Encore une route. Elles se ressemblent toutes les putains de routes d’Australie. Ca m’énerve. Je sais pas où je suis mais je suis toujours le pouce en l’air au bord de la route. J’ai pas de coéquipier à proximité. Je ne sais pas où est Martin, il a dû aller chercher une voiture plus loin. J’ai arrêté de m’inquiéter quand je me suis rendue compte qu’il finissait toujours par me retrouver quand il en avait besoin. Et là, ça me fait de l’air. Il est insupportable aujourd’hui, et je suis de mauvaise humeur. Donc mieux vaut ne pas être dans mon passage. Une nouvelle voiture passe devant moi sans s’arrêter et j’abandonne. Je regarde autour de moi et je vois un supermarché. J’ai 5 dollars dans ma poche, j’avais oublié qu’on nous demandait de vivre avec si peu d’argent. Avec 5 dollars est ce qu’on peut seulement acheter un grain de riz. Je regarde sûrement ce billet comme si c’était un ovni.

J’avance et un nouveau duo. Enfin, Jack tout seul. Lui aussi a dû perdre sa partenaire. Ou se perdre tout court. “T’en as pas marre de me suivre.” Je suis de l’autre côté de la route. Autant s’occuper un peu alors qu’il est certainement la seule personne en capacité de me changer les idées quand je suis dans ce genre d’état. Je le regarde faire, il a presque l’air de savoir ce qu’il fait le con. Mais je me tais, on ne va certainement pas partir sur des compliments, il en profiterait trop. “Y’a un supermarché.” Je pense qu’il l’a vu vu qu’il est juste derrière lui. “Viens.” C’est pas une question. C’est pas mon binôme mais j’ai bien besoin d’une pause. Ca faisait au moins 10 minutes que j’étais debout à attendre. 10 minutes qui m’ont semblées être 10 heures. Je déteste attendre, je déteste être debout en baskets, et là, je détestais être seule en plus de tout ça. Si Martin s’en va, sur qui je râle moi ?


@Jack Epstein @May Glitters

Une autre route, une sur laquelle ils ne se sont pas perdus et ça c'est probablement la plus belle réussite depuis de longues heures. Ils ont trouvé des toilettes publiques sur le chemin et c'était le Graal ça aussi, leur permettant de laver leurs nuques poisseuses et leurs cheveux emmêlés avec du savon à main qui puait le chewing gum mais qui était toujours moins pire que la sueur et les restes de boue du bush australien.

“T’en as pas marre de me suivre.” il pourrait lui dire l'inverse en riant, et ce serait tout aussi vrai. Parce que la carte pointe vers Charleville et pas vers Waterhouse est ses boucles éparses, parce que la map offre des routes vers leur première destination et pas vers les piques acides de la jeune riche qui aujourd'hui ressemble bien plus à une aventurière qu'à une starlette. « T'as bronzé depuis la dernière fois. Ça te va bien. » faut qu'il le souligne d'ailleurs. Que le soleil qui a naturellement doré sa peau vaut mieux que tout le maquillage et les lampes artificielles du monde en l'instant.

Derrière eux, “Y’a un supermarché.” et il l'a vu, Colleen aussi. Ils ont regardé ce qu'ils tenaient comme ressources monétaires, il est en charge de nourrir les troupes ou du moins de tenter. Avec peu de moyens il est pas particulièrement stressé. “Viens.” alors ils vont faire des emplètes ensembles, maintenant? « Seulement si tu passes derrière pour que je râle que c'est désormais toi, qui me suis. » ça valait la peine de le dire, maintenant qu'elle l'encourage à la suivre elle qui râlait de l'inverse la seconde d'avant.

« C'est quand la dernière fois où t'as mangé? » qu'il finit par demander, de nulle part, s'inquiétant comme le canadien qu'il personnifie qu'elle ait quand même au moins un peu réussi à se mettre un truc sous la dent au fil de l'aventure.

Je suis un peu plus souriante quand je sais que je vais pouvoir faire chier quelqu’un d’autre que Martin. Jack m’amuse déjà avec sa tête d’aventurier. Il a l’air épuisé. Qu’est ce qu’il a bien pu faire depuis ces deux premiers jours ? Je me pose la question en dodelinant de la tête. “1 minute que je suis là et t’as déjà maté mon bronzage.” Je lève les yeux au ciel en restant de mon côté de la route pour le moment. “La poussière te va bien au teint.” Qu’est ce qu’il a foutu ? Il a la tête du type qui avait tellement de poussière et de terre sur le visage que même quand il l’a lavé ça a laissé des marques.

Je montre le supermarché. C’est là que j’allais avant de le croiser de nouveau. Vous croyez qu’on peut demander d’échanger les coéquipiers ? Parce que Jack est pour l’instant bien moins lourd que Martin, qui, j’espère, est encore en train de chercher une voiture. Sinon, on est dans la merde pour bouger d’ici avant la fin de la journée. “Jamais de la vie.” Et j’accélère le pas pour lui passer devant. “Tu peux mieux admirer le bronzage de mon dos je suis devant.” Ouais je parle que du bronzage, pour l’instant. J’ai relevé mes cheveux, je le fais rarement ça. J’ai les cheveux à moitié frisés aussi, parce qu’ils sont au naturel et ça aussi ça arrive rarement. J’attends qu’il me suive, parce que oui, ce sera toujours lui le suiveur dans l’histoire.

Et c’est qu’il s’inquiète pour ma santé, il veut savoir comment je vais, si j’ai mangé. Mes sourcils se froncent. J’ai mangé quand on était à l’hôtel ce matin, quand Martin rageait parce que son lait était du lait de vache. Moi j’ai mangé pour au moins 5 personnes au cas où je ne puisse rien avaler de la journée. “Ce matin.” Je ne lutte même pas un peu. “Tu crois que je vais survivre ?” Je le regarde, faussement choquée. “Et toi ? T’as mangé et dormi ?” Si je fais des updates jour après jour il doit les faire aussi.

Elle est de l'autre côté de la rue et elle est belle Ivy, elle le sait. Elle le sait quand elle passe ses doigts de façon désabusée dans ses mèches quand tout est probablement calculé au millimètre près, quand elle bat des paupières et affiche son sourire de conquérante deux jours à peine après le début de l'aventure. Il savait que la Waterhouse serait à sa place ici - et lui, il cherche des yeux où se trouve son binôme à elle parce que si elle est ainsi, c'est soit parce qu'elle la tué, soit parce qu'elle lui a fermé la gueule. Dans les deux cas, ça l'amuse Jack. Ivy fera de la bonne télé.

“1 minute que je suis là et t’as déjà maté mon bronzage.”
« Je suis incorrigible. »
“La poussière te va bien au teint.”
« On a rencontré des moines. »

Les échanges se crient d'un côté à l'autre de la route, ils ont l'air de deux gamins idiots et c'est pour pour déplaire aux caméramans qui apparemment s'amusent à jouer du ping pong de leurs échanges qui ne font aucun sens. Elle a dormi où, elle?

“Jamais de la vie.” la traînée de poussière qu'elle laisse dans son sillage force le canadien à hausser le sourcil, dubitatif. “Tu peux mieux admirer le bronzage de mon dos je suis devant.” il mate rien du tout en vrai, sauf le panneau publicitaire plus loin sur la route, par-dessus sa tête de blonde déterminée, qui vante une marque lambda de clopes. Il en rêve, là. Bien plus que de bouffer. D'ailleurs. “Ce matin.” sa tête hoche, il confirme qu'il a entendu et que ça le rassure, du moins, un peu. “Tu crois que je vais survivre ?” « Tu survis très bien pour l'instant. » comme l'évidence. Il le lui dirait si elle le lui demanderait qu'elle a de quoi aller loin. “Et toi ? T’as mangé et dormi ?” les questions ne l'étonnent pas, lui qui devrait se demander si elle use de ruse ou si elle veut vraiment savoir à son tour. Faut croire qu'il lui fait confiance, ou qu'il est sacrément idiot et aveugle. Un peu des deux? « Oui, et oui. » simple, concis. Mais encore? « C'était dans une église. » qu'il explique, ses moines, la nuit qu'ils se sont grattées à Inglewood avant de reprendre la route de façon bien plus confiante. « Ils m'ont même pas demandé de confesser mes pêchés, ils avaient fait un voeu de silence. » qu'il pouffe, grand gamin naïf.

Je pouffe de rire, ma mauvaise humeur part quelques secondes. Un caméraman me suit, et ce n’est pas pour me déplaire. Je lève les yeux au ciel, croise les bras sur ma poitrine quand je lui parle d’un côté de la route. Quand ma voix porte bien plus que la sienne parce que moi je suis habituée à hurler sur le monde entier. Des moines ? Qu’est ce qu’il raconte ? En tout cas, ça a l’air de plaire aux deux caméras qui nous filment alors qu’on raconte tout et n’importe quoi. Même à des kilomètres de Brisbane, même sur la route, même pendant une aventure filmée, on arrête jamais de jouer. C’est certainement pour ça que je l’ai rejoint, et que je n’ai pas encore prévu de lui voler une voiture, ou ses 5 dollars qu’il doit encore avoir sur lui.

“Pour l’instant ?” Mon sourcil se hausse, est ce qu’il aurait des doutes sur ma capacité à aller loin dans cette aventure ? Il y a deux parties de moi qui entrent en collision actuellement. Celle qui veut retrouver ses talons, son appartement, ses soirées et tout ce qu’elle fait à Brisbane. Et celle qui est compétitrice, et qui a envie d’éliminer le monde entier pour remporter la victoire. Et tout le monde le sait, l’esprit de compétition est plus fort que tout. Donc je suis là, en basket. Pas maquillée, pas coiffée. Une tenue d’aventurière sur le dos. Qui aurait cru que ce serait possible de me voir dans un état pareil un jour ? Certainement pas moi. Mais l’appelle de l’argent est fort, surtout quand j’ai l’impression de commencer à en manquer, et ça, c’est une sensation que je n’avais jamais connu. Il s’intéresse alors je m’intéresse. C’était quoi sa phrase déjà ? Ah oui, tu partages je partage. Ca sonne comme un pacte non ?

“Ca explique les moines.” Il y avait donc quelque chose derrière toute cette explication foireuse. “Si t’avais dû te confesser je pense que tu serais pas encore sorti de l’Eglise.” Je continue de le taquiner parce que c’est le fonctionnement qu’on a. Mais il a l’air d’en avoir vécu des choses Jack, il ne fait pas parti des gens moralisateurs, mais il fait sûrement partie de ceux qui pourraient passer des jours à parler pour raconter toutes les expériences qu’il a pu avoir au cours de sa vie. Je le vois lorgner sur le panneau d’affichage des clopes. “C’est pas bon pour la santé.” Ivy moralisatrice, moi j’aime bien, même si je ne devrais pas. Parce que j’aurais bien fumé quelque chose moi aussi.

“Ca explique les moines.” elle a de la suite dans les idées Ivy, et il se réjouit comme un gamin de pouvoir partager son aventure avec elle le temps de la lui relater le sourire aux lèvres. « T'aurais adoré. Peu importe ce qu'on disait, ils répondent pas. Ils ont fait un voeux de silence les pauvres gars. » il la connaît à force, il sait qu'elle se serait amusée comme une fillette à la veille de Noël si elle avait été face aux moines à tenter de leur dire des insanités encore et toujours jusqu'à ce qu'ils ne finissent par jamais céder à son paquet de profanités. Il aurait payé, littéralement avec les maigres cinq dollars dans ses poches - pour voir un tel spectacle. “Si t’avais dû te confesser je pense que tu serais pas encore sorti de l’Eglise.” son sourcil se hausse, elle lui attribue des intentions qui sont totalement véridiques parce qu'entre vous et moi, il a le profil Jack. Les cheveux en bataille et la voix rauque, la peau bariolée de cicatrices de bagarres et les cernes de vie bien plus que de manque de sommeil. « Dur. » on lit en lui comme dans un livre ouvert, la drogue, la musique, les vices et les nuits ont eu raison de lui. « Mais vrai. » pourtant il assume, qui ça étonne.

Elle repère son air qui dérive par-delà son épaule pour repérer le panneau publicitaire de clopes. “C’est pas bon pour la santé.” son avertissement passe comme dans du beurre, elle-même n'est pas à une cigarette près. « Faut bien mourir de quelque chose. » et s'il dit qu'il l'imagine elle, mourir en Marilyn, dans ses draps de satin et son parfum et dans la fleur de l'âge, ça compte pour quoi? Lui, il s'étonne que son coeur ait pas pété avec tout ce qu'il lui a imposé au fil des années. « Je pense pas qu'ils ont de champagne ici. » nargue-t-il, le canadien de plus en plus dans son élément dehors, de moins en moins lorsqu'ils passent les portes automatisées d'un supermarché de bord de route, climatisé et aux rations diminuées.

Martin devrait faire voeux de silence. Mais Jack non, j’aime bien quand on parle comme ça. Il me change un peu les idées et ça m’amuse d’hurler d’un côté à l’autre de la route. Les caméramans ont l’air de bien aimé notre dynamique eux aussi puisqu’ils nous suivent absolument partout. Film chaque instant qu’on passe là. Il est 100% naturel, et moi je le suis bien moins. Mais lui il fait ressortir ce côté que je ne laisse pas voir à tout le monde, et la seule chose qui me gêne là, c’est que les caméras la voient aussi cette partie. Donc je cache. Je repasse devant lui, éternelle compétitrice. Chaque moment est bon pour lui montrer que je passerai toujours devant lui. Et surtout dans ce jeu, j’ai pour objectif d’être première, mais je garde espoir que ce soit lui le deuxième. “Vérité.” La vérité est souvent dure et n’importe qui ce serait énervé. “Je sais.” Il n’a pas eu besoin de le dire. Il sait bien moins bien cacher tout ça que moi.

“Tu penses déjà à mourir ?” Je hausse un sourcil. Qu’il attende au moins de savoir jusqu’où il peut aller dans l’aventure avant de se faire éliminer par la mort. “Tu crois que si je force mon binôme à fumer il pourrait mourir sur le trajet ?” Je pouffe de rire, Martin a le don de m’énerver. Il y avait 2 divas dans cette aventure, et ils les ont mis en duo les cons. On avance jusqu’au supermarché et je suis revenue à sa hauteur. “Comment ça ? On peut boire autre chose que du Champagne dans la vie ?” Je fais une moue faussement outrée. L’alcool me manque, alors j’essaie d’en rire plutôt que d’y penser trop longtemps. “Tu m’offres quoi ?” Je pousse la porte sans faire attention à ceux qui nous disent bonjour. “On fait une émission, y’a des caméras.” Pas un regard pour les caissières qui sont déjà certainement en train de trépigner d’impatience à l’idée d’avoir une seconde devant une caméra. “T’es censé pouvoir acheter quoi avec 5 dollars ?” Là par contre il doit sûrement être bien plus expérimenté que moi.

“Tu penses déjà à mourir ?”
« Ils me qualifient de doyen ; ça doit vouloir dire que je suis celui le plus proche de, en effet. »

Il a pas peur de la mort Jack, ni avant, ni jamais. Même quand il se noyait dans sa gerbe en pleine soirée où tous les vices s'étaient cumulés, jamais il n'avait eu la frousse de crever. Il aurait pu et certains diraient même qu'à une époque il aurait dû. Pourtant il est encore là, son corps malmené par les années, son corps qu'il tente de soigner quand c'est pas donné. “Tu crois que si je force mon binôme à fumer il pourrait mourir sur le trajet ?” « Il est pas si pire que ça. » il sait pas trop pourquoi il défend Martin quand il le connaît bien moins qu'Ivy, mais il est comme ça Jack. À prendre le parti des opprimés, à être celui qui supporte les causes perdues à défaut qu'on supporte la sienne.

La porte qu'ils passent, la fraîcheur du commerce qui jure avec la météo chaudement aride dehors. “Comment ça ? On peut boire autre chose que du Champagne dans la vie ?” sa voix chante, elle feint d'être outrée, ses fossettes se creusent adorablement sur ses joues rosies par le soleil et non des litres de maquillage crémeux et collant. « Panique pas, mais aussi, tu peux manger autre chose que du caviar. » qu'il chuchote, comme la pire des confidences, avant de rire de plus belle.

“Tu m’offres quoi ?”
« Mon respect éternel. »

Ses yeux dérivent sur les étalages, il fait inventaire de ce qui est possible de mettre entre ses paumes sans brûler stupidement le budget qu'il garde férocement comme le trésorier responsable que personne aurait cru qu'un jour il serait. “On fait une émission, y’a des caméras.” les caissières relèvent la tête, elles grommellent, il rassure. « Ils vont vous faire signer des décharges si vous voulez pas être à l'écran. » un caméraman dégaine naturellement les formulaires au même moment. “T’es censé pouvoir acheter quoi avec 5 dollars ?”

« Des pâtes. » qu'il commence, lui pointant le rayon. Ça coûte pas cher et ça remplit bien, ça aide aussi quand y'a des aventures qui demandent de courir ou de survivre à un kangourou. « Des conserves. » de haricots, de légumes, de poisson. C'est pas très glorieux, mais en frottant le rebord contre le bitume d'asphalte on les ouvre sans ouvre-boîte et on peut avoir protéines et fibres de plus à se mettre sous la dent. « Et du chewing-gum, ça c'est ta surprise. Juste si t'es sage. » il attrape le paquet à la menthe poivrée ; ça leur sauvera sur le dentifrice qu'il pense.

”Je dois t’appeler papy Jack ?” Je hausse un sourcil avant de pouffer de rire. Ce serait étrange, ce surnom ne lui va pas si bien que ça. Il a beau être le doyen de cette aventure, je pense qu’il fait partie de ceux qui sont les plus jeune dans leur tête. “C’est parce que tu l’as pas en binôme que tu dis ça.” Je grogne, je boude. Moi aussi certains diraient que je suis une enfant dans ma tête, et je ne pense pas qu’ils aient tort. Mais il aime tout le monde Jack, dans tous les cas il aurait pensé que son binôme aurait été le meilleur qu’il aurait pu avoir. Même si on sait très bien tous les deux que le meilleur duo qu’il aurait pu avoir c’était avec moi. On aurait su se gérer, j’en suis persuadée. Et personne n’aurait eu aucune chance de nous battre, jamais.

Pas de Champagne, je ne sais pas si je vais m’en remettre. J’aurais bien bu une coupe là, enfin, j’aurais pu boire n’importe quoi tant qu’il y avait un peu d’alcool à l’intérieur. Mon rire suit le sien avant qu’il ne commence à chuchoter. “Non je te crois pas.” Je ne suis même pas une grande fan de caviar, c’est cliché des riches, et pourtant, ce n’est même pas si bon que ça. Je pose une main sur mon coeur, faussement outrée par ses propos. “Si tu me dis qu’il existe d’autres champignons que les truffes dans ce genre de magasin je pense que je fais un malaise.” Il veut jouer sur les clichés je le suis jusqu’au bout. J’ai l’impression de me retrouver à Brisbane, loin de cette aventure quand je discute avec lui.

“Ca je l’avais avant qu’on se retrouve ici.” Comme le monde entier. Il n’est jamais méchant Jack, il met toujours tout le monde sur le même pied d’égalité. On est bien différents des fois. Je parle, et il calme les tensions. Il passe derrière moi pour ramasser les pots cassés à chaque fois qu’il en a l’occasion Epstein. Je ne sais pas quoi en penser, mais je continue de me dire qu’il ferait ça pour n’importe qui et ça me frustre un peu.

Ma tête se décompose sûrement à chaque fois qu’il parle de quelque chose qu’on pourrait acheter pour le manger. “C’est pas des choses qu’on doit faire cuire ça ?” Je touche les conserves comme si j’étais en train de découvrir une espèces d’insectes encore inconnu par les scientifiques, un air de dégoût toujours ancré sur le visage quand mes yeux font des allers-retour entre le visage du brun et les conserves. “Déjà, je suis toujours sage.” Oh que c’est faux. “Et, est ce que tu serais en train d’insinuer que j’ai mauvaise haleine ?”

Le supermarché est vraiment pas si pire que ça. Il a des airs de Graal quand ils sont perdus au beau milieu du bush et que personne n'a de quoi se penser grand cuisinier. “Non je te crois pas.” elle le fait rire, elle le fait toujours rire quand elle joue les ingénues trop riches pour la ligue. Il sait qu'elle joue un rôle Ivy, elle le joue à la perfection. Un jour elle arrêtera sûrement de tourner autour du pot et elle lui fera assez confiance pour lui montrer la vraie elle. D'ici là, il attend. “Si tu me dis qu’il existe d’autres champignons que les truffes dans ce genre de magasin je pense que je fais un malaise.” il est patient, il a tout son temps. « Les seuls champignons que tu vas trouver ici ils sont dans leurs litres de lait j'crois. » sa main elle, s'empresse de saisir le premier carton à disposition, l'agitant sous ses yeux avant de pouffer à son oreille. « Reste loin, c'est dangereux. Avril 2020. »

“Ca je l’avais avant qu’on se retrouve ici.” un nouvel éclat de rire, alors qu'il laisse ses pas se perdre entre les allées mais ses prunelles glisser sur le haut du visage d'Ivy de l'autre côté des étagères alignées, presque vidées. « T'es toujours aussi sûre de toi ou c'est traitement de faveur avec moi? » elle doit savoir qu'elle peut aller loin et fort avec lui, qu'il s'en amusera toujours. Probablement pour ça qu'elle s'amuse à autant le piquer encore et éternellement.

Les conserves lui plaisent pas, qui ça étonne. “C’est pas des choses qu’on doit faire cuire ça ?” « Déjà fait, t'es en retard Waterhouse. » déjà cuit, déjà prêt à consommer. Il serait prêt à parier qu'elle a jamais utilisé un ouvre-boîte de sa vie et pour ça, il en est presque attendri. « Si tu trouves un four, du riz c'est bien aussi. » pour cuire, des trucs. Il lui donne toutes les réponses sans même qu'elle ait posé la moindre question. Une alliance, qu'ils ont.

“Déjà, je suis toujours sage.”  il éclate de rire, ses pattes d'oie se dessinent, ses fossettes avec.
“Et, est ce que tu serais en train d’insinuer que j’ai mauvaise haleine ?” ses paumes maintenant, qu'il lève en l'air, drapeau blanc et paquet de gomme à mâcher qui s'échoue lamentablement au sol à leurs pieds.
« Punis pas le messager. » personne a ragé sur sa possible mauvaise haleine parce que tout le monde rage sur les délais à respecter, pas sur l'esthétisme de chacun.

Epstein, lui, il râle à peine quand il se penche pour attraper le paquet, qu'il laisse son regard dériver vers les échantillons de savons et d'autres produits de beauté à hauteur de regard. « Ça sent presque ton shampooing. » il souffle, une bouteille ouverte qu'il a humée, redressant du menton toujours en tailleur au sol. Ça dit "secret nocturne" sur l'emballage et ça le fait rire, allez savoir.

”Là par contre je vais vomir.” Et ça c’est pas une blague quand il me parle de champignons dans du lait. Quelle horreur. Et ça le fait rire en plus alors je le bouscule légèrement par l’épaule. “Ils mettent vraiment des produits périmés ?” Ok là tout de suite j’ai vraiment pas envie d’acheter quoi que ce soit ici. Je compte pas mourir déjà moi. Je suis pas la doyenne contrairement à Jack. Et puis mourir la première semaine à cause d’une bouteille de lait ça ce serait vraiment la honte. Je le fais rire, ça me fait rire aussi. Mon rire finit souvent par suivre le sien ces derniers temps. “Y’a vraiment une bonne réponse à cette question ?” On se retrouve à se regarder par dessus une étagère, je les vois ses yeux qui cherchent mon visage, il doit certainement voir les miens qu’il voit de son côté aussi.

Déjà fait ? Qu’est ce qui est déjà fait ? “Oh…” C’est déjà cuit. Qui mange ce genre de trucs sérieux ? J’ai la nausée rien qu’à l’idée que je peut-être devoir en manger si on ne trouve pas de maison un jour. “Tu crois qu’on peut avoir un four portable pour 5 dollars?” Je parle de choses que je ne connais pas. Je vis dans l’inconnu là, Jack me guide, il a l’air de s’y connaître en supermarché. J’ai du mal à me souvenir de la dernière fois où j’ai fait mes courses toute seule. Et il ne juge pas Jack, c’est étonnant de voir à quel point il est capable de tout accepter.

“Je pourrais me vexer de t’entendre rire comme ça.” Mais je me vexe pas parce que j’ai moi-même ris à cette blague. Je serais bien ennuyeuse si je voulais toujours être sage. Le monde s'ennuierait si je l’étais. Là par contre je vais me vexer, je sors ma moue boudeuse. Je n’ai pas mauvaise haleine, personne n’a pu vérifier ça. “Jette la faute sur quelqu’un d’autre, t’es la seule personne de qui je me suis assez rapprochée pour que tu puisses connaitre mon haleine.” Parce que je reste loin de Martin, je reste loin du reste du monde. Mais pas de Jack.

Ca sent comme mon shampoing, je tourne la tête vers lui. Je ne lâche pas ses yeux bien souvent, mais là c’est de l’incompréhension qu’il doit y lire. “Qui te dit que j’utilise toujours le même shampoing ?” Mon sourcil se hausse, je la pose pas la vraie question, je lui demande pas pourquoi il se souvient de l’odeur de mon shampoing, pourquoi il cherche un shampoing qui ressemble au mien. “Tu pourrais toujours l’acheter pour qu’on ait la même odeur de shampoing. Ou juste pour que tu puisses dormir avec, un doudou pour pas que tu m’oublies.” Je souris, j’ai un peu perdu ma moue boudeuse. Il ne pourra pas m’oublier, jamais.

“Tu crois qu’on peut avoir un four portable pour 5 dollars?” oh, Ivy. « T'es mignonne. » parce qu'elle doit même pas avoir eu envie à un moment ou un autre de s'en servir, de son four. Il voudrait pas juger et il s'en voudrait de le faire, mais ce serait bien facile d'entrer dans un mode réflexion où il en viendrait à la conclusion qu'elle sait même pas comment allumer l'électroménager. À la place, il dit de la merde et il essaie de l'éduquer sur la survie sur la route - en espérant qu'ainsi ils continuent de se recroiser au hasard d'un supermarché glauque à nouveau.

Ses rires et ses moqueries donc, elle les remarque vite. “Je pourrais me vexer de t’entendre rire comme ça.” « Vas-y, j'attends que ça. » comme si elle allait céder à sa simple autorisation. Ils jouent tous les deux, c'est la dynamique qu'ils ont mise en place apparemment et qu'ils tiennent, solidement ancrés à se moquer du monde entier et d'eux-mêmes au passage. Les caméramans eux, s'attardent à filer entre les allées pour filmer ce qui aux yeux de Jack n'est rien de plus que des emplettes à deux. Hm.

“Jette la faute sur quelqu’un d’autre, t’es la seule personne de qui je me suis assez rapprochée pour que tu puisses connaitre mon haleine.” il lui fait signe de se pencher à sa hauteur, elle reste droite, stoïque. « On est pas subtils Ivy. » il chuchote, elle en a rien à battre, il réitère. « Pour l'alliance. » parce que clairement que les autres joueurs ont remarqué, clairement qu'ils ont été pistés. C'est pas censé rester caché, ce genre d'association? Il vient de les brûler.

La distraction monte, le parfum du shampooing bon marché avec. “Qui te dit que j’utilise toujours le même shampoing ?” à son tour d'hausser le sourcil comme l'épaule. « T'utilises le même depuis le début en tout cas. » n'a-t-elle pas dit plus tôt que c'était de lui qu'elle se rapprochait le plus au fil de l'aventure? Ça sera ça, l'argument qu'il utilisera, si elle le pique du revers. “Tu pourrais toujours l’acheter pour qu’on ait la même odeur de shampoing. Ou juste pour que tu puisses dormir avec, un doudou pour pas que tu m’oublies.” un rire de plus, un rire de moins. Et il pose leurs quelques vivres sur le comptoir, tourne son regard vers le sien. « Non, j'vais mettre mon 5 dollars sur ton four portatif à la place. »

”Mignonne ? Vraiment ?” J’arrive pas à savoir si c’est positif ou négatif. Ca me paraît bizarre d’être mignonne après avoir dit un truc pareil. C’est vraiment mignon ce genre de question ou c’est juste Jack qui marche pas comme le reste du monde dans sa tête ? On va dire que c’est Jack qui est bizarre. “Je pense pas que tu veuilles vraiment me voir vexé pour de vrai.” Parce que je serais juste comme je suis avec le reste du monde et des participants. Avec eux, je suis pas comme avec lui. Mais ça il le sait forcément déjà, il a dû le voir parce qu’il est pas complètement aveugle le brun. Mon regard est toujours accroché au sien entre deux allées, entre des boites de conserve et des sachets de pâtes. Qu’est ce qu’on fout là au juste ? On sait qu’on repartira avec peu de chose, ou peut-être rien. On s’est juste encore isolé, pour jouer, pour passer le temps. Juste parce qu’on est bien là, avec ou sans caméras.

Je me retrouve en face de lui de nouveau, et il se rapproche de moi pour chuchoter. L’alliance, dont on a jamais parlé mais qui s’est faite naturellement. Allez savoir pourquoi j’ai décidé que Jack était une personne que je ne chercherai pas à détruire sur mon passage même lors de cette compétition. “Je peux toujours me mettre à te hurler dessus pour que tout le monde pense que je te traite comme n’importe quel concurrent.” Je peux aussi, s’il préfère, ou juste si je le décide en fait. Je ris un peu, je secoue la tête. L’odeur de mon shampoing, c’est particulier comme souvenir de moi, mais c’est un souvenir. “C’est quoi l’odeur du tien ?” Je le connais déjà, des effluves qui trainaient dans son cou quand on était dans son bureau. “Tu me le donneras ?” Je suis sûre que ça existe pas les fours portatifs de toute façon.

Les pauvres caissières qui se replacent cheveux et maquillage, qui s'assurent que leur t-shirt à l'éponyme du supermarché soit bien droit, peu fripé à l'écran. Elles rayonnent faussement, elles ont l'air d'être des gens qui veulent avoir l'air d'avoir du plaisir et Jack il en a rien à faire quand il a encore totalement oublié qu'ils sont filmés. “Je peux toujours me mettre à te hurler dessus pour que tout le monde pense que je te traite comme n’importe quel concurrent.” « Bon plan. » il a rien d'un fin stratège et s'il le lui mentionne, c'est bien plus pour qu'elle, elle fasse gaffe de pas se faire prendre plutôt que lui. Si on lui reproche quelque chose, il la dégagera de tout en prenant l'entièreté des responsabilités, la laissant être blanche comme neige de leur illégalité. « Faudra s'assurer de le faire devant le plus de caméras possible aussi. Pour la bonne télé. » en attendant, ils complotent, quand leur alliance se résume simplement à parler champagne et truffes en bordure de la route nationale. La domination mondiale sera clairement pour plus tard.

“C’est quoi l’odeur du tien ?” elle joue les curieuses et lui il arque la nuque, intrigué. C'est pas son genre de renvoyer les questions, pourtant depuis qu'ils ont passé les portes automatisées elle ne cesse de le surprendre avec un intérêt décuplé pour les détails qu'il se fait plaisir à aligner. « Certains disent clope et cuir. » certains comme certaines, comme Ellie et ses réponses au questionnaire qui lui ont valu sa participation à l'émission.

“Tu me le donneras ?” de quoi? Oh, le four. Il pense à la babiole qui existe en mode jouet pour enfants, le truc rose à paillettes où tu peux cuisiner des biscuits corail et des cupcakes violet. Il se moque et elle comprendra sûrement pas, mais il enregistre déjà l'info pour s'atteler à fouiller les brocantes une fois qu'ils seront de retour à Brisbane. Ça servira à rien à ce moment-là Jack - does he look like he cares? « On fera garde partagée. » qu'il conclut, éternellement rieur, les vivres qu'ils paient et le parking qu'ils rejoignent d'un commun accord. Un autre.