« Oh, ne t’inquiète pas pour eux. Quelque chose me dit qu’ils le seront bien assez tôt quand Rüya m’aura tagué, c’est comme ça qu’on dit ? Sur tous les réseaux sociaux. » Je lui parle de la jeune femme comme s’il la connaissait lui aussi, alors qu’en fait pas du tout, il faudrait peut-être que j’évite de partir dans des précisions un peu trop personnelles ou alors je vais le tuer d’ennui le pauvre. Je m’excuse du coup par avance si jamais je parle trop, on a même plutôt échangé nos casquettes parce qu’avant c’était lui qui ne pouvait s’empêcher de gesticuler dans tous les sens, sûrement la fatigue ou le stress qui prend le dessus sur l’excitation. « Il ne faut vraiment pas hésiter à me le dire. Parfois je ne suis vraiment pas doué pour tenir une conversation et je peux très vite partir dans tous les sens. » j’en rigole comme un con alors que Marius et Ginny seraient les premiers à approuver mes dires, tout comme mes frères. Finalement, j’arrive à trouver un compromis, un sujet qui le passionne lui aussi tout autant, quelque chose qu’il aimerait même reprendre dans un futur plus ou moins proche, le surf. « Super doué, je ne sais pas vraiment si on peut dire ça, mais je me démerde plutôt bien ouais. J’étais présent à Nazaré quand il y a eu la plus grande vague surfée au monde. Vingt quatre mètres, rien que ça. » Bon, je ne l’ai clairement pas fait, je n’ai pas du tout le niveau pour ce genre de vague, mais de voir le brésilien le faire lui, c’était tout simplement inouï et inimaginable pour moi. Il en vient à me proposer une petite séance quand on aura terminé notre petit cheminement jusqu’à Perth, comment je peux le lui refuser ? Je ne refuse jamais une session de surf. « Bah tu sais quoi, on ira surfer pour fêter notre victoire. Ça sera notre petite fête à nous. » On s’autoproclame déjà grand vainqueur de l’émission alors qu’on en est quand même bien loin, si ça se trouve on est même actuellement dans les derniers, mais bon, pour le moment laissons place à la bonne humeur. Il suffisait que je pense à ça et voilà que le karma vient frapper à notre porte. John s’arrête sur le côté et après quelques minutes on se décide de sortir pour voir ce qu’il se passe. « Rien de grave ? On peut faire quelque chose pour t’aider ? » Je ne veux pas trop faire mon lourd, surtout qu’il nous aide bénévolement et qu’il ne nous demande strictement rien en retour pour ça, mais je ne peux tout de même m’empêcher de voir les chiffres défiler sur ma montre. Visiblement ce n’est rien de grave, ça va seulement prendre encore un peu de temps. Je soupire de soulagement, mais aussi un peu, ça me fait chier, vous voyez le genre ? On va dire que ça nous permet au moins de prendre un peu l’air. « Tu penses qu’on se situe plutôt bien niveau classement par rapport aux autres compétiteurs ? » Je me retourne alors vers Kane pour lui poser la question, les deux bras posés sur le toit de la voiture.

« Oh, ne t’inquiète pas pour eux. Quelque chose me dit qu’ils le seront bien assez tôt quand Rüya m’aura tagué, c’est comme ça qu’on dit ? Sur tous les réseaux sociaux. » Rüya encore. Après c’est vrai que c’est de la même chose qu’on parle, donc logique qu’il remette son étudiante sur le tapis mais… En tout cas il me fait beaucoup rire avec son ‘c’est comme ça qu’on dit?’. Il a 60 ans mais il en fait 30 c’est ça le truc ? Nan il est juste pas adepte des réseaux sociaux. Ca va sous le sens quand tu vois que le gars il est dans l’archéologie. Les vieux trucs. Il est adorable quand il essaie de me rassurer, mais y’a vraiment pas besoin. Cela dit j’apprécie.« Y’a aucun soucis Liam. Pas encore. » Je tente de mettre une touche d’humour mais c’est la vérité. On sait tous que plus on avance dans l’aventure, plus on va se taper sur le système l’un l’autre. C’est mathématique. On a besoin de notre espace et on ne l’aura pas. Constamment l’un avec l’autre.

« Super doué, je ne sais pas vraiment si on peut dire ça, mais je me démerde plutôt bien ouais…» Et puis il enchaine sur un fun fact dans le milieu du surf. Il a l’air de vraiment bien s’y connaître et j’aime écouter les gens parler de ce qu’ils aiment faire. « Bah tu sais quoi, on ira surfer pour fêter notre victoire. Ça sera notre petite fête à nous. » Je fais « oui » de la tête très vivement. »

« Oui oui oui ! Même si je vais sûrement finir noyé tout le temps mais oui, j’approuve. » J’aime qu’on pense à notre victoire comme si c’était acquis. Non, on a beaucoup d’espoir, c’est tout. C’est cool. Un petit tour pour vérifier John et la voiture. Apparemment ça va, Liam est déjà de retour vers moi. « Tu penses qu’on se situe plutôt bien niveau classement par rapport aux autres compétiteurs ? » « Aucune idée. On les a pas vu partir et on en a pas croisé un seul… Ca peut être très bon signe comme très mauvais. » Je fronce le nez et puis je repense à ce que Grace m’a dit. « Tu sais quoi, on devrait aller à Perth, même si on perd. On a le temps non ? T’as prévu 5 semaines de libre dans ta routine. On va jusqu’à Perth, on se fait notre soirée avec le surf. Juste comme ça. Pour le kiffe. Pour des petites vacances. Tu veux ? » Parce que moi je veux.

Kane se montre plus que modeste quand il commence à me faire rire sur le fait qu’il pourrait être amené à se noyer toutes les minutes si jamais il recommence à monter sur une planche et je lui fais un signe de la tête comme pour lui dire, not on my watch. Le blondinet soulève un détail important, on a encore croisé personne. Il n’y a pas mille solutions, soit on est devant, soit on est derrière tout le monde ou soit on est perdu. La dernière me paraît très peu probable, je me suis assuré que chaque panneau d’indication du n° de la route correspondent à ce que j’ai tracé sur la carte. Je n’ai pas pu m’être trompé sur ce détail. « Dans tous les cas, il faut au moins qu’on arrive à Charleville dans un premier temps. C’est le plus important. » Perth est encore très loin et il y a plusieurs étapes, donc ce n’est pas non plus une seule et unique course de qui va aller sur la côte ouest en premier et le plus vite. « Ecoute, si on ne s’étripe pas avant la fin de l’émission si on est éliminé pourquoi pas. » Je ne veux pas lui avouer que même si j’ai bloqué cinq semaines dans mon planning ça ne me dérangerait pas de directement retourner à Brisbane, il me reste encore pas mal de travail et on ne sait jamais ce qu’il peut se passer quand tu laisses faire le tien être fait par les autres. Ouais, je suis aussi un peu maniaque sur certains points. John nous invite à regagner la voiture alors qu’il a terminé de réparer la panne, un souffle de soulagement et nous voilà reparti. « On ne doit plus être très loin de Dalby, on est encore dans les temps je pense. » Je surveille un peu trop souvent ma montre, mais le temps c’est de l’argent comme on dit et encore plus quand il y a quelques milliers de dollars à gagner au bout du compte.

Je ne me suis pas trompé, le reste de la route s’est faite un peu plus dans le silence, la fatigue ayant petit à petit réussi à se glisser sous nos yeux. Mes paupières sont lourdes, mais l’annonce de John me fait sursauter et me retire tout de suite de ce sommeil qui m’attendait. « On est finalement arrivé à Dalby ?» La pancarte de la ville est juste sous nos yeux. Ce fut long et on a presque eu des problèmes, mais notre mini étape et là, à quelques mètres.