À la première occasion, il s’est échappé.
C’était trop pour lui et il n’aurait pas supporté de poursuivre la soirée au bord de la piscine. À ceux qui se sont interrogés quant à son départ précipité, il a usé de la carte activité pour prétendre vouloir se reposer une ou deux heures avant d’aller observer le ciel étoilé. Réponse plus polie, presque fayotte, mais indiscutable compte tenu du nouveau de fatigue de chacun qui provoque nécessairement la compréhension. Il s’est excusé comme d’ordinaire, il a fait quelques sourires, quelques signes de mains, balancé encore quelques politesses pour s’assurer d’un départ qui ne se ferait pas au détriment de quelqu’un qui lui en voudrait de s’éloigner aussi rapidement. Mais d’être resté dans son coin une partie de la soirée l’a aidé à ne décevoir personne en coupant court à une conversation – pour cela, encore aurait-il fallu en avoir et ne pas être simple spectateur de celles des autres. Parfois de leur dispute, aussi. Comme celle entre Ivy et deux autres hommes dont il s’est rendu témoin avant de s’éclipser à la première occasion. Il est désolé pour la jeune femme qui semblait vouloir lui parler (même s’il n’y croit pas vraiment, toujours conscient de ne pas susciter suffisamment l’intérêt chez les autres pour justifier qu’on vienne vers lui). Dans un premier temps lui est venue l’idée d’aller frapper à la porte de sa chambre pour s’excuser de son impolitesse, avant de se raviser en songeant à la liste des choses qu’il ne doit plus faire en sa présence. Cela en fait partie. À l’inverse, rien n’indique qu’il ne puisse pas lui demander comment elle va après cette conversation mouvementée. Ce n’est pas comme s’il n’avait pas le temps de s’arrêter, aussi. Il a sorti sa plus belle excuse, mais dans le fond il n’a pas spécialement envie de se reposer. Ou alors, peut-être qu’il l’aura lorsqu’Ivy l’aura envoyé balader, puisqu’il ne sait toujours pas que penser de la jeune femme et qu’une part de lui souffle encore que c’est une mauvaise idée alors qu’il finit par toquer à la porte. La silhouette de la jeune femme finit par s’afficher et c’est avec un sourire gêné et visiblement nerveux qu’il prend la parole. « Euh, salut, j’espère que je ne te dérange pas. » Il se serait bien excusé, mais il lui faut trouver une autre formulation. « Tu... t’avais pas l’air bien quand t’es partie, tout à l’heure et je voulais voir si... » Est-ce que cela entre dans la catégorie « ne pas se justifier » ? Il est hésitant un instant, raison pour laquelle il s’interrompt avant de reprendre la parole. « Enfin, ça va, Ivy ? » Voilà. Pas de justification, pas d’excuse, une simple question. Manquerait plus qu’elle lui demande de ne plus en poser et là, il est complètement paumé.

@May Glitters
@Ivy Waterhouse

J’ai voulu m’éloigner de la foule. Et Jack m’a retrouvé, encore une fois. On était seul, on a essayé de parler mais il ne comprend jamais rien Jack. Est ce que moi même j’y comprends quelque chose à tout ça ? Certainement pas. Mais je suis repartie, encore plus furieuse que je ne l’étais de base. Oui c’était possible. Entre Jack, Elise, Colleen, et l’autre que je ne connais pas mais qui m’a bien fait chier avec son discours moralisateur, je ne sais plus où donner de la tête, et je déteste le monde entier. J’ai marché un peu, je marche plus depuis que je suis en week end que depuis qu’on a passé notre semaine avec Martin.

J’ai retrouvé finalement ma chambre et Martin dort, je ne fais pas de bruit, je le réveillerai sûrement plus tard mais je reste appuyée contre la porte, quelques secondes, quelques minutes, je ne sais pas. Je suis juste posée et je profite du calme ambiant, et l’idée d’un Jack qui ne va pas pouvoir me retrouver tout de suite me détend un peu. Je suis partie furieuse, et il déteste ça. J’espère qu’il me retrouvera demain, ou dans quelques jours, ou un autre week-end, mais pas là.

J’allais bouger mais quelqu’un toque doucement, j’ouvre et sors de la chambre pour ne pas réveiller mon binôme tout de suite. Je vois Kieran et mon sourire s’agrandit un peu. Qu’est ce qu’il fait là ? Il n’avait pas l’air de vouloir me voir il y a quelques minutes. Ou heure, je ne sais même plus quand est ce que j’étais déjà là-bas avec tout le monde. “Non, mais Martin dort donc vaut mieux qu’on reste là.” Je ferme la porte derrière moi, on pourrait bien aller ailleurs aussi. Je soupire un peu en captant son regard qu’il ramène rapidement vers le mien cette fois. “Ca va toujours.” Un sourire rassurant qui se forme sur mon visage, j’arriverai peut-être à m’en convaincre aussi. “Et toi ? T’avais pas vraiment l’air à l’aise.”

Il est hésitant derrière la porte, Kieran, ayant peur, comme toujours, de déranger. Il ne voudrait pas réveiller la jeune femme ou attiser les flammes de sa colère. Le dernier regard qu’elle lui a adressé en quittant la pièce n’était pas des plus chaleureux et il ignore si c’est à cause de la conversation houleuse qu’elle a eue avec les deux types ou parce qu’il s’est défilé discrètement. Mais elle lui a aussi adressé un sourire, ce qui achève de le convaincre de frapper à cette porte. Si elle lui en voulait pour quelque chose, elle n’aurait pas souri. C’est d’une logique implacable. C’est la première chose qu’il lui demande et il est autant gêné d’avoir peut-être réveillé Martin que rassuré de ne pas déranger la jeune femme. Ça l’aurait perturbé, de ne pas être venu s’assurer de son état avant de se coucher. Elle l’a mis mal à l’aise plus tôt dans la semaine et il aurait adoré disparaître, mais elle n’a pas été méchante, ce qui lui suffit à la considérer comme une personne avec laquelle il aime échanger. « Oh, oui, bien-sûr. » Il rétorque avant d’afficher un sourire. « On peut aller ailleurs, si tu préfères. » Rapport au fait que les couloirs ne sont pas forcément de plus insonorisés et qu’il anticipe une nouvelle dispute avec un autre témoin. Il a eu son lot pour la semaine plus tôt, même s’il n’était pas vraiment concerné. « Tu veux que je t’offre un café ? » Ne vous en faites pas, il ne s’est pas soudainement trouvé un sens de l’humour, il a réfléchit à cette plaisanterie dès qu’il a vu le café et le thé gratuit à disposition dans le hall de l’hôtel. Il laisse échapper un léger rire avant de reporter son attention sur la jeune femme. « Oh, d’accord. Tant mieux, je m’inquiétais à cause des deux types, je ne voulais pas qu’ils t’aient contrariée et que tu y penses toute la nuit. » Comme lui l’aurait fait, par exemple. « Oui, ça va. C’est juste que... qu’il y avait trop de monde. C’était un peu étouffant. » Ce n’est pas la foule qui lui fait peur, pourtant. C’est l’insignifiance qu’il a dans cette foule. « Je t’ai pas vue à l’activité, tu n’es pas venue ? » Ce qui semble logique, en réalité. Mais il s’inquiète toujours, sauf qu’il n’ose pas insister Kieran, alors il préfère user d’autres stratagèmes. Et puisqu’il sait être bavard, autant l’utiliser à son avantage.

Je reste devant la porte, me demandant ce qu’il vient faire ici mais j’attends qu’il parle. “Ouais on bouge.” On va ailleurs, je sais pas où, mais je n’ai pas envie de croiser des gens que je n’ai pas envie de voir au milieu de ce couloir. Je le regarde, encore étonnée qu’il ait fait le chemin jusqu’à ma chambre. C’est bizarre non ? Venant du jeune homme. Il est timide, et on ne peut pas dire que j’étais de bonne humeur quand je suis allée le voir alors qu’il était déjà un peu éloigné de la foule. Mais je marche à ses côtés, peut-être que lui aussi a besoin de se changer un peu les idées alors je reste plutôt calme avant de rire à sa proposition de café. “Tu perdras même pas d’argent cette fois.” Je l’ai vu qu’il était gratuit le café. Et je vois que ça lui a fait penser à moi. Ca n’est absolument pas pour me déplaire.

“T’es vraiment gentil.” Ca m’étonne qu’il existe encore des gens aussi bons sur cette planète. Ca m’intrigue. “Je pensais que t’aurais pris tes jambes à ton coup et que t’aurais cherché à m’éviter jusqu’à la fin du week-end.” Ca c’est ce que j’avais prévu. Et je pensais avoir raison, mais il vient de me surprendre la brun. Je fronce les sourcils et on entre dans l’ascenseur. Hors de question que je prenne l’escalier alors je ne lui laisse pas vraiment le choix. “Non j’avais pas envie de voir les étoiles.” Je connais déjà toutes les constellations depuis des années. “T’as regardé toi ? Ou t’es resté de ton côté ?” J’ai vu que des gens l’avaient interpellé. Il est certainement apprécié Kieran, même si je ne peux pas m’empêcher de me dire que certaines personnes peuvent l’utiliser. Il a l’air naïf, et fragile. Ca me donnerait presque envie de lui apprendre comment se protéger.

Il ne connait pas Martin, il ne sait pas comment celui-ci peut réagir quant au fait d’être réveillé par un visiteur nocturne et il n’a pas envie de le découvrir. Le problème, c’est qu’il n’a pas non plus envie de rejoindre sa chambre, de penser à ces quelques mots sortis de la bouche d’Eve au cours de la soirée près de la piscine. Il n’a pas non plus envie de retourner voir les étoiles, pas parce qu’il l’a déjà fait et que cela lui suffit, mais parce que s’il est parti, c’est aussi parce qu’il y avait trop de bruit autour de lui. Il ne sait pas exactement de quoi il a envie, en réalité, mais la compagnie d’Ivy lui semble être un bon début. Elle accepte sa proposition d’aller ailleurs et un sourire s’affiche sur ses lèvres alors qu’il se calque sur ses pas, docile : il ira où elle décidera d’aller. « Peut-être que c’est moi qui en gagnerais cette fois, qui sait. » S’il joue bien ses cartes. Parce qu’elle les avait gagné pendant quelques instants, même pour de faux, ces 3 dollars. « C’est normal. » Qu’il précise par la suite, avant de se reprendre. « Enfin, pas que tu considères que je sois gentil. Je suis pas prétentieux, enfin je, je crois pas. Juste que... enfin, c’est normal de se préoccuper des autres, de ceux qui en valent la peine, je trouve. » Et des autres aussi, en réalité. Ceci explique pourquoi il s’est autant préoccupé de son ex et de tous les autres qui n’ont jamais cessé de piétiner sa confiance en lui. Un vrai paillasson ; qu’Ivy se sente privilégiée alors qu’il lui donne l’autorisation de s’essuyer elle-aussi les pieds. « Vraiment ? Pourquoi ? » Il demande par la suite, intrigué. Ça n’a jamais été son but de la fuir, sans quoi il y serait parvenu sans peine : la fuite est un domaine qu’il maîtrise à la perfection. « Bon, si tu m’avais jeté ton verre à la figure, oui, j’aurais cherché à t’éviter. » Il précise avec le plus grand sérieux ; ce n’est même pas une tentative d’humour, c’est un simple constat en prenant en compte la situation avant qu’il ne disparaisse. Il s’engouffre dans l’ascenseur à sa suite, avant de glisser un « d’accord » ; c’est un peu dommage, mais c’est son choix. « Non, j’y suis allé parce que ça m’intéressait. Mais le marché était bondé, c’était bruyant et je n’entendais pas très bien les explications du type. Et de toute façon, il n’avait pas vraiment le temps pour ça. » Ce qui est un peu  dommage, parce qu’il aurait adoré en savoir plus sur l’astronomie. Mais il n’avait pas de temps à accorder à un curieux comme Kieran, bien trop réjouit à l’idée de regarder les étoiles avec quelqu’un pour la première fois de sa vie. « Enfin, c’était quand même chouette, vraiment, j’ai appris plein de choses. » Non, c’est faux et c’est une déception. Mais il modère ses propos après avoir réalisé de la négativité qui découle de son discours. « Ça va mieux avec Martin ? » Il l’interroge par la suite, curieux de savoir si les rapports entre les deux partenaires se sont améliorés depuis le moment qu’ils ont partagé en début de semaine. Il dirait oui, mais le respect du sommeil n’est pas un gage de grande qualité ; quoi qu’à première vue il imagine qu’Ivy serait disposée à ne pas respecter celui-ci si ça peut lui permettre de rendre fou son binôme.

Je sors de la chambre même si j’y suis rentrée il y a seulement quelques minutes. Je ne pensais pas avoir plus de visite ce soir. J’en ai eu beaucoup des altercations ce week-end. Même avec Jack alors que je ne l’aurais jamais cru possible. Mais je fais avec, je me braque, je me renferme et c’est bien mieux comme ça. “Et tu comptes faire ça comment ?” Mon sourcil se hausse, est ce qu’il compte essayer de m’arnaquer ? J’ai hâte de voir ça si c’est le cas, je suis une professionnelle dans ce domaine. “T’es pas obligé pourtant.” D’être gentil, serviable et toujours de bonne humeur devant tout le monde. Il a le droit d’aller mal lui aussi, ou de s’énerver et de tout envoyer valser. Je me demande s’il en serait réellement capable un jour.

Je n’étais pas de bonne humeur ce soir, même si je venais vers Kieran sans une once de méchanceté. Mais il a fallu que ce type me bouscule et que Jack vienne mettre son grain de sel dans l’histoire. “Parce que y’a beaucoup de monde qui cherche à m’éviter et après ce soir t’aurais pu en faire partie.” Et lui il est calme, il est posé, il n’aime pas le conflit. Alors qu’est ce qu’il fiche ici ? Je me tourne vers lui et penche un peu la tête alors qu’on est encore dans l’ascenseur. “Non la menace ne t’était pas destinée !” Je pouffe de rire même si je ne trouve pas la situation avec Jack particulièrement drôle. Il a l’air vraiment sérieux et ça me fait légèrement rire. Je ne suis pas du genre à gâcher un verre d’alcool en le lançant au visage de quelqu’un si ce n’est pas mérité. Jack l’aurait mérité, mais pas Kieran. “Tu connais pas les étoiles ?” Je trouve ça étonnant que tout le monde ne connaisse pas ce genre de chose. Dans mon éducation, je n’ai pas eu d’autre choix que d’apprendre le nom des constellations par coeur. Et ça reste en tête ce genre de choses. “Vraiment ?” Il râle mais dit qu’il a appris pleins de choses ? Je ne sais pas si je dois vraiment le croire alors je tente d’attraper son regard pour savoir s’il ment. Il me parle de Martin et je hausse les épaules. “On a décidé de s’éviter un peu ce week-end pour se laisser de l’espace. Je suis pas du genre à apprécier rester avec la même personne tout le temps. J’ai besoin de ma liberté.” Et Martin n’est pas aussi calme que Kieran, même pendant un week-end détente on pourrait s’engueuler. Alors je vais continuer de profiter de mon week-end et de ma soirée, avec ce brun aux magnifiques yeux bleus que je n’avais pas encore vraiment remarqué.

« ... je sais pas encore, mais j’ai le temps d’y réfléchir. » Il rétorque un peu hésitant, se mordant la lèvre instinctivement par gêne alors qu’elle vient de le mettre devant son ignorance ; en réalité il n’a aucune idée de comment réussir à retourner le schéma de leur première rencontre à son avantage cette fois-ci et il n’aura probablement pas plus d’inspirations dans les heures ou les jours à venir. Il ne reste plus qu’à espérer qu’elle l’oublie et ce ne sera pas difficile pour Kieran de retourner la conversation sur autre chose surtout s’il s’agit d’éloigner l’attention qu’on peut lui accorder. « Je sais et je ne le suis pas. » Obligé. Non, il n’est pas venu frapper à cette porte parce qu’il ressentait une quelconque obligation ; pour une fois il ne s’agit que d’une envie que Kieran a écouté – parce que celle-ci, elle ne lui paraît pas menaçante et il n’a pas besoin de peser le pour et le contre pour se dissuader de s’écouter. « Oh, je vois. Mais non, j’ai pas de raisons de t’éviter et je comprends pas pourquoi ils sont beaucoup à le faire. » Certes, il a fui dès que le ton est monté. Il n’a pas bien compris pourquoi elle s’en prenait au premier type – mais il ne cherche pas à le savoir parce qu’encore une fois, plus il est loin du conflit et mieux il se porte ; il n’a pas l’intention de réactiver celui-ci. Quant au second, il peut comprendre qu’elle n’ait pas apprécié sa présence : parce qu’il s’est interposé alors que tout ceci ne le regardait pas. Kieran n’aurait pas apprécié non plus, à la différence qu’il n’aurait jamais osé le faire remarquer. Son rire se joint au sien, avant qu’il n’affiche un sourire rassuré quant à la confirmation qu’il n’était pas menacé, sourire qui disparaît lorsqu’il se sent, comme toujours, confronté à son manque d’intelligence. « Non. » Qu’il répond un peu mal à l’aise, avant de reprendre : « Enfin, je connais certaines de nom, mais je saurais pas les repérer dans le ciel. C’est... enfin, on me l’a jamais appris et j’ai jamais cherché à le faire, c’est bête. » Ça fait partie des choses qu’il aurait voulu faire avec un parent, mais l’occasion ne s’est jamais présentée et passé un certain âge, Kieran a simplement oublié l’idée, comme beaucoup de petites choses du quotidien auxquelles il a renoncé. « Hm, hm. » Il confirme par la suite en se pinçant les lèvres. « Enfin, peut-être pas ‘’plein’’ de choses, mais bon, c’est pas la faute de ce type. Je peux poser beaucoup de questions parfois et il n’avait pas le temps. J’aurais dû penser que j’étais pas tout seul, c’était pas correct de ma part de le ... monopoliser autant. » Il assure avec un sourire, avant d’évoquer Martin qu’ils ont quitté quelques minutes plus tôt. « Tu le dis si tu trouves que tu me vois trop, hein. » Car même si c’est un jeu et qu’ils ne se croisent pas de la semaine, durant le week-end il fréquente plus Ivy que d’autres – il ne voudrait pas qu’elle le perçoive comme un étouffement. Se dirigeant vers le hall, il fait un geste de la main à la jeune femme pour qu’elle se serve en premier avant d’opter pour un thé noir de son côté. « T’es quel genre de personne, alors ? À part que t’as besoin de ta liberté. » Il demande avec un sourire, curieux d’en savoir plus sur la jeune femme.

Il m’amuse Kieran, je lève un sourcil quand il a l’air de dire que lui peut gagner à ce genre de jeu. “Je suis patiente, j’ai hâte de te voir à l’oeuvre.” J’attends vraiment, j’aimerais voir de quoi il est vraiment capable. Et ce qui m’intrigue le plus, c’est sa gentillesse qui semble être à toute épreuve. Comment c’est possible de toujours être aussi gentil ? J’en ai aucune idée, et c’est exactement le genre de chose qui me donne envie de comprendre pourquoi il est comme ça. Il doit avoir des raisons. Je n’ai pas plus de détail et je fronce les sourcils. Il fait partie de ceux qui ont l’air de m’apprécier, et ça aussi c’est étonnant alors qu’il m’a déjà vu m’énerver. Je souris, un peu incompréhensive quand il dit qu’il ne comprend pas pourquoi les gens ne m’apprécient pas. Je pouffe un peu de rire en attrapant un café gratuit. “T’es le genre qui voit que le bon chez les gens ?” Je n’ai jamais été capable de faire un truc pareil. Et je ne le ferai sûrement jamais.

J’avais pas prévu de regarder les étoiles, mais il y a encore beaucoup de télescopes à l’extérieur. “C’est rare les gens qui connaissent vraiment les étoiles.” Je hoche la tête. Si on ne m’avait pas obligé à les apprendre je l’aurais sûrement jamais fait. Ce n’est pas quelque chose qui m’intéresse, ça me permet juste d’avoir une meilleure culture générale. Je réfléchis une seconde et bois mon café. “Il est payé pour ça.” Je grogne un peu, à la place de la production je l’aurais viré s’il n’était vraiment pas capable de faire son boulot correctement. “Tu le sauras le jour où j’en aurais marre de te voir.” Clairement c’est exactement le genre de chose qu’il serait le premier à savoir. Pour l’instant, je le supporte, et je réfléchis même à ce qu’on va pouvoir faire pour le reste de la soirée. Je ne compte pas retourner dans ma chambre tout de suite. “Je suis le genre qui se dévoile pas facilement.” Et ça, c’est peu dire. Je ne connais pas assez Kieran pour lui donner un quelconque détail sur ma vie. Mais je continue de sourire en haussant un sourcil. “Et je suis le genre à avoir eu des cours d’astrologie quand j’étais jeune.” Et beaucoup d’autres cours, mais ça encore, il n’a pas besoin de le savoir quand j’attrape sa main pour l’entraîner à l’extérieur pour trouver un bon point de vue. “Et toi ? T’es quel genre de mec ?”

Il ferme les yeux un bref instant, affichant une légère moue sur le visage, de celle qui dit « tu sais autant que moi que j’y suis incapable », car même s’il prétend le contraire, Kieran n’est qu’un piètre joueur face à Ivy et il ne pourra décemment pas l’impressionner. Il ne répond rien, se contente de cette grimace qui veut tout dire, espérant qu’elle oubliera bien vite cette fausse assurance derrière laquelle il s’est caché ; définitivement ce n’est pas pour lui. Qu’il reste avec ses doutes et ses incertitudes, c’est bien aussi. « Oui. Le genre à croire que c’est essentiel, dans notre monde. » Il précise avec un fin sourire. Cette réflexion est souvent partagée dans un esprit critique, mais Kieran ne s’en formalise pas. Au-delà du monde de manière générale, c’est surtout essentiel dans son monde. C’est le seul moyen pour lui de supporter les épreuves ; même s’il ne l’admettra jamais. Mais s’il ne se focalisait pas sur le bien chez les autres, il n’en serait pas là où il en est aujourd’hui. Ce n’est pas nécessairement la place qu’il voudrait occuper, mais c’est celle qui est le plus rassurante. « Oh. Ça me rassure, j’ai pas vraiment eu cette impression. » Qu’il confesse, en songeant à la manière dont tout le monde suivait les explications du type d’un air convaincu, hochant la tête régulièrement, avec quelques « bien-sûr » et autres « je vois » confirmant à Kieran son manque de connaissances dans le domaine, qui l’a fait se murer dans le silence aussitôt qu’il a compris qu’il était trop curieux. « Il ... il est pas payé pour faire de l’assistance. » Il excuse le type avec un léger rire, même si, dans le fond, il partage l’avis d’Ivy. Mais jamais il ne l’avouera, jamais il ne se montrera critique de la sorte. « Très bien, merci. » Et peut-être qu’il ne devrait pas la remercier, mais elle ignore sans doute à quel point c’est important pour lui d’être fixé sur l’avis des autres, de savoir ce qu’il pense pour éviter toute zone d’ombre et que les choses soient concrètes. « Enfin, je, j’espère que ce sera jamais le cas. » Parce que cela impliquerait qu’elle ait des sentiments négatifs vis-à-vis de lui et il aurait ainsi échoué dans sa mission de complaisance. Il plonge ses lèvres dans son thé avant d’afficher un sourire à la réflexion d’Ivy ; il ne l’aurait pas deviné, qu’elle était aussi secrète en vue du peu d’informations qu’il possède, hm. Il est surpris lorsqu’elle s’empare de sa main, mais ne dit rien, se contente de suivre malgré sa gêne évidente. « Celui qui n’a jamais eu de cours d’astrologie et qui n’en a pas vraiment eu beaucoup plus dans d’autres domaines. » Ni même une scolarité suivie avant ses onze ans ; ce n’était pas la priorité de ses parents et ses lacunes s’entendent encore à l’heure actuelle. « C’est sûrement pour ça que je suis pas très intéressant, j’ai pas grand-chose à dire. » Aucune culture générale, aucune passion hormis l’art et des opinions très neutres qui le dépossèdent de tout intérêt et tout charisme. « Remarque, j’en donne des cours, enfin, pas de, pas d’astrologie c’est sûr, mais... j’imagine que... ça s’annule ? » Qu’il babille, dans une tentative de masquer sa gêne alors qu’il continue à suivre Ivy. « Il y a pas de couvre-feu, rassure-moi ? » Il demande, alors qu’ils s’éloignent, songeant au fait que les candidats reprenaient le chemin de l’hôtel plus tôt ; il ne voudrait pas être de l’irrespect des règles.

Il n’est pas à ma hauteur Kieran, on ne joue pas dans la même cours et je le vois à chaque fois que j’ouvre la bouche pour le perturber. C’est facile, et pourtant je ne me lasse pas, ça c’est étonnant. Et je profite de ce moment pour oublier un peu tout ce qu’il s’est passé avec Jack, avec tout les autres cons qui font partie de cette aventure. Oui je ne suis pas vraiment de bonne humeur ce soir, et pourtant j’arrive à être plutôt gentille avec Kieran. Etonnant ça aussi. Mais je ne réfléchis pas vraiment et je bois mon café, il est tard pour un café et je sens que je ne pourrais sûrement pas dormir. Je serai épuisée demain et c’est Martin qui fera les frais de ma mauvaise humeur au réveil. Je grimace, les gens ne sont pas bon en général. Je ne sais pas comment il peut avoir la force d’imaginer ça.

“Les gens font les connaisseurs parce qu’ils connaissent 2 constellations et souvent ils montrent même pas les bonnes.” Et ça m’étonnerait que qui que ce soit connaisse vraiment les étoiles ici. Ils ont pas l’air d’être de ce genre là. Et finalement, elle aurait aimé être là pour pouvoir casser n’importe qui se tromperait sur une étoile. “T’es irrécupérable !” Je pouffe de rire, il se dénigre constamment. Ca aussi je me demande comment c’est possible. Je me lève et j’attrape sa main pour l’éloigner de cet endroit pour l’emmener dehors. Il pourra toujours me poser deux ou trois questions, jusqu’à ce que j’en ai marre. Je souris, il espère que je l’apprécierai toujours. Je ne peux pas m’avancer sur ça, c’est trop flou. Je ne peux pas savoir si j’aurais encore envie de le voir le lendemain. “T’es pas le seul.” A ne rien connaitre aux étoiles. “Pourquoi tu te dénigres tout le temps ?” Je fronce les sourcils, je ne suis pas du genre à passer par quatre chemins et il doit le savoir même après seulement deux rencontres. “Des cours de quoi ?” Je continue d’avancer avec lui jusqu’à ce qu’on se retrouve au bon endroit. Je me souviens vaguement de mes cours, heureusement que j’ai une bonne mémoire. “On s’en fiche.” Couvre feu ou non, je ne compte pas rentrer tout de suite. “C’est mieux sans tout le monde autour non ?” Je hoche la tête et on se retrouve sous les étoiles.

Kiki acquiesce silencieusement lorsqu’Ivy précise que la plupart des gens ne connaissent que deux constellations, rassuré par ces propos, lui qui tend à penser que tout un chacun connaît par cœur les constellations et qu’il fait figure d’exception à la règle. Les seules connaissances du ciel qu’il a touchent à la mythologie. Il ne pourra pas repérer la Grande Ourse, mais il pourra expliquer c’est qu’est l’empyrée, même si cela demeure moins intéressant. Kiki fronce les sourcils alors qu’elle souligne qu’il est irrécupérable, ne comprenant pas réellement pourquoi elle fait cette réflexion, mais s’empêchant de se montrer plus curieux ; encore une fois Kiki ne voudrait pas que l’intérêt d’Ivy devienne négatif et qu’il en subisse les conséquences. Il se laisse timidement guider par la jeune femme lorsqu’elle s’empare de sa main, la suivant même si Kiki ne peut s’empêcher de jeter un regard ou deux en arrière ; des fois que la production n’apprécierait pas cette escapade nocturne. « Je me dénigre pas. » Kiki rétorque sincèrement, ne partageant pas cette impression. Selon Kiki, il s’agit simplement de constats ; pourtant c’est bien un mécanisme intériorisé depuis des années, au point où il en est devenu naturel. « De dessin. Je suis dessinateur. » Kiki précise, même s’il se doute que l’information n’est pas très intéressante. Ce n’est pas un travail aussi impressionnant que médecin ou avocat ; mais il s’y épanouit... presque. C’est un autre débat. « D’accord... » Il précise par la suite, Kiki, même s’il ne s’en fiche pas autant et qu’il continue de penser que cela pourrait se retourner contre eux. « Oui. » Il approuve ensuite dans un sourire, maintenant qu’ils se sont éloignés et bénéficient de plus de tranquillité. Kiki relève le regard vers le ciel avant de le poser sur Ivy. « Bon, alors, explique-moi. » Il demande, avant de rapidement reprendre. « L’avantage, c’est que tu n’as pas de pression à avoir, mon dernier prof’ était plutôt nul. » Rencontré il n’y a pas plus d’une heure et vite oublié, maintenant qu’il est pendu aux lèvres d’Ivy, impatient d’en découvrir plus.