Liam m’a proposé de surfer. De m’apprendre en tout cas. Je ne sais pas pourquoi on a fini par parler de tout ça. Je n’aurais peut-être pas dû lui dire que j’aimais ça et que j’avais toujours rêvé de surfer sur les vagues. Parce que je ne lui ai pas dit que j’étais terrorisée par les profondeurs depuis toujours aussi. Il aurait fallu que je précise, mais au lieu de ça, j’ai accepté en hochant frénétiquement la tête.

Le jour est arrivé, on s’est donné rendez-vous directement sur la plage. Je lui ai dit que je n’avais aucun équipement, à part un maillot de bain que j’ai enfilé dans le vestiaire en sortant du travail. Ca va m’aider à me changer les idées, depuis que j’ai appris pour mes parents et ma famille, j’ai constamment envie de faire de nouvelles choses. Et c’est l’occasion, je stresse. J’angoisse facilement, j’en tremblerais presque. Mais je me ressaisis et je prends un appel du refuge. On a une nouvelle assistante vétérinaire en ce moment, et je m’occupe de la former. Je lui ai dit que je la laissais seule un peu plus tôt ce soir, elle n’a rien de très important à faire mais ça lui donne quelques responsabilités. Elle me demande des détails sur des croquettes et me dit que des chatons ont encore été emmené à la porte du refuge. Je soupire en passant ma main contre mon front, je veux vraiment profiter de ma fin d’après-midi, alors je pourrais gérer les chatons ce soir en quelques minutes, ou demain. Je lui dis d’ausculter les chatons, mais ils sont apparemment sevrés donc ma visite pourra attendre le lendemain matin.

Au moment où je raccroche je me retourne et tombe sur Liam. Mon sourire s’agrandit et je viens poser un baiser sur sa joue pour le saluer. “Je suis en avance !” Comme toujours, je suis tout le temps en avance et ça il le sait déjà. “J’ai mis mon maillot, mais c’est tout ce que j’avais.” Je m’excuserais presque, mais j’attends ses instructions pour la suite des évènements.



@Liam Taylor

Je passe la plupart de mes journées de repos à la plage. Je m’y rends dès le lever de soleil, c’est là où on retrouve techniquement les meilleures vagues, mais ma passion est telle que je n’arrive pas à quitter cette étendue de sable fin avant que la journée ne se termine. Je peux passer des minutes entières à voir le soleil se coucher, adosser contre ma planche, admirant la beauté de ce spectacle qui se trouve devant mes yeux. Je ne pourrais jamais m’en lasser, c’est mon petit moment à moi, au calme, alors que la plage commence à devenir déserte. Aujourd’hui est un autre jour et j’ai proposé à Molly de venir surfer un peu avec moi. C’est un peu ma façon à moi de la remercier pour son aide apporté à Amos. On a un peu discuté et je ne sais pas si c’est vrai ou non, mais elle m’a avoué de bien aimer traîner sur la plage, alors si je peux lui faire découvrir ma passion pour le surf j’aurais atteint mon objectif.

Comme à mon habitude, je me retrouve déjà à 6:00 a.m sur la plage, attendant patiemment que les premières petites vagues montrent le bout de leur nez. Je monte sur ma planche et je me dirige au large de la plage, assis, bercé par les petits remous de l’océan. Nous ne sommes pas très nombreux de ce que je vois, cinq, six tout au plus, attendant l’un des moments les plus satisfaisant de la journée. Elle arrive, elle est là, la première vague, elle n’a pas l’air très imposante, mais c’est amplement suffisant pour pouvoir en profiter. De retour sur la plage, il est maintenant l’heure de manger, j’ai été invité par ce petit groupe de passionnés, la journée se déroulera sous le signe de beach-volley et autre sport de plage.

Les heures passent et nous voilà en fin d’après-midi, j’attends patiemment l’arrivée de Molly. Je me suis dit que ça serait idéal comme horaire, les vagues ne seront pas très grosses, voir ne décollant même pas de la surface et il y a beaucoup moins de monde, ce qui pourrait lui mettre un peu de pression. « Je suis en avance ! » J’entends sa voix, je me retourne alors et suis presque étonné de la voir si tactile avec moi. Non pas que ça me gêne, mais bon elle ne m'y a pas habitué, après ce n'est pas non plus un drame. Je la salue en retour et je note tout de même que c’est appréciable de voir quelqu’un arriver à l’heure ou en avance, je suis très à cheval là-dessus. « Bah écoute on va pouvoir commencer. » Je ne perds pas trop de temps et on commence à se diriger vers la location de matériels pour le surf. Il va lui falloir une petite planche, j’espère qu’ils ont ça en réserve. « J’ai mis mon maillot, mais c’est tout ce que j’avais. » Il est vrai que je n’avais pas encore fait attention, elle est même déjà prête à découvrir ce magnifique passe-temps. « J’espère que tu ne crains pas trop le froid, l’eau n’est plus très chaude à cette heure-là de la journée. » Je m’en amuse, d’habitude je vois toujours les néophytes débarquer avec leur combi intégrale et même parfois des lunettes de piscine, c’est très amusant à voir. On rentre à la location et j’indique à la jeune femme d’aller voir le gérant pour qu’il puisse lui donner la bonne planche et la bonne combi si jamais elle en a besoin. « On va commencer par les bases. On va poser la planche sur le sable et je vais te montrer certaines positions à avoir pour tenir. » En marche vers la plage, je peux sentir à des kilomètres l’anxiété qui commence à émaner de la jeune femme.



@Molly Ivywreath

J’attends depuis quelques minutes, je ne sais pas combien de temps je passe au téléphone mais quand je me retourne c’est lui qui m’attend. Je déteste faire attendre les gens, j’espère que lui ne m’en voudra pas d’avoir pris cet appel. Je lui dis bonjour, je tente de détendre l’atmosphère. Je tente surtout de me détendre moi, je suis vraiment stressée mais j’essaie de le cacher. On arrive et il me dit directement qu’on va commencer. Il n’y a pas d’avant le surf, de discussion quelconque et je trouve ça bien parce que ça me montre qu’il apprécie vraiment l’idée. D’un autre côté, j’aurais peut-être aimé qu’on se mette à discuter et qu’on se perde tellement dans les mots qu’on aurait dû repousser ce cours. Je ne sais pas quel genre de réaction je vais bien pouvoir avoir quand on va se retrouver au milieu de l’océan. “Je… je te suis.” Et je le suis en jouant avec mes doigts.

J’observe les planches, l’équipement. Je n’y connais rien, je suis vraiment nouvelle dans ce domaine et j’espère que ça ne va pas fatiguer Liam. J’espère qu’il est du genre patient aussi, parce que je pourrais très bien me mettre à paniquer pour un rien. J’attends patiemment ses indications, je ne ferai pas un pas de travers. J’ai toujours été une très bonne élève et ce n’est certainement pas aujourd’hui que ça va changer. Tant que tout ça touchera à la théorie, je serai une élève très sérieuse et appliquée. J’ai seulement peur de la pratique, et du moment où je vais me retrouver sur cette même planche mais dans l’eau. Quelle idée d’aller parler de mes envies d’apprendre le surf à un autralien, j’ai l’impression que tous les australiens font du surf c’est dingue.

Je suis perdue, je vais devoir lui poser des tonnes de questions et j’ai déjà mal à la tête pour lui. “Non je suis pas frileuse.” Je ris un peu, je vais tenir le coup je le sais. C’est un homme qui me conseille un peu plus loin. Il me dit que pour une première fois la combinaison n’est pas nécessaire alors je reste en maillot. Il me propose plusieurs planches et fini par choisir à ma place quand il voit dans mes yeux que je ne saurais absolument quoi choisir. Je sors de là avec une planche, bien plus grande que moi mais ça doit être normal. Je hoche la tête. “Là sur le sable ? Mais la mer ça parait bien moins stable quand même.” Je dis ça sur le ton de l’humour, je préfère rire pour éliminer les tensions. “T’es sûr que la combinaison c’est pas nécessaire ?” Parce que ça me ferait gagner du temps d’en prendre une en fait. On avance et je pose ma planche. “Je t’écoute.” Je pose mes mains sur mes hanches et attends de savoir ce qu’il va bien pouvoir m’enseigner.

Molly me paraît bien stressée, si jamais elle n’est pas fan de la mer ça risque d’être plus difficile que prévu de la faire monter sur une planche. On passe par toutes les cases à cocher pour le parfait débutant en surf, louer le matériel et un bon début. Je lui indique ce qui serait idéal pour elle avec le gérant de la boutique qui est un très bon ami à moi, c’est à ce moment-là qu’il me fait part de ses doutes quant au fait que ce soit le bon moment pour lui apprendre, peu de vague, le soleil commence à se coucher, mais c’est justement pour moi l’un des meilleurs moments. Les vagues seront calmes, elle pourra ressentir cette sensation de se retrouver en pleine mer, assise sur sa planche tout en admirant le coucher de soleil à l’horizon. Il n’y a rien de plus beau, en dehors de cette nouvelle dague reçue au musée et nous provenant tout droit de la Rome antique. L’eau sera froide et je préfère déjà la prévenir pour qu’elle se prépare, on a beau être en Australie l’hiver approche à grands pas. « Bon bah écoute, je crois que nous n’avons rien besoin d’autre. On va pouvoir commencer. » On sort du magasin et nous voilà de retour sur la plage, le sable commence peu à peu à se refroidir alors que je lui propose de commencer ici avant d’aller à l’eau. Sa remarque est très pertinente et arrive à m’arracher un sourire, elle vient de casser toute ma mise en scène afin de la taquiner, dommage pour moi. Au moins elle ne me donne plus l’air d’avoir si peur de se jeter à l’eau. « Bien vu, pour le moment on va seulement s’allonger sur la planche et nager vers le large. » C’est tout aussi bien de commencer par lui donner l’occasion de ressentir par elle-même la sensation qu’on a en étant sur une planche. On passera plus tard pour lui apprendre à se relever et là on aura besoin de s’entraîner sur le sable, on va déjà juger son niveau de stress. Je lui fais un signe de la tête pour qu’elle me suive. « Tu vas attacher la sangle à ta cheville, si jamais tu chavires au moins tu ne perdras pas ta planche. Crois-moi, il faut s’habituer dès le début parce que tu finiras un jour ou l’autre par tomber. » Lui dis-je avec un léger rire, je repense à toutes ces fois où j’ai bien pu tomber avant de réussir à bien me relever dessus ou alors à ma première vague. On va maintenant commencer à passer aux choses sérieuses, se mettre sur la planche et commencer à nager. « Maintenant, on va jeter notre planche à l’eau délicatement et se positionner directement dessus, on va aussi tout de suite se mettre à nager afin d’aller un peu plus loin au large. Il faut impérativement avoir la tête légèrement relevée et ne pas la coller sur la planche, il faut aussi bien garder ses pieds ensemble et ne pas écarter les jambes. » Ça fait peut-être beaucoup d’informations, mais elles ne sont pas bien compliquer à se souvenir donc je ne m’inquiète pas là-dessus. Je lui indique ensuite le mouvement des bras et des mains à adopter afin d’optimiser sa nage afin qu’elle soit la plus fluide et reposante possible. C’est très important si elle ne veut pas se retrouver fatiguée à mi-chemin. « Tu as tout retenu c’est bon ? Ne t’inquiètes pas, je vais y aller tranquille le temps que tu t’y habitues, on ne va faire que nager aujourd’hui. » Je ne compte pas l’emmener très loin, le but n’est pas de lui rendre l’exercice impossible et avec le soleil qui se couche ça ne l’aidera peut-être pas à se sentir très à l’aise pour un début. On se met finalement à l’eau après une ou deux petites questions. Je peux très bien entendre sa respiration rapide, signe que le stress commence à se montrer petit à petit et c’est tout à fait normal de ressentir ça, mais ça ne pourra que lui procurer plus de plaisir quand elle se rendra compte qu’elle y arrive. « Tu vois que tu te débrouilles plutôt bien, allez, on continue. » Un petit peu d’encouragement n’a jamais fait de mal.


@Molly Ivywreath

L’ambiance est sérieuse, Liam n’a pas vraiment l’air d’être là pour rigoler alors je l’écoute attentivement. Je ne veux faire aucune erreur, et je vais essayer d’apprendre le plus vite possible. L’océan est beau au coucher du soleil. Je profite une seconde de la vue avant d’aller chercher tout ce dont j’ai besoin pour m’équiper. Je vais essayer de ne pas poser trop de questions, je ne voudrais pas l’ennuyer. Je hoche la tête quand il me dit qu’on va pouvoir commencer et je le suis sur la plage en faisant attention de ne pas tomber avec ma planche gigantesque sous le bras. Il sourit alors je fais pareil, je n’ai pas pu garder ma remarque pour moi. Et on se dirige vers l’eau alors que ma respiration s’accélère un peu. Tout va bien se passer, il n’y a pas de raison pour qu’il m’arrive quelque chose. Alors je ferme les yeux une seconde et je continue de le suivre pour copier chacun de ses mouvements. Je vais tomber et il faut apparemment que je me fasse à l’idée, je hoche la tête en accrochant ma planche à ma cheville. “Donc je m’accroche à ma planche dès que je peux.” J’espère ne pas tomber trop souvent, surtout si je me retrouve à ne pas avoir pied. “Et comment je fais pour ne pas chavirer et finir au beau milieu de l’océan ?” Parce que ça ça me fait vraiment peur.

J’enregistre chacune des informations. Mais je tique au moment où il dit qu’on va aller au large. Je souffle, ça va aller. Il ne peut rien m’arriver tant que je ne m’éloigne pas trop de lui. On va faire que nager, et finalement j’ai hâte, c’est magnifique l’océan à cette heure là. Et j’espère que la vue est encore plus belle sur l’eau, ça me permettra de me concentrer sur autre chose que les profondeurs. “Y’a pas d’animaux dangereux par là ?” Je tourne ma tête vers lui, je dois vraiment avoir l’air d’une enfant à paniquer à cause de tout ça. “C’est bon j’ai tout retenu on peut y aller.” Je hoche la tête, tente de lui envoyer un sourire des plus rassurant et mets ma planche dans l’eau. Je vais continuer de suivre chacun de ses gestes pour être sûre de ne faire aucune bêtise. “Je suis sûre que je dois avoir l’air ridicule.” Je pouffe de rire sur la planche et continue de regarder devant moi en essayant de ne pas penser à la profondeur de l’eau ou à ce qu’il peut bien se cacher en dessous de moi. C’est pas le moment de paniquer.

Je ne suis clairement pas le meilleur pour choisir les bons mots quand il s’agit de surf. Ce sport pour moi c’est un peu inné, je ne pense à rien, je mets mon cerveau sur pause et je laisse la mer ainsi que les vagues guider mon instinct. Je sais que si je sors ça à Molly elle me trouvera bizarre et elle ne comprendra pas forcément le délire du message que je voudrais lui faire passer. Alors je vais essayer de faire du mieux que je peux en choisissant les bons mots et j’espère qu’elle arrivera à bien saisir que le surf est aussi avant tout une communion avec la mer, ne faire qu’un avec cette dernière et à ce moment-là on peut vraiment ressentir le bonheur de surfer. « Si tu te positionnes bien et que tu ne bouges que tes bras, il ne devrait y avoir aucun souci. Tout est une affaire d’équilibre. » J’essaie de la rassurer avec un léger sourire, il faut qu’elle prenne confiance en elle et qu’elle me fasse aussi confiance et tout ira pour le mieux. « Tu n’as pas à t’inquiéter, la mer sera calme en cette fin d’après-midi et il n’y a pas beaucoup de monde, tu n’auras même pas de vague pour te faire peur ! » Pour cela il faudra encore nager un peu plus loin au large que ce que j’ai prévu et ça serait une mauvaise idée pour une débutante.

« Non hahaha, il n’y a aucun danger sous l’eau si ce n’est les récifs auxquels il faut faire attention, mais là aussi tu n’as rien à craindre, comme j’ai dit la mer est calme, aucun risque. » Il y a bien les rouleaux, mais je connais ce coin comme ma poche, je sais où on peut les éviter et où est-ce qu’on sera vraiment tranquille. C’est que j’ai quand même préparé la chose en amont et que j’ai pris toutes les précautions pour qu’il ne lui arrive rien. Elle hoche la tête pour me dire qu’elle est prête et je le fais à mon tour, on se met finalement en route, tranquillement et sans se presser. On continue de nager, Molly a l’air d’un peu galérer, mais c’est plus que convenable pour une première fois. Je ralentis un peu pour ne pas prendre d’avance et je tourne ma tête en arrière pour voir où elle en est. « Encore un tout petit effort, on y est presque, tu te débrouilles bien ne t’inquiètes pas. » Un sourire qui se veut encore rassurant pour la jeune femme et je me remets à nager sur ma planche alors qu’elle arrive à mon niveau.

C’est à peine une petite de dizaine de minutes plus tard que je lui fais signe de s’arrêter elle aussi, la plage étant déjà assez loin derrière nous. « Maintenant tu peux t’asseoir en écartant les jambes et en te relevant doucement avec tes bras. » Je lui montre en premier comment faire en ralentissant mes mouvements. Je suis déjà resté assis comme ça pendant plusieurs minutes espérant voir passer une vague digne de ce nom. Maintenant on peut admirer le magnifique coucher de soleil. « Alors, qu’est-ce que tu en dis ? C’est magnifique non ? » Un silence s’installe par la suite alors qu’on se met à contempler le spectacle sous nos yeux. Voilà, c’est de ça dont je parlais tout à l’heure, la sensation que je ressens actuellement n’est que plaisir, le léger courant marin caressant mes jambes et mes mains et le coucher de soleil qui emplit mes yeux de rêves tous plus fous les uns que les autres.



@Molly Ivywreath

Plus on avance dans l’eau plus je me demande pourquoi j’ai décidé de demander un cours de surf à Liam. J’essaie de combattre ma peur de l’eau depuis des années, et pourtant la peur des profondeurs persiste. Mais j’essaie, et je ne veux rien laisser paraître sur mon visage. Je ne veux pas avoir l’air terrifié et pourtant Liam tente de me rassurer du mieux qu’il peut. Je hoche la tête, rien pour me faire peur, rien pour me déstabiliser, je respire un peu mieux. “Je devrais pas finir la tête sous l’eau alors ?” Je tente de plaisanter avec ce qui me fait peur. Je dois être rassurée, même si je tombe et que je coule il ne devrait pas me regarder me noyer. Je ne devrais pas stresser autant, et pourtant je ne le contrôle pas. Même si je suis vétérinaire, je ne peux m’empêcher de penser que quelque chose peut surgir du fond de l’eau pour nous dévorer. Il faut que j’arrête de me faire tant de films sinon je vais finir par me mettre à hurler. “Rien à craindre.” Je répète ce qu’il veut dire pour me rassurer, tout va bien se passer.

Je m’en sors bien, je hoche la tête et continue d’être la meilleure élève possible. J’essaie de rester à son niveau mais il avance vite, alors je force un peu plus sur mes bras en essayant de ne pas penser au fait que je n’ai certainement plus pied. On s’arrête, je respire et tente de ne pas paniquer en m’asseyant. Je reprends mon équilibre à plusieurs reprises en m’accrochant à ma planche comme si ma vie en dépendait. Je me concentre sur lui quand il me parle, ne pas penser à l’océan et au fond. Je dirige mon regard vers le coucher de soleil et je trouve ça magnifique. Ca me calme un peu, et je souris. “C’est sublime.” Je n’avais jamais vu un si beau paysage.

Je ne m’attendais pas vraiment à ce qu’elle ait autant peur de l’eau ou de ce qu’on pouvait bien y retrouver, mais l’effort qu’elle fournit alors que c’est elle initialement qui m’a proposé de lui faire un petit cours me fait plaisir. Si en plus en dehors du fait de lui apprendre les petites bases du surf je l’aide à vaincre petit à petit sa peur des profondeurs alors j’aurais fait une pierre deux coups, ce n’est pas si mal pour un prof débutant, non ? « Comme j’ai dit aucun risque. Tant que tu fais attention et que tu ne cherches pas à faire n’importe quoi tu n’as rien à craindre. » Si j’ai choisi cet endroit précis pour qu’elle puisse débuter ce n’est pas pour rien. Les courants sont peu puissants à cette heure-ci, il y a peu de vague, peu de récif, enfin bref il n’y a quasiment aucun danger si elle suit mes conseils. « Il n’y a aucun requin mangeur d’Homme, aucune baleine géante qui pourrait t’avaler par inadvertance. Si tu décides de plonger et de mettre la tête sous l’eau tu verras au mieux des petits poissons, avec un peu de chance tu pourrais même voir des tortues. »  

On continue notre petit bout de chemin, attendant que la côte s’éloigne un peu plus et que le soleil se couche. Ici c’est parfait. « Je te l’avais dit que ça valait le coup. Tu n’auras pas fait tous ces efforts pour rien ! » Je pourrais contempler ce coucher de soleil encore jusqu’à la fin, mais il faut repartir avant que ce dernier ne se couche totalement, sinon on va avoir quelques petits soucis pour revenir sur la plage. « Prête à refaire le sens inverse ? Rien de compliquer, tu prends exactement les conseils que je t’ai donnés tout à l’heure et tu les appliques de nouveau. » Le retour se déroule sans encombre et alors que l’on se retrouve à seulement quelques mètres de la plage je me retourne vers Molly pour lui lancer un petit défi. « On fait la course jusqu’au bout ? Qu’est-ce que t’en dis ? » J’accompagne mon petit défi d’un large sourire afin de la persuader d’accepter. C’est surtout une façon pour moi de voir si j’arrive à lui faire oublier cette peur qu’elle a pour le large et les profondeurs de la mer. « Le dernier arrivé sur la plage devra payer les chamallows pour le petit feu de camps. Alors qu’en dis-tu ? » D’une certaine manière ça sera notre petite récompense à tous les deux pour la fin de ce premier cours de surf.

Je respire, je me calme et je me concentre sur la voix de Liam qui fait attention à ce que j’apprenne correctement. Je ne compte pas me mettre debout sur cette planche pour le moment, après tout, je suis encore bien trop terrifiée par les fonds marins. J’essaie de ne pas m’imaginer le pire, et je respire calmement, je calque mon rythme à celui du jeune homme qui se tient à côté de moi. Il me fait rire en parlant du fait que je ne risque rien, et que je ne vais pas me faire dévorer par des animaux qui n’existent même pas. C’est fou ce que l’imagination peut faire malgré toutes les connaissances que j’ai sur les animaux et leurs comportements. Je ne suis pas une experte en animaux marins, mais je sais qu’il n’y a rien de dangereux à naviguer sur les eaux australiennes. “Je suis désolée je panique pour un rien. Ca se voit tant que ça ?” Parce que je n’ai rien dit, de peur qu’il me prenne pour une folle ou qu’il finisse par se moquer de moi, mais je suis bien moins discrète que ce que je pouvais imaginer.

Je regarde le soleil se coucher, émerveillée par le moment. Et il faut faire le chemin inverse pour retourner sur la plage. Ce moment est passé bien trop vite à mon goût, mais je suis Liam. Je fais comme il m’a appris, je me concentre sur mes jambes et sur mes bras. Et il me sollicite avant qu’on arrive sur la plage. Je le rejoins, parce qu’il était encore un peu plus devant moi. “Avec plaisir !” J’adore jouer, et je me prépare à remuer mes bras le plus vite possible. Il parle d’un feu de camp et je suis ravie que la soirée puisse continuer après cette expérience nouvelle. “Ca me va ! J’adore faire griller des chamallow. Tu vas devoir en acheter des tas !” Et voilà que je le taquine en souriant. Prêt, feu, partez.

Dééééééééés :

C’est tout ce que j’aime, je veux dire partager mes passions. Ici c’est le surf, une pratique qui n’est pas si simple que ça, mais qui dès qu’on a le truc et qu’on a un minimum d’équilibre on peut déjà commencer à y prendre plaisir. Ce sport permet de voir des paysages magnifiques, de s’isoler l’espace d’un instant au beau milieu de la mer ou l’océan. C’est devant ce magnifique coucher de soleil que je me souviens de tous ces instants où je ne pensais plus à rien, ou je voulais simplement être coupé du monde. Tous ces instants me reviennent en tête et l’idée d’un nouveau voyage comme celui au Népal me traverse l’esprit, comme si j’avais de nouveau ce besoin maladif de vouloir me retrouver seul le temps de quelques jours. On m’a toujours dit que je ferais un parfait ermite et même si je prenais la chose à la rigolade à l’époque, mes proches n’avaient finalement peut-être pas tort. La nuit commence à tomber et il est déjà temps de retourner sur la plage. C’est le moment le plus difficile de la journée, celle de devoir quitter l’eau qui caresse sa peau, mais je ne suis pas seul aujourd’hui. J’essaie de rendre le trajet du retour un peu plus fun avec de défi de lancer vers la jeune femme, retour qui est toujours un peu plus compliqué quand la fatigue se mêle à la situation. Les bras sont régulièrement lourds tout comme le souffle qui est plus compliqué à reprendre. Le but n’était pas vraiment de l’humilier bien au contraire et c’est également pour ça que je la laisse volontairement gagner alors que je risque presque de tomber de ma planche tant je n’ai pas l’habitude d’avancer si lentement. Une fois sur la plage le sourire de Molly me suffit pour voir qu’elle a apprécié cette après-midi.

C’est quelques minutes plus tard alors que le feu commence doucement à crépiter que je sors ces fameux chamallows de mon sac. Comme on dit, une promesse est une promesse et chez les Taylor il est important de la tenir. « Tiens, attrape cette poche. » Une chacun devrait être amplement suffisant pour terminer cette soirée comme il se doit. On n’a pas vu grand-chose, mais c’est déjà bien suffisant pour un début, surtout pour Molly qui n’avait pas l’air d’être très sereine au début de ce cours improvisé. « Alors, qu’en dis-tu ? Ça t’a plu ? » Le plus important c’est qu’elle ait pris du plaisir pour moi sinon ça voudrait simplement dire que j’ai échoué à ma tâche de professeur que je me suis donné. Cette petite brise de vent provenant du large, ça m’avait bien manqué ça aussi, je profite de l’occasion afin de fermer les yeux quelques secondes, de m’imaginer un monde où je pourrais passer ma journée à rester assis comme ça, oui un monde simple et sans stress, une utopie. « Il ne faudra pas oublier de dire à mon frère que j’ai été sympa avec toi hein, sinon il va encore me faire la morale et me dire que je ne sais pas m’y prendre avec les autres. » Je laisse échapper un rire, alors que maintenant j’imagine déjà l’ainé me faire ses gros yeux.

J’ai gagné la course, je ne sais même pas comment c’est possible tant j’allais lentement. Il m’a certainement laissé gagner, mais je souris. On a passé un très bon moment, et j’en suis étonnée. Je ne pensais pas vraiment apprécier un moment à être au beau milieu de l’océan. Et pourtant, j’ai aimé ce coucher de soleil, et il a réussi à m’aider à ne pas trop paniquer. Je ne sais pas combien de temps on est restés dans l’eau, mais la lumière est bien moins présente. Il propose de faire un feu de camp, de manger des chamallows, et je n’hésite pas une seule seconde quand il propose de manger. Surtout quand il parle de bonbons.

Tiens, attrape cette poche. » J’attrape ce qu’il me tend, il a prévu bien assez pour deux. “On a pas le droit de quitter cette plage tant que c’est pas terminé ?” Je hausse les épaules avant de rire. On s’assoit et je commence à m’approcher du feu. « Alors, qu’en dis-tu ? Ça t’a plu ? » Je réfléchis en me tournant vers lui. “Contre toute attente, j’ai adoré. Le coucher de soleil était magnifique.” Je souris. “C’était agréable mais toujours un peu terrifiant.” Mon chamallow grille au-dessus du feu et je regarde le spectacle. J’adore ce genre de moments simples.

« Il ne faudra pas oublier de dire à mon frère que j’ai été sympa avec toi hein, sinon il va encore me faire la morale et me dire que je ne sais pas m’y prendre avec les autres. » Je pouffe de rire en mangeant la sucrerie. Ca fait un moment que je n’ai pas vu Amos et ça m’amuse de voir à quel point les deux frères peuvent bien s’entendre. “Je lui dirai que tu sais très bien t’y prendre avec les jeune femmes qui ont peur de l’eau et qui décident quand même de s’essayer au surf.” Je fronce les sourcils. “Enfin, surfer c’est un grand mot.” Je suis seulement restée assise sur une planche à flotter, mais grâce à Liam, je n’ai pas eu vraiment peur.