| MAEVE & AMOS ► LONG LONG WAY |
| | (#)Lun 1 Juin - 16:11 | |
|
LONG LONG WAY
La sonnerie de mon téléphone m’a tiré d’un sommeil perturbé par mes tracas et la douleur consécutive à mon accident et, l’espace d’un instant, alors que mes yeux refusaient de s’ouvrir, j’ai songé à ne pas décrocher. Qui pourrait me joindre ? Raelyn m’en veut toujours et j’ai redouté qu’il s’agisse de ma femme à l’autre bout de la ligne. Elle était de loin la dernière personne que j’avais envie d’entendre, Mitchell la suivant de près. Or, je n’ai pas regretté de m’être raclé la gorge avant de répondre d’un allo rocailleux. J’aurais détesté que ma généreuse créancière ne tombe sur ma boîte vocale. Je nourrissais, pour Maeve Fox, un profond respect. Outre le financement de mon bateau et de mes futurs projets, je la trouvais juste et sympathique. Bien sûr, j’avais rempli ma part du marché : je lui avais rapporté dans les moindres détails l’avancement de mon projet de casino, ce qui équivalait à lui avouer que Mitchell avait déserté le Club, provisoirement, attendant de Raelyn qu’elle s’occupe du bébé sans le jeter avec l’eau du bain. Ça servait mes intérêts et je devais lutter pour réprimer le sourire satisfait qui menaçait d’habiller mes lèvres. Qu’importe ceci dit, ce n’est pas l’objet de son appel passablement étonnant. Elle avait besoin de moi, un service à lui rendre et que je ne pouvais décemment lui refuser. Comment pourrais-je ? Je lui dois beaucoup, à la cheffe d’entreprise. Dès lors, j’ai accepté de me présenter chez Lubya pour récupérer un tableau, la payer, lui rappeler que son silence est de rigueur – à tout niveau d’ailleurs – et procéder à un échange de biens. Qu’était cette pièce ? Aucune idée. Je n’en avais cure. Ça ne me regardait pas et j’ai appris il y a bien longtemps à tirer les leçons des conséquences de la curiosité déplacée. J’y verse rarement l’eau de mon moulin dans ce défaut, mais ça m’est arrivé à une époque révolue depuis des lustres et j’ai juré qu’on ne m’y reprendrait plus. En revanche, j’ai noté les date, heure et lieu du rendez-vous avec son contact et j’ai confirmé que j’y serais, sans faute, qu’elle pouvait mettre son cœur à l’aise et je n’ai pas menti.
Le moment venu, je n’ai pas eu besoin qu’elle me rappelle à l’ordre d’un texto. J’ai ramassé la veste et j’ai pris la direction du nouvel appartement de Lubya. Lorsqu’elle s’est “séparée“ de Mitch, elle a veillé à se défaire de toute l’emprise qu’il avait sur elle. J’en ai déduit que sous ses airs d’ingénue ou de vamp – difficile de statuer – elle était plus maligne qui n’y paraissait. Elle ne m’a pas contrarié. Elle m’a elle-même répété les règles en encaissant son chèque. Elle n’a pas non plus précisé ce que renfermait le tube cylindrique qu’elle m’a confié péniblement. Ce devait être important et, s’il est vrai que je me suis demandé comment cette serveuse était entré en contact avec la grande blonde aux jambes interminables, je n’ai posé aucune question. J’ai simplement pris la route pour accomplir le reste de ma tâche et je suis rentré sur mon bateau, là où s’achevait cette entreprise. Maeve m’attendait devant la Marina et, en sortant de la voiture, je l’ai saluée d’un signe de la tête courtois. « Je suis ravi de vous revoir. Tout s’est bien passé… mais je suppose qu’on sera plus en sécurité sur le catamaran. » Là où aucune paire d’yeux curieuses ne serait témoin de la transaction. « J’avais promis que je vous le ferais visiter d’ailleurs. C’est le moment où jamais. Et je suis désolé de vous recevoir comme ça, mais j'ai eu un petit accident de voiture, il y a quelques jours» Sept. si j'avais voulu être exacte. A défaut, je conclus par un sourire et une grimace à destination de mon plâtre. Rien ne m'aura empêché d'être efficace, mais je dois bien admettre que je suis épuisé.
|
| | | | (#)Mer 3 Juin - 10:53 | |
| Jeudi 7 Mai 2020.Je monte dans la BMW rutilante et attache ma ceinture, retenant un soupir agacé. « Je suis en retard. » Inutile de lui préciser combien cela me met hors de moi, Alec en a parfaitement conscience. « Où et quand, Ms. Fox ? » Il me demande d'un ton posé, alors que son regard croise le mien dans le rétroviseur. J'esquisse un petit sourire. Son calme incroyable est la plus grande de ses qualités. Il n'est pas mon chauffeur depuis si longtemps pour rien. « La marina, dans quinze minutes maximum. » Il acquiesce, les yeux pétillants de malice. « Accrochez-vous, Ms Fox. » Il compte bien profiter autant que possible de la situation, mais comment lui en vouloir ? Mon planning est toujours organisé au millimètre près, trajets inclus. Ce n'est pas souvent qu'il a mon accord pour bafouer le code de la route à cause d'un obstacle de dernière minute. Je serais la pire des patronnes si je gâchais son plaisir. Il a toujours fait preuve d'une loyauté et d'un sens du service irréprochables. Il a bien mérité de jouer les taxis fous l'espace d'un instant, non ? « Je crois en vos talents, vous le savez. Je dois pourtant admettre que là, ça me semble presque impossible… » Alec quitte le parking souterrain sur les chapeaux de roue, s'engageant sur l'avenue. La circulation, plutôt dense en cette fin de journée, tend à me donner raison. Mais il lui en faut davantage pour le décourager. « Le presque fera toute la différence, Ms Fox. » Là-dessus, il effectue un virage serré et se lance dans une rue à sens interdit. Nous arrivons sur place exactement quatorze minutes et cinquante-et-une secondes après notre départ. « Alec, je ne sais pas ce que je ferais sans vous. » Je m'exclame, ouvrant la portière. « C'est toujours un plaisir, Ms Fox. » Je quitte le véhicule puis réajuste ma veste de tailleur avant de me diriger vers l'entrée de la marina. Mon rendez-vous arrive un court moment plus tard, un tube fermé dans une main, et son autre bras… dans le plâtre. Je me demande ce qui a pu lui arriver, réservant toutefois cette question pour plus tard. Il me salue d'un signe de tête que je m'empresse de lui rendre. « Bonsoir, Amos. » « Je suis ravi de vous revoir. » « Moi de même. » Surtout compte tenu des motifs de notre entrevue. J'ai beaucoup de mal à dissimuler mes émotions, pour une fois. D'un autre côté, nous sommes presque à l'aboutissement de mon rêve le plus cher. « Tout s’est bien passé… mais je suppose qu’on sera plus en sécurité sur le catamaran. » Un signe de tête plus tard, il nous guide sur le ponton, jusqu'à son emplacement d'amarrage. Il m'offre une visite tout en s'excusant de me recevoir dans cet état, dû à un accident de voiture récent. « S'il s'agit de la seule blessure à déplorer, vous m'en voyez soulagée. » Au fil des semaines, j'ai appris à apprécier Amos. Je lui entrevois un brillant avenir ici, à Brisbane. Il aurait été dommage de le perdre maintenant. Il me fait grimper sur le pont de catamaran et lorsque mon regard se pose de nouveau sur lui, il m'est difficile de ne pas remarquer ses traits tirés. Grave ou non, ce fameux accident l'avait sûrement bousculé. « Vous auriez dû me le dire, au téléphone. J'aurais confié cette mission à quelqu'un d'autre. » Ma manière personnelle de reconnaître sa santé fragile et de le remercier d'avoir, malgré tout, accepté de voir Lubya. Car à vrai dire, je suis loin de manquer de personnes de confiance au sein de mon équipe. Celle dirigée d'une main de fer par Dominic. J'avais voulu envoyer Amos en particulier dans un seul but : savoir de quoi il est vraiment capable, tester ses limites. A supposer qu'elles existent. Bien sûr, récupérer la copie chez Lubya n'était que la première (et la plus facile) des deux étapes… @Amos Taylor
Dernière édition par Maeve Fox le Ven 12 Juin - 15:24, édité 1 fois |
| | | | (#)Ven 5 Juin - 17:35 | |
|
LONG LONG WAY
Je n’ai jamais abordé Maeve Fox qu’au milieu du cadre professionnel et si j’avais dû la décrire j’aurais choisi : contrôle. Tout semble pondéré, pesé, de ses sourires en passant par les mots qu’elle emploie. Et, pourtant, ce soir, alors que nous nous saluons d’un signe courtois de la tête, je la trouve différente. Je ne la qualifierais pas de guillerette ou de nerveuse, mais elle m’apparaît plus impatiente que durant nos précédents échanges. Que m’a-t-elle envoyé chercher chez l’agaçante et candide Russe ? Que contient-il ce rouleau que j’ai sorti de mon coffre ? Mon cerveau fourmille d’idées et je suis certain que parmi mes hypothèses, l’une approche la vérité. Ceci étant, je ne pipe mot de ma curiosité. Son feu est attisé, mais je considère que mon rôle, aujourd’hui, était d’investir celui d’Hermès moderne et je m’y tiens. Je ne m’affranchis pas des limites du scénario, car l’indiscrétion ne me ressemble pas, ne me va pas, et je verse un peu d’eau dans la coupe de mes défauts. Quoi que cette femme puisse tramer, si j’étais destiné à n’être qu’un pion sur l’échiquier de ses projets, ne l’apprendrais-je pas bien assez tôt ? « Plus ou moins, mais ce n’est rien de grave de toute façon. » Rien capable de m’empêcher de lui renvoyer l’ascenseur alors qu’elle a participé à l’achat et à la rénovation de mon bateau. Je le lu fais visiter avec un plaisir non dissimulé d’ailleurs. « Aucun regret ? » Estime-t-elle que son argent aura été bien dépensé ? Je lui rembourse ce prêt. Je ne rate jamais une échéance – et ça n’arrivera jamais –, mais quoi de plus décevant que d’investir une somme énorme au profit d’un homme sans goût ? « Et, ne vous inquiétez pas. Si j’avais été mourant, vous l’auriez su. Mais, je connais mes limites. » ai-je rétorqué tandis qu’elle ponctue les conséquences de mon accident. De mon point de vue, en plus d’être un grand garçon, j’assume que j’ai envers elle une dette de reconnaissance et qu’il n’est jamais bon de refuser un service à un quelconque créancier.
Convenable, je l’invite à s’asseoir sur le sofa. Moi, j’arpente la cabine jusqu’à la cuisine et je lui propose à boire. Il y a un peu de tout. Elle aurait presque l’embarras du choix. Pour ma part, je regrette d’hésiter à me servir un verre de whisky. Mon corps en a besoin. Ma tête est de moins en moins d’accord et je balaie mes réticences d’un revers invisible de la main. Je ne suis pas prêt pour un sevrage supplémentaire. L’absence de Raelyn amoindrit mon moral, mais je fonctionne. Je l’écoute, Maeve. Je suis tout consacré à la suite du programme puisqu’il y en a une. Au contraire, que ferait-elle là ? Pourquoi l’échange ne se serait-il pas déroulé dans le confort de son bureau ? J’ai déposé son remontant face à elle, sur la table basse. Le mien a trouvé place non loin du sien. J’ai récupéré ensuite le paquet abandonné sur le plan de travail et, m’asseyant en face d’elle, j’ai fini par le lui tendre. « Ceci est donc à vous. » Je l’ai gratifiée d’un sourire et j’ai renchéri, moins par empressement que par franchise. « Et maintenant ? » Qu’as-tu prévu, Maeve ? À quelle sauce envisage-t-elle de de déguster le plat de résistance ?
|
| | | | (#)Sam 6 Juin - 14:43 | |
| Amos balaie son accident de notre conversation en quelques mots placides. Il n'a visiblement pas envie de discuter des détails ou des circonstances, et je lui en suis reconnaissante. Non seulement les événements qui ont mené à son plâtre ne me regardent pas, mais pire encore : ils ne me sont d'aucun intérêt. Amos est là, devant moi, en relative bonne forme et le rouleau tant espéré sous le bras. C'est le plus important. J'acquiesce donc, gardant le silence. Nous traversons le pont côte à côte avant de descendre dans la cabine. « Aucun regret ? » Me demande-t-il à l'instant où notre visite s'achève. « Je n'ai jamais vraiment aimé les bateaux. » J'avoue pour commencer. Les seules (et rares) fois où je passe du temps en mer, c'est uniquement dans un but bien précis : mettre certains pontes dans ma poche, conclure une grosse affaire ou obtenir des informations. « Je dois néanmoins admettre que vous avez beaucoup de goût. » Une décoration sobre et bien équilibrée. Le premier mot qui me vient à l'esprit alors que mon regard balaie la pièce est confortable. Le catamaran d'Amos est loin des yachts aux intérieurs écœurants que j'ai pu voir jusque-là. J'ai remarqué, au fil des années (et pas seulement sur des bateaux), que l'argent semble effacer la notion d'esthétisme chez la plupart de mes pairs. Sous prétexte que leur compte en banque leur permet de tout s'offrir, ils vont jusqu'à faire des choix extrêmement douteux dans le seul et unique but d'étaler cette richesse. Un gâchis monumental, si vous voulez mon avis. Mon attention dévie sur le plâtre d'Amos puis sur ses traits que je devine fatigués, et je me permets une dernière remarque à propos du fameux accident. Je ne suis pas sans cœur malgré tout. S'il m'en avait parlé au téléphone, j'aurais pu envoyer quelqu'un d'autre chez Lubya. Le service demandé n'aurait été que partie remise. Et à nouveau, il s'empresse de me rassurer. Il met un point final au sujet en m'invitant d'un geste à prendre place sur le sofa. Bonne élève, je m'exécute aussitôt. L'impatience rendant mes jambes légèrement flageolantes, je préfère être assise pour la suite de notre entretien. « Un whisky sec, merci. » Amos s'affaire à quelques pas de là, côté cuisine. Il est cependant vite revenu. S'installant à mes côtés, il dépose nos deux verres sur la table basse puis me tend le long rouleau, sourire aux lèvres. « Ceci est donc à vous. Et maintenant ? » « Maintenant ? » Je répète, les yeux plus brillants que jamais. « J'espère être bluffée. » J'ai peu de doutes. Dans le cas contraire, deux personnes perdraient la vie ce soir. La peintre, Lubya, et Rupert, le spécialiste, sensé vérifier chaque étape de la confection, jusqu'à la touche finale : s'assurer que ses propres confrères, partout dans le monde, ne découvriront jamais la vérité. Je pousse doucement les boissons afin de faire de la place et déroule la peinture devant nous. Impossible de retenir mon émotion. Je suis subjuguée. « Wow. » Connaissant ce tableau par coeur, je me concentre sur chaque détail, les uns après les autres. La conclusion ne se fait pas attendre : j'ai eu raison de miser sur Lubya. Son talent est indéniable. Je me tourne enfin vers Amos. « Ceci est La Vigne Rouge. Elle a été peinte en 1888 par Van Gogh près d'Arles, une ville du Sud de la France. » Un sourire triomphant étire mes traits. « Enfin, pas tout à fait. Ceci est la reproduction exécutée par Lubya. Un travail impressionnant. » Avec précaution, je range l'oeuvre d'art dans son rouleau. Elle est belle, certes, mais n'en reste pas moins qu'une copie. J'attrape mon whisky et me permet d'en boire une gorgée avant de répondre concrètement aux interrogations d'Amos. « L'original est à Brisbane, gracieusement prêté par le musée des beaux-arts Pouchkine de Moscou, pour une exposition temporaire. C'est ma compagnie qui a décroché le contrat de transport fluvial pour son prochain trajet. La suite est simple : procéder à un échange avant que l'original ne reparte. » Je laisse un court instant à Amos pour digérer l'information et ce qu'elle implique, puis entreprends de lui faire part des détails. Il en aura besoin pour réussir cette mission. « Un spécialiste détaché par le Musée Pouchkine sera là pour vérifier la peinture au chargement. Le container sera ensuite scellé devant lui. Le tableau restera donc sans surveillance jusqu'à son arrivée au port de destination : Los Angeles, où il sera exposé durant deux mois avant de rentrer à Moscou par avion. A l'arrivée à Los Angeles, le même spécialiste viendra superviser l'ouverture du container et procédera à une nouvelle vérification sur les docks. Je me dois d'être présente, en tant que PDG de la FLSC et donc, en tant que responsable du transit maritime. S'il y a le moindre problème… » Je laisse le reste en suspens. Amos a compris. « Lorsque l'expert aura validé la pièce comme étant l'originale au port de L.A., nous pourrons célébrer une victoire bien méritée. » Je finis par conclure, imaginant déjà La Vigne Rouge en ma possession. Un rêve en passe de devenir réalité. @Amos Taylor |
| | | | (#)Dim 7 Juin - 17:40 | |
|
LONG LONG WAY
Maeve n’est ni la première ni ne sera la dernière à confier on manque d’attrait pour les bateaux et, personnellement, j’entends et je comprends. J’ai tendance à penser que cette inclination dépendrait presque de la génétique. C’est comme une sorte de chromosome ou en plus qui dicterait la passion des gens comme moi, des gens attirer par l’autre, des gens à l’aquacité incroyable. C’est mon don, finalement. L’océan, la mer, et ce qui permet de s’en rapprocher sont une insatiable inclination. Alors, mon navire, je l’ai bichonné, je l’ai soigné, choyé à l’instar d’une mère pour son bébé et, comme elle me qualifie d’homme de goût, je lui souris avec gratitude, mais sans m’accorder au préalable tout le mérite. « Oh, j’ai été aidé. Raelyn a des goûts sûrs. » Et, c’est bon de parler d’elle, d’évoquer notre association aujourd’hui mise à mal par ma couardise. Je me souviens de sa contribution à l’édification de mon rêve de gosse et je me dis que nous sommes bien assortis, elle et moi, pour que notre histoire s’achève aussi brutalement. Nous nous relèverons, qu’importe ma duplicité, car je sais me montrer franc quand la situation l’impose. Et, tandis que je sers à Maeve son whisky sec, je songe que je verse également dans la reconnaissance sans abuser. Ce soir, j’en fais l’étalage d’ailleurs. Mon état physique aurait pu me défaire de mes obligations sans la femme d’affaires ne m’en tiennent rigueur. Je suis diminué, c’est visible, elle le remarque et le souligne. Mais moi, je balaie la délicatesse en minimisant les conséquences de mon accident. En choisissant de lui rendre ce service, je n’ai pas usé la corde de ma robustesse. J’en étais capable et je ne suis pas assez lâche pour me retrancher derrière des excuses fallacieuses. Au contraire, je lui tends son bien et, m’installant sur mon sofa, je me laisse gagner par la curiosité. Mes questions précédentes trouveront bientôt réponse et je la détaille ouvrir précautionneusement son paquet. Je pars en quête d’une expression qui masquerait ses traits usuellement si neutres. Qu’est-ce que détenait Lubya qui sera susceptible de la bluffer ? « Et, je vous le souhaite. » Vraiment, puisque mon instinct me souffle qu’elle sera déçue dans l’éventualité où l’objet découvert et examiné par ses seules pupilles ne la satisfait pas. Il n’en est rien. L’onomatopée le prouve et moi, alors qu’elle révèle l’objet de sa passion, je suis déçu. L’art me touche si peu. «Je connais Arles. » ai-je commenté non sans perdre le fil de son récit. Où veut-elle en venir ? Qu’attend-elle de moi ? Que je me transforme en Arsène Lupin ? Je n’en suis pas un. Je ne suis pas plus un voleur qu’un cambrioleur bien que j’en ai la discrétion. Je ne suis même pas certain que le projet m’intéresse. Me demanderait-elle, par contre, de mener des négociations que je me montrerais moins réticent. Sur l’heure, je reçois et traite des informations qui, d’après moi, sortent du cadre de mes compétences. « Et, je présume que l’échange doit se faire tant que le tableau est encore ici, à Brisbane et que vous m’imaginez dans le rôle. » ai-je avancé, perspicace, même si mon rôle m’échappe toujours. « C’est ce que vous attendez de moi, Maeve ? » Que je dérobe dans son écrin une pièce rare ? « Je n’ai pas été formé à m’introduire dans les musées mieux protégés que les coffres-forts. » ai-je admis en hochant négativement de la tête. « À moins que vous ayez pris un accord préalable avec le conservateur dudit musée. Dans ces conditions, je pourrais vous servir de transporteur, voir de négociateur si c’est là votre intérêt. Pour le reste, je vous décevrais, j’en ai bien peur. » Pourquoi me montrer plus gros que le bœuf ? Connaître ses faiblesses est une force parmi d’autres, non ?
|
| | | | (#)Ven 12 Juin - 8:18 | |
| Un fin sourire étire mes traits alors que le prénom de Raelyn s'immisce dans notre conversation. Elle et moi nous sommes toujours bien entendues. Les femmes comme elles sont bien trop peu nombreuses. Ambitieuse, déterminée, la blonde sait ce qu'elle veut et ce qu'elle ne veut pas. Sa loyauté au Club et à Mitchell est indéniable et force d'autant plus le respect que ces derniers temps, sans elle, l'organisation se serait certainement effondrée. « En effet. » Je ne peux que le constater. Je n'ai jamais eu l'occasion de lui rendre visite à son appartement. Nos échanges se font en lieu totalement neutre si, pour une raison X ou Y, nous ne pouvons investir ni mon propre bureau, ni le restaurant. Notre lien a beau être strictement professionnel, cela fait plusieurs années qu'il perdure, et je dois admettre qu'au fil du temps, je me suis attachée à Raelyn. « Notre prochain rendez-vous n'étant pas encore programmé, je pense que vous la reverrez avant moi. Transmettez-lui mes amitiés et… tous mes compliments pour cet excellent travail. » J'ajoute, désignant l'intérieur du bateau d'un geste large. Installés sur le canapé, nos boissons devant nous, Amos et moi entrons dans le vif du sujet : le fameux tableau. La copie de nouveau rangée dans son tube protecteur, je fournis à mon nouvel associé les éléments dont il a besoin pour appréhender l'étape suivante. Je sais qu'il est un peu moins emballé que prévu. Manifestement, l'art ne le touche pas, une chose que je peux comprendre. Mais cette peinture n'est rien de plus qu'une mission, un objectif à atteindre pour lui. Tant qu'il se montre à la hauteur, ses goûts personnels n'entrent aucunement en ligne de compte. « Et, je présume que l’échange doit se faire tant que le tableau est encore ici, à Brisbane et que vous m’imaginez dans le rôle. » J'acquiesce doucement et prends une nouvelle gorgée de l'excellent whisky qu'il m'a servi. Amos fronce les sourcils, l'air perdu. Il se demande pourquoi j'ai fait appel à lui, sachant que braquer des musées n'est pas son fort. J'échappe un petit rire amusé, ce qui le fait réfléchir à une solution alternative : un accord éventuel avec le conservateur. Et là, en effet, il pourrait peut-être faire quelque chose. Décidant que son supplice a assez duré, je me mets en quête de lui révéler l'entièreté de l'opération. « Non, le conservateur ne sait rien. Connaissez-vous l'avantage d'être à la tête de la compagnie maritime qui s'occupe du transit jusqu'à Los Angeles ? Les containers peuvent être scellés, descellés puis re-scellés… sans que personne ne soupçonne rien, puisque c'est moi qui fournis cette garantie. » Je vois les yeux d'Amos s'éclairer : il a compris où l'échange devait se faire. Mais par prudence et souci du détail, je préfère confirmer à haute voix. « Nous allons attendre la veille du départ. L'expert passera, reconnaîtra le tableau comme original et nous scellerons le conteneur devant lui. Il repartira, rassuré, et le conteneur restera sans surveillance toute la nuit. Le lendemain matin, mes dockers le chargeront sur le navire et il prendra la mer. Nous avons donc seulement quelques heures pour agir, ce qui est largement suffisant. Vous serez trois : un membre de mon équipe se chargera de dé-sceller le conteneur, surveiller les alentours afin de s'assurer que vous êtes seuls et re-scellera ensuite le tout, avant de partir. Rupert, le spécialiste qui a aidé Lubya à établir cette reproduction parfaite du tableau, sera en charge de remplacer l'original avec la copie. » Je laisse un court moment de pause, vérifiant qu'Amos suit toujours. Son air concentré me prouve que c'est bien le cas. Je reprends donc. « Vous serez là pour superviser tout ça. Mon agent ne peut pas faire le guet sur les docks et surveiller Rupert. Contrairement à Lubya, l'argent n'est pas son moteur : parce qu'il est le meilleur dans sa profession, il me le fallait lui, et personne d'autre. Nous avons donc dû menacer ses proches pour qu'il apporte son aide. Bien évidemment, il n'a aucune idée de mon implication. Elias, le membre de mon équipe qui sera avec vous, a été son seul contact tout au long du processus. Et de manière officielle, Elias n'est pas mon employé. » Si tout devait se savoir, je serais donc protégée. A cause des scellés, ma compagnie maritime serait suspectée mais il n'y aurait aucune preuve reliant les faits à ma propre personne. A défaut d'un coupable, les poursuites serait sans doute abandonnées. « De manière concrète, j'ai besoin de vous pour garder un oeil sur Rupert et lui rappeler que si son travail n'est pas fait correctement ou s'il parle après coup… il y aura de terribles conséquences. Je vous ferai passer son dossier complet dès demain, pour que vous puissiez vous familiariser avec les détails le concernant. » Un sourire illumine mon visage. Parce que le plus important arrive. « Et bien sûr, je compte sur vous pour me ramener ce tube, avec l'original à l'intérieur cette fois. » Un cadeau que je m'empresserai de récupérer. Hors de question d'attendre le lendemain matin. « Mon chauffeur personnel vous emmènera sur les docks, vous et Rupert. Elias se débrouillera par ses propres moyens. Quand tout sera terminé, ma voiture ramènera Rupert, puis vous déposera chez moi. Je vous attendrai. » Je garde enfin le silence. Je ne demande pas à Amos s'il est toujours partant. A mon sens, cela va sans dire. Je serais extrêmement déçue qu'il en soit autrement. J'attends donc surtout de savoir s'il a des questions à me poser, ou si tout est clair dans son esprit. @Amos Taylor |
| | | | (#)Dim 14 Juin - 13:53 | |
|
LONG LONG WAY
Il y a de fortes chances, ai-je retenu alors que le mode exact de conjugaison relèverait e du conditionnel. Pour lui transmettre les amitiés de Maeve Fox, encore faut-il que Raelyn me pardonne mon mensonge et, non négligeable, qu’elle soit au courant que mon généreux débiteur est la femme avec laquelle elle travaille. Certes, dans les faits, ce ne sera pas un problème en soi. Ç’aurait pu l’être à l’époque où nous n’étions pas engagés. J’aime cultiver mon goût du mystère, mais aujourd’hui, je présume que ma relation professionnelle avec Fox ne la chiffonnerait pas outre mesure. C’est bien ce dont il s’agit d’ailleurs, d’une relation professionnelle qui sort du cadre de la dette contractée depuis qu’elle m’a envoyé en mission, en son nom, auprès de Lubya et qu’assise dans mon sofa, elle découvre le fruit du travail de la Russe. Je ne suis pas stupide. Je comprends mieux son émotion presque extatique, à la chef d’entreprise. Et, je devine sans grande difficulté qu’elle a pour moi des projets qui, sur l’heure, me dépassent. Je l’écoute attentivement, presque solennellement, jouant de mes doigts valides avec mon verre d’alcool. Si j’étais concentré sur moi, j’admettrais que j’hésite à le boire. L’esprit tout occupé ailleurs, j’y trempe d’abord mes lèvres et en avale une gorgée comme s’il s’agissait d’un verre d’eau. Ma perplexité l’amuse dès que j’ose une question. Sa gaieté n’est pas contagieuse néanmoins. Outre ma curiosité, je sais qu’il est des limites que mes valeurs m’empêcheront de franchir et le vol, le cambriolage gratuit, en plus de ne pas convenir avec mes compétences, font partie de ses limites que je me suis seul fixées en posant le pied à Brisbane. Je savais que je tremperais dans la criminalité, mais si j’y enfonce volontiers la main jusqu’à l’épaule, je ne m’y abandonnerai jamais complètement.
Et, le plan se précise enfin. Il est bien ficelé et à moindre risque finalement. Mon rôle est de superviser, pas de commettre un crime éhonté et je n’ai pas de scrupule à endosser celui de complice. Aussi, me suis-je détendu et, mentalement, j’ai noté les différentes questions qui survienne au fur et à mesure de ses explications. « Je suppose qu’au moment où le conteneur sera scellé, vous serez présente pour garantir votre bonne foi. Et moi ? » Prévoit-elle de me garder dans sa poche comme un as de pique et de m’en sortir le moment venu ? Où suis-je supposé l’accompagner afin de lui servir d’alibi ? « Et, si l’expert se montrait récalcitrant ? S’il décidait de faire placer des gardes à la demande de son propriétaire ? » Dans l’état actuel des choses, je ne pourrais pas les assommer. Je ne suis pas dans une forme olympique. En revanche, pour la question des caméras de surveillance au port, je présume qu’elles lui appartiennent et qu’elles seront coupées pour l’occasion. En panne peut-être. Avec pour ses hommes de maintenant un billet urgent mentionnant que le système doit être réparé urgemment, message garant de sa bonne foi. « J’entends que vous avez pensé à tout, mais si cet expert travaille sous le joug d’une menace, qu’est-ce qui vous prouve qu’il ne dévoilera pas que la vigne rouge n’est plus où elle devrait être ? » me suis-je enquis, non par prétention à l’idée de parfaire son plan, mais avec à cœur de ne pas signer pour un aller simple en prison. Obtenir son dossier, l’étudier, m’en dira sûrement long sur lui, mais elle me le décrit comme un passionné, ce qui signifie par conséquent que : « La menace ne suffira pas. Vous le savez, Maeve. Qu’avez-vous en tête ? » Et c’est, de mon point de mon point de vue, la question la plus importante. Le détail concernant qui me ramènera chez elle avec l’original d’une toile de Van Gogh – tout ce ramdam pour de la couleur, ça me dépasse – m’importe peu. C’est ma protection qui m’intéresse.
|
| | | | (#)Sam 4 Juil - 11:55 | |
| Amos écoute avec attention les détails de ce plan de longue date. Il ne cherche aucunement à interrompre le fil de mes explications, au contraire. Il engrange les éléments dans un silence total, impérieux. Ses traits sont concentrés, ses sourcils se froncent parfois mais le plus souvent, c'est un léger acquiescement qui vient ponctuer mes mots. Je sais qu'il aura des choses à me demander. L'inverse me décevrait. Néanmoins, il a la décence de patienter, de me laisser mettre en place chacune des pièces du puzzle afin d'obtenir une vue générale, avant de me questionner sur les éventuelles zones d'ombres restantes. Je ne suis ni naïve ni stupide. Et j'ai conscience que même la préparation la plus réfléchie, même le stratagème le plus abouti, ne sont pas nécessairement dénués d'erreurs. Rien, absolument rien, n'est infaillible. Se croire au-dessus de tout mauvais choix - ou mauvais pas - serait comme se tirer une balle dans le pied. A partir de maintenant, les rouages sont enclenchés. Je ne peux plus faire machine arrière et la moindre contrariété devra être étouffée dans l’œuf le plus rapidement possible. Heureusement pour moi, je peux compter sur des personnes de confiance, Dom se trouvant en tête de cette liste. C'est là mon meilleur atout. Je me tais enfin et marque cette coupure par une gorgée de whisky. Amos semble réfléchir encore, puis sa voix se fait de nouveau entendre. « Oui. Je ne suis, bien sûr, que très peu présente lorsque les containers sont scellés. Ce n'est pas mon rôle, des responsables au sein de mon entreprise sont embauchés à cette fin. Mais pour des dossiers aussi… sensibles et importants, ma présence est toujours essentielle. » Celle d'Amos, en revanche, ne l'est aucunement. Le fait qu'il soit avec moi au moment de la fermeture du container serait même suspicieux, étant donné qu'il ne fait pas partie de la compagnie maritime. « Vous n'interviendrez qu'au moment de l'échange. » Je l'informe donc, lui confirmant que ses services ne seront requis que pour une tâche bien précise. « Soyez rassuré : il n'y aura aucun garde. » Le tableau appartient au musée russe et tout a d'ores et déjà été bouclé avec son représentant des semaines plus tôt. S'il avait souhaité protéger le chef-d'oeuvre durant sa nuit sur les docks, cela aurait déjà été évoqué. Quant à l'expert, il n'est là que pour attester qu'il s'agit bien de l'original, et il ne possède aucune forme d'autorité quelconque. Je sens que Rupert n'est pas prêt à être évincé de notre conversation de sitôt. Amos s'interroge sur sa capacité à garder ce terrible secret, quand bien même il sait que les vies de ses proches sont en jeu. Nos regards s'accrochent, et Amos me fait vite comprendre qu'il n'est pas dupe. « La menace ne suffira pas. Vous le savez, Maeve. Qu’avez-vous en tête ? » J'esquisse un léger sourire. Il ne lui aura pas fallu longtemps pour comprendre quel destin funeste attend ce fameux spécialiste. « Vous avez ma parole, Amos. Rien ne remontera jamais jusqu'à vous. » Je lui assure, lui offrant sa réponse de manière détournée. Le dire à voix haute serait bien inutile. Ce qui compte, après tout, c'est que son implication ne soit pas révélée, non ? Peu importe le sort de Rupert. Ce dernier n'est qu'un pion. Un malheureux pion dont la seule faute est d'être considéré comme le meilleur dans sa profession… Pour aller de l'avant, avoir l'esprit tranquille - autant que possible compte tenu des circonstances, il me faut la confirmation orale d'Amos. C'est à lui, maintenant, de me donner sa parole. « Je peux compter sur vous ? » Je demande, un sourcil rehaussé, attendant de connaître sa décision finale. Allait-il accepter ? Et le cas échéant, quelle serait la suite ? Aborderait-il le sujet de ce qu'il gagnera, à prendre quelques risques pour moi ? De la rémunération qu'il en tirera ? Ou considère-t-il plutôt ma demande comme un service qu'il me doit, puisque j'ai accepté de lui prêter de l'argent (avec un remboursement dénué d'intérêts) lorsque personne d'autre ne pouvait le faire à ma place ? @Amos Taylor |
| | | | (#)Dim 26 Juil - 23:44 | |
|
LONG LONG WAY
Je l’ai écouté comme un fidèle devant le discours du pape catholique et j’ai analysé, jaugé de la pertinence de son plan somme toute bien rôdé et évalué qu’elle est exactement mon rôle dans cette entreprise. Qu’attend-t-elle de moi, Maeve ? Que j’outrepasse le domaine de mes compétences ? Je m’enorgueillis encore d’être de ces malfrats sans grande envergure, mon seul crime étant la clandestinité de mes activités. Du reste - les jeux d’argent, quel qu’ils soient, n’ont rien d’illégaux - je suis une petit poisson dans le bassin de la criminalité et ça me va bien. Mon ambition est la vérité par rapport à Sofia. Rien de plus. Rien de moins. Dès lors, je n’ai pipé mot dès lors qu’elle a signé la conclusions de sa tirade en avalant une gorgée de son whisky sec. Précipitation est l’apanage des imprudents. Je n’ai ouvert la bouche qu’une fois les pièces de l’engrenage emboîtées, juste avant de vérifier qu’un grain de sable ne s’est pas glissé dans le mécanisme avant de l’enclencher. « Au moment de l’échange entre le vrai et le faux, donc.» ai-je repris avant de poursuivre. « Si je comprends bien, mon rôle est de le superviser.» Au contraire, elle me détrompera, miss Fox. Elle éclaircira son ordre et je serai tout aussi libre d’accepter ou de refuser, qu’importe qu’elle m’ait prêté une coquette somme d’argent pour mener à bien mes différents projets. « Je peux vous demander comment vous vous y êtes prises pour que le musée propriétaire n’ait pas mis des gardes en faction autour de cette oeuvre ? Des gardes sur fonds propres...» Comment peuvent-ils uniquement se fier à la bonne foi de la compagnie maritime ? « Et, si vous n’avez rien à voir là dedans, ça me semble bien audacieux de leur part.» Bien trop à mon goût, ce qui m’amène doucement à une autre interrogation que j’ai posé sur la table au milieu des deux verres de whisky. Elle s’est appariée à une autre concernant Ruper. Pourquoi lui faire confiance ? Quel est-t-il, son moyen de pression sur ce quidam ? Curieux au possible, je me suis redressé pour ne rien perdre de ses explications. Son dessein est ambitieux et, s’il est bien une réalité que je souhaite m’éviter, c’est celle du monde carcéral. Or, tout indique qu’en cas de pépin, je me retrouverai derrière les barreaux, entendu en prévenu, sans passer par la case départ. « M’avez-vous cru sur parole, Maeve ? Quand je suis venu chez vous pour vous demander un service ?» Et, aujourd’hui, c’est bien ce dont il s’agit. Elle me réclame mon aide et si ma reconnaissance lui est dévouée, elle n’est pas un puits sans fond. En récupérant auprès de Lubya son travail, je me suis mouillé plus que de raison par rapport à Raelyn. Nous n’avons jamais évoqué de questions pécuniaires elle et moi. Elle n’a aucune idée du poids de mon portefeuille puisque notre relation n’a rien de vénale et d’intéressée. Ceci étant, je n’en reste pas moins persuadé qu’elle s’étonnerait d’apprendre que je me suis associé avec l’un des partenaires du Club. « Entendons-nous, je ne suis pas en train de vous dire non, je veux juste être certain de ce que je fais. Je ne peux pas me lancer à l’aveugle. » Et, ça implique que j’ai besoin de son authenticité et non d’une promesse. « Surtout s’il y a des gardes. Quelles sont les limites à ne pas dépasser ?» Il y en a toujours, au même titre que la dangerosité d’un acte illégitime devant la loi.
|
| | | | (#)Sam 15 Aoû - 10:16 | |
| Les sourcils froncés en signe de réflexion intense, Amos est certainement en train de songer au déroulement de ce plan dans tous ses détails. Son cerveau emboîte les nombreuses pièces et huile les rouages, cherchant (en espérant ne pas trouver) un éventuel grain de sable susceptible de faire dérailler le mécanisme et de tout compromettre. Je le comprends. Je suis certes devenue sa créancière, mais cela ne fait pas de moi une personne de confiance à ses yeux. Il souhaite se protéger, assurer ses arrières avant de me donner sa décision. Le contraire aurait été aussi étonnant que décevant. Il élève enfin la voix pour me demander de confirmer son rôle : celui de superviser l'échange entre le vrai et le faux tableau. « Oui. » J'acquiesce. « Surveiller Rupert pendant que mon agent se charge des alentours. Ensuite, récupérer la toile originale et l'amener au penthouse. Rien de plus, rien de moins. » En ce qui le concerne, la mission reste simple, nette et précise. A moins que l'expert ne pose soudainement problème, ce qui est fort peu probable : il sait quelles seraient les conséquences d'une rébellion de sa part. Il n'osera pas aller jusque-là. Amos finit par poser une autre question, à laquelle je m'attendais pour être tout à fait honnête. Un sourire amusé étire mes lèvres. Il n'est décidément pas habitué aux nombreux échanges d'oeuvres d'art qui ont lieu dans le monde entier entre divers musées ou propriétaires. Si certains choisissent de protéger ces pièces à grand renfort d'escouades, la majorité n'en fait rien. « Et attirer l'attention ? » J'interroge, un sourcil rehaussé. « Personne ne sait quand cette peinture quitte Brisbane, ni avec quelle compagnie maritime. Pourquoi mettraient-ils des gardes ? » Je hausse les épaules et ajoute, les yeux et la voix remplis de malice. « Comme le veut l'expression, le meilleur moyen de cacher quelque chose est de le laisser à la vue de tous… » Je peux le confirmer d'expérience, ayant moi-même usé de ce subterfuge à plusieurs reprises au cours des dernières années. Je suis ouverte à la discussion, aux interrogations quelles qu'elles soient, mais mon interlocuteur semble vouloir justifier la légitimité de ses doutes. J'esquisse un geste vague de la main, indiquant que cela est loin de me froisser, et entreprends de le rassurer. « Bien sûr que non, Amos, et vous le savez. Je ne vous demande pas d'avoir confiance en moi sans aucune raison. Mais si cela peut vous être d'un quelconque réconfort, sachez que si j'avais ne serait-ce qu'une infime appréhension sur cette mission, j'aurais envoyé quelqu'un d'autre. Pas un homme qui m'est redevable de trois cent cinquante mille dollars. » Car je ne fais pas de différence par rapport à la somme, qu'elle soit conséquente ou non. Je m'attends à retrouver chaque centime - à minima - dans tous mes investissements. C'est, à mon sens, la première règle du monde des affaires. Amos enchaîne sur les limites qu'il ne doit pas dépasser au cours de cette tâche, s'il vient à accepter d'en faire partie. « Aucun garde ne sera présent. » Je lui rappelle en premier lieu, mon regard convaincu plongé dans le sien. Je n'aurais pas pris tant de risques pour un tableau, quand bien même il s'agit de celui dont je rêve depuis de longues années. Mon équipe et moi-même avons fait notre travail de façon aussi minutieuse que précise. « Vous vous assurez que notre expert fasse bien ce que l'on exige de lui. Si besoin est - mais j'en doute - utilisez les informations de son dossier pour le motiver un peu. Rappelez-lui ce que nous avons sur lui, et par conséquent ce qu'il peut perdre en refusant de se montrer coopératif. Dans l'éventualité plutôt invraisemblable où il continuerait à poser problème, appelez-moi, et je me chargerai alors de la suite. C'est tout, Amos. Vraiment. »Et c'est sans le quitter des yeux une seconde que je conclus. « Je sais que vous ne pouvez pas m'offrir votre confiance. Il me faut la mériter, au même titre que vous devrez mériter la mienne. Mais je vous ai donné ma parole que rien ne remontera jusqu'à vous. Jamais. Et je n'ai qu'une parole, Amos. S'il en faut une, mon long et fructueux partenariat avec le Club en est une preuve suffisante, non ? » Sur ces entrefaites, je termine mon verre, laissant au propriétaire des lieux le soin de me transmettre sa décision finale. @Amos Taylor |
| | | | (#)Dim 30 Aoû - 19:47 | |
|
LONG LONG WAY
Bien sûr, j’ai revu l’échelle de mes valeurs suite au décès de ma fille. Pour mener à bien ne vengeance, c’est un impératif. Je ne pouvais décemment fomenter des plans pour détruire un homme en demeurant attacher à mon éthique. Mais, en plus de ne pas confondre le bien et le mal, je n’ai rien d’imprudent. Alors, je réfléchis. J’analyse le plan. Je cherche les failles. J’interroge afin que Maeve illumine les zones d’ombre de son plan. Il est hors de questions que je mette dans la gueule de loup. J’aurais bien trop à perdre et, en outre, ma confiance dévouée nécessite que je me sois pris d’affection pour mon interlocuteur. A défaut, je suis précautionneux. Certes, j’apprécie la femme d’affaires. Son franc parler est une donnée non négligeable. Elle est également intelligente et, tout comme Rae – bien que je ne les compare pas réellement – elle est sculptée dans du bois d’ébène, ce qui la rend fier, forte et susceptible de résister au vent de tempête. C’est une chance finalement, sinon sans doute aurais-je écourté cette discussion d’ignorer si je dois me sentir flatté de la foi qu’elle témoigne en mes compétences ou insulté qu’elle m’ait assimilé à un malfrat. Un instant, j’envisage qu’il s’agit d’un test et, d’emblée, mon amour du défi a statué sur un “oui, je vais le faire.“ Je n’en pipe mot cependant. J’écoute religieusement chacune des explications de mon interlocutrice. J’imprime, je veille à respecter ma perspicacité. « Parce que l’argent compterait plus que la discrétion, mais c’est un milieu dont j’ignore tout. » ai-je répliqué en haussant une épaule, réveillant au passage la douleur de mes côtes et le chatouillement de mon plâtre. Au moins en serais-je débarrassé le jour de la transaction. J’aurais trouvé dommage de refuser et de cracher sur l’opportunité de réduire ma dette auprès de cette femme. N’est-elle pas son meilleur argument, d’ailleurs ? La somme qu’elle m’a gentiment confiée n’est qu’une bagatelle pour son portefeuille. Le cas échéant, pour être riche il faut aimer l’argent, ce qui sous-entends que l’on n’enverrait ni derrière les barreaux ni à la mort l’un de ses débiteurs. J’ai donc souri discrètement et j’ai affirmé en dodelinant de la tête. C’est à présent acté, presque trop facilement et je ne l’écoute plus que d’une oreille distraite tenter de me persuader tandis que je me saisis de son verre pour le remplir à nouveau. Etonnamment, le mien n’est pas encore vide. J’ai ralenti depuis l’accident. Ceci étant, j’en verse un peu pour signer l’accord comme il se doit. « C’est entendu. Je lirai le dossier. » Je l’ai désigné du menton. Nul doute que c’est celui qui traîne sur la banquette depuis arrivée. « Que je sache où et quand appuyé si nécessaire. » ai-je conclu en levant mon contenant. Ne pouvons-nous pas trinquer ?
Sujet clôturé
|
| | | | | | | | MAEVE & AMOS ► LONG LONG WAY |
|
| |