Accoudée au bar, Maze buvait tranquillement une bière, le regard perdu dans le vide. L’air peu amène qu’elle affichait ostensiblement ne semblait malheureusement pas arrêter les hommes qui se trouvaient au saloon avec elle. Si la plupart se contentaient de lui jeter des coups d’œil appuyés, seul l’un d’entre eux se permit de s’approcher d’elle pour lui lancer un : « On n’a pas l’habitude de voir de jolies poupées seules par ici. Je devrais peut-être m’occuper de toi ? ». Maze leva les yeux au ciel et pensa pour elle-même "Poupée ? Vraiment ?" L’histoire aurait pu s’arrêter là s’il n’avait pas appuyé ses mots en se permettant de faire glisser ses doigts sur son visage puis vers sa clavicule. Sans même le regarder et d’un geste brusque, Maze attrapa le poignet de l’homme, allant plaquer sa main trop baladeuse sur le bar avant d’y planter un couteau qu’elle avait sorti en un battement de cil de la jarretière qu’elle portait à la cuisse droite. D’un même mouvement, son autre main s’était emparée du Colt qui se trouvait à la ceinture de sa victime et qu’elle était venue brutalement placer sur son front. Après avoir poussé un cri de douleur à réveiller les morts, l’homme s’était mis à trembler et à transpirer à grosses gouttes en la regardant. « Si j’étais toi, je changerais de façon de parler aux femmes. » Elle regrettait presque d’avoir sorti sa plus belle robe ce jour-là. Pour une fois qu’elle tentait de passer incognito et de se tenir tranquille, il avait fallu que cet abruti vienne la chercher. Le tenant toujours en joue, elle se leva de son tabouret et jeta un coup d’œil à sa gauche en entendant quelqu’un hurler : « Les gars, c’est la sœur de Jesse James ! » tout en pointant de son index une affiche "Wanted" qui, il fallait l’avouer, la mettait plutôt en valeur. « Merde. » Plusieurs hommes s’étaient levés à la suite de cette annonce pour braquer leurs armes sur elle. Elle pourrait repasser pour ce qui était de rester incognito. Et en plus elle n’avait pas la tenue appropriée pour ce genre d’échauffourées. Elle soupira avant de récupérer son couteau qui était jusqu’alors toujours planté dans la main du goujat. Elle attrapa ce dernier pour le placer devant elle et passa le bras armé de son couteau autour de son cou, son autre bras se tendant vers la salle et menaçait de tirer sur quiconque chercherait à s’en prendre à elle. « On va rester calmes les gars. Ok ? » Lentement, elle avançait à reculons vers la sortie, se servant du corps de l’homme comme d’un bouclier à de quelconques balles pouvant arriver jusqu’à elle.  « J’ai pas l’intention de vivre dans l’ombre de mon frère. La sœur de Jesse James a un nom, et c’est Maze. » Sur ces paroles, elle trancha la gorge du malheureux qui avait eu la mauvaise idée de lui adresser la parole et, avant que son corps ne tombe à terre, elle se saisit du chapeau qui était sur sa tête pour le mettre sur sa propre tête. D’un geste vif, elle fit demi-tour pour passer les portes du saloon et se retrouver à l’extérieur. Tout en regardant rapidement autour d’elle pour repérer un quelconque moyen de fuir, elle entendit des exclamations, des cris et des bruits de chaises renversées à l’intérieur. Elle avait intérêt à se dépêcher de filer de là. Son regard se posa sur des chevaux et un jeune homme qui se trouvait à côté d’eux. Il n’avait pas pointé d’arme vers elle et ne semblait pas vouloir l’éliminer dans la seconde. Elle choisit donc, peut-être à tort, de ranger son couteau et son colt et courut dans sa direction. Une fois arrivée à sa hauteur, elle lui lança : « T’as l’intention de bouger pour m’aider cowboy ? J’ai pas prévu de m’éterniser ici. » Elle avait dit cela sans même le regarder, trop occupée à déchirer sa robe à mi genoux. Elle ne pouvait pas monter à cheval si elle laissait sa robe en l’état. Jetant un coup d’œil interrogateur à cet homme, elle l’interrogeait silencieusement du regard pour savoir ce qu’il avait l’intention de faire alors qu’elle s’affairait à détacher l’un des chevaux pour prendre la fuite. Au même moment, une balle siffla à côté de sa tête alors qu’une autre vint égratigner son épaule. Lâchant un râle de douleur et de colère, elle ressortit instantanément son colt pour faire feu vers celui qui venait de sortir du saloon et de la prendre en joue. Il allait falloir qu’elle décampe très vite de là avant d’avoir tout le village à ses trousses. Son identité était révélée et sa tête mise à prix. Une bonne journée en perspective.

Spoiler:

Il était paisible, le mariole. Personne ne faisait attention à lui malgré sa stature imposante et sa manie de dormir à côté des chevaux plutôt que de sa faire une petite place dans une des chambres au dessus du saloon. Wren n'aimait pas être enfermé quelque part, surtout pas quand il avait une réputation à tenir, ou plutôt un profil bas parce qu'on parlait d'un des voleurs les plus en vogue du Far West. Rien ne lui échappait lorsqu'il était dans les parages et aucune pièce d'or ne finissait ailleurs que dans ses poches. Parfois, lorsqu'il était en pleine disette, le cow boy acceptait des contrats de hors la loi, jouant le rôle de chasseur de primes à merveille parce que tuer ne lui avait jamais posé aucun réel problème. Il était plutôt fameux pour sa violence notoire, son inintérêt constant pour les gens qui passaient à côté de lui, se sentant l'âme d'un envoyé du chaos plutôt qu'un prêcheur de l'amour et des bons sentiments. Il se retrouvait dans ce bled paumé où il faisait toujours chaud, les moustiques étaient envahissants et il n'arrivait pas à tirer sur son fagot décemment au milieu du bordel ambiant qu'il entendait à l'intérieur de l'établissement qu'il jouxtait pour une petite sieste à côté de son canasson. Il entendit des cris, quelques envolées lyriques dignes des plus grands westerns qu'on ait jamais produits mais Doherty n'était pas réputé pour sa grande curiosité au moment des situations de crise. Il ne bougeait pas que quand il avait quelque chose à y gagner et à l'heure actuelle, une baston générale dans le saloon du coin lui semblait bien trop commun pour que le tout l'interpelle... C'était en tout cas vrai jusqu'à ce qu'une jolie brune s'échappe du bar et coure vers là où il était pour piquer un des chevaux accroches là. A coup sûr. Des gars la suivaient de près, sortant leur arme pour lui tirer dedans, le cow boy voyant qu'elle avait été touchée au milieu de cette affaire mais est-ce qu'il bougeait pour autant? "Et bah, ça dépend... Il y a quoi comme dédommagement exactement? Parce que, d'après cette jolie affiche, tu vaux bien cher mais je peux être fort utile si j'ai de quoi me mettre sous la dent." Effectivement, Wren connaissait les meilleures planques de la région, en ayant utilisé plus d'une au cours de sa longue carrière débutée à l'adolescence. Enfin, il avait décidé que le piquant de la brune l'intéressait assez pour qu'il réplique à la bande de loubards, colt à la main, remontant sur son cheval avec une voltige assez impressionnante, entraînant Maze vers les confins du village, là où il savait qu'il y avait la meilleure planque possible pour le peu de temps qu'ils avaient devant eux. "Le tunnel là, c'est ta route vers le paradis de la planque, la brune." Il jeta sa clope avant de lui faire un geste de la main pour l'inviter à passer dans ce trou qui ne payait pas de mine mais qui révélait une sacrée chambre derrière, de quoi se poser une heure ou deux, jusqu'à ce que les autorités oublient qu'elle ait été vue dans les parages. "On a pas l'habitude des célébrités qui valent chères ici, faut les excuser, ils ont pas le sens des affaires, ces gars là." Contrairement à lui, voilà le message qu'il voulait faire passer en s'asseyant sur la chaise de bois dans un coin de la pièce en toisant la brune de son regard vert si perçant. Elle ne lui échapperait pas, il se promettait au moins cela, le voleur.

Comment choisissait-elle de faire confiance aux gens ? Simple : elle ne leur faisait jamais confiance. Elle choisissait plutôt de les tuer immédiatement ou de leur laisser un sursis. Certains méritaient quelques fois qu’elle les épargne, mais ils étaient peu nombreux à faire partie de cette catégorie. Gardant son regard fixé vers ses assaillants, elle haussa toutefois un sourcil surpris suite à ce que cet inconnu venait de lui rétorquer. Avec ce genre de répliques, il venait d’être automatiquement catégorisé parmi les gens qu’elle éliminait sans attendre. Il suffisait simplement qu’elle trouve un instant pour se retourner et…Son plan s’arrêta là en constatant que ses balles vinrent faire écho aux siennes pour l’aider à tenir à distance ses adversaires. Affichant un léger sourire en coin, elle songea qu’il venait de gagner son sursis. Restant silencieuse, elle sauta à son tour sur un des chevaux et le suivit au galop jusqu’à un tunnel qui ne payait vraiment pas de mine. Son frère aurait certainement désapprouvé sa conduite actuelle, et pourtant il aurait également été le premier à rentrer dans ce tunnel. Maze jeta un coup d’œil interrogateur à l’homme tout en gardant sa main fermement agrippée au manche de son colt, comme pour lui signifier que toute cette histoire ne lui semblait pas très claire. Elle n’était pas le genre de personne à se faire piéger facilement. Aucune autre possibilité que de rentrer dans ce foutu tunnel ne s’offrait à elle de toutes façons, et s’il le fallait, elle était prête à lutter jusqu’à ce que mort s’en suive. Mais il n’avait apparemment pas l’intention de l’éliminer tout de suite, pas si elle pouvait lui rapporter quelque chose comme il le lui avait si bien fait comprendre. Elle jeta un coup d’œil à la pièce dans laquelle ils venaient de rentrer avant de se retourner vers lui : « Je te propose qu’on commence par se mettre sur un pied d’égalité. Puisque cette affiche ne me laisse plus le loisir de me présenter, puis-je au moins savoir à qui j’ai affaire ? » Son célèbre frère avait toujours refusé de l’impliquer dans ses casses car, à ses yeux, elle restait une femme et donc un être trop faible pour pouvoir se montrer digne des combines dans lesquelles il trempait. C’était pour cette raison qu’elle avait décidé de se faire son propre nom et de tirer un peu trop souvent dans le tas dès que quelqu’un venait la chercher. Petit à petit, elle était parvenue à se faire respecter par plusieurs bandits grâce auxquels elle vivait sa vie de manière plutôt aisée, si on faisait abstraction du fait qu’elle devait la plupart du temps vivre cachée. Mais Jesse, malgré ses réticences envers elle, avait tenu à l’avertir de plusieurs personnes dont elle devait se méfier dans le coin. Un grand cowboy aux yeux perçants ne lui rappelait pas l’une de ses descriptions, mais peut-être son nom lui donnerait-il plus d’informations. Restant debout, elle l’observa de longues secondes avant de reprendre la parole : « Et qu’est-ce que cette petite escapade de fortune va me coûter exactement ? » car il était certain qu’il n’avait pas agi ainsi pour ses beaux yeux. Il était intéressé. Et qui ne l’était pas dans cette ville ? Sa main libre glissa brusquement sur sa cuisse, prête à attraper son couteau. Elle venait d’entendre comme un craquement à sa gauche et son regard s’était instantanément dirigé dans cette direction. Elle avait entendu pas mal d’histoires de fantômes ces derniers temps et ne s’était jamais résolue à les croire, mais elle restait prudente malgré tout. En constatant qu’il n’y avait strictement rien, ses muscles se détendirent quelque peu pour la première fois depuis de longues minutes. Elle reporta son attention sur sa robe et en déchira un nouveau pan en guise de bande pour panser sa plaie. Décidément, cette robe avait vécu l’enfer en un temps record. Elle dénuda ensuite son épaule pour jeter un coup d’œil à l’endroit où elle avait été touchée et ses sourcils se froncèrent légèrement : c’était encore moins beau à voir que ce qu’elle imaginait. Son regard passa de sa plaie vers l’inconnu et, l’air sérieuse et un peu trop autoritaire elle lança : « Un coup de main peut-être ? » Panser son épaule seule allait lui prendre une éternité. Elle avait bien du mal à sonder ses intentions, et encore plus à anticiper les réactions qu'il pourrait avoir, et c'est ce qui le rendait le plus dangereux à ses yeux. Un séduisant danger, sans aucun doute, mais un danger malgré tout.

Il était né chieur notoire, en plus de voler à droite à gauche pour se former un petit pécule raisonnable pour ses vieux jours... Comme s'il allait les voir, évidemment. Wren était toujours dans les ennuis, poursuivi par un shérif par ci ou un ennemi par là, on ne lui laissait jamais se reposer en paix dans une de ses nombreuses planques. Alors, qu'il se retrouve au beau milieu d'une embuscade ce jour-là ne le choquait pas outre mesure, c'était même devenu une lutte habituelle pour lui. Cela dit, c'était la première fois qu'il osait prendre la défense du plus petit nombre parce qu'il restait sacrément opportuniste le Doherty et choisir celle qui était toute seule dans son camp, c'était risquer la mort et il trouvait l'idée parfaitement dérangeante. Peut être que le cow boy avait agi par esprit de séduction, là non plus, on n'aurait pas pu être étonné puisqu'il ne restait jamais de marbre face aux brunes avec un sale caractère, tout le monde le savait. Quoique ses intentions furent, on ne lui laissa pas le temps de les développer dans la partie consciente de son cerveau puisque Maze embrumait tout cela jusqu'à ce qu'il réussisse à sa caler tranquillement sur une chaise dans une planque de choix. Il la regardait, avec intensité, son jeu préféré, sentant forcément l'indécision de la jeune femme concernant son cas car il aurait très bien pu être un goujat de première catégorie qui l'aurait tuée dès qu'ils auraient passé une porte vers la solitude. Wren n'en faisait rien, il ne bougeait pas, ne tenait pas même une main sur son arme, contrairement à le brune piquante qui lui demandait clairement combien cette petite escapade à la rescousse lui coûterait. "J'attends ton prix. Je suis pas difficile en fait sur les moyens de paiement, du moment que je m'amuse un minimum... Wren Doherty, mais je suis plutôt discret donc on me voit pas trop sur les affiches d'habitude." C'était peut être arrivé une ou deux fois par le passé mais le jeune homme exerçait une certaine pression sur la police pour qu'on le retire vite de là. Il n'avait clairement aucun intérêt à être connu: comment être un bon chasseur de primes si on le reconnaissait à chaque coin de rue? Maze ne devait pas le reconnaître et c'était bien mieux ainsi alors qu'elle opérait dangereusement pour observer sa blessure, endommageant un peu plus son accoutrement dans l'affaire. Doherty se releva délicatement pour s'approcher d'elle, ses doigts voguant vers la blessure avec un sourire spontané. "T'as un éclat de balle, rien qui sera dur à gérer, assis toi." Il l'invita vers le lit de fortune dans le coin de la pièce, se munissant de sa trousse de premier secours qu'il utilisait fréquemment en vue des risques de son métier. "Qu'est ce que tu fais dans la région? C'est clairement pas désagréable de te voir en chair et en os... Mais c'est risqué, ils sont pas finauds, les gars du coin." Il sous entendait qu'elle était belle mais Maze devait déjà connaître cette information alors que Wren s'y prenait délicatement pour retirer l'éclat, pansant la plaie avec une douceur qu'on ne pouvait pas lui soupçonner, ses doigts frôlant la peau satinée avec un intérêt accru, forcément.

Elle l’observa de longues secondes, silencieusement, comme essayant une nouvelle fois de le sonder. Mais elle n’avait pas entendu parler de lui, pas sous ce nom là en tout cas, et elle ne parvenait toujours pas à le cerner. Pour l’instant, il n’avait en tout cas toujours pas rejoint la catégorie des gens qu’elle pouvait songer à épargner. Elle pouvait être sévère dans son jugement. Après tout, il l’avait bien aidée jusque-là. Mais c’était aussi grâce à cette sévérité qu’elle était encore en vie aujourd’hui. « Ok, Wren… » C’était ça son prix ? Elle afficha un sourire en coin tout en continuant de l’observer. « Tu veux dire que tu t’es pas suffisamment amusé avec cette petite course poursuite ? » En sous-effectif face aux adversaires et en présence d’une fugitive recherchée. Difficile de faire plus distrayant pourtant. « J’en connais un autre qui a voulu s’amuser un minimum avec moi dans le saloon, je suis pas certaine qu’il ait apprécié la fin de l’histoire…ni le milieu…ni même le début. » Elle en revanche, tout cela l’avait grandement divertie. A chaque nouvelle mésaventure qu’elle rencontrait, elle se jurait de se montrer plus prudente la fois prochaine et de faire davantage profil bas. Mais l’aventure coulait dans ses veines, les problèmes l’attiraient, le danger l’excitait. Elle ne voulait pas juste exister, elle voulait se sentir vivante. Et jusqu’à présent, elle y était plutôt bien parvenue. Son air méfiant ne la quittait pas alors qu’elle daignait s’installer sur le lit que lui désignait Wren. Elle était plutôt impressionnée qu’il soit si bien équipé, elle qui ne s’encombrait jamais de plus que le nécessaire vital : une arme. Et pour se balader avec une trousse de premiers secours, c’est qu’il devait en avoir besoin assez régulièrement. Cela ne fit que renforcer un peu plus sa méfiance, tout en éveillant sa curiosité. Les petites choses qui lui criaient de ne pas lui faire confiance commençaient à sérieusement s’accumuler, tout comme son sentiment d’insécurité qui, quant à lui, ne faisait qu’accroitre son envie de voir où toute cette histoire allait bien les mener. En présence de son frère qui tirait sans même réfléchir, il ne faisait aucun doute que ce Wren aurait déjà une balle entre les deux yeux. En présence de Maze, qui avait hérité du même caractère de feu mais savait malgré tout faire preuve de mesure de temps à autre, cela arriverait peut-être plus tard. Pour l’heure, il se montrait bien utile en soignant sa plaie. Il fallait qu’elle reste pratique : d’abord se remettre sur pieds, et après éliminer les témoins inutiles. Elle ferma les yeux et se mordit légèrement la lèvre pour éviter de lâcher un quelconque cri de douleur alors qu’il retirait l’éclat de la balle qui l’avait touchée. Elle avait tout de même sa dignité à conserver dans toute cette histoire. « Vivre cachée toute la sainte journée, ça devient vite très long. J’avais envie de boire un verre pour me changer les idées. » Son ton était ironique et un sourire moqueur s’affichait sur son visage, mais elle appréciait toutefois son compliment pour ce qu’il était. « J’allais pas rester cloitrée éternellement. J’avais besoin d’un peu d’action et disons…qu’un de ces gars pas très finauds m’a aidée à provoquer ma chance. » Elle n’avait même pas de but précis en tête. Pas de casse à faire, pas de têtes particulières à éliminer, juste envie de voir ce que le destin allait lui réserver aujourd’hui. Elle avait rouvert les yeux et lui lançait maintenant un coup d’œil, surprise par la dextérité avec laquelle il gérait sa blessure. Plutôt du genre à ne rien laisser transparaître de ses émotions, elle ne put retenir un frisson en sentant le contact délicat de ses doigts avec sa peau. C’était un jeu dangereux auquel il jouait, et c’était probablement pour cette raison qu’elle l’appréciait tant. Toutefois, si elle avait daigné remiser son colt hors de portée, ses doigts restaient crispés, prêts à se saisir de son couteau au moindre signe de vrai danger.  « C’était risqué en effet…Mais c’est là que ça devient le plus intéressant, non ? » Elle lui lança un regard entendu. Lui aussi avait l’air de bien s’acclimater en présence d’ennuis en tout genre. Pourquoi aurait-il aidé une femme dont la tête était mise à prix autrement ?

Elle était vraiment spéciale, du genre de nanas qu'on ne rencontrait pas tous les quatre matins. De toute évidence, Wren avait toujours eu plus de chance de rencontrer une femme qui attendait sagement son mari du côté du saloon qu'une de celles qui sortaient arme à la main, prêt à en découdre avec le premier inopportun venu. Maze faisait définitivement partie de cette deuxième catégorie, peu encline à faire confiance à quiconque: il n'avait pas franchement besoin de sonder son regard pour comprendre que rien ne serait jamais facile avec quelqu'un comme elle et Doherty se demandait vraiment quelle genre d'éducation elle avait pu avoir pour être aussi méfiante du genre humain. Du côté du cow boy, c'était plutôt évident, l'enfer tous les jours dès le lever du lit et il avait vite fait de poignarder son paternel pour protéger le reste de la famille de sa main de fer. Il était vite devenu un fugitif après cela, apprenant bien plus tard que sa mère était décédée dans un incendie. Il s'en était remis en apparence, prétextant qu'il était un homme bien trop solitaire pour en avoir quelque chose à faire des démises du reste de sa famille. Wren n'y pensait donc jamais, ne se laissait jamais aller à de telles faiblesses, ne sauvant personne d'autre que sa petite personne... Avant ce sauvetage inopiné auquel il n'avait pas mûrement réfléchi et pourtant, il se retrouvait là, à gratter la peau meurtrie de la brune avec un sourire au coin des lèvres. "On a pas le droit d'être insatiable? Hum, différent, Maze. Il t'a pas demandé son avis ce gars là avant, si?" Car lui n'était pas comme cela, à dire vrai. Wren n'avait jamais eu besoin d'user de violence pour avoir une femme: il préférait au contraire le jeu de chat et de la souris et que le tout pouvait apporter, se lassant bien vite dès qu'il était question d'enfants et d'avoir une maison à la campagne. Avec une fille comme Maze, il se doutait que ce n'était pas quelque chose dont on pouvait discuter et c'était exactement pour cette raison qu'il prenait tout son temps pour la soigner, relâchant la plaie qu'après de longues minutes de concentration, sans s'éloigner énormément pour autant. "Hum, je vois. T'en as tué combien?" Il la jaugeait, clairement intéressée par ses excès de violence, comme si c'était quelque chose qui était censé ravir un homme normal mais Wren était loin de l'être, ses yeux pétillants dès le moment où elle mentionna le risque. Oui, il adorait le danger et la situation dans laquelle il était l'attirait forcément. "Je vais pas te contredire sur le sujet. Décrispe toi, t'as pas besoin de ce couteau, Maze. J'ai aucunement l'intention de te tuer... Pourquoi, toi, si? Je te plais pas, c'est ça?" Il lui fit un clin d'oeil osé, provoquant certainement sa chance dans un contexte qui n'allait pas tellement en sa faveur mais il ne voulait pas user de ses armes. Pas celles-ci en tout cas, car ses yeux et son sourire jouaient pour lui dans cette expérience de vie trépidante qu'il laissait s'exprimer à ce moment-là.

Il était impertinent, il avait décidément tout pour plaire. Ou tout du moins, pour lui plaire à elle. Les hommes qui la reconnaissaient avaient plutôt tendance à se tenir le plus loin possible d’elle. Ceux qui ne la connaissaient pas et ne s’y prenaient pas correctement pour l’aborder finissaient avec les mains épinglées aux objets à proximité. Et il n’y avait rien de moins séduisant qu’un homme qui hurlait à la mort à cause de la douleur. « Tu as tous les droits… » Pour ce qui était de les respecter de son côté, c’était une autre histoire. « Non, effectivement. Bonne remarque. Mais est-ce que t’as vraiment l’intention de me le demander, mon avis, Wren ? » Un sourire en coin vint appuyer sa question qui se pouvait difficilement plus rentre dedans. Et aimait-elle qu’on lui demande son avis finalement ? Un avis ne pouvait-il pas se capturer aussi habilement qu’une pièce d’or ? Elle avait tendance à penser que c’était le genre de choses qui pouvait se gagner de manière tacite entre les deux partis quand chacun d’eux s’y prenait correctement. L’accoster et déposer ses mains sur elle dès les premières secondes était le meilleur moyen d’y perdre quelques doigts, des mains, ou la vie. Le malheureux du jour en avait fait les frais. Elle haussa un sourcil interrogateur en l’observant, tout en essayant de jauger s’il était vraiment intéressé par le nombre de morts qu’elle avait provoqués. Ça n’était pas le genre de questions qu’elle avait l’habitude d’entendre, hormis de la bouche de son frère qui, malgré le sexisme ambiant, ne pouvait s’empêcher de ressentir une certaine fierté quand le décompte était élevé. « Aujourd’hui ? Juste un. Mais je me suis assurée que le spectacle soit bon et la foule m’a semblé plutôt en délire. En plus, j’ai gagné un chapeau flambant neuf et un colt. » Elle fit un signe de tête en direction du chapeau qu’elle avait déposé sur une table en entrant dans la chambre et à côté duquel son arme trônait non loin. En y repensant, elle aurait pu risquer très gros en choisissant de se rendre dans un lieu public avec son couteau comme seule arme. Mais cela rendait sa sortie plus intéressante encore. « Et combien j’en ai tué depuis le…début ? » Quel qu’ait été le début pour elle. Cela commençait à remonter loin. Son regard passa du chapeau à Wren, pour se replonger dans ses yeux dont il savait résolument bien jouer. Un sourire entendu vint s’afficher sur son visage : « C’est comme le nombre de partenaires qu’on a pu avoir. Un chiffre trop personnel et un peu trop grand pour qu’on veuille vraiment le partager. » Non sans se départir de son sourire, elle secoua légèrement la tête à sa dernière remarque. « Me plaire n’a jamais été un gage pour rester en vie. » Des anciennes conquêtes qui avaient mal fini, il y en avait eu un certain nombre. Et après, elle s’étonnait encore qu’on n’ose plus l’approcher. « T’as aucunement l’intention de me tuer ? Ou…je ne sais pas…disons…de me livrer au shérif à un moment ou à un autre ? » Ses doigts se détendirent mais son couteau resta bien en place dans la jarretière de sa cuisse. « Dis-moi Wren. Parce que j’ai beaucoup de mal à comprendre quelles sont tes intentions. » Il ne pouvait pas juste avoir été là au bon endroit, au bon moment et avoir décidé de l’aider sans véritablement prendre le temps d’analyser la situation, si ? Enfin…après tout, c’était tout à fait le genre de comportement qu’elle même aurait pu avoir.

Vivre dangereusement, c'était clairement la voie qu'il avait choisi au cours de son adolescence, après son premier mort, son propre père. Depuis cet instant là, Wren avait surtout la sensation de ne plus ressentir grand chose et de chercher des substituts d'émotions dans chaque rencontre qu'il faisait, sans vraiment atteindre son but. Peut être était-il devenu insensible ou simplement mauvais, il n'avait aucun réel moyen de le savoir au bout du compte. Doherty ne savait plus grand chose, sauf qu'il n'aimait pas deviner ce à quoi sa journée du lendemain ressemblerait: il avait besoin de la magie de la surprise pour se sentir réellement exister et cela justifiait sûrement les choix hasardeux qu'il faisait de temps en temps, juste pour se garantir qu'il n'était pas certain de rester en vie jusqu'au coucher du soleil. Alors, oui, il était fréquent de voir un Wren se rafistoler tout seul dans un coin car il s'était mis dans une situation extrême et le tout le faisait sourire, comme si c'était normal d'à peine ressentir la douleur quand une balle vous transperçait la peau. Il était devenu dangereux pour cela d'ailleurs, par la force des choses, son destin le forçant à aller toujours plus vers la pénombre sans espoir d'en ressortir à un moment donné. A ce sujet, il était intimement convaincu que Maze pourrait le comprendre car elle donnait l'air de vivre comme lui, sans rien attendre de beau, juste un peu plus d'enfer dans un monde sans saveur. "Disons que je sais saisir ma chance au bon moment, quand on le veut bien, Maze." Il ne lui ferait pas l'affront de lui sauter dessus alors que la situation ne requérait pas un tel comportement. Non, à la place, Doherty allait continuer de la cuisiner tout doucement, l'interrogeant sr le cours de la journée, sans s'attendre à de véritables réponses car la brune était clairement une femme de beaucoup de mystères mais c'était ce qui l'attirait, ce qu'il aimait le plus, à dire vrai. "Bonne pioche, c'est évident. Moi, ça me dérange pas de partager ce genre d'infos, il y a aucun sujet trop personnel avec moi." Il ne cachait pas grand chose, c'était vrai. Wren s'assumait dans toute sa personnalité, que ce fut lorsqu'il brûlait des tonneaux d'alcool pour le plaisir ou quand il volait des bijoux à des tribus indiennes environnantes. Il ne croyait pas au mauvais oeil de toute manière et en vue comment il utilisait les siens, rien ne lui arriverait de sitôt avec un charme aussi trépidant. "Qui te dis que je veux vivre longtemps? Te donner au shérif? Ce serait de très mauvais goût de la part d'un gars qui supporte pas ces gens là. Et te tuer? Qu'est-ce que j'aurais à y gagner? L'argent n'a pas beaucoup de valeur en soi, pas quand il y a pas le défi d'avoir réussi un sacré coup et ce serait pas le coup. Non, je crois que je te veux vivante." Il la préférait ainsi, c'était clair vu à quel point il la dévorait du regard, à peine subtil pour un cow boy dans son genre. "Après, tu peux toujours me tuer, c'est sûr, mais tu passerais à côté de la résolution du mystère que je suis pour toi. Et j'ai la sensation que tu serais déçue si tu te laissais aller à ce genre d'extrémités sans avoir été au bout de l’aventure... Non?" Tirer sa chance jusqu'au bout pour qu'elle laisse sa main s'évader de l'endroit où Wren savait qu'elle gardait précieusement son couteau. Il n'allait pas mourir aujourd'hui, pas quand il avait peut être enfin trouvé une partenaire à sa taille.

Son visage afficha furtivement une expression surprise accompagnée d’un sourire intrigué. Il pensait réussir à saisir sa chance au bon moment ? L’avenir le leur dirait. « Tu n’as donc aucun tabou. C’est marrant, ça ne m’étonne pas beaucoup. » Et ça lui plaisait grandement. Les gens qui n’avaient rien à cacher et aucune information à dissimuler étaient toujours les plus intéressants. C’était aussi eux aussi qui, en général, avaient les meilleures histoires à raconter. Elle hocha doucement la tête quand il évoqua le plaisir de voler. Elle ne pouvait qu’approuver. Les casses dont elle était le plus fière étaient sans aucun doute ceux où elle s’était retrouvée seule contre plusieurs adversaires, sans véritablement savoir si elle allait s’en sortir ou non à la fin de l’histoire. « Tu me veux vivante ? » Elle jeta un coup d’œil rapide à sa blessure et jugea qu’il n’était pas nécessaire de tenter de replacer ce qui restait de sa robe sur son épaule. Elle était en lambeaux, les apparences pouvaient difficilement encore être sauvée pour ce bout de tissu. Tout en se levant, Maze reporta son attention sur Wren en le fixant intensément, se rapprochant de lui avec un sourire en coin. « C’est bon à savoir. » Une fois suffisamment proche de lui, elle posa sa main gauche sur l’épaule de Wren et continua d’avancer pour qu’il soit lui-même contraint de reculer. Il n’y avait aucune rapidité ni aucune violence dans ses gestes qui étaient contrôlés et calculés. Elle l’amena jusqu’à la chaise où il était encore installé quelques minutes plus tôt et, en exerçant une légère pression sur son épaule, le fit s’asseoir. Sans retirer sa main, elle se pencha vers lui, rapprochant leurs deux visages. « C’est vrai, tu m’intrigues…Et j’ai pas pour habitude de ne pas avoir le fin mot de l’histoire. » Cependant, elle avait aussi tendance à manquer de patience. Et la faire languir de cette façon avait beau exciter sa curiosité, cela jouait aussi dangereusement avec ses nerfs. Elle avait l’habitude que les choses soient claires et aillent vite. Elle n’avait pas le temps de tourner en rond, même si elle devait admettre que la lenteur et l’incertitude de la situation présente mettait tous ses sens en éveil. « Cependant… » Sans le quitter du regard, sa main droite s’était levée. Dans un geste sensuel et lent, elle fit partir son index de sa poitrine et le fit glisser jusqu’à son bas-ventre. De là elle le fit dévier vers l’une de ses jambes et, doucement, vint soulever le bas de sa robe meurtrie. Ses mouvements n’avaient pas accéléré, ses doigts allèrent entourer les uns après les autres le manche de son couteau qu’elle sortit de son emplacement. Sans avoir quitté Wren du regard un seul instant, elle vint déposer la lame sur sa joue droite, dangereusement proche de son œil. « Résoudre le mystère que tu représentes sans te tuer ne m’empêche pas de t’abîmer quelque peu pour autant. » Elle avait l’intime conviction que ça n’était pas le genre de menaces qui devaient l’arrêter. Elle se mordit la lèvre inférieure alors qu’une lueur toute particulière venait de s’allumer dans son regard. Ce jeu devenait un peu plus intéressant à chaque seconde et réveillait en elle des instincts dont elle ne soupçonnait même pas l’existence. Mais un nouveau craquement se fit entendre dans la pièce. Sans déplacer la lame de son couteau de son emplacement actuel, elle daigna cependant lâcher le regard de Wren pour tourner sa tête légèrement sur le côté, usant le meilleur de sa vision périphérique pour tenter de détecter une quelconque activité étrangère autour d’eux.  Ses sourcils se froncèrent légèrement. Elle ne voyait rien. « Je suis pas folle quand même ; tu entends la même chose que moi ? » Elle resta silencieuse un instant, l’oreille attentive et le regard dangereusement loin de sa cible principale. Mais il n’y avait strictement rien autour d’eux. Sa blessure était-elle en train de lui faire avoir des hallucinations ?

Wren n'avait clairement pas pour ambition d'être un mystère de l'humanité. Par la force des choses, cependant, il l'était parce qu'il avait beau se dévoiler, ses actes ne semblaient pas avoir de sens légitime et pour cause, le légendaire cow boy ne s'intéressait à rien. Ni personne. Depuis un moment. Alors, dans ces conditions, comment avoir une ligne directrice? Un jour, il pouvait être tranquille dans un coin de cambrousse à pêcher et le lendemain, au beau milieu d'un casse à réclamer de dédommagements de toutes les manières violentes possibles. Heureusement, on ne lui demandait pas beaucoup de faire preuve de cohérence car il n'avait plus d'entourage depuis de nombreuses années, préférant la vie en solitaire jusqu'à trouver mieux, ou tout du moins, jusqu'à trouver une camarade d'infortune qui partagerait ses idéaux... Ou plutôt, ses méfaits. Maze était une possibilité en tête de liste en vue de sa singularité et de ses manières très peu sympathiques quand on essayait d'apprendre à la cerner. Doherty n'avait pas peur d'elle, pas même de la manière dont son ton lui répondait, le cow boy laissant le silence s'éterniser jusqu'à ce qu'elle joue un peu avec ses nerfs bien accrochés. Il avait fini sur sa chaise de tantôt, observant avec un sourire non feint les faits et gestes de la belle brune, s'extasiant devant le grain de peau qu'elle dévoilait malgré elle pour lui mettre son couteau contre la joue. On ne pouvait pas dire que Wren avait été surpris d'un tel geste, il n'avait même pas eu un battement de cils en sentant le fer contre sa peau, son regard toujours porté vers celui de la brune, sans la lâcher une seule seconde. "M'abîmer? Voyons, dans quel but? Beaucoup de personnes ont essayé mais je suis insensible à cela, Maze. C'est pas comme ça que tu comprendras comment je fonctionne, je t'assure, mauvaise technique... Mais je comprends, t'as l'habitude d'user de la violence plutôt que d'autres atouts que tu possèdes, fort dommage, si tu veux mon avis." Elle ne lui avait pas demandé, loin de là même et Wren posa une main ferme sur le couteau, ignorant le sang qui coulait sur la lame car il n'avait aucun rapport avec la douleur, pas physique en tout cas et il le montrait par son regard déterminé et perçant, elle ne l'aurait pas ainsi. De toute manière, la jeune femme fut interrompue au beau milieu de son interrogatoire étrange par des bruts extérieurs, une habitude que Wren avait oublié mais pas la brune, semblait-il. "T'as réveillé les morts avec ton arme... Peut être une de tes anciennes victimes qui vient te demander tes comptes. Il faut brûler les gens que tu tues, Maze, le savais-tu ça?" Il avait été attaqué par le passé par un de ces vieux fantômes mais désormais, Doherty ne se faisait plus avoir, baissant finalement le couteau de la jeune femme vers le sol. "Quel mort voudrait ta peau, hein? Qui as-tu plus abîmé que les autres, Maze?" Il s'était relevé, tournant autour d'elle, son souffle venant frôler la peau de son cou à intervalles régulières car il ne comptait pas s'arrêter en si bon chemin avec une femme comme elle. Wren avait tout son temps et il espérait qu'elle aussi, par la même occasion.

Elle leva les yeux au ciel, faussement exaspérée, lorsqu’il mentionna les atouts qu’elle avait et dont elle ne se servait pas suffisamment. « C’est justement parce que les hommes ont tendance à trop s’intéresser à ce genre d’atouts que je préfère maintenant choisir la violence. Et puis…violence est automatiquement synonyme d’action, non ? » Quoi que, jusqu’à présent Wren parvenait à la tenir en haleine sans user de la moindre violence. Elle l’observa appuyer sur la lame, à chaque seconde un peu plus intriguée par son comportement. La brune décolla son pouce du manche de son couteau pour le faire glisser sur le visage de Wren à l’endroit où le sang avait coulé. Il était donc insensible à tout cela ? Si elle était amenée à devoir lutter contre lui dans les prochaines minutes, cette information venait grandement compliquer les choses pour elle. Elle l’avait docilement laissé abaisser la lame de son couteau et se relever, gardant un œil sur lui et sur toute autre potentielle présence dans la pièce. « T’as eu un court aperçu du spectacle de tout à l’heure, non ? C’est ce genre de scènes de crime que je laisse derrière moi de manière générale. Difficile de prendre le temps de brûler quoique ce soit. » Croyait-il vraiment à ces histoires de fantômes ? Et elle, y croyait-elle ? N’était-ce pas juste des histoires que les vieux du village s’amusaient à raconter pour effrayer la population et pour dissuader les enfants de rester dehors tard le soir ? Elle n’avait encore jamais croisé une quelconque présence fantomatique, mais les bruits qui couraient ces temps-ci commençaient à sérieusement la faire douter et à provoquer une légère psychose chez elle, comme le prouvait la scène qu’ils étaient en train de vivre. Si elle devait garder Wren à l’œil tout en restant attentive à de possibles phénomènes paranormaux autour d’eux, le plan se compliquait. Quel qu’ait été le plan à la base. Elle haussa un sourcil, réfléchissant presque sérieusement à la question qu’il venait de lui poser. « Comme je te le disais tout à l’heure, un nombre un peu trop grand d’adversaires pour que je puisse cibler une personne en particulier. » En général, elle préférait accorder une mort brève. Mais cela ne l’avait pas empêchée quelques occasions de s’amuser un peu auparavant avec ses victimes en fonction de ce qu’elles avaient pu lui faire, ou en fonction de son humeur du moment. Ses nerfs commençaient être sérieusement mis à rude épreuve et voir Wren lui tourner littéralement autour tout en sentant son souffle sur elle ne l’aidait pas à garder son calme. Il jouait et oscillait un peu trop bien à son goût entre son désir et sa capacité à sentir le danger autour d’elle. Et laisser quelqu’un se jouer d’elle de cette façon ne lui ressemblait pas vraiment. D’un geste vif, elle fit un demi-tour sur elle-même pour se retrouver face à lui et agripper brusquement le col de sa chemise pour le rapprocher d’elle. « Tu joues avec ma patience Wren… » Sa main tenait fermement sa chemise alors que celle tenant son couteau était, cette fois-ci, restée tranquille le long de son corps. Si son arme ne le menaçait pas directement, l’expression de son visage en revanche pouvait laisser planer le doute. Elle avait planté son regard une nouvelle fois dans le sien et était tout ce qu’il y avait de plus sérieuse. Elle-même ne savait pas exactement si elle voulait l’inciter à laisser tomber son petit jeu, ou à passer à la vitesse supérieure.

Ils allaient franchement s'amuser, pas besoin de chercher des distractions beaucoup plus loin que cette planque qui ne payait pas de mine, Wren avait absolument tout ce dont il avait besoin sous la main. Il devait avouer que ces derniers jours avaient été teintés d'ennui, la faute à ce bled où rien ne se passait jamais. Puis, Maze avait débarqué avec fracas, faisant quelques victimes sur son passage mais ce n'était pas cela qui effrayait quelqu'un comme Doherty, bien au contraire. Il préférait ce genre de personnages, avec une propension à la violence et à l'imprévisibilité car il se reconnaissait bien plus dans ce genre de comportements de son côté. Wren était peut être même pire que la jeune femme car il était devenu insensible à la douleur au cours de son adolescence et lui prouvait avec un regard volontaire et qui aurait pu faire peur à un individu lambda mais Maze n'était pas de ceux là non plus. "Je vois que tu jures que par l'action... Mais il y a d'autres moyens que la violence pour en avoir." Il en savait quelque chose, lui qui trouvait son adrénaline le plus souvent dans le calme le plus complet, certainement parce que c'était ce genre d'atmosphère qui lui permettait d'avoir le plus de plaisir à usurper des objets de valeur. Quand c'était le chaos, le tout était beaucoup trop simple et Wren détestait la facilité, il le prouvait à nouveau en ayant entaillé sa paume de main pour prouver ses dires à la jolie brune. "Garde un briquet sur toi, à l'avenir. Avec un peu d'alcool, ça fait fureur sur les scènes de crime." Il se permettait même de laisser planer son amour du feu au dessus de leur crâne en tournant autour de la jeune femme, voyant bien qu'elle appréciait le jeu malgré cet air désapprobateur qu'elle conservait fixé à ses traits. Doherty lisait en elle, il comprenait fort bien qu'il arrivait à bout de sa patience vu la manière dont elle s'accrocha à sa chemise en usant d'un ton plus ferme encore. Lui ne bougeait pas, ne cherchant même pas à se défaire de son contact, comme si le tout lui apportait une pleine satisfaction puisqu'il réussissait à la faire réagir d'une manière ou d'une autre. "Hum... Impatiente à ce point? Sur quel plan, Maze? Je peux peut être t'aider sur la question, après tout." Il posa une de ses mains sur celle qui tenait fermement son vêtement, son visage se rapprochant un peu plus du sien, à quelques centimètres seulement, le regard magnétique bloqué vers celui ébène de la jeune femme. Jouer avec le feu jusqu'au bout, pour ne rien regretter, ne pas perdre une miette du spectacle que constituait Maze à ses yeux.

Elle haussa un sourcil interrogateur. « D’autres moyens ? Développe. » Puisqu’il n’avait pas de tabou, il pouvait aller jusqu’au bout de son raisonnement qu’elle était d’ailleurs très curieuse de connaître. Elle qui, en effet, n’avait jamais trouvé meilleur divertissement que dans la violence la plus totale et les combats les plus inégaux. D’ailleurs n’était-ce pas d’une certaine manière un duel qu’ils étaient justement en train de se livrer ? Elle ne savait pas s’ils jouaient à armes égales mais elle ne tarderait certainement pas à le découvrir. « Je note le conseil. Ça peut effectivement s’avérer utile. » Et lui offrir une sortie littéralement explosive. Après tout, trouver de l’alcool sur les scènes où elle cherchait les ennuis n’était jamais bien compliqué. Il y avait toujours deux ou trois ivrognes pour trainer à proximité, et son lieu de prédilection était de toutes manières les saloons. « Tu m’as l’air bien au fait de toutes ces histoires d’esprits et de comment les éviter. Dois-je en conclure que les fantômes ne te font pas peur ? » Y avait-il véritablement quelque chose qui pouvait lui faire peur au fond ? Elle n’en était pas certaine, mais si tel était le cas, elle aurait donné cher pour le savoir.
La brune laissa un léger rire lui échapper alors qu’elle secouait doucement sa tête en signe de désapprobation. Il était incroyable, au sens littéral du terme. Elle n’arrivait pas à l’effrayer, elle n’arrivait pas à le repousser, et elle n’arrivait pas à le faire avancer plus vite. Il faisait ce qu’il voulait, et elle commençait à se demander s’il n’était pas en mesure de l’amener exactement là où il en avait envie. Elle n’était pas certaine d’apprécier grandement cette idée, mais elle ne pouvait pas lutter contre son caractère impatient. Sa respiration s’était accélérée alors que sa main s’était posée sur la sienne et que leurs visages s’étaient rapprochés. « Tu tiens vraiment à ce que je tire la première, Wren ? » Elle ne dévia pas une seule seconde son regard du sien. Présentement, plus grand chose n’existait autour d’elle en dehors de ce regard-là. Quant à tirer la première ? Elle était plutôt habituée à ce qu’il en soit ainsi en règle générale de toutes façons. Elle ne saurait dire si elle cédait aux caprices de cet homme ou aux siens, mais elle n’en était plus à ce stade de la réflexion. « Très bien. » Elle sentait sa respiration sur la peau de son visage et cela la rendait folle. Elle resserra un peu plus sa prise sur son vêtement et d’un geste vif l’attira à elle pour réduire à néant la distance qui séparait leurs deux visages, allant sceller ses lèvres aux siennes avec une envie qui la dévorait depuis de longues minutes maintenant. Une envie à laquelle elle avait décidé de laisser libre court. Contrairement au sort du malheureux de tout à l’heure, les mains de Wren n’étaient pas prêtes de se retrouver clouées à la table la plus proche dans un futur proche.

Il était bien au fait de tout ce qui se passait, évidemment. Wren n'était pas un démon assoiffé de sang et de vengeance mais il avait ses moments, ce qui ne le rendait pas moins dangereux que Maze de bien des manières. Ses armes étaient différente de celles de la jeune femme qui manquait franchement de subtilité, certainement que son éducation avait quelque chose à voir la dedans ou son lien fraternel avec un bandit ultra recherché. Dans tous les cas, Doherty avait affaire à une femme fort intelligente qui savait placer ses pions au bon endroit et au bon moment, de quoi défier un peu plus l'homme qu'il était. Le défi, désormais, c'était elle. Tout ce qu'elle représentait, tout ce qu'elle montrait mais aussi et surtout, tout ce qu'elle essayait de cacher car c'était toujours cela que Wren désirait débusquer. Lorsque c'était trop simple ou trop visible, il décampait bien vite mais il avait la sensation q'avec Maze, il trouverait toujours un nouveau glorieux trésor à dénicher. "L'action peut aussi être silencieuse et furtive... Un peu comme un jeu de séduction, tu vois." Elle devait sûrement voir en effet vu qu'ils se tournaient autour, littéralement, depuis de nombreuses minutes et peu importe les efforts de la brune, Wren ne semblait pas prêt à laisser un peu de terrain. Au contraire, il restait campé sur sa position, s'approchant toujours un peu plus d'elle, sentant son parfum lui titiller les narines alors que sa main glissait contre la sienne. Il en oubliait presque qu'elle était fortement armée et qu'elle pouvait changer de tactique en un claquement de doigts, à croire que cette position le charmait plus qu'elle n'aurait dû. Elle était impatiente, il le sentait dans la vibration de son souffle, dans cette proposition qu'elle eut de l'attaquer en premier, bien sûr que c'était parfaitement ce que le grand homme voulait. Qu'elle craque. Qu'elle lâche du lest ou au contraire, en reprend un peu plus alors qu'il sentit une pression plus ferme encore sur sa chemise au moment où elle amenait ses lèvres vers les siennes. Exactement ce qu'il attendait, ce qu'il voulait, approfondissant le baiser avec une envie non feinte, ses mains se posant sur ses joues en ne demandant rien de plus que cela, que ces milliers de sensations qui traversaient son corps en embrassant une femme aussi ténébreuse que Maze. "C'est tout, Maze? On s'arrête là, alors?" Il avait le souffle clairement court en murmurant ces quelques mots, ses lèvres encore si proches des siennes et l'envie de les habiter à nouveau lui grillait la cervelle. Néanmoins, il jouait un peu plus, s'adonnant à ce risque fou avant d'abandonner son âme au diable, ses doigts glissant délicatement vers son épaule dénudée alors que ses yeux, eux, s'étaient assombris d'un désir nouveau. Unique. Enflammé. Tout ce qu'il aimait dans un seul moment volé.

Elle laissa un léger rire lui échapper. Évidemment, d’un point de vue jeu de séduction, elle pouvait difficilement mieux voir de quoi il voulait parler. « Les règles de ce genre de jeux sont un peu trop floues à mon goût. Comment est-ce que tu désignes le gagnant exactement ? » S’il s’agissait du premier à craquer, alors elle se déclarait bien volontiers bonne perdante. Mais si les règles prenaient en compte le plus joueur des deux pendant la partie, elle avait certainement encore toutes ses chances et elle comptait bien les faire valoir. Et, si elle avait cédé la première, elle ne retint pas un fin sourire de satisfaction alors que Wren répondait à son baiser. Il s’était peut-être montré plus patient qu’elle, mais dans les faits il ne cherchait pas à cacher que la finalité à court terme de toute cette histoire était la même dans leur esprit respectif. Elle l’encouragea de manière tacite à continuer ce plongeon dans le vide avec elle en l’attirant un peu plus à elle de sorte que sa poitrine était à présent tout contre son torse. Aussi haletante que lui, elle reprit son souffle quelques secondes tout en replongeant son regard dans le sien. Par provocation, ses lèvres allèrent frôler les siennes sans lui laisser le temps de les capturer une nouvelle fois. Puis elle murmura à son tour : « Est-ce que j’ai vraiment la tête de quelqu’un qui ne va pas au bout des choses ? » Elle ne put retenir un nouveau frisson lorsque ses doigts vinrent glisser sur son épaule. Presque à regret, elle se décolla de lui de quelques centimètres, conservant malgré tout encore une grande proximité. « Dis-moi Wren. En plus de ta trousse de secours… » Pour joindre le geste à la parole, sa main droite tenant encore fermement son couteau se leva lentement pour aller se caler sous son cou. Elle avait suivi des yeux le trajet de sa lame et une fois celle-ci parfaitement calée à l’endroit où elle l’avait décidé, elle reporta son attention sur les yeux de sa cible. « …Est-ce que tu penses aussi à te balader avec des vêtements de rechange ? » Sans le quitter du regard, lentement, précautionneusement, son couteau entama une descente. Elle fit craquer un à un les points de pression permettant de garder sa chemise fermée, la pointe de sa lame venant effleurer son torse sans jamais entailler sa peau pour autant. Avec sa tendance à brusquer les choses ça n’était pas la première impression qu’elle pouvait donner, mais ses gestes pouvaient aussi être d’une infinie précision quand elle le voulait bien. Le regard résolument décidé, et s’humectant les lèvres comme un animal sauvage face à sa proie aurait pu le faire, sa tête s’était légèrement penchée sur le côté alors qu’elle attendait sa réponse. Comme si celle-ci pouvait avoir une quelconque importance sur le déroulé de la suite des choses.