| no one knows how far we’ll go (colleen) |
| | (#)Lun 6 Juil 2020 - 14:56 | |
| Colleen n’excluait pas la possibilité de participer une deuxième fois au concours de cheesecake. Non pas par esprit revanchard, son échec ne lui laissait aucun goût amer. Au contraire elle était ravie que Livia ait obtenu cette seconde place largement méritée, cela lui avait donné l’approbation nécessaire pour se lancer dans la vente à emporter de pâtisseries à l’épicerie, or l’Anglaise ne doutait pas un seul instant que ces nouveautés remporteraient un franc succès auprès de ses clients. A ses yeux, le concours n’avait été qu’un prétexte pour s’amuser et tenter de se dépasser dans le domaine culinaire. La pseudo rivalité qui avait existé entre Livia et elle n’avait fait que pimenter un peu les choses, et bien loin de créer des tensions au sein du duo elle n’avait fait que renforcer leur amitié. Alors pourquoi ne pas retenter l’expérience ? Pourquoi ne pas proposer à Marius de l’accompagner ? Colleen était consciente qu’elle se projetait, peut-être même un peu trop. Mais elle ne parvenait à se défaire de la certitude que Marius et elle seraient toujours en bons termes d’ici là. Il avait pris une telle place dans son cœur en si peu de temps qu’elle ne pouvait concevoir qu’il puisse disparaître de son quotidien du jour au lendemain. A ce titre, l’épisode du concours de cheesecake avait sonné comme une sérieuse prise de conscience. En imaginant Livia et Marius en couple, Colleen avait réalisé que les sentiments qu’elle avait développés à l’égard du professeur d’histoire des arts n’avaient rien de platoniques contrairement à ce qu’elle avait bien voulu admettre. Ce déclic lui avait fait l’effet d’une gifle, tant elle était parvenue à les camoufler et les ignorer jusque-là. Il y avait eu la soirée au Canvas bien sûr, mais elle avait mis son comportement sur le compte des piña coladas, se voilant la face d’excuses qui, en réalité, ne pouvaient pas tout à fait justifier l’attirance qu’elle avait ressentie pour lui ce soir-là. Puis la soirée passée à l’appartement, où ils s’étaient tous les deux livrés et où Marius lui avait fait comprendre qu’elle n’avait pas besoin de prétexte pour profiter de sa compagnie. Les mots étaient gravés dans la mémoire de la jeune femme : elle n’avait pas besoin de prétexte car il appréciait passer du temps avec elle, sans doute un peu trop si bien qu’il risquait d’y prendre goût. Elle avait compris qu’elle flirtait avec le danger à ce moment-là, que leurs confessions dépassaient le stade de l’amitié et étaient susceptibles de les amener sur un terrain glissant. Pourtant, elle avait une fois de plus refusé de voir la vérité en face et avait préféré nier ses sentiments naissants. Aujourd’hui, elle ne pouvait plus se permettre de les ignorer plus longtemps. Ils étaient bien réels, bien ancrés, et Colleen éprouverait bien des difficultés à s’en défaire.
« Pourquoi pas ? » Lui répondit-elle quand il évoqua une seconde édition. « C’était amusant, et ça le serait encore plus si tu y participais aussi ». Maintenant qu’elle savait qu’elle ne tiendrait pas la chandelle en présence de Livia et Marius, la perspective était un peu plus réjouissante. Les cupcakes qu’il avait cuisinés pour elle étaient vraiment délicieux, et s’il prétendait n’être capable que d’exécuter les recettes, ce n’était pas un problème. Un sourire malicieux se dessina sur les lèvres de Colleen. « Tu peux toujours être mon commis dans ce cas ? » Lui proposa-t-elle pour le taquiner. L’idée de donner des ordres à Marius était étrangement alléchante pour elle qui ne possédait pourtant pas une once d’autorité en temps normal. Surtout en présence d’un homme. Des années de mariage avec August l’avaient poussée à se laisser dominer plutôt qu’à dominer. Et même si le contexte qu’elle proposait ici n’avait rien de tendancieux, elle ne pouvait s’empêcher d’être titillée par cette possibilité. A vrai dire, elle imaginait parfaitement Marius en tenue d’apprenti cuisiner, avec la toque, le tablier et tout le tralala. L’image s’était déjà imposée à elle quand il avait admis passer régulièrement du temps derrière les fourneaux, et elle était particulièrement plaisante. « Par contre il faudra que tu puisses suivre le rythme… ». Un sourire espiègle flottait sur ses lèvres. Il était si simple de colorer ses propos de sous-entendus alors qu’elle n’en avait même pas eu l’intention au départ. « Et que tu t’armes de patience, aussi, parce que je suis du genre à changer d’avis toutes les dix secondes en cuisine. Si tu es prêt à endurer ça… On devrait pouvoir s’arranger ». En réponse à son clin d’œil elle lui en adressa un à son tour. « Mais on a le temps de voir venir d’ici là, le prochain concours n’est pas prévu avant un an ». Qui sait ce que l’avenir leur réservait ? Même si elle peinait à imaginer un futur dont Marius serait absent, cela ne signifiait pas pour autant qu’elle avait raison.
Le ton, léger jusque-là, changea lorsque Colleen ouvrit enfin le cadeau qu’il avait emballé pour elle. L’émotion la gagna immédiatement quand elle découvrit son œuvre. Il avait visé juste une fois de plus, en choisissant de peindre une aquarelle représentant sa maison et de lui en faire cadeau pour son anniversaire. Elle peinait toujours à réaliser qu’il avait passé autant de temps à réaliser cette aquarelle. Quand d’autres se seraient contentés de lui offrir un cadeau banal – un sac, de la vaisselle ou une carte cadeau – Marius s’était montré particulièrement soucieux de lui faire plaisir, en organisant carrément un après-midi complet au cours duquel les surprises s’enchaînaient. La main dans la sienne, Colleen bafouilla quelques mots de remerciements, l’émotion lui nouant la gorge et l’intensité du regard que Marius posait sur elle bloquant ses pensées. Elle parvint néanmoins à retrouver une certaine contenance quand il évoqua les nouveaux voisins de la jeune femme, et elle répliqua en faisant référence à l’absence de rideaux. Le pouce de Marius caressa la paume de sa main et elle ne put empêcher un frisson de la traverser. Une fois n’est pas coutume, elle se perdit dans l’intensité de son regard et Dieu seul savait ce qui aurait pu en résulter s’il n’avait pas brisé l’instant en évoquant son trente-huitième anniversaire prévu le lendemain et en l’interrogeant sur le programme de la journée. Colleen trébucha du petit nuage sur lequel elle avait flotté ces dernières minutes et son regard se voila aussitôt d’appréhension. Elle savait qu’elle aurait dû lui parler avant de Race of Australia, mais l’occasion ne s’était jamais présentée et elle n’avait pas forcé les choses. Désormais, il lui était impossible de reculer l’échéance. Si elle allait loin dans l’aventure – ce dont elle ne pouvait s’empêcher de douter malgré tout – elle serait partie pour un mois et demi. Six semaines sans voir Lou, sans travailler à l’hôpital, sans vivre à Brisbane. Sans contacter Marius. Il ne s’y attendait probablement pas, et c’était ce qui rendait sa tâche plus ardue. Mais elle se lança. Parce qu’elle n’avait pas le choix, parce qu’elle ne pouvait taire plus longtemps ses projets, elle lui confia son départ imminent et lui expliqua le concept de l’émission. La réaction de Marius ne se fit pas attendre : il dégagea sa main des siennes, brisa leur connexion et jura à voix haute. Dire que Colleen ne s’était pas attendue à une telle réaction était un euphémisme. Elle se figurait bien qu’il ne serait pas ravi. Peut-être même qu’il ne comprendrait pas les raisons qui la poussaient à participer à une telle émission. Aux yeux de nombreuses personnes il ne s’agissait que de télé-réalité après tout, ni plus ni moins. Mais cela ne justifiait pas la réaction de Marius pour autant. Elle lisait la colère froide dans son regard, l’irritation dans les traits tendus de son visage. Cela contrastait tellement avec son comportement jusque-là que Colleen ne comprit pas quelle mouche l’avait piqué.
Sourcils froncés, l’expression chagrinée, elle eut un mouvement de recul. Lui révélait-il son vrai visage ? Elle n’avait jamais pris Marius pour quelqu’un de colérique, ni de possessif d’ailleurs, et elle avait beau se creuser les méninges pour tenter de trouver une explication rationnelle à son attitude, ses efforts demeurèrent vains. Lorsqu’il détacha les mains de son visage, son regard croisa le sien. Et les prochains mots qu’il prononça ne firent qu’accentuer son trouble. Elle allait lui manquer ? C’était donc ça, son explication ? C’était insensé ! Si c’était vrai il avait une drôle de manière de le lui prouver. Elle préféra garder le silence plutôt que de remettre en question son aveu, ne sachant définitivement plus sur quel pied danser. Puis il lui parla de son frère qui participerait à la même émission. Cette fois la surprise fit dresser les sourcils de Colleen. A sa connaissance Marius n’avait qu’un frère, celui dont il lui avait parlé quelques semaines auparavant, Tommy. Pourtant, elle avait beau réfléchir Colleen ne voyait toujours pas ce qui posait problème. Son frère participait à Race of Australia aussi, et alors ? Ce départ ne le soulageait-il pas ? Ne venait-il pas de lui dire qu’il pourrait profiter de Moïra pendant la durée de sa participation à l’émission ? Il devrait être ravi de cette opportunité qui se présentait à lui. Elle en resta perplexe. « Je ne comprends pas, Marius. Je ne comprends pas ta réaction. Qu’est-ce que ça peut bien faire que ton frère participe aussi à l’émission ? Ça n’a aucune importance, si ce n’est que justement cela te permettra de profiter de Moïra. D’après ce que tu m’as dit l’autre soir, j’ai plutôt l’impression que c’est une très bonne chose pour toi, non ? ». A quoi rimait tout cela ? Elle n’en avait pas la moindre idée, la raison lui échappait. Et sa perplexité ne fit que grimper quand il lui conseilla de profiter à fond de son aventure. Un instant il lui caressait la main, l’autre il la repoussait. Il s’était énervé, lui avait dit qu’elle lui manquerait, avait mentionné son frère, Moïra, et maintenant il lui disait de profiter de l’aventure ? Qu’est-ce qui se passait ? « J’avais bien l’intention d’en profiter… Il faut que tu comprennes que ce n’est pas une décision que j’ai prise à la légère » Se défendit-elle. « Je ne me suis jamais lancée dans une expérience pareille, j’ai à peine voyagé en trente-huit ans. Jusqu’à il y a quelques mois, je n’avais même jamais quitté l’Europe. J’ai passé tellement de temps enfermée dans un quotidien monotone, fade, sans intérêt… Je me suis tellement ennuyée. J’en ai besoin, Marius. J’ai vraiment besoin de découvrir autre chose et de repousser mes limites. Je garde la tête sur les épaules malgré tout, je sais que ce ne sera pas facile, je sais que je me lance dans l’inconnu et que cela ne me plaira peut-être pas. Mais si je ne le fais pas, je sais aussi que je le regretterai et je ne suis pas prête à ajouter cette déception à la longue liste de regrets que j’ai déjà ».
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| | | | (#)Mar 7 Juil 2020 - 13:22 | |
| Te projeter, ce n’était clairement pas ton truc. Tu n’aimais pas imaginer trop à l’avance ce qui pourrait se passer car cela t’amenait souvent à espérer des choses qui ne se réalisaient jamais. Alors tu préférais vivre au fil du temps, sans essayer de t’imaginer dans un an ou deux. Le seul domaine dans lequel tu imaginais ce genre de perspectives était le domaine professionnel mais dans le domaine de ta vie privée et en particulier de ta vie sentimentale, tu préférais ne pas te projeter trop sérieusement tant que tu n’avais aucune raison de le faire. En te parlant du prochain concours de cheesecake, Colleen venait de te laisser entendre que vous seriez toujours en contact l’année prochaine et en assez bon termes pour participer de nouveau à ce concours. Il était vrai que maintenant que tu avais la jeune femme dans ta vie, tu imaginais mal ne plus la voir, ni lui parler. Mais tu avais ressenti la même chose avec Alice alors tu voulais te montrer plus prudent. Toutefois, malgré tout ce que ton cerveau pouvait te dire et essayer de nier, ton attachement à la femme qui te faisait face était bien réel et ne faisait que grandir tous les jours un peu plus. Même si tu avais envie de penser que la laisser te filer entre les doigts ne serait pas un problème, tu savais que ce n’était pas le cas, pas du tout même. Si tu étais réservé sur ta participation à la prochaine édition du concours c’était plus parce que tu ne pensais pas avoir un réel talent de pâtissier qu’autre chose. Pas par fausse modestie. Les cupcakes étaient bons mais reproduire une recette n’était pas si difficile que ça à tes yeux. « Pourquoi pas ? C’était amusant, et ça le serait encore plus si tu y participais aussi » Etant né dans une famille où la compétition entre ses membres était constante, tu avais tout de suite détourné ton attention de toute compétition sportive en grandissant et puis ensuite de toute compétition tout court. La seule que tu acceptais était la compétition universitaire car tu voulais être parmi les meilleurs de ton domaine mais pour les autres pans de ta vie, tu avais fui la compétition comme la peste. Pourtant, tu savais que cela pouvait être amusant des fois. « Tu peux toujours être mon commis dans ce cas ? » Tu n’y avais pas du tout pensé mais cela pourrait être un bon compromis en effet. Imaginer la douce Colleen se transformer en chef cuisinière intransigeante fit apparaître un petit sourire sur tes lèvres. Cette idée aurait fait se dresser les poils de ta mère mais tu n’avais pas le moindre souci avec l’idée de suivre les ordres d’une femme. Cela faisait longtemps que tu n’étais plus prisonnier de cette vision réductrice que ta mère vous avait transmise. En y repensant, tu trouvais cela ironique car tu avais toujours pensé que ta mère en faisait autant voire plus que ton père en restant à la maison. « Par contre il faudra que tu puisses suivre le rythme… Et que tu t’armes de patience, aussi, parce que je suis du genre à changer d’avis toutes les dix secondes en cuisine. Si tu es prêt à endurer ça… On devrait pouvoir s’arranger. Mais on a le temps de voir venir d’ici là, le prochain concours n’est pas prévu avant un an » Les paroles de Colleen semblaient tentées de sous-entendus que tu relevais mais que tu ne comptais pas commenter. Il y avait un temps pour tout et l’occasion se présentera certainement de prouver à la demoiselle en face de toi que tu n’avais aucun problème pour suivre le rythme que ce soit en cuisine ou ailleurs. Si Colleen changeait d’avis toutes les deux minutes, ce n’était pas ton cas et peut-être que ce serait la force de votre duo si vous finissiez par le mettre en place. « Entendu pour faire un essai comme ton commis. Le fait que le concours ne soit pas pour tout de suite nous laisse le temps de nous entraîner pour être certains d’être compatibles. » Dis-tu à la jolie brune avec un petit sourire en coin sur les lèvres. Toi aussi tu pouvais jouer au jeu des sous-entendus. Une partie de toi espérais d’ailleurs que ces sous-entendus ne resteraient pas seulement cela … Secouant la tête, tu te reconcentrais sur Colleen qui ouvrit ton cadeau et il sembla émouvoir la jeune femme tout en lui plaisant ce qui était le but recherché. Chercher le contact physique avec Colleen te sembla nécessaire et c’est sa main que tu attrapais pour la serrer dans la tienne. En demandant à la jeune femme ce qu’elle avait prévu pour son anniversaire avec sa fille le lendemain, tu ne t’attendais pas à l’annonce qui allait t’être faite.
Il avait suffi de quelques mots pour venir briser d’un seul coup la bulle dans laquelle vous vous étiez installés depuis la fin du cours de surf. Colleen allait participer à Race of Australia. Colleen allait participer à cette satanée émission aux côtés de ton frère … Ton sang ne fit qu’un tour et ce fut une douche froide immédiate. Le visage blessé de Colleen quand tu dégageais les mains de ton visage firent immédiatement monter en toi une forme de culpabilité car elle n’y était pour rien. Et surtout, elle ne comprenait pas. Quand tu lui avouais la participation de ton frère, tu t’attendais à ce que son visage s’éclaire, qu’elle comprenne mais cela ne fut pas le cas. Ses sourcils ne firent que plus se froncer et si tu avais besoin d’une preuve supplémentaire que tu venais de la blesser, le ton qu’elle employa ne laissait aucun doute possible : « Je ne comprends pas, Marius. Je ne comprends pas ta réaction. Qu’est-ce que ça peut bien faire que ton frère participe aussi à l’émission ? Ça n’a aucune importance, si ce n’est que justement cela te permettra de profiter de Moïra. D’après ce que tu m’as dit l’autre soir, j’ai plutôt l’impression que c’est une très bonne chose pour toi, non ? » Il n’y avait aucun doute à ce sujet. Le départ de ton frère pour le tournage et l’emménagement temporaire de ta nièce étaient deux évènements qui n’annonçaient que de bonnes choses pour toi. Comme Colleen le soulignait, tu allais pouvoir profiter de ta nièce pendant au minimum une semaine, peut-être bien plus en fonction de l’évolution de ton frère dans l’aventure. Mais là, tout de suite, ce n’était pas à ça que tu pensais. La dernière fois que Tommy avait rencontré une femme importante pour toi, il s’était enfui avec elle à l’autre bout du monde. Colleen n’était pas Alice, tu le savais très bien et cela semblait peu probable que Tommy tombe sous le charme de Colleen alors qu’il avait tant de mal à faire le deuil d’Alice comme tu avais pu le constater quelques semaines plus tôt. Pourtant, une partie de toi ne pouvait s’empêcher d’envisager cette possibilité. C’était plus fort que toi, c’était une peur que tu avais en toi depuis longtemps. Tu n’avais jamais eu de relation avec une femme assez importante pour lui présenter ta famille dysfonctionnelle donc tu n’avais pas eu à faire face à ce genre de situation auparavant. Le fait que tu considérais Colleen comme une femme assez importante pour rencontrer ta famille aurait peut-être dû t’alarmer mais cela semblait être le cadet de tes soucis pour l’instant. « Tu as raison, c’est une bonne chose pour moi car je vais passer du temps avec Moïra. Mais ce n’était pas de ça que je parlais. » Maintenant que tu devais verbaliser ta peur, essayer de l’expliquer à Colleen, tu te rendais compte qu’elle allait lui sembler complètement folle. Pourtant, certaines blessures laissent des traces … « La dernière fois que Tommy a rencontré une femme qui était … important pour moi, ils s’envolaient pour le Canada quelques mois plus tard. » Dis-tu presque à demi-mot mais assez fort pour que Colleen l’entende. Elle connaissait ton histoire, tu étais certain qu’elle comprendrait exactement où tu voulais en venir. tu préférais ne rien ajouter, la laisser réagir à cette information que tu lui donnais plutôt que de parler trop pour ne faire qu’aggraver ton cas. Parce que tu pouvais voir que Colleen était blessée et elle comptait bien se défendre de tes attaques, qu’elle pensait dirigées vers autre chose. « J’avais bien l’intention d’en profiter… Il faut que tu comprennes que ce n’est pas une décision que j’ai prise à la légère. Je ne me suis jamais lancée dans une expérience pareille, j’ai à peine voyagé en trente-huit ans. Jusqu’à il y a quelques mois, je n’avais même jamais quitté l’Europe. J’ai passé tellement de temps enfermée dans un quotidien monotone, fade, sans intérêt… Je me suis tellement ennuyée. J’en ai besoin, Marius. J’ai vraiment besoin de découvrir autre chose et de repousser mes limites. Je garde la tête sur les épaules malgré tout, je sais que ce ne sera pas facile, je sais que je me lance dans l’inconnu et que cela ne me plaira peut-être pas. Mais si je ne le fais pas, je sais aussi que je le regretterai et je ne suis pas prête à ajouter cette déception à la longue liste de regrets que j’ai déjà » Il n’avait jamais été question pour toi de dissuader la jeune femme de se lancer dans l’aventure. Tu n’avais aucun droit de lui demander une chose pareille et cela ne t’avait pas traversé l’esprit. Tout ce qu’elle venait de te dire, tu t’en doutais. Si Colleen avait accepté de participer à une émission de télé-réalité, ce n’était pas pour voir sa tête sur un petit écran. C’était pour autre chose. Elle ne t’avait jamais caché son envie de liberté, son besoin d’aventures. Un besoin que tu ne partageais pas du tout mais cela ne t’empêchais pas de le respecter malgré tout. Tu ne voulais pas que Colleen se méprise. Tu n’étais pas en train de la juger, ta réaction n’était l’expression que de tes démons. Ceux que tu arrivais à canaliser la plupart du temps mais qui semblaient se réveiller désormais. « Je ne cherche pas à te dissuader de partir et si c’est important pour toi de faire cette aventure, tu as raison de participer. C’était le but de ta nouvelle vie à Brisbane n’est-ce pas ? Un renouveau et de nouvelles expériences ? » Tu voulais lui prouver que tu l’avais écoutée mais surtout que tu l’avais comprise. L’idée de la dissuader ou de l’empêcher de faire quoi que ce soit n’était jamais apparue dans ton esprit. Bien sûr qu’elle allait partir dans cette aventure, ce sera à toi de gérer tes peurs et tes démons. « Tu n’as pas à te justifier, si c’est la bonne décision pour toi, c’est la seule chose qui importe. » Oh elle allait terriblement te manquer … Tu savais par ton frère que tout contact pendant l’aventure sera impossible alors ce sera de longues semaines sans Colleen … « Tu vas rencontrer de bons amis à moi également. J’en ai deux qui ont été sélectionnés et ma meilleure amie présentera l’émission. » Finis-tu par dire. Oui, tu n’allais pas participer à Race of Australia mais tu te sentais presque aussi impacté par cette aventure que les participants eux-mêmes.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Jeu 9 Juil 2020 - 14:56 | |
| Une seconde plus tôt il lui offrait le plus touchant des cadeaux, la suivante il la repoussait. Une seconde plus tôt il s’exprimait avec légèreté, la couvait d’un regard taquin et chargeait ses propos de sous-entendus – Colleen n’avait pu réprimer le sourire qui ne demandait qu’à prendre possession de ses lèvres lorsqu’il avait évoqué cette histoire d’entraînement et de compatibilité – la suivante il se braquait, jurait, faisait tomber le masque. Car c’était bien de cela dont il était question, n’est-ce pas ? Un masque ? Marius avait-il joué un rôle depuis le début, celui du gentleman doté des meilleures intentions, celui de l’homme blessé par son passé tragique… Celui qui, lentement mais sûrement, était parvenu à l’apprivoiser, à craqueler la carapace pourtant solide qui protégeait son cœur ? Était-elle si naïvement tombée dans le panneau ? S’était-elle laissée berner par sa faculté à toujours déceler le meilleur chez les autres ? Marius n’était-il donc qu’une copie conforme d’August ? August qui, des années auparavant, était parvenu à tromper sa vigilance en gommant ses imperfections afin de se montrer sous son meilleur jour. August dont le vrai visage ne lui était apparu que bien plus tard. Orgueilleux, impatient, jaloux, possessif. Elle l’avait aimé avec une rare dévotion, aveuglée par son affection, et la claque qu’elle avait reçue en ouvrant finalement les yeux des années plus tard n’en avait été que plus monumentale. Était-elle donc vouée à répéter inlassablement le même schéma ? A se méfier, douter, accepter, aimer, se bercer d’illusions, puis admettre la vérité quand le mal était déjà fait, et comprendre trop tard qu’une fois de plus elle aurait mieux fait de s’en tenir à ses résolutions premières.
Cela en avait tout l’air. Les modèles étaient bien trop similaires pour qu’il ne puisse s’agir que d’une simple coïncidence. Tout portait à croire qu’elle s’était fait berner. Que les apparences s’étaient révélées, une fois de plus, trompeuses. Et pourtant, envers et contre tout, Colleen ne pouvait se résoudre à le croire. Marius se tenait là, face à elle, froid, incroyablement distant, le regard dur. Sa réaction aurait dû la mettre davantage sur ses gardes, elle aurait dû prendre ses jambes à son cou quitte à repartir en bus vers Brisbane, seule et le moral en berne. Mais elle lui laissait le bénéfice du doute malgré tout. Elle avait besoin qu’il puisse lui apporter une justification rationnelle à tout cela, car au fond d’elle elle refusait de croire qu’il n’en existait aucune. Elle ne pouvait décemment pas se tromper à chaque fois. Son comportement la blessait, la chagrinait, soulevait tout un tas de doutes et d’interrogations dont elle se serait bien passée. D’un autre côté, céder à son instinct initial qui avait été de fuir n’était pas non plus la solution. Elle était sur le point de quitter Brisbane, peut-être pendant six semaines au total si elle parvenait à aller jusqu’au bout de l’aventure. Comment pouvait-elle laisser les choses en plan de la sorte ? Elle se connaissait suffisamment pour anticiper sa réaction : elle ruminerait tout au long de ces semaines passées loin de lui et laisserait son imagination vagabonder et créer les pires scénarios qui soient – scénarios qui, à n’en pas douter, s’éloigneraient de plus en plus de la réalité. Il y avait de fortes chances que cette mésaventure avec Marius gâche complètement le plaisir qu’elle était susceptible de prendre lors de son épopée à travers l’Australie. Pouvait-elle l’envisager ? La réponse était non.
Alors elle prit son courage à deux mains. Mâchoires crispées, le regard voilé, elle exprima son incompréhension à voix haute. Elle ne comprenait pas sa réaction, la raison de cet emportement si soudain. Faisait-il preuve de possessivité à son égard ? Ou s’agissait-il d’autre chose ? Elle évoqua Tommy, Moïra, sans parvenir à faire le lien. Sans saisir là où il venait en venir quand il avait mentionné ces prénoms un instant plus tôt. Tout portait à croire que Marius se réjouirait de la garde de sa nièce au départ de son frère pour la course, et pourtant ce n’était guère ce qu’il laissait sous-entendre. Une fois ses incertitudes levées, elle lui laissa la parole. Elle espérait sincèrement qu’il n’éluderait pas ses questions car elle pensait mériter son honnêteté. Et il finit par lui donner ses explications. Des explications dont la nature la décontenança : il lui dit qu’elle avait raison et qu’il considérait la garde de Moïra comme une opportunité inespérée de passer du temps avec elle, mais que ce n’était pas ce qui avait motivé sa colère. Il mit le doigt sur ce qui le dérangeait, à savoir le fait qu’il la considérait comme étant suffisamment importante à ses yeux pour redouter sa rencontre avec Tommy. Car la dernière fois qu’une telle chose s’était produite, ne s’était-il pas fait voler la vedette par son cadet ? Cette hypothèse n’avait jamais effleuré l’imagination de la brune et lui fit ouvrir de grands yeux ébahis. Deux enseignements bien distincts se dégageaient de cet aveu : d’une part, il admettait qu’elle comptait pour lui. D’autre part, qu’il soit encouragé par ses propres craintes ou un manque de confiance en elle, il redoutait qu’elle puisse tomber sous le charme de Tommy. Comment pouvait-il imaginer une chose pareille ? Bien sûr qu’elle ne pouvait pas contrôler ses affinités, personne n’en était capable et elle qui n’avait jamais rencontré Tommy auparavant pouvait difficilement prétendre qu’elle ne pourrait pas l’apprécier. Mais de là à ce qu’il imagine qu’elle puisse être suffisamment cruelle pour laisser l’histoire se répéter, la frappait de stupéfaction. Ne comprenait-il donc pas à quel point elle s’était attachée à lui ? Bon sang, était-il aveugle au point de ne pas le voir ? Elle-même avait mis du temps à l’accepter mais désormais elle était incapable de faire marche arrière et d’ignorer plus longtemps la teneur de ses sentiments, de sa curiosité, de son attirance, à son égard.
Son regard s’adoucit. « Marius, tu es un idiot » Énonça-t-elle simplement en secouant la tête et en roulant des yeux. « Ce n’est pas parce que je participe à la même aventure que ton frère qu’on va tomber amoureux l’un de l’autre ! Comment peux-tu imaginer que je te ferais un truc pareil ? ». Elle en était incapable, elle en avait la très ferme conviction. Nul ne pouvait prévoir l’avenir, mais elle savait en son for intérieur qu’elle ne serait jamais capable de le blesser de la sorte. Et même si elle admettait, ne serait-ce qu’un bref dixième de seconde – c’était le temps maximal qu’elle pouvait accorder à cette réflexion – qu’elle puisse effectivement être attirée par Tommy, jamais elle ne succomberait à cette attirance au risque de trahir Marius. Elle n’avait pas la moindre intention de lui asséner un tel coup de poignard dans le dos. Alors elle tendit la main vers lui, la posa délicatement sur sa joue et l’obligea à la regarder droit dans les yeux. « Regarde-moi Marius, et écoute-moi. Je te promets que ça n’arrivera pas. Toi aussi tu es important pour moi. J’aurais préféré le contraire, crois-moi, ça aurait été beaucoup plus simple pour moi si je ne m’étais pas attachée à toi. Mais c’est trop tard, et il faut que tu me croies quand je te dis que ce que tu es en train d’imaginer, là-dedans… ». Elle fit remonter sa main vers sa tempe qu’elle tapota affectueusement. « Ce que tu es en train d’imaginer, ça n’arrivera pas » Conclut-elle avec fermeté. Sa main s’attarda sur sa peau et ses yeux sur les siens quelques secondes supplémentaires, le temps pour elle de s’assurer que le message était bien passé. Puis ses doigts se détachèrent sagement de son épiderme et elle s’écarta pour qu’ils puissent se tenir à une distance plus raisonnable l’un de l’autre. Une distance qui apaisait les battements de son palpitant et lui permettait de considérer les choses avec davantage de lucidité.
Demeurant malgré tout sur la défensive, elle lui révéla les raisons qui l’avaient poussée à accepter de participer à l’émission. Elle ressentait un besoin irrépressible de s’évader, de faire des rencontres, de découvrir cette culture qui, même après presque une année entière passée sur le sol australien, continuait de lui échapper. De dépasser ses limites, de se prouver qu’elle était capable de s’en sortir dans des conditions différentes de celles qu’elle avait toujours connues. Elle n’était pas motivée par l’appât du gain, par la prime hebdomadaire versée aux candidats ou les cent mille dollars réservés au binôme vainqueur. Elle n’en avait cure de tout cet argent, elle tout ce qui l’intéressait vraiment était la nature même de l’expérience. Cette notion d’inconnu qui l’attirait inexorablement depuis qu’elle s’était libérée des chaînes de son mariage, depuis qu’elle avait pris la décision de tout plaquer du jour au lendemain pour quitter l’Angleterre et s’envoler à des milliers de kilomètres pour débuter une nouvelle vie.
Marius sembla saisir le message et il lui fit part de sa compréhension à cet égard. Elle fut rassurée de constater que contrairement à ce qu’elle avait appréhendé l’espace de quelques instants, il ne cherchait pas à la retenir à Brisbane. Sa réaction n’avait donc été motivée que par la seule perspective d’imaginer Colleen et Tommy dans la même aventure. « Oui » Fit-elle en réponse à ses questions. « C’est important pour moi, j’en ai vraiment besoin » Répéta-t-elle. Car c’était bien de cela dont il était question : un besoin. Plus qu’une envie, une lubie, un intérêt passager, il s’agissait ni plus ni moins d’une aspiration si profondément ancrée en elle qu’il lui était impossible de s’en défaire. « Je sais que c’est la bonne décision ». Il admit que d’autres amis à lui participeraient à l’émission, dont sa meilleure amie qui présenterait justement l’émission. Colleen haussa les sourcils, étonnée. « Ah oui ? Comment s’appellent-ils ? ». Soit le monde était petit, soit le cercle d’amis de Marius à Brisbane s’étendait au-delà de ses espérances. « Je ne serai pas vraiment seule dans ce cas ». Elle esquissa un sourire. « Et toi non plus, d’ailleurs. Avec Moïra à tes côtés tu vas pouvoir tellement en profiter que le temps passera en un claquement de doigts, tu verras ». Marius lui avait déjà exprimé l’importance que revêtait sa nièce à ses yeux, et l’émission représentait une aubaine pour lui dans la mesure où il pourrait passer un temps précieux avec elle – en espérant, bien entendu, que Tommy soit éliminé le plus tard possible de l’émission. « Et pour ta gouverne, toi aussi tu vas me manquer ».
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| | | | (#)Sam 11 Juil 2020 - 12:04 | |
| Cette après-midi étaient censée être remplie uniquement de bons moments. Tu avais encore du mal à croire que l’atmosphère avait changé aussi rapidement et que tes doigts qui jouaient avec ceux de Colleen quelques minutes plus tôt étaient désormais dans tes cheveux et sur ton visage alors que tu essayais de digérer la nouvelle qu’elle venait de t’annoncer. Jamais tu n’aurais pensé que Colleen se lancerait dans une émission de télé-réalité et tu avais eu raison de le penser car son inscription était due à Lou apparemment. Tu n’étais pas surpris que son profil ait attiré les yeux des producteurs et encore moins ceux de May. Tu n’as jamais caché à ton amie que tu ne comprenais pas du tout pourquoi elle voulait absolument percer dans ce milieu mais si elle en était ici aujourd’hui c’était qu’elle devait avoir l’oeil pour sélectionner les bons candidats et faire de l’audience. Colleen était la candidate inespérée très certainement. Le profil que l’on n’a pas l’habitude de voir dans sa télévision et qui pourra permettre à beaucoup plus de téléspectateurs de s’identifier. De la même manière, tu étais à peu près certain que si un jour l’idée te venait de participer à ce type d’émission, ton profil attirerait assez le regard pour au moins te permettre de passer un casting. Mais tu n’avais jamais cherché à être connu de cette manière, tu préférais vivre ta vie tranquillement, dans l’ombre et concrètement, devoir mettre les mains dans le cambouis pour traverser l’Australie te faisait frissonner de dégout plus qu’autre chose. Toi, quand tu voyageais, tu avais besoin de dormir dans des hôtels pleins de charmes ou de beaux Airbnb. Ton frère avait toujours été celui qui aimait la nature. Toi, tu aimais l’observer mais tu n’avais aucun attrait pour la côtoyer de près. Toutefois, contrairement à Colleen, tu avais déjà voyagé et visité l’Australie et plusieurs endroits dans le monde. Quand tu avais des conférences à l’étranger, tu essayais de garder quelques jours pour visiter la ville dans laquelle tu te trouvais. Or, ton interlocutrice n’avait pas pu vivre ce genre d’aventure et tu comprenais qu’elle ait envie de se découvrir. Cela ne voulait pas dire que c’était plus facile pour toi à accepter. Tu aurais aimé pouvoir passer au-dessus de ton histoire, pouvoir lui sourire et l’assurer que tu la soutenais à cent pour cent. Mais cela aurait été mentir et tu avais été trop surpris par son annonce et les images qu’elle avait fait apparaître dans ton esprit pour cacher ta véritable réaction. Tu aurais aimé avoir mis cette histoire avec Alice derrière toi et ne plus avoir peur de présenter qui que ce soit à ton frère mais là encore, ce n’était pas aussi simple que ça. En y réfléchissant bien, ton frère ne connaissait rien de ton entourage. Il devait se douter que tu avais des amis, des collègues mais au mieux, il en entendait parler, au pire, il ignorait leur existence. Et cela était réciproque. Tu ignorais qui faisait parti de la vie de ton frère. Des fois, Moïra parlait de quelqu’un dans une histoire mais cela ne t’aidait en général pas beaucoup. Le seul moment où vos vies se croisaient c’était avec Moïra ou chez vos parents. Les deux seuls liens qui vous empêchait de couper totalement les ponts comme cela serait arrivé si votre famille n’avait pas voulu à tout prix vous réconcilier.
Tes soeurs et ton frère pensaient que tu étais ce grand frère invincible et supérieur à eux que personne ne pouvait arrêté. La vérité était toute autre. Tu n’avais jamais eu une confiance en toi débordante. Le seul domaine dans lequel tu n’avais jamais douté était tes études et ensuite ta carrière professionnelle. Là, tu connaissais ta juste valeur. Mais dans tes relations avec les autres, c’était une autre histoire … Qu’avais-tu à offrir de plus qu’un autre ? Qu’avais-tu à offrir de plus que ton frère ? Alice avait répondu à ces questions pour toi ou du moins, tu avais considéré qu’elle y avait répondu car tu n’avais pas dit un mot à Alice depuis qu’elle était venue t’annoncer être amoureuse de ton frère et leur départ pour le Canada. Si elle était encore parmi vous, tu lui aurais sans doute posé la question aujourd’hui mais cela ne servait à rien d’espérer quelque chose qui n’arriverait jamais. Tu n’arrivais pas à te convaincre que tu avais assez à offrir pour gagner une bataille quotidienne face aux hommes qui entraient dans la vie de Colleen. Que ce soit ton frère ou un autre d’ailleurs. Mais tu avais envie d’y croire pour une fois, d’essayer d’être assez pour quelqu’un sans te perdre de vue non plus. Tu n’étais pas la personne la plus facile à vivre et tes blessures étaient profondes mais tu avais envie de les surmonter, tu n’y étais juste jamais arrivé auparavant. Voilà pourquoi tu essayais de faire comprendre à Colleen ton point de vue, ce qui t’avait fait passer de l’homme tendre à l’homme fermé en quelques secondes. Tu ne voulais pas la blesser, ce n’était pas ton intention mais tu l’avais fait quand même … Quand les mots sortirent de ta bouche, tu vis le regard de Colleen s’adoucir et tu soupirais doucement de soulagement. Tu n’avais pas envie de la perdre, pas à cause de tes peurs irrationnelles. Tu ne manquais pas les yeux qu’elle leva au ciel alors qu’elle te disait : « Marius, tu es un idiot. Ce n’est pas parce que je participe à la même aventure que ton frère qu’on va tomber amoureux l’un de l’autre ! Comment peux-tu imaginer que je te ferais un truc pareil ? » Ce n’était pas rationnel justement, le problème était bien là. Tu savais que même si ton frère était charmant, il était peu probable qu’il charme Colleen et que celle-ci en tombe amoureuse. Ni lui, ni toi n’étiez les mêmes et Colleen n’était pas Alice, une Alice qui était encore très présente dans les pensées de ton frère. Mais la peur sera toujours là, quoi que puisse en dire la jolie brune en face de toi parce que tu es incapable de la contrôler. Tu frissonnais quand les doigts de Colleen se posèrent sur ta joue et tu posais ton regard bleu azur dans ses beaux yeux alors qu’elle te disait : « Regarde-moi Marius, et écoute-moi. Je te promets que ça n’arrivera pas. Toi aussi tu es important pour moi. J’aurais préféré le contraire, crois-moi, ça aurait été beaucoup plus simple pour moi si je ne m’étais pas attachée à toi. Mais c’est trop tard, et il faut que tu me croies quand je te dis que ce que tu es en train d’imaginer, là-dedans… Ce que tu es en train d’imaginer, ça n’arrivera pas » Le contact de sa peau contre la tienne te permettait de ne pas laisser ton esprit se perdre encore dans des images qui te paralysaient. Colleen t’encrait dans le présent et te forçait à l’écouter. Les mots qu’elle prononçait s’imprimaient doucement dans ton esprit mais ils faisaient petit à petit leur chemin. Il y avait quelque chose de rassurant dans le fait de l’entendre dire qu’elle aussi s’était attachée à toi. Les battements de ton coeur s’accélérèrent à cette idée car tu n’étais pas habitué à intéresser qui que ce soit sur le long terme. Colleen s’éloigna de toi et tu retins un geste pour la rattraper. C’était sans doute mieux ainsi car ses doigts contre ta peau t’avaient donné de nouveau envie de poser tes lèvres sur les siennes, désir simple mais brûlant qui se faisait de plus en plus imposant. « Je sais que rationnellement tu as raison et j’ai confiance en toi mais cette peur, je ne peux pas la contrôler, c’est … » Il allait falloir que tu apprennes à avoir confiance en ce que vous étiez en train de construire, peu importe ce que c’était. Ce n’était pas le moment de définir votre relation par des mots, surtout pas quand Colleen allait disparaître pendant plusieurs semaines. Mais cela ne changeait rien au fait que ton affection pour elle ne faisait que grandir. « Merci, j’avais besoin de l’entendre. Je … Je pensais que j’avais surmonté tout cela mais il semblerait que non. C’est à moi d’apprendre à le gérer. » Dis-tu en haussant les épaules. Colleen n’y était pour rien et ne pouvait rien pour toi à ce niveau-là. Ce sera à toi de travailler sur toi-même car même si cela n’avait pas été lors de cette émission, Colleen aurait forcément rencontré Tommy à un moment donné non ? Tu ne t’étais pas projeté jusque là, préférant garde ta famille loin de tes relations, amicales comme amoureuses, le plus longtemps possible.
A tes yeux, Colleen aurait pu trouver une autre manière de vivre des aventures et de visiter l’Australie mais si elle voulait participer à cette émission et si elle pensait que c’était une bonne chose à faire alors elle devait le faire. Tu comprenais qu’elle soit sur la défensive après ce qu’elle t’avait confié sur ton mari. Mais tu ne cherchais pas à la retenir même si tu avouais que tu aurais préféré qu’elle reste à Brisbane pour pouvoir continuer à la voir régulièrement. Toutefois, tu n’étais plus un adolescent, tu savais être patient et le retour de Colleen à Brisbane n’en sera que plus fort quand l’aventure sera terminée. « Oui. C’est important pour moi, j’en ai vraiment besoin. Je sais que c’est la bonne décision » Tu hoches la tête et tu restes silencieux. Colleen était assez grande pour prendre ses décisions toute seule et si elle partait le lendemain, elle l’avait déjà prise bien avant de t’en parler. De toute manière, tu n’avais pas ton mot à dire. Tu lui confiais donc qu’elle allait rencontrer des amis à toi, peut-être même faire l’aventure avec eux car tu avais bien trop de personnes de ton entourage qui participaient à l’émission. « Ah oui ? Comment s’appellent-ils ? Je ne serai pas vraiment seule dans ce cas. Et toi non plus, d’ailleurs. Avec Moïra à tes côtés tu vas pouvoir tellement en profiter que le temps passera en un claquement de doigts, tu verras » Un petit sourire apparut sur ton visage car tu ne doutais pas que vivre avec ta nièce allait être un challenge maintenant qu’elle avait onze ans. Mais tu savais déjà que cela allait bien se passer et tu comptais en profiter avant que ton frère ne rentre et que tu ne la vois plus que de temps en temps comme c’était le cas actuellement. « Tu as certainement dû rencontrer May qui présentera l’émission, j’ai cru comprendre qu’elle avait géré le casting. Puis il y a Liam que j’ai rencontré à l’université où il étudiait l’archéologie. Il enseigne et bosse au musée désormais. Et tu rencontreras Gregory que j’ai rencontré à Paris. Il a un caractère de cochon mais il sera toujours là quand tu as besoin de lui. » Lui dis-tu un sourire amusé sur le visage. Ton ami avait ses défauts mais il avait surtout d’importantes qualités. « Et pour ta gouverne, toi aussi tu vas me manquer » L’aveu de Colleen fit apparaître un sourire amusé sur tes lèvres mais il cachait le fait que tu étais heureux et soulagé de l’entendre prononcer ces mots. Parce qu’elle n’était pas encore partie que tu savais déjà qu’elle allait terriblement te manquer. C’est fou comme quelqu’un pouvait prendre une place aussi importante dans ta vie en quelques mois seulement. « Raison de plus pour profiter pleinement de ce moment de répit avant le début de la course. » Dis-tu à Colleen très sincèrement. Tu n’avais pas envie que cette journée si magique jusqu’ici se termine sur une note teintée de malaise et de regrets. Non, vous étiez venus ici pour fêter l’anniversaire de la jeune femme et c’était ce que vous alliez faire. Instinctivement, tu te rapprochais de Colleen à la recherche de ce contact perdu par ta faute. Dans tes yeux, il ne restait plus rien de la peur qui reviendra une fois qu’elle sera partie mais qui pour l’instant s’était envolée. Parce que tu ne pouvais pas résister, tu attrapais une mèche de ses cheveux que tu repoussais derrière son oreille et si tes doigts s’attardèrent légèrement sur sa joue et le peau douce de son cou, ce n’était pas si grave n’est-ce pas ?
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Dim 12 Juil 2020 - 18:24 | |
| La réaction de Marius arracha à Colleen un profond soupir de soulagement. Elle ne s’était donc pas trompée sur son compte. Toutes les incertitudes qui s’étaient immiscées clandestinement dans son esprit quand il l’avait repoussée s’envolèrent aussi vite. Il ne cherchait pas à la retenir à Brisbane. Il ne s’agissait pas de jalousie, ni même de possessivité, et cette conclusion rassurait profondément Colleen. Si les intentions de Marius avaient été celles qu’elle lui avait prêtées quelques minutes plus tôt, elle n’aurait eu d’autre choix que de renoncer à tout ce qu’ils avaient progressivement construit. A tout ce qu’ils pouvaient continuer de bâtir, ensemble. Colleen ne tirait pas de plans sur la comète. Elle refusait d’envisager quoique ce soit avant que cela ne se produise véritablement. C’était comme un instinct, un instinct de conservation, un instinct étroitement lié à son désir de se protéger. Elle avait tiré les enseignements de ses échecs passés et refusait obstinément de se projeter au risque d’écorcher son cœur déjà bien abîmé. Elle qui, jusque-là, avait même exclu la seule éventualité d’une relation amoureuse. Elle persistait à penser que son bonheur ne dépendait pas d’un homme, qu’elle était parfaitement capable de mener sa barque sans l’aide de quiconque. Qu’en réalité, l’amour n’était qu’un leurre capable de vous briser, de vous anéantir lorsque les choses ne se passaient pas comme prévu. Le vécu de Colleen en la matière l’empêchait d’envisager sereinement un futur amoureux paisible, dénué de conflits. Elle était effrayée à l’idée de se perdre une nouvelle fois, de mettre ses propres aspirations de côté pour contenter l’égo d’un homme qui, lui, serait parfaitement capable de les poursuivre sans une once de culpabilité. De s’enfermer dans un quotidien qui ne pourrait jamais pleinement la satisfaire, de se sentir prisonnière d’une relation dont le manque d’équilibre en deviendrait malsain. Elle portait les stigmates du fiasco qu’avait été son mariage. Un an après avoir formulé son besoin de divorcer et de reprendre les rênes de sa propre vie, la vérité était qu’elle portait toujours ses désillusions en bandoulière et qu’elle ne pouvait tout simplement pas envisager essuyer un nouveau revers aussi douloureux.
C’était la raison pour laquelle elle avait tant nié ce qui se passait entre Marius et elle, ce qui menaçait de se produire s’ils poursuivaient sur la même lancée. Elle n’avait pas prévu leur rencontre, n’avait pas prévu de s’attacher à lui et encore moins de développer des sentiments pour lui. Mais c’était sans compter sur l’obstination tenace du destin qui en avait décidé autrement et les avait poussés l’un vers l’autre à plusieurs reprises. Et si l’on disait que le hasard faisait généralement bien les choses, était-ce le cas pour ces deux-là ? Pouvaient-ils véritablement avancer dans la même direction, unir leurs cœurs fêlés ? Risquer une énième déception, pour l’un comme pour l’autre ? Colleen, qui était pourtant de nature optimiste et avait tendance à absolument tout idéaliser, ne pouvait s’empêcher d’éprouver quelques doutes à ce sujet. Elle avait conscience que le chemin parcouru était déjà conséquent, que le fait qu’elle soit parvenue à s’ouvrir était déjà un miracle en soi et qu’il lui serait d’autant plus difficile de revenir en arrière à présent. Mais cela signifiait-il pour autant qu’elle oserait s’aventurer sur ce territoire inconnu ? Qu’elle pouvait faire fi de ses réticences pour débuter quelque chose ? Elle n’avait aucune certitude à ce sujet, oscillant sans cesse entre le oui et le non – le oui quand elle se trouvait face à Marius et que son regard éliminait à lui seul sa prudence coutumière, le non quand elle gambergeait seule chez elle et se rappelait ses déconvenues passées. Quand le souvenir d’August continuait à la tourmenter. Avait-elle seulement le choix, néanmoins ? La raison et le cœur se livraient toujours une bataille acharnée, et plus les minutes passées auprès de Marius s’égrainaient, plus le cœur gagnait du terrain. Son cœur, qu’elle venait de lui ouvrir en lui expliquant à quel point elle s’était déjà attachée à lui, même si elle s’en serait bien abstenue en toute honnêteté. La main posée sur sa joue, une lueur déterminée illuminant le bleu de ses yeux, elle prit le temps de lui expliquer qu’elle ne serait jamais capable de tromper sa confiance de la manière qu’il imaginait. Et elle lui fit un aveu dont elle fut la première surprise : il était trop tard pour envisager faire marche arrière. Là, tout près de lui, sa peau contre la sienne, ses yeux dans les siens, elle comprit que c’était impossible.
Ses doigts glissèrent sur sa peau puis elle les détacha à contre-cœur, parce que c’était plus raisonnable pour elle comme pour lui. Pour autant, ses yeux restèrent bien ancrés dans les siens et quand il lui révéla qu’il savait pertinemment qu’elle avait raison mais qu’il ne pouvait pas s’affranchir de cette crainte qui continuait de le torturer, la fragilité qu’elle lut dans son regard l’ébranla profondément. Que pouvait-elle répondre à un constat pareil ? Son instinct la poussait à poser une nouvelle fois ses mains sur son visage, son index sur ses lèvres pour le faire taire. Elle voulait le rassurer, lui dire que tout finirait bien par s’arranger, qu’elle serait là pour s’en assurer. Le prendre dans ses bras, comme elle l’avait fait des semaines auparavant, nicher son visage dans le creux de son cou et s’enivrer de son parfum. Au lieu de quoi elle resta silencieuse un instant, la gorge nouée, les bras ballants. A le regarder. A ressentir sa peine. Jusqu’à ce que les mots s’imposent naturellement à elle et traversent ses lèvres sans qu’elle ait la sensation d’en contrôler ni le flot ni la portée. « Tu finiras par y arriver. Fais-toi confiance, ça viendra ». Et d’ajouter : « Je n’ai pas l’intention de t’abandonner, Marius. Même si je pars demain et que je ne sais pas quand je reviendrai, à mon retour, tu pourras compter sur moi ». C’était la vérité, ce départ pour Race of Australia était une occasion inespérée pour elle de repousser encore un peu plus ses limites, mais elle y voyait également une opportunité de faire le point sur elle et cette relation qu’elle ne parvenait pas à définir avec Marius. Le fait d’être loin de lui plusieurs semaines – si toutefois elle allait loin dans l’aventure – lui permettrait de considérer les choses avec plus d’objectivité. Quand il était là, près d’elle, elle était incapable d’en faire preuve, ses résolutions s’effondrant à son contact. Mais à des kilomètres de Brisbane, elle avait bon espoir d’y parvenir.
Après avoir réaffirmé à Marius son besoin d’évasion et d’aventure, il évoqua d’autres personnes dans son entourage qui participaient elles aussi à l’émission. Dont la présentatrice, qui semblait être une très bonne amie à lui. May Glitters. La mention de ce nom rafraîchit la mémoire de l’Anglaise qui acquiesça. Il avait raison : elle avait eu l’occasion de la croiser pendant le casting, qu’elle avait en partie dirigé. Elle ne savait pas que c’était elle qui s’apprêtait à présenter l’émission en revanche, elle le découvrait à l’instant. Puis il lui parla de deux autres candidats, Liam et Gregory, candidats qui cette fois n’évoquaient rien de particulier à la jeune femme. Il avait rencontré le premier à l’université, et le second à Paris. Colleen ne connaissait ni l’un ni l’autre, mais qui sait ? Peut-être que l’un d’entre eux deviendrait son binôme pour l’aventure, et puisque Marius insistait sur le caractère de cochon de Gregory, elle avait tendance à espérer que Liam serait son partenaire. « Je me souviens de May, elle avait l’air sympa » Fit-elle. « Par contre je n’ai croisé aucun des autres candidats. Je pense qu’il y aura neuf binômes en tout alors j’ai peu de chance de me retrouver avec Liam ou Gregory, mais ce serait amusant si c’était le cas ». Elle s’abstint d’indiquer qu’en suivant cette logique il y avait également peu de chances qu’elle se retrouve avec Tommy, préférant éviter soigneusement de le mentionner à nouveau. Elle craignait que cela ait pour effet immédiat d’effacer le sourire qui étirait les lèvres de Marius depuis qu’elle avait parlé de Moïra. Or elle n’avait pas la moindre envie que son regard se voile une nouvelle fois d’anxiété. Au contraire, elle voulait apercevoir ces petites ridules qu’elle affectionnait tant au coin de ses yeux quand ils redeviendraient rieurs, elle tenait à maintenir cette ambiance qui était redevenue plus légère. Alors en écho à l’aveu qu’il lui avait fait quelques minutes plus tôt, elle se lança à son tour et admit qu’il allait lui manquer. Parce qu’il ne s’agissait que de la vérité, d’une part, mais aussi parce qu’elle savait que cette confession ne ferait pas disparaître son sourire et qu’il s’accrocherait même avec plus de force sur ses lèvres. Et elle ne s’était pas trompée. Sa réaction dépassa même ses espérances. Non seulement il souriait, non seulement il la contemplait de ses yeux rieurs, mais il confia aussi son envie de profiter de ces quelques heures qui restaient avant son départ. Colleen frissonna quand il se rapprocha d’elle, et son cœur se mit à cogner jusque dans ses tempes lorsqu’il s’empara d’une mèche de ses cheveux pour la glisser derrière son oreille. Ses doigts frôlèrent sa joue, puis s’attardèrent un instant dans son cou. Le contact était à la fois doux et électrique, tous ses sens étaient en alerte. Elle était à peu près certaine qu’il pouvait sentir son pouls s’emballer sous son toucher. Elle ne réagit pas immédiatement cependant, incapable d’esquisser le moindre geste, craignant qu’il ne s’éloigne d’elle. Ses yeux quittèrent les siens pour glisser sur son visage et s’arrêter sur ses lèvres. Cette bouche qu’elle avait eu l’audace de caresser au Canvas, mais qu’elle n’avait osé embrasser que dans ses songes. Cette bouche qu’elle brûlait de goûter. Elle hésitait, pourtant. Un signal d’alerte s’était enclenché dans son cerveau, elle savait que si elle réduisait la distance entre eux elle atteindrait un point de non-retour. Céder à l’appel de ces lèvres était tentant, mais était-ce vraiment raisonnable ? Non. Pouvait-elle se le permettre ? Peut-être. En avait-elle envie ? Cela ne faisait pas l’ombre d’un doute. Elle pensait beaucoup trop, Colleen. C’était plus fort qu’elle, elle n’était pas de celles qui se lançaient sans songer aux conséquences au préalable. Si c’était le cas, elle n’aurait pas attendu tout ce temps. Dès la soirée au Canvas, elle aurait sauté sur l’occasion. Mais encore une fois, était-ce raisonnable ?
Plusieurs secondes défilèrent. Elle ne quitta pas ses lèvres des yeux, hésitant toujours quant à ce qu’il convenait de faire. Et puis les doigts de Marius glissèrent juste en dessous de son oreille, atteignant un point particulièrement sensible, et elle n’y tint plus. Au Diable la raison. Au Diable les précautions. Au Diable toutes ces bêtises ! Elle tendit le cou et ne s’arrêta que lorsque son nez frôla le sien. Elle posa sa main sur sa joue, planta son regard dans le sien et le scruta à la recherche d’une forme d’approbation. Ce ne fut que lorsqu’elle crut la déceler qu’elle s’autorisa enfin à poser ses lèvres sur les siennes. Timidement d’abord, les effleurant plus qu’elle ne les embrassait véritablement, puis avec davantage de conviction quand elle comprit qu’il ne l’arrêterait pas. Ses lèvres se mêlèrent aux siennes et les découvrirent. Elles avaient le goût de l’océan, le goût du sel, le goût de l’inconnu. Alors que la première s’éternisait sur sa joue, sa deuxième main se posa sur son épaule et remonta jusqu’à sa nuque. Elle n’avait plus la moindre notion de temps. Peut-être que l’étreinte dura une seconde. Peut-être qu’elle dura une minute. Peut-être cinq. Elle n’en savait rien et la vérité était qu’elle s’en fichait complètement. Quand elle détacha ses lèvres des siennes, à contre cœur, elle rouvrit les yeux et sentit ses joues s’empourprer. « Je… ». Je quoi ? Elle ne savait pas quoi dire. Parce qu’elle n’avait qu’une seule envie, recommencer.
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| | | | (#)Lun 13 Juil 2020 - 13:57 | |
| C’était dans ces moments-là que tu maudissais Alice et surtout, tu regrettais qu’elle soit décédée avant que vous n’ayez eu le chance de discuter de ce qui s’était passé toutes ces années auparavant. Bien trop fier et trop blessé à l’époque, tu n’avais pas voulu entendre ses explications. Tu n’étais même pas certain que si tu l’avais laissée s’expliquer ton cerveau aurait enregistré ses paroles tellement que tu te sentais trahi et en colère. Mais aujourd’hui, tu aurais aimé avoir la possibilité d’en parler avec elle, de comprendre. Parce qu’il était possible que ce choix qu’elle avait fait n’était pas de ton fait, que ce n’était pas toi qui avais fait quelque chose qui n’allait pas. Et puis, malgré les tords d’Alice, tu aurais préféré que Moïra grandisse avec sa mère, qu’elle connaisse cette femme merveilleuse qui l’avait mise au monde. Mais avec des si on refait un monde … Echanger avec Alice sur le passé t’aurait permis d’aller de l’avant de manière plus sereine. C’était cependant impossible alors il allait falloir que tu te fasse confiance, chose que tu n’avais pas réussi à faire depuis longtemps. Ou peut-être n’avais-tu tout simplement pas essayé. Tu te souvenais de cette dispute que tu avais eue avec ta mère il y a plusieurs années. A l’époque où tu acceptais des rencontrer les jeunes femmes qu’elle sélectionnait pour toi. C’était lui faire un procès bien injuste que de l’accuser de t’arranger des rencontres avec des jeunes femmes horribles. Ta mère te connaissait bien, trop bien peut-être et certaines des femmes que tu avais rencontrées étaient tout à fait charmantes. Mais il y avait toujours un moment où tu te désintéressais, où tu préférais les laisser filer plutôt que de t’engager dans quoi que ce soit. Cela avait mis ta mère hors d’elle et elle n’avait pas hésité à te balancer à la figure que tu ne pouvais pas laisser Alice te retourner le cerveau, qu’elle était avec ton frère et ne reviendrait pas et qu’il était temps que tu te concentres sur autre chose. Il y avait eu d’autres accusations également ce qui t’avait amené à ne pas voir tes parents pendant plusieurs mois. Mais ta mère avait raison. Tu n’avais jamais fait l’effort de mettre Alice derrière toi, pour personne. Pourtant, pour Colleen, tu en avais envie. Plus que ça, tu comprenais enfin que tu en avais besoin. Les marques qu’elle avait laissées sur ton coeur et sur ton histoire ne pourront pas toutes être effacées. La manière dont tu avais réagi à l’annonce de Colleen en était la preuve mais tu pouvais essayer. Tu te devais d’essayer si tu voulais construire quelque chose avec la jolie brune qui te faisait face. Il avait fallu du temps mais tu comprenais enfin où ta mère voulait en venir, tu comprenais ce qu’elle avait essayé de te faire réaliser mais que tu avais été trop aveugle pour voir toutes ces années auparavant. Réussiras-tu à refermer le chapitre Alice pour aller de l’avant ? Tu n’en sais rien mais l’absence de Colleen ces prochaines semaines te permettra de réfléchir à la meilleure manière de le faire. Tu as déjà commencé, en abordant ce sujet avec ton frère. Pour la première fois de ta vie, tu avais fait preuve de courage et de retenue. Tu avais lancé le sujet en sachant très bien qu’il pouvait faire exploser tout ce que vous aviez construit ces derniers mois mais tu savais aussi que ne pas en parler, au moins une fois, ne vous permettrait pas d’aller de l’avant complètement. Et ton frère t’avait surpris quand il ne s’était pas énervé. Oh ses paroles n’avaient pas été tendres mais vous aviez discuté de ce sujet comme des adultes avant de vous mettre d’accord sur le fait de ne plus jamais en parler à part à la demande de Moïra.
La surprise que tu avais préparée aujourd’hui pour l’anniversaire de Colleen n’était pas subtile. Tu avais toujours été un romantique dans l’âme et Jacob s’était gentiment moqué de toi quand tu lui avait parlé de ton idée de cadeau. Mais tu n’avais pas envie de cacher l’intérêt que tu portais à Colleen. Tu ne savais pas vraiment où vous alliez et ce que tu pouvais espérer mais tu ne te projetais pas trop loin. Rien que le fait qu’elle accepte de te revoir te suffisait à faire battre ton coeur un peu plus vite. Vous jouiez avec le feu car tu n’étais pas certain qu’elle soit prête pour quoi que ce soit après son divorce et peut-être que toi non plus tu n’étais pas prêt mais tu ne voulais pas la laisser te filer entre les doigts. C’est ce que tu avais fait avec Evelyn, tu avais eu peur de ce qu’elle te faisait ressentir alors tu l’avais repoussée au loin. Avec Colleen, tu ne voulais pas faire la même erreur. Au lieu de la repousser, tu avais envie de l’attirer un peu plus vers toi, de laisser le bout de ses doigts découvrir chaque trait de ton visage mais pas uniquement de ton visage. Comme lors de votre soirée chez elle, tu confiais à Colleen tes peurs et tes inquiétudes sans hésitation. Parce qu’elle devait comprendre que c’était contre toi que tu te battais intérieurement. Tu vis la peine dans ses yeux, cette tristesse face au constat qu’elle ne pouvait pas t’aider, que cette épreuve tu devais l’affronter seul. Tu laissais ses doigts se balader sur ton visage, ces doigts qui te permettaient de ne pas te perdre dans la spirale infernale de tes peurs et de tes angoisses. « Tu finiras par y arriver. Fais-toi confiance, ça viendra. Je n’ai pas l’intention de t’abandonner, Marius. Même si je pars demain et que je ne sais pas quand je reviendrai, à mon retour, tu pourras compter sur moi » C’était la promesse, jusqu’ici implicite, que vous vous faisiez depuis le début de l’après-midi. Peu importe le temps qui s’écoulera entre aujourd’hui et votre prochaine rencontre, il y aura une prochaine rencontre car ni l’un, ni l’autre, vous n’envisagiez la possibilité de ne pas vous revoir. Et entendre ces paroles dans la bouche de Colleen, c’était un soulagement. Pas complet parce qu’Alice t’avait fait des promesses elle aussi mais il était temps que tu acceptes que Colleen n’était pas Alice et que tu lui fasses confiance sur ce plan là aussi. « Le plus important c’est que tu reviennes. » Lui dis-tu en guise de réponse. Le tournage de l’émission n’allait pas durer des mois et des mois, l’aventure se déroulait sur cinq semaines, c’était ce que t’avait dit May donc Colleen reviendrait et c’était à ce retour que tu comptais te raccrocher.
Maintenant que tu avais affirmé à Colleen que tu ne cherchais pas à la retenir à Brisbane et la priver de nouvelles aventures, l’atmosphère se détendit à nouveau et tu avouais à la jeune femme qu’elle n’allait pas rencontrer seulement ton frère mais d’autres personnes de ton entourage proche comme May, Liam ou Gregory. « Je me souviens de May, elle avait l’air sympa. Par contre je n’ai croisé aucun des autres candidats. Je pense qu’il y aura neuf binômes en tout alors j’ai peu de chance de me retrouver avec Liam ou Gregory, mais ce serait amusant si c’était le cas » Elle avait autant de chance de se retrouver avec l’un d’eux que n’importe qui d’autre dont Tommy. Mais cela ne servait à rien de remuer le couteau dans la plaie, ni elle, ni toi n’aviez aucune influence sur la composition des binômes de cette aventure donc il faudra faire avec, peu importe le résultat final. Tu ris légèrement quand Colleen te dit que May avait l’air sympa. Oh elle l’était avec toi. Mais il ne fallait pas se faire l’illusion, May comptait avant tout faire de l’audience et mener son aventure d’une main de maître, tu n’étais pas certain qu’elle soit toujours vue comme sympa par les participants à ces émissions qu’elle adorait caster et animer. « Fait attention à toi, May compte avant tout relever d’une main de maître le défi de la présentation de cette émission, c’est une vétérante, elle sait exactement ce qui fait de l’audience et sa carrière est plus importante que tout le reste, même si fille. Je l’adore, c’est une amie extraordinaire mais je suis heureux de ne pas la connaître au boulot. » Avouais-tu à Colleen. Tu ne pensais pas que May ferait des choses horribles mais les producteurs arrangeaient souvent les choses un peu à leur manière dans ces productions donc tu préférais prévenir Colleen pour qu’elle soit attentive. Contrairement aux jeunes de la nouvelle génération qui recherchaient à se mettre en scène, Colleen voudrait sans doute maîtriser un peu ce qui allait transparaître derrière la caméra.
Quand Colleen t’avoua que toi aussi tu allais lui manquer, tu fus rassuré, bien plus qu’elle ne le pensait très certainement. Tu étais rassuré de savoir que ce manque allait être partagé et pas à sens unique. Colleen avait pris une place importante dans ta vie, peut-être trop importante mais tu n’avais pas envie d’arrêter cette course exponentielle. A la place, tu avais envie de profiter de ces derniers instants avant cette séparation dont vous ignoriez tous les deux la durée exacte. Tu laissais tes envies prendre le dessus et tu replaçais une mèche de la jeune femme derrière son oreille laissant tes doigts s’attarder sur sa peau. Tu n’avais plus envie de briser le contact, tu avais envie de l’accroitre mais tu ne bougeais pas d’un pouce. Tu sentis le pouls de Colleen s’accélérer sous tes doigts, accompagnant le tient qui résonnait dans tes oreilles, bloquant tous les bruits qui vous entouraient, vous enfermant dans une bulle hermétique où tout semblait se passer a ralenti et où soudain, tout semblait possible. Tu vis le regard de Colleen descendre sur tes lèvres et son regard se voila légèrement alors que tes doigts caressaient toujours sa peau pour venir s’arrêter sous son oreille, la faisant frissonner mais surtout la mettant en action. En une poignée de secondes, le nez de Colleen frôlait le tient, son regard cherchait au fond du tient l’approbation pour continuer, pour vous octroyer le droit de ce contact dont vous rêviez depuis des semaines sans vous octroyer le droit de le réaliser. Tu lui donnais cette approbation, du moins tu l’espérais et quelques secondes plus tard, les lèvres de Colleen exploraient les tiennes. Timidement dans un premier temps mais plus entreprenantes ensuite. Tu fermais les yeux instinctivement, mémorisant chaque sensation de cet instant si précieux. Les lèvres de la jeune femme avaient le goût du capsage qu’elle avait mangé mais gardaient une pointe du sel de l’océan en face de vous. C’est quand la main de Colleen se posa sur ta joue que tu rouvris les yeux, laissant l’autre se poser sur ta nuque alors que tu l’attirais contre toi. Ta main sur son cou y resta, caressant sa joue avant de redescendre dans son cou et de recommencer sans jamais te lasser. Et puis il fallut reprendre votre respiration alors Colleen s’éloigna de quelques centimètres. Ton coeur battait à tout rompre et ta respiration était saccadée. Cacher ton trouble et le désir qu’avait fait naître ce baiser dans tes yeux ne te traversa pas l’esprit. « Je… » Croisant son regard, tu n’hésitas pas longtemps. Vous aviez assez parlé, il était temps de laisser vos corps parler à votre place. Les joues empourprées de Colleen ne la rendait que plus belle à te yeux et bientôt, tes lèvres se reposèrent sur les siennes pour continuer leur découverte. C’était comme si l’on venait de te donner une nouvelle drogue, une à laquelle il aurait suffit d’une goutte pour que tu sois complètement addict. Tu avais oublié à quel point un baiser pouvait être grisant. Tu posais ta main libre sur la hanche de Colleen pour l’attirer contre toi. L’espace qui vous séparait t’offensait au plus haut point mais tu la laissais libre de ses mouvements, laissant ta main sur sa hanche, un point de contact supplémentaire dans cette étreinte qui perdait de son innocence alors que ta langue venait demander l’entrée de ses lèvres. Il faudrait bien s’arrêter mais pas maintenant, pas tout de suite, pas quand tu avais rêvé de ce moment à plusieurs reprises et que la réalité dépassait toutes les attentes que tu avais pu avoir …
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Lun 13 Juil 2020 - 19:38 | |
| La brise s’était levée. Elle soulevait ses mèches brunes et chatouillait sa peau salée. Un souffle léger qui n’avait rien de menaçant et dont elle accueillait la caresse avec un plaisir non dissimulé. Le ciel était zébré de nuages vaporeux qui de là-haut semblaient les épier, curieux, sans doute, de guetter leurs réactions et découvrir ce que ces deux-là leur réservaient. Le rocher derrière eux formait un rempart, les séparant de la plage et des rares surfeurs qui tentaient d’apprivoiser les vagues, les protégeant de leurs regards indiscrets. Ils n’avaient pourtant rien à cacher. La scène semblait ordinaire, parfaitement innocente. Un goûter sur la plage après une séance de surf… Après l’effort, le réconfort ? En apparence du moins, car les regards qu’ils échangeaient ne tromperaient personne. Les coups d’œil étaient appuyés, curieux, intéressés, d’une discrétion qui laissait parfois à désirer. L’atmosphère, devenue irrespirable quelques secondes plus tôt, s’était de nouveau muée en quelque chose de plus paisible, quoique teintée d’une tension qui n’était plus tout à fait étrangère à l’Anglaise. Cette même tension qu’elle ressentait au contact de Marius depuis quelques temps, depuis cette fameuse soirée au Canvas qui avait vu leur relation évoluer, basculer d’un rapport amical à une connexion plus profonde. Cette même tension qu’elle n’avait plus expérimentée depuis des années, celle des débuts, celle de l’inconnu, celle qui était capable de galvaniser chaque cellule de son être, d’envelopper ses pensées d’un brouillard anesthésiant, d'encourager son audace.
Demeurer à l’écart du beau brun lui coûtait énormément. Encore plus lorsqu’il évoqua ses difficultés à se faire confiance et à gérer les craintes qui persistaient à ternir sa vision des choses. Colleen en connaissait la cause, il lui avait confié son histoire quelques semaines plus tôt. Elle ne cherchait pas à les minimiser car elle avait conscience que les maux de Marius étaient profondément ancrés en lui depuis de nombreuses années, qu’ils prenaient leurs racines dans le drame qu’il avait vécu au départ d'Alice et Tommy. Prétendre qu’elle serait capable à elle seule de guérir ces blessures serait une ineptie. Marius venait de l’admettre : c’était un travail personnel, qu’il devait lui-même entreprendre pour aller de l’avant. Au mieux, elle pouvait l’aider à surmonter ces appréhensions. L’aider à avancer, à se faire confiance. Ce n’était pas parce qu’elle se lançait dans Race of Australia dès le lendemain qu’il devait considérer ce départ comme un abandon. Ce n’en était pas un, elle avait bien l’intention de le retrouver à son retour, peu importait la tournure que prendrait cet après-midi avec lui. Se lancer dans cette émission télévisée n’était pas un prétexte pour lui signifier qu’il ne comptait pas pour elle, pour s’affranchir de cette relation indéfinissable qui les liait. Elle le faisait pour elle et pour personne d’autre. Elle ne lui avait jamais caché son besoin d’indépendance, cet appétit pour l’inconnu qu’elle ressentait depuis qu’elle avait quitté l’Angleterre. A presque quarante ans, elle aspirait à autre chose qu’une vie rangée et tranquille. Elle dont la jeunesse avait été écourtée par une grossesse prématurée avait soif d’aventures et ressentait cette nécessité de se retrouver. A ce titre, Race of Australia était une occasion inespérée. Seule elle n’aurait jamais osé se lancer dans cette course, mais Lou ne lui avait pas laissé le choix et quand sa candidature avait été retenue, sa fille l’avait amenée à considérer l’émission comme une opportunité qui correspondait en tous points à ses attentes. Et elle avait raison : l’occasion était bien trop belle pour l’ignorer. Elle savait que ce ne serait pas toujours facile, qu’elle prenait des risques. Serait-elle capable d’affronter les épreuves quotidiennes ? Le stress, le manque de confort et de nourriture, la compétition, la présence continue des caméras ? Elle n’en avait pas la moindre idée et peut-être qu’elle faisait une erreur en se lançant dans cette fichue course, mais comme elle venait de le dire à Marius : si elle n’essayait pas, elle le regretterait, elle en avait la conviction.
« Bien sûr que je reviendrai » Lui répondit-elle. C’était une évidence. Abandonner sa fille pour six semaines dans le meilleur – ou le pire – des cas serait déjà suffisamment difficile en soi. Elle ne pourrait pas faire durer le plaisir davantage. Elle qui rechignait à la perspective de manquer le dix-huitième anniversaire de Lou ne pouvait définitivement pas imaginer s’éloigner trop longtemps d’elle. Et puis, elle s’était habituée à Brisbane. Son travail la satisfaisait pleinement, elle était parvenue à trouver un certain équilibre entre sa profession et ses activités personnelles. Elle y avait noué des liens, à Brisbane, des amitiés qui comptaient beaucoup pour elle. Elle s’y sentait tellement bien qu’elle avait même abandonné sa location à Redcliffe au profit d’un joli pavillon qu’elle avait acheté dans le quartier de Logan City. Cet achat était le symbole de son bien-être ; elle vivait à l’heure australienne désormais et n’avait pas la moindre intention de faire marche arrière. Marius ne devait pas s’inquiéter de ce départ car il n’était que provisoire. Le pire scénario possible était encore qu’elle prenne tellement goût à l’aventure qu’elle décide de passer toutes ses vacances à l’étranger, à la découverte de nouvelles cultures et de nouveaux lieux. Mais si elle avait besoin de sortir de sa zone de confort, elle avait conscience que cette aspiration avait ses limites. Elle était une mère avant tout, et c’était bien à Brisbane que sa fille résidait. Elle l’avait suivie jusque-là et ne comptait pas l’abandonner. Si l’une des deux devait voler de ses propres ailes en premier, il ne faisait l’ombre d’un doute que ce serait Lou. Pour Colleen, tout départ était temporaire.
Quand Marius mentionna la présentatrice de l’émission ainsi que ses amis qui étaient également sur le point de participer à l’émission, Colleen réagit en soulignant qu’il était peu probable qu’elle forme un binôme avec l’un d’entre eux. Etrangement, elle n’appréhendait pas tant que cela la découverte de son futur partenaire de jeu. Lors du casting on lui avait demandé de décrire son binôme idéal, et elle espérait sincèrement que la production avait été attentive à la réponse qu’elle avait formulée. Elle n’était pourtant pas sans savoir que dans ce genre d’émission il était coutume de créer des binômes d’inconnus explosifs, susceptibles de faire parler d’eux et ainsi faire grimper les audiences. Colleen n’était pas naïve au point d’imaginer que les professionnels en charge du casting ne constitueraient que des binômes parfaitement compatibles. Il y aurait forcément de fortes têtes pour prendre le dessus. Toutefois l’Anglaise était bien trop calme pour s’agacer ouvertement de ce type de comportement et s’il s’avérait qu’elle partageait ces semaines de course avec un mauvais caractère, il y avait fort à parier qu’elle se contenterait de faire profil bas plutôt que d’attiser l’animosité entre eux. Et puis, à quoi bon redouter ce binôme quand les dés étaient déjà jetés ? La peur n’évitait pas le danger. Marius la mit néanmoins en garde contre May, qu’il connaissait très bien et qui visiblement n’était pas une novice en la matière. Colleen, qui avait cette tendance naïve à idéaliser tous ceux qu’elle rencontrait, l’avait qualifiée de « sympa », mais à entendre Marius elle comprit que derrière cette prétendue sympathie se dissimulait une redoutable ambition. Ces confessions firent dresser les sourcils de la brune. Elle n’aurait pas dû être étonnée pourtant, elle aurait dû se douter que de telles productions cachaient forcément un monde de requins aux dents longues. « Je me méfierai dans ce cas » Promit-elle. « Merci de m’avoir prévenue, je ne m’en étais pas rendu compte ». Ce qui était loin d’être une surprise quand on possédait la candeur de Colleen – il fallait simplement espérer qu’elle ne lui porterait pas préjudice dans l’aventure et qu’elle n’accorderait pas sa confiance trop facilement, au risque de se faire avoir.
Parce qu’il avait l’air d’en douter, et aussi parce qu’elle avait besoin de lui confier cette réalité, elle lui déclara qu’il allait lui manquer pendant le tournage de l’émission. Sans attendre quoi que ce soit en retour, sans imaginer que ces paroles agiraient comme un déclic entre eux. Pourtant, c’est bien ce qui se produisit. Colleen eut beau s’accrocher à sa raison au cours des secondes suivantes, et tenter de résister à l’appel de ses lèvres, le combat était perdu d’avance. Quand les doigts de Marius se posèrent sur son visage, elle frissonna face à l’intensité de son regard et aux sensations que ce contact lui procurait. Son pouls s’emballa et son cœur tambourina dans sa poitrine. Elle sentit sa peau s’embraser là où il l’effleurait, mais elle se désintéressa très vite de ses propres émotions quand son regard s’arrêta sur ses lèvres à lui. Combien de fois avait-elle ressenti cette vive attraction pour lui ? Combien de fois avait-elle refusé de céder à son appel ? Son obstination avait ses limites, sa ténacité ne pouvait rien contre la force de ce magnétisme. Alors elle mit ses pensées en sourdine, sa raison de côté, et laissa son cœur la guider vers les lèvres de Marius. Elle s’empara de leur pulpe avec délicatesse, prit le temps de découvrir leur saveur sans brusquer les choses. Au début, du moins. Par la suite elle peina à se retenir et glissa une main sur sa joue, l’autre dans sa nuque. Il lui répondit en l’attirant vers lui, achevant de gommer la distance entre eux. Elle esquissa un sourire contre ses lèvres avant de fermer les yeux et de graver chaque instant, chaque sensation, dans sa mémoire. Ce baiser eut un goût de trop peu néanmoins, et quand elle dégagea son visage du sien elle regretta immédiatement le contact perdu. Elle tenta vainement de s’exprimer, mais troublée par leur échange elle ne parvenait pas à trouver les mots. Ce baiser portait toutes les promesses qu’ils n’avaient jamais osé énoncer à voix haute. Elle l’avait longtemps imaginé, voire espéré quand elle se le permettait, et si elle savait qu’elle pouvait difficilement faire marche arrière à présent, elle ne regrettait rien pour autant.
Ne lui laissant pas le loisir de s’exprimer, Marius prit à son tour le contrôle de la situation et l’attira une nouvelle fois contre lui. Colleen ne se fit pas prier. Un léger frémissement lui parcourut l’échine quand il posa sa main sur sa hanche et elle ferma les yeux, s’abandonnant complètement à son contact, guidée par son instinct. Ses lèvres s’entrouvrirent spontanément et le baiser gagna en intensité, se fit plus impérieux, plus urgent. Ses doigts parcoururent sa joue, glissèrent sur la ligne de sa mâchoire, se perdirent dans ses cheveux, s’attardèrent dans sa nuque puis dans son dos, s’enroulèrent autour de sa taille. Poussée vers lui, dans son emportement elle en oublia totalement qu’ils se trouvaient dans un lieu public et que le rocher ne pouvait pas tout à fait dissimuler leur étreinte. Ses lèvres contre les siennes, son corps contre le sien, le désir la transperçait de toutes parts. Elle qui n’avait pas goûté à ce type de contact depuis très longtemps sentait bien que son corps réclamait le sien. Elle bascula vers lui, l’étreignit davantage, les joues en feu, la respiration saccadée. Jusqu’à ce qu’une petite voix dans sa tête ne la rappelle subitement à l’ordre, lui faisant prendre conscience de l’endroit dans lequel ils se trouvaient. Elle fronça les sourcils et grogna légèrement contre ses lèvres, frustrée. Si elle ne mettait pas un terme à cette étreinte, elle n’était pas certaine de pouvoir contrôler ses ardeurs plus longtemps. A regret, elle éloigna sagement son visage du sien pour l’enfouir dans son cou et respirer son parfum devenu familier. Elle mesurait pleinement la signification de ce baiser, elle qui s’était pourtant refusée ce genre d’échange jusqu’à présent. Il était trop tard pour changer d’avis désormais. Ses lèvres roulèrent contre sa peau et s’arrêtèrent près de son oreille. « Tu m’as parlé de ton art, du surf et même de la cuisine… Mais tu m’avais caché ce talent-là » Murmura-t-elle, taquine. « Je ne suis plus sûre d’avoir très envie de partir demain, c’est malin ». Elle déposa un baiser en-dessous de son oreille, puis un autre sur sa joue, sa barbe lui piquant agréablement les lèvres, et enfin dégagea son visage pour le placer juste en face du sien et planter son regard dans ses yeux bleus. « Ça m’a ouvert l’appétit » Ajouta-t-elle, un sourire mutin étirant ses lèvres gonflées. Elle ne précisa pas lequel, d'appétit, et se contenta de lui voler un dernier baiser avant de saisir un cupcake et de croquer dedans à pleines dents, sans le quitter des yeux.
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| | | | (#)Mar 14 Juil 2020 - 11:08 | |
| L’une des raisons pour lesquelles tu n’arrivais pas à te faire confiance c’était que quand tu te demandais ce que tu avais de mieux à offrir qu’un autre, la réponse ne t’apparaissait pas de manière évidente. Tu n’avais jamais été très doué quand il était question de relations sociales avec des personnes qui comptaient pour toi. Ta mère avait veillé à ce que tu connaisses tous les codes des rencontres mondaines et tu n’avais jamais eu de mal à retenir un détail sur l’un, une anecdote sur l’autre ce qui te faisait passer pour un homme intéressant dans ces évènements. Mais quand il s’agissait d’une relation privée où personne ne devait décrocher au bout ni un contrat, ni un numéro de téléphone, c’était une autre histoire. Depuis ton adolescence, tu avais toujours été plus renfermé que le reste de tes camarades. Moins facile à lire, moins facile à dérider. Peu de personnes avaient la patience d’essayer et quand elles le faisaient, tu finissais par ne pas faire le poids face à un autre. Alors petit à petit, sans vraiment t’en rendre compte, tu avais fini par te persuader que tu n’avais pas grand chose à offrir finalement. Et Alice te l’avait prouvé mieux que quiconque en prenant la fuite avec ton frère. Tommy était ton opposé. Il s’était attaché en grandissant à devenir tout ce que tu n’étais pas. Pourtant, c’était lui qu’Alice avait choisi. Alors face à l’annonce de la participation de Colleen à Race of Australia et sa rencontre prochaine avec Tommy, tu avais vu rouge. Mais Colleen avait raison, tu devais lui faire confiance et surtout, tu devais te faire confiance. « Bien sûr que je reviendrai » Ses mots sonnaient comme une évidence et tu ne doutais pas qu’ils l’étaient. Après tout, Colleen venait d’acheter une maison à Logan City, sa fille étudiait dans cette ville, bien sûr qu’elle allait revenir. L’aventure n’était pas censée durer pendant des mois non plus, à un certain moment cela s’arrêtait. Elle allait donc revenir à Brisbane, mais reviendrait-elle vers toi ? En dehors du fait qu’elle allait rencontrer ton frère, elle allait aussi rencontrer d’autres personnes et vivre des aventures qui allaient la transformer. Est-ce qu’elle la transformerait au point qu’à son retour, il n’y aurait plus de place pour toi dans sa vie ? Tu n’en savais rien mais tu savais que tu étais encore en train d’envisager seulement le pire. En grand pessimiste que tu étais, ce n’était pas étonnant mais tu devais te forcer à y croire pour l’instant. Tu répondis avec un petit sourire aux paroles assurées de Colleen et l’atmosphère se détendit de nouveau alors que tu lui confiais qu’elle rencontrerait dans cette aventure un certain nombre d’amis à toi. que la jolie brune ne puisse mettre un visage que sur le nom de May ne te surprenait pas du tout car elle avait participé à la sélection des candidats. Mais même si tu adorais ton amie, tu préférais prévenir Colleen qu’elle risquait d’être surprise. Peu importe les attaches qu’elle pourrait avoir, May ne se privera pas s’il y a l’occasion de faire des audiences. Donc il valait mieux que Colleen ne lui fasse pas trop confiance non plus, tu ne voulais pas qu’elle se fasse avoir. « Je me méfierai dans ce cas. Merci de m’avoir prévenue, je ne m’en étais pas rendu compte » C’était normal qu’elle ne s’en soit pas rendue compte. Elle avait dû voir May quelques minutes, dans le meilleur des cas une heure ou deux et tu savais que ton amie savait montrer son meilleur côté quand elle le voulait. Tu n’avais jamais aimé le milieu dans lequel elle évoluait et elle le savait. Contrairement à son ex-compagnon cependant, tu l’encourageais à s’y réaliser si elle le désirait pendant que tu jouais le rôle de parent de substitution avec sa fille. Etrange comme la vie était faite … Tu avais toujours eu envie d’être père sans jamais en avoir l’occasion alors que May n’avait pas voulu être mère mais l’avait été très tôt. Tu ne peux t’empêcher de te dire que le monde est parfois mal fait. Mais il n’y a rien que tu puisses faire à ce sujet. Tu resteras l’oncle ou le bon ami de maman et il est temps que tu l’acceptes. « Tu te lances dans une aventure où j’ai bien peur que l’on ne vous fasse pas de cadeaux. Il faudra que je demande à May quand ils prévoient de diffuser l’émission. » Parce qu’elle doit forcément déjà le savoir et que tu sais que si tu ne la regardes pas, tu serais lynché par une bonne partie de ton entourage. La vérité c’est que tu as envie de la regarder, pour la première fois de tout ta vie, tu as envie de regarder la télévision. Tu as envie de découvrir les aventures de Colleen, de Greg, de Liam et aussi de ton frère parce que tu étais curieux de le voir évoluer sans que tu sois dans les parages. Tu savais qu’il n’était pas tout à fait le même.
La confession de Colleen te donna le courage de toucher la jeune femme de nouveau. Maintenant que son départ était une réalité et qu’il était imminent, tu n’avais plus envie de perdre de temps. Tu posais tendrement tes doigts sur la peau de la jeune femme qui te faisait face, sentant son pouls s’accélérer alors que vos yeux s’ancraient dans ceux de l’autre. Il ne fallut que quelques secondes pour qu’une bulle se crée autour de vous. Tu oubliais que vous étiez sur la plage, tu oubliais tout le reste pour te concentrer uniquement sur Colleen, assise près de toi et que tu avais rêvé d’embrasser plus d’une fois au fil de vos différentes rencontres. Depuis quelques temps, cette envie s’était fait terriblement pressante et tu avais hésité en quittant son appartement mais cette fois … C’est Colleen qui fit un pas en avant, hésitante mais tu n’allais pas la repousser, bien au contraire. Quand vos lèvres se touchèrent et commencèrent à se découvrir, ce fut un soulagement. Le fait que ce soit Colleen qui face ce pas en avant, cela te prouvait qu’elle tenait à toi, assez pour t’embrasser et même si c’était puéril, c’était un soulagement pour toi. Tu ne perdis pas de temps à répondre à ses lèvres, les tiennent venant les accompagner pour prouver à Colleen à ton tour, à quel point tu avais attendu ce baiser. Quand elle s’éloigna, vous laissant reprendre votre souffle, elle essaya de parler mais elle n’y parvient pas et tu n’avais pas envie de parler. Pas encore, pas quand ses lèvres étaient toujours si proches et qu’elle t’avait donné la permission de recommencer. Quand tu posais de nouveau tes lèvres sur les siennes, il n’était plus seulement question de découverte. Le baiser s’intensifia presque naturellement alors que votre envie de vous découvrir sous ce nouveau jour se faisait plus grande. Vous vous étiez confiés l’un à l’autre, sur des sujets très personnels et dont vous parliez peu. Vous aviez ouvert à l’autre une partie très intime de vous et c’était une autre partie que vous découvriez à cet instant. Ta main sur la hanche de Colleen l’attira vers toi et bientôt, elle était installée sur tes cuisses, une jambe de chaque côté sans jamais briser votre baiser. Les sensations qui t’envahirent n’étaient pas nouvelles mais elles étaient oubliées. Elles te frappèrent de plein fouet alors que les mains de Colleen semblaient être partout à la fois. Sur ton visage, sur ta nuque, dans ton cou, dans ton dos. Cela faisait longtemps que tu n’avais pas été ivre mais tu avais l’impression de l’être à cet instant précis. Plus le baiser s’intensifiait, plus le désir qui t’habitait augmentait de manière exponentielle. Cela faisait plus de trois ans que personne ne t’avait touché ainsi et c’était la meilleure des tortures … Ta main droite explorait toujours les traits de son visage et se lovait dans son cou que tu caressais avec ton pouce alors que ton autre main sur sa hanche avait fini par soulever légèrement le t-shirt qu’elle portait pour poser délicatement tes doigts sur sa peau, y dessinant de petits cercles qui eurent pour effet de faire frissonner Colleen et de te convaincre de continuer. Mais bientôt, elle s’éloigna de nouveau et ton regard retrouva instinctivement le sien. Lire un tel désir dans le regard de la belle brune était grisant et tu ne doutais pas qu’elle pourrait lire le même dans ton regard. Mieux que de le lire dans ton regard, une certaine partie de ton corps s’était réveillée dans cette étreinte alors que le corps de Colleen s’était collé contre le tient. Peut-être l’avait-elle senti, peut-être pas mais tu n’y prêtais pas attention, tu ne pouvais pas le contrôler, pas quand tu n’avais qu’une envie, c’était de continuer. Toutefois, il était préférable que vous marquiez une petite pause car le bruit des vagues vint te rappeler que vous étiez dans un lieu public et que ce n’était pas l’endroit pour ce genre de choses. Pourtant, tu refusais que Colleen quitte tes bras et elle ne semblait pas vouloir les quitter non plus. Ses lèvres vinrent se poser contre ton cou et remontèrent jusqu’à ton oreille. Tu étais à peu près sûr qu’elle pouvait sentir le rythme frénétique de ton pouls et tu ne cherchais pas à retenir un léger gémissement. Tu avais envie de te perdre dans ce désir enivrant mais la voix de Colleen te dit : « Tu m’as parlé de ton art, du surf et même de la cuisine… Mais tu m’avais caché ce talent-là . Je ne suis plus sûre d’avoir très envie de partir demain, c’est malin » Tu n’étais pas sûr d’être le plus doué dans ce domaine-là comme elle le disait mais ça, c’était un doute que tu allais garder pour toi. Un sourire amusé se dessina sur tes lèvres et tu lui répondis : « Il fallait bien que je garde quelques surprises à te faire découvrir. » Tu posais brièvement tes lèvres sur le coin des siennes avant de venir goûter la peau de son cou que tu butinais jusqu’à arriver à la jointure de ses épaules. Le regard légèrement embrumé, tu lui dis : « Je devais m’assurer que tu aies une bonne raison de revenir. » Tu plaisantais bien sûr mais à moitié. Même si tu aurais aimé continuer, même si tu ne désirais qu’une chose c’était de continuer à découvrir le corps de Colleen, vous aviez tous les deux que cela n’arriverait pas aujourd’hui. Alors peut-être qu’un peu de teasing ne ferait pas de mal et lui donnerait une autre raison de revenir n’est-ce pas ? La séparation allait être difficile, c’était indéniable. « Ça m’a ouvert l’appétit » Il fallait l’avouer, tu avais un petit côté possessif. Alors avoir Colleen contre toi, un sourire taquin sur les lèvres, en train de croquer dans un cupcakes que tu avais préparé pour son anniversaire avait quelque chose de pleinement satisfaisant. Alors qu’elle avalait sa première bouchée, tu posais ta main sur celle qui attrapais le cupcake et tu vins en prendre une bouchée toi aussi. Après qu’elle ait croqué une nouvelle fois dans le gâteau, tu eus une idée et essayant de faire passer ton geste pour un accident, tu vis valser la main de Colleen tenant le gâteau dont la crème sur le dessus vint s’écraser en bas de son cou avant de glisser légèrement. « Oops. » Dis-tu avant d’attraper le gâteau. Il n’y avait aucun doute, tu n’étais pas du tout désolé et Colleen n’allait pas le croire une seule seconde. Tu déposais un premier baiser dans son cou avant de lui dire : « Pendant que je m’occupe de nettoyer ma bêtise, tu ne m’as toujours pas dit quel était ton livre préféré. » Un sourire taquin se dessina sur ton visage alors que tes lèvres se reposaient sur la peau de la femme en face de toi.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Ven 17 Juil 2020 - 16:54 | |
| Marius avait raison : en rejoignant le casting de Race of Australia, Colleen se lançait dans une aventure dont elle ne maîtrisait ni les tenants ni les aboutissants. Ce constat faisait naître en la jeune femme des sentiments contradictoires : l’appréhension, l’inquiétude, le doute, mais aussi l’excitation, l’impatience et la détermination. De sa vie, elle avait rarement ressenti un cocktail d’émotions aussi explosif et si elle ne pouvait nier que cela avait un côté terrifiant, son enthousiasme était tel qu’elle était prête à en assumer les conséquences, voire les regrets s’il s’avérait que la course ne correspondait pas en tous points à ses attentes. Elle était incapable d’anticiper les péripéties qu’elle s’apprêtait à vivre, mais elle avait fait de son mieux pour s’y préparer physiquement en suivant un programme de fitness très strict depuis quelques semaines. Car s’il y avait bien une chose qu’elle refusait catégoriquement, c’était d’être un boulet pour son futur binôme, et elle avait conscience qu’elle devrait avant tout compter sur son endurance pour rester dans la compétition. Marius venait de le souligner de manière très juste : la production ne leur ferait pas de cadeaux, et Colleen doutait que l’aventure ne consiste qu’à faire de l’autostop entre chaque étape du parcours qui traversait l’Australie d’est en ouest. Cela serait beaucoup trop simple, les producteurs avaient obligatoirement d’autres idées derrière la tête – des idées qui, à n’en pas douter, allaient mettre leurs nerfs à rude épreuve. Colleen ne savait absolument pas comment elle réagirait face à l’inconnu, si elle serait du genre à paniquer ou à relativiser. Son optimisme avait tendance à la faire pencher pour la deuxième option, mais tant qu’elle n’était pas confrontée à ces épreuves elle pouvait difficilement anticiper ses réactions. Elle comptait toutefois sur sa maîtrise du yoga pour lui venir en aide dans les moments pénibles, et sa gestion de la respiration pour l’aider à retrouver son sang-froid. Deux alliés dont elle ne sous-estimait pas l’importance au vu des conditions dans lesquelles l’aventure se déroulerait.
Après avoir douté des intentions de Marius à son égard l’espace d’un instant, son emportement soulevant son lot d’interrogations dans l’esprit confus de la jeune femme, elle fut rassurée de constater que leur complicité ne s’était pas évaporée et qu’elle était revenue aussi vite qu’elle s’était éclipsée. Colleen peinait toujours à réaliser la rapidité avec laquelle elle s’était attachée à lui, la rapidité avec laquelle il était parvenu à briser les barrières qu’elle avait érigées. Depuis qu’elle avait quitté l’Angleterre, elle se raccrochait à son envie d’indépendance avec résolution, désireuse de ne pas répéter les mêmes erreurs qui l’avaient amenée à passer à côté d’une bonne partie de son existence. Malgré les tentatives répétées de Lou pour lui trouver chaussure à son pied – en l’inscrivant contre son gré sur un site de rencontre, par exemple, ou en s’échinant à commenter systématiquement les hommes qu’elles croisaient dans la rue – l’engagement de Colleen n’avait jamais flanché. Pas à une seule reprise. En l’espace de ces premiers mois passés en Australie, elle n’avait pas ressenti le besoin d’une présence masculine à ses côtés, ni éprouvé la nécessité de faire des rencontres. Et si son cœur se serrait parfois lorsqu’elle rejoignait son lit froid et désert la nuit, elle était à chaque fois rattrapée par ses convictions. Sa liberté retrouvée était précieuse, bien plus que tout le reste. Du moins, jusqu’à Marius. Jusqu’à ce que, ironie du sort, le professeur de sa propre fille ne vienne contourner sa méfiance et briser ses certitudes. Jamais elle n’aurait pu imaginer que cette rencontre innocente sur le seuil de sa porte quelques jours à peine après son arrivée à Brisbane l’amènerait sur cette plage de Gold Coast. Au fil de leurs rencontres, ces deux cœurs brisés s’étaient ouverts peu à peu. Marius lui avait accordé sa confiance en lui confiant son histoire, et Colleen la sienne en révélant son passé. Malgré tout, l’Anglaise sentait bien qu’elle n’était pas prête à faire une croix définitive sur sa liberté. Qu’importe ce qu’il se passerait avec le bel Australien, elle ne ferait pas de concessions sur son indépendance, et c’était bien la raison pour laquelle elle s’était montrée si ferme en évoquant sa participation à Race of Australia. Ces semaines passées loin de lui s’annonçaient difficiles, mais nécessaires pour son bien-être. Pour une fois, elle devait se montrer égoïste.
Avant son départ le lendemain, il leur restait néanmoins une poignée d’heures et des instants dont Marius avait déclaré vouloir profiter. Colleen n’avait pas anticipé la suite des événements, mais quand il posa sa main sur son visage qu’il explora du bout des doigts, elle comprit qu’elle ne pourrait plus résister très longtemps à la tentation qu’il représentait et qu’elle s’était évertuée à ignorer. Leur premier baiser fut doux, il traduisait à lui seul tout ce que Colleen n’était pas encore capable d’exprimer à voix haute. Ses espoirs, ses sentiments. Son désir, son attirance. La faculté qu’avait Marius à se glisser dans ses pensées à n’importe quel moment de la journée, le matin quand elle se réveillait, la journée quand elle travaillait, le soir quand elle rêvassait. Son aptitude à la troubler quand il la fixait de son regard brûlant. Ses lèvres se familiarisèrent lentement avec les siennes, jusqu’à ce que le rythme ne leur suffise plus, jusqu’à ce que le désir prenne le pas sur la découverte. Leurs souffles se mêlèrent, les respirations s’accélérèrent, Colleen sentit le rouge lui monter aux joues et son cœur cogner frénétiquement dans sa poitrine, dans ses tempes, dans ses oreilles, partout à la fois. Et quand elle parvint enfin à détacher sa bouche de la sienne, ce ne fut que pour mieux la retrouver une seconde plus tard. Si elle avait été capable d’examiner la scène d’un point de vue extérieur, sans doute aurait-elle eu honte de ce comportement ; avec ses cheveux en bataille et ses joues rouges elle avait l’air d’une adolescente qui vivait ses premiers émois. Mais c’était plus fort qu’elle, elle avait attendu si longtemps avant de faire le premier pas que désormais, elle était incapable de se contrôler. Elle laissa Marius l’attirer vers lui et l’installer sur ses cuisses, sans jamais briser le contact de leurs lèvres. Le désir qui émanait du beau brun était bien réel et ne faisait qu’attiser davantage le sien. S’ils avaient choisi un autre endroit pour leur premier baiser, un lieu qui n’était pas aussi exposé, Colleen soupçonnait qu’elle n’aurait pas eu la force nécessaire pour détacher ses lèvres des siennes et cesser l’exploration de ses doigts qui couraient sur sa peau. Mais là, sur la plage, en plein jour, ce n’était ni le lieu ni le moment de prolonger leur étreinte. La perspective était alléchante pourtant, elle ne pouvait prétendre le contraire. Cela faisait si longtemps qu’elle n’avait pas ressenti un désir aussi brûlant et enivrant qu’elle eut toutes les peines du monde à se raisonner. Elle y parvint, cependant. Dans un éclair de lucidité, elle brisa le contact de leurs lèvres et nicha son visage dans le cou de Marius. Taquine, elle ne résista pas très longtemps avant de venir glisser ses lèvres à son oreille et lui confier son ressenti. Ce baiser rendait son départ du lendemain plus difficile. Elle savait d’avance qu’elle rejouerait cette scène des dizaines de fois avant son retour, et que quitter Brisbane quelques heures plus tard serait un déchirement dès que l’image de Marius s’inviterait dans ses pensées. Elle n’avait pas le choix toutefois, et savait qu’elle prenait la bonne décision en maintenant sa participation à l’aventure. Y renoncer signifierait retomber dans ses vieux travers. Cela exposerait de façon très claire qu’elle n’avait pas tiré le moindre enseignement de l’échec de son mariage, et qu’une fois de plus elle avait laissé sa relation avec un homme prendre le pas sur ses aspirations personnelles. Cela ne voulait pas dire que c’était simple, mais elle n’avait pas le choix.
Quand elle planta son regard dans celui de Marius, le désir qu’elle y décela la troubla encore plus que celui que son corps exposait. Elle avait déjà eu le loisir de les sonder à plusieurs reprises, mais jamais ses yeux n’avaient été aussi animés qu’en cet instant-là. Il évoqua son souhait de ne pas dévoiler toutes ses cartes trop rapidement, et elle esquissa un sourire alors qu’il embrassait le coin de sa bouche et enfouissait à son tour son visage dans son cou. Les baisers qu’il déposa sur sa peau la firent frissonner de plaisir si bien que lorsqu’elle reprit la parole, elle ne put dissimuler totalement le trouble qui voilait sa voix. « Mmh, je crois que c’est réussi ». Ses doigts glissèrent instinctivement jusque dans sa nuque qu’elle caressa. Elle ferma les yeux un instant alors que les baisers de Marius se poursuivaient dans son cou. « Je vais peut-être même m’arranger pour être éliminée dès la première semaine, d’ailleurs » Suggéra-t-elle d’une voix espiègle. Elle n’avait pas la moindre intention de céder à cette envie-là, mais elle ne pouvait nier que l’idée n’était pas déplaisante. Imaginer passer des semaines sans Marius s’annonçait plus douloureux que prévu, et l’espace d’un moment elle regretta presque d’avoir succombé à la tentation de ses lèvres. Un moment, seulement, parce que la seconde suivante ce regret s’effaçait déjà de ses pensées. Elle saisit un cupcake qu’elle porta à ses lèvres, les miettes tombant sur le torse de Marius qui l’observait avec une rare intensité. Elle était toujours assise sur lui, car si elle avait réussi à détacher ses lèvres des siennes elle ne pouvait se résoudre à rompre totalement leur proximité. Et puis, elle comptait toujours sur la hauteur du rocher pour la dissimuler des regards indiscrets, et si ce n’était pas le cas, elle n’avait qu’à espérer que personne ne la reconnaîtrait… Posant sa main sur la sienne, Marius croqua à son tour dans le cupcake et les lèvres de Colleen dessinèrent un sourire en le voyant faire. C’était la première fois qu’elle le voyait agir de cette manière avec elle, et ce nouvel aspect de sa personnalité qu’elle découvrait l’amusait beaucoup.
Aussi, quand il fit semblant d’écraser maladroitement le glaçage du cupcake sur sa peau, elle éclata de rire. Le visage de Marius se fendit d’un sourire taquin et elle secoua la tête devant son air faussement désolé. « Oups, comme tu dis… » Fit-elle, amusée, en enfonçant délicatement le doigt dans sa fossette. Il inclina le visage vers sa peau et tendit les lèvres pour l’embrasser là où la crème s’étalait. Elle frémit et s’efforça de plisser les yeux pour se concentrer sur ce qu’il lui disait. Visiblement, cet homme avait non seulement bonne mémoire mais en plus de cela il ne perdait pas le nord, revenant à la charge avec ses interrogations sur le livre qu’elle avait sélectionné avant de venir. « Je ne suis pas certaine de pouvoir me concentrer sur quoi que ce soit pendant que tu fais ça, tu m’as clairement surestimée… » Se défendit-elle, un sourire satisfaisait réhaussant les commissures de ses lèvres alors que ses paupières retombaient devant ses yeux pour mieux apprécier la sensation de ses lèvres contre sa peau. « Mais si tu insistes… ». Elle se pencha en arrière et à tâtons, récupéra la lanière de son sac. Ouvrant un œil, elle chercha la fermeture éclair du sac qu’elle tira pour en extirper le roman, puis le déposa derrière Marius pour qu’il puisse le saisir une fois qu’il aurait terminé de nettoyer sa bêtise. « Si tu te moques, gare à tes fesses ! » Prévint-elle sans une once de crédibilité. Puis elle se lança. « J’admets avoir un certain penchant pour les drames romantiques… Ça doit être mon côté fleur bleue qui ressort. Bref, j’ai choisi The Notebook, tu connais ? Si tu n’as jamais vu l’adaptation cinématographique, tu n’y couperas pas à mon retour de l’émission » Annonça-t-elle, un sourire étirant ses lèvres. « Ça parle de l’histoire d’amour de deux jeunes dans les années trente, contée par un homme à une femme âgée atteinte d’Alzheimer. Ces deux jeunes viennent d’univers complètement différents : elle est issue d’une famille aisée, lui travaille comme ouvrier. Il est question de ségrégation sociale à l’époque, et le destin finit par les séparer… Jusqu’à ce qu’ils se retrouvent des années plus tard, quand elle est sur le point d’en épouser un autre. Je ne vais pas te spoiler la fin, sinon il n’y aura plus le moindre intérêt quand je te forcerai à regarder l’adaptation avec moi… ». Elle énonçait cette obligation l’air de rien, mais était quand même déterminée à le visionner avec lui – ce serait sa punition pour l’avoir poussée à emporter son livre préféré en sachant pertinemment qu’elle n’en aurait pas besoin... « Mais c’est une très belle histoire, et tant pis si ça fait de moi quelqu’un de niais ». Elle posa sa main sur sa joue et la caressa d’un air distrait. « J’imagine que tes lectures sont un peu plus intellectuelles que les miennes… ? » Lui demanda-t-elle avec un sourire.
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| | | | (#)Mer 22 Juil 2020 - 9:33 | |
| L’expérience que tu avais avec la télé-réalité était très minime car tu n’en regardais pas et tu ne t’y intéressais pas. Ce que tu en savais, c’était ce que May t’avait expliqué au fil des années et ce n’était vraiment pas toujours très reluisant. Mais que cela te plaise ou pas, Colleen serait partie le lendemain dans une aventure qui allait bouleverser sa vie. Parce que même si tu ignorais exactement comment les choses se passaient, si tu soupçonnais que beaucoup de choses étaient exagérées ou détournées, tu ne doutais pas que Colleen allait vivre une belle aventure. Elle était trop honnête, trop humble, trop … Elle ne s’abaissera jamais au niveau des mesquineries de certains candidats dont tu entendais parler de temps en temps quand tu surprenais des conversations de tes élèves dans les couloirs. La télé-réalité ne t’avait jamais attirée. Tu préférais te perdre dans tes croquis et tes aquarelles plutôt que dans la vie mise en scène de personnes inconnues et souvent ridicules. Tu espérais que ce n’était pas ce qu’ils avaient prévu pour Colleen, du ridicule. Mais tu étais persuadé d’une chose, elle ne les laisserait pas faire s’ils comptaient la lui faire à l’envers. Peut-être que tu ne connaissais pas encore très bien ce côté de la jeune femme mais tu en avais vu un aperçu quand elle s’était imaginée que tu allais lui demander de ne pas partir. Venant de toi, cela aurait été un comble quand tu n’avais été qu’égoïste dans tes choix de vie depuis toujours et tu en payais les conséquences avec ta soeur aujourd’hui. Alors Colleen avait le droit d’être égoïste, elle avait le droit de vouloir vivre une aventure comme elle n’en vivra certainement jamais d’autre et peu importe ce que tu en pensais. La retenir ne te traversa pas vraiment l’esprit, c’est plutôt l’idée de l’imaginer dans une proximité avec ton frère cadet qui te dérangeait mais tu n’avais de prise sur aucune de leurs actions, il allait falloir que ta peur irrationnelle se calme, que tu essaies de la contrôler. Six semaines elle avait dit ? Tu sentais déjà qu’elles allaient être très longues. La perspective de l’absence soudaine de Colleen te faisait réaliser à quel point elle était devenue une constante dans ta vie. Désormais, tu ne regardais plus ton portable deux fois par jour pour t’assurer qu’aucune urgence n’était arrivée, tu te surprenais à le regarder bien plus souvent, dans l’attente d’une réponse de la jeune femme ou alors quand tu avais une anecdote à lui raconter. Tu te surprenais à dessiner les traits de son visage quand tu avais un crayon entre les mains et tu savais déjà que dans les semaines à venir, tu tenteras peut-être d’esquisser son portrait. Cela faisait tellement longtemps que tu n’avais laissé personne prendre une telle place que cela semblait complètement irréel. Comme si les expériences que tu vivais actuellement ne t’appartenaient pas réellement. Si tu vivais dans un rêve éveillé, tu n’avais pas envie de te réveiller … Mais si c’était un rêve, tout irait toujours bien et l’annonce de la participation conjointe de Tommy et Colleen à cette émission avait sonné un réveil brutal à une après-midi idyllique. Tu n’avais aucune envie toutefois que la journée se termine sur cette tonalité, surtout si tu ne devais pas voir Colleen pendant des jours, voire des semaines, voire plus d’un mois.
Quant tes doigts vinrent se poser contre la jour de la jolie brune, ce fut comme un choc électrique qui fit renaître cette petite braise qui avait commencé à naître lors de votre rencontre au Canvas mais qui avait eu le temps de prendre de l’ampleur et de commencer à vous consumer. Vous aviez été très sages, peut-être trop sages jusqu’ici et le baiser que vous étiez en train d’échanger, à la vue de tous, comme deux adolescents n’était à tes yeux que la suite logique d’un désir sincère et fort. Il fut un temps où tu aurais été embarrassé de ce désir et tu te serais senti coupable. Tu aurais cherché à t’éloigner et à fuir cette situation qui t’aurait gênée. Mais avec Colleen, c’était l’inverse. Elle t’avait surpris dès le début et elle t’avait fait te surprendre. Quand tu lui avais conté ton histoire, ces blessures qui avaient du mal à se refermer, dont tu n’aimais pas parler mais que tu lui laissais voir en toute confiance. Tu ne t’étais pas attendu à lui conter ton histoire ce soir-là mais tu n’arrivais pas à le regretter. Comme tu étais certain de ne pas regretter de ne pas chercher à te cacher. Des promeneurs qui pouvaient sans doute vous apercevoir au loin, derrière le rocher mais également de Colleen qui pouvait sans aucun doute lire tes émotions dans tes yeux et les sentir se répercuter dans chaque cellule de ton corps. Tu avais oublié à quel point c’était grisant de se laisser emporter par ses désirs, de ne pas les brider incessamment. Toutefois, tu savais que tu pouvais ressentir chacune de ces sensations parce que c’était Colleen dans tes bras, sur tes cuisses et personne d’autre. Peu importe les moqueries de tes amis, tu restais persuadé que tout devenait plus intense et plus fort quand on apprécie réellement la personne que l’on laisse entrer dans son intimité. Parce que c’était ça que vous étiez en train de faire, vous brisiez un mur de plus dans cette relation que vous ne nommiez pas mais que vous construisiez au fil du temps et de vos rencontres. Votre étreinte dura un moment, tu ne saurais dire combien de temps mais c’est avec regret que tu sentis Colleen s’éloigner. Pourtant, elle avait sans doute raison mais tu fus rassurée quand elle ne fit que détacher ses lèvres des siennes tout en restant installée là où elle se trouvait. Laisser vos corps se découvrir doucement, c’était la continuité naturelle de ce que vous aviez déjà construit jusqu’ici. « Mmh, je crois que c’est réussi. Je vais peut-être même m’arranger pour être éliminée dès la première semaine, d’ailleurs » Ton regard croisa rapidement le sien et tu n’y crus pas une seule seconde. Tu n’avais pas envie qu’elle fasse ce genre de choses de toute manière. Maintenant qu’elle avait décidé de partir, il fallait qu’elle donne tout pour réussir. Tu savais que Colleen avait du mal à croire qu’elle pouvait y arriver. Tu n’avais pas eu l’impression qu’elle soit beaucoup plus sportive que toi et elle venait de te confirmer que c’était sa première vraie aventure cependant, tu savais qu’elle avait des ressources, elle s’en sortira très bien. Posant ta main sur sa joue, tu la caressais légèrement en lui disant : « Je compte sur toi pour tout donner pour aller jusqu’au bout. La récompense en rentrant ne sera que meilleure. » Tes lèvres se posèrent de nouveau sur les siennes à ces paroles et tu espérais lui faire comprendre qu’elle n’avait pas à s’en faire, tu seras toujours là, à l’attendre patiemment à son retour, peu importe quand elle reviendrait. Et quitte à la voir partir, tu préférais qu’elle réussisse et que cette aventure soit synonyme de bons souvenirs et de grands bonheurs. L’attente ne rendra vos retrouvailles que bien plus fortes, tu n’en doutes pas une seule seconde. Mais vu qu’elle n’était pas encore partie, tu comptais bien profiter de sa compagnie encore un peu.
Quand Colleen se saisit du cupcake et que tu la regardes croquer dedans, l’idée qui te vient à l’esprit devrait te faire rougir et pourtant, tu n’hésites pas à la réaliser. Saisissant la main de la jeune femme pour toi aussi prendre une bouchée du cupcake, tu fais croire à une maladresse quand le reste du cupcake vient s’écraser contre la peau de la jeune femme. « Oups, comme tu dis… » L’air amusé de Colleen te rassure et rien qu’à l’idée de nettoyer cette bêtise, tu tressaillis. Tu ne tardais pas à te mettre au travail en déposant tes lèvres contre cette peau qui t’invitait à la découvrir. Tu regrettais de ne pas pouvoir voir le visage de la jeune femme mais tu ressentais chacune de ses respirations et tu ne manquas pas la légère accélération de ces dernières alors que tu avançais dans ta tâche. Mais cela ne voulait pas dire que tu avais perdu le nord et tu demandais à Colleen quel était son livre préféré, dernière élément que tu lui avais demandé d’apporter et dont tu n’avais pas vu la couleur : « Je ne suis pas certaine de pouvoir me concentrer sur quoi que ce soit pendant que tu fais ça, tu m’as clairement surestimée… Mais si tu insistes… » Un sourire amusé se dessina sur tes lèvres. Le but était bien de la faire perdre sa concentration pour qu’elle ne soit plus animée que par les sensations que tu provoquais en elle. Mais tu la laissais s’éloigner pour attraper le livre. Cela ne dura que quelques secondes mais la sentir s’éloigner fut comme un déchirement. Alors quand elle reprit sa place, tu fis peu de cas de ce livre qu’elle avait posé à tes côtés, préférant te concentrer pour l’instant sur le nettoyage de la crème sur la peau de Colleen. Quelques baisers suffirent à venir à bout de ta bêtise préméditée et tu profitais de chaque seconde, gravant chaque réaction de Colleen dans ton esprit. Une fois terminé, tu attrapais une serviette pour finir le travail, laissant ton regard chargé de désir croiser de nouveau celui de Colleen. Tu te saisis du livre à vos côtés et cela sembla lui redonner la parole : « Si tu te moques, gare à tes fesses ! J’admets avoir un certain penchant pour les drames romantiques… Ça doit être mon côté fleur bleue qui ressort. Bref, j’ai choisi The Notebook, tu connais ? Si tu n’as jamais vu l’adaptation cinématographique, tu n’y couperas pas à mon retour de l’émission. Ça parle de l’histoire d’amour de deux jeunes dans les années trente, contée par un homme à une femme âgée atteinte d’Alzheimer. Ces deux jeunes viennent d’univers complètement différents : elle est issue d’une famille aisée, lui travaille comme ouvrier. Il est question de ségrégation sociale à l’époque, et le destin finit par les séparer… Jusqu’à ce qu’ils se retrouvent des années plus tard, quand elle est sur le point d’en épouser un autre. Je ne vais pas te spoiler la fin, sinon il n’y aura plus le moindre intérêt quand je te forcerai à regarder l’adaptation avec moi… Mais c’est une très belle histoire, et tant pis si ça fait de moi quelqu’un de niais. J’imagine que tes lectures sont un peu plus intellectuelles que les miennes… ? » Tu avais déjà entendu parler de ce livre ou de ce film ou des deux probablement mais tu n’avais jamais lu ni vu le film qui en avait découlé. Tu regardais Colleen s’animer en parlant de cette histoire d’amour aux multiples obstacles. Tu ne doutais pas que l’histoire devait bien se terminer, que d’une manière ou d’une autre les deux protagonistes finiraient par se retrouver. « Je n’ai pas l’intention de me moquer. Si c’est une histoire qui te touche, je la découvrirai avec plaisir, tu n’auras pas besoin de beaucoup insister. » Lui dis-tu car l’idée de passer la soirée à regarder un film avec Colleen dans tes bras, c’était … Peu importe le film que vous regarderiez, il y avait quelque chose d’intime à cette scène que tu pouvais déjà imaginer et tu serais idiot de refuser une telle invitation. « Merci d’avoir partagé ça avec moi. » Lui dis-tu en déposant de nouveau tes lèvres sur les siennes. Avec le départ de Colleen, tu pourrais même envisager de lire ce livre pendant son absence. Tu te promis de le faire si elle partait vraiment longtemps, si l’émission pour elle s’éternisait. Ce serait une bonne chose, le but était de gagner mais tu savais qu’elle te manquerait un peu plus tous les jours. « Je ne sais pas si mes lectures sont plus intellectuelles. Mon livre préféré est Sense & Sensibility de Jane Austen. Je ne doute pas que cela doit te parler. Je devais être au lycée à l’époque où mon professeur nous a fait une séquence sur la littérature britannique et je ne saurais dire pourquoi, ces deux soeurs m’ont touché plus que je ne l’aurais imaginé. Austen veille à ce que ses héroïnes trouvent le bonheur, ce livre est une manière pour moi de garder une lueur d’espoir. Malgré tout ce que j’ai traversé, je le trouverai peut-être aussi ce bonheur. » Dis-tu en haussant les épaules. Là, tout de suite, avec Colleen contre toi, tu avais bien l’impression de l’avoir trouvé en effet. Mais il était un peu tôt pour faire ce genre de confession. Tu espérais que la jolie brune en face de toi s’en doutait cependant, qu’elle avait compris ce que tu n’avais pas explicité. Le silence s’installa entre vous, un silence agréable et entrecoupé de baisers volés. Vous deviez être l’image parfaite de deux adolescents qui apprennent à se découvrir et cette image te fait sourire plus qu’autre chose. Ce n’est que quand tu vis le propriétaire de la boutique de surf commencer à ranger le matériel, au loin que tu compris qu’il était sans doute temps de rentrer. Vous aviez un peu de route devant vous et tu ne voulais pas que Colleen commence son aventure crevée. Alors même si ces mots, tu n’avais pas envi de les prononcer, c’est bien de tes lèvres qu’ils s’échappèrent : « J’aurais préféré rester encore un peu mais on devrait peut-être y aller. » Lui dis-tu en désignant le magasin de surf qui fermait. Tu n’avais pas regardé ton téléphone, tu ignorais l’heure qu’il était mais l’après-midi devait déjà toucher à sa fin. « Tu dois certainement avoir envie de te reposer et de profiter de Lou avant de partir. » Tu ne doutais pas que sa fille l’attendait de pied ferme si elle partait le lendemain. Caressant doucement sa joue, tu déposais un dernier baiser sur ses lèvres, regrettant déjà d’avoir brisé cette bulle. Pourtant, vous saviez tous les deux qu’elle ne serait pas éternelle.
@Colleen Sainsbury |
| | | | (#)Dim 26 Juil 2020 - 21:55 | |
| Pour la première fois depuis de longs mois, Colleen s’autorisait à espérer, à envisager avec sérénité son futur amoureux. Cela n’était plus arrivé depuis si longtemps que la sensation de son cœur qui cognait frénétiquement dans sa poitrine aurait pu à elle seule la faire vaciller. La force des premiers émois, ceux que l’on éprouvait au tout début, quand les fondations n’étaient pas posées, que l’équilibre de l’édifice demeurait précaire et que la crainte de tout voir s’écrouler vous hantait. C’était exactement ce que ressentait l’Anglaise à ce moment précis. Contrairement à la première fois – la seule fois – où elle avait ressenti toutes ces émotions la faire vibrer, elle avait conscience que l’échec qui pouvait en résulter était destructeur, susceptible de menacer son équilibre. C’était la raison pour laquelle elle avait renoncé avec autant de ferveur à l’éventualité même d’une relation amoureuse. Parce que c’était trop douloureux, parce que les regrets qui l’avaient assaillie quand elle avait réalisé le désastre de son mariage étaient bien trop lourds à porter. Pendant dix mois, elle était restée fidèle à cette volonté. Elle s’était tenue à l’écart des hommes sans éprouver la moindre envie d’abandonner ses principes. Et puis la soirée passée au Canvas avec Marius avait chamboulé ses convictions, et elle avait senti naître entre eux un magnétisme qu’elle avait tenté d’ignorer mais auquel, en réalité, elle n’avait pu rester insensible. Marius avait réveillé cette partie d’elle. Au fil de leurs entrevues cette certitude avait fini par s’ancrer en elle et si elle avait tenté de résister à la tentation tant bien que mal, elle avait bien senti qu’elle n’aurait peut-être pas la force nécessaire pour poursuivre ainsi. Et désormais, elle en avait la confirmation. Leurs lèvres s’étaient trouvées, reconnues. Colleen n’était parvenue à maîtriser ni ses gestes ni sa curiosité, et lui avait révélé l’urgence de son désir. Là, sur la plage, le masque était tombé, les réticences s’étaient envolées et les promesses s’étaient nouées. Et la vérité était qu’elle n’en regrettait pas un seul instant. Même si avec du recul elle aurait sans doute pu se montrer plus prudente, moins entreprenante, elle se raccrochait à la croyance que les remords valaient toujours mieux que les regrets. Si elle n’avait pas cédé à la tentation, elle aurait passé six semaines à ressasser sa déception et peut-être même que cela l’aurait empêchée de vivre à fond son aventure. Parce qu’elle avait laissé son cœur battre sa raison, elle savait qu’elle ne pourrait pas s’en vouloir de ne pas avoir essayé, et qu’elle chérirait au contraire ce souvenir jusqu’à son retour à Brisbane, peu importait quand il aurait réellement lieu. Cette étreinte resterait gravée dans son esprit pour les semaines à venir, comme une promesse, celle de pouvoir construire une nouvelle histoire. Car si elle avait encore eu des doutes au sujet de l’intérêt que lui portait Marius, la réaction qu’il avait eue quelques secondes plus tôt avait achevée de les écraser. Elle avait lu dans ses yeux un désir similaire au sien, et l’impatience avec laquelle il avait répondu à son baiser ne pouvait que confirmer la réciprocité de son attirance.
Quand leurs lèvres se séparèrent et qu’ils tentèrent tous les deux de reprendre leur souffle, Colleen en profita pour nicher son nez au creux de son cou et retrouver son parfum familier. Elle plaisanta à propos de Race of Australia, et même si elle savait qu’elle n’avait pas la moindre crédibilité en affirmant à voix haute son intérêt d’être éliminée d’entrée de jeu pour le retrouver le plus vite possible, au fond d’elle elle devait bien admettre que la proposition était alléchante. Néanmoins, agir de la sortir viendrait briser tout ce qu’elle avait tenté de construire depuis son arrivée à Brisbane, sa volonté de s’affranchir et de ne plus dépendre de la volonté d’autrui. Elle ne pouvait résolument plus raisonner de cette manière, ce serait l’erreur la plus grotesque qu’elle puisse commettre. En croisant le regard de Marius, elle réalisa qu’il ne la croyait pas une seule seconde et cela la fit sourire. Il posa sa main sur sa joue et lui confia qu’il comptait sur elle pour donner son maximum et aller le plus loin possible dans l’aventure. Selon ses dires, la récompense n’en serait que meilleure. Colleen acquiesça avant qu’il ne vienne lui voler un baiser, puis planta son regard dans le sien. Elle savait que le manque que susciteraient ces semaines passées loin de lui rendrait les retrouvailles encore plus intenses. L’attente était en proportion du bonheur qu’elle créait, avait dit un homme politique Canadien dont elle ne se rappelait pas le nom. Ces semaines passées loin de Marius seraient un challenge autant qu’une révélation, elle en était persuadée, et contrairement à ce qu’elle venait d’annoncer elle avait bien l’intention de jouer le jeu à fond, et de ne pas laisser son impatience compromettre les chances de son binôme d’aller le plus loin possible dans l’aventure. « C’est promis » Fit-elle, la moue solennelle et la main posée sur sa poitrine. « Et si ton frère devient un adversaire, compte sur moi pour lui botter les fesses » Ajouta-t-elle, son visage se fendant d’un sourire amusé.
Le cupcake dans lequel croqua Colleen vint malencontreusement s’écraser dans son cou, ou du moins était-ce ce que Marius voulait bien lui faire croire car le sourire qu’il arborait en disait long sur sa prétendue maladresse. Elle avait déjà aperçu cette lueur espiègle danser dans ses beaux yeux bleus, et elle avait l’impression qu’elle ne s’en lasserait jamais. Il saisit la chance de pouvoir rattraper ses bêtises sans rechigner, et mit tant de cœur à l’ouvrage que la sensation de ses lèvres contre sa peau lui arracha un soupir. Elle parvint néanmoins à se soustraire quelques secondes à son étreinte pour récupérer le livre qu’elle avait glissé dans son sac à dos avant de partir, et le déposa derrière lui. Dès qu’elle reprit sa place initiale, les lèvres de Marius vinrent de nouveau s’attaquer à la crème qui s’étalait sur sa peau et Colleen se cambra légèrement contre lui. Elle attendit qu’il termine pour pouvoir se concentrer pleinement sur la description de son livre, et ne se lança que lorsque son regard retrouva le sien. Elle lui dévoila l’intrigue de The Notebook, tout en évoquant la possibilité qu’ils visionnent un jour son adaptation cinématographique ensemble. Si elle avait appréhendé sa réaction, il la surprit en se montrant compréhensif et en acceptant même sa proposition sans hésiter. Il posa de nouveau ses lèvres contre les siennes un bref instant, et lui parla à son tour du livre qui l’avait le plus touché. Elle fut de nouveau surprise quand il lui en révéla le titre. Sense and Sensibility, un bijou de la littérature britannique signé Jane Austen. Colleen ouvrit de grands yeux ronds d’étonnement mais ne l’interrompit pas quand il lui expliqua ses raisons. Ce ne fut que lorsqu’il termina qu’elle esquissa un sourire sincère, dénué de sarcasme. « Tu es étonnant ». Elle fit glisser son index sur sa joue et dessina de petits ronds dans sa barbe de trois jours. « Je n’aurais jamais pu imaginer que tu choisirais ce livre en particulier, mais effectivement ça me parle. J’ai déjà vu l’adaptation mais je ne refuserais pour rien au monde de la revoir si l’envie te prenait » Ajouta-t-elle avec un clin d’œil. Elle plaça sa deuxième main sur sa joue et vint poser son front contre le sien. « Quant au bonheur… Au risque de le répéter : tu le mérites. Et si je peux y contribuer, même en partie… ». Sa bouche retrouva la sienne et elle l’embrassa délicatement, avec une infinie douceur. Puis elle dégagea son visage du sien et lui sourit. Par la suite, elle quitta sa position sur ses cuisses et s’allongea dans le sable à côté de la couverture que Marius avait étalée. Elle saisit la main de ce dernier et l’encouragea à en faire de même.
Elle était incapable de dire combien de temps ils restèrent ainsi, les yeux s’intéressant alternativement au ciel parsemé de nuages au-dessus de leurs têtes et au regard de l’autre. Là, étendus sur le sable, ils échangèrent quelques baisers, savourant ces derniers moments passés ensemble sans savoir quand ils se reverraient la prochaine fois. Au bout d’un certain temps, quand elle commença à frissonner sans sa veste, Marius lui annonça qu’il était sans doute temps d’y aller. Parce qu’elle savait qu’il avait raison, Colleen hocha la tête sans parvenir à dissimuler la tristesse qui se logea aussitôt dans son regard à la perspective de ne plus le voir avant longtemps. « Tu as raison ». Il l’embrassa furtivement puis se relevant, il lui tendit la main pour l’aider. Une fois debout, elle épousseta ses vêtements et commença à réunir leurs affaires. Quelques minutes plus tard, alors qu’ils étaient installés dans la voiture, Colleen posa sa main sur celle de Marius, l’intimant d’attendre avant de démarrer. « Merci infiniment pour cette journée. C’était le meilleur pré-anniversaire de toute ma vie ». Avec un sourire, elle fit remonter sa main jusqu’à son épaule, son cou puis sa joue. « Tu vas me manquer ». Et tant pis si elle radotait, tant pis si elle avait l’air niaise ainsi. Parce que c’était la vérité, sa vérité, une vérité qu’elle voulait ancrer dans l’esprit de Marius. Elle ne résista pas à l’envie de l’embrasser une dernière fois avant de repartir vers Brisbane et se rapprocha de lui. N’ayant pas la moindre envie de le quitter, elle prolongea le baiser le plus longtemps possible, ses doigts parcourant inlassablement son doux visage, inscrivant dans sa mémoire ses traits pour être certaine de ne jamais, jamais les oublier.
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| | | | | | | | no one knows how far we’ll go (colleen) |
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