J’ai été appelé par un certain Matthew McGrath. J’ai sourit, qu’est ce qu’il est con ce type. Il m’a appelé, et il aurait mieux valu pour lui qu’il passe un an en prison plutôt que de m’être redevable. Il savait que j’étais à Londres pour quelques jours ou semaines. Il a de la chance que j’ai répondu aussi, parce que c’est rare que je réponde aux numéros inconnus. Bref, j’ai pris la voiture avec chauffeur, parce que, bien évidemment, je n’ai jamais touché le volant d’une voiture à part le jour du permis. Et, on ne peut pas dire que j’ai réellement conduit ce jour là. J’ai fait passer les liasses de billets de ma main à celle de l’examinateur. Et je l’ai eu, qui ça étonne ?

On me dépose devant le commissariat, je ne peux m’empêcher d’avoir une mine de dégoût en regardant les gens qui se trouvent autour. Quelle horreur d’être mêlée à la foule, je déteste ça quand ce n’est pas pour aller dans les bars. Même dans les bars je préfère le coin VIP parce que j’y suis plus à l’aise. Et parce que je peux choisir qui va pouvoir passer la soirée avec moi aussi. J’aime contrôler tout ce qui m’entoure au cas où vous l’auriez pas déjà remarqué. J’hésite à faire demi-tour et à laisser croupir Matt dans sa cellule. Mais l’idée d’avoir le contrôle sur son futur proche m’amuse beaucoup. J’ai déjà mon plan, et je jubile rien qu’à y penser. Je rentre, je n’attends pas, est ce que je suis le genre de personne qui fait la queue ? Certainement pas. “Matthew McGrath, je veux le voir avant de payer quoi que ce soit.” Blablabla c’est pa autorisé, blablabla c’est pas comme ça que ça marche. Mais quand je glisse plusieurs billets à chacun des policiers autour de moi les portes s’ouvrent comme par miracle.

Et je me retrouve devant sa cellule, je me pose contre le mur. Tu crois que tu vas t’en sortir aussi facilement Matt ? Mon regard est malicieux, j’ai tout mon temps. Moi je suis du bon côté des barreaux. “Alors tu m’appelles à l’aide McGrath ?” Pourquoi pas une de ses soeurs ou ses parents ? “T’as intérêt à être le mec le plus parfait et le plus agréable de tous les temps si tu veux sortir d’ici.” Je place mes mains dans mon dos, mes yeux ne lâchent pas les siens.

C'était sa faute au gars en vrai. À tous les gars, nuance.

C'était leur faute et ils sont cons de pas l'avoir au moins assumé quand c'est moi qui s'est fait embarqué pour coups et attaques. Mais ils ont dit un truc ou fait un truc ou bougé un truc ou je sais pas, je sais plus. Je sais juste que je pue la clope et le whisky, que j'ai mal aux jointures et à la mâchoire, que ça goûte le fer dans ma bouche et que j'ai véritablement pas envie de me coucher sur leur lit de métal avec un matelas qui sent l'urine jusqu'à un kilomètre à la ronde.

“Alors tu m’appelles à l’aide McGrath ?” ouaiiiiis mais surtout je t'appelle parce que Jill est blasée de venir me sauver. Parce que Gin est à l'autre bout du monde - chez elle, en Australie - et parce que je sais qu'au moins si c'est toi qui est là, ça fera pas partie de la longue liste de choses que mes parents me reprochent et que ma famille me reproche et que le monde entier me reproche. Mais elle s'en fout Ivy, des vraies raisons, elle en a rien à battre de mes émotions toutes brouillées. « J'me suis toujours dit que tu serais canon sur un cheval blanc en mode prince charmant, que veux-tu. » vaut mieux jouer ses cartes donc, vaut mieux parler sa langue. C'est mieux comme ça.

“T’as intérêt à être le mec le plus parfait et le plus agréable de tous les temps si tu veux sortir d’ici.” sortir d'ici pour aller foutre quoi d'autre, hen Matt? J'ai pas envie de rentrer parce que ça veut dire croiser le regard du père déçu, de la mère angoissée. J'ai pas envie de rentrer parce que ça veut dire que j'ai encore une autre journée de merde au compteur de l'infinité qui n'en finit justement plus. Si elle a besoin de savoir ça, aussi? Jamais. « Tu pourrais saluer l'artiste au lieu de le critiquer. » que je roucoule, faussement idiot de service, me rapprochant des barreaux de métal qui nous séparent pour y ancrer mes doigts, y poser mon menton.

Mes prunelles la lâchent pas, la connerie ajoute un sourire en coin sur mes lèvres. « C'est la seule façon que j'ai trouvée pour avoir toute ton attention que sur moi. » c'est pas trop difficile, ça. La compétition est pas féroce, y'a un policier qui mange son poids en beignets dans l'angle, et y'a deux autres loques de types arrêtés pour je sais pas quoi qui somnolent en bavant derrière moi. Pourtant, l'excuse sonne parfaitement choisie à mes oreilles. « Ta soirée à toi était aussi nulle que la mienne pour que tu arrives ici aussi vite? »

Je sais pas ce que je viens foutre dans un endroit pareil. J’aurais pu envoyer quelqu’un en lui faisant promettre de sortir le McGrath de là et de raconter ça à personne. Mais non, j’ai appelé le chauffeur, j’ai donné l’adresse et on se retrouve au bon endroit. Et mon sourire conquérant sur mon visage reste bien en place quand je le vois le gamin assez con pour se faire choper derrière les barreaux. “Toi par contre tu fais une princesse de merde.” Il est mignon Matt, mais il est dans les compliments déguisés je suis dans les piques. C’est lui qui doit me convaincre, pas l’inverse. Moi je peux lui faire regretter jusqu’à la fin de son existence de m’avoir fait chier ce soir. “Par contre j’ai une limo et pas un cheval blanc j’espère que t’es pas déçu.” J’ai pas dit qu’il allait monter dans la voiture même si je finis par le faire sortir de là.

“Il a fait quoi l’artiste ?” Il a frappé ? Il a vendu ? Il a voulu faire son malin en tirant la langue à un flic et il s’est fait attrapé. Je me demande bien. Il s’approche des barreaux et moi je ne bouge pas. Je continue de le fixer, je ne baisse jamais les yeux. “C’est vrai que c’est original comme date.” Il a peut-être toute mon attention là. Il n’a pas vraiment de concurrence, c’est bien dommage. J’aurais peut-être pu trouver un délinquant pire que lui pour faire chier mon père. Il aime bien les McGrath, c’est dommage. Je fais un pas et je suis un peu plus proche des barreaux. De son visage à lui. “Elle est encore plus merdique depuis que t’as commencé à parler.” Je lève les yeux au ciel, faussement excédée. Je souffle, je suis au maximum de ma patience là non ? Je pourrais faire un signe de la main et lui souhaiter une bonne nuit. “Je te sors de là seulement si tu me proposes quelque chose de plus intéressant que te regarder chouiner ici !” Le défi dans le regard, on pourrait toujours passer la soirée ensemble loin de là s’il mettait son cerveau en mode on et qu’il réfléchissait.

“Toi par contre tu fais une princesse de merde.”
« Tu me blesses. »

Elle me blesse pas du tout Ivy, elle m'arrache un éclat de rire plutôt. Elle fait sa fière et elle fait sa piquante, mais elle a quand même tout abandonné pour venir à ma rescousse ce soir et peu importe l'angle dans lequel elle le jouera je sais facilement que mon égo va que se rappeler du fait qu'elle est ici et nulle part ailleurs. “Par contre j’ai une limo et pas un cheval blanc j’espère que t’es pas déçu.” « Tu vas partager? » elle fait genre je garde la réponse pour moi jusqu'à la fin et ça aurait le don d'en énerver plus d'un. Moi avec, mais je jure que ma voix est presque aussi détachée qu'elle-même tente de l'être.

La vérité, c'est qu'elle rage de pas avoir été là pour assister au spectacle, pour savoir pourquoi mes jointures sont dans un si piteux état. “Il a fait quoi l’artiste ?” et voilà qu'elle se vend la blonde, en posant la question qui lui brûle les lèvres d'envie. Mon menton se redresse, mes yeux restent bien plantés dans les siens, son pas que je remarque et mes mains qui s'agrippent aux barreaux pile dans son champ de vision. « Devine. » c'est pas très compliqué et elle le verra parfaitement, elle est aux premières loges. “C’est vrai que c’est original comme date.” son dédain paraît presque plus que son amusement, c'est qu'elle est cute quand elle essaie, faut lui donner. « Attends de voir la suite, t'es pas prête. » pourtant à ce jeu-là, j'ai gagné depuis longtemps.

“Elle est encore plus merdique depuis que t’as commencé à parler.” l'une de mes mains lâche les barreaux pour s'apposer sur mon coeur, tragiquement - et faussement - outré. La moue qui vient avec est si exagérée et si piteuse que j'éclate de rire la seconde d'après. “Je te sors de là seulement si tu me proposes quelque chose de plus intéressant que te regarder chouiner ici !” elle est proche Ivy, elle l'est assez pour que mes doigts quittent mon torse pour se faufiler vers elle, que mon bras s'allonge à travers les fentes des grillages et que je finisse par attraper le pan de sa veste. « T'as peur de chopper un truc si t'approches trop? » elle est délicate la tension de mes doigts refermés sur le tissu de ses vêtements. Presque.

Je roule des yeux, il commence certainement à me fatiguer. Il parle trop pour raconter n’importe quoi le McGrath. Je le blesse pas du tout. Il est du genre coriace Matt, il ne se vexe pas aussi facilement. Il serait bien moins drôle si c’était le cas. “Tu peux toujours courir derrière la voiture.” Je ne suis pas venue jusqu’ici pour rien. Même si la petite mine suppliante que j’ai vu au début aurait pu me suffir pour sortir de là sans l’aider. Je ne lâche pas ses yeux, mes bras restent croisés sur ma poitrine et j’attends. Je l’écoute, juste pour le fait qu’il parle trop les flics auraient pu le virer de cette cellule pour avoir la paix.

Les mains du brun s’entourent sur les barreaux, et je les vois ses jointures qui ont l’air d’avoir pris quelques coups. C’est qu’il a un côté bad boy ce McGrath. Je hausse un sourcil, je cherche la bonne réplique alors qu’un sourire en coin naît sur mes lèvres. Il veut jouer aux devinettes, et on peut faire ça longtemps j’en suis sûre. Tant que ça m’amuse il n’y a pas de raison pour que j’arrête ce cinéma. “T’as tapé dans un mur après avoir perdu une partie sur ta play et t’as fait tellement de bruit en pleurant que t’as été embarqué pour tapage nocturne ?” Je sais qu’il s’est battu, c’est l’explication la plus évidente, mais c’est bien moins amusant alors j’attends de longues minutes avant de donner la deuxième théorie. “Si tu veux que je sois impressionnée faudrait au moins que tu me dises que t’étais seul contre plusieurs types et qu’au moins deux ont fini à l’hosto, ou à la morgue. Sinon c’est terriblement ennuyant.” Il y a peu d’histoires du genre si on reste dans les hautes sphères du monde. C’est pour ça que ce soir, les histoires du McGrath m’intéressent.

“J’attends.” Et j’espère que la suite est aussi intéressante que ce qu’il a l’air de vendre. Il ne devrait pas la jouer comme ça Matt, il devrait savoir que je vais forcément être déçue parce que je vais m’imaginer le meilleur date du monde. Parce que oui c’est censé se transformer en date pour que ce soit intéressant non ? Je suis à une distance raisonnable des barreaux et de ses mains à lui. Pourtant, il vient attraper ma veste, et je ne bouge pas. Mais il sait comment parler, il sait quoi utiliser. “J’ai peur de rien.” Et c’est pour ça que je me rapproche de lui, et mon regard ne lâche pas le sien quand nos visages se retrouvent à seulement quelques centimètres. “Je te manquais trop ? Tu voulais me voir avant de finir sur la chaise électrique ?” Le sourire carnassier qui ne quitte toujours pas mon visage malgré la proximité. On en est pas à la chaise électrique, mais ça pourrait s’il continue à être chiant.

La cellule pue.
Les gars au fond de la cellule puent.
Le poste de police en entier où y'a la cellule pue.
Et le pire là-dedans, c'est que j'arrive pas à identifier ce qui pue le plus entre tout ça.

“T’as tapé dans un mur après avoir perdu une partie sur ta play et t’as fait tellement de bruit en pleurant que t’as été embarqué pour tapage nocturne ?” et elle, apparemment, elle a une meilleure tolérance que moi parce qu'elle fronce même pas du nez. À croire que dans la bourgeoisie, on a pas tous les mêmes capacités. « Presque. » c'est bien trop fun de la faire rager, c'est bien trop plaisant de la voir chercher. “Si tu veux que je sois impressionnée faudrait au moins que tu me dises que t’étais seul contre plusieurs types et qu’au moins deux ont fini à l’hosto, ou à la morgue. Sinon c’est terriblement ennuyant.” « Trois. Et y'en a deux autres qui doivent m'attendre dans la ruelle d'en face, avoue t'en frissonne déjà d'appréhension. » alors j'improvise ou du moins j'en ai l'air. Mais c'est ça la vérité, encore heureux que mon air de con additionné du pire sourire de merdeux que j'ai en banque rendent le tout un peu plus mystérieux pour encore un temps.

“J’attends.”
« Impatiente. »
“J’ai peur de rien.”
« Permets-moi d'en douter. »
“Je te manquais trop ? Tu voulais me voir avant de finir sur la chaise électrique ?”
« Bingo. »

Et elle s'est approchée, bon okay, je l'ai encouragée. « T'as pas plus envie que moi de passer ta soirée ici Ivy. » de joueur, mon ton finit par dériver vers quelque chose de bien plus sérieux. « Allez, paie ma caution et je t'en devrai une. » mes paupières battent la cadence, mes doigts remontent le long de son bras, font la course l'un avec l'autre au passage. C'est de la chair de poule que je sens, là, sur son bras? C'est à cause du contact ou à cause du dégoût pour l'odeur de la cellule qui lui monte enfin au nez quand elle en est si proche? « Tu vas adorer que j'ai une dette envers toi. »

Je me rapproche des barreaux pour voir à quel point il est désespéré le McGrath. Il ne peut compter que sur moi et oh que j’adore ça. J’aime avoir ce pouvoir, et je ne sais même pas encore si je vais vraiment le sortir de là. Je cherche des raisons pour lesquelles il est dans cet état, il est capable de beaucoup de choses le brun, et je sens que je vais être déçue si j’ai la véritable explication. “Oh donc je me mets en danger si je te sors de là.” Je m’en fiche, ça n’a aucune importance pour moi parce que personne n’osera jamais me toucher. Et s’ils ont le malheur d’arracher un seul cheveux ils pourraient passer le restant de leurs vies en prison.

Je ne me concentre pas sur ses mains qui passent le long de mon bras, tous les moyens sont bons pour sortir de cette cellule apparemment. Comme s’il pouvait m’avoir aussi facilement que toutes les connes qu’il a bien pu avoir comme copines. Il n’est pas de cette trempe là Matt, il n’est pas capable de gérer une fille comme moi. “Je te permets rien du tout.” Parce que je n’ai peur de rien et c’est ce que je crois être vrai depuis toujours. “Moi je rêve de te voir griller sur la chaise.” Mais je suis sûre qu’il n’a rien fait d’assez grave pour mériter un tel châtiment. Dommage. La prochaine fois peut-être.

“Je passerai pas la soirée ici.” Je me suis juste amusée à lui rendre visite pour lui montrer à quel point c’est beau l’extérieur et qu’il vaudrait mieux qu’il ne passe plus une seule nuit en cellule s’il veut continuer de profiter de la vie. Il y a une chose qui me tient ici, devant lui. Non ce n’est pas le frisson qui parcourt mon bras et ma colonne vertébrale. C’est ses dernières phrases. “Tu auras une énorme dette envers moi alors.” J’ai une dizaine de carte bleue dans mon sac, et je pourrais utiliser n’importe laquelle pour payer sa caution d’un montant plus que ridicule. “Un service, une dette, je peux te demander n’importe quoi n’importe quand.” Et c’est non négociable.                  

Le truc avec Ivy, c'est qu'elle parle, elle parle, et elle parle encore. J'avais oublié à quel point elle préfère le son de sa voix à celui des billets qui s'accumulent entre ses doigts, c'est étonnant avouez. J'aurais eu le temps de lancer cinq autres combats easy rien que durant le temps qu'elle prend pour se rapprocher des barreaux, et cinq suivants ça avant qu'elle n'étale les (ses) règles qui dicteront la suite. Suite que je n'écoute qu'à moitié, quand prendre une douche, gober mon poids en café et aller m'effondrer dans mon lit constituent la sainte trinité à travers laquelle je voudrais me complaire dans un futur plus ou moins rapproché. Elle m'en empêche depuis trop longtemps là, et mon sourire de joueur n'est plus du tout convaincu par ses envolées chiantes au possible. Elle fait chier.

Le truc, c'est que je pensais qu'elle jouerait un peu en venant me chercher ici, mais pas qu'elle en ferait une foutue partie de négociations sur le long terme à la con. L'endroit pue la sueur et la bière, elle a déjà dépassé son quota d'inspirations aussi dégoûtées que ses expirations et moi, je m'emmerde à ce qu'elle tourne autour du pot sans rien donner à sa suite. Le jeu est long, éreintant et fatiguant, au final. Elle devait vraiment passer une soirée encore pire que la mienne pour passer autant de temps ici que nulle part ailleurs. Presque triste.

“Un service, une dette, je peux te demander n’importe quoi n’importe quand.” « Ouais, okay, c'est bon, deal. » l'accord est pris au même moment où je soupire, un peu d'agacement, un peu d'exaspération aussi. Je veux juste dégager d'ici, et si ça ajoute mille tergiversations et tout autant de détours alors que je pourrais répondre à sa clause par de nouvelles blagues de merde, on en sera pas sortis que le soleil aura déjà fini de se lever.

Ma paume que je lui tends pour conclure l'entente. Ma peau est moite et mes jointures sont fendues, y'a rien de propret ici. Elle va sûrement se laver les mains pendant cent ans pour s'enlever l'impression d'avoir touché un sans-abris et ses microbes qui vont avec. « Quand t'es prête. » la prochaine fois, c'est sûr que c'est Jill que j'appelle.

Il joue Matt, mais, ce qu’il ne sait apparemment pas, c’est qu’il ne saura jamais jouer aussi bien que moi. Il attrape ma veste, manque de loucher en tentant de me lancer un regard séducteur et je rentre dans le jeu. Parce que c’est moi qui ai le pouvoir, là, tout de suite. C’est moi qui décide s’il sort de cette cage ou si je le regarde y rester pendant des heures encore en espérant qu’ils rajouteront des mecs dangereux dans sa cellule. Je penche la tête plusieurs fois, rapproche mon visage des barreaux sans être assez près pour qu’il tente de m’embrasser. Il en serait capable le McGrath, j’en suis certaine.

Il me doit quelque chose, un service, un défi, n’importe quoi, et cette idée me plaît. Je n’oublierai jamais ça, et il le sait le jeune homme. Il a promis, et je sais qu’il tiendra sa promesse. Il n’aura pas le choix de toute manière. S’il ose me dire non je laisserai l’enfer s’abattre sur lui sans avoir aucune pitié. « Ouais, okay, c'est bon, deal. » “Tu vas tellement regretter de m’avoir appelé un jour.” Je hoche la tête, la demande pourrait avoir lieu demain comme dans dix ans, mais elle aura lieu un jour. Un jour où il ne s’y attendra pas une seule seconde.

Je me recule, détache sa main de mes vêtements et regarde le policier qui doit se charger d’ouvrir la cellule.  « Quand t'es prête. » Je hoche la tête et la porte s’ouvre. On sort et je grimace. “Tu devrais déjà aller prendre une douche.” Je fronce le nez et m’éloigne de quelques centimètres du brun. “T’as de bons plans dans la ville ou ta soirée de délinquant t’a trop fatigué pour faire autre chose ?” Je ne connais pas grand chose à Londres, je ne connais pas souvent les villes dans lesquelles mes parents me traînent à longueur de temps. Ce soir, j’ai un chauffeur. J’ouvre la porte de la voiture, avant de me glisser à l’intérieur. “Tu viens ou tu comptes faire le tour de la ville en courant ?”

Ivy est d'une lourdeur, j'aurais jamais pensé que ça pourrait être encore possible venant d'elle qu'elle m'énerve plus qu'en l'instant. « Quand t'es prête. » j'insiste, je suis clair, suffisamment pas assez. “Tu devrais déjà aller prendre une douche.” parce qu'elle parle et qu'elle parle et qu'elle parle encore ; quel calvaire. “T’as de bons plans dans la ville ou ta soirée de délinquant t’a trop fatigué pour faire autre chose ?”  « Fais-moi sortir, on discute de la suite après. » que je coupe, court. Un peu brusque en l'état, va falloir que je fasse gaffe sinon elle risque de repartir en me laissant dans son sillage. La garce.

Et enfin, y'a la voiture. Le simple fait de respirer l'air de la nuit même si Londres est polluée comme rien fait du bien, c'est pour dire.  “Tu viens ou tu comptes faire le tour de la ville en courant ?” à question idiote s'ajoute mon sourire de jeune premier qui entre dans l'habitacle, docile comme tout. La voiture démarre et je me cale dans le siège à peine conscient de ce qui se dit, de ce qu'elle peut bien faire aussi. Le plan c'était qu'elle me sorte de là : le reste, j'ai oublié. « Va y avoir deux arrêts. » que je la coupe, ou ai l'impression de, alors que ma silhouette s'allonge pour s'adresser au chauffeur de la manière la plus brève que j'ai en banque. « Quoi, t'as dit que je devais prendre une douche. » je sentirais presque ses prunelles me brûler la nuque, anticipant au mieux.

Puis, la voilà la maison familiale. Le manoir McGrath de merde, dans lequel j'ai juste envie d'aller me perdre et d'oublier la soirée et tout le reste. Surtout le reste. « Rentre chez toi Ivy. » à titre d'argument supplémentaire, mon index pointe l'horizon comme si je m'adressais à une gamine d'à peine cinq ans. L'effet est condescendant au possible. « Le soleil se lève. » et en gage de remerciement ou de semblant de, c'est bruyamment que mes lèvres dégueulassement poisseuses d'alcool séché et de sang dans le même état  se plaquent sur son front, fraternel à foison. « J't'en dois une, ouais, ouais. »