| please save me from the hell i'm in (colleen) |
| | (#)Mer 29 Avr 2020 - 9:32 | |
| Quand Scarlett t’avait appelée pour prendre des nouvelles, tu avais trouvé cela louche mais tu n’avais rien dit. Ce n’était pas du tout le genre de ta soeur de passer des coups de téléphone de ce genre mais votre relation se portait un peu mieux ces derniers temps alors tu décidais de ne pas te montrer de suite suspicieux. Tu pris le temps de lui donner des nouvelles et elle en fit de même avant de te proposer de vous retrouver autour d’un verre après votre boulot respectif quelques jours plus tard. Regardant ton calendrier, tu avais accepté sans hésitation, heureux de pouvoir passer un peu de temps avec ta soeur. Le jour du rendez-vous, tu étais repassé chez toi pour te changer car Scarlett avait insisté qu’elle était une femme comme une autre et qu’elle n’avait nullement envie de passer la soirée avec un professeur d’université. L’excentricité de ta soeur ne finissait pas de te surprendre mais tu suivis ses demandes, cela ne te coûtait pas grand chose de repasser chez toi pour prendre une douche et t’habiller d’une chemise et d’un jean habillé qui te donnaient une allure classe sans trop en faire. Tu pris ensuite la direction du Canvas en prenant un bus car le bar n’était pas très loin de chez toi. Quand tu en passais la porte une quinzaine de minutes plus tard, tu ne fus pas surpris de ne pas voir la tête de ta soeur autour d’une table. Tu étais en avance et Scarlett mettait un point d’honneur à arriver en retard. Tu t’installais dans un booth, commandant une bière en sachant que ce serait le seul verre que tu prendrais ce soir, l’eau et le jus de pomme seront tes compagnons pour le reste de la soirée. Alors que tu commençais à t’impatienter, tu sentis ton portable vibrer et le message que tu lus de ta soeur te fit perdre ton sourire : J’ai une amie que je voulais te présenter. Ne me remercie pas et passe une bonne soirée ! Ton sang se glaça en lisant ces mots parce que la dernière chose que tu avais envie de faire ce soir c’était de te retrouver dans un potentiel rendez-vous galant avec une inconnue. Plissant les yeux, tu poussais un soupir. Tu n’aurais jamais dû confier à Scarlett que ce qui se passait avec Evelyn, peu importe ce que c’était réellement, était bel et bien terminé. Ta petite soeur semblait vouloir te faire passer à autre chose et même si tu appréciais le sentiment, elle ne s’y prenait pas de la meilleure manière. Tu détestais être surpris de la sorte et tu détestais les blind dates avec ferveur depuis que Beth avait eu une période où elle te les faisait enchaîner. Mais ce qui te faisait le plus peur, c’était les goûts de Scarlett qui étaient aux opposés des tiens. Encore avec Beth, tu avais plus confiance, elle te connaissait assez pour avoir une idée de ce qui pourrait t’intéresser ou pas. Avec Scarlett, ce n’était pas le cas et tu avais terriblement peur de la personne qui allait apparaître.
Le suspens fut de courte durée car une jeune femme brune ne tarda pas à faire son apparition à ta table en vérifiant ton identité et en te donnant la sienne : « Charlotte Lupin, enchantée. » Te dit-elle avant de prendre place en face de toi. Le serveur vient t’amener ta bière et elle commande un cocktail dont tu n’as jamais entendu le nom avant de commencer à parler. Il ne te fut pas longtemps avant de comprendre qu’elle est bien plus jeune que toi et que son passe temps préféré est de s’entendre parler. Les quinze premières minutes de ce rendez-vous sont on ne peut plus inconfortables. Tu as l’impression d’être devant tes élèves, à les voir te dévorer des yeux. Ces derniers ont au moins la gentillesse d’essayer de le cacher mais la jeune femme en face de toi semble penser que tu aimes la voir te fixer et t’imaginer sans tes vêtements. Il est évident qu’elle pense déjà à te proposer de rentrer chez elle ou l’inverse mais elle ne se doute pas que ce n’est absolument pas ton style. Comme tu t’y attendais, Scarlett avait tapé à côté, bien à côté et tu te demandais pourquoi elle s’était dit que c’était une bonne idée jusqu’à ce que la jeune femme prononce ces mots quand tu lui demandais ce qu’elle faisait comme métier : « J’ai une galerie d’art en ville et mes parents en ont aussi plusieurs, c’est un métier familial. » Il y avait des chances que tu avais déjà été traîner dans ces galeries et quand tu en demandas un peu plus, tu te rendis compte que c’était bel et bien le cas. La conversation autour de l’art rendit le rendez-vous un peu meilleur pendant quelques minutes jusqu’à ce que tu sentes le pied de la jeune femme contre le tient puis remontant le long de ta jambe. Tu te figeais, c’était plus fort que toi. Tu n’étais pas quelqu’un de très tactile et qu’on te touche sans te demander la permission était quelque chose que tu détestais, en particulier dans des cas aussi … intimes. En même temps, elle pencha la tête comme passionnée par ce que tu racontais et rapprocha ses mains des tiennes sur ta table. Tu étais plus droit qu’un piquet et tu ne comprenais pas comment elle ne voyait pas qu’elle te mettait plus que mal à l’aise. Tu retirais brusquement tes mains de la table, ne sachant pas comment te sortir de cette situation parce que c’était une amie de Scarlett et ta soeur t’en voulait déjà assez pour tout un tas de choses, tu n’avais pas besoin de te la mettre à dos. Si seulement, si seulement quelqu’un pouvait t’appeler pour une urgence ou n’importe quoi d’autre pour sortir de cette situation …
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Jeu 30 Avr 2020 - 17:38 | |
| La semaine était arrivée à son terme et Colleen avait quitté le St Vincent’s Hospital non sans un certain soulagement. Le week-end arrivait à point nommé, et malgré les quelques rendez-vous qu’elle devrait honorer le lendemain – des visites postnatales qui ne pouvaient pas attendre le lundi suivant – le rythme serait néanmoins beaucoup moins soutenu qu’il ne l’avait été les jours précédents, or la sage-femme comptait bien en profiter. Ce besoin de se détendre n’était pourtant pas motivé par un dégoût soudain pour son travail, au contraire, Colleen aimait être soumise à un rythme effréné qui ne lui permettait que rarement de sortir la tête de l’eau. Elle qui avait passé des années à s’agacer d’un quotidien peu exaltant ne pouvait qu’apprécier pleinement la cadence qu’elle s’imposait ici, à Brisbane, et qui lui permettait enfin de se rendre réellement utile. Les journées passaient à une vitesse fulgurante, les rendez-vous s’enchaînaient et les clientes se succédaient, ne laissant à la sage-femme que peu de répit. Toutefois, à force de dépenser toute son énergie au profit de l’exercice de son métier et d’enchaîner avec des soirées au cours desquelles ses loisirs aspiraient le peu de forces qui lui restait, Lynn n’était pas contre une pause bien méritée. Or celle-ci avait pris la forme d’une soirée en compagnie de ses collègues dans un pub de la ville, le Canvas. C’était Izzie, sage-femme comme elle au St Vincent’s Hospital, qui lui avait proposé de se joindre à elle pour boire un verre qu’elle estimait bien mérité après une telle semaine. Ravie, Lynn avait immédiatement accepté et finalement, plusieurs autres collègues avaient décidé de partager cette soirée en leur compagnie. Pour Colleen, il s’agissait d’une occasion rêvée pour faire plus amples connaissances avec ses collègues. Jusque-là, rares avaient été les opportunités de les retrouver en dehors de l’hôpital pour partager plus que des anecdotes relatives à leur travail, or elle considérait qu’il était nécessaire de se familiariser davantage aux femmes de son service. Elle avait même envoyé un message à Yasmine pour lui proposer de se joindre au groupe mais cette dernière avait poliment décliné, étant déjà prise ce soir-là.
Aussi avait-elle fait un rapide détour à son appartement de Redcliffe pour prendre une douche en vitesse et abandonner son uniforme de travail au profit d’une tenue plus habillée – en l’occurrence, elle avait choisi l’une de ses longues robes au style un peu bohème qu’elle affectionnait tant, la météo Australienne lui permettant d’en profiter davantage qu’en Angleterre. Face au miroir de la salle de bain, elle s’était également accordée quelques petites touches de coquetterie en réhaussant son regard d’un trait d’eye-liner qui intensifiait le bleu de ses yeux, et en accentuant le rouge de ses lèvres. En semaine elle délaissait généralement sa trousse de maquillage mais ce soir-là, elle avait décidé que l’occasion en valait la peine. Enfin, après un coup de téléphone à Louisa qui devait la rejoindre le lendemain, elle quitta l’appartement et prit les transports en commun afin de rejoindre ses collègues au Canvas.
La musique lui parvint de l’intérieur du bar alors qu’elle n’en était encore qu’à quelques mètres, et la chaleur des lieux la submergea dès qu’elle y entra. Ce n’était pas la première fois qu’elle mettait les pieds au Canvas, mais chaque fois qu’elle s’y rendait elle ne pouvait s’empêcher de comparer l’intérieur du bar aux pubs qu’elle avait fréquentés à quelques reprises en Angleterre. Le Canvas était un endroit plutôt branché. La lumière tamisée des néons enveloppait l’espace d’une ambiance intimiste et le volume de la musique qui s’échappait des haut-parleurs installés aux quatre coins de la pièce était raisonnable, permettant aux clients de pouvoir tenir une conversation sans devoir hausser le ton de la voix. Colleen aperçut Izzie au bar et la rejoignit. Elle se glissa sur le tabouret qui était dos à la pièce principale et adressa un grand sourire à sa collègue. « Piña colada ? » lui demanda cette dernière en guise de salutation. « Avec plaisir ! ». Alors qu’Izzie donnait leur commande au barman, Lynn en profita pour la détailler un instant. De toute évidence, sa collègue avait sorti le grand jeu pour cette soirée entre filles : d’une main experte elle avait relevé ses cheveux en un chignon sophistiqué, et n’avait vraisemblablement pas lésiné sur les moyens pour faire disparaître la fatigue de son visage. Sa robe épousait ses formes et soulignait résolument ses courbes, quant à son décolleté, il laissait objectivement peu de place à l’imagination. Izzie était plus jeune que Colleen, et célibataire comme elle, il ne faisait pas l’ombre d’un doute qu’elle avait activé son radar, prête à jouer de ses charmes si l’occasion se présentait à elle.
Elles discutèrent quelques minutes en attendant leur commande, puis furent bientôt rejointes par quatre autres collègues, toutes sages-femmes comme elles. Le petit groupe quitta alors le bar pour aller s’installer dans un booth non loin des tables de billard où plusieurs joueurs s’affairaient déjà, non sans leur jeter quelques regards à la dérobée dès qu’ils le pouvaient. La conversation tourna naturellement autour de l’hôpital au début, avant de s’en éloigner graduellement pour aborder des thèmes plus personnels. Colleen demeura en retrait, écoutant plus qu’elle ne participait réellement, envieuse d’en découvrir davantage sur ses collègues. Le premier cocktail fut suivi d’un second, et Lynn était justement en train de le siroter quand elle s’intéressa quelques instants aux tables autour d’elles. Son regard se posa sur un couple, à quelques mètres d’elle, et s’arrondit d’étonnement quand elle reconnut le profil de l’homme. Il s’agissait indubitablement de Marius Warren, le professeur d’université de Lou – celui même qui l’avait convoquée deux semaines plus tôt dans son bureau pour lui parler de l’attitude inappropriée de sa fille en cours. Cette entrevue avait été précédée de deux rencontres inopinées, une première fois devant l’appartement de Colleen, une seconde sur le campus universitaire. Le monde était décidément bien petit, pensa-t-elle. Ou alors, le hasard faisait bien les choses.
Ecoutant d’une oreille distraite les paroles de ses collègues, Lynn saisit l’ananas sur le bord de son verre et croqua le fruit, les yeux rivés sur le couple à quelques mètres d’elle. Etrangement, il lui semblait que Marius n’était pas particulièrement à l’aise face à la jeune femme qui lui faisait face. La sage-femme se demanda un instant s’il s’agissait de sa petite amie ou de sa sœur, peut-être – Marius avait bien mentionné l’existence de deux sœurs plus jeunes que lui lors de leur première rencontre – mais quand elle vit le pied de la jeune femme frôler celui du professeur puis remonter lentement sa jambe, Lynn balaya cette dernière hypothèse. Pourtant, si le geste initié par la jeune femme semblait suggérer qu’elle était bien la petite amie de Marius, la réaction de ce dernier contestait cette idée. En effet, son corps se raidit et il eut même un geste de recul quand son interlocutrice tenta de manière peu subtile d’approcher ses mains des siennes. A en juger par l’attitude du professeur d’histoire des arts, ce dernier aurait donné n’importe quoi pour échapper à cette situation ; Colleen en conclut qu’il devait être au beau milieu d’un rendez-vous qui ne se déroulait pas tout à fait comme prévu. Elle grignota l’ananas, son attention désormais complètement détournée de la conversation de ses collègues, et reposa l’écorce dénudé du fruit sur la table. Petit à petit, une idée audacieuse prit forme dans son esprit. Par deux fois, Marius lui était apparu comme un sauveur alors qu’elle se trouvait elle-même dans une situation délicate… Et si le destin les avait de nouveau réunis pour lui permettre de lui rendre la pareille ?
Colleen hésita encore quelques instants, mais au plus les secondes s’égrainaient, au plus la certitude qu’elle devait absolument voler au secours du pauvre Marius gagnait en intensité. Alors, avant de changer d’avis, elle prit une profonde inspiration et but le reste de son cocktail, comptant sur le liquide alcoolisé pour lui donner une dose suffisante de courage pour ce qu’elle s’apprêtait à faire. Elle se retourna brusquement vers ses collègues et s’approcha d’Izzie afin de lui glisser quelques mots à l’oreille. « Je reviens dans quelques minutes ». Elle s’écarta et adressa un clin d’œil complice à la sage-femme avant de se lever. Elle esquissa plusieurs pas en direction du couple et réalisa qu’elle devait faire plus d’efforts que d’habitude pour marcher droit – s’il était vrai que l’alcool levait les inhibitions, il n’était toutefois pas le meilleur ami de l’équilibre. La jeune femme glissa une main dans sa frange qu’elle balaya d’un geste maîtrisé, puis arbora un sourire qu’elle espérait convaincant. Arrivée à la hauteur du couple, elle ignora superbement la belle brune qui se tenait face à Marius et réserva exclusivement son attention à ce dernier, vers lequel elle se pencha. « Marius ! Je ne savais pas que tu serais là ce soir, petit cachottier ! ». Elle embrassa sa joue alors que les siennes s’empourpraient légèrement, et noua ses bras autour de son cou d’un geste possessif. Elle espérait que son petit jeu ne le perturberait pas trop, et surtout qu’il comprendrait son manège. Elle s’installa sur ses genoux et consentit enfin à poser son regard sur la jeune femme, qui eut un mouvement de recul. « Et… Vous êtes ? ». Elle fronça les sourcils, dévisagea la jeune femme d’un air critique et passablement méprisant avant de planter son regard dans celui de Marius, interrogateur. « Chéri, qui est cette personne ? ».
Dernière édition par Colleen Sainsbury le Sam 2 Mai 2020 - 18:56, édité 2 fois |
| | | | (#)Ven 1 Mai 2020 - 11:51 | |
| Deux options étaient envisageables : soit Scarlett pensait vraiment que ce genre de rendez-vous était quelque chose que tu appréciais et elle pensait agir dans le meilleur de tes intérêts, soit Scarlett voulait se venger de quelque chose et elle venait de réussir car tu étais vraiment, mais vraiment très mal à l’aise et tu ne voyais pas comment tu allais pouvoir te sortir d’une telle situation. Connaissant ta soeur, les deux options avaient autant de chances d’être possibles mais peu importe les bonnes ou mauvaises intentions de ta soeur, tu comptais lui en faire voir de toutes les couleurs dès que tu seras débarrassé de la jeune femme assise en face de toi. Bon, peut-être que tu exagères légèrement. Tout à son sujet n’est pas horrible ce qui voulait dire que Scarlett ne te détestait pas totalement, c’était déjà ça. Elle avait une qualité qui était indéniable c’était son ambition et la détermination qu’elle semblait mettre à avoir exactement ce qu’elle voulait était admirable. Tu le remarquais chez certains de tes élèves, c’était une bonne chose la plupart du temps mais ce soir, sa détermination c’était de t’avoir toi et cela ne faisait aucun doute. Scarlett ne t’avait pas caché qu’elle préférait ne pas se lancer dans une histoire et prendre du bon temps quand elle le pouvait. Tu préférais imaginer ta soeur vierge et pure pour toujours plutôt que de l’imaginer avec un homme car cela te donnait envie de vomir. Scarlett t’avait fait comprendre qu’elle te conseillait vraiment d’adapter son mode de vie si ce que tu aurais aimé voir arriver avec Evelyn n’avait plus d’avenir. Elle était ensuite partie dans un monologue sur les besoins sexuels de vos corps ou quelque chose dans le genre. Tu avais préféré raccrocher plutôt que de continuer à l’entendre te faire des réflexions sur ta vie sexuelle, elle aussi inexistante depuis que tu t’étais laissé entraîner dans les brasse Margot. Un souvenir qui t’était cher mais auquel tu évitais de penser car il ne faisait que mettre en avant quelque chose que tu ne pourras jamais avoir. Que Scarlett ait laissé entendre à la jeune femme en face de toi que tu pourrais être intéressé pour poursuivre la soirée après ce rendez-vous n’était pas surprenant. Quand tu avais essayé d’expliquer à ta soeur que tu avais besoin de connaître le personne avant de pouvoir envisager de l’entraîner dans un lit, elle avait dû comprendre qu’un rendez-vous suffisait. Ce n’était pas ce que tu voulais dire et Charlotte allait malheureusement le découvrir car tu ne comptais nullement finir ta soirée avec elle.
En plus d’occuper la majeure partie de la conversation, la jeune femme qui te fait face semble bien décidée à mettre toutes ses chances de son côté. Quand tu étais adolescent, l’idée de jouer à se faire du pied sous une table aurait pu t’amuser, ce n’est nullement le cas aujourd’hui, encore moins quand la personne en face de toi n’a aucune raison, à tes yeux, d’initier un geste aussi intime. Tu te figes mais elle ne semble pas le remarquer et tu es trop choqué pour repousser son pied de suite. Par contre, les mains qui veulent s’emparer des tiennes, tu les repousses sans hésiter, presque comme si la toucher serait te brûler. Tu as tout à fait conscience de ne pas avoir des réactions sociales tout à fait normale. Le fait de n’être presque pas touché au quotidien, à part les poignées de main de tes collègues, avait transformé ce manque initial en gêne profonde quand un toucher était initié sans que tu ne le cherches vraiment. Essayant de reprendre tes esprits, tu ouvris la bouche pour mettre un terme au nouveau monologue de Charlotte quand une voix vous interrompit : « Marius ! Je ne savais pas que tu serais là ce soir, petit cachottier ! » Tu n’as pas le temps de tourner la tête que des lèvres vinrent se poser sur ta joue et des bras s’enroulent autour de ton cou. Tu sens la tête de tourner et c’est à peine si tu remarques le pied de Charlotte qui quitte ta jambe. Tu as été plus touché ce soir que les deux derniers mois réunis, décidément, tout le monde s’est passé le mot. Quand les lèvres qui se sont posées sur ta joue s’éloignent, tu tournes la tête pour poser tes yeux sur Colleen. Etrangement, le fait de savoir que c’est Colleen et pas une totale inconnue te permet de reprendre une profonde inspiration parce que tu avais arrêté de respirer quelques secondes. Un sourire se dessine automatiquement sur ton visage et tu te concentres pour chasser la crise d’anxiété qui te guette. Le regard de Colleen croise rapidement le tient, comme pour y chercher une autorisation et elle doit la trouver car quelques secondes plus tard, elle est assise sur tes genoux et s’adresse à Charlotte : « Chéri, qui est cette personne ? » Chéri ? Qu’est-ce …. ? Tu arrêtes le train de tes pensées alors que tu comprends enfin ce que Colleen est en train de faire. Cela ne rend pas la situation moins gênante et cela ne veut pas dire que tu ne sens pas ton rythme cardiaque aller à cent à l’heure. Mais tu ne peux pas laisser la panique gagner, il faut que tu joues le jeu, il faut que tu te débarrasses de Charlotte. Alors que ton regard se pose dans celui de Colleen, tu remarques que le sien est légèrement embrumé et tu te demandes combien elle a bu de cocktail avant de venir jouer cette comédie. Ce n’était pas quelque chose que tu aurais imaginé de la femme qui deux semaines plus tôt se prenait un coup sur la tête en apprenant que sa fille draguait ouvertement son professeur. Oh quelle ironie … Prenant une grande inspiration et tu enroules un de tes bras autour de la taille de Colleen, laissant ton autre main attraper la sienne. Autant jouer le jeu à fond et montrer à Charlotte que ton rejet était complet tout à l’heure. « Lynn, je te présente Charlotte, c’est une amie de ma petite soeur. » Aucun mensonge là-dedans pour l’instant, ils arrivaient cependant : « Ma soeur m’a fait croire que je devais la retrouver ce soir mais a préféré envoyer Charlotte à sa place. Apparemment elle pense qu’il est temps que je me remette en scelle. » Expression ridicule à tes yeux mais que tu avais entendu de tout ton entourage ces derniers temps. Posant ton regard sur Charlotte qui semblait choquée et surtout humiliée, tu lui dis : « Scarlett n’est pas encore au courant que je suis déjà en scelle en vérité. Charlotte, voici Colleen ma petite amie. » Cette fois elle manque de s’étouffer et tu dois dire que tu n’es pas loin non plus mais tu sais que ton visage ne laisse rien paraître. Charlotte est une femme fière, bien trop fière pour supporter ce genre d’humiliation. Elle se lève, attrape son sac et vous lance un : « J’aurais dû m’en douter, Scarlett a toujours des mauvais plans de toute façon. » Elle n’ajoute rien mais elle est partie et c’est bien suffisant pour toi. Posant ton regard dans celui de Colleen, tu te retrouves à lui dire : « Bonsoir Colleen. » C’est ridicule vu qu’elle est toujours assise sur tes genoux mais tu n’arrives pas à trouver autre chose à dire pour l’instant, tu es encore légèrement sonné de cet épisode à vrai dire.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Sam 2 Mai 2020 - 19:10 | |
| Colleen était quelqu’un de raisonnable. Elle n’avait jamais été du genre à abuser de la boisson, et se contentait généralement d’un verre quand elle était invitée chez des amis ou sortait les retrouver en ville. Même lors de sa première année à l’université, elle n’avait jamais été encline à enchaîner les soirées avec ses camarades – et pourtant ce n’étaient pas les occasions qui manquaient quand vous étiez étudiante en médecine dans la capitale Anglaise. Les futurs médecins étaient réputés pour les fêtes qu’ils organisaient et leur capacité à tenir l’alcool, et il se passait rarement une semaine sans qu’on lui propose de rejoindre tel ou tel groupe pour faire la fête jusqu’au petit matin. Pourtant, la jeune femme avait été une étudiante modèle, de celles qui préfèrent concentrer exclusivement leurs efforts sur les études, quitte à passer pour une rabat-joie par moments. Enceinte à dix-neuf ans, elle n’avait plus eu l’occasion de goûter aux plaisirs de la vie étudiante par la suite, et s’était contentée de vivre cette vie par procuration, par le biais de ses amis. Ce qui expliquait sans doute pourquoi aujourd’hui, à trente-sept ans, elle ne tenait pas très bien l’alcool ; elle n’avait que très peu d’entraînement, et sa taille menue n’était probablement pas non plus adaptée à la consommation abusive de boissons alcoolisées.
Si Colleen avait décliné la proposition de sa collègue quand cette dernière lui avait offert une première piña colada une heure plus tôt, sans doute aurait-elle réfléchi davantage à son opération sauvetage avant de se jeter dans la gueule du loup sans préparation. Certes, Marius était un loup plutôt séduisant, et même l’esprit légèrement embrumé par l’alcool Lynn doutait vraiment que ce dernier profite de la situation. Ce n’était pas le genre. Elle ne le connaissait peut-être pas beaucoup, mais elle avait la certitude qu’il ne faisait pas partie de ces hommes insistants qui savent se montrer particulièrement persuasifs quand ils ont une idée derrière la tête. L’image qu’il lui avait renvoyée jusqu’à présent était plutôt celle d’un homme éduqué, un parfait gentleman qui se montrait prudent et attentionné et qui n’hésitait pas à mouiller la chemise pour voler au secours de demoiselles en détresse.
Toutefois, la proximité dont jouissait à présent la jeune femme auprès de ce dernier était quelque peu déstabilisante. Un éclair de lucidité parvint l’espace d’un instant à percer le voile brumeux de ses pensées pour se demander si elle n’en avait pas fait un peu trop. Marius était resté imperturbable quand elle avait débuté son petit numéro, seule une lueur hésitante nichée au fond de son regard lui avait révélé son trouble avant de disparaître pour laisser place à une flamme plus chaleureuse. Tout portait à croire qu’il avait fini par saisir là où elle venait en venir, car il enlaça la taille de Colleen et saisit sa main une seconde plus tard pour ajouter davantage de crédibilité à leur comédie. Le regard toujours plongé dans les yeux clairs de Marius, Colleen acquiesça subrepticement d’un signe de la tête pour l’encourager. Elle détourna ensuite son attention de lui, plus troublée qu’elle ne l’aurait admis. Il en profita pour faire les présentations avec la fameuse Charlotte. Il lui expliqua que sa sœur Scarlett avait joué les entremetteuses dans l’espoir qu’il se remette « en selle ». Colleen frémit et dut se mordre l’intérieur des joues pour résister au rire qui lui chatouilla la gorge. Un vrai supplice. Le visage de la jeune femme se fendit d’une moue presque comique alors qu’elle faisait de son mieux pour ne pas éclater de rire. Sans s’en rendre compte, ses doigts exercèrent aussi une pression furtive sur le dos de la main du professeur.
S’adressant à Charlotte, Marius demeura impassible et ajouta que Colleen était sa petite amie et qu’il était par conséquent parfaitement… En selle. Quelques images intruses traversèrent l’esprit de Lynn, illustrant les propos du professeur d’histoire des arts, et elle dut faire un effort considérable pour les en chasser et se reconnecter à la réalité. Face au couple, la brune pimpante qui s’était montrée très entreprenante auprès du professeur d’histoire des arts quand ils n’étaient encore que tous les deux, n’en menait pas large à présent. Douchée par l’humiliation, ses joues avaient pris une teinte cramoisie et ses yeux lançaient des éclairs menaçants. Colleen ressentit un sursaut de culpabilité en assistant à la réaction de cette inconnue, qui n’était peut-être pas si détestable après tout. Une femme qui joue de ses charmes pour séduire un homme n’est pas forcément une mauvaise personne. Lynn pressa ses lèvres l’une contre l’autre mais veilla à ne rien laisser transparaître ; il était trop tard à présent pour faire marche arrière. Après avoir récupéré son sac à main, Charlotte se leva, courroucée, et tourna les talons non sans s’être agacée des mauvais plans de Scarlett au préalable.
Colleen tourna lentement le visage en direction de Marius pour planter son regard dans le sien. Le temps parut suspendu et elle retint son souffle, prenant pleinement conscience de la situation et plus précisément de leur proximité. Le bras du professeur autour de sa taille. Ses doigts entremêlés aux siens, sans qu’elle ne sache qui avait initié ce geste, ni quand cela s’était produit. Son visage si proche du sien qu’elle pouvait sentir son souffle lui chatouiller la peau. Figée, Lynn n’osait plus esquisser le moindre geste. Etrangement, elle se sentait plutôt à l’aise dans les bras du professeur d’université, mais cela ne rendait pas la situation moins déroutante pour autant. L’illusion fut maintenue quelques secondes supplémentaires, et puis Marius entrouvrit les lèvres et la salua dans un souffle. « Bonsoir Marius » Murmura-t-elle à son tour, à peine consciente que sa voix empruntait une tonalité suave. Elle sonda le regard clair du professeur à la recherche d’un indice qui pourrait lui permettre de saisir son état d’esprit… En vain. Elle désigna la porte du bar d’un signe de la tête sans le quitter des yeux. « Elle est partie ? » Demanda-t-elle à mi-voix. Marius acquiesça et elle se sentit soulagée. A priori, plus rien ne l’obligeait à jouer la comédie à présent, même si elle n’était pas tout à fait désagréable. Quelques secondes passèrent sans que ni l’un ni l’autre n’ose prononcer un mot, puis Colleen plissa les yeux et consentit finalement à détacher ses doigts des siens. « Je suis désolée, j’en ai peut-être fait un peu trop. J’étais assise là-bas avec des collègues… ». Commença-t-elle avant de jeter un regard à la table en question pour illustrer ses propos. Elle constata avec surprise que toutes ses collègues les regardaient avec des yeux ronds. Elle aperçut même Izzie lever le pouce en signe d’encouragement, et dut secouer la tête pour remettre de l’ordre dans ses idées et poursuivre ses explications. « … Et je t’ai remarqué. Tu n’avais pas l’air particulièrement à l’aise surtout quand… Tu sais, la fille a commencé à te frôler la jambe, tout ça. Je me suis dit que tu avais probablement besoin d’un coup de main pour te dépêtrer de cette situation, alors j’ai sorti le grand jeu ». Elle lui offrit un sourire d’excuse, avant de remarquer une goutte de bière logée sur quelques poils de barbe à la commissure des lèvres de Marius. Elle fronça les yeux et avança l’index en direction de sa bouche, avant d’arrêter son geste aussi net, la main suspendue à mi-hauteur. Elle battit en retraite et s’éclaircit la gorge. « Tu as… Hum, je crois que tu as de la bière, juste là ». Colleen lui montra d’un geste vague l’endroit, avant de se dégager progressivement de l’étreinte du professeur, ne souhaitant pas donner l’impression qu’elle voulait en profiter plus que de raison. Elle se leva finalement, contourna la table et s’installa sur la banquette que venait de quitter Charlotte. Cet éloignement lui permit de reprendre le contrôle de ses émotions, et de laisser un peu d’espace au pauvre Marius qui, décidément, était particulièrement malmené par la gente féminine ces derniers temps.
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| | | | (#)Dim 3 Mai 2020 - 11:40 | |
| Si renouer avec tes soeurs voulait dire devoir faire face à ce genre de guet-apens, tu n’étais pas certain que tu devrais continuer tes efforts dans ce sens. Oui, tu avais souffert de l’absence de lien avec Scarlett mais tu devais avouer que ne pas avoir le nez de ta famille dans ta vie privée était plutôt agréable. Que ta soeur ait envie de changer ton statut de célibataire, cela ne te surprenait pas vraiment parce que c’était tout à fait le genre de Scarlett. Par contre, cet épisode soulignait une chose : elle ne te connaissait pas bien du tout. Et tu ne pouvais pas lui en vouloir, tu étais une partie de la cause de cette ignorance que vous aviez développée l’un pour l’autre. Beth n’aurait jamais osé te faire un coup pareil. Elle te prévenait toujours quand elle t’organisait un blind date et arrivait à t’y faire aller malgré tout. Et surtout Beth savait qu’il valait mieux éviter les personnes trop tactiles dès les premières rencontres. En même temps, tu n’étais pas certain que Beth connaisse des femmes comme Charlotte ce qui soulignait encore un peu plus la différence entre tes deux soeurs. Il allait falloir que tu aies une discussion sérieuse avec Scarlett parce que tu n’avais aucune envie de te retrouver dans cette situation de nouveau. Et puis ta soeur allait certainement avoir un résumé de la soirée par Charlotte, tu ne serais pas surpris si elle avait déjà essayé de te contacter mais ton téléphone était en silencieux et ce n’était pas le moment de regarder ce dernier. Non, ce n’était pas le moment du tout quand tu avais sur les genoux Colleen, bien installée dans tes bras que tu avais placés autour d’elle pour rendre cette charade convaincante. Tu avais l’impression d’être dans un rêve car tu n’arrivais pas à imaginer que la scène se soit réellement déroulée ainsi. Toute l’énergie que tu ne passais pas à paniquer, tu l’avais passée à faire des phrases cohérentes pour faire comprendre à Charlotte, qu’elle pouvait abandonner sa mission, tu n’étais pas intéressé. Colleen te laissa t’occuper de remettre la jeune femme à ta place et tu ne manquais pas son air amusé à certaines de tes phrases. Tu n’étais même pas certain des mots qui sortaient de ta bouche tellement tu avais l’impression de vivre une expérience hors de ton corps. Cela ne t’était jamais arrivé mais il ne faut apparemment jamais dire jamais. Quand Charlotte finit par partir, tu n’avais pas pensé que la voir partir serait un tel soulagement. Tu te sentis respirer un peu plus facilement et pendant quelques secondes tu oubliais presque la présence de Colleen sur tes genoux, vos doigts enlacés et tes bras autour de sa taille. C’est quand les yeux de la jolie brune se posent sur les tient que soudain, chaque point de contact entre ton corps et le sien se réveille et tu prends conscience que vous êtes très, très proches. Trop proches certainement pourtant, tu es incapable de bouger, tu ne veux pas briser ce moment hors du temps pour une raison qui t’échappe. Mais tu finis par ouvrir la bouche et la saluer parce que vous ne pouvez pas continuer à vous fixer sans rien dire. « Bonsoir Marius. » Sa voix était presque comme un murmure, comme si vous étiez dans une bulle et que vous n’étiez que tous les deux. Cela rendait la situation bien plus intime tout d’un coup mais tu te rendis compte que cela ne te faisait pas autant paniquer que cela aurait dû. Le choc initial passé, tu devais avouer que c’était agréable que d’avoir quelqu’un si proche de toi, dans tes bras pour une fois. « Elle est partie ? » Elle n’avait pas quitté ton visage des yeux, elle n’avait pas vu Charlotte pousser la porte et partir. Cela faisait au moins cinq minutes et vu qu’elle n’était pas revenue, tu en déduisis qu’elle était en effet partie. Tu hochais la tête, refusant de briser la connexion mais Colleen le fit pour vous quand elle détacha ses doigts des tiens en te disant : « Je suis désolée, j’en ai peut-être fait un peu trop. J’étais assise là-bas avec des collègues… Et je t’ai remarqué. Tu n’avais pas l’air particulièrement à l’aise surtout quand… Tu sais, la fille a commencé à te frôler la jambe, tout ça. Je me suis dit que tu avais probablement besoin d’un coup de main pour te dépêtrer de cette situation, alors j’ai sorti le grand jeu » C’était plus fort que toi, tu ne pouvais pas l’arrêter, tu sentis le rouge te monter aux joues. Déjà parce que tu n’aimais pas plus que ça être le centre de l’attention et maintenant que Colleen les avait désignées, tu remarquais que tous ses collègues vous regardaient de manière intriguée. Et ensuite parce que tu avais légèrement honte d’avoir été pris le court par une femme qui n’avait rien fait d’autre que du rentre dedans assez physique. Il aurait suffit de la repousser, tu aurais fini par le faire mais pour cela, il fallait que tu calmes la panique qui t’avait envahie et cela prenait un peu te temps. Tu allais la remercier, tu allais dire quelque chose quand elle avança sa main en te disant : « Tu as… Hum, je crois que tu as de la bière, juste là. » Sa main s’arrêta à quelques centimètres de ton visage et tu pus voir à l’expression de ses traits le moment où la bulle dans laquelle cette situation vous avait mis venait de se briser. Tu la laissais glisser hors de tes bras et prendre place en face de toi alors que tu attrapais la serviette en papier posée sur la table pour t’essuyer la bouche. Il n’est plus question de rester silencieux désormais, tu dois une fière chandelle à Colleen, tu en es bien conscient. « Tu n’as pas à t’excuser, c’est à moi de te remercier. » Dis-tu le plus sincèrement du monde. La distance qui existait désormais entre vous grâce à la table te permettait de retrouver un peu ton éloquence ce qui te rassurait beaucoup. « Tu veux boire quelque chose ? » Lui proposas-tu. « Enfin si tes collègues peuvent se passer de toi encore un peu, je ne voudrais pas venir jouer les troubles fêtes. » C’était quelque chose que tu ne faisais jamais de ton côté. Sortir avec tes collègues voulait dire avoir à parler de toi, partager des choses intimes et tu n’en avais aucune envie. Tu avais noué des amitiés dans l’équipe éducative de l’université et tu sortais avec eux de temps en temps mais uniquement parce que tu avais entièrement confiance et que tu les appréciais réellement. « Je suis vraiment désolé que tu aies eu à assister à cette scène. J’essaie de recoller les morceaux avec ma soeur et c’est sa manière à elle de faire les choses. » Dis-tu en secouant légèrement la tête. « Merci d’être venue à mon secours. J’aurais fini par reprendre mes esprits mais je … Je ne suis pas quelqu’un de très tactile, en particulier avec des inconnus et encore plus quand le toucher est … intime. » Tu espérais que Colleen comprendrait que tu ne la considérais pas comme une inconnue et que même si son arrivée sur tes genoux avait créé une panique dans ton esprit, elle n’avait rien à voir avec l’horreur qui t’avait envahie au toucher de Charlotte. « Maintenant on peut dire qu’on est quitte, un sauvetage contre un autre. » Dis-tu un sourire sur les lèvres en haussant les épaules. « Je ne m’attendais pas à ce que l’on se recroise ainsi je dois l’avouer. » Lui dis-tu amusé. Il valait mieux être amusé que de se pencher trop en détail sur les sensations que tu avais ressentis ces dix dernières minutes. Tu n’avais pas eu besoin d’avoir la jeune femme sur tes genoux pour remarquer qu’elle était très belle mais votre dernière interaction avait mis ces pensées de côté quelques temps.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Dim 3 Mai 2020 - 16:00 | |
| La distance plus raisonnable que Colleen avait instauré entre Marius et elle lui permettait de remettre un peu d’ordre dans ses idées, bien que son esprit demeurât brouillé, et pas seulement à cause de l’alcool. Cela faisait une éternité que la jeune femme ne s’était pas trouvée dans les bras d’un homme. A vrai dire, les seuls qu’elle avait connus étaient ceux d’August, son ex-mari, car les précédents ne comptaient pas vraiment – elle ne pouvait pas les considérer comme des hommes à l’époque, ses seules relations avant August se résumant à des amourettes adolescentes et passagères n’ayant abouti à rien d’autre que quelques baisers volés. L’homme qu’elle avait épousé était le seul qui soit parvenu à percer sa carapace et atteindre son cœur. Or, depuis qu’elle lui avait présenté une demande de divorce et pris la poudre d’escampette pour aller vivre à l’autre bout du monde, Colleen avait mis un point d’honneur à refuser toutes interactions romantiques avec la gente masculine. Son objectif en arrivant à Brisbane était clair : se défaire définitivement de l’emprise d’August pour commencer une nouvelle vie, faire ses propres choix et se montrer plus aventureuse. Ses plans n’incluaient en aucun cas une présence masculine à ses côtés, au contraire Colleen considérait qu’elle avait besoin d’être seule pour vivre pleinement sa vie. Louisa avait bien essayé de lui faire changer d’avis, mais c’était peine perdue car si l’adolescente était pourvue d’une détermination tenace, ce n’était rien comparé à l’entêtement de sa mère. Et lorsque l’étudiante avait inscrit Lynn sur un site de rencontre sans l’accord de cette dernière, quelques mois après leur arrivée en Australie, le savon qu’elle s’était vu passer lui avait suffi pour abandonner définitivement son projet. Pourtant, si Colleen se satisfaisait pleinement de son célibat et ne s’en cachait pas, elle devait reconnaître que les minutes passées auprès de Marius l’avaient troublée et semé le doute dans son esprit. Elle avait occulté tout ce qui se trouvait autour d’eux et s’était abandonnée à l’instant passé à ses côtés sans analyser la situation, et surtout sans réfléchir à la portée de ses gestes. Or, elle devait reconnaître qu’elle s’était sentie particulièrement à l’aise dans ses bras. Le professeur d’histoire des arts dégageait une aura rassurante, et à aucun moment Colleen ne s’était sentie en danger sur ses genoux. Au contraire, elle s’était même sentie en sécurité. Et si elle avait écouté son instinct plutôt que sa raison, sans doute qu’elle n’aurait pas été contre prolonger cet instant un peu plus longtemps pour voir où cela pouvait la mener. Sa curiosité avait été piquée et d’après ce qu’elle avait cru déceler dans le regard de Marius, il n’avait pas eu l’air de se plaindre. Il était même resté silencieux, comme si lui non plus n’avait pas voulu rompre le charme de leur échange pour se reconnecter à la réalité.
Quoiqu’il en fût, Lynn ressortait grandement troublée de cette expérience. Assise sur la banquette face à Marius, elle tenta de ne pas laisser transparaître son hésitation et s’abstint d’initier tout autre contact physique avec lui. Ses mains se posèrent prudemment sur le bord de la table et elle croisa ses jambes sous celle-ci, tout en veillant à ne pas rencontrer les pieds de Marius au passage. La vérité était qu’elle se méfiait à présent de ce que lui soufflait son instinct, aussi valait-il mieux prendre ses précautions. Alors que lui aussi semblait reprendre ses esprits et retrouver l’usage de la parole, le beau brun la remercia et lui proposa un verre, si toutefois elle pouvait se permettre de rester éloignée un peu plus longtemps de ses collègues. Oubliant l’espace d’un instant qu’elle avait déjà bu deux cocktails et qu’en prendre un troisième ne serait pas forcément avisé, elle accepta. « Avec plaisir, les piña coladas sont franchement délicieuses dans ce bar ». Lynn tourna la tête et jeta un nouveau coup d’œil en direction de la table qui se trouvait presque dans son dos à présent, et où se tenaient ses collègues. Elle remarqua non sans un certain soulagement que la conversation avait repris son cours et qu’elles ne les dévisageaient plus avec une curiosité palpable. Elle ne put s’empêcher de noter toutefois qu’Izzie continuait à jeter quelques coups d’œil dans sa direction, et s’imagina que dès son retour sur la banquette, la jolie blonde n’hésiterait pas à l’assaillir de questions. Autant repousser ce moment encore un peu, pensa Colleen. Surtout si elle restait en bonne compagnie. La jeune femme tourna la tête et porta de nouveau toute son attention sur son interlocuteur. « Je pense qu’elles pourront très bien se passer de moi, ne t’en fais pas. Quand je suis partie, la discussion tournait autour d’une épisiotomie qui a mal tourné… Je t’épargne les détails, mais autant te dire que tu ne joues pas du tout les trouble-fêtes ».
Alors que Colleen ne parvenait plus à détacher son regard du sien, Marius lui expliqua qu’il essayait de se réconcilier avec sa sœur ces derniers temps, et lui confirma que c’était bien elle qui était à l’origine de son rendez-vous avec Charlotte. Il la remercia d’être venue le sauver et Lynn haussa les épaules, comme si prétendre qu’elle était sa petite-amie et forcer sur les détails pour rendre le mensonge convaincant n’était vraiment pas grand-chose. Il lui expliqua par la suite être quelqu’un de très peu tactile, et que les avances de la jeune femme l’avaient déstabilisé. Lynn acquiesça pour donner le change, mais en réalité un doute s’immisçait dans son esprit. Pour quelqu’un qui ne se considérait pas comme tactile, Marius ne l’avait pourtant pas repoussée quand elle s’était installée sur ses genoux. Au contraire, il était parvenu à rendre leur comédie vraisemblable en multipliant les contacts. Était-ce parce qu’il ne la considérait pas comme une inconnue ? Sans doute. De toute façon Colleen n’était pas vraiment en état d’analyser davantage la situation, et l’incertitude se dissipa rapidement dans son esprit embrumé. « Scarlett, c’est ça ? Le prénom de ta sœur ? Je ne la connais pas mais d’après ce que tu me dis, ça m’a l’air d’être un sacré numéro ». La sage-femme posa son coude sur la table et son menton sur la paume ouverte de sa main, ne quittant pas Marius des yeux un seul instant. « En tout cas, j’espère ne pas être allée trop loin dans ma comédie. Je veux dire, si tu n’es pas du tout tactile, j-je suis désolée si je t’ai perturbé avec mon baiser et… Le reste » Conclut-elle. Elle s’excusait pour rester polie, mais la vérité était qu’elle ne regrettait pas du tout ses gestes. Et puis, il fallait admettre que leur interaction avait rendu cette soirée plus amusante.
Marius considéra qu’ils étaient quittes désormais, et lui avoua qu’il ne s’était pas attendu à ce que leurs chemins se croisent de nouveau, en particulier dans ces conditions. Colleen hocha la tête et sans s’en rendre compte, son regard glissa sur ses lèvres, qui lui apparurent pleines et plutôt attrayantes. Quand elle s’en rendit compte, elle se reprit immédiatement et planta derechef ses yeux dans les siens, ses joues arborant une teinte rosée provoquée par son embarras. Quelle mouche l’avait donc piquée, bon sang ? Elle avait l’impression d’être dans la peau d’une adolescente qui était incapable de se contrôler. Elle s’adossa au dossier de la banquette pour instaurer une plus grande distance entre eux et s’éclaircit la voix. « Tu as raison, moi non plus je ne pensais pas te revoir dans ces conditions. Mais je dois avouer que c’était amusant… Pour moi, en tout cas » S’empressa-t-elle d’ajouter. « Par contre, si la situation se reproduit un jour, évite d’utiliser des expressions comme « se remettre en selle » : j’ai bien cru que j’allais tout faire capoter en éclatant de rire. C’était très difficile de rester sérieuse… Sisi, c’est vrai, ne me regarde pas comme ça ». Elle esquissa un sourire amusé et une lueur espiègle dansa au fond de son regard. Elle tâcha néanmoins de retrouver son sérieux et poursuivit. « Tu veux que j’aille chercher les boissons au bar ? Tu prends quoi ? ». |
| | | | (#)Lun 4 Mai 2020 - 9:05 | |
| Les femmes et toi, ça avait toujours été très compliqué. Tomber amoureux d’Alice alors que tu n’étais qu’un pauvre doctorant avait été la meilleure chose qui te soit arrivé mais en même temps la pire vu comment les choses s’étaient déroulées par la suite. Alice t’avait fait découvrir ce que c’était que d’aimer une autre personne d’un amour fort et sincère, chose que tu n’avais jamais vu dans ton foyer où vos parents se supportaient et s’appréciaient plus qu’autre chose. Mais elle avait ensuite préféré partir avec ton petit frère ce qui avait achevé de fermer ton coeur pour une durée indéterminée. La douleur avait été telle que tu n’avais pas voulu reprendre le risque d’être blessé ainsi. Oh certaines femmes avaient voulu croire que tu allais changer, pour elle, mais tu avais toujours fini par les décevoir car tu ne t’investissais pas assez. La vérité c’était que tu ne t’en sentais pas capable. Tu t’étais souvent demandé si Alice se doutait des dégâts qu’elle avait causés en partant avec Tommy. Et pas simplement au niveau de ta relation avec ton frère qui était déjà compliquée à l’époque. Les tentatives pour te pousser à te lancer dans une relation avaient été nombreuses quand tu étais trentenaire mais le passage de la quarantaine semblait avoir freiné tes proches dans leur frénésie. Ils étaient sans doute bien trop content que tu puisses les dépanner en gardant leur progéniture au pied levé pour essayé de te trouver chaussure à ton pied. Tu avais bien conscience de ne pas être le seul à être marqué par tes expériences passées. Colleen aussi devait avoir son histoire à elle vu que le père de Lou ne semblait pas dans les parages de ce que tu avais compris lors de votre dernière conversation. C’était toujours étrange pour toi de relier Lou à la belle brune en face de toi. Colleen était si jeune … Aurais-tu sacrifié ta carrière pour un enfant s’il avait pointé le bout de son nez alors que tu n’étais pas encore vraiment un adulte ? Tu n’en savais rien et tu n’avais pas eu à te poser la question. La solitude dans laquelle tu t’étais enfermée un peu malgré toi ces dernières années te rendait réticent au toucher des autres, en particulier quand c’était un toucher que tu ne voyais pas venir. Mais une fois la panique et l’anxiété évacuée, tu avais apprécié ce contact avec Colleen, peut-être plus que tu n’aimerais l’admettre. Alors qu’elle était installée sur la banquette en face de toi, tu pouvais encore sentir des traces de ce toucher inattendu mais pas aussi gênant que tu ne l’avais imaginé.
C’était un peu malgré vous que la bulle dans laquelle vous vous étiez installée venait d’être brisée. Vous repreniez tous les deux vos esprits et le fil d’une nouvelle conversation. Toi qui pensais passer la soirée avec ta soeur, tu étais bien loin du compte ce soir … Mais la compagnie de Colleen avait toujours été agréable et donc tu cherchais à la prolonger, un peu égoïstement, en lui proposant un verre pour la remercier. « Avec plaisir, les piña coladas sont franchement délicieuses dans ce bar » Un sourire amusé se dessine sur tes lèvres. Tu n’étais pas très penché sur les cocktails mais tu la prendrais au mot. Les cocktails étaient trop alcoolisés pour toi, tu ne voulais pas prendre plus de risques que nécessaire. Si c’était ce que Colleen voulait cependant, tu lui en commanderas une. « Je pense qu’elles pourront très bien se passer de moi, ne t’en fais pas. Quand je suis partie, la discussion tournait autour d’une épisiotomie qui a mal tourné… Je t’épargne les détails, mais autant te dire que tu ne joues pas du tout les trouble-fêtes » Tu sens une grimace se dessiner sur ton visage. Tu ne connais pas les détails de cette procédure, la seule chose que tu sais c’est qu’elle est réalisée lors de l’accouchement pour aider les choses. N’ayant pas eu d’enfants et n’ayant pas eu à assister à des accouchements, tu ne t’étais pas renseigné plus que cela. Tu regardes une dernière fois les collègues de Colleen et tu souris d’une manière que tu espères rassurante à la collègue qui vous jette encore des regards mi curieux, mi-inquiets de temps en temps. « Avoue que tu cherchais à te sauver également, je t’ai donné une bonne excuse. » Lui dis-tu pour la taquiner. Ce genre de sujet devait être l’équivalent pour vous des élèves dissipés et insupportables que vous aviez en cours. Toi, tu les oubliais dès que tu quittais l’université mais tes collègues aimaient en parler en dehors, tu l’avais compris en lui suivant prendre un verre une des rares fois où tu y étais allé. Même si tu ne devais pas vraiment d’explications à Colleen, tu lui expliquais comment tu t’étais retrouvé dans cette situation. Honteux de t’être laissé déstabiliser par le pied de Charlotte remontant sur ta jambe, tu expliquais assez maladroitement à la jeune femme pourquoi tu avais été si mal à l’aise. Tu n’étais pas très tactile, plus par manque de contact en temps normal que parce que tu n’aimais pas du tout ça. Tu vis la surprise sur les traits de Colleen à cette explication car tu ne l’avais pas chassée de tes genoux quand elle s’y était assise. Tu étais peut-être un meilleur acteur que tu ne le pensais si elle n’avait pas vu la panique qui t’avait envahie pendant quelques secondes. « Scarlett, c’est ça ? Le prénom de ta sœur ? Je ne la connais pas mais d’après ce que tu me dis, ça m’a l’air d’être un sacré numéro » Tu laissais échapper un petit rire à ces paroles en secouant légèrement la tête. En effet, c’était un très bon descriptif de la plus jeune de tes soeurs. Tu avais encore du mal à comprendre comment elle fonctionnait, tu ne la connaissais toujours pas assez bien mais tu essayais. « C’est bien Scarlett en effet. Et c’est un excellent descriptif. Mais en vérité mes deux soeurs sont de sacrés numéros mais à leur manière. » Beth et Scarlett ne pouvaient pas être plus différentes l’une de l’autre mais cela n’empêchait pas que cette expression pouvait les décrire toutes les deux d’une certaine manière. « En tout cas, j’espère ne pas être allée trop loin dans ma comédie. Je veux dire, si tu n’es pas du tout tactile, j-je suis désolée si je t’ai perturbé avec mon baiser et… Le reste » Tu secouais la tête, tu ne lui avais pas confié cela pour qu’elle s’excuse et tu ne lui en voulais pas. Au contraire, elle t’avait sauvé la mise parce que dix minutes de plus avec Charlotte sonnaient comme l’enfer. « Je ne te cache pas que j’ai eu un moment de panique mais il est vite passé. Cela faisait des années que je n’avais eu personne sur mes genoux cependant. » Dis-tu presque contemplatif. Moïra ne comptait pas, surtout qu’elle le faisait de moins en moins désormais.
Le silence s’installa quelques instants entre vous et alors que tu n’avais pas à réfléchir aux mots qui sortaient de ta bouche, tu observais Colleen. Sa peau au teint clair qui rougissait légèrement, ses yeux qui étincelaient et brillaient de malice, ses longs cheveux bruns, … Elle était vraiment magnifique. Tu l’avais remarqué lors de votre première rencontre mais sans réellement t’arrêter sur ce détail. Quand elle se recula pour s’appuyer sur la banquette, tu sortis de tes pensées pour l’écouter te dire : « Tu as raison, moi non plus je ne pensais pas te revoir dans ces conditions. Mais je dois avouer que c’était amusant… Pour moi, en tout cas. Par contre, si la situation se reproduit un jour, évite d’utiliser des expressions comme « se remettre en selle » : j’ai bien cru que j’allais tout faire capoter en éclatant de rire. C’était très difficile de rester sérieuse… Sisi, c’est vrai, ne me regarde pas comme ça » Tu répondis à son sourire amusé par un petit rire. La vérité c’était que tu avais dit la première chose qui te passait par la tête. Tu n’avais pas réfléchi à ce que cela pouvait avoir comme répercussion mais tu pouvais comprendre pourquoi Colleen avait trouvé cela amusant : « C’est l’expression que Scarlett et Beth ne cessent d’utiliser, elles l’ont gravée dans mon esprit. » Expliquas-tu à Colleen amusé. « Je t’aurais pardonné d’en rire, je ne trouve pas toujours les bonnes expressions. » Tu étais un bon orateur mais tu n’étais pas un spécialiste non plus et tu n’avais pas toujours les bons mots et les bonnes expressions au bon moment. « Tu veux que j’aille chercher les boissons au bar ? Tu prends quoi ? » Tu secoues la tête et tu te lèves car ce n’est pas à elle d’aller chercher les boissons vu que tu comptes bien la lui offrir pour le service qu’elle vient de te rendre. « C’est moi qui t’invites. » Lui dis-tu avec un clin d’oeil avant de te diriger vers le bar. Tu commandes une piña colada pour Colleen et un petit verre de vin pour toi. Tu ne risques rien à prendre un deuxième verre mais ce sera bel et bien le dernier. Tu as appris ces dernières années que jouer avec les limites pouvait s’avérer être une très mauvaise idée. Les deux verres à la main, tu revins t’installer en face de Colleen, posant son cocktail devant elle. « Et voilà pour toi ! Trinquons à ce sauvetage ! » Lui dis-tu en levant ton verre. Après avoir bu une première gorgée, tu lui demandais : « Comment vas-tu depuis la dernière fois ? Tu as l’air de te plaire sur les terres australiennes. » Lui fis-tu remarquer parce que tu pourrais presque oublié que Colleen n’était en ville que depuis quelques mois.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Mar 5 Mai 2020 - 19:02 | |
| Qu’il était ironique de se retrouver dans une telle posture avec Marius, quand Colleen avait fait la morale à sa propre fille dix jours plus tôt, lui reprochant de faire des avances à son professeur. Certes, le contexte était différent – elle n’avait pas le même âge que Lou et ne faisait pas non plus partie des étudiantes du professeur Warren – toutefois il fallait bien avouer qu’avec du recul, l’hôpital se moquait un peu de la charité… A croire que la pomme ne tombait jamais très loin de l’arbre, et que la fille avait les mêmes goûts que sa mère. Qu’à cela ne tienne, Colleen n’était pas en train de séduire Marius, et les circonstances dans lesquelles elle s’était retrouvée sur ses genoux étaient tout à fait défendables. Elle avait voulu rendre service après tout… Ce n’était pas comme si elle s’était jetée dans ses bras dans le but de lui faire un numéro de charme – tel n’était pas vraiment le genre de la maison. Cependant, elle devait admettre qu’en dépit de ses réticences, elle ne demeurait pas insensible aux charmes du professeur. Il était bel homme, elle avait eu tout le loisir de s’en rendre compte quand elle était encore sur ses genoux. Il possédait un regard magnétique dans lequel il était difficile de ne pas se perdre, une mâchoire carrée dissimulée sous une barbe qui lui avait agréablement chatouillé les lèvres quand elle avait embrassé sa joue, et des traits à la fois virils et harmonieux. Même les pattes d’oies qui creusaient très légèrement sa peau au coin de ses yeux étaient séduisantes. Il n’était donc pas étonnant que le professeur d’histoire des arts de la Queensland University ait tapé dans l’œil de sa fille. Même si cette dernière persistait à dire qu’elle n’était pas vraiment attirée par Marius, et qu’il ne s’agissait que d’un jeu initié dans le but de gagner la sympathie et le respect de ses camarades, Colleen avait bien du mal à la croire, surtout après avoir passé un peu de temps en compagnie du professeur en question. De plus, la sage-femme avait toujours soupçonné sa fille de préférer aux garçons de son âge des hommes plus murs et plus expérimentés. Complexe d’Œdipe ? Peut-être, en tout cas certains indices lui avaient mis la puce à l’oreille. Comme par exemple lorsque du haut de ses six ans, Lou avait désigné Robert Downey Jr dans son costume d’Ironman sur l’écran de la télévision, et déclaré avec le plus grand sérieux qu’il était le plus bel homme au monde et qu’elle l’épouserait un jour. Ou quand, un peu plus tard, elle avait rejeté les avances de Malcolm, leur petit voisin qui avait son âge, confiant à sa mère qu’elle le trouvait « trop gamin ». Et s’il était vrai que Lou s’était toujours montrée précoce vis-à-vis de ses camarades, que ce soit au niveau scolaire ou social, il en allait sûrement de même pour sa vie sentimentale et son intérêt pour les garçons. Louisa n’avait jamais ramené le moindre petit-ami à la maison – craignant sans doute de s’attirer les foudres de son père – mais Colleen admettait volontiers que voir sa fille en compagnie d’un garçon n’était pas quelque chose qu’elle aspirait à voir avant au moins une paire d’années.
Chassant l’image de sa fille de son esprit, et se débarrassant de la culpabilité qui l’avait envahie un instant à son évocation, Colleen se concentra de nouveau sur Marius qui lui parlait de ses sœurs. Apparemment, deux sacrés phénomènes si elle s’en tenait à ce qu’il lui disait. Pourtant, elle sentait bien à sa manière de s’exprimer qu’il éprouvait une grande affection pour toutes les deux. A la réflexion, Lynn en vint à se dire que si Marius lui semblait si protecteur, c’était sans doute lié à son statut d’aîné de fratrie. D’après ce qu’elle avait appris le concernant, il n’avait pas d’enfant, mais il ne faisait l’ombre d’un doute qu’il aurait fait un excellent père tout comme il avait dû être un très bon frère aîné. Alors qu’il lui confiait à présent avoir ressenti un moment de panique quand elle s’était imposée sur ses genoux pour le sauver des griffes de Charlotte, Colleen s’interrogea sur les raisons qui expliquaient le peu de contacts physiques expérimentés par le professeur d’université ces derniers temps. Marius venait de l’admettre : il n’était pas habitué à être au contact de femmes, et plus tôt il avait même avoué que sa sœur pensait qu’il était temps pour lui de se remettre en selle. Si la jeune femme s’était amusée de l’utilisation de cette expression, elle n’avait pas réfléchi à ce qu’elle impliquait réellement, et de nouveau, cette révélation souleva bon nombre de questions. A en juger par son physique séduisant et sa tendance à attirer ses étudiantes comme des aimants sans même le vouloir, il ne devait avoir aucun mal à charmer la gente féminine. Était-ce donc par choix, qu’il évitait les relations ? Colleen ne voyait que cela, et cela expliquerait la persévérance de Scarlett à vouloir caser son frangin, à défaut de justifier pourquoi exactement Marius fuyait les femmes. Au moins, se dit Lynn en l’observant toujours avec la même intensité, ils étaient tous les deux sur la même longueur d’onde. En théorie. « Au plus tu me parles de tes sœurs, au plus tu me donnes envie de les connaître » Avoua-t-elle avec un sourire. « En tout cas, tu n’as pas l’air de t’ennuyer avec elles ». Fille unique, Colleen avait toujours regardé les fratries avec envie. C’était d’ailleurs le seul regret qu’elle nourrissait à l’égard de Lou : le fait d’en avoir fait une fille unique à son tour, et de ne lui avoir donné ni frère ni sœur. C’était un schéma que, plus jeune, elle s’était jurée de ne jamais reproduire et qui avait pourtant fini par être dupliqué à l’identique. Même s’il s’agissait d’un accident, elle était tombée enceinte très jeune tout comme sa propre mère avant elle, et avec les études d’August et le souhait de Lynn de reprendre les siennes plus tard, il n’avait pas été question de faire un deuxième enfant.
En parfait gentleman, Marius lui proposa d’aller chercher lui-même les boissons et de l’inviter. Il détacha son regard du sien et quitta la banquette pour se diriger vers le bar, et Colleen fixa le siège vide avec regret. L’arrivée de son troisième cocktail étant imminente, elle se ressaisit rapidement et profita de ces quelques instants seule pour inspirer profondément par le nez et expirer lentement par la bouche, comme elle l’enseignait à ses patientes pour leur permettre de retrouver leur calme. Car la vérité était qu’elle en avait bien besoin, de calme et de sérénité, après l’échange particulièrement troublant qu’elle venait d’avoir avec Marius. Récupérant son téléphone portable qu’elle avait emporté dans la poche de sa longue robe, elle constata avec effarement qu’une pluie de notifications s’était abattue sur celui-ci – la plupart en provenance d’Izzie, qui de toute évidence ne lésinait pas sur les points d’exclamation pour faire passer ses messages.
- Izzie a écrit:
- Lynn, qu’est-ce que tu fabriques ??!! C’est qui ce mec ?! Il a un copain ? Ou un frère ? Ou mieux, un jumeau ?!!!
- Izzie a écrit:
- Et dire qu’on est en train de parler de ventouse obstétricale pendant que toi tu flirtes tranquillement avec ce type. J’en reviens pas !!! KARMA IS A BITCH !!!!
- Izzie a écrit:
- J’espère que tu as un moyen de contraception au moins… Tu es sage-femme, tu sais ce qui arrive dans un moment d’égarement… !!
- Izzie a écrit:
- Et dire que je pensais que tu étais une sainte ! Tu caches bien ton jeu !!
- Izzie a écrit:
- Hey oh ! Je sais que tu es en train de lire mes messages, regarde par ici !!!!!!
Clairement, Izzie avait une tolérance à l’alcool encore moins élevée que la sienne. Colleen se tourna pour voir sa collègue lui adresser un clin d’œil – avec les deux yeux – avant qu’elle ne se mette à pianoter furieusement sur son écran. Curieuse, la sage-femme se redressa et glissa un coup d’œil à son propre téléphone. Quelques secondes plus tard, le message lui parvint et elle éclata de rire – il ne contenait aucun mot, mais plutôt une succession de smileys plus suggestifs les uns que les autres qui laissaient peu de place à l’imagination. C’est bien sûr à ce moment précis qu’elle entendit Marius revenir derrière elle, et elle se dépêcha de ranger son téléphone avant qu’il ne puisse en voir l’écran, rougissant légèrement en repensant au dernier message de sa collègue. « Merci beaucoup, tu es vraiment un parfait gentleman ». Ils levèrent leur verre ensemble et trinquèrent au sauvetage de Colleen. Tout comme il l’avait fait à chaque fois qu’ils s’étaient vu, Marius s’intéressa à elle, lui demandant comment elle allait et si elle se plaisait toujours en Australie. Lynn planta son regard dans le sien et porta le verre à ses lèvres avant de lui répondre. « Ça va très bien ! Et non seulement je m’y fais mais cette nouvelle vie en Australie me plaît beaucoup en plus de ça. Je savoure pleinement la liberté qu’elle m’offre ». Elle souleva son verre pour appuyer ses propos. « … Comme tu peux le voir. D’ailleurs, à la réflexion, je ne suis pas certaine que ce troisième verre était une bonne idée si je ne veux pas me couvrir de ridicule. Du coup… Je compte sur tes talents de sauveur pour m’aider si jamais je pars en cacahuètes ». Elle le désigna de l’index de sa main libre, les yeux brillants. Elle reposa finalement le verre et attrapa distraitement le morceau d’ananas sur le bord. Elle n’avait pas mangé grand-chose depuis son déjeuner pris à l’hôpital plusieurs heures plus tôt, aussi pensait-elle naïvement que grignoter les fruits de ses piña coladas pourrait l’aider à tenir le coup. « Et toi ? J’espère que ça va… Je veux dire, entre les étudiantes éperdues d’amour qui te courent après et ta sœur qui t’organise des rendez-vous romantiques avec des femmes très séduisantes sans ton accord, il y a de quoi perdre la tête. Et si en plus de ça tu dois te coltiner une maman d’élève un peu alcoolisée par la suite… Quelle horreur, je te plains ! » Fit-elle pour le taquiner, avant de croquer une nouvelle fois l’ananas. |
| | | | (#)Mer 6 Mai 2020 - 10:54 | |
| Voilà une soirée qui n’avait pas du tout pris la tournure escomptée. Pensant retrouver Scarlett ce soir, tu t’étais attendu à une soirée agréable mais pas complètement. Tu n’étais toujours pas très à l’aise en présence de ta plus jeune soeur, ayant peur que tes mots soient mal interprétés. Scarlett était impulsive et tu savais qu’un pas de travers pouvait réduire à néant tous tes efforts. Donc, comme à chaque fois que tu te retrouvais en famille, tu avais fini par accepter que tu ne pouvais pas être complètement à l’aise, complètement toi-même. Et n’était-ce pas le plus cruel ? Tu entends souvent tes collègues dire que c’est en famille qu’ils peuvent être eux-même sans avoir peur d’être jugés. Toi, tu étais toi-même dans d’autres circonstances et souvent seul dans ton appartement certainement. Mais c’était sans doute cette impossibilité pour toi d’être totalement quelqu’un d’autre, de laisser derrière toi des blessures passées qui faisaient que tu vivais de manière solitaire. Oh tu l’entendais bien assez de tes collègues, cette incrédulité qu’ils laissaient paraître quand tu leur disais que tu étais seul. Tu ne la connaissais que trop bien … Ce n’était pas si grave. Personne ne te forçait à rester seul, tu aurais pu trouver quelqu’un certainement mais tu n’avais pas envie d’être avec une femme juste pour l’être, tu n’avais pas envie de lui faire croire qu’elle possédait ton coeur quand tu savais que c’était impossible. Depuis ton retour de Paris, depuis que les choses s’améliorent avec Tommy, tu commences à mettre derrière toi un certain nombre de choses. Peut-être que tu finiras par te sentir prêt à te livrer de nouveau à quelqu’un ? Tu n’en sais rien mais une chose est sûre, Tommy n’est pas prêt de la rencontrer le jour où cela arrivera. Réaction ridicule et puérile mais ce sera une peur qui t’accompagnera jusqu’à la fin de ta vie très certainement. Le sourire de Colleen et ses yeux brillants de malice te sortirent de tes pensées. Tes différentes rencontres avec la jeune femme s’étaient révélées hasardeuses et assez drôle dans l’ensemble. Tu avais été amusée par son accent anglais, sa maladresse naturelle et attachante. Colleen avait su te mettre à l’aise rapidement, sans réellement faire d’efforts pour cela. Le fait qu’elle ne connaisse personne dans ton entourage, qu’elle ne s’attende à rien de ta part devait sans doute jouer là-dedans. Votre dernière rencontre était elle plus gênante mais peut-être pas plus que ce qui s’était passé aujourd’hui. C’était d’ailleurs très ironique que tu aies dû demander à Colleen de parler à sa fille pour qu’elle arrête de te draguer en cours et d’avoir joué la comédie inverse avec la mère de Lou quelques minutes plus tôt … Tu avais eu du mal à faire le lien entre la fille et la mère au départ mais après le sauvetage de Colleen ce soir, tu n’avais aucun mal à retrouver des traits de caractères de Lou chez sa mère. Tu devrais d’ailleurs remercier la jolie brune parce que sa fille s’était très largement calmée depuis votre entretien et cela te permettait de te détendre un peu plus et de mieux respirer en cours.
Parce que tu avais parlé de Scarlett et de la raison pour laquelle tu t’étais retrouvé dans cette situation, tu parlais un petit peu de tes soeurs à Colleen. Oh elles étaient toutes les deux de sacrés numéros, sans doute plus que tu ne pouvais ou ne voulais t’en douter. Tu les aimais énormément toutes les deux mais tu n’étais pas toujours le meilleur quand il s’agissait de le leur montrer. « Au plus tu me parles de tes sœurs, au plus tu me donnes envie de les connaître. En tout cas, tu n’as pas l’air de t’ennuyer avec elles » Tu secouais légèrement la tête. Non, tu ne t’ennuyais jamais avec tes soeurs, tu ne t’ennuyais jamais avec ta famille en général en vérité. Dans des situations comme ce soir, ce n’était pas très grave, c’était même amusant. Mais la plupart du temps, ce n’était pas des petites machinations sans importance qui transparaissaient entre les Warren. C’était bien plus que ça et votre mère était la reine des manipulatrice, un don qu’elle avait passé à des degrés très divers à tous ses enfants. Beth était très certainement la meilleure à ce jeu … « On ne s’ennuie jamais chez les Warren. J’aimerais te dire que c’est une bonne chose mais ce n’est pas toujours le cas. » Dis-tu en haussant les épaules. Votre famille était loin d’être parfaite, elle était même loin d’être agréable. Les coups bas, les rancoeurs, la jalousie, voilà des sentiments qui qui étaient la base de vos liens familiaux. Alors même si vous essayiez de changer les choses, ce n’était pas forcément évident. « Tu es fille unique ? » Demandas-tu à Colleen curieux d’en savoir plus sur elle. C’était la manière dont elle avait prononcé sa dernière phrase qui te laissait penser que la jeune femme n’avait pas eu la malchance de grandir dans une grande fratrie. Tu n’arrivais pas à décider si c’était une bénédiction ou une malédiction, même à quarante trois ans, tu n’arrivais pas à trancher.
C’était à toi d’aller chercher les boissons alors une fois que tu sus ce que Colleen voulait, tu filais au bar pour les récupérer. Alors que tu les attendais, ton regard se posa sur Colleen qui avait sorti son portable et qui semblait amusée par ce qu’elle y avait trouvé. Son regard en coin à sa collègue te fit comprendre qu’il y avait une conversation en cours entre les deux et un sourire amusé se dessina sur ton visage. Heureusement que Colleen était plongée dans son téléphone parce que tu n’étais pas certain d’être très discret. Tu aurais pu détourner le regard mais tu n’en avais pas envie. Il y avait quelque chose de fascinant à regarder le sourire de la jeune femme, à voir le rose lui monter aux joues puis disparaître alors qu’elle secoue la tête, à voir un sourire en coin se dessiner sur son visage et puis le clin d’oeil à sa collègue. Tu te surpris à avoir envie de coucher ces expressions sur du papier, de dessiner les traits fins de la jeune femme pour ne pas les oublier … Le barman pose les boissons devant toi et tu sursautes alors qu’il te sort de ta contemplation. Le sourire en coin qu’il te lance te fait comprendre qu’il a vu clair dans ton jeu. Tu te contentes de le remercier et d’apporter les boissons à la table où Colleen t’attend. « Merci beaucoup, tu es vraiment un parfait gentleman » On te le dit souvent mais pour toi, c’est naturel. Certains trouvent cela vieux jeu, d’autres trouvent cela stupide, toi tu trouves cela nécessaire et tu es heureux que Colleen apprécie le geste. « Parfait je ne sais pas, mais j’essaie en tout cas. » Lui dis-tu avec un clin d’oeil avant de trinquer. Parce que c’est important pour toi de prendre des nouvelles et parce que cela ne te dérange pas d’écouter les autres parler d’eux, tu demandes à Colleen si sa vie à Brisbane se passe toujours bien. « Ça va très bien ! Et non seulement je m’y fais mais cette nouvelle vie en Australie me plaît beaucoup en plus de ça. Je savoure pleinement la liberté qu’elle m’offre… Comme tu peux le voir. D’ailleurs, à la réflexion, je ne suis pas certaine que ce troisième verre était une bonne idée si je ne veux pas me couvrir de ridicule. Du coup… Je compte sur tes talents de sauveur pour m’aider si jamais je pars en cacahuètes » Il y avait quelque chose de terriblement amusant à voir la jeune femme légèrement ivre. Elle était encore en pleine possession de ses moyens mais lors de vos rencontres précédentes, il y avait une certaine réticence à laisser tomber les masques, que ce soit de ton côté ou du sien parce que vous ne vous connaissiez pas vraiment. Mais ce soir, il n’était plus question de masque ou de réticence, c’était une Colleen sans filtres que tu avais en face de toi. Posant une main sur ton coeur, tu lui dis : « Promis, je m’engage à te sauver de toi-même ce soir si nécessaire. Je ne boirai pas autre chose après ce verre, je pourrai même te ramener chez toi si besoin. » Tu ne savais pas comment elle était arrivée au bar mais si elle était en voiture, elle ne pourra pas la prendre pendant de longues heures encore. Sauf que tu pris conscience quelques secondes trop tard de ce qu’une telle invitation pouvait vouloir dire. « Je n’essaie pas de m’inviter chez toi je … Enfin, si jamais … Je préfèrerais m’assurer que tu es bien rentrée. » Dis-tu simplement pour éviter de t’enfoncer un peu plus dans le trou que tu étais en train de creuser. Tu pris une gorgée de ton vin pour te distraire : « Et toi ? J’espère que ça va… Je veux dire, entre les étudiantes éperdues d’amour qui te courent après et ta sœur qui t’organise des rendez-vous romantiques avec des femmes très séduisantes sans ton accord, il y a de quoi perdre la tête. Et si en plus de ça tu dois te coltiner une maman d’élève un peu alcoolisée par la suite… Quelle horreur, je te plains ! » Tu ris légèrement à la taquinerie de ton interlocutrice. Tu pouvais comprendre comment elle pouvait arriver à une telle conclusion mais ta vie n’était pas si intéressante que ça. « C’est vraiment très difficile, je vais bientôt craquer. » Lui dis-tu en prenant un air bien trop défaitiste pour être réel. Tu n’avais jamais été un bon comédien. « Dit comme ça, ma vie semble le plot parfait pour un soap opéra. » Dis-tu amusé. Ta vie était tout sauf un soap opéra … « Mais je dois dire que j’apprécie la compagnie de la mère mon élève légèrement alcoolisée. C’est beaucoup plus intéressant que le reste. » Lui dis-tu avec un clin d’oeil. Parce que c’était vrai et parce que flirter ne pouvait pas faire de mal n’est-ce pas ? « D’ailleurs merci beaucoup. J’espère que la discussion que tu as eue avec Lou n’était pas trop pénible. Dans tous les cas elle a porté ses fruits donc merci. » Elle ne pouvait pas s’imaginer le soulagement que cela avait été de ne plus avoir à contourner tous les sous-entendus de Lou qui posait désormais ses questions normalement. Elle se laissait prendre au jeu de temps en temps mais ça, tu pouvais le lui pardonner.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Mer 6 Mai 2020 - 19:08 | |
| « Yep, fille unique » Répondit Colleen lorsque Marius lui posa la question. « Je ne te cache pas que j’ai tendance à envier les grandes fratries de ce fait. J’imagine que quelque part, on convoite toujours ce que l’on n’a pas : les enfants uniques rêvent d’une flopée de frères et sœurs avec lesquels s’amuser, quand les enfants issus de fratries, eux, jalousent ceux qui ont le bonheur d’être le centre de l’attention parentale » Déclara-t-elle avec philosophie, le menton posé dans la paume de sa main, ses yeux se perdant dans le vague l’espace d’un court instant. Elle ne savait pas d’où lui venait cet élan de discernement, mais force était de constater qu’il était parvenu à traverser le voile nébuleux de ses pensées. C’était une réflexion qu’elle s’était toujours faite, enfant. Alors que ses amis se plaignaient sans cesse de frères et de sœurs pénibles, et de l’injustice qu’occasionnaient les décisions parentales, Lynn les avait toujours considérés comme étant particulièrement chanceux. A l’époque, elle aurait tout donné pour voir le ventre de sa mère s’arrondir et quelques mois plus tard, découvrir avec émerveillement le visage d’un petit bébé qui posséderait les traits de l’un de ses parents, peut-être même un peu des siens. Elle en avait d’ailleurs exprimé l’envie à plusieurs reprises, rentrant de l’école les yeux brillant d’espoir pour demander à ses parents un petit frère avec lequel s’amuser. Elle se souvenait même avoir ajouté la mention « petit frère » sur l’une de ses listes adressées au Père Noël, alors qu’elle n’avait que quatre ou cinq ans. Ses parents avaient beau lui expliquer que ce genre de cadeau ne pouvait être livré par le vieil homme à la longue barbe blanche, Colleen n’avait pu empêcher la déception de peindre ses traits chaque fois qu’elle avait ouvert le contenu des cadeaux sous le sapin et découvert qu’ils ne renfermaient pas un nouveau-né tout fripé. Au fil des années et des Noëls, elle s’était fait une raison puis s’était jurée de ne jamais reproduire ce tableau familial. Bien sûr, le destin en avait décidé autrement et l’avait finalement amenée à suivre le même chemin. Colleen soupira puis se redressa sur son siège avant de balayer ces pensées du revers de sa main. Ses traits se détendirent et elle plissa les yeux. « Si je tombe dans ce genre de sentimentalisme, c’est que j’ai vraiment besoin d’un autre verre » Fit-elle pour changer de sujet. Elle proposa à Marius d’aller chercher les boissons mais celui-ci déclina son offre et se rendit lui-même au bar. D’ordinaire Colleen aurait insisté pour s’en occuper elle-même – elle avait passé tellement d’années soumise aux décisions de son époux sans pouvoir véritablement intervenir dans le processus, qu’elle avait fait le serment de ne plus jamais laisser un homme, quel qu’il soit, lui dicter sa conduite en Australie. Toutefois, elle devait admettre qu’elle ne faisait plus vraiment confiance en son sens de l’équilibre, rendu précaire par la consommation de ses deux précédents cocktails. De plus, elle pressentait que Marius n’était en rien similaire à son ex-époux et que, peut-être, elle pourrait lui accorder sa confiance. Contrairement à August, il avait l’air de réellement se soucier de ce qu’elle pensait, et y accorder du crédit. Quand il avait proposé de se rendre au bar, il s’était imposé sans hausser le ton de la voix, et Colleen avait interprété son geste comme un élan de serviabilité plutôt qu’un élan d’orgueil. Bien sûr, tout cela n’était peut-être qu’une façade en réalité. Lorsqu’ils étaient jeunes, August aussi lui était apparu sous son meilleur jour. Elle n’avait décelé ni même suspecté qu’il puisse être en réalité si différent de ce qu’il lui avait laissé entrevoir. Aussi Colleen nota-t-elle dans un coin de son esprit qu’elle devait demeurer vigilante malgré tout et ne pas se laisser berner par le jeu des apparences, qui pouvaient s’avérer trompeuses, comme elle l’avait appris à ses dépens.
La jeune femme s’amusa beaucoup de son échange avec Izzie en l’absence de Marius, et lorsqu’il revint à sa place et qu’elle glissa son téléphone portable dans la poche de sa robe avec empressement, elle apprécia le fait qu’il ne puisse pas lire dans ses pensées. Ces dernières, déjà troublées quand il l’avait quittée momentanément, l’étaient encore davantage après les remarques de sa collègue. La vérité était que ses certitudes étaient malmenées par l’attirance qu’elle ressentait à l’égard du professeur d’université – une attirance qu’il était difficile de continuer à dénier à présent, son passage sur les genoux du beau brun ayant exposé assez clairement la nature de son attraction. Alors qu’elle s’était évertuée à garder la plus grande distance possible entre elle et lui, son corps se tendit en avant dès qu’il s’assit face à elle. Son dos se décolla du dossier et elle se rapprocha ostensiblement de la table à laquelle elle s’accouda. Ils trinquèrent et Marius répondit à son compliment de façon humble. Bien sûr qu’il n’était pas parfait, mais ses manières l’étaient bel et bien, quoiqu’il puisse en dire. Alors qu’elle lui confiait compter sur ses talents de sauveur si elle venait à déraper à force d’enchaîner les cocktails, il posa sa main sur son cœur et déclara solennellement qu’il volerait à son secours si la situation se présentait, quitte à la raccompagner chez elle si besoin était. Lynn haussa les sourcils et inclina la tête, ses yeux brillant à nouveau d’un éclat taquin. Marius ne tarda pas à se rattraper – ou du moins, il essayait – en ajoutant de manière assez maladroite qu’il ne sous-entendait rien d’autre par là. Lapsus révélateur ? Elle sonda les traits de son visage et ses yeux en particulier, et ne put empêcher un doute de s’immiscer dans son esprit. Venait-il d’exprimer autre chose dans un moment d’égarement ? Elle chassa cette interrogation de son esprit, n’étant pas en mesure de lui accorder plus d’importance de toute façon. « Bien sûr, bien sûr… J’ai parfaitement compris ce que tu voulais dire, ne t’en fais pas ». Un sourire amusé s’installa éhontément sur ses lèvres et elle lui adressa un clin d’œil alors que le rose montait aux joues de Marius, signe que la même idée avait bien traversé leurs esprits à tous les deux. Pourtant, à moins d’un sacré retournement de situation – ou d’autres cocktails – elle n’était pas prête à le laisser entrer chez lui. Ce n’était pas une idée déplaisante pour autant, certes, il était parvenu à piquer sa curiosité et à éveiller des sensations qu’elle pensait avoir réussi à anesthésier définitivement, mais pour autant il s’agissait d’un pas qu’elle n’était pas prête à franchir.
Alors qu’ils goûtaient tous les deux leur boisson, Colleen s’intéressa à son tour à Marius, faisant allusion à ses talents de séducteur. Bien loin de se laisser décontenancer par les provocations de la sage-femme, il parvint à lui donner le change, lui confiant qu’il ne tarderait pas à craquer si la situation venait à se poursuivre. Elle tenta de réprimer un sourire en pinçant ses lèvres, et fit mine de le croire en hochant la tête d’un air compatissant alors que son jeu d’acteur peinait en réalité à la convaincre. Et puis, avec un naturel déconcertant, il avoua que la mère alcoolisée l’intéressait plus que le reste. Surprise, Colleen en lâcha le bout d’ananas qu’elle grignotait à ce moment-là. Apparemment lui aussi pouvait se révéler particulièrement taquin, et sous ses airs de ne pas y toucher, flirtait sans peine avec elle. Déstabilisée, Lynn ne répondit pas tout de suite et se perdit à nouveau dans son regard qui semblait exprimer bien plus que ses paroles. Elle finit néanmoins par se reprendre au bout de quelques secondes, rompant le silence chargé en tension qui s’était installé entre eux. Elle s’éclaircit la voix. « J’espère que la mère de votre élève ne vous causera pas trop de souci, dans ce cas, professeur Warren » Conclut Lynn sur un ton qui semblait vouloir le mettre au défi, et en insistant particulièrement sur les deux derniers mots. Elle haussa les sourcils un instant puis souleva de nouveau son verre pour en boire une gorgée, sans détacher son regard du sien. Elle posa d’ailleurs son autre main à quelques centimètres de la sienne sans s’en rendre compte. Marius aborda à cet instant le sujet de Lou, avec qui elle avait effectivement eu une conversation une dizaine de jours plus tôt. « Je suis ravie d’entendre que Lou s’est calmée ». Elle posa le verre sur la table qui les séparait et poursuivit. « Je ne vais pas prétendre que c’était une conversation simple à avoir, maaais… Si le résultat est là, c’est le principal. Et puis, si ça peut te rassurer, je pense qu’il s’agissait plus d’un jeu avec ses camarades qu’autre chose. Non pas que je remette en question ton charme indéniable, bien sûr… ». Elle haussa les sourcils d’un air évocateur. « Cela dit, elle revient à l’appartement demain et j’ai bien l’intention de ne pas mentionner notre petite entrevue ». Elle les désigna tour à tour de son index pour appuyer ses propos. Colleen imaginait sans peine la réaction de sa fille si elle avait le malheur de gaffer à propos de cette soirée-là : cette dernière poserait ses mains sur ses hanches, la jaugerait de haut en bas, et une moue désapprobatrice viendrait inéluctablement habiller ses traits. Non vraiment, elle n’avait pas la moindre envie de supporter les remontrances de sa fille unique, surtout si une gueule de bois devait l’accompagner toute la matinée – ce qui était susceptible d’arriver. « Je ne suis pas prête à affronter son sarcasme ou ses réflexions. Non pas qu’on ait fait quoique ce soit de répréhensible, de toute façon » Se rattrapa-t-elle avec un sourire. Une partie d’elle aurait bien ajouté « pas encore » à la fin de sa phrase, mais ce n’était décidément pas une bonne idée. Et puis, Lynn se rappelait que pour quelqu’un qui n’était pas tactile, Marius avait été suffisamment malmené pour le restant de la soirée – que ce soit par Charlotte ou même par elle-même. Elle détacha son regard du sien, le riva sur la table et aperçut sa main juste à côté de la sienne. Elle plissa les yeux un instant, tentée de faire un pas vers lui, avant de se résigner et de la poser sagement sur son verre.
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| | | | (#)Jeu 7 Mai 2020 - 10:08 | |
| La famille était un sujet épineux pour toi. La tienne n’était que lambeaux depuis des années, des lambeaux que Beth tentait de recoudre tant bien que mal, parfois aidée de l’un, parfois de l’autre. Tu t’étais trouvé à penser que tu serais bien mieux sans mais quand tu voyais tes amis en famille, quand tu t’étais retrouvé dans des familles où l’on ne cherche pas votre faiblesse pour vous frapper là où ça fait mal, tu t’étais dit que qu’avoir une grande famille ce n’était pas si mal finalement. Assez étrangement, même si vous ne l’admettriez jamais, vous vous reposiez les uns sur les autres dans les moments difficiles et personne n’avait refusé de jouer à ce jeu, de maintenir un équilibre dont tu commençais à ne plus voir l’intérêt. « Yep, fille unique. Je ne te cache pas que j’ai tendance à envier les grandes fratries de ce fait. J’imagine que quelque part, on convoite toujours ce que l’on n’a pas : les enfants uniques rêvent d’une flopée de frères et sœurs avec lesquels s’amuser, quand les enfants issus de fratries, eux, jalousent ceux qui ont le bonheur d’être le centre de l’attention parentale » C’était effectivement quelque chose d’assez courant. Tu l’avais souvent entendu dans ton entourage mais tu ne l’avais jamais prit au sérieux. Parce que même si avoir des frères et soeurs pouvait être terriblement frustrant, quand tout se passe bien, ils sont une source de confort inestimable. Toi, tu n’avais jamais eu envie d’être fils unique. Oh tu t’étais souvent pris à souhaiter que Tommy ne soit jamais né mais tu avais toujours eu envie d’une fratrie. Ton plus grand regret sera que tu n’aies jamais réussi à unir cette fratrie et à lui donner vie de manière sereine et pérenne. C’était un regret de plus à ajouter à une longue liste … « Il y a des fois, je me dis qu’il vaut mieux être un enfant unique plutôt que d’être plusieurs et d’avoir l’attention parentale uniquement sur le premier enfant. Les jalousies et les rancoeurs qui se créent dans ces cas là sont difficilement effaçables. » Dis-tu en laissant ton regard se perdre dans le vide quelques secondes. Tes parents auraient dû s’arrêter à un enfant s’ils n’étaient pas capables de tous vous soutenir de la même manière. Tu avais reçu une attention dont tu n’avais jamais trop su quoi faire et qui t’avait mis en porte-à-faux avec tes soeurs et ton frère. Ce n’était que bien des années après avoir quitté le foyer familial que tu étais arrivé à ces conclusions. Que Colleen ait eu envie de frères et soeurs, c’était tout à fait normal. Pour avoir été fils unique pendant de nombreuses années avant que Beth ne te rejoigne, tu avais aussi beaucoup insisté auprès de tes parents. « Si je tombe dans ce genre de sentimentalisme, c’est que j’ai vraiment besoin d’un autre verre. » Tu ne te fis pas prier et tu allais chercher vos verres au bar. C’était presque naturel pour toi de le faire parce que ta mère t’avait inculqué des valeurs conservatrices qui te poussaient à souvent vouloir en faire trop par rapport à ce que les femmes d’aujourd’hui attendaient d’un homme. Mais ce verre, tu voulais l’offrir à Colleen pour la remercier de t’avoir sauvé la mise ce soir donc c’était à toi d’aller le chercher.
La manière dont Colleen avait fait son apparition, le fait que vous vous retrouviez cette fois dans un contexte bien plus détendu que votre dernière rencontre faisait que tu voyais une autre facette de la jolie brune. Et c’était une facette qui te plaisait beaucoup. Tu n’étais pas quelqu’un de particulièrement superficiel mais tu aimais observer la beauté quand elle se présentait et Colleen était très belle. Tu ne devais pas être le seul à l’avoir remarqué. Elle avait ce charme bien à elle et tu l’observais alors qu’elle regardais son portable et échangeait avec sa collègue par le regard. Et puis tu revins t’installer en face d’elle et sans que tu ne comprennes vraiment comment, tu te retrouvais à faire une bourde qui sembla beaucoup amuser Colleen si son regard taquin était une quelconque indication. Ce n’était pas ton genre de faire ce type de propositions parce que ce n’était pas ton genre de coucher avec une femme comme ça, juste parce que tu en avais envie sans qu’il n’y ait de sentiments. Ce n’était pas possible pour toi, tu en étais incapable. Colleen était attirante, c’était indéniable mais ce n’était pas suffisant pour toi, tu ne la connaissais pas assez pour te permettre ce genre de réflexion, même pour rire. Heureusement, Colleen sembla comprendre où tu voulais en venir : « Bien sûr, bien sûr… J’ai parfaitement compris ce que tu voulais dire, ne t’en fais pas. » Tu laissais échapper un petit soupir de soulagement et tu savais que tes joues devaient être légèrement rosées mais tu pris le sourire amusé de la jolie brune comme une bonne chose, elle ne risquait rien à discuter avec toi. Bien sûr, elle ne pouvait pas en avoir la certitude, avec toutes les histoires que l’on entendait de vos jours … Tu décidais de ne pas répondre pour ne pas t’enfoncer un peu plus et vous changer de sujet. C’était déconcertant la manière avec laquelle, même si tu ne connaissais pas très bien Colleen, vous n’aviez aucun moyen à trouver des sujets de conversation. Ce n’était pas toujours le cas quand tu rencontrais des gens, les silences gênants étaient d’habitude de mise, au moins au début.
En rebondissant sur les paroles de Colleen, tu décidais à ton tour de flirter un peu. Après tout, c’était bien la moindre des choses que de retourner la pareille à la jeune femme. Il était clair qu’elle ne s’y attendait pas du tout et un petit sourire fier se dessina sur ton visage. C’était agréable de la déstabiliser un peu, elle pouvait désormais comprendre ce que tu avais ressenti un peu plus tôt dans la soirée. Toutefois, son silence prolongé commença à t’inquiéter jusqu’à ce qu’elle te dise : « J’espère que la mère de votre élève ne vous causera pas trop de souci, dans ce cas, professeur Warren. » Tu n’avais pas de fantasme qui résultait de ton poste à l’université mais il y avait quelque chose dans la manière dont Colleen venait de prononcer ce titre qui réveilla quelque chose en toi. Il était évident que tu n’avais pas flirté ainsi depuis bien trop longtemps s’il suffisait de si peu pour te faire réagir ainsi. Toutefois, tu essayais de ne rien laisser paraître, comprenant bien le défi que te lançait Colleen. La balle était désormais dans ton camp. « Oh je pense qu’elle peut me causer quelques soucis, j’ai bien peur que derrière son air innocent se cache autre chose mademoiselle Sainsbury. » Lui répondis-tu en te souvenant de l’email que tu lui avais écris quelques semaines plus tôt. « Ai-je tord ? » Lui demandas-tu avec un sourcil levé et un air musé sur les lèvres. La table était toujours entre vous mais vous vous étiez rapprochés autant que cela était possible. Tu avais fait mine de ne pas le remarquer mais vos mains n’étaient plus qu’à quelques centimètres l’une de l’autre. Voulant détendre la tension qui s’était installée, tu la remerciais d’avoir parlé à sa fille qui s’était beaucoup calmée depuis quelques temps. « Je suis ravie d’entendre que Lou s’est calmée. Je ne vais pas prétendre que c’était une conversation simple à avoir, maaais… Si le résultat est là, c’est le principal. Et puis, si ça peut te rassurer, je pense qu’il s’agissait plus d’un jeu avec ses camarades qu’autre chose. Non pas que je remette en question ton charme indéniable, bien sûr… Cela dit, elle revient à l’appartement demain et j’ai bien l’intention de ne pas mentionner notre petite entrevue. » Tu étais rassuré de savoir que Lou ne s’était pas réellement persuadée être amoureuse de toi, c’était quelque chose que tu ne saurais pas bien gérer. Les attirances physiques de tes élèves, ça ce n’était pas un problème mais plus que ça, ce serait compliqué pour toi. « Je ne suis pas prête à affronter son sarcasme ou ses réflexions. Non pas qu’on ait fait quoique ce soit de répréhensible, de toute façon. » Cela ne devait pas être simple de gérer sa vie avec une fille adolescente. Tu n’arrivais pas à imaginer ce que cela pouvait donner dans ce genre de situation alors si Colleen tenait à garder cette entrevue secrète de sa fille, ce n’était pas toi qui allait l’en empêcher. Ce que Lou pouvait penser de cette rencontre avec sa mère t’intéressait fort peu. Elle n’était pour toi qu’un visage de plus dans un amphithéâtre après tout … Approchant tes mains de celles de Colleen, tu attrapais ces dernières pour les prendre dans les tiennes et tu laissais ton pouce dessiner de petits cercles sur la paume de sa main ou à l’intérieur de son poignet. « Et là, tu penses que ce serait répréhensible ? » Te surpris-tu à lui demander un sourire sur le visage. Toute appréhension que tu avais pu ressentir auparavant envers Colleen s’était envolée quand tu avais accepté de la laisser s’installer sur tes genoux. Désormais, tu n’avais pas envie de revenir en arrière.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Sam 9 Mai 2020 - 17:40 | |
| Au plus les minutes défilaient, au plus la tension était palpable et l’ambiguïté apparente ; elles se glissaient dans chacune de leurs paroles et se manifestaient à travers leurs gestes avec un naturel déconcertant et une aisance déstabilisante. Colleen ne maniait pas l’art du flirt avec expertise, elle ne s’était pas prêtée à cet exercice depuis près de deux décennies. Si ses souvenirs étaient corrects, c’était surtout August qui l’avait courtisée à l’époque et elle n’avait pas eu à fournir d’efforts importants pour faire de leur relation une réalité. Refroidie par la réputation de séducteur invétéré du rouquin, Colleen n’avait pas exprimé le moindre intérêt à son égard au départ, se contentant de l’observer déballer son grand jeu avec une certaine méfiance, ne souhaitant pas voir le piège se refermer trop facilement sur elle. La dernière chose qu’elle avait voulu à l’époque était voir son nom ajouté au tableau de chasse déjà bien rempli d’August, et c’était ce qu’elle lui avait fait comprendre. Le jeune homme avait ainsi dû déployer de grands efforts de persuasion pour révéler des intentions plus honorables et parvenir à la convaincre qu’il ne la percevait pas uniquement comme une conquête. Le processus qui les avait menés à former un couple solide n’avait pas vraiment demandé à Colleen beaucoup d’efforts, et avant cela, elle n’avait jamais été du genre à courir derrière les garçons. C’était la raison pour laquelle elle se surprenait ce soir-là à être capable de flirter sans difficulté. Face à Marius, elle ne se laissait pas décontenancer et au contraire, l’alcool aidant, avait même initié ce jeu entre eux en lançant les hostilités la première. Elle ressentait une certaine fierté à l’idée d’être en mesure d’y jouer et de rebondir à chacune des piques lancées par le beau brun. Il y avait quelque chose de particulièrement excitant à découvrir une facette de sa personnalité qu’elle n’avait jamais réellement envisagé auparavant. Mais après tout, n’était-ce pas précisément ce qu’elle était venue chercher en déménageant à Brisbane ? Se recentrer sur elle-même, sur ses objectifs personnels, ses ambitions et ses propres désirs ? Divorcée à présent et libérée de l’influence nocive et étouffante de son ex-époux, elle avait tout le loisir de redécouvrir la personne qu’elle était. Car il était évident qu’elle n’était plus la même qu’à dix-huit ans. Son expérience, ses années supplémentaires, ainsi que les obstacles rencontrés sur le chemin qui l’avaient finalement menée à Brisbane l’avaient endurcie. A défaut d’être véritablement méfiante, elle se montrait plus prudente. De même, elle avait beau demeurer naïve, elle avait le sentiment de s’affirmer davantage dans certaines situations et de ne plus accorder sa confiance avec la même facilité qu’avant. Jour après jour, elle faisait de nouvelles découvertes et discernait avec davantage de lucidité qui elle était réellement. Et la vérité était que ce soir-là, à travers le manège qui se jouait entre Marius et elle, elle percevait un aspect d’elle qu’elle n’avait même jamais soupçonné.
Au-dessus du tracé régulier qui délimitait sa barbe de quelques jours, la peau de Marius avait pris une teinte rosée plus prononcée. Il était particulièrement plaisant d’imaginer que c’était elle qui avait provoqué chez lui une telle réaction, et le sourire de Colleen en disait long sur ce que cette réalisation lui faisait ressentir. De nouveau, elle avait joué avec les mots, laissant comprendre au professeur d’histoire des arts qu’elle avait parfaitement compris là où il voulait en venir, mais qu’un doute subsistait. A en croire l’embarras toujours apparent sur son visage, Marius n’avait pas anticipé le sens caché que ses propos pouvaient porter. Toutefois il était amusant pour Colleen de remettre en question ses intentions avec une telle désinvolture. Elle n’ajouta rien de plus, prenant un malin plaisir à observer le soulagement apparaître sur les traits de son interlocuteur. A priori, par le biais de ses aveux, Marius lui avait fait comprendre qu’il n’espérait pas vraiment se faire inviter chez elle après leur entrevue, or il était rassurant pour Lynn de savoir à quoi s’en tenir. Malgré le jeu auquel ils se livraient, ils semblaient être tous deux sur la même longueur d’onde et ne pas se faire d’illusions quant à la conclusion de cette soirée, n’attendant pas plus de l’autre que ce qu’il était réellement en mesure de lui offrir pour l’instant.
Alors que Colleen faisait une nouvelle fois référence à elle par l’intermédiaire du portrait peu flatteur de « la mère d’élève alcoolisée », susceptible de créer des problèmes au professeur d’université, elle perçut l’amusement dans le regard de ce dernier. Elle avait volontairement mis les formes en s’adressant à lui, en insistant sur sa profession et son nom de famille, comme si elle était elle-même l’une de ses étudiantes. Marius surenchérit à son tour, avouant qu’il était au contraire persuadé qu’elle pourrait lui causer des soucis malgré l’innocence qui se dégageait d’elle en apparence. Il appuya sur les deux derniers mots, « Mademoiselle Sainsbury », ce qui provoqua un frémissement chez Colleen qu’elle tenta malgré tout de contenir. Elle afficha une moue à la fois crédule et dubitative, comme si elle pouvait difficilement imaginer qu’il puisse parler d’elle en ces termes, mais son sourire ne dupait personne. « Je ne vois absolument pas de quoi tu veux parler » Répondit-elle en haussant les épaules. Ses yeux s’arrondirent subitement une seconde plus tard, et elle fit mine d’enfin comprendre de qui il parlait. « Ah pardon, tu parlais de moi ? Je n’y étais pas du tout ! Alors oui dans ce cas, permets-moi de t’affirmer que tu te trompes lourdement ». Elle posa sa main sur son cœur, comme si elle n’en revenait pas des accusations qu’il lui portait, et secoua la tête un instant d’un air désapprobateur, sourcils froncés. Incapable de se contenir plus longtemps, elle finit inéluctablement par éclater de rire devant l’expression de Marius. Elle lui parla ensuite de Lou, et fit référence à la conversation qu’elles avaient eues toutes les deux une dizaine de jours plus tôt. En dépit des piña coladas avalées ce soir-là et de la confusion qui en résultait dans son esprit, elle était toutefois en mesure de se souvenir parfaitement de cette discussion. Lou s’était efforcée d’emprunter un ton désinvolte en faisant référence au petit jeu auquel elle s’adonnait en cours d’histoire des arts, comme si Marius avait exagéré la portée de ses actes, mais sa mère n’était pas dupe. Elle connaissait les réactions de sa fille par cœur et à la lumière de ce qu’il lui avait été révélé, elle avait compris que cette dernière n’était plus une enfant. Ainsi, elle ne s’était pas laissée embobiner par ses tentatives pour minimiser les choses, et était même parvenue à se montrer intraitable. Elle avait rappelé à Lou le coût de ses études et de ses à-côtés. Certes son père gagnait très bien sa vie et était en mesure de lui offrir les études de son choix, mais ce n’était pas une raison pour en profiter et risquer de tout gâcher. Parce qu’elle était intelligente et sensée, sa fille avait fini par avouer qu’elle était allée trop loin et lui avait promis de présenter ses excuses à son professeur. Avec du recul, Colleen n’avait pu s’empêcher de ressentir une certaine fierté à l’idée que Lou soit suffisamment mature pour reconnaître ses torts.
Colleen conclut qu’elle n’était pas prête à affronter les réflexions de sa fille si celle-ci venait à apprendre qu’elle avait passé la soirée en compagnie de son professeur, tout en précisant qu’ils n’avaient bien sûr rien fait de condamnable. Il ne manquerait plus qu’une des amies de Lou se trouve au Canvas et lui rapporte les faits et gestes de sa mère ! Lynn voyait difficilement comment elle pourrait se justifier si tel était le cas ; il était difficile d’imaginer que Lou puisse être suffisamment naïve pour croire qu’elle s’était retrouvée sur les genoux du professeur d’histoire des arts pourvue des meilleures intentions qui soient, à savoir voler à son secours et sauver sa soirée. Evidemment, au départ, elle n’avait pas anticipé que les choses puissent par la suite évoluer d’une telle manière, or il fallait bien admettre que le regard que Marius posait sur elle à présent ne laissait pas de place au doute.
La bulle qu’elle s’était efforcée de faire éclater au début de leur entrevue en se dégageant de son étreinte s’était progressivement reconstruite autour d’eux. Lynn ne pensait plus du tout à ses collègues à quelques mètres de là, ni aux joueurs qui s’amusaient autour des tables de billard, ni même à la musique qui s’échappait des enceintes. Son attention était entièrement focalisée sur Marius, et la tension était telle qu’elle choisit de se soustraire à son regard pendant un moment dans le but de retrouver ses esprits. Ce qu’il réalisa ensuite fit voler en éclats ses résolutions. Alors qu’elle venait de placer ses deux mains autour de son verre, ignorant le picotement de sa peau alors que l’une d’entre elle se trouvait une seconde plus tôt à côté de celle de Marius, ce dernier les saisit toutes les deux sans avertissement préalable. Prise au dépourvu, Colleen planta derechef ses yeux dans les siens, sourcils haussés. Elle demeura figée un instant alors que son cœur s’emballait et qu’elle sentait son pouls battre avec frénésie au niveau de son poignet, à l’endroit exact où le pouce du beau brun exerçait une pression agréable. Imperturbable, il lui demanda si elle considérait à présent que leurs actes étaient répréhensibles, et elle avala sa salive malgré le nœud qui obstruait sa gorge. Si elle était parvenue à rester maîtresse de ses émotions jusque-là, et ne pas laisser le trouble envahir l’expression de ses traits, le masque était définitivement tombé à présent. Contrairement à ce qui s’était produit presque une heure plus tôt, quand elle avait joué le rôle de la petite amie de Marius, le contact qu’il avait initié portait une toute autre signification. Il était intentionnel, ne laissait place à aucune ambiguïté. « J-je pense que… » Commença Colleen, une fois sortie de sa torpeur. « Hum, oui, j’imagine que ça l’est… Un tout petit peu ». Cela n’était pas désagréable pour autant, loin de là, et passé le choc qu’avait entraîné la réaction de Marius, elle appréciait à présent les caresses qu’il lui prodiguait et le contact brûlant qui en résultait. « Ta sœur Scarlett doit être aveugle pour penser que tu as besoin de son aide pour te remettre en selle » Fit-elle en insistant sur l’expression qui l’amusait toujours autant. « Ou alors tu lui caches bien ton jeu, parce que j’ai l’impression que tu te débrouilles parfaitement sans son aide. Non pas que je me plaigne de quoi que ce soit, au contraire ». Elle esquissa un sourire, profita un instant des mouvements du pouce de Marius sur sa peau, puis dégagea lentement sa main droite pour reprendre son cocktail et le porter à ses lèvres. Étrangement, elle eut la sensation qu’au lieu de rendre ses pensées plus confuses qu’elles ne l’étaient déjà, l’alcool lui permettait d’y mettre un peu d’ordre. Son palpitant freina quelque peu sa course effrénée et elle prit une profonde inspiration. D’un, elle ne faisait rien de mal. De deux, rien de regrettable ne pourrait lui arriver, l’issue de leur entrevue ayant déjà été abordée précédemment. De trois, elle était majeure et vaccinée, n’avait de comptes à rendre à personne et ce qu’il se passait ne l’engageait pas à grand-chose finalement, sinon à passer un moment agréable en bonne compagnie. Elle ne prenait pas vraiment les choses à la légère, mais ce n'était pas parce qu’elle passait une soirée à flirter avec Marius qu’elle lui promettait quoique ce soit d’autre en échange ou qu’elle renonçait à sa liberté. Pour une fois, elle avait envie de passer un moment sans songer aux conséquences. Reposant le verre sur la table un peu brusquement, elle glissa sa main de nouveau dans la sienne et entremêla ses doigts aux siens, alors que sa deuxième recevait toujours ses caresses. « Je pense que c’est plutôt toi qui vas nous causer des problèmes » Souffla-t-elle en plantant son regard dans le sien. « Mais promis, je ne te dénoncerai à personne, pas même sous la torture » Ajouta-t-elle en lui faisant un clin d’œil.
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| | | | (#)Dim 10 Mai 2020 - 10:22 | |
| Actuellement, tu n’étais pas dans ton élément naturel. Oui, tu fréquentais des bars avec tes proches de manière régulière mais tu n’arrivais pas à te souvenir la dernière fois où tu y avais passé un moment avec une femme en flirtant comme tu étais en train de le faire avec Colleen. Tu n’avais jamais été un très grand flirt mais tes amis aimaient te dire à l’époque que tu n’en avais pas besoin. Ils adoraient te taquiner en te faisant remarquer que tu attirais les demoiselles rien qu’en respirant ce que tu trouvais réellement ridicule. Avec les années, tu avais remarqué que tu avais un certain charme quand tu le voulais et la plupart du temps c’était quand tu n’attendais rien de la personne en face de toi. S’il y avait quelque chose à perdre ou à gagner dans l’échange, tu perdais facilement tes moyens. Encore aujourd’hui, tu te demandais comment tu avais pu attirer l’attention d’Alice. Elle avait vu quelque chose en toi mais elle avait trouvé mieux chez ton frère. C’était cette blessure qui te hantait encore aujourd’hui et qui faisait que tu n’étais jamais complètement à l’aise dans ce type de situation. Parce que tu n’avais pas confiance en toi, parce qu’il y aura toujours une meilleure version de toi chez un autre et que tu ne penses pas valoir tant d’attention. Tommy ne devait pas se douter une seule seconde des dégâts qu’il avait causés à l’époque. Toi non plus d’ailleurs. Trop obnubilé par ta rancoeur, ta colère, ta tristesse, ce n’est que des années plus tard que tu as compris qu’Alice et lui n’avaient pas fait que briser ton coeur. Alors tu essayais, tu essayais de te battre contre les pensées qui avaient tendance à t’assaillir dans ces moments là. Et ce soir, contre toute attente, cela semblait fonctionner. Du moins, tu profitais du moment sans te prendre la tête. Ta maladresse naturelle t’avait permis de faire comprendre à Colleen que tu ne t’attendais pas à ce que cette entrevue se termine chez elle, du moins pas comme certains l’entendraient. La ramener chez elle si elle avait trop bu pour t’assurer qu’elle rentrait bien, c’était un oui. Mais pas plus que cela. Tu n’avais jamais été intéressé par le sexe pour le sexe, cela te dérangeait même un peu. Tu savais que c’était ridicule aux yeux de beaucoup et tes amis te le faisaient souvent remarquer mais tu ne pouvais pas fonctionner autrement. Et puis même si tu étais intéressé, Colleen méritait bien plus que ce genre de traitement. Tu la respectais bien trop pour t’avancer sur ce terrain glissant. Et étrangement, le fait que tu aies mis les pieds dans la plat vous permis à tous les deux de vous détendre. Cette soirée n’avait pas pour enjeu de se terminer dans un lit, rien que cette pensée te faisait monter le rouge aux joues ce qui était ridicule, et vous pouviez donc profiter de ce moment pour sortir un peu tous les deux de votre norme. En venant s’installer sur tes genoux pour te sauver la mise, Colleen avait fait tomber toutes les barrières que tu avais pu avoir sans réellement s’en rendre compte. Tu aurais pu installer de nouveau un mur entre vous mais tu n’en avais pas envie car Colleen ne t’avait jamais semblé être une personne malveillante qui se servira de tes faiblesses contre toi.
Alors pour une fois, tu laissais tomber les apparences, tu ignorais les regards curieux qui pouvaient se poser sur vous, tu ignorais tout cela pour profiter de cet échange avec Colleen. Tu lui donnais toute ton attention, tu gravais dans ta mémoire les expressions de son visage, son sourire et tu savais déjà que tu passeras plusieurs heures demain à les dessiner ou à les peindre. Tu faisais rarement des portraits, ta spécialité étant plutôt des paysages mais tu feras une exception pour cette fois. « Je ne vois absolument pas de quoi tu veux parler. Ah pardon, tu parlais de moi ? Je n’y étais pas du tout ! Alors oui dans ce cas, permets-moi de t’affirmer que tu te trompes lourdement » Tu la vis prendre un air effaré et tu souris. Elle jouait la comédie bien mieux que toi c’était certain. Non, tu ne te trompais pas du tout. Le regard malicieux que te lançait Colleen était bien trop similaire à celui que Lou pouvait te lancer pour que tu te trompes de beaucoup. Mais cela ne te dérangeait pas, au contraire. Alors que les attentions de la fille en classe étaient des plus déplacées, celles de sa mère étaient attachantes et bien trop plaisantes pour que tu imagines lui demander d’y mettre un terme. « Je te le permets mais seulement si tu me permets à mon tour d’un douter. » Lui dis-tu d’un ton amusé en penchant légèrement la tête sur la gauche. Tu ne rajoutais rien cependant car Colleen n’avait sûrement pas très envie de penser à sa fille ce soir. Malgré cela, tu tenais à la remercier d’avoir parlé à cette dernière qui s’était beaucoup calmée depuis que tu avais vu Colleen la dernière fois. Cela n’avait pas dû être facile pour ton interlocutrice à qui tu avais fait comprendre que sa fille n’était certainement plus la petite princesse innocente qu’elle prétendait être. Mais tu ne te faisais aucun souci pour Lou, elle était trop intelligente et déterminée pour ne pas réussir dans la vie.
En parlant de Lou, Colleen te confia ne pas avoir envie de parler de cette entrevue à sa fille. Tu n’avais de ton côté aucun problème avec cette idée et même si elle avait voulu lui en parler, cela ne te gênerait pas plus que cela. Lou était ton élève certes mais tu n’avais pas de comptes à lui rendre, pas tant que tout ce que vous faisiez avec Colleen n’était que du flirt. Oh tu ne doutais pas que l’adolescente aurait un avis sur le sujet et te le ferait savoir mais cela ne changeait rien au fait que tu ne lui devais pas de comptes. Par contre, tu avais terriblement envie de passer du côté du répréhensible. Prenant ton courage à deux mains, tu attrapais les mains de Colleen posées sur son verre, lui donnant une nouvelle fois toute ton attention. Tu savais que cela déstabilisait beaucoup les gens qui on se focalisait sur eux. De vos jours, tout le monde était distrait et incapable de se concentrer sur quoi que ce soit. Toi, tu y arrivais très bien. Tu laissais les bruits du bar s’effacer au loin, remplacé par le battement du coeur de Colleen que tu sentais sous ton pouce doucement appuyé sur son pouls au niveau de son poignet. La jolie brune se figea sous la surprise, cherchant quelque chose dans ton regard. Tu ne savais pas quoi mais elle dû le trouver car elle se détendit de nouveau et tu souris. Tu avais conscience que tu avais peut-être dépassé les bornes mais le fait que les mains de Colleen n’aient pas quitté les tiennes te rassurait légèrement. Tu observais chaque expression de son visage et même si elle devait penser que tu étais imperturbable, ce n’était pas le cas. Si elle s’amusait à poser ses doigts sur ton pouts, elle se rendrait compte que tu n’étais pas aussi calme que tu voulais le laisser penser. Le contact que tu venais d’établir avec Colleen était le contact le plus intime que tu avais eu depuis … Tu préférais ne pas y penser, surtout quand ce n’était que caresser les mains de la jeune femme. « J-je pense que... Hum, oui, j’imagine que ça l’est… Un tout petit peu. » C’était bien ce que tu espérais. Il y avait quelque chose de terriblement excitant à te dire que pour une fois, tu faisais quelque chose de répréhensible. Même si ça le serait pour une adolescente de dix-sept ans et pour personne d’autre vu qu’en temps que célibataire, Colleen et toi ne faisiez rien de mal. « Ta sœur Scarlett doit être aveugle pour penser que tu as besoin de son aide pour te remettre en selle. Ou alors tu lui caches bien ton jeu, parce que j’ai l’impression que tu te débrouilles parfaitement sans son aide. Non pas que je me plaigne de quoi que ce soit, au contraire » Tu laissais échapper un petit rire à ces paroles. Non, tu ne voudrais pas qu’elle s’en plaigne, ce ne serait pas vraiment très bon pour toi. Ta soeur ne connaissant strictement aucun pan de ta vie à part le pan professionnel, qu’elle en ait déduit que tu avais besoin de son aide ne te surprenait pas beaucoup. « Je serai dévasté si tu te plaignais, mon égo ne se relèverai pas. » Lui dis-tu en prenant un faux air tragique. Tu avais envie d’une seule chose, que Colleen passe un bon moment. Et tu avais envie de passer un bon moment également mais c’était bel et bien le cas. Tu ne voulais pas forcer la jeune femme à faire quelque chose qu’elle regretterait ou lui faire croire que tu attendais quoi que ce soit. « Ma soeur n’a pas passé plus de deux heures consécutives en ma compagnie depuis vingt ans et me prend pour un robot incapable de toute affection. A ses yeux je suis un cas désespéré. » Tu ne savais pas si Colleen allait te croire pourtant, tu étais à peu près certain que c’était comme cela que Scarlett te voyait. Peut-être que c’était un peu différent depuis qu’elle t’avait aidé à trouver le cadeau d’Evelyn mais tu ne pensais pas qu’elle ait radicalement changé son opinion. Colleen prit une nouvelle gorgée de son cocktail avant d’enlacer ses doigts aux tiens. ton pouce continuait à caresser son autre main, presque de lui-même, comme si c’était naturel désormais. « Je pense que c’est plutôt toi qui vas nous causer des problèmes. Mais promis, je ne te dénoncerai à personne, pas même sous la torture» Un sourire se dessine sur ton visage alors que tu prends ton air le plus innocent : « Moi ? » Tu souris avant d’ajouter : « Tu dois te tromper, j’ai toujours été un ange voyons. » Lui dis-tu en secouant la tête. C’était loin d’être le cas, bien loin d’être le cas. Tes erreurs ne se comptaient plus sur les doigts de la main depuis longtemps … Approchant ton visage de celui de Colleen, tu lui demandais : « Quel est le prix de votre silence, oh belle demoiselle ? » Personne ne viendra la torturer pour lui faire avouer que tu n’étais pas aussi sage que tu aimais le faire croire, vous le saviez tous les deux. « Ne dit-on pas qu’il faut se méfier de ceux qui paraissent le plus innocent ? » Lui dis-tu avec un clin d’oeil à ton tour. Tu laissais tes yeux se perdre dans le bleu de ses iris, l’envie de refaire apparaître ce petit sourire sur le coin de ses lèvres, plus fort que toi.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Dim 10 Mai 2020 - 17:00 | |
| En arrivant ce soir-là au Canvas, Colleen aurait difficilement pu prédire la suite des événements. Ce qui avait commencé comme une soirée détente en compagnie de ses collègues pour fêter la fin de la semaine de travail à l’hôpital et le début d’un week-end bien mérité, s’était brusquement transformé en rendez-vous impromptu en très bonne compagnie. Face à Marius, la sage-femme peinait encore à réaliser comment elle en était arrivée là, le cœur battant à tout rompre contre sa poitrine, sa température corporelle grimpant progressivement et son esprit se brouillant de pensées audacieuses. Elle avait de plus en plus l’impression de se retrouver dans la peau d’une adolescente à un premier rendez-vous, le contrôle de ses émotions devenant particulièrement complexe. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas ressenti de telles palpitations l’animer, son mariage ayant battu de l’aile bien avant qu’elle ne décide d’y mettre un terme. Elle se souvenait vaguement avoir éprouvé des sensations similaires à ses débuts avec August, quand ils n’en étaient encore qu’au stade des premières découvertes. Quand tout est beau, tout est rose, que les regards se voilent d’un filtre factice rendant les choses plus merveilleuses qu’elles ne le sont en vérité, quand l’objectivité n’existe pas. La première année qu’ils avaient passée ensemble avait indubitablement été la meilleure, et puis la réalité les avait rattrapés et l’arrivée de Lou avait bousculé l’ensemble de leurs convictions. Leur amour s’était transformé, leurs attentes avaient évolué, puis ils s’étaient perdus. Colleen ne regrettait pas les décisions prises mais devait admettre que depuis son arrivée à Brisbane, elle avait vraiment l’impression de respirer à nouveau. Elle avait décidé de bouleverser sa propre vie et force était de constater que c’était un succès. Si elle devait recommencer, elle le ferait sans scrupules ni incertitudes car le jeu en valait la chandelle.
La complicité qui s’était naturellement installée entre Marius et elle se prolongeait et gagnait en intensité à chaque seconde qui passait. Les regards qu’ils échangeaient étaient lourds de sens, et si Lynn avait eu la possibilité d’observer la scène à distance en étant parfaitement sobre, sans doute aurait-elle eu honte de l’image qu’elle renvoyait. Ses joues étaient roses, ses yeux brillants, ses cheveux légèrement ébouriffés et ses lèvres dessinaient un sourire béat. Sa retenue s’était envolée et son regard reflétait chacune de ses pensées, or ces dernières n’étaient pas toujours très honorables. A vrai dire, elle ne renvoyait pas une image d’elle-même plus respectable que celle dégagée par Charlotte plus tôt dans la soirée, sur cette même banquette. A croire que Marius avait le don d’ébranler la gente féminine, même lorsqu’il était doté des meilleures intentions ou qu’il ne fournissait pas le moindre effort pour séduire. Elle ne connaissait pas grand-chose de sa vie privée, sinon qu’il était apparemment célibataire et peu enclin aux relations amoureuses, à en juger par ce qu’il avait exprimé précédemment en parlant de sa sœur qui cherchait à tout prix à le caser. Quels secrets cachaient son sourire bienveillant ? Ou quelles blessures n’avait-il pas encore pu cicatriser ? Dans un état normal – ou moins alcoolisé – Lynn aurait sans doute puisé dans son imagination pour parvenir à tout un tas de scénarios plus ou moins crédibles sur l’histoire de Marius Nicolas Warren. Peut-être même que l’un d’entre eux aurait effleuré la vérité. Ce soir-là cependant, elle n’était guère en mesure de formuler des hypothèses, et ne pouvait que se satisfaire d’avoir son attention rien que pour elle. Le regard plongé dans le sien, elle imprima ses traits dans sa mémoire, grava ses expressions dans son esprit.
Alors que les caresses de sa peau contre la sienne se poursuivaient, et que la tête lui tournait un peu plus désormais, Colleen s’efforça de maintenir une concentration absolue. Marius s’amusa de ses paroles, confiant qu’il serait dévasté si elle venait à se plaindre de ce qu’il se passait entre eux et elle esquissa un sourire devant son air faussement dramatique. « Rassure ton égo, alors » Souffla-t-elle, les yeux rieurs. C’était un jeu entre eux, et même si elle avait été décontenancée quand il avait saisi délicatement ses mains, elle ne souhaitait pas qu’il fasse marche arrière. Bien que brûlant, le contact demeurait tendre et innocent malgré tout. Il lui expliqua un peu plus en détails la nature de sa relation avec Scarlett, et elle se sentit intriguée par ses confidences. « Un robot incapable de toute affection ? » Répéta-t-elle, incrédule. Elle glissa un regard appuyé en direction de leurs mains enlacées, pour justifier sa surprise. « Tu n’as rien d’un robot ce soir, Marius » Dit-elle sur un ton plus sérieux cette fois. « Si elle te voyait ce soir, je suis sûre qu’elle changerait d’avis. En tout cas, si tu as besoin d’un témoignage un jour pour lui prouver qu’elle se trompe, tu as mon numéro ». Elle esquissa un sourire sincère, puis fronça les sourcils un instant en se souvenant d’un détail important. « En fait non, pas vraiment mais… Peut-être que si tu le mérites, je te le donnerai à un moment donné. Ce soir. Uniquement parce que tu serais susceptible d’en avoir besoin dans ce cas précis, bien entendu ». Car à la réflexion, il s’avérait qu’ils n’avaient jamais échangé leur numéro de téléphone au cours de leurs précédentes entrevues. La première fois, ils venaient à peine de se rencontrer, la deuxième, ils n’en avaient pas vraiment eu le temps et la troisième s’était déroulée dans un cadre strictement professionnel – Lynn aurait pu difficilement demander le numéro de Marius alors qu’il venait de lui révéler que sa fille lui faisait des avances. Cette quatrième fois, en revanche, était complètement différente et maintenant qu’ils avaient partagé un peu plus que de simples paroles, il n’était pas totalement insensé de vouloir garder le contact par un biais moins formel que les mails.
Son verre était presque vide désormais, mais curieusement Colleen n’avait aucune envie de quitter le confort de la banquette ni de faire éclater la bulle qui s’était reformée autour d’eux. Elle n’avait pas non plus envie d’un autre verre, ayant déjà un peu trop flirté avec ses limites ; avoir la tête qui tourne était une chose, être malade en était une autre. Sa main droite se détacha de celle de Marius et elle exerça à son tour une douce pression sur sa peau, s’attardant sur les lignes qui creusaient l’épiderme de la paume de sa main. Elle affirma que ce serait lui qui serait la cause de leurs problèmes mais il s’en défendit, ses traits composant un air innocent alors qu’il certifiait être un ange. Elle pencha la tête, clairement peu convaincue par ce qu’il avançait, mais elle n’eut pas le temps d’arguer davantage car déjà il approchait son visage du sien. Il lui demanda quel était le prix de son silence et elle plissa les yeux, se tendant à son tour en avant pour approcher son visage. Cette fois-ci, elle n’avait pas l’intention de se laisser déstabiliser et voulait répondre à ses provocations déguisées. « Je ne suis pas sûre que tu sois en mesure d’en payer le prix, désolée ». Elle haussa les épaules comme si cela la peinait réellement. Ses lèvres ébauchèrent un sourire taquin. « Et je suis navrée de te l’apprendre, mais tu n’as plus l’air si innocent à présent. Le masque est tombé, j’y vois clair là-dedans… » Sa main se dégagea de la sienne et son index tapota par deux fois sa peau au niveau de son front. « …et ce n’est pas joli-joli ». Les yeux dans les siens, elle se surprit à éprouver une furieuse envie de se lever, contourner la table et revenir sur ses genoux, afin de faire évoluer leur intimité. Pourtant, elle n’en fit rien et resta sagement assise sur la banquette, une part de sa conscience suffisamment éveillée pour lui rappeler qu’ils n’étaient pas seuls. Elle fit glisser son doigt le long de sa joue, qui se perdit un instant dans les poils de sa barbe avant de descendre un peu et de suivre la ligne de sa mâchoire. Après une courte seconde d’hésitation, il s’aventura sur la lèvre inférieure du beau brun et le regard de Colleen quitta le sien pour mieux observer son geste et s’attarder sur la courbe de sa bouche. Elle était à peu près sûre qu’elle ne parvenait plus à respirer, et pourtant, son cœur cognait sévèrement contre sa poitrine, si fort qu’elle se demandait s’il pouvait l’entendre. Ses yeux quittèrent sa bouche et remontèrent en direction des siens pour en sonder le bleu et tenter de comprendre ce qui se tramait réellement dans son esprit. Elle interrompit sa caresse et dégagea son doigt de sa peau, reculant un tout petit peu son visage du sien pour pouvoir saisir son verre et en siroter le reste du cocktail. « 07-1412-1320. Mon numéro de téléphone. Au cas où » Murmura-t-elle, l’ombre d’un sourire sur ses lèvres.
Dernière édition par Colleen Sainsbury le Mer 13 Mai 2020 - 16:02, édité 1 fois |
| | | | (#)Lun 11 Mai 2020 - 11:00 | |
| Et dire que tu avais prévu de passer la soirée avec ta soeur … Ce serait mentir que de dire que tu regrettais que la soirée ait pris cette tournure. Tu avais une profonde affection pour Scarlett mais vous n’étiez pas encore assez à l’aise l’un avec l’autre pour que cette soirée ne comporte pas son lot de silences gênés et de remarques déguisées, en particulier à ton encontre. Alors même si elle avait très mal commencé avec la présence de Charlotte, cela te semblait être un vague souvenir désormais alors que la chaleur de la peau de la belle brune assise en face de toi venait réchauffer les tienne. Tu ne savais pas où tu avais trouvé le courage de flirter de cette manière. Mais les mots avaient toujours été faciles pour toi. Jouer avec eux, les tourner d’une manière ou d’une autre, c’était presque naturel. Pour le reste par contre, c’était une autre histoire. Toucher une personne et dans cette situation, une femme magnifique, c’était toujours intimidant. Il y avait quelque chose d’intime dans ce genre de geste, une intimité que tu n’étais pas vraiment sûr de mériter. La peur d’aller trop loin, d’aller trop vite, de faire un pas de travers t’habitait toujours dans ces cas-là. Ce soir, sans vraiment comprendre pourquoi, tu avais eu le courage de passer au-dessus de tout cela parce que pour la première fois depuis longtemps, tu en avais eu envie. Oh tu n’étais pas aveugle, tu voyais bien les regards que te lançaient certaines femmes quand tu en rencontrais dans les galas, à l’université ou dans des bars avec des amis. Tu savais que tu n’aurais aucun mal à en ramener chez toi si tu le voulais. Mais tu n’en avais jamais envie. Flirter un petit peu, échanger quelques mots et sous-entendus, c’était innocent et cela ne menait à rien alors tu le faisais en souriant. Ce soir, ce qui venait tout changer, c’était que pour une fois, tu avais envie de casser le mur, de laisser ton anxiété derrière toi et de saisir cette chance. Et contre toute attente, tu avais trouvé le courage de le faire. Colleen avait ce talent de te mettre à l’aise, de ne pas te faire douter du moindre de tes faits et gestes. Elle ne s’en doutait pas mais sa bienveillance, la gentillesse dont elle avait fait preuve lors de toutes vos précédentes rencontres et l’intérêt qu’elle t’avait porté de manière désintéressée faisait qu’aujourd’hui, tu avais été capable de baisser ta garde. Vous aviez tous les deux vos démons, vous étiez trop âgés pour ne pas les avoir mais ce soir, c’était comme si vous étiez deux jeunes adultes, comme si tout avait été effacé momentanément et que vous recommenciez du début. C’était une sensation excitante, comme un retour dans le temps …
« Rassure ton égo, alors » Focalisant ton attention sur Colleen, tu admirais son sourire qui était devenu comme addictif. La faire sourire mais particulièrement la faire rire était ta mission pour cette soirée. Voir ses yeux s’illuminer, ses lèvres s’étirer, c’était un spectacle que tu n’avais pas envie de voir s’arrêter. Vos mains désormais liées, il était hors de question d’arrêter de flirter pour autant. Colleen était toujours aussi amusée de l’expression que tu avais utilisée lors de ta conversation avec Charlotte et te le fit remarquer. Tu pouvais comprendre comment la jeune femme pouvait penser que ta soeur et toi vous entendiez très bien mais chez les Warren, ce n’est pas l’entente fraternelle qui prévaut. « Un robot incapable de toute affection ? Tu n’as rien d’un robot ce soir, Marius. Si elle te voyait ce soir, je suis sûre qu’elle changerait d’avis. En tout cas, si tu as besoin d’un témoignage un jour pour lui prouver qu’elle se trompe, tu as mon numéro. En fait non, pas vraiment mais… Peut-être que si tu le mérites, je te le donnerai à un moment donné. Ce soir. Uniquement parce que tu serais susceptible d’en avoir besoin dans ce cas précis, bien entendu » Non, tu n’étais pas un robot c’était évident. Mais Colleen ne t’avait pas vu quand tu étais adolescent, elle n’avait pas idée des relations que tu avais avec Scarlett. Même si tu faisais toujours remarqué à ta soeur qu’elle exagérait, tu pouvais comprendre d’où venait ce genre de réflexions. Mais tu laissais Scarlett de côté parce que ton interlocutrice venait d’attirer ton attention sur un tout autre sujet qui était son numéro de téléphone. Il est vrai que vous n’aviez pas échangé vos numéros malgré vos rencontres qui se multipliaient. Jusque là, l’occasion ne s’était pas vraiment présentée, du moins elle n’aurait pas été justifiée. Ce soir, les cartes était redistribuées. « Je vais tout faire pour le mériter alors, je ne voudrais pas que Scarlett manque une occasion d’être remise à sa place. » Dis-tu à Colleen avec un clin d’oeil. Tu espérais avoir déjà mérité le numéro de Colleen parce que tu ne savais pas ce qu’elle attendrait de toi pour qu’elle te le donne mais elle te le ferait savoir bien assez tôt, tu n’en doutais pas. Et tu pouvais toujours lui donner le tient, quoi qu’en dise ta mère, les femmes pouvaient elles aussi faire le premier pas.
La bulle dans laquelle vous vous étiez enfermée était bien trop agréable pour vouloir la briser. Tu avais l’impression de retrouver une partie de toi longtemps oubliée, de renouer avec l’homme que tu aurais pu être si les choses s’étaient passées différemment. C’était excitant mais en même temps, légèrement inquiétant. Tu étais un homme qui aimait les habitudes, les briser créait toujours une forme d’anxiété chez toi mais pas assez pour que tu la laisses gagner ce soir. Le sourire de Colleen, ses réponses à tes paroles et à tes gestes avaient permis de calmer cette anxiété. Si tu avais senti que tu étais allé trop loin, tu aurais bien sûr tout arrêté et tu aurais mis de la distance entre vous deux mais cela n’avait pas été le cas. Colleen avait su te donner le change et elle continuait encore à le faire : « Je ne suis pas sûre que tu sois en mesure d’en payer le prix, désolée. Et je suis navrée de te l’apprendre, mais tu n’as plus l’air si innocent à présent. Le masque est tombé, j’y vois clair là-dedans… et ce n’est pas joli-joli » Quand le bout de ses doigts vinrent se poser sur ton front, tu frissonnais. Les doigts de la jeune femme ne s’attardèrent pas sur ton front et tu essayais de reprendre tes esprits pour lui répondre quand son doigt descendit le long de ta joue. Tu sentis l’air quitter tes poumons et c’était comme si le temps était soudainement suspendu. Comme si la seule chose qui te permettait de rester dans le monde réel était le doigt que Colleen laissait courir sur ton visage. Quand le doigt de Colleen vint se poser sur ta lèvre inférieure, tu laissais échapper une expiration, laissant ton souffle chaud se poser sur son doigt. Tu pouvais sentir ton coeur marteler ta poitrine, toute pensée cohérente était désormais impossible et tu n’étais même plus certain de respirer. Et puis soudain, les doigts de Colleen quittèrent ton visage et ce fut comme une claque, un retour brutal à la réalité. Tu ne pus empêcher un « No .. » de sortir de ta bouche mais tu te repris avant de prononcer la dernière lettre en sentant le rouge te monter aux joues. Gosh … Depuis combien de temps ne t’avait-on pas touché ainsi ? Bien trop longtemps si ce simple toucher suffisait à rendre la situation dans ton pantalon aussi inconfortable. Incapable de parler, tu finis par déglutir difficilement, ta pomme d’Adam trahissent le trouble que Colleen avait su créer en toi. « 07-1412-1320. Mon numéro de téléphone. Au cas où » Ces mots furent un autre rappel à la réalité. Avec la main que tu n’avais pas dans celle de Colleen, tu attrapais ton téléphone et tu ouvrais une note pour y inscrire le numéro de la jeune femme. Tu ne te faisais pas du tout confiance de t’en souvenir le lendemain matin vu le trouble que tu avais toujours du mal à chasser. Reposant l’appareil électronique sur la table, tu rattrapais le regard hypnotisant de Colleen : « Au cas où en effet … » Laissas-tu échapper presque à demi-mot. Tu n’avais pas envie de briser cette bulle mais tu savais qu’il fallait que tu le fasse. Il fallait que tu le fasses avant que ce jeu n’aille trop loin et que vous le regrettiez tous les deux. Parce que les beaux yeux de Colleen et son sourire envoutant te donnaient envie de mettre tes principes au placard et ce n’était pas une bonne chose. Tu attrapais ton verre pour le finir à ton tour avant de lui dire : « Je vais devoir te laisser et tes collègues semblent s’impatienter. » Un rapide coup d’oeil au groupe qu’avait quitté Colleen suffisait à voir qu’elles semblaient elles aussi sur le départ. « Merci pour ce soir. Pour le sauvetage et pour un très bon moment. » Lui dis-tu en caressant une dernière fois la pomme de sa main avant de briser le contact. Tu n’avais qu’une envie, c’était d’attraper de nouveau sa main mais il fallait que tu partes avant de ne plus pouvoir résister. Attrapant ton téléphone, tu te lèves et tu ajoutes : « Mon numéro est le suivant : 07 - 2458 - 6734. Au cas où. » Lui dis-tu avec un petit sourire en coin. Et puis parce que tu ne peux pas résister, tu t’approches de la jeune femme et dépose tes lèvres sur sa joue avant d’ajouter : « Merci encore. » Elle n’imagine pas une seconde le cadeau qu’elle t’a fait ce soir en passant cette soirée avec toi, pas une seule seconde …
@Colleen Sainsbury |
| | | | | | | | please save me from the hell i'm in (colleen) |
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