2000. Je ravale mes soupçons et ma fierté, je ravale mes doutes, je ravale ma tristesse aussi mais cette dernière n’existe de toute manière pas dans la version officielle. Une femme est morte en couche et ça arrive tous les jours j’en suis certain, ce n’est pas parce qu’elle portait un enfant qui était (supposément) le mien que je devrais m’en vouloir pour quoi que ce soit. Ce n’est pas parce que j’étais trop occupé à boire jusqu’à ne plus me souvenir de rien que je devrais m’en vouloir non plus, j’imagine. Ça arrive tous les jours, des morts et des naissances. Mon enfant est mort, celui de mon frère est né. Le juste équilibre des choses, j’imagine, et au moins on échappe aux pleurs de la mère en deuil. Ne reste que moi, mais moi j’ai pas pleuré. J’étais trop bourré pour ça, de toute façon.

Maintenant qu’ils ont eu le droit de ramener le garçon à la maison, je crois qu’il était de mise pour moi que de passer une dernière fois avant qu’ils retournent dans leur villa à eux, trop grande, trop loin. Les connaissant je sais qu’ils s’envoleront dès que les médecins leur auront donné leur aval, eux qui s’adaptent rapidement aux coutumes italiennes mais qui, je pense, s’adaptent encore mieux à celles de l’aristocratie européenne. Je n’habite plus chez les parents ni nulle part ailleurs depuis quelques années déjà mais je suis revenu un temps seulement pour être avec eux puisqu’ils ont sûrement besoin du meilleur oncle de la Terre entière pour les aider à s’habituer à cette nouveauté. Il n’y a pas même à discuter de cette chose tellement tout me paraît évident. Il n’y a que moi qui arrive à arrêter de faire pleurer leur nourrisson, même si je n’arrive pas à l’expliquer pour le moment encore.

J’entre dans la pièce qui lui est dédiée après avoir toqué un temps à la porte, habitude nouvelle que je vais perdre aussi rapidement que j’ai su la gagner. Je ne crie pas et je suis calme, Elise est posée dans l’immense fauteuil offert par nos grands parents et dans ses bras se tient l’enfant qui semble endormi. Je referme la porte sans un bruit et m’installe sur un fauteuil en face, un sourire forcé au coin des lèvres. “Je savais pas quand est ce que vous repartiez alors j’ai préféré venir plus tôt.” Des mots et des phrases d’adultes sortent de ma bouche, je ne m’y ferai jamais. J’ai hâte de perdre cette habitude là aussi. “J’ai trouvé des habits taille miniature, donc ça devrait lui aller.” J’ai posé le sac sur la commode à ses côtés en entrant, les habits de nourrisson empaquetés dans un papier cadeau que je n’ai bien sûr par réalisé moi même. Je ne prends pas le temps de préciser que cela a été acheté avec l’argent volé à mes parents, on dira seulement que c’est l’intention qui compte je crois. Il y a toute l’attention du monde, là, c’est promis. "Il va bien ?" Je suis supposée demander ça à Elise en premier, je crois, mais j'ai encore beaucoup de mal avec les mondanités et tout le bordel.

@elise williams  

Tu vis dans une bulle carrément. Tu n'as pratiquement pas fermé l'oeil depuis que Saül t'a mis le petit entre les mains. Les cernes sont bien présentes pour confirmer le manque de sommeil. Ce n'est pas tant que le nouveau né soit difficile. Il dort la plupart du temps. Mais même lorsqu'il dort, toi, tu n'y arrives pas. Tu as peur qu'on te l'enlève ce petit miracle que tu n'espérais plus. Tu as peur qu'il arrête subitement de respirer. Tu as probablement lu beaucoup trop d'article sur la mort subite du nouveau né. Beaucoup trop d'article en trop peu de temps. Tu emmerdes déjà Saül avec tes milles-et-une craintes non-justifiées. Mais tu n'as pas eu neuf mois pour te préparer à l'arrivée de cet enfant dans votre vie. Il était juste arrivé par enchantement du jour au lendemain. Juste comme ça. Vous aviez passé quelques jours dans la maison d'enfance de Saül histoire de venir présenter l'enfant à tout le monde, à ses parents, aux petites soeurs qui y vivaient toujours, puis à Auden qui passait de temps en temps. Justement, le voilà qui passe la porte de la chambre. « Je savais pas quand est ce que vous repartiez alors j’ai préféré venir plus tôt » Tu lui souris, un vrai sourire. Tu es sur un nuage de bonheur, et il n'y a rien qui pourrait t'en faire descendre. « Tu as bien fait. Tu sais comment il est ton frère. Il fatigue déjà des journées de boulot qu'il a manqué. » Tu lèves légèrement les yeux au ciel avant de lui sourire de nouveau. Tu aurais peut-être aimé rester ici plus longtemps. C'est bien ici. Tu n'as rien d'autre à faire que de contempler le nourrisson dans tes bras. « J’ai trouvé des habits taille miniature, donc ça devrait lui aller. » « C'est gentil. » que tu lui dis en détournant légèrement le regard vers le paquet cadeau -qui n'a visiblement pas été emballé par lui, ni par aucun autre homme de ce monde- qu'il venait de déposer sur la commode. « Il va bien ? » Tu hoches la tête. Oui. Il allait bien. « Il est parfait » Tu pose ton regard sur le petit être endormis. Tu pose sur lui le regard d'une mère aimante avant de relever ton regard vers Auden. « Tu veux le prendre ? » que tu lui demandes en te levant de la chaise. Tu n'attends pas vraiment sa réponse avant de lui mettre l'enfant entre les mains. Comment pourrait-il refuser de prendre un être si parfait ? Ça te semblait impossible. « Il ressemble à Saül. Tu trouves pas ? » Tu avais réussi a te convaincre toi même. Même si, la mama Williams avait elle plutôt émis comme commentaire qu'il était la copie de son oncle Auden. Franchement, tu aurais voulu qu'elle meurt là, sur le champ. Même si, au fond, personne d'autre n'avait trouvé ce commentaire étrange. Parce que c'est possible de ressembler aux oncles et tantes. Ça reste la même génétique.

@auden williams  

Le bambin est bien plus beau que tous ceux que j’ai pu croiser à la nurserie de l’hôpital, quand j’étais déjà allé le voir lui et Saül il y a quelques jours de ça. Ce sont les gènes Williams qui y jouent, assurément, et c’est la principale raison pour laquelle il n’a rien à voir avec la plèbe et qu’il ressemble déjà à un demi-Dieu. Je ne le dirai pas à mon frère parce qu’il s’en vanterait jusqu’à la fin de ses jours et que ça serait lourd, n’empêche que c’est bien vrai et qu’il sera sans doute le deuxième plus beau de la famille (juste après moi). Même si pour le moment il se contente d’être tout boudiné, j’ai bon espoir pour que son état général s’arrange très rapidement - je serai le tonton le plus fière du monde.

« Tu veux le prendre ? » Comme pris sur le fait accomplis, je relève vivement les yeux vers Elise et entrouvre la bouche pour articuler quelque chose sans jamais réellement y arriver. Je devrais dire non, parce que je vais le casser, parce qu’il va tomber, parce qu’il va se réveiller et parce qu’il va pleurer, parce que c’est elle sa mère et que moi je n’ai aucun droit sur lui. Pourtant j’ai à peine le temps de laisser planer un long et sonore “Euuuh” avant qu’elle ne décide à ma place et me confie son fils entre les bras que je tends vivement pour qu’il vienne s’y lover. « Il ressemble à Saül. Tu trouves pas ? » Mes prunelles restent visées dans les siennes alors qu’elle n’a d’yeux que pour son fils, j’en viens à refermer la bouche en faisant claquer mes dents entre elles. Peu assuré, mon regard finit par dériver vers le nourrisson emmitouflé de couvertures. Il s’est réveillé mais il ne pleure pas. Il n’est pas cassé non plus, encore moins tombé. Il va bien, je crois. Tout va bien alors je me permets de poser mes yeux sur lui, pour de vrai cette fois-ci, et d'acquiescer en hochant silencieusement la tête. “Il a ses yeux.” Il a les yeux bleus de mon frère avec lesquels c’est certain il a attiré la planète entière dans son lit. L'enfant a les mêmes, clairs et puissants. Il ressemble à mon frère, à n’en pas douter - pourquoi y aurait-il même à douter ? “Je crois qu’il m’a souri.” Et par simple politesse et rien de plus, absolument rien de plus, je me mets à lui sourire à mon tour tout en délogeant une de mes mains de dessous lui pour venir caresser ses joues du bout de l’index. “Vous avez eu le temps de tout préparer pour lui ? Ça n’a pas été trop compliqué ?” Est ce qu’il sera bien ? Est ce qu’il sera heureux ? Le déni de grossesse les a pris de court et jusqu’à ce qu’Elise arrive à l’hôpital avec des maux de ventre, elle ne savait pas qu’elle allait accoucher. J’en conviens que le changement a dû être brutal pour autant je veux m’assurer que s’ils quittent la maison alors ce sera seulement pour que mon neveu vive dans de meilleures conditions. Jamais rien de moins.

« Euuuh » Mais il n'a pas vraiment le temps de répondre Auden. Il n'a pas le temps d'exposer ses craintes à tenir un être aussi fragile entre ses bras que tu t'es déjà permises de le faire. Il est si beau, si parfait, comment ne pourrait-on pas avoir envie de le prendre ? Ça te semblait tout simplement inimaginable. « Il a ses yeux. » Il aurait tout de Saül et pratiquement rien de toi. On croirait simplement qu'il tient sa teinte de cheveux plus foncé de toi. Tout le reste du Williams tout craché et ce ne serait pas étrange que ce soit le cas. Tout le monde sait que les enfants ont souvent tendance à plus ressembler au père. « Je crois qu’il m’a souri. » Et il sourit en retour, et toi non plus, tu ne peux pas t'empêcher de sourire tendrement. Ça rend heureux les bébés.

« Vous avez eu le temps de tout préparer pour lui ? Ça n’a pas été trop compliqué ? » Pour ce petit miracle surprise, non, vous n'étiez pas prêt du tout. Personne ne saura jamais que c'est un projet qui datait de quelques mois déjà, qu'un coup marié, vous vous étiez lancé dans le projet bébé. Après le mariage, c'est le bébé. C'est comme ça que ça marche c'est tout. Mais dans la version officielle, vous vouliez des enfants, mais pas tout de suite. Cosimo était un bébé plus que surprise, mais vous étiez comblé malgré tout, même s'il était arrivé plus tôt que prévu. Dans le version officielle toujours. « Pas vraiment. Mais ta mère nous a beaucoup aidé et Saül s'est occupé d'acheter tout. » Sous tes ordres bien sûr. Les disputes ont déjà commencé alors qu'il n'avait pas commandé la bonne tonte de blanc. Blanc, c'est blanc, selon lui non. Non. Blanc c'est pas juste blanc. « Tout devrait être prêt à notre retour à la maison. » Parce que vous ne ferez rien vous même naturellement. Alors oui, tout devrait être prêt à votre tour comme si cette chambre d'enfant avait toujours existé. « Tu viendra nous visiter ? Tu es toujours le bienvenue tu sais. » Il faut bien que quelqu'un le lui dise et ce ne saura pas Saül même s'il le pense.

@auden williams  

« Pas vraiment. Mais ta mère nous a beaucoup aidé et Saül s'est occupé d'acheter tout. » Je retiens un quelconque commentaire seulement parce que je vois le sourire du bambin qui s’agrandit quand je caresse la peau de ses joues. Il est la seule raison (la seule distraction, okay, rien de plus) pour laquelle je ne roule pas des yeux et ne souffle pas non plus ; simplement parce que j’aurais pu lui faire avoir froid. Si le bébé de mon frère est malade à cause de moi alors c’est sûr et certain qu’il me fera la morale pendant des années et qu’il m’en voudra pendant des décennies et j’ai pas envie de tester, je vous jure, ça serait l’enfer. Tout ça pour dire que oui, bien sûr que c’est mon frère qui a tout acheté. Il a commandé les produits les plus chers sur internet en pensant qu’ils allaient forcément être les meilleurs et il ne s’est pas déplacé dans un seul magasin parce que ça aurait été comme se mêler à la foule. Il ne fait pas ça, mon frère. Il dépense et il se contente de penser que c’est suffisant. J’espère qu’il apprendra au contact de son fils que la vie ne fonctionne pas toujours ainsi. « Tout devrait être prêt à notre retour à la maison. » Cela n’a pas grand chose pour me rassurer mais j’hoche au moins silencieusement de la tête sans jamais quitter le nourrisson des yeux. Il continue de sourire et moi j’en fais autant ; c’est comme une bataille de regards mais en inversé. J’aime bien le principe. Je serai imbattable et mon neveu sera le deuxième meilleur mondial dans ce domaine, c’est assuré. « Tu viendra nous visiter ? Tu es toujours le bienvenue tu sais. » Je continue de le bercer doucement de mes bras alors que mes yeux remontent vers Elise. “Je … Je suis pas revenu pour longtemps, ici. Tu sais, je suis partout et nulle part et …” J’ai besoin de voir l’ailleurs, j’ai besoin de visiter d’autres choses, j’ai besoin de respirer un autre air que celui de notre affreuse province qui étouffe et qui sent les champs de blé. Ce n’est pas la maison ici ni même nulle part ailleurs et j’ai encore besoin de trouver la mienne à défaut de l’avoir trouvée. “Si je passe par chez vous je viendrai mais je peux rien promettre.” Parce que je n’ai pas d’itinéraire, parce que j’erre sans but précis. Je ne sais pas où je serai le lendemain, jamais, et surtout je n’ai pas souvent envie de subir le regard réprobateur de mon frère, celui qui juge tous mes faits et gestes et chacune de mes idées. “Vous n’aurez pas besoin de moi pour l’élever, de toute façon.” Mon sourire se veut rassurant (résigné). Cet enfant est le leur et seuls ses parents sauront ce qui est bien pour lui ou non. Mon avis n’a aucune importance là dedans, je suis juste là pour poser mon index dans sa main et c’est déjà bien assez. “Quand il sera assez grand pour en manger je lui ferai des tiramisu bien meilleurs que ceux de Saül.” D’ici là beaucoup de choses auront changées et c’est une promesse que je me sens capable de tenir, finalement. “Il ne m’a pas dit comment vous alliez l’appeler.” Il ne veut jamais rien me dire, de toute façon, il est chiant mon frère.

« Je … Je suis pas revenu pour longtemps, ici. Tu sais, je suis partout et nulle part et … » Bien sûr que tu sais. « Si je passe par chez vous je viendrai mais je peux rien promettre » C'est un non. Tu le sens dans le fond de sa voix. Tu souris malgré tout pour cacher ta déception. « Vous n’aurez pas besoin de moi pour l’élever, de toute façon. » Ce n'était clairement pas la raison de tout ça non plus. Tu n'aurais même pas besoin de Saül pour l'élever non plus. Tu le fera toute seule, parce que tu es trop intense et que tu vas prendre toute la place, parce qu'il va te laisser faire sans rien dire, parce que c'est un homme d'affaire pas de famille. Et ça t'iras, pendant plusieurs années jusqu'à ce qu'il décide finalement de s'en mêler. À partir de là, tout dégringolera, lentement, à petit feu. « Je sais. J'ai juste envie qu'il soit bien entouré. C'est important, la famille. » Toi t'es toute seule. Saül, lui, il a la chance d'être bien entouré par son frère et ses soeurs. C'est pas pour rien que vous êtes ici et non en Australie. C'est pour être bien entouré.

« Quand il sera assez grand pour en manger je lui ferai des tiramisu bien meilleurs que ceux de Saül. » Tu ris doucement, alors que ton regard se perd de nouveau vers le nouveau-né qui semble si paisible dans les bras de Auden. Ça devrait probablement te déranger. Mais tu es enfoncé tellement loin dans le déni que ça te fait même plaisir. « C'est possible, ça ? » Les tiramisu de Saül sont assez dure à battre. Ça va assurément prendre une compétition pour déclarer un vainqueur. « Il ne m’a pas dit comment vous alliez l’appeler. » « Cosimo » Vous aviez opté pour garder les souches italienne des Williams, alors que son propre père commençait à renier les siennes. Étrange, oui. De toute façon, c'est ici qu'il grandira. Ce n'est pas dans les projets de partir. Du moins, pas dans les prochaines années. Tu te doutes bien qu'un jour ou l'autre, vous devrez voler là où le boulot de Saül le lui demande, mais ce n'est pas pour bientôt. Du moins, tu ne crois pas.

@auden williams  

Il y a des mots, des concepts et sous entendus que je ne comprends pas encore. Mon attention toute entière reste occupée sur l’enfant, je place mes doigts de manière à couvrir le plus d’espace pour le porter au mieux sans ne jamais risquer qu’il tombe ou lui faire mal. Il est un Williams, après tout, le premier d’une toute nouvelle génération et c’est bien pour cela qu’il est devenu le joyaux de la famille aux yeux de tous, de moi aussi. Pour une fois je ne fais de zèle et rentre docilement dans le rang, tentant pour autant de cacher le sourire en coin naissant sur mes lèvres. « Je sais. J'ai juste envie qu'il soit bien entouré. C'est important, la famille. » Ouais, peut être. Ma famille n’est pas le centre de mes priorités pour le moment et je doute réellement qu’elle le soit un jour. Saul fait sa vie et les filles aussi, aucun n’a besoin et sans doute que c’est bien mieux ainsi à en juger par le fait que je passe plus de temps en dehors de la maison que dans notre village natal. Il sera bien entouré avec ou sans moi, je ne me fais pas de soucis pour lui. Il sera sans doute même mieux entouré sans moi dans les parages.

« C'est possible, ça ? » Je quitte le bambin des yeux un instant, l’oeil vif et fier, un sourire de vainqueur sur le visage. “Tu goûteras. Tu verras qu’après ceux de mon frère te paraîtront suuuper fades.” Bien sûr que c’est possible. Ce n’est pas parce que j’utilise sa recette que je dois m’en tenir à son niveau de médiocrité, heureusement que j’ai su rajouter mes propres ingrédients et ma propre originalité dans tout cela. Tout ça pour en arriver au meilleur tiramisu de la famille Williams, si ce n’est même du pays tout entier.

Et enfin le prénom de mon neveu se voit révélé. « Cosimo » Je rigole par automatisme, finalement pas choqué le moins du monde que Saül ait choisi le nom d’un des individus les plus connus et puissants du pays. C’est mon frère tout craché, ça. “J’aurais dû m’en douter.” Mon attention revient un temps sur le chérubin lequel n’a physiquement rien à voir avec le Medici et c’est très franchement une bonne nouvelle pour lui - et pour nous tous. Je serai ravi d’un jour accompagner ces yeux bleus à l’école, c’est certain.

Enfin Cosimo bouge, Cosimo s’agite, Cosimo tente de baragouiner quelque chose sans pour autant que quiconque soit capable de le comprendre. Ses mains lâchent mon doigts, il les tend en l’air et je ne sais pas quoi faire. Je n’ai jamais eu à guide le livre du bébé et tout ceci dépasse de bien loin mes capacités, cela d’ailleurs rien à voir avec mes capacités. Saul est le seul père de la famille, ce n’est certainement pas mon cas. “Okaaay okay c’est le moment où je te le rends.” Un pas puis un autre et je réduis l’espace entre nous, redéposant de nouveau l’enfant près d’un être humain dont il a bien plus l’habitude que moi. “Il va bien ? J’ai fait un truc de mal ? Faut lui préparer un biberon ou un truc dans le genre ?” Je sais pas comment marchent ces choses là et ça a vraiment quelque chose d’effrayant au fond.

« Okaaay okay c’est le moment où je te le rends. » Il s'avance vers toi en te remettant le nourrisson entre tes bras. Et il retrouve si naturellement le confort de tes bras qui l'apaise presque dans la même seconde. Tes bras qui ne le berce que depuis quelques jours seulement. Ta voix qui le rassure depuis peu. Le rôle de mère qui t'es venu si naturellement pour lui. L’instinct maternelle qui est venue comme s'il était vraiment le tien. Et lui, ce petit être qui ta laisser prendre le rôle si facilement. Il devrait pas te donner la vie si facile ce bébé. Il devrait te pourrir la vie pour te punir de lui avoir arraché à sa vrai famille. Même si c'est pour le mieux. Pas vrai que c'est pour le mieux ? C'est ce que Saül t'a dit. Tu étais déjà convaincu avant qu'il ne le spécifie de toute façon. Tu le suivra dans tout et n'importe quoi de toute façon. Là dedans encore plus.

« Il va bien ? J’ai fait un truc de mal ? Faut lui préparer un biberon ou un truc dans le genre ? » Tu ris doucement. « Relaxe Auden. Un bébé ça pleure parfois. Souvent même » Cosimo que tu admires comme la prunelle de tes yeux. Cosimo que tu berces doucement entre tes bras. Il est si parfait. Parfait. Ses pleures qui se calment quelques secondes, puis reprennent de plus belle la seconde suivante. Il est beau même quand il pleure. Tout ce qu'il fait t'épates, alors qu'il ne fait rien d'autre que boire et dormir. Puis, il y a les pleures qui se poursuivent. Bon, peut-être qu'il a faim finalement. « Tu peux aller demander à ta mère. Elle va s'en occuper. » Du biberon. C'est sûrement pas Auden qui sait la recette pour faire une bouteille. Et puis, elle t'aide énormément la mère des Williams. Il faut dire qu'elle est plus qu'enjoué de son rôle de grand-mère. C'est peut-être pour ça aussi que c'est si facile avec le bébé, parce que tu as énormément d'aide ici. Ce ne sera pas aussi facile quand vous partirez d'ici. C'est pas Saül qui se lèvera la nuit pour s'occuper du petit. Il est trop occupé pour élever un enfant.

@auden williams