Ca faisait déjà une semaine que Victoire avait épuisé sa réserve mensuelle de cannabis médicinal. C’était sensé l’aider dans sa dépression car elle avait dit à sa psy qu’elle avait beaucoup de mal à s’endormir (c’était tout à fait vrai) et qu’elle manquait d’appétit (ça par contre, c’était totalement faux). En réalité, Victoire n’en faisait pas un usage très « médicinal » et ne respectait pas la posologie, elle s’en servait comme d’un anesthésiant, comme d’un moyen de « poser son cerveau » chaque soir et aussi comme d’un amplificateur de l’effet de l’alcool. Bref, elle avait clairement autant un problème avec le cannabis qu’elle en avait un avec l’alcool, c’est pourquoi elle avait sa dealeuse attitrée qui lui fournissait le complément nécessaire à sa consommation. Sauf que la dernière fois qu’elle l’avait vue, Jo lui avait dit qu’elle allait quitter Brisbane et ne serait plus là pour lui en vendre. Devant la panique de Vic à l’idée de se retrouver sans sa dose, elle lui avait filé le numéro d’un autre dealer. L’ancienne mannequin avait insisté pour obtenir le numéro d’une femme dealeuse car elle n’avait aucune envie de se retrouver dépendante d’un homme inconnu, mais Jo n’avait pas mieux à lui proposer.
Une semaine qu’elle n’avait plus rien à rouler en rentrant du travail, qu’elle grattait le fond de son grinder et de ses pochons à la recherche des miettes et qu’elle consommait toujours plus de whisky pour trouver le sommeil. Elle avait repoussé ce moment au maximum mais elle n’avait plus le choix, il fallait qu’elle contacte ce fameux « Jet ». Alors la veille, elle avait envoyé un sms : « Jo m’envoie, je suis Vic. 100$G. ». Vicky connaissait tous les codes courants utilisés par les dealers, celui-là n’était pas super discret ni confidentiel, mais tout le monde le comprenait au moins. Elle demandait 100$ d’herbe (G pour « grass »). C’était plus que sa consommation mensuelle mais elle voulait éviter d’avoir à revoir ce dealer rapidement. Puis, pour être sûre d’avoir une réponse rapide, elle avait précisé dans un deuxième sms : « Demain ? Où ? ».
Elle avait lu la réponse le lendemain matin et ils avaient arrangé un rendez-vous. Elle devait se rendre au fameux bar où elle avait rencontré Crystal, Le Canvas. Un bar, un mec inconnu à rencontrer, dealer de surcroît… *Comment ça pourrait mal se passer…* ironisait-elle intérieurement. Le soir venu, elle revêtit à nouveau sa tenue de « camouflage anti-drague » : pantalon et hoodie noirs, pas de maquillage, ses cheveux roux attachés en une queue de cheval sommaire. Elle se regarda dans le miroir de son entrée avant de partir. *Look de cambrioleuse, ça arrêtera pas tout le monde mais au moins, j’ai les fesses et la poitrine camouflées par ce hoodie informe*
Elle se gara sur le parking proche du bar et s’y rendit sans attendre. *Vivement que ce soit fait, que je rentre à l’appart’ et que je me roule un énorme pétard* Elle jeta un œil à sa montre, elle était pile à l’heure. Elle s’engouffra dans le bar et se rendit dans le recoin qu’il lui avait indiqué, derrière les tables de billard. Elle avait son grand sac à main rouge sur l’épaule, c’était la description qu’elle lui avait faite : vêtements noirs, sac à main rouge. Il n’y avait plus qu’à l’attendre. Elle se poste contre le mur et entreprit de regarder son téléphone pour se donner une contenance et éviter le contact visuel avec les clients du bar. *Restez loin de moi, je ne fais que passer. Le message est clair non ?*
Je bosse ce soir. Est ce que c’est utile de le dire alors que je bosse tous les soirs en réalité. Je sors et je fais le tour des bars, je change souvent d’endroit en donnant mon numéro aux clients réguliers et certains autres dealeurs avec lesquels je collabore. Jo en faisait partie avant de quitter la ville. Et elle m’a envoyé un message pour m’envoyer quelques uns de ses clients. Mais ce soir je suis pas dans une bonne soirée, j’ai passé 20 minutes avec un gars qui voulait négocier le prix du sachet, et on ne négocie pas avec moi. Mais je ne lui ai pas mis mon poing dans la figure, je lui ai juste promis que la prochaine fois qu’il essayait de négocier je casserai bien plus que son nez. Alors je me retrouve à grogner tout seul alors que je me dirige vers le bar pour prendre une bière. Je regarde, j’observe tout autour de moi et trouve quelques groupes auxquels je pourrais sûrement vendre une tonne de choses.
Je me rappelle que je dois rejoindre la cliente de Jo, j’espère qu’elle n’est pas trop chiante. J’ai autre chose à foutre que m’occuper d’une nouvelle toxico en manque qui voudra négocier. Et c’est elle que je cherche des yeux quand je vois que c’est l’heure du rendez-vous. Ca doit durer peu de temps, juste un échange. Je sais ce qu’elle veut, elle sait combien ça coûte. Sac à main rouge, je cherche ça. Et bingo, je la vois au fond du bar. Enfin je vois un truc caché sous une tonne de pull et de capuche et on dirait presque que c’est elle la criminelle qui doit se cacher de quelque chose. Je lève les yeux au ciel, elle est étrange.
Je me rapproche d’elle, et prépare le bon sachet entre mes mains. J’ai encore beaucoup de marchandise sur moi alors je fais attention à ce que je montre. Il y a toujours des risques de se faire attraper par quelqu’un. Il faut toujours être sur ses gardes, c’est une habitude que j’ai pris depuis des années déjà. “C’est là.” Je me pose contre le mur. Elle ne touchera pas la marchandise tant que je n’aurais pas l’argent. “t’as la thune ?” Je tourne la tête vers elle. “Tu sais que c’est les dealeurs qui cherchent à se cacher ou à faire peur comme ça pas les clientes.” Ouais fallait bien que je la sorte cette pique là.
Victoire sursauta quand elle entendit une voix toute proche d’elle. Elle lèva la tête et entrevit le pochon de cannabis dans les mains du dealer avant même de voir son visage. Elle leva les yeux vers ses traits, il n’avait pas l’air d’un dangereux criminel. A la lumière tamisée du bar, elle ne discernait pas de tatouage sur son visage, ni de cicatrice de méchant de film en travers du sourcil. Elle respira profondément pour essayer d’avoir l’air cool et détendue mais elle ne peut s’empêcher de reculer légèrement pour récupérer un peu de son espace vital. Il voulait savoir si elle avait l’argent, très bien il allait droit au but. Elle répondit en commençant à fouiller avec empressement dans son grand cabas rouge : « Oui, bien sûr ! ».
Elle était un peu nerveuse, il y avait tellement de bordel dans son cabas qu’elle ne s’y retrouvait plus. Elle n’aurait jamais dû y balancer le billet en vrac au lieu de le glisser dans son porte-monnaie. Victoire releva la tête alors que le dealer faisait une remarque sur sa tenue et elle rabaissa sa capuche qui lui tenait bien trop chaud en lui répondant : « Tant mieux si je fais peur. » Elle replongea dans son cabas en essayant de cacher le léger tremblement qui agitait ses mains. *Quelle débile tu fais ! Tu voulais faire ça vite et c’est toi qui lui fait perdre du temps* Elle se sentit obligée de préciser : « J’ai la thune, hein, il faut juste que je la retrouve. » Elle se mit à fourrager dans son sac avec fougue comme si elle cherchait à mélanger les boules du jeu Motus. Elle ne se rendit même pas compte qu’une photo tomba de son sac pour se planter aux pieds du dealer, une photo d’elle et de sa mère qui datait d’une dizaine d’année, de l’époque où elle était encore mannequin. Elle avait été prise dans les coulisses d’un défilé et Victoire y portait une robe de créateur en lamé doré et ajourée qui laissait apparaître une bonne partie de son anatomie.
Totalement inconsciente de la pièce à conviction qu’elle venait de faire tomber par terre, Victoire mit enfin la main sur le billet de 100$ et le brandit devant le dealer : « Voilà, désolée. Fais voir l’herbe… » Elle avait beau être pressée, elle ne comptait pas non plus se faire arnaquer et elle voulait jeter un œil à la marchandise et à la taille du pochon avant de faire affaire avec ce Jet.
J’ai avancé doucement et elle sursaute. Ca a le don de me faire soupirer bruyamment. Les gens qui passent commande savent bien qu’un dealeur va finir par les aborder non ? Alors pourquoi prendre peur à partir du moment ou quelqu’un leur adresse la parole ? Je suis froid, je le sais. Mais c’est une cliente et je ne suis pas là pour me faire des amis. Surtout quand j’ai l’impression qu’elle n’a pas l’argent puisqu’elle ne trouve pas le billet en moins de 5 secondes. Elle est cachée par des pulls et un jogging, quel dommage. Elle n’a pas l’air mal pourtant. Je me demande pourquoi elle ne profite pas d’être là pour s’amuser un peu. Elle pourrait fumer son herbe sur la terrasse et s’éclater de longues minutes sur la musique, les gens sont étranges des fois. “Cette technique ne marche même pas si tu veux éviter de te faire draguer.” Je grogne presque, elle a un beau visage qu’elle ne peut pas cacher sous un pull. Et n’importe que type pourrait venir la draguer juste là parce qu’il serait un peu trop bourré. Moi j’ai juste envie de jouer, surtout quand je remarque à quel point elle est hostile.
“Bouge j’ai pas la soirée.” Et si elle ne finit pas par sortir un billet de ce sac je me barre avec sa commande en blacklistant son nom. Elle n’aura plus jamais d’herbe venant de moi ou de la ruche et ce serait dommage pour elle en sachant qu’on a la meilleure marchandise. Une photo tombe du sac et évidemment je me baisse pour la récupérer. Je l’observe, et la tourne un peu dans tous les sens. “C’est toi ça ?” Mon regard fait des allers-retour entre son visage et la photo. “On dirait pas.” Je souris, un sourire mauvais, je suis dans un mauvais jour. “La drogue fait des ravages.” Et mon sourcil se hausse alors qu’elle trouve enfin son billet, il était temps. Je vérifie le billet et le glisse dans ma poche, il n’en sortira plus maintenant. Et je lui montre l’herbe. “Tu comptes te barrer comme ça pour aller fumer toute seule chez toi ?” Elle a l’air d’être sous tension, peut-être qu’elle pourrait m’occuper un peu pendant cette soirée.
Alors qu’elle cherchait frénétiquement dans son sac, le dealer lui fit remarquer que s’emmitoufler dans un pull n’était pas même efficace pour éviter de se faire draguer. Oui, elle le savait mais c’était toujours mieux que rien et ça attirait moins l’attention qu’une robe moulante aux couleurs flashy. Elle ignora sa remarque en continuant à fouiller ses affaires. Il lui mettait un peu la pression et quand finalement, elle releva les yeux avec le billet en main en lui demandant à voir l’herbe, elle réalisa horrifiée qu’il tenait dans les mains une photo de sa vie d’avant, sa vie secrète. « C’est toi ça ? », il se moqua et plaisanta en disant que la drogue faisait des ravages.
Il lui prit le billet et elle s’empressa de lui arracher la photo des mains. C’était la photo de sa mère qu’elle gardait toujours sur elle, de l’époque où la santé de celle-ci était encore relativement bonne. Elle s’exclama : « Rends-moi ça ! Qui t’a permis de toucher à mes affaires ? » Elle avait prit le cliché des mains du dealer d’un geste brusque et rapide, elle se sentait vulnérable du fait qu’il ait vu cette photo et cela se traduisit par une attitude franchement agressive. Est-ce qu’il avait suivi l’affaire du procès à l’époque ? Est-ce qu’il allait la reconnaître ? Où est-ce qu’il allait simplement devenir lourd car il venait de réaliser qu’il avait une ancienne mannequin face à lui ?
Il avait discrètement exhibé l’herbe mais dans son énervement, Victoire avait presque oublié pourquoi elle était là, ce soir, à parler à ce type douteux. Elle jeta un regard au pochon, il était de bonne taille, l’herbe avait l’air de bonne qualité à l’œil et elle n’allait pas s’attarder dans ce bar pour la sentir et la tester. Elle s’apprêta à le saisir quand il recula légèrement la main en lui demandant : « Tu comptes te barrer comme ça pour aller fumer toute seule chez toi ? » Victoire s’agaça encore plus et tenta d’attraper le pochon à nouveau. Elle n’avait aucune envie de devoir faire un corps à corps avec cet individu, elle passait son temps à éviter le contact physique avec les hommes qu’elle croisait et s’il faisait un geste déplacé, elle risquait de paniquer totalement. Elle lui répondit avec colère mais tout en se contenant pour ne pas hausser la voix : « C’est exactement ce que je compte faire, oui. Donne-moi ça, c’est payé, merde ! »
Elle est longue à chercher dans son sac, alors je regarde la photo qu’elle a laissé tomber. Elle est pas mal si on lui enlève cette tenue de merde. Pourquoi elle veut se cacher comme ça ? C’est dommage, j’aurais pu profiter d’un visuel bien plus plaisant si elle n’avait pas décidé d’enfiler un sweat. C’est presque dommage. Et je joue avec le sachet en regardant la photo et en lançant deux trois piques. Et son ton me plaît pas, si elle est pas contente c’est pareil, je suis pas là pour qu’une gamine me fasse chier pour un paquet d’herbe. Elle se prend pour qui à s’énerver ? C’est dommage pour elle je suis dans une mauvaise journée, et je pourrais très bien partir avec son fric sans lui donner un seul gramme. “D’où tu t’énerves déjà ?” Le sachet est hors de sa portée quand moi je me rapproche un peu, surtout pour l’intimider. Elle est petite, elle est fine, elle ne devrait pas chercher les embrouilles avec un dealeur qu’elle ne connait même pas. “T’as qu’à mieux ranger, et si t’es pas contente c’est pareil.” Je suis sérieux, mon ton ne se hausse pas alors que mes yeux la fixent. “Arrête de chercher la merde.” Je dis ça en me rapprochant un peu de son oreille, je chuchote presque.
Elle compte rentrer chez elle pour fumer ça toute seule, c’est dommage pour elle le sachet n’est pas encore près de quitter ma main. Elle m’énerve, elle n’aurait pas dû. Elle aurait dû rester dans son coin en disant amen à tout ce que j’aurais pu lui dire. Elle ne sait pas comment s’y prendre ou quoi ? Son ancienne amie aurait peut-être dû la tenir au courant quand elle lui a filé mon numéro. Je soupire et un sourire en coin étire un peu mon visage. Mon bras se pose contre le mur pour faire face à cette femme, “Oh arrête de gueuler tu vas attirer l’attention.” Et j’ai pas besoin de ça, j’ai encore bien trop de marchandise sur moi pour la soirée, et je n’ai pas vraiment envie de me faire choper. Je me suis rapproché, toujours pour l’intimider, elle ne doit pas hurler, elle n’y connait rien en échange discret de came ou quoi ? “Si tu continues à faire chier tu repars sans drogue, et sans argent.”
Victoire voit le visage du dealer changer d’expression, il n’a pas apprécié qu’elle lui arrache la photo des mains et il se montre menaçant. Il ne cautionne pas son énervement, bien entendu il ne la connaît pas, il ne sait pas pourquoi elle est tant à fleur de peau vis à vis de cette photo et de son attitude de mal alpha. Il se rapproche d’elle et lui murmure dans l’oreille de ne pas chercher la merde. Elle se recroqueville, s’aplatit contre le mur derrière elle, cherchant à s’éloigner le plus possible de lui. Elle est sur le point d’exploser, de crier ou de pleurer. Mais il lui redonne un peu d’air et elle arrive à reprendre momentanément ses esprits. Il lui fait peur, elle n’a pas envie de rester une minute de plus face à lui, d’ailleurs elle lui précise qu’elle compte effectivement aller fumer seule chez elle. Mais il a pris la mouche, il maintient le sachet hors de sa portée et elle n’ira sûrement pas se coller contre lui pour atteindre son bras tendu vers l’arrière.
Son attitude commence à être trop pour la rousse, elle lui intime de lui donner ce pour quoi elle vient de le payer mais il n’est pas de cet avis. Il lui ordonne d’arrêter de crier et place son bras contre le mur. Il a probablement fait ça pour leur donner un peu d’intimité, le masquer aux regards indiscrets éventuels, mais Victoire se sent surtout poussée dans ses retranchements, oppressée par sa position dominante. Il a peur de se faire repérer mais son attitude ne fait qu’empirer l’instabilité et l’imprévisibilité de sa cliente. Elle se colle au mur à nouveau et le supplie d’une voix tremblante :« Arrête ! Recule ! »
Est-ce qu’elle tenait vraiment tant que ça à son sachet de drogue ? Oui, elle en avait besoin. Ses crises d’angoisse, son mal-être généralisé, sa propension à cogiter sans interruption, ça n’allait faire qu’empirer si elle n’avait pas de quoi fumer. *Oui mais si tu te fais agresser par ce type, c’est pas d’un pétard que t’auras besoin pour te calmer mais d’une piquouze et d’une camisole* Tout son corps était en alerte, tendu, prêt à réagir et à se défendre. Elle grogna sans parvenir à garder un volume sonore bas : « J’en veux plus de ta merde, connard ! ». Il se rapprochait de plus en plus, ignorant sa supplication et la menaçant de repartir sans argent ni drogue. Elle était prise au piège, acculée contre le mur, sa silhouette imposante et inquiétante prenant tout l’espace.
Elle n’avait plus d’air, elle ne réalisait même plus où elle était : dans un lieu public où elle ne craignait probablement pas grand chose. Elle lui jeta un regard mi-paniqué et mi-rageur, peu importait la drogue à présent, il fallait qu’elle fasse ce qu’elle faisait de mieux : fuir. Elle avait peur qu’il l’en empêche, qu’il essaye de l’attraper et qu’il finisse par poser ses mains sur elle. Elle ne pouvait pas supporter l’idée que cette brute la touche. Elle puisa dans sa colère, celle qui ne la quittait jamais, et réagit avec toute l’agressivité dont elle était capable pour se sortir de cette situation. Sans préavis, elle percuta son torse de toutes ses forces, bras tendus devant elle pour ne le toucher que de la paume des mains et rester le plus loin possible de lui. Pendant qu’elle faisait cela, elle hurla : « JE T’AI DIT DE RECULER ! »
Le cœur battant, elle s’élança dans le bar pour s’éloigner de lui, contourna la table de billard et trébucha sur un tabouret qui se trouvait dans son chemin. Elle entendit des cris alors qu’elle était en train de chuter au sol. Elle s’éclata au sol mais elle ne réalisa pas tout de suite où elle avait mal, elle entendit surtout des pas précipités autour d’elle, un homme hurler « POLICE ! » et elle vit le dealer s’élancer vers le fond du bar. *Merde, merde, merde… La police... Qu’est-ce que j’ai fait, encore ?*
Je vais commencer à m’énerver. Elle est là et elle me regarde, me parle comme si j’étais le pire connard de l’univers. C’est peut-être pas faux mais elle est pas au courant la gamine. Elle ne fait que juger alors que j’ai accepté de gracieusement lui vendre sa drogue. Sachet qui pourrait rester dans ma main au lieu de finir dans son sac si elle continue à me faire chier. Je me rapproche parce qu’elle se fait de moins en moins discrète à parler fort comme ça. Quoi elle est pas au courant que c’est illégal ce qu’elle fait ? Pauvre conne. “Je recule seulement si t’arrête de gueuler.” Elle a cru quoi ? Qu’elle me donnerait des ordres comme elle le veut ? “Très bien barre toi si tu veux mais je garde la thune.” Elle avait déposé les billets dans ma main, c’était bien trop tard pour les récupérer maintenant. Mais moi je ne bouge pas. Elle ressemble à un petit animal blessé, ou piégé par la lumière des phares d’une voiture. Pathétique. Je n’ai rien fait, j’ai juste approché mon visage et elle se met dans un état pareil. Si elle ne se droguait pas elle n’aurait pas à faire à des types louches, alors qu’elle arrête de se plaindre un peu.
Elle s’énerve la petite chose, elle commence à gigoter dans tous les sens et me pousse sur le côté. Mais elle est débile ou quoi ? Je lève les yeux au ciel, elle peut toujours crever que le sachet restera dans ma poche. Et elle se met à hurler, et là j’ai vraiment envie de la frapper pour qu’elle ferme sa gueule. Elle a pas compris quoi dans le délire d’être discret. En plus elle ne sait même pas mettre un pied devant l’autre apparemment puisqu’elle se vautre en plein milieu du bar. Je ne retiens pas un rire avant de m’adosser au mur. Si les gens se concentrent sur elle, ils se concentreront moins sur moi. Alors je fais comme si de rien n’était mais il faut qu’un abruti cri d’appeler la police. Si un flic entre ici je suis dans la merde. Bon, bah on est bon pour fuir. Je cours vers les toilettes, elle va le regretter cette conne. Elle ne sait pas à qui elle s’attaque. Je jette les sachets qu’il me reste. Il y en a pour plus de 1000 dollars, je n’ai pas eu le temps de bien compter. Lou va être ravie. Tu le regretteras Victoire.
Il n’a rien fait en réalité, seulement se montrer menaçant, s’approcher trop près d’elle… Mais parfois, il n’en fallait pas plus pour que l’angoisse monte, que le sentiment d’être en danger grandisse et que la réponse universelle de Victoire à ce genre de situation fasse son entrée : agressivité suivie de fuite. Combien de fois lui avait-on dit que si elle avait vraiment été violée pendant toutes ces années dans le studio de Justin Riddle, quelqu’un aurait l’entendre crier ? Combien de fois lui avait-on demandé si elle avait crié, si elle s’était débattue ? Combien de fois lui avait-on demandé : Pourquoi ? Pourquoi tu n’as pas crié ? Elle avait bien appris sa leçon, maintenant elle criait, maintenant elle réagissait de manière excessive. C’était le syndrome post-traumatique disait sa psy, pour Victoire c’était surtout sa meilleure technique d’auto-défense.
Le dealer voulait qu’elle se taise, mais il était toujours beaucoup trop proche d’elle, elle sentait sa respiration contre elle et ça la dégoûtait, ça lui rappelait trop de mauvais souvenirs. Alors, elle n’en avait rien à faire qu’il menace de garder son argent. Elle l’avait poussé et elle avait hurlé, elle avait détalé de manière si désordonnée qu’elle était tombée. Elle avait eu peur qu’il soit sur elle en une seconde. Elle avait vu la colère, la haine dans son regard quand elle avait crié, s’il avait pu lui arracher la tête à cet instant, il l’aurait probablement fait.
Mais dans le bar, un gars crie « Police » et il accoure vers elle, vers lui aussi. Il n’appelle pas la police, il est de la police. Victoire voit son badge scintiller quand il le sort pour le montrer aux gens pour qu’ils le laissent passer. Par réflexe, Victoire se retourne vers Jet et le voit détaler vers les toilettes. Le policier est assez ralenti par la foule de danseurs et de buveurs pour que Jet s’y enferme. Et là, tout se passe comme dans un film. Victoire est toujours par terre, hypnotisée par la scène, elle ne pense même pas à s’enfuir pour éviter d’être interrogée par la police. Après tout, elle venait acheter de la drogue, c’était illégal, elle risquait des ennuis. Mais ce à quoi elle assistait la fascinait. Le policier en civil se jetait de manière répétitive contre la porte des toilettes verrouillée. Il allait se faire arrêter, il devait avoir plein de came sur lui, et c’était la faute de Victoire. Elle se mordit la lèvre… Et s’il cherchait à se venger ?
La porte cède, peut-être s’est-il enfuit par la fenêtre ? Mais non, il est là, le policier le sort, le plaque contre le mur et ne trouve rien que quelques billets. Dont celui de Victoire probablement. Il a dû se débarrasser de la drogue en tirant la chasse ? En la jetant par la fenêtre ? Vic commence à se dire qu’elle ferait mieux de détaler mais une femme s’approche d’elle et se présente comme la collègue du policier briseur de portes. Vic est coincée, elle a raté son occasion de fuir la situation.
La policière l’interroge et la rousse lui ment, elle dit qu’il l’a juste draguée très lourdement et qu’elle a réagi un peu violemment. La femme lui dit que son « dragueur » est soupçonné de faire partie d’un gang et était surveillé ce soir-là. Est-ce qu’ils ont vu Victoire donner le billet au dealer ? Probablement, en tous cas ils ont dû la voir fouiller dans son sac. Elle maintient cependant son histoire et la policière lui demande ses papiers, puis fouille ses affaires. Il n’y a rien à trouver et donc elle ne trouve rien. Le policier passe à côté d’eux, tenant fermement le dealer par le bras. Victoire voit le visage fermé de Jet, il la fusille littéralement du regard. Elle baisse les yeux aussitôt. Le policier dit à sa collègue qu’il n’avait plus rien sur lui mais qu’il va l’emmener au poste pour le questionner. Ils s’éloignent et la policière rend à Victoire ses papiers d’identité en lui disant : « Il se peut que nous vous convoquions pour prendre votre déclaration. »
Victoire répondit avec un peu trop de véhémence : « Mais je vous ai déjà dit qu’il m’a juste draguée, je le connais pas ce gars... » La policière lui adressa une moue dubitative qui signifiait qu’elle ne croyait pas un traître mot de ce qu’elle disait. Elle ajouta : « Vous déciderez si vous avez quelque chose à nous dire dans un lieu moins bondé. Dans 8 heures maximum, il sera libéré si on n’a rien contre lui, il avait l’air tout de même très en colère contre vous, Mademoiselle Laclos... »
Puis sur ces mots, la policière sortit pour rejoindre son collègue probablement. Vic resta interdite au milieu du bar qui était devenu silencieux, la musique était éteinte, les gens chuchotaient, ils étaient tous en train de la regarder. Quand elle finit par réaliser cela, elle se dirigea vers la sortie. Elle fut dehors juste à temps pour voir la voiture de police s’éloignait. Elle n’arrivait pas à le croire, elle se retrouvait toujours à cours de weed et encore plus stressée qu’avant. Elle avait échappé à une agression d’un dealer, perdu 100 dollars, s’était fait un ennemi et avait attiré l’attention de la police qui voulait qu’elle balance un membre de gang ? Au moins, il lui restait du whisky à son appartement où elle s’empressa de rentrer. Encore un jour où elle aurait mieux fait de rester chez elle...
(c) DΛNDELION
Spoiler:
Je crois que j'avais pas été assez explicite dans mon précédent RP, mais le gars qui criait "Police" pour moi c'était un policier en civil... Si jamais ce que j'ai écrit ne te convient pas, dis moi je peux modifier
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