pas directement. Alors le passé n’était définitivement pas l’avenir, ni son avenir à lui, ni son avenir à elle. Le passé devait rester là où il était surtout dans leur cas à tout les deux. « Ça ne peut pas être ton avenir. » Elle voulait lui dire qu’il n’était plus le petit garçon à la merci de sa mère. Qu’il était devenu un homme et qu’il pouvait se libérer de son passé. Qu’il avait le droit de tourner la page mais elle savait que ce n’était pas toujours une question de volonté. Ce qu’elle savait aussi c’était que vivre dans le passé empêchait souvent de profiter du présent. Et, le présent était tout ce qu’ils avaient, et le présent de Tim, même s’il n’était pas parfait, regorgeait quand même de belles choses à commencer par ses enfants. « Ton avenir c’est Willow et Gabriel. Ce n’est pas ta mère, pas ton enfance, pas le passé d’Ariane. C’est ce que tu vis chaque jour avec tes enfants. » Elle l’avait vu s’occuper de ses enfants, elle l’avait entendu lui parler de ses deux bébés, et elle ne doutait pas de l’amour que Tim éprouvait pour ses enfants. Elle connaissait assez bien Tim pour savoir qu’il ferait tout pour eux. S'il y avait une chose que Tim savait faire, c'était prendre soin des autres, donner tout son amour et son énergie pour les autres. « Tu es quelqu’un de bien Tim. Malgré ton passé, malgré toutes les souffrances, tu es devenu quelqu’un de bien et ça personne ne peut te l’enlever. Je ne sais pas ce qu'il se passe dans ta tête en ce moment, mais tu as surmonté tellement de choses, que tu vas réussir. Quelques soient les difficultés tu vas t'en sortir. » Elle avait lâché Tim, pour le regarder et tenter de capter son attention. Elle essuyait ses yeux humides qui prouvaient qu'elle n'avait pas pu retenir ses larmes. C'était Tim, et elle était bien incapable de rester insensible devant la détresse de son ami. « Je veux t'aider Tim, mais tu dois me parler. » Elle s'était levée, quittant la position inconfortable dans laquelle elle s'était mise au moment ou elle avait vu Tim craquer. Lui attrapant la main, elle l'invitait à se relever et à la suivre sur le canapé, elle n'allait pas le laisser se recroqueviller contre le mur. Elle n'allait pas le laisser se refermer, il allait devoir lui parler parce qu'après l'avoir vu ainsi, elle ne pouvait qu'être extrêmement inquiète pour l'état émotionnel du Français. Et elle se sentait aussi en colère désormais. En colère contre la vie qui continuait à malmener Tim, encore et encore.
Il ne comprenait que très rarement les raisons qui le poussaient à se retrouver dans ce genre d'états mais Tim n'avait jamais vraiment réussi à contrôler sa sensibilité. C'était peut être pire ces derniers temps car le français avait démarré une thérapie qui le mettait à fleur de peau: évidemment, le but de l'exercice résidait dans ce genre de détails mais Decastel craquait à des instants parfaitement improbables quand il donnait l'impression d'être vaillant deux minutes auparavant. Il savait pour sûr que la fatigue ne devait pas aider et avec les jumeaux qui ne faisaient pas leurs nuits, le pauvre brun se retrouvait avec des heures de sommeil tronquées quand il ne faisait pas cauchemar sur cauchemar. Le processus était forcément lent et difficile mais Timothy se trouvait déjà dans une posture où il était prêt à tout abandonner du jour au lendemain parce qu'il n'était pas à la hauteur de la tâche requise. Il pensait surtout à ses enfants, c'était ce qui l'aidait à relativiser dans cette période complexe et il remettait tout de suite un pied devant l'autre pour affronter la prochaine séance, les prochains pleurs et les nouveaux cauchemars à chaque nuit qui venait. Là, tout était différent car sa crise avait été déclenchée par de simples mots venant d'Alex, quelque chose de dérisoire et qui ne semblait pas porter atteinte sévèrement à son existence. Pourtant, Tim s'était tout de suite révélé inquiet d'apprendre les détails du passé de sa soeur, comme s'il s'en voulait encore et toujours de ne pas avoir été présent pour elle. Encore une fois, il avait ce vieux complexe du héros qui se sacrifiait pour son prochain alors qu'il était clairement temps qu'il s'occupe de lui avant d'aller voir de quelle couleur était l'herbe chez le voisin. Tim n'y arrivait pas, surtout pas quand il s'agissait de gens qu'il aimait et pour sûr, il aimait Ariane, comme il aimait Alex par ailleurs. Celle-ci fit tout son possible pour faire taire ses sanglots, le tenant fermement contre elle alors que l'ancien soldat avait du mal à reprendre son souffle pour autre chose que de nouvelles larmes. Il finirait par se calmer, par pouvoir enchaîner plus de trois mots mais pour le moment, il se contentait d'écouter les propos d'Alex, elle qui le rassurait en précisant qu'il ne s'agissait que du passé de Parker, pas de ce qu'elle était maintenant. Tim n'en avait pas la certitude parce qu'ils n'avaient pas parlé dans la profondeur de leur passé, quelques bribes ici et là, laissant de côté ce qui pouvait leur porter le plus préjudice mais Tim aurait tout encaissé. C'était sa soeur. Comme il avait pardonné à Clarke ses erreurs par le passé. Ce qui comptait, c'était sa présence ici et maintenant alors qu'elle mentionnait les jumeaux et Tim hocha fermement la tête au moment de se détacher de l'étreinte de son amie. "T'as raison, oui. Je sais que je devrais toujours t'écouter, Alex." Elle lui répétait ce qu'elle pensait de lui, dessinait un portrait courageux de sa personne en le hissant jusqu'au canapé et Timothy ne rechigna pas tellement au moment de s'y asseoir, se sentant plus fragile que jamais. "Je suis juste fatigué. Les jumeaux dorment pas beaucoup. J'ai commencé mes rendez vous chez la psy et je fais plein de cauchemars. Je suis seul aussi. C'est pas facile d'avoir dit au revoir à Charlie. Rien n'est jamais facile avec moi alors, oui, je crois que je suis fatigué mais je dois pas l'être. Pour les enfants, je dois pas l'être." Ils étaient sa priorité ultime, le jeune homme essuyant ses larmes en tâchant de s'armer d'un air plus serein et surtout déterminé car il n'était pas censé se laisser abattre, pas à mi parcours. Pas comme cela, avec Alex.
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Le voir ainsi, si fragile presque incapable de respirer prit par l’émotion trop vive qu’il semble ressentir. Alex l’a toujours su que Tim était sensible, parfois fragile, mais elle a trop souvent refusé de le voir ainsi. Parce qu’il a toujours été l’optimiste, il a toujours été celui qui consolait Alex quand elle faisait tomber le masque qu’elle s’était elle même collé à son arrivée à Brisbane. Il était là toujours. Il écoutait, il rassurait, il était comme ça Tim. Capable de faire preuve d’une force incroyable pour aider les autres, alors parfois c’était simple d’oublier qu’il avait lui aussi ses failles. Sauf qu’aujourd’hui, elles s’expriment de façon directe et Alex se sent déboussolée, perdue face à cette douleur qui se dégage de l’attitude de son ami. Elle voudrait lui tendre la main, elle voudrait pouvoir le libérer de cette souffrance mais elle ne sait pas comment s’y prendre. Et même si elle le savait, c’est ancré en Tim, depuis l’enfance, et elle ne peut pas le soulager d’un claquement de doigt, ni même d’une étreinte. Même si elle aimerait. Et à ce moment précis, quand elle le voit lutter contre une nouvelle série de larmes, elle maudit l’univers qui s’entête à venir bousculer encore et encore Timothy Decastel. Elle s’en veut aussi à elle même, de le faire souffrir encore. Et elle en veut à toutes ces personnes qui ont un jour prit un peu de Tim sans rien lui laisser. Ce qu’elle a aussi fait il y a quelques années. Elle aurait dû être là pour lui, elle n’aurait pas dû l’abandonner et le laisser seul. Elle n’aurait jamais dû faire ce qu’elle a fait mais même si elle s’en veut, elle sait que pour cette fois (au moins) elle n’est pas responsable de la détresse de Tim. C’est une bien maigre consolation, parce que même si c’est pas elle la responsable Tim souffre et c’est tout ce qu’elle peut voir en ce moment. Il souffre et ce n’est pas quelques paroles qui vont pouvoir l’apaiser. Mais elle arrive à capter son attention. Elle arrive à le faire sortir de sa bulle et a le faire parler avec elle. Assisse sur le canapé elle l’écoute se confier. Elle l’écoute parler de sa fatigue, de ses séances de psy, de ses cauchemars et de Charlie. Et elle déteste chacun des mots qu’il prononce. Elle déteste le savoir seul. Elle déteste apprendre qu’il fait encore des cauchemars. Elle déteste Charlie aussi. Tout comme elle déteste la mère de Tim. Cette dernière, Alex l’a toujours détesté mais si elle s’y connaît en parents défaillants, la mère de Tim semblait être dans une toute autre catégorie et elle avait fait tellement de mal à son fils que bien des années après Tim en souffrait encore activement. « Tu n’es pas seul. » De tout ce qu’il avait dit c’était sans doute la première chose qu’elle avait retenu. « Je n’ai pas été vraiment à la hauteur mais je suis là maintenant. Tu n’es pas seul. » Alex sait parfaitement bien ce que peut produire les effets d’une thérapie. Les souvenirs qui reviennent parfois plus vifs, plus douloureux, plus clairs aussi. Les sensations oubliées, les peurs enfouies, toutes ces choses enterrées si profondément qui reviennent à la surface sans ménagement aucun. Elle sait ça, elle connaît mais elle gère parce qu’elle n’est pas seule. Elle a son psy, elle a son groupe de soutien. Mais surtout, elle a Caleb et elle a cette grossesse sur laquelle elle concentre son énergie et ses pensées. « On laisse tomber les cartons, tu te reposes ici et maintenant. » Un ton autoritaire de la part de Clarke, elle avait bien l’intention de permettre à Tim de profiter de cet après-midi calme pour se reposer. « Comme à l’époque. Juste toi et moi, devant un vieux film à partager nos pensées. » Elle ne pouvait pas l’apaiser sur le long terme mais elle pouvait lui donner un peu de répit. Elle pouvait essayer au moins. « Et si tu veux me parler de ta thérapie, de tes cauchemars ou de Charlie, je t’écoute. » Et si à l’époque c’était plutôt elle qui profitait de ce moment pour se confier à lui, cette fois elle espérait qu’il le ferait. « Mais si tu préfères dormir un peu, je reste là avec toi et je m’occupe d’éloigner les cauchemars. » Elle ne pouvait pas faire ça, mais c’était sa façon à elle de lui dire qu’elle resterait à veiller sur lui.
Il ne s'était pas rendu compte de l'état de détresse dans lequel il se trouvait, sûrement parce que Tim intériorisait toujours tout afin de ne pas avoir à embêter les personnes de son entourage avec ses problèmes. Ce n'était clairement pas la meilleure des solutions que celle de garder tout pour soi mais c'était ce qu'il avait toujours fait, par principe. Alors, Timothy s'était armé seul à surmonter cette thérapie sans oser le dire à grand monde par peur que l'affaire ne fonctionne pas. Chaque jour semblait plus dur que le précédent ces derniers temps mais il n'osait pas lâcher les armes, pas quand le moindre effort supplémentaire donné pouvait le remettre sur pied. Il savait que tout cela était nécessaire pour pouvoir aller de l'avant, faire le deuil de toutes ces anciennes relations qui n'avaient rien donné de plus qu'un désespoir alarmant. Néanmoins, c'était dur pour Decastel de dire adieu: il n'avait franchement jamais été un spécialiste en la matière, se raccrochant toujours à ses souvenirs, comme si c'était la seule chose qui lui permettait de garder un sens à sa vie. Au fond, l'inverse se produisait: toutes ses images l'amenaient toujours un peu plus vers le bas mais Tim aimait l'idée qu'il revivait des moments connus. Il avait toujours eu peur de l'inédit, s'attendant toujours à ce que le ciel lui tombe sur la tête du jour au lendemain. Peut être qu'aujourd'hui était ce moment là, le jeune brun s'affalant sur le canapé aux côtés d'Alex, sans pouvoir rien faire de plus qu'écouter les paroles réconfortantes de son amie. Celle-ci répétait à quel point elle n'avait pas été à la hauteur par le passé et Tim hocha la tête en signe de dénégation car, à ses yeux, elle avait fait tout ce qu'elle avait pu pour tenir le coup. Pour être à ses côtés et ne pas le laisser tomber. Evidemment, Clarke ne pouvait pas le voir ainsi puisqu'elle était partie à l'autre bout du monde en laissant sa vie derrière elle mais Tim avait vite oublié le mal que tout cela lui avait fait lorsqu'elle était réapparu au beau milieu de son cimetière. "Tu veux mettre quel film?" L'ancien soldat parla tout à fait machinalement, comme si c'était normal de poser cette question en pleine situation de crise. Cependant, il ne pleurait plus. Pas pour le moment. Il avait écouté les mots d'Alex et il avait pris en compte toutes les alternatives qu'elle lui proposait, sans savoir laquelle serait la meilleure. Toutes, non? Timothy posa donc sa tête sur l'épaule d'Alex, instinctivement, ouvrant la bouche sans savoir ce qui allait en sortir. "Elle est là toutes les nuits. Ma mère. Alors, je reste sur une chaise à côté des enfants quand ils sont à la maison pour les protéger." Il avait peur pour eux. Si peur. Tout le temps. "Et j'ai des regrets. Plein. J'ai perdu tellement de temps à courir après des fantômes, à croire en quelque chose qui n'a jamais été réel parce que... Charlie m'a jamais aimé. Personne m'a jamais aimé." On lui avait fait croire, autant sa mère que celle de ses enfants et c'était sûrement ce qui faisait le plus mal dans l'affaire. Qu'on ait joué avec son coeur, qu'on continuait à le faire en toute impunité alors qu'il était déjà à terre. Inerte. A bout de coeur.
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La tête de Tim posée sur son épaule, Alex écoutait son ami se confier lui qui ne le faisait que très rarement. Elle l’écoutait parler de ses cauchemars, de cette mère qui continuait à hanter ses nuits et sa vie et elle avait l’impression de pouvoir le comprendre, un peu trop bien. Elle se souvenait de ses propres cauchemars, ceux dans lequel elle revoyait sa mère, les traces de la corde visible autour de son cou lui reprocher de l’avoir abandonné. Elle et ce bébé sans visage. Elle les déteste. Les cauchemars, mais aussi leurs mères. La sienne, et celle de Tim. Elle déteste cette situation, elle déteste aussi d’être si impuissante. Parce qu’elle ne peut rien face aux cauchemars. Elle ne peut rien face aux traumatismes laissés par une enfance chaotique. Prenant la main de Tim dans la sienne, elle se contente de la serrer un peu, dans un geste qui se veut amical et soutenant. Et elle pourrait lui dire que sa mère n’est pas là, que les jumeaux ne craignent rien, et que tout ça ce n’est pas réel mais il le sait sans doute déjà. Il le sait comme elle savait que ce n’était pas sa réellement mère dans ses cauchemars mais il y a des chose qui marquent, des choses qui déstabilisent et elle sait que la mère de Tim fait partie de ces choses là. Et elle ne pouvait rien y faire, juste être là pour lui, devant le premier film qu'elle avait trouvé sur Netflix, un film banal qui donnait surtout un prétexte pour se poser ensemble. Mais Alex avait bien trop d'inquiétudes pour réellement s'intéresser au film. Et l'inquiétude et la colère d’Alex n’allait pas diminuer alors que Tim se livrait sur la fin de son histoire avec Charlie. Cette fille lui aura donc tout prix. C’était dur pour Alex d’entendre Tim dire qu’il n’avait jamais été aimé. Et pourtant elle avait fait partie de ces gens aussi. Ceux qui n’avaient pas su respecter les sentiments de Tim. Elle l’avait aimé à sa manière, pas comme il fallait, pas comme lui l’avait aimé à l’époque mais elle tenait à lui et elle ne pouvait pas le laisser penser que personne ne l’aimait. « Ne dis pas ça Tim. » Elle avait dit ça avec un ton autoritaire faisant comprendre à Tim qu’elle n’appréciait pas qu’il se dévalorise autant. Elle repensait aux mots de Tim, à ses confidences, à tout ce qu'il venait de dire. « Les regrets ça ne peut rien t’apporter de bons, à part te faire douter, et t’empêcher de savourer l’instant. Ne gâche pas ton temps à ressasser le passé. » C’était presque ironique venant d’elle ce genre de phrase mais elle le pensait sincèrement. Parce que Tim avait encore beaucoup de belles choses à vivre s’il se donnait le droit de les vivres. « Acceptes d’aller de l’avant, petit à petit, à ton rythme mais renonce pas.» Il avait prit sa vie en main, il avait parlé de sa thérapie, de son envie d'aller mieux pour ses enfants et Alex ne pouvait que le pousser à ne jamais abandonner. Malgré les difficultés elle devait le soutenir et même si elle ne savait pas comment s'y prendre, elle essayait encore et toujours. Le soutenir, le rassurer, dédramatiser, l'amuser, elle faisait comme elle pouvait avec ses moyens limités devant la détresse de son ami. « Je ne suis pas au meilleur de ma forme mais si tu as besoin que je règle son compte à ta mère ou à Charlie je le ferais. Et avec plaisir en plus. » Deuxième fois qu’elle proposait ses services, et si elle le disait avec un certain humour, au fond d’elle, elle n’aurait pas été contre l’idée de pouvoir envoyer son poing sur le visage de la mère de Tim. Elle avait eu envie à l’époque et elle en avait toujours envie aujourd’hui. Peut-être encore un peu plus tant elle pouvait ressentir toute la douleur que Tim portait en lui encore aujourd’hui. « Mais plus sérieusement Tim. Ta mère est enfermée, elle ne peut rien contre toi, elle ne peut rien faire aux petits, ne lui laisse pas avoir du pouvoir encore. Prends le contrôle, fais ce qu’il faut pour qu’elle n’ait plus jamais aucune emprise sur ta vie. » Et si vis à vis de Charlie et de la relation de Tim avec la mère de ses enfants, Alex avait bien peu de chose à dire, ayant de toute façon déjà prit partie depuis longtemps pour le Français jusqu'à en venir aux mains avec l'Australienne. En revanche, elle en avait des choses à dire sur la mère de Tim. « Tu as essayé d’aller te confronter à elle une bonne fois pour toute ? Si tu veux je peux t’accompagner. » Et la elle était sérieuse en proposant à Tim de l’accompagner. Parce qu’il ne pouvait définitivement pas continuer à enchaîner les nuits trop courtes gâchées par des cauchemars encore et encore. Il ne tiendrait pas à ce rythme et elle ne le laisserait pas s’enfoncer encore plus sans tenter de l’aider. De le soutenir. « Je peux pas te laisser comme ça, laisse moi te protéger un peu et t'épauler. » Elle ne pouvait pas le laisser ainsi, aussi mal, aussi triste et aussi seul. Parce que même s'il ne l'était pas, il donnait l'impression de se sentir bien seul et ça Alex ne pouvait pas le supporter. Il avait passé trop longtemps tout seul déjà et elle ne le laisserait pas seul, et encore moins en ce moment alors qu'il avait beaucoup de choses à surmonter.
Il se surprenait encore à craquer, lui qui ne faisait que se promettre constamment d'arrêter. Tim voulait être plus fort que cela, surtout maintenant que les enfants commençaient à grandir. Il voulait être père et cesser de paraître si naïf et innocent, il avait passé l'âge. Decastel, pourtant, ne pouvait rien y faire quand il sentait on estomac se nouer et qu'il était obligé de se perdre quelques instants dans le flot de ses pensées en espérant qu'il puisse gérer la situation au minimum. Alex était là cela dit et il compta sur son épaule pour se délester du poids de son existence, le grand brun. C'était vrai, néanmoins, qu'il se sentait seul, désemparé et que rien ne le préparait à ce qu'il allait devoir vivre par la suite. Les obstacles semblaient si immenses et dans sa tête, il était encore si petit. Timothy savait que ce n'était qu'un ressenti, rien de grandement important, rien qui ne puisse être changé avec un peu d'aide. C'était pour cette raison qu'il avait démarré une thérapie cognitive et comportementale: aide inespérée qui le rendait très franchement à fleur de peau. Il suffisait de mentionner un sujet délicat et le pauvre brun craquait sans s'arrêter pendant une bonne quinzaine de minutes. Se contenir, oublier qu'il était seul le temps de quelques heures parce que son amie était là et qu'elle ne le lâcherait pas. Alex avait été une constante essentielle, même si elle avait dû partir quelques temps, Timothy n'avait jamais oublié la place prépondérante qu'il lui vouait. La jeune anglaise était une personne qui comptait énormément pour le brun, même si elle n'avait pas toujours été ce qu'il aurait voulu. Cette période était effacée depuis un bon moment maintenant: en tout cas, le fleuriste n'y pensait plus, se concentrant uniquement sur les mots de la blonde. Elle paraissait optimiste, elle qui était revenue de l'enfer. Il devait l'écouter à tout prix, ne pas se laisser submerger par d'autres pleurs, il en avait déjà trop laissé couler ces derniers temps. Il ne parla pas, il la laissa faire, relier le fil de ses idées pour le rassurer sur ce qu'elle espérait qu'il fasse, surtout concernant sa mère. Tim avait conscience que c'était la prochaine étape, voir sa mère, la confronter, ne plus avoir peur de tous les souvenirs qui la concernaient maintenant qu'elle était hors d'état de nuire. Définitivement. "Ce sera pas nécessaire, faut que tu prennes soin de toi et de ton bébé, c'est ce que je veux avant tout." Alors, hors de question qu'elle parte dans une quête de violence pour remettre à leur place les quelques personnes qui avaient blessé son ami. Il lui souriait, Tim, ses yeux bleus ressortant avec une intensité toute particulière, l'émotion devait y être pour quelque chose assurément. "Je sais que je dois le faire. Ariane devait venir aussi mais je sais pas quand je serai vraiment prêt. La psy m'a dit que ça viendrait tout seul, que je le sentirai et que je devrai me laisser aller quand je sens que c'est le moment. Je t'appellerai pour que tu puisses venir si tu veux." Il ne voulait pas la forcer et puis, tout dépendait de l'avancée de sa grossesse, évidemment. "T'es ma meilleure amie et je t'aime." Une déclaration d'amitié, voilà ce qu'il lui offrait dans un effort désespéré de remonter à la surface. Tim s'essuyait les yeux mais il tremblait, la crise n'était pas passée, il le savait très bien. "Je devrais peut être te laisser te reposer, je veux pas te déranger plus avec mes histoires." Il ne voulait surtout pas qu'elle le voie dans cet état car, oui, Timothy avait encore honte. Beaucoup trop pour qu'il tienne le cap.
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S'il y avait bien une chose commune aux deux amis, c'était que ni le Français, ni l'Anglaise n'étaient réellement doués pour prendre soin d'eux. Alex était même pas réellement douée pour prendre soin de quiconque, et pourtant depuis quelques semaines maintenant, elle devait prendre soin d'elle, et surtout de ses deux bébés qui s'accrochaient malgré les complications survenues quelques semaines plus tôt. Elle ne pouvait pas faire grand chose pour eux, si ce n'est ce qu'elle faisait déjà. Mais il restait toujours une part d'incertitude quand à la santé des deux bébés, et si elle avait annoncé sa grossesse à Tim, elle ne lui avait pas parlé de la présence des deux embryons, ni même de ses craintes de les perdre. Alors quand il lui avait dit qu'elle devait prends soin d'elle et de son bébé, elle aurait aimé pouvoir réagir et lui avouer. Lui parler de ses craintes, de cette peur d'en perdre un autre, ou les deux. De tout ce qu'elle ressent finalement au fond, mais elle n'avait rien fait. Se contentant de plonger son regard dans celui de Tim, toujours aussi touchant et sincère, tout en lui promettant finalement de prendre soin d'elle. « C'est ce que je fais, j'essaye en tout cas. » Elle faisait du mieux qu'elle pouvait, espérant que son corps ne finirait pas par la trahir à nouveau. Elle ne voulait pas se laisser déstabiliser alors elle concentrait ses pensées sur Tim, se perdant dans le regard de son ami. Il y avait tellement d'émotions dans les yeux du fleuriste, des choses qu'il n'osait pas dire que l'on pouvait lire dans le bleu de ses yeux. Et, elle accueillait avec un peu de chaleur le sourire qu'il lui adressait, tout en l'écoutant s'exprimer après plusieurs minutes de sanglots et de détresses. Il envisageait les choses, il envisageait de se confronter avec sa mère, et c'était déjà une première étape. Mais il confirmait qu'il n'était pas prêt et sur ce point Alex ne pouvait pas vraiment intervenir. C'était à lui de se sentir prêt, de sentir le moment opportun pour faire face à cette femme, pour combattre les cauchemars et les souvenirs. Il était le seul à savoir quand il serait prêt, assez armé pour se tenir droit et ne pas s'écrouler face à la douleur d'une telle démarche. Mais Alex serait là pour lui. Quand il serait prêt, elle serait à ses côtés, s'il voulait d'elle, elle serait là, toujours parce que c'est ce que lui avait fait. Il avait été là quelques années auparavant, et de nouveau quand elle était réapparue dans le cimetière, devant la tombe de son amie, après des années de silences. Il avait été là, pour l'écouter, pour la soutenir, et pour lui pardonner aussi. Et elle avait comprit la chance qu'elle avait d'avoir un ami comme lui dans sa vie. « Je le veux, enfin si tu as envie que je t'accompagne. Après si tu veux le faire seul ou le faire avec Ariane ou n'importe qui, le plus important c'est que tu saches que je suis là pour toi si tu as besoin. » Et elle lui confirmait sincèrement qu'elle avait envie d'être là pour lui et qu'elle le serait s'il lui demandait. Elle voulait le protéger un peu, à sa manière. Elle aurait aimé pouvoir lui éviter toute souffrance, l'éloigner de cette vie qui semblait devenir trop lourde à porter pour les épaules de Tim, mais elle ne pouvait pas faire ça. Elle pouvait en revanche le maintenir à flot quand il se sentait faiblir, comme aujourd'hui. Quand les sanglots prenaient le dessus et qu'il perdait le contrôle, elle voulait être là pour essuyer ses larmes parce qu'elle avait passé bien trop de temps à être celle que l'on console sans être celle qui soutiens, qui rassure. Parce qu'elle n'avait plus envie de le voir si fragile et qu'elle serait avec lui tant qu'il aurait besoin de quelqu'un sur lequel s'appuyer. Tim était toujours marqué par l'émotion du moment, par ses émotions et la crise qu'il venait de subir, mais en quelques mots de sa part, les yeux verts de l'Anglaise s'étaient mis eux aussi à briller suite à la déclaration d'amitié du Français. « Je t'adore Timou, et je ne veux pas te perdre alors tu as intérêt à prendre soin de toi. » Une main qui ébouriffait les cheveux de Decastel et un sourire sincère et ému qui accompagnait ses mots, Alex tenait sincèrement à lui et ils n'étaient pas nombreux ceux qui avaient une telle place dans sa vie alors autant par amitié que par égoïsme, elle avait besoin qu'il aille bien, elle avait besoin qu'il soit heureux parce qu'elle ne pouvait pas perdre un autre proche. Elle ne pouvait pas le perdre. Alex le regardait toujours, luttant pour ne pas craquer sous le coup de l'émotion, et elle voyait que lui aussi luttait, qu'il tremblait toujours et il était hors de question de le laisser repartir ainsi. « Je te laisse pas partir dans cet état, c'est même pas négociable. » Le ton était ferme de la part de l'Anglaise et après cette affirmation, elle s'était adoucie. « Et tu ne me déranges pas Tim. Jamais d'accord ? Et puis, tu as peut-être encore plus besoin que moi de te reposer, alors installe toi et profite de mon canapé pour quelques minutes. » Elle s'était laissée tomber sur le canapé, comme pour donner l'exemple à Tim. Elle avait oublié totalement le film qu'elle avait lancé, elle regardait le plafond essayant de mettre un peu d'ordre dans ses idées et ses émotions mais c'était un sacré bordel dans l'esprit d'Alex. Les émotions, les hormones, les souvenirs, tout se mélangeaient et elle réfléchissait à haute voix désormais. « On aurait du faire ça y'a bien longtemps. Quand on était jeune, on aurait du trouver la force de se débarrasser de leurs emprises, une bonne fois pour toute. Parce qu'on leur a laissé l'opportunité de nous faire du mal pendant trop longtemps. » Elle parlait bien entendu pour la mère de Tim, mais aussi pour son père à elle. C'était un autre point commun entre eux, cette faiblesse face à leurs géniteurs, même si sur ce point Alex s'en sortait mieux que Tim, ayant réussi à mettre plusieurs milliers de kilomètres entre son père et elle, et ayant dompté les cauchemars liés au suicide de sa mère. Et alors qu'elle pensait à tout ça, elle se sentait angoissée d'un coup. De nouveau. Parce que son père revenait dans son esprit. Ce qu'il savait, ce qu'il faisait, qui il était, tout autour de lui était sujet à inquiéter et à énerver l'Anglaise. Et elle avait toujours la crainte de le voir débarquer un jour. Elle soufflait légèrement pour ne pas se sentir submergée. Ils avaient trente ans maintenant, il était père, elle allait devenir mère et pourtant ils étaient toujours sous l'emprise d'un parent défaillant, comme les enfants qu'ils avaient été, sauf qu'ils n'étaient plus des enfants désormais. « Jamais je ne le laisserais s'approcher de mes enfants. » Elle pouvait accepter qu'il lui pourrisse la vie encore et encore, mais alors que son père occupait son esprit à nouveau, elle se faisait la promesse, devant témoin, qu'elle protégerait ses enfants de cet homme malsain. Qu'elle n'était peut-être pas capable de se protéger elle même, mais qu'elle réussirait pour ses enfants. Comme elle savait que Tim réussirait à aller mieux, pour ses enfants aussi. « On va y arriver Tim, pour nos enfants. » Elle s'était redressée, appuyée contre l'épaule du Français, une lueur d'espoir dans la voix, elle croyait sincèrement qu'ils s'en sortiraient cette fois. Elle, lui.
Avoir aussi mal au coeur était devenu une coutume chez Decastel, même s'il n'avait jamais apprécié le concept. Tim avait pensé qu'il avait fini par se débarrasser peu à peu de ses vieux démons mais il s'avérait qu'il ne pouvait que s'être trompé. Il n'avait jamais guéri, le jeune brun, parce qu'il n'avait jamais totalement fait le deuil des quelques relations destructrices qui avaient forgé son caractère. Timothy avait juste désiré être fort, au moins un peu plus que par le passé, mais il n'avait fait que reculer l'échéance. Maintenant, c'était Alex qui devait être le témoin de ses pleurs puis de son mutisme, le temps qu'il retrouve la paix intérieure, au moins pour quelques minutes. Le brun se rendait surtout compte que tout cela l'épuisait: entre ses crises, les enfants, ses peurs multiples, rien n'était jamais franchement réglé. Decastel n'avait toujours été que l'ombre de lui-même, un garçon franchement serviable mais aussi clairement perdu dans un monde plus méchant qu'autre chose. Il n'avait vu que la cruauté autour de lui, que l'abandon surtout et c'était toujours ce qui l'avait le plus blessé car il donnait toujours tout lorsqu'il aimait, Tim, mais ce n'était pas toujours le cas en face. Il avait appris à vivre avec, à se faire une raison que son altruisme était plus destructeur qu'autre chose mais le fleuriste n'avait pas changé pour autant. Le jeune homme était profondément bon, tout simplement, et ce n'était peut être pas assez pour se forger une existence correcte mais au moins, il ne vivrait jamais dans le mensonge de son côté. C'était désormais à lui de faire le parcours nécessaire cela dit pour guérir, devenir quelqu'un de plus fort à défaut de pouvoir être meilleur car il y avait les enfants qui comptaient sur lui. Timothy savait qu'il en était capable, il avait juste besoin d'une dose de courage supplémentaire mais il ferait ce qu'il faudrait pour surmonter cette période quelque peu difficile. Cette réalité lui permit de faire taire ses pleurs et dans une moindre mesure ses tremblements, son regard se posant dans celui de Clarke. Elle aussi avait souffert de mille manières différentes mais elle avait toujours retrouvé la lumière, de quoi lui permettre de retrouver Caleb, alors Tim se devait de croire qu'il pourrait avoir un chemin similaire, même si personne ne l'attendait réellement de l'autre côté du chemin. La solitude, de toute façon, il avait toujours réussi à faire avec, s'y complaisant d'ailleurs beaucoup trop bien pour que ce fut quelque chose de sain pour lui. Tim, au contraire, devait s'ouvrir, s'extérioriser et prendre le temps d'apprendre de l'extérieur plutôt que de s'épuiser face à autrui, encore une promesse qu'il se faisait en silence en écoutant les propos d'Alex. "Merci d'être là." Timothy n'avait pas besoin de lui dire qu'il l'appellerait lorsqu'il serait prêt à affronter sa mère car Alex devait d'ores et déjà savoir qu'elle ferait partie des privilégiés au courant de la moindre de ses intentions. Cet instant n'arriverait pas tout de suite, ni le lendemain, mais l'échéance arrivait tout doucement et Decastel avait conscience qu'il allait bientôt faire un sacré virage dans son existence. Il en sortirait beaucoup plus fort, avec un équilibre moins précaire et, il l'espérait, beaucoup moins seul également. En attendant, il se contentait de hocher la tête en notant la requête de Clarke, qu'il prenne soin de lui. Il n'avait jamais été très doué en la matière mais il pouvait au moins essayer de le promettre car Alex avait toujours tout fait pour aller mieux pour lui. C'était donc donnant donnant, un échangé de bons procédés qui n'était pas prêt de s'arrêter entre eux deux, le regard bleuté de Tim se montrant clairement ému de pouvoir compter sur l'affection d'Alex après toutes ces années. Leur amitié était clairement unique et il ne regrettait pas une seule seconde de s'être battue pour elle durant tout ce temps. "On était pas prêts à les affronter. Mine de rien, on parle de nos parents. C'est le premier amour qu'on aurait dû obtenir et tous les enfants s'accrochent à ça... A leurs parents, même s'ils sont mauvais pour eux. Maintenant, on sait. Mais on était encore trop naïf pour le comprendre autrement, il faut pas regretter d'avoir tenu aussi longtemps, c'est ce qui nous a fait grandir." De manière bancale certes, mais c'était déjà un début, Tim réceptionnant la tête d'Alex sur son épaule alors qu'il vint lui caresser les cheveux pour espérer faire taire quelques bribes de sa colère. "On les laissera pas abîmer ce qu'on a créé, c'est certain. Maintenant, on est forts, toi et moi. Personne pourra faire du mal à nos enfants. Pas tant qu'on sera présents dans la vie de l'autre pour empêcher ça, OK?" Car il comptait bien être là pour les protéger, les enfants qu'Alex pourrait avoir, peu importe le nombre et Tim était prêt à parier que c'était la même chose pour elle. Ils étaient liés pour la vie, désormais.
I'll be there for you, when the rain starts to pour I'll be there for you, like I've been there before I'll be there for you, 'cause you're there for me too... . .
Avec Tim, elle s’était toujours sentie bien l’Anglaise. Elle n’avait pas à faire semblant. Pas à être toujours souriante. Pas à chercher à plaire. Elle n’avait pas peur de le décevoir aussi, elle l’avait déjà fait pleins de fois. Tim était peut être l’une des rares personnes encore en vie à la connaître aussi bien. Avec Caleb. Ils étaient deux à savoir qui elle était vraiment. A connaître ses fragilités et ses failles. A connaître son histoire aussi. Et elle était juste elle-même avec le Français. S’autorisant à se montrer faible, s’autorisant à douter et à montrer ses failles parce qu’elle avait une confiance aveugle en Tim et qu’elle savait que jamais il n’utiliserait quoique ce soit contre elle. Alors elle parlait librement et ça lui faisait un bien fou de pouvoir être au côté de Tim. Comme avant. Dans ce canapé à partager ses doutes et ses colères. « Je sais pas si ça m’a fait grandir Tim, je sais juste qu’ils m’ont fait beaucoup de mal. Et je les ai laissé faire. » Et peut-être que c’était pour ça aussi qu’elle était rentré à Londres après avoir fuit, parce qu’elle savait qu’elle souffrirait à leurs côtés. Elle les avait laissé faire parce que c’était finalement ce qu’elle voulait, souffrir. Sauf que ce n’était plus le cas désormais. Et malgré tout, elle avait peur de son père. Peur de ce qu’il pouvait bien lui faire. Peur du pouvoir qu’il arrivait encore à avoir sur elle. Peur de savoir qu’il connaissait presque tout de sa vie et qu’il savait comment lui faire du mal et qu’il ne se gênerait pas de le faire s’il en avait envie ou besoin. « J’ai peur de lui. » C’était autant l’adulte que la petite fille qui s’exprimait avec cette révélation honnête. Elle était terrifiée par son paternel, autant qu’elle le haïssait. Elle cherchait le soutien de Tim à ce moment précis, posant sa tête sur l’épaule de Français, elle sentait le geste amical de Tim qui tentait sans doute de rassurer l’Anglaise. Chacun leur tour ils avaient besoin d’un soutien. L’un comme l’autre ils avaient besoin de ces moments de complicité si important. Et finalement ils étaient plus forts ensemble. Comme le disait Tim. Et même si elle, elle ne se sentait pas plus forte ou plus apte à tenir tête à son père, elle se sentait soutenue. Et ça faisait toute la différence. Elle n’était plus seule. Et que ce soit Caleb ou Tim elle savait désormais qu’elle n’aurait jamais à gérer sa famille tout seule. Et Tim lui promettait, ils feraient front ensemble. L’un avec l’autre, contre les ravages que leurs parents respectifs pouvaient générer dans leur vie. L’un avec l’autre pour se soutenir et protéger leurs enfants de cette souffrance et de cette absence d’amour. « On va les protéger. » Peut-être que la menace la plus élevée pour ses filles c’était elle et pas son père, mais pour le deuxième cité, elle savait que Tim serait à ses côtés pour protéger les enfants Clarke-Anderson et c’était déjà un fait rassurant. « Je serais toujours là pour toi ou pour les deux petits. » Et cette fois, elle pouvait lui dire qu’elle serait là pour toujours, parce qu’elle le pensait sincèrement. C’était ici chez elle maintenant. À Brisbane. C’était ici qu’elle voulait vivre dans la maison qu'elle venait d'acheter, dans laquelle elle s’apprêtait à construire sa famille. Et elle ne laisserait personne lui enlever ça, pas même elle et surtout pas son père. Se tournant vers Tim pour lui faire un sourire rassurant et amical, elle avait fini par se lever tout en bousculant Tim d’un geste amical. « Ma première action pour protéger les petits c’est de t’obliger à faire une sieste parce que vu ton état tu vas finir par t’écrouler et tu serviras à rien s’il t’arrive quelque chose. » Elle lui balançait un oreiller au visage tout en riant doucement. C’était une autre de leurs habitudes. Des restes de leurs vingtaines, et Alex riait en voyant l’oreiller s’écraser sur le visage de Tim. « Allez dors un peu Decastel je vais finir de ranger mon bordel moi. » Ce bordel qu’elle avait semé en faisant -défaisant- les cartons avant que Caleb ne puisse assister à ce désastre laissé par Alex.
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