| (joassan) only the very best |
| | (#)Lun 22 Juin 2020 - 3:43 | |
| joanne & hassan only the very bestNo one can have more than their due, I wanted life, I wanted you, only the very best, a reasonable request. This is the way you should remain, never feeling any pain, never growing old. Sleep little one your night is here, mine is growing very near, oh, it's getting cold. ☆☆☆ Après un démarrage un peu poussif, le premier semestre avait semblé filer à une telle allure qu’Hassan s’était retrouvé pris au dépourvu lorsqu’étaient arrivés les examens de fin de session, qu’il préparait ordinairement bien en amont. Distrait, préoccupé, le brun avait paradoxalement l’impression de faire du surplace dans sa vie personnelle mais de n’avoir le temps de rien, et d’avoir tant de proches pour lesquels s’inquiéter n’avait fait que lui donner une excuse supplémentaire pour ne pas avoir à affronter ses propres angoisses. Rhett se muait dans un déni qui le frustrait tant il lui donnait l’impression d’avoir affaire à une version antérieure de lui-même, à la fierté trop mal placée et à la crainte de déranger trop palpable pour qu’admettre que tout n’allait pas bien apparaisse comme une option sérieuse. Pourtant, le brun savait d’expérience que tenter de forcer les choses n’arrangerait rien et même pire, que Rhett risquait de prendre la mouche et de s’isoler d’autant plus ; Faute de mieux l’enseignant s’en tenait donc à garder sur lui un œil discret, relayé dans cette entreprise par une Joanne qui elle aussi avait pourtant d’autres chats à fouetter. On s’imaginait sans doute qu’Hassan aurait tiré une certaine satisfaction de la chute morale et médiatique du second mari de la blonde, mais sans en être réellement étonné le brun n’avait pas eu le cœur à s’en réjouir, conscient du cauchemar dans lequel la blonde avait une nouvelle fois été entraînée et d’à quel point tout cela devait la rendre malheureuse. Mais là encore la situation était aussi délicate que sa position vis-à-vis de Joanne, et Hassan ne pouvait pas faire plus que de tenter de lui occuper l’esprit et de la distraire de ses tracas lorsqu’ils se voyaient – majoritairement sur le campus de l’université, où il était plus simple pour eux de se croiser. Pourtant, ce n’était pas au milieu des allées verdoyantes de l’University of Queensland qu’il lui avait donné rendez-vous ce dimanche-là, mais dans les méandres tous aussi verts de Bayside et de sa mangrove aménagée. Depuis la semaine précédente, le brun s’était retrouvé gardien provisoire d’une troisième boule de poils, Kelly lui ayant confié son adorable Beagle pendant qu’elle allait – il n’en revenait toujours pas – participer à une émission de télé-réalité. Et pas n’importe laquelle, car en grand amateur des émissions de Bear Grylls le brun était en toute logique un afficionado de Race of Australia … et c’était bien le dernier endroit où il aurait imaginé Kelly mettre les pieds. En supplément de Spike le chien de garde et Bandit la bonne pâte, le brun prenait donc également soin de Tobey la pile électrique, et afin de s’assurer une soirée de tranquillité Hassan avait bien l’intention de dépenser toute l’énergie de ce petit monde dans une longue marche dominicale, à laquelle il avait eu l’idée de convier Joanne un peu sur un coup de tête. Contre toute attente celle-ci avait pourtant accepté sans trop se faire prier lorsqu’il lui avait envoyé un message la veille pour le lui proposer – elle n’avait que trop peu d’occasions de s’octroyer du temps pour elle, Hassan le savait, et lui assurant que Jamie pourrait aisément s’occuper des enfants seul si elle s’absentait quelques heures, ils s’étaient donc donnés rendez-vous sur le parking à l’entrée du sentier de randonnée avec leur paire de baskets, le kway dans un coin du sac au cas où le temps se gâtait, et leurs chiens respectifs donnant ainsi l’impression qu’ils s’apprêtaient à mener un troupeau de canidés jusqu’à on ne savait quel alpage. Si Spike et Bandit obéissaient suffisamment pour qu’Hassan n’ait pas besoin de les tenir en laisse, Tobey était quant au lieu beaucoup plus difficile à canaliser. Et puisqu’il ne s’agissait pas de son chien il n’était pas question pour le brun de tenter le diable, aussi le Beagle trottinait-il en bout de laisse en tirant parfois rageusement lorsque les deux bipèdes du groupe n’avançaient pas assez vite à son goût. Il y avait quelque chose d’apaisant à discuter de tout et de rien avec Joanne, un vague goût de nostalgie aux arômes d’une époque où les choses étaient plus simples, quand bien même il fallait pour cela éviter l’éléphant dans la pièce que représentaient les déboires familiaux actuels de la petite blonde. « Tu as eu des nouvelles au fait, pour ton projet de doctorat ? » La dernière fois qu’ils en avaient discuté tout cela n’était qu’à l’état de projet, dans laquelle la jeune femme hésitait encore à se lancer pour tout un tas de raisons, allant de la peur du temps et de la charge de travail considérable que cela lui demanderait de dégager, en passant par l’incertitude d’être suffisamment à la hauteur pour se lancer dans une telle entreprise. Hassan n’avait pas souhaité l’influencer dans sa décision, aussi avait-il préféré la laisser mûrir la décision seule de son côté, mais non sans lui avoir déjà assuré qu’il la croyait tout à fait capable de se montrer à la hauteur si elle se décidait – de cela il n’avait pas le moindre doute, et l’expérience de professeur suffisante pour estimer savoir de quoi il parlait.
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| | | | (#)Mar 23 Juin 2020 - 19:33 | |
| MIRACLE PILL so sick of living inside myself | |
Habituellement, Joanne consacrait les deux jours qui formaient son weekend intégralement à sa famille. C'était l'une de ses principales exigences à son embauche, tout comme auprès de Marius quand elle avait commencé à donner des cours à l'université. Seulement, la dynamique familiale était très différente depuis plusieurs mois, et porter un masque du matin jusqu'au soir à la maison commençait à l'éreinter. Ce n'était pas une vie, de prétendre pour les enfants, de faire mine que tout allait bien au boulot pour que les curieux les plus malveillants ne puissent pas aller à la pêche aux informations. Le couple s'était donné comme ultimatum la fin de la construction de leur future maison, pour se décider de leur avenir. Alors que Joanne était convaincue qu'une fois qu'ils vivraient dans une maison neuve, où il n'y avait plus aucun souvenir à laisser derrière eux. Jamie pensait que ce n'était pas le toit sous lequel ils vivaient qui posaient problème. Mais c'était eux. Une vérité que la blonde avait alors bien du mal à accepter. Les jours défilaient et elle ne savait toujours pas si elle voulait bien leur accorder une chance et le cas échéant, si Jamie la saisirait. Et ce n'était pas en étant au milieu des cris joyeux de ses enfants et des aboiements enthousiastes des chiens qu'elle y parvenait. Et si on lui en voulait, qu'elle demande le divorce ? Un mot qui l'horrifiait mais qu'elle venait à envisager. Ses questionnements allaient bon train et la communication avec Jamie était très loin d'être optimale depuis quelques temps. La proposition d'Hassan pour aller se promener en pleine végétation l'espace de quelques heures semblait tomber du ciel tant elle trouvait cela inattendu. Elle avait accepté sans attendre, ayant subitement besoin de prendre un grand bol d'air frais, de ne pas être sollicitée de toute part. Une scène différente que la mascarade menée à la maison, et le masque de professionnelle qu'elle portait quotidiennement au travail. Jamie ne devait pas être serein qu'elle passe un peu de temps avec son ex-mari. Joanne avait eu vent de l'altercation qu'il y avait eu entre Rhett et Jamie aussi. Elle peinait à croire cette histoire mais les faits étaient là. Il faudrait qu'elle en discute avec lui, à l'occasion. Mais ce n'était pas le sujet du jour. Elle espérait pouvoir alléger un coeur bien trop lourd pour le petit gabarit qu'elle était. La conséquence de ne s'être véritablement confiée à personne sur son état d'esprit, ses doutes, ses sentiments. Alors elle semblait un peu ailleurs, très songeuse, peut-être même absente par moment. Son ex-mari la sortait dans ses pensées par un sujet de conversation qui était devenu le principal qu'elle avait à aborder ces derniers temps. "J'étais dans un premier temps allée voir Marius, qui est aujourd'hui un collègue – ça fait toujours bizarre, de me dire ça–" dit-elle en interrompant son récit en plein milieu par cette pensée qui lui semblait enocre incongrue ". Enfin, toujours est-il que je tenais vraiment à avoir son avis sur la question parce que je n'envisage pas seulement de faire un simple doctorat, même si en soi, ça n'a rien de simple. Ils proposent une autre version où l'on illustre en quelque sorte l'objet de la thèse par une exposition. Ca va sans doute décupler le temps de travail, mais c'est vraiment ce que je voudrais faire. Et d'avoir eu son aval m'a conciliée dans mon choix et c'est seulement après que j'ai envoyé ma demande." Ayant soudainement compris qu'elle s'était particulièrement éloignée de la question initiale d'Hassan, Joanne se pinçait nerveusement les lèvres. Quand elle se lançait dans une conversation qui tournait autour de sa passion, il était bien difficile de la couper dans son élan. "Pardon." souffla-t-elle avec gêne. Puis elle reprit avec une voix un petit peu déterminée. "On m'a dit que j'aurais une réponse début du mois prochain." Une bonne partie de son avenir se jouerait à ce moment-là. Par moment, cela la faisait paniquée, durant d'autres, elle était surexcitée. Si elle était menée à essuyer un refus, la déception n'en serait que plus grande. Elle essayait de ne pas trop y songer. "D'ailleurs, je voulais te demander... –Je n'y ai pas pensé la dernière fois qu'on s'est vus–, si jamais la réponse est positive, tu voudrais bien me prêter tes cours de méthodologie sur la rédaction de la thèse ? Marius m'a déjà filée la version qu'il avait sous le coude, mais..." Elle haussait timidement les épaules. "Je ne suis pas contre quelques conseils supplémentaires en la matière." Peut-être qu'il avait écrit ici et là des mémos ou des petites astuces qu'elle trouverait utile. La blonde était preneuse du moindre conseil. Son sens du perfectionnisme étant régulièrement exacerbé de la pression qu'elle se donnait toute seule avait aussi ses bons côtés; elle restait à l'écoute, attentive aux remarques qu'on lui faisait. Gardant toujours ce sourire de façade qu'elle avait appris à maîtriser au fil des derniers mois, Joanne se mura quelques instants dans son silence. Et si elle finit par se séparer de Jamie, comment allait-elle gérer son quotidien ? La tâche se compliquerait allègrement. "Mieux vaut tard que jamais, pas vrai ?" dit-elle finalement, se souvenant alors parfaitement des discussions qu'elle avait pu avoir des années plus tôt avec le brun, alors qu'ils étaient encore ensemble et que ce dernier avait déjà la certitude qu'elle en avait largement les capacités.
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| | | | (#)Dim 19 Juil 2020 - 13:28 | |
| Il faisait gris. Le gris de ces journées du début de l’hiver où la majorité des australiens n’aspiraient qu’à rester chez eux devant Netflix « au cas où » la pluie décidait de s’en mêler, mais qui promettait des balades dont les chiens ne reviendraient pas la langue pendante et les maîtres assommés par la chaleur ou le manque d’air. L’air était frais sans être froid, le vent secouait les branches de arbres sans les agresser, et outre la volonté de s’éviter la désagréable sensation de tourner en rond sans but chez lui Hassan trouvait à ces escapades dans la mangrove quelque chose d’apaisant. Un apaisement qu’il avait proposé à Joanne en partage, pas certain qu’elle serait d’humeur à faire la conversation mais pas dérangé par la perspective d’une marche silencieuse que seuls les bruits de nature environnants et l’enthousiasme des chiens viendraient troubler. Car les silences, un temps devenus si lourds entre les deux anciens époux, avaient retrouvés ce brin de tranquillité dont l’un comme l’autre avaient à ce moment cruellement besoin, chacun pour des raisons qui leur étaient propres. Le sentier filant sous leurs pieds depuis un certain temps, néanmoins, Hassan avait lancé sa ligne sans certitude d’hameçonner quoi que ce soit mais en amenant sa curiosité vers le seul sujet qu’il savait actuellement ne pas être épineux pour Joanne : celui de ses projets professionnels, et plus particulièrement celui de pousser au niveau supérieur les études achevées il y avait de cela quelques années désormais. Un projet que le brun, en enseignant qui se respectait, considérait avec intérêt. « J'étais dans un premier temps allée voir Marius, qui est aujourd'hui un collègue – ça fait toujours bizarre, de me dire ça … » Donnant l’air de songer à voix haute plutôt que de converser, la blonde avait marqué une pause puis finalement repris d’un ton moins absent « Enfin, toujours est-il que je tenais vraiment à avoir son avis sur la question parce que je n'envisage pas seulement de faire un simple doctorat, même si en soi, ça n'a rien de simple. Ils proposent une autre version où l'on illustre en quelque sorte l'objet de la thèse par une exposition. Ça va sans doute décupler le temps de travail, mais c'est vraiment ce que je voudrais faire. Et d'avoir eu son aval m'a conciliée dans mon choix et c'est seulement après que j'ai envoyé ma demande. » Tellement moins absent qu’il l’avait à peine entendue respirer entre les lignes de sa tirade, avant que la réalité ne la frappe et qu’elle ne pince ses lèvres d’un air désolé avant d’ajouter « Pardon. On m'a dit que j'aurais une réponse début du mois prochain. » Secouant la tête, Hassan s’était fendu d’un rire léger. « Ne t’excuse pas, y’a rien de mal à être enthousiaste. Ça fait plaisir de te voir comme ça. » De la voir s’enthousiasmer pour ce projet, mais de la voir s’enthousiasmer tout court en vérité. De la voir moins morose, même pour quelques instants. « Tu me tiendras au courant de la réponse ? » Elle était probablement suffisamment au fait de l’intérêt qu’il y portait, pour avoir déjà eu l’occasion d’en discuter tous les deux, mais demander une confirmation et ainsi réitérer en filigrane le soutien qu’il y apportait ne coûtait pas grand-chose. « D'ailleurs, je voulais te demander... » Interrogeant du regard, il l’avait laissée reprendre « Je n'y ai pas pensé la dernière fois qu'on s'est vus, si jamais la réponse est positive, tu voudrais bien me prêter tes cours de méthodologie sur la rédaction de la thèse ? Marius m'a déjà filée la version qu'il avait sous le coude, mais ... Je ne suis pas contre quelques conseils supplémentaires en la matière. » À son haussement d’épaules il avait répondu par un sourire, et hochant d’abord la tête en signe d’approbation il avait aussitôt confirmé « Bien sûr, je t’enverrai ça. En plus ça tombe bien, je l’ai retravaillée l’année dernière pour la donner à une élève, alors entre ça et celle de Marius ça te fera déjà une bonne base pour démarrer. » Et de son point de vue c’était probablement le plus difficile, le démarrage … Le reste venait bien plus vite, une fois la panique de ne pas savoir par quoi commencer maîtrisée. Songeuse, la blonde avait retrouvé le silence un instant, et débordant un peu moins d’énergie qu’au démarrage Tobey avait suffisamment cessé de tirer sur sa laisse pour qu’Hassan y laisse un peu de mou supplémentaire. « Mieux vaut tard que jamais, pas vrai ? » avait alors fini par reprendre Joanne, et levant la main qui ne tenait pas la laissé en signe d’innocence le brun avait répondu « Là, tu noteras que ce n’est pas moi qui l’ai dit. » d’un ton amusé. Plus sérieux cependant, il avait repris presque aussitôt « Tu as la curiosité nécessaire pour te lancer dans ce genre de choses, je l’ai toujours dit. Et les capacités, sans quoi Marius ne s’intéresserait pas au projet, c’est quelqu’un d’exigeant. » Mais cela elle le savait sans doute déjà aussi bien que lui, car l’enseignant avait cette réputation tant auprès de ses élèves que de ses collègues – une réputation qui n’était en rien un reproche, cela dit. Ce fut Hassan qui cette fois-ci laissa le silence s’étirer quelques minutes après cela, ne le brisant que pour héler Spike dans un farsi qu’il n’utilisait plus que trop peu à son goût tandis que le berger allemand les distançait un peu trop. « L’université m’a fait une proposition en début d’année. » Maintenant lui semblait être le moment ou jamais d’en parler, quitte à rester sur le professionnel. « Le doyen de la fac’ de sciences politiques a été recruté par l’université d’Auckland pour la rentrée prochaine. On m’a proposé son poste. » Au son de sa voix on sentait que malgré en brin d’enthousiasme Hassan le premier s’étonnait encore que l’on ait pensé à lui, et ce malgré un CV qu’il savait intéressant depuis que son contrat chez ABC et ses interventions à l’université de Sydney s’étaient ajoutés à son statut de professeur et son travail pour le compte d’Amnesty International. Le brun ne vivait plus que pour son travail, et au fond il était grand temps que cela lui serve. « J’étais pas encore certain de ma réponse alors j’en avais parlé qu’à Sohan et Rhett, mais j’ai décidé d’accepter. » avait-il finalement ajouté, sans toutefois s’épancher sur les raisons qui l’avaient fait douter, ni sur les presque trois mois – et quelques rappels insistants – qu’il lui avait fallu pour se décider à trancher.
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| | | | (#)Lun 20 Juil 2020 - 23:09 | |
| ONLY THE VERY BEST so sick of living inside myself | |
Le sujet de conversation avec lequel Joanne n'avait pas à fournir d'efforts pour s'étaler était bien celui de son projet professionnel. Elle ne lésinait pas dans les détails, la façon dont elle se projetait dans sa carrière bien qu'elle n'avait pas encore véritablement conscience de l'impact que pourrait avoir la réussite de sa thèse. Son doctorat pouvait la propulser, gagnant le respect de ses pairs avec une considération qu'elle ne mesurait pas. Le sujet sur lequel elle désirait travailler, qu'elle avait donné dans les grandes lignes lorsqu'elle avait fait ses demandes auprès du musée et de l'université la fascinait plus que de raison. L'enthousiasme était visible dans un regard bleu pétillant qu'Hassan ne manquait pas de soulever. Il semblait heureux de la voir sourire le temps de quelques pas qui composaient leur promenade. Le brun était intéressé de connaître la progression de ce projet et tenait à ce que son ex-femme le tienne informé de la réponse de ses supérieurs. "Bien sûr." lui répondit-elle, touchée par son envie de la soutenir. Chaque soir, quand elle rentrait chez elle, elle s'empressait de demander à Jamie si elle avait eu du courrier, il savait très bien ce qu'elle attendait. Il la suivait tout autant dans son projet, faisait tout ce qu'il pouvait pour attirer les bonnes grâces et faire en sorte que ce rêve là, se réalise. Il se pliait en quatre pour obtenir son pardon et se démenait pour sa réussite. Il voulait la voir briller, s'épanouir. Pour l'heure, la petite blonde s'intéressait surtout à la méthodologie complexe qui posait le cadre d'une thèse. Marius lui avait déjà donné sa version, mais elle se disait qu'elle pourrait quelques éléments supplémentaires des notes de son ex-mari. Un sourire soulagé vint illuminer son visage lorsqu'il acceptait à sa demande sans la moindre hésitation. "Merci infiniment." Elle allait pouvoir potasser sur ce dont elle disposait déjà, tout en prospectant en parallèle de trouver des noms de personnes qui pouvaient être son directeur de recherches. Le sujet était spécifique, ciblé et elle se devait d'étendre ses recherches aux professionnels vivant en Europe. Elle était sur tous les fronts et elle gérait. Elle aimait ce qu'elle faisait. "J'ai l'impression de devenir étudiante à nouveau." confessa-t-elle avec un rire nerveux. Cela lui rappelait étrangement la période charnière où Hassan était professeur et elle étudiante, avec Marius comme professeur. Une drôle d'impression, qu'elle avait là. Quand Joanne ne parlait plus, on pouvait constater qu'elle se noyait très rapidement dans ses songes; et dieu savait combien ils étaient nombreux. "Tu le pensais tellement fort." finit-elle par dire avec une pointe d'amusement à sa remarque. D'un ton plus solennel, il tenait tout de même à lui rappeler qu'il avait toujours cru en ses capacités et en elle, mettant bien en avant le fait que si Marius la soutenait, c'était qu'il voyait du potentiel. Il n'allait pas soutenir une de ses anciennes étudiantes dans un projet qui lui semblait irréalisable. Avoir son approbation ne faisait que confirmer ce qu'Hassan avait toujours intimement su. Durant leur marché, Hassan dut à un moment donné rappeler à l'ordre l'un de ses chiens. Il l'avait fait en utilisant la langue de son pays d'origine. Joanne avait toujours aimé l'entendre parler farsi. Les phrases étaient si fluides et agréables à entendre pour elle. Quand ils étaient ensemble, elle avait toujours beaucoup aimé l'entendre prononcer quelques mots. L'écouter à nouveau lui fit ressentir une nostalgie ponctuelle, qu'elle décidait de ne pas verbaliser. Tout comme elle trouvait toujours l'accent britannique de son mari particulièrement charmant. Le brun reprit la parole, annonçant qu'il y avait aussi une évolution professionnelle de son côté. L'annonce laissait d'abord Joanne bouche bée quelques secondes. "Tu vas être le doyen de la faculté de sciences politiques ?" Question rhétorique, bien sûr. Elle voulait simplement s'assurer qu'elle ait bien compris toutes les informations qu'il venait de lui donner. "C'est une sacrée promotion." dit-elle finalement, avec amusement. "C'est vraiment génial, Hassan." reprit-elle avec plus de sincérité. "Ca doit être une sacrée responsabilité, tout de même. Ton planning va finir par être plus chargé que celui de Marius." Elle était admirative des personnes qui occupaient ce genre de postes. Elle n'avait aucune inquiétude pour son ex-mari, elle savait qu'il allait gérer avec brio. "Comment tu te sens, par rapport à ça ?" Joannne supposait que c'était le genre d'offres qui méritaient réflexion, pour lequel on se posait tout un tas de questions. Etre doyen devait probablement ouvrir de nouvelles portes, mais qui demandait aussi beaucoup de travail. Il aurait désormais toute une branche universitaire sous son aile, ce n'était pas rien. "Est-ce qu'il va falloir que je te vouvoie sur le campus, une fois que ce sera officiel ?" lui demanda-t-elle dans le seul but de le taquiner. "Je suis contente pour toi. Tu vas être parfait dans ce rôle, j'en suis certaine." Avait-il besoin d'être rassuré ? Possiblement. Dans tous les cas, Joanne ne pouvait que l'encourager dans cette voie-là. Elle se sentait fière de lui. Leur promenade se poursuivait avec tranquillité. Le ciel nuageux évitait que le soleil n'agresse trop la peau pâle de la jeune femme. Même si les températures restaient plus qu'honnêtes pour la population européenne par exemple, les hivers australiens faisaient ressortir la frilosité bien connue chez Joanne. L'on ne la voyait jamais sortir sans une veste ou un gilet, ne serait-ce que sous le bras afin qu'elle puisse le mettre juste au cas où. Pouvoir se vider la tête sans avoir à gérer les enfants, les chiens ou son travail en dehors de son temps était assez libérateur. Jusque là, on évitait les sujets fâcheux. Mais il n'y avait pas un instant où Joanne ne songeait pas à Jamie, à leur avenir en tant que couple, que famille. Elle avait le sentiment qu'elle devait aussi faire des efforts, dans l'espoir de le pardonner, de pouvoir se reconstruire une nouvelle fois, de s'accorder une chance qu'elle pensait être la dernière. Elle ignorait même à ce stade, si elle avait véritablement pensé ces mots ou non. Rien que de songer à une séparation la rendait triste. Mais Jamie avait raison sur un point, pour le bien à eux et celui de leurs enfants, ils ne pouvaient décemment pas continuer à vivre dans le climat dans lequel il pataugeait depuis tous ces mois. Elle ne cherchait pas forcément des conseils, elle n'en parlait à personne. Car il y en avait bien trop qui préférerait la voir séparer de Jamie plutôt que de la voir se montrer une nouvelle fois indulgente pour lui, un nouveau qu'elle accordait par les sentiments amoureux toujours aussi forts qu'elle éprouvait pour le Keynes. Elle l'aimait tant. "Tu as des nouvelles, pour l'adoption ?" dit-elle après être restée encore une fois trop longuement songeuse.
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| | | | (#)Lun 12 Oct 2020 - 20:43 | |
| Dans le brouillard que semblait actuellement être sa vie personnelle, voir Joanne se réjouir sincèrement de quelque chose faisait plaisir à voir et Hassan y trouvait contre toute attente une certaine forme d’apaisement … Comme si, par procuration, le bonheur d’autrui parvenait à réveiller un peu celui qu’il peinait à ressentir pour lui-même, en dépit des quelques projets qui en temps normal auraient suffi à éclaircir son horizon. Et puis il en avait toujours été tellement persuadé, que Joanne avait le potentiel pour se lancer dans ce genre de projets – ce n’était ni les capacités ni les connaissances qui lui avaient manquées durant toutes ces années. L’envie, peut-être, ou la confiance en elle-même, plus probablement. « J'ai l'impression de devenir étudiante à nouveau. » avait fini par confier la blonde, un rire nerveux lui échappant tandis qu’Hassan quittait des yeux un instant leurs animaux pour offrir à son ex-épouse un sourire aussi amusé que l’avait été sa remarque. Mieux valait tard que jamais, l’adage s’était rarement aussi bien appliqué, et loin de vouloir nier lorsque Joanne avait rétorqué « Tu le pensais tellement fort. » Hassan lui avait donné un coup d’épaule amusé, avant de se reconcentrer sur la route et sur les chiens qui trottinaient, à bonne distance pour les deux siens et au bout de la laisse pour celui de Kelly. Que Joanne se soit épanchée un peu plus sur ce qui se profilait pour elle professionnellement parlant dans les mois qui suivraient avait renvoyé Hassan à l’information qu’il gardait jusque-là pour lui seul, n’ayant que brièvement évoqué la question avec Sohan et avec Rhett lorsqu’il en était encore à peser le pour et le contre, mais n’en ayant plus dit mot à personne depuis que la décision avait été prise en son for intérieur et qu’il avait renvoyé à qui de droit le mail indiquant qu’il acceptait la proposition. « Tu vas être le doyen de la faculté de sciences politiques ? » L’air incrédule, Joanne semblait n’avoir posé la question que pour appuyer la confidence que venait de lui faire le brun, et acquiesçant d’un signe de tête Hassan avait fait état de la nervosité qui habitait la blonde quelques instants plus tôt. « Ça fait tellement bizarre de l’entendre dit par quelqu’un. Mais oui, il semblerait bien. » Il avait encore un peu de mal à réaliser, et ce n’était assurément pas quelque chose qu’il aurait pensé faire partie de ses projets lorsque l’année scolaire avait débuté … Mais toutes les surprises que lui réservaient cette année ne pouvaient pas être uniquement mauvaises, après tout. « C'est une sacrée promotion. C'est vraiment génial, Hassan. » avait de son côté repris Joanne avec un sourire. « Ça doit être une sacrée responsabilité, tout de même. Ton planning va finir par être plus chargé que celui de Marius. » La manière dont il avait secoué la tête trahissait le fit qu’il s’agissait peut-être d’un argument ayant fait pencher la balance du côté de cette décision plutôt que le contraire, mais encore un peu incertain le professeur n’avait pas osé rebondir sur le sujet … Jusqu’à ce que Joanne n’ajoute « Comment tu te sens, par rapport à ça ? » du moins. Semblant réfléchir un court instant à la réponse, Hassan avait fini par dodeliner la tête. « Je ne sais pas trop … Je crois que je ne réalise pas encore totalement. » Il faudrait probablement attendre la prochaine rentrée et le fait qu’il prenne officiellement ses fonctions pour que l’information s’imprime définitivement dans son esprit. « J’ai mis des mois avant de donner ma réponse, on me l’a proposé en début d’année. » avait-il alors repris « Je crois que j’avais peur d’accepter pour de mauvaises raisons. Mais je sais aussi que c’est une opportunité qui ne se représentera peut-être pas de sitôt … J’ai pas envie d’avoir de regrets. » Il en avait déjà tellement sur d’autres sujets, il voulait au moins pouvoir être fier de ce qu’était son parcours professionnel … Et puis, il enseignait dans cette université depuis tellement longtemps. Il était temps qu’il cesse de se trouver des excuses et qu’il sorte du confort de ce qu’il connaissait déjà. « Est-ce qu'il va falloir que je te vouvoie sur le campus, une fois que ce sera officiel ? » Poussant un soupir volontairement théâtral, le brun avait pris un air sérieux pour rétorquer « Hm hm, et à partir de maintenant tu es priée de m’appeler Monsieur le Doyen. » si austère qu’ils avaient tous les deux éclaté de rire la seconde suivante. Oh, comme cela lui donnait l’impression d’avoir cent ans. « Je suis contente pour toi. Tu vas être parfait dans ce rôle, j'en suis certaine. » Dans la bouche de quelqu’un d’autre Hassan n’y aurait vu que de la politesse et rien d’autre, les usages que l’on servait à quelqu’un dans ce genre de situation, mais dans la bouche de la blonde il n’avait pas autant de peine à y croire – peut-être parce qu’il en avait fait de même avec elle juste avant, ou peut-être simplement parce qu’ils avaient la décennie passée l’un à côté de l’autre pour leur faire savoir quel mérite les avaient, tous les deux. « Merci. » avait-il alors sobrement répondu, laissant la phrase flotter un instant avant d’ajouter timidement. « T’es la première à qui je le dis. Que j’ai accepté. » Jusque-là il l’avait gardé précieusement pour lui, comme un secret dont on voulait voir le monopole encore un peu avant de le partager. Pour cette raison, sans doute, le brun avait senti s’envoler une petite partie de ce qui alourdissait ses épaules et un bref soupir résolu lui avait échappé. Un coup de vent avait secoué les arbres autour d’eux et fait s’arrêter un instant Tobey, qui levant l’une de ses pattes avant avait humé l’air quelques secondes avant de reprendre sa route, la piste passée à portée de son museau visiblement moins intéressante que la volonté de rattraper Spike et Bandit bien loin devant lui. « Tu as des nouvelles, pour l'adoption ? » Arrivée après plusieurs minutes de marche silencieuse la question avait résonné dans le crâne d’Hassan de manière un peu abrupte, un peu désagréable, et prenant le temps de la digérer le brun avait tourné la tête vers Joanne et soupiré un « Non. » résigné avant de fixer de nouveau le sentier. Semblant hésiter, il avait mis quelques secondes supplémentaires à reprendre la parole. « Je ne pense pas que j’en aurai. Si ça avait dû être le cas ce serait déjà fait. » Autant se montrer réaliste. « C’était aussi une des raisons pour lesquelles j’ai mis du temps à donner ma réponse pour le poste de doyen. Mais je crois qu’il est temps que j’arrête de courir après ce qui n’est pas à ma portée, et que je réapprenne à apprécier ce qui se présente sur mon chemin. » Cela ressemblait à un conseil de biscuit chinois plutôt qu’à quelque chose qu’il avait décortiqué durant des semaines avec l’aide de son psy, mais peu importe. Ce n’était pas ce dont il avait rêvé, ce n’était pas comme ça qu’il aurait souhaité que les choses se passent, mais elles étaient ainsi et pleurer sur son sort n’y changerait rien … Ce n’était pas la vie qu’il aurait voulu, mais des gens comme lui il y en avait des tas, et tous n’étaient pas malheureux pour autant. Il fallait seulement qu’il apprenne, lui aussi.
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| | | | (#)Mer 14 Oct 2020 - 0:04 | |
| ONLY THE VERY BEST so sick of living inside myself | |
Il y avait des jours où Joanne peinait à réaliser les portes qui venaient de s'ouvrir à elle. Si on lui avait dit quelques années plus tôt qu'elle se lancera dans un tel labeur, il n'y aurait pas cru une seule seconde. Et pourtant, la voilà à l'aube de nouvelles opportunités et d'une ascension des plus prometteuses. Cela compensait largement le désastre qu'était sa vie sentimentale. Il paraissait que ça arrivait souvent, que l'un rattrapait l'autre, pour maintenir une sorte d'équilibre. Même si elle parvenait à tout gérer au quotidien, la petite blonde avait conscience que cela n'allait pas durer éternellement. Un jour ou l'autre, les murs qu'elle avait érigé allaient se briser. Seulement, elle était incapable de savoir quand, comment et pourquoi. Son ex-mari, lui aussi, s'était vu proposé une promotion à laquelle il ne s'attendait probablement pas, et pas des moindre. "Ca le rend plus concret, je suppose. Non ?" lui demanda-t-elle avec un léger sourire alors qu'il avouait qu'il trouvait cela étrange de l'entendre de la bouche de quelqu'un d'autre. La conservatrice ne pouvait que se réjouir sincèrement pour lui. Il avait encaissé beaucoup de faits négatifs ces derniers temps; le fait qu'on le reconnaisse à sa juste valeur dans le cadre professionnel ne pourrait que lui être des plus bénéfiques. Comme pour Joanne, il avait des difficultés à le réaliser. "Ce n'est pas une décision à prendre à la légère. Je comprends que tu aies eu besoin d'autant de temps pour que tu puisses y penser." Il y avait bien du avoir un élément déclencheur pour qu'il donne sa réponse à l'université, du moins c'était ce qu'elle supposait. A moins qu'un beau matin, il avait été frappé d'une évidence dès qu'il avait ouvert les yeux. Peut-être qu'il s'était dit qu'il ne voulait plus laisser la moindre opportunité glisser de ses doigts. "Je suis fière de toi." lui souffla-t-elle en tournant son regard vers lui. "Les étudiants et les professeurs seront entre de très bonnes mains, avec toi." Ca, elle en avait l'assurance. Hassan était fait pour ça, Joanne l'avait remarqué très tôt dans leur relation. Il avait toujours été fait pour l'enseignement, alors devenir doyen n'était presque qu'une suite logique des choses.Il le méritait amplement. Le brun parvint même à la faire rire un petit peu lorsqu'il plaisantait, lui disant qu'elle devrait même désormais l'appeler par sa nouvelle fonction. "Vous montez déjà sacrément sur vos grands chevaux, dites donc." répondit-elle avec tout autant d'amusement. Joanne avait envie de passer une main amical sous son bras, mais elle avait toujours un peu peur que ce soit mal interprété. Il ne manquait plus que Jamie soit là pour qu'il se fasse des idées sur la relation dans anciens mariés. Le professeur confesse à Joanne qu'elle était la première à en être informée. Elle en était surprise, elle se doutait bien qu'elle n'est pas en tête de liste lorsqu'il s'agissait d'annoncer ce genre de bonnes nouvelles. Il y avait les Khadji, il y avait Rhett... Les choix étaient multiples. "J'en suis flattée." lui répondit-elle avec douceur. "Il y a une raison particulière pour que tu m'en parles à moi en premier ou... C'était juste parce que c'était dans la lancée de notre conversation sur nos avenirs professionnels ?" demanda-t-elle avec une pointe de curiosité. Elle échangeait avec lui un regard complice avant de baisser la tête, et regarder ses pieds avancer. La suite de leur discussion était un petit peu plus compliquée pour Hassan car ils abordaient un sujet qui restait très sensible. La petite blonde en avait conscience. "Mais tu l'avais dit toi-même, quand on s'était vu une fois, que c'était le genre de démarche qui pouvait prendre vraiment beaucoup de temps." fit-elle remarquer. Non pas qu'elle tentait de rendre le comprimé plus facile à avaler ou déborder d'un optimisme clairement inutiles. Elle ne se rappelait que de ce qu'il lui avait raconté. Néanmoins, Hassan souhaitait quand même se lancer dans une nouvelle idéologie, à ne plus pourchasser des chimères et à se laisser simplement surprendre par les opportunités qui se présenteraient à lui. "Ce doit être la meilleure façon de penser, oui." l'encouragea-t-elle. Peut-être que Joanne devrait se mettre à songer à son avenir de la même façon, mais au vu de l'instabilité de sa vie dernièrement, elle n'arrivait absolument pas à se projeter. "Qui sait, c'est comme ça que tu tomberas sur de belles surprises." Une compagne, une adoption, un autre chien.. Ou même des choses bien plus simples, mais qui étaient susceptibles de suffire à son bonheur. Elle ne lui souhaitait que cela; qu'il soit heureux. "Tu le mérites, plus que quiconque." souffla-t-elle tout bas alors qu'elle s'engouffrait petit à petit dans ses propres pensées. Les minutes de marche qui suivirent furent particulièrement silencieuses. Parfois, elle regardait autour d'elle, voir ce qu'il s'y passait, avant de baisser à nouveau son regard. Les sujets de conversation venaient cruellement à lui manquer. Elle n'avait pas grand chose à partager, ces derniers temps, si ce ne sont les nouveautés qui tournaient autour de son travail. Parler d'enfants risquait de rendre Hassan plutôt amer dans la mesure où ils venaient tout juste de parler de ses démarches pour une adoption. Mentionner Rhett et Sophia n'étaient pas non plus très judicieux. La brise qui s'était levée l'avait convaincue à enfiler son gilet, frileuse comme elle était. "Et... du coup, pour... ton nouveau poste, ce sera effectif à partir de quand ?" finit-elle par demander, subitement sortie de ses pensées bien tristes. "Est-ce que tu continueras à enseigner en parallèle ?" Etre doyen devait apporter son lot de responsabilités, de réunions et d'investissement, mais Joanne ignorait simplement à quel point. "Est-ce qu'on pourra toujours se voir ou... Tu auras un tel planning de ministre que tu n'arriveras plus à caser nos rencontres quelque part ?" le taquina-t-elle, retrouvant ainsi le sourire pendant une fraction de secondes. "Tu me diras, je pourrai en dire autant. Je ne suis pas doyenne, mais les prochaines années ne seront pas de tout repos." Un doctorat ne se faisait pas en un claquement de doigt. "Je compte sur toi pour m'en extirper de temps à autre." ajoutait-elle avec amusement. Ce n'était en aucun cas une obligation, ni même une suggestion. Juste une référence à des souvenirs communs. Il il la connaissait, il l'avait vu s'acharner sur son mémoire à en oublier ses repas et en perdant de nombreuses heures de sommeil. Il devait bien se douter que cette fois-ci n'allait pas faire exception non plus.
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| | | | (#)Mar 10 Nov 2020 - 4:22 | |
| Qu’il se soit enfin décidé à une réponse à donner à cette proposition ne signifiait pas pour autant qu’Hassan avait cessé de douter, et le fait que la question ait été posée bien des mois plus tôt n’en était que la preuve la plus flagrante. Dans sa vie professionnelle plus que dans n’importe quel autre domaine le brun n’avait pourtant jamais été du genre à douter de ses propres capacités, et bien que pas du genre à fanfaronner il lui était arrivé fort peu souvent de ne pas se sentir à la hauteur d’une tâche. Et malgré tout … malgré tout cette fois-ci il avait hésité, tergiversé, avancé pour mieux reculer sous le poids de ses propres incertitudes, aux prises avec des craintes qui ne concernaient pas tant ses capacités professionnelles que tout le reste. Tout ce dont des responsabilités universitaires supplémentaires étaient susceptibles de le détourner. « Ce n'est pas une décision à prendre à la légère. Je comprends que tu aies eu besoin d'autant de temps pour que tu puisses y penser. » lui avait pourtant à ce sujet opposé Joanne avec indulgence, dont la distance ne permettait plus de deviner que sous l’avalanche de questionnements se cachait sans doute aussi un brin de couardise, et la crainte de la réaction possiblement mitigée d’autres de ses proches. À commencer par une. Pour cette dernière raison plus que pour le reste, Hassan avait senti son cœur s’emballer un peu lorsque la blonde avait ajouté « Je suis fière de toi. » et sous sa barbe ses joues avaient repris quelques couleurs. « Les étudiants et les professeurs seront entre de très bonnes mains, avec toi. » Il préférait ne pas se porter l’œil en se montrant aussi certain qu’elle à ce sujet, et malgré l’aide et les conseils que ne manquerait probablement pas de lui dispenser son prédécesseur il s’attendait d’ores et déjà à quelques couacs de démarrage, mais il essayait néanmoins de rester optimiste. « J’espère. Je vais faire de mon mieux, en tout cas. » Et n’importe qui le connaissant saurait que professionnellement parlant le brun ne faisait jamais les choses à moitié, et ne se contentait pas de l’à peu près. Pour l’heure il avait cependant préféré revenir à la plaisanterie, minaudant d’un air pompeux pour mieux éclater de rire lorsque son ex-épouse avant rétorqué « Vous montez déjà sacrément sur vos grands chevaux, dites donc. » d’un ton amusé. Reprenant tout de même un brin de sérieux, le cœur résolument plus léger, il avait fini par admettre n’en avoir encore parlé à personne d’autre qu’à elle. À Sohan, à Rhett et bien sûr à Qasim il avait parlé de la proposition, se sentant incapable de prendre une décision sans entendre le point de vue de ces trois bonhommes en qui il avait une confiance aveugle, mais maintenant qu’il avait donné sa réponse à l’université il gardait l’information pour lui depuis des jours, comme résolu à la garder pour lui en attendant le bon moment. « J'en suis flattée. » Relevant ses iris bleus dans sa direction, la blonde avait questionné avec curiosité « Il y a une raison particulière pour que tu m'en parles à moi en premier ou ... C'était juste parce que c'était dans la lancée de notre conversation sur nos avenirs professionnels ? » Prenant une inspiration pour se laisser le temps de la réflexion, Hassan avait glissé les mains dans ses poches et haussé vaguement les épaules. « Un peu des deux, je crois … » Laissant sa phrase en suspens, il avait semblé s’apprêter à dire quelque chose avant de se raviser. « … Non mais, tu vas trouver ça stupide. » Pinçant ses lèvres, et poussé par le regard de la blonde l’intimant d’aller au bout de son raisonnement, il avait fini par ajouter « T’étais aussi la première à qui j’ai dit que je voulais devenir prof. Alors ça me donne un peu l’impression de boucler la boucle, tu vois ? » Et l’impression aussi, dans un sens, que si leur relation avait changé l’importance qu’il donnait à son opinion, elle, était toujours la même. Passant du coq à l’âne et de l’un à l’autre des projets qu’elle savait lui tenir à cœur, Joanne avait mis le doigt sur une autre des grandes inconnues de la vie d’Hassan, dont il mentirait en disant que son incertitude à ce sujet n’avait pas aussi eu sa part de responsabilité dans le temps qu’il avait mis à accepter la proposition des hautes sphères de l’université. Comment s’engager dans un projet quand se nourrissaient tant d’incertitude ? Fallait-il sacrifier une opportunité qui ne se représenterait peut-être pas dans l’espoir d’une autre qu’on ne lui offrirait peut-être jamais ? A défaut d’une véritable réponse à ces questionnements Hassan avait choisi la voie de la raison, et essayait de se contenter de ce qui était à portée de sa main au lieu de viser trop haut pour lui. « Mais tu l'avais dit toi-même, quand on s'était vu une fois, que c'était le genre de démarche qui pouvait prendre vraiment beaucoup de temps. » Bien sûr il l’avait dit, parce que c’était ce qu’on lui avait dit aussi, et sans doute était-ce ce qui l’empêchait de se faire une raison une bonne fois pour toute, ce qui empêchait à cette minuscule flamme d’espoir de s’éteindre pour de bon. « Je sais. Mais plus d’un an … ? » Il ne savait pas, et peut-être ne saurait-il jamais. Pourtant il espérait encore une réponse négative à pas de réponse du tout, mais qui sait s’ils n’étaient pas des centaines comme lui … Qui avait du temps à consacrer à ménager les susceptibilités de tous ceux que le système mettait de côté ? « Ce doit être la meilleure façon de penser, oui. » avait finalement acquiescé Joanne, Hassan se gardant bien de rendre à son psy le crédit d’une telle épiphanie. « Qui sait, c'est comme ça que tu tomberas sur de belles surprises. Tu le mérites, plus que quiconque. » Aussi fort avait-il envie de la croire sur parole, il en venait pourtant à douter. Malgré tout, les certitudes de Joanne étaient parvenues à lui arracher un sourire songeur, et murmurant un « Merci. » prudent mais sincère, il regrettait simplement qu’elle soit encore si prompte à croire en lui mais toujours si peu capable de croire en elle-même avec la même conviction. Laissant le silence reprendre le dessus sur le reste, il avait remonté le col de son blouson lorsqu’un coup de vent était venu secouer la végétation autour d’eux, et sifflé à l’attention de Spike qui les distançait un peu trop. Le silence en pleine nature n’en était jamais vraiment un, le vent, la faune et la flore se chargeaient de combler l’absence de conversation, quant à Hassan il n’était dérangé par le silence que lorsqu’il le trouvait lourd – et ce n’était pas le cas, aujourd’hui. Il avait proposé cette balade à Joanne dans le cas où elle aurait envie de parler, mais si elle n’en avait pas le cœur il se satisferait tout autant du fait de lui avoir fait prendre l’air, et de l’avoir extirpée au moins pour quelques heures de l’ambiance morose qu’il devinait être celle qui subsistait chez elle depuis quelques temps. « Et ... du coup, pour ... ton nouveau poste, ce sera effectif à partir de quand ? » La brise lui arrachant un frisson qui n’avait pas échappé au brun, elle avait enchaîné directement sans attendre la réponse à la première question : « Est-ce que tu continueras à enseigner en parallèle ? Est-ce qu'on pourra toujours se voir ou ... Tu auras un tel planning de ministre que tu n'arriveras plus à caser nos rencontres quelque part ? » Un rire avait échappé au professeur, et la tête se penchant de côté juste le temps que son regard n’attrape celui de Joanne. « Alors. La rentrée prochaine, oui, et évidemment. Dans cet ordre. » Il aurait pu développer, dire que d’ici la rentrée prochaine le doyen actuel comptait le mettre au parfum de ses futures fonctions pour que la passation se fasse en douceur, ajouter qu’il lui faudrait probablement sacrifier quelques heures d’enseignement mais que trouver un nouvel enseignant pour le seconder ferait aussi partie de ses premières tâches, et minimiser la saturation pourtant avérée de son emploi du temps, mais il n’avait rien fait de tout cela et s’était contenté d’aller au but, tendant dès lors à la blonde la perche nécessaire pour rebondir. « Tu me diras, je pourrai en dire autant. Je ne suis pas doyenne, mais les prochaines années ne seront pas de tout repos. Je compte sur toi pour m'en extirper de temps à autre. » Levant la main droite devant eux pour y montrer fièrement l’index et le majeur qu’il venait de croiser, il avait assuré « Croix de bois, croix de fer. » d’un ton léger, et naturellement enchaîné en ajoutant « Et j’aurai aucun scrupule à recruter Rhett pour venir m’aider à botter les fesses de Marius s’il t’accapare plus que de raison. » et la mention de Rhett ne jetant un froid – un frais, disons – qu’après coup, un nouveau silence s’étirant tandis que le brun fermait les yeux et secouait la tête de sa bêtise. La vérité c’est que Rhett serait peut-être avec eux s’il ne s’était pas passé … eh bien, ce qui s’était passé. Ils seraient peut-être allés ailleurs, les sentiers de la mangrove étant probablement un peu trop pour le genou fragilisé du sportif, peut-être auraient-ils pris un verre quelque part ou simplement flâné sur un bout de plage … Mais Rhett n’était pas là, et si Hassan ne l’avait pas convié c’était pour ne pas froisser Joanne, qui ne serait peut-être même pas venue. « Il est désolé, tu sais. Rhett. » avait-il alors menti, tout en se promettant de forcer jusqu’à ce que le rugbyman accepte de le faire croire, même s’il n’en pensait pas un mot. Car Rhett n’était pas désolé pour son geste, et Hassan n’était pas désolé pour Jamie et pour sa mâchoire. « Il est inquiet pour toi. On est inquiets pour toi. Et je sais bien que ça n’excuse pas tout, mais … » Mais ce n’était pas comme si elle ne connaissait pas Jamie. Évidemment qu’il devait avoir provoqué Rhett, il l’avait forcément provoqué … C’était ce qu’affirmait ce dernier du moins, et Hassan ne demandait qu’à le croire, le mari de Joanne n’ayant fut un temps pas lésiné pour tenter de lui faire perdre son calme à lui aussi. « Tu sais quoi ? Oublie. Je suis probablement pas le mieux placé pour te parler de ça. » Il n’avait pas envie de se fâcher avec Joanne, pas maintenant. Pas encore. Et surtout pas à cause de Jamie.
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| | | | (#)Dim 15 Nov 2020 - 18:18 | |
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Le sentiment de fierté qu'avait Joanne dès que le brun lui avait la grande nouvelle l'aidait à voir, l'espace de quelques secondes, le verre à moitié plein. Son quotidien n'était pas des plus faciles, alors s'accrocher à son projet professionnel ou au tremplin que venait d'avoir Hassan l'aidait beaucoup. Il doutait un petit peu de ses compétences une fois qu'il devra pleinement occuper son poste alors qu'à ses yeux, il n'y avait pas vraiment de raisons. Il enseignait désormais depuis de nombreuses années, il avait toujours été très investi dans son travail, toujours dans l'intérêt de ses étudiants. Et, le plus important, il adorait ce qu'il faisait. Ce qui avait le plus surpris Joanne, c'était quelle soit parmi les premières dans l'entourage du professeur à être mise au courant pour sa promotion. Il expliquait, avec timidité, par crainte d'être jugée par son ex-femme, qu'il trouvait une sorte de finalité à lui dire qu'il allait devenir doyen, bien des années après lui avoir confessé vouloir devenir professeur à l'université. Joanne lui lançait un regard attendri. Il exprimait là encore une sorte de fidélité et confiance qu'il avait à son égard. A moins que ce ne soit qu'au nom du bon vieux temps. Quoi qu'il en soit, elle était véritablement touchée de cette attention. "Je ne trouve pas ça stupide du tout." lui assura-t-elle avec un léger sourire. "Au contraire, je comprends ce qui t'a mené à penser de cette façon." Elle le connaissait bien, et ce cheminement n'avait au final rien de surprenant. C'était Hassan, voilà tout. Il leur était impossible d'ignorer totalement leur décennie de vie commune. Une complicité était toujours là. Discrète peut-être, mais toujours là. Alors que son avenir professionnel allait le faire rayonner de plus belle, c'était sur le plan familial qu'il ressentait encore une certaine amertume. Il avait voulu fonder une famille avec Joanne avant qu'il ne tombe malade. Il avait songé à l 'alternative de l'adoption, étant devenu stérile suite aux chimiothérapies, et avait fait toutes les démarches nécessaires pour espérer avoir un jour un enfant. Il doutait. Du fait de ses antécédents, de son célibat, de ses tentatives de suicide dont Joanne ignorait l'existence pour la plupart. Des données qui pouvaient compromettre son dossier. "J'ai lu un article, pas plus tard que la semaine dernière, où on expliquait que la moyenne de délai d'attente était de trois ans, à peu près. Tu as encore un peu de marge." dit-elle d'un ton encourageant. "Alors ne désespère pas. Pas tout de suite." Elle comprenait que l'attente était pire que tout, pire même qu'une réponse négative. N'ayant guère de commentaires supplémentaires à faire sur ce sujet, Joanne reposait rapidement des questions au sujet de sa promotion, une façon bien peu subtile d'éviter des sujets plus sensibles. C'était par une salve de réponses concises que le brun y répondit, sans donner davantage de détails sur lesquelles elle aurait potentiellement pu rebondir, rien de tout ça. Prise de court, Joanne esquissa un rapide sourire timide avant de baisser la tête et regarder le sol sur lequel ils avançaient tranquillement. Elle comptait notamment sur son ex-mari pour la sortir de ses bouquins et de ses recherches pour son doctorat pour les prochains tours à venir. Mentionner Rhett n'avait pas été des plus judicieux. Certes, elle comprenait qu'il fasse tout naturellement partie de l'équation et n'en voulait pas à son ex-mari de parler de lui. Seulement Joanne n'arrivait pas à le pardonner et lui n'avait certainement pas l'intention de s'excuser pour ses actes. Les deux amis se trouvaient donc dans une impasse. Elle lui sourit très tristement au brun lorsque celui-ci avançait que son meilleur ami avait des regrets. "J'en doute." souffla-t-elle d'un air résilié. "S'il l'était vraiment, il serait me le dire lui-même." Et il ne serait pas passé par Hassan pour transmettre ce message là. "Mais c'est gentil de te part de... D'essayer de recoller les morceaux." Ca ne partait pas d'un mauvais sentiment, elle le savait. Nerveuse, Joanne se mit à jouer avec ses doigts. "C'est donc par inquiétude qu'il a frappé Jamie ?" Elle ne cherchait pas à provoquer, ni à réagir, c'était une simple question rhétorique lancée comme ça. Elle n'était pas contrariée non plus, n'ayant même plus la force pour ça. "Mais quoi ?" lui demanda-t-elle avec douceur. Joanne voulait entendre ce qu'il pensait, même si elle en avait une vague idée. Néanmoins, Hassan était peu désireux de braquer totalement la jeune femme en approchant un sujet de conversation qu'elle avait jusqu'ici soigneusement évité. La conservatrice croisait finalement ses bras, imposant un silence qui avait duré plusieurs minutes. "Ca ne se passe pas très bien." souffla-t-elle finalement. Joanne minimisait largement la façon dont elle vivait son quotidien. "L'intervention de Rhett n'avait pas vraiment aidé." Un rictus triste et résigné vint marquer son visage brièvement avant qu'elle ne replonger dans ses pensées. Elle culpabilisait qu'elle puisse leur inspirer de l'inquiétude. Ils avait raison, au fond. Mais Joanne ne l'entendait pas vraiment de cette oreille. "Nous essayons de... maintenir une vie de famille, pour les enfants." Qu'ils disposent encore d'un équilibre pour leur épanouissement, le temps que le couple se décide de leur avenir. "Nous sommes au moins d'accord de faire en sorte qu'ils en pâtissent le moins possible le temps que..." Elle ne trouvait pas de bonne façon de terminer sa phrase. "... Le temps que ça aille mieux." Joanne avait mentionné le divorce durant une longue conversation avec son époux. Elle n'arrivait pas à passer au-dessus de ce scandale là. C'était la goutte de trop. Mettre des mots sur sa situation était un exercice bien plus difficile qu'elle n'aurait pu l'imaginer. Elle qui avait toujours eu une certaine facilité à exprimer ses pensées et ses émotions. Là, la donne avait changé : elle n'y parvenait plus. "Ca va aller." souffla-t-elle. Une phrase qu'elle se répétait au quotidien.
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| | | | (#)Lun 14 Déc 2020 - 14:05 | |
| Cela tenait peut-être à son tempérament, ou simplement au fait que jamais les « vraies » relations d’Hassan ne s’étaient terminées du fait d’une disparition brutale de ses sentiments, mais ce que le brun avait construit au fil de ses relations sentimentales il ne se sentait que rarement capable de le défaire de bout en bout, et les choses étaient d’autant plus vraies concernant Joanne, avec qui il avait partagé une décennie entière de relation. Ils n’étaient certes plus cette Joanne et ce Hassan, mais le temps passant et la blessure de leur divorce ayant enfin commencé à cicatriser il était peu à peu parvenu à définir d’une nouvelle place à lui accorder, une place à part qui ne lui convenait qu’à elle, et dans laquelle il s’autorisait à nouveau à leur faire confiance à elle et à son opinion. Pour autant, ce qui paraissait limpide à ses yeux ne n’était pas tant lorsqu’il fallait mettre des mots dessus, et avant qu’elle ne réponde « Je ne trouve pas ça stupide du tout. Au contraire, je comprends ce qui t'a mené à penser de cette façon. » il craignait encore qu’elle ne se méprenne sur ses intentions comme cela avait tant de fois été le cas par le passé … Qu’il n’en soit rien revêtait donc pour lui un caractère aussi rassurant que précieux, tout comme l’optimisme qu’elle s’évertuait à conserver sur un autre sujet, sur lequel Hassan avait de son côté commencé à perdre espoir. « J'ai lu un article, pas plus tard que la semaine dernière, où on expliquait que la moyenne de délai d'attente était de trois ans, à peu près. Tu as encore un peu de marge. Alors ne désespère pas. Pas tout de suite. » Il n’avait rien répondu pourtant, plus tant par défaitisme que parce que l’année passée à s’en persuader lui-même avait déjà drainé tellement de son énergie qu’il s’en sentait désormais totalement vidé. « Je ne désespère pas. » avait-il pourtant fini par murmurer, presque pour lui-même, et son regard glissant à nouveau vers le sentier face à eux. « J’essaye seulement d’être raisonnable. » Et Dieu savait pourtant que cela n’était pas dans son tempérament, lui l’homme de passion qui fut un temps n’était jamais guidé par la demi-mesure … Mais c’était la peur de prendre des gadins qui, mois après mois, année après année, finissait par annihiler même les plus forts traits de son caractère. Pas mécontent de voir la conversation dériver de nouveau vers Joanne, le fil de ses pensées lui avait malgré tout échappé l’espace d’un instant, suffisant pour que le prénom de Rhett ne quitte ses lèvres avec habitude, presque avec réflexe, la situation délicate dans laquelle Joanne et lui se trouvaient actuellement du fait de l’altercation de ce dernier avec le mari de la blonde. Et si de vive-voix Hassan refusait de prendre explicitement parti pour l’un ou l’autre de ses amis, il aurait été bien naïf d’imaginer qu’en son for intérieur le brun ne se range pas tout naturellement du côté de l’ancien rugbyman. « J'en doute. S'il l'était vraiment, il serait venu me le dire lui-même. » avait en tout cas rétorqué Joanne avec résignation lorsque le brun avait tenté, sans trop y croire c’est vrai, de prétendre que Rhett était désolé. « Mais c'est gentil de te part de ... D'essayer de recoller les morceaux. » Le regard allant à son tour balayer le sol, elle s’était tout de même fendu d’un « C'est donc par inquiétude qu'il a frappé Jamie ? » teinté de sarcasme lorsqu’Hassan avait tenté d’excuser le geste – plus ou moins – malheureux de Rhett, et s’il ne s’était pas donné la peine de répondre, un vague roulement d’yeux lui avait néanmoins échappé lorsque la blonde avait insisté « Mais quoi ? » Elle pouvait bien enrober la question de toute la candeur qu’elle souhaitait, Hassan ne pouvait pas croire qu’elle était à ce point naïve quant à l’autre face de cette histoire. « Mais tu connais Rhett aussi bien que moi, ce n’est pas le genre à s’emporter facilement. Et ton mari sait se donner du mal pour appuyer sur les mauvais boutons. » Mais Joanne ne l’avait pas cru lorsqu’il lui avait fait part des remarques racistes faites à son égard, alors pourquoi se voilerait-elle moins la face cette fois-ci ? C’était un débat stérile qu’il refusait d’avoir à nouveau avec elle tant ils en connaissaient tous les deux déjà l’issue, et au bout du compte il avait préféré couper court, se refusant à ce que l’ombre de Jamie vienne une fois encore semer la zizanie entre eux. Silencieuse, Joanne avait continué à marcher d’un pas cependant plus ralenti, Hassan y adaptant sa cadence et calmant du même coup les ardeurs d’un Tobey qui tirait sur sa laisse avec impatience. Plus loin sur le sentier ses deux propres chiens avaient marqué l’arrêt, signe que quelque chose devait leur barrer le passage, mais attendant d’y être à son tour pour s’en inquiéter l’enseignant avait rendu toute son attention à son ex-femme lorsqu’elle avait finalement repris la parole. « Ça ne se passe pas très bien. » Qu’elle l’admette était une plus grande surprise que la nouvelle en elle-même, sans quoi Hassan n’aurait pas ainsi cherché une occasion de l’emmener prendre l’air seule expressément dans le but de la changer un peu de décor. Il ne s’attendait en revanche pas à ce qu’elle poursuive et ajoute « L'intervention de Rhett n'avait pas vraiment aidé. Nous essayons de ... maintenir une vie de famille, pour les enfants. » trop habitué jusqu’à présent à ce que Joanne se dresse tel un rempart entre la raison et les diverses dérives de son second époux. « Nous sommes au moins d'accord de faire en sorte qu'ils en pâtissent le moins possible le temps que ... Le temps que ça aille mieux. » Elle n’était pas enviable, la place de ces deux bambins, pris au milieu de querelles d’adultes dont ils avaient tout intérêt à être encore trop petits pour les comprendre. « Ça va aller. » Joanne semblait avoir besoin de s’en convaincre bien plus que de convaincre son interlocuteur, et tous les deux étaient finalement arrivés là où Spike et Bandit les attendaient. La suite du sentier avait été barrée et un panneau des park rangers indiquait la formation d’une zone marécageuse et l’instabilité du terrain. « Je suis désolé. » Elle pouvait raisonnablement en douter, bien sûr, mais il était sincère. « Peu importe mon opinion à propos de lui, je n’aime pas te savoir malheureuse. » Et heureuse elle n’avait pas semblé l’être depuis un moment maintenant, en dépit de ce qu’elle tentait avec plus ou moins de faire croire autour d’elle, à d’autres qui ne la connaissaient pas comme Hassan la connaissait, et qui n’étaient pas capable de lire l’incertitude derrière un sourire trop figé ou la tristesse derrière un regard absent. « Tu sais que si tu as besoin de quelque chose tu n’as qu’à demander ? N’importe quoi. »
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| | | | (#)Mer 16 Déc 2020 - 15:31 | |
| ONLY THE VERY BEST so sick of living inside myself | |
Ils se connaissaient depuis seize ans, bientôt dix-sept. Une relation aussi longue qu'intense. Que si les dix premières années s'étaient déroulées de façon normale pour un jeune couple, les dix dernières les avaient rattrapé en matière de drames et d'incompréhension. Un tel passif laissait toujours son empreinte au fils de leurs conversations, que ce soit en bien, ou mal. L'on ne savait pas toujours comment interpréter certaines personnes, plus perturbés par le fait de très bien connaître la personne que l'on avait en face que de quiproquos anodins. Des avantages, et des inconvénients. Après des années à ne pas savoir sur quel pied danser avec l'un l'autre, il semblerait qu'ils aient enfin trouvé une sérénité dans leur relation, qu'importe le nom qu'on lui donnera. Elle n'était pas seulement amicale, cela allait sans dire. Ils se reconstruisaient encore, mais tout avait enfin été mis à plat, ils tentaient tous les deux d'avancer. Et enfin, leurs discussions étaient plus naturels, plus spontanés. Il y avait parfois des petites étincelles anecdotiques de leur vie passée, qui les faisaient sourire, qui les rassuraient. Ils parvenaient à se reconnaître malgré tous les changements (positifs ou non) que la vie leur avait apporté depuis leur divorce. Voilà qu'un nouveau pendait au nez de Joanne. Mais il y avait certaines choses qui ne changeaient pas. Comme Hassan qui prenait inlassablement la défense de Rhett alors qu'il devait probablement avoir une part de culpabilité durant son altercation avec Jamie. Mais ça, Hassan ne voudrait pas l'entendre. Pour lui, le Britannique était une personne avec un mauvais fond. Que si l'ancien rugbyman avait du user de ses poings, c'était que son adversaire l'avait forcément mérité. Mais s'ils en étaient venus, c'était que chacun avait agrémenté de façon négative leur conversation. Ce débat là était sans but et vide de sens, Joanne s'en était bien rendue et c'était pour cela qu'elle avait cessé de l'agrémenter plus que de raison. Ce qu'ils pouvaient être têtus, parfois.
Du coin de l'oeil, la belle blonde avait cru remarquer une pincée de surprrise dans le regard de son ex-mari lorsqu'elle lui confessait que sa vie conjugale n'était pas des plus brillantes depuis plusieurs mois. A quoi bon le cacher, il l'avait certainement deviné depuis qu'ils s'étaient retrouvés là, pour se promener. Aussi, elle se doutait bien que ce n'était pas sans raison qu'il lui avait fait la proposition de cette sortie, loin de son rôle de mère, d'épouse, et de conservatrice. Loin de toute source d'inspiration de sujets de conversation insignifiants, afin de se concentrer sur soi, et sur ses projets. Joanne ignorait où elle plaçait l'espoir de renouer correctement avec Jamie. Elle ne savait pas ce qui pouvait aider à aller mieux, ni même ce qui lui permettrait d'y voir plus clair sur son futur. Comme dans un état de léthargie, elle ne faisait rien, s'attendant à ce que l'une des bonnes actions de son mari face à un déclic, qui permettrait de lui pardonner. Et de reprendre une vie relativement normale. Seulement, elle ne voyait plus d'issues. Elle essayait de se montrer optimiste, de faire en sorte de ne pas se montrer aussi blessée qu'elle ne l'était véritablement. Mais, les mois défilant, elle était devenue lasse, éteinte. La blonde tentait de se persuader qu'une chimère allait devenir vraie et paradoxalement, elle avait conscience qu'elle se berçait d'illusions. Elle l'aimait encore. Ce n'était pas un problème de sentiments, c'était tout le reste. Son ex-mari n'avait jamais caché l'aversion qu'il avait pour Jamie. Malgré cela, il se sentait désolé pour elle que ça n'aille pas pour Joanne. Celle-ci forçait un sourire aux lèvres pincées. Elle ne savait que croire, lorsqu'il disait être désolé. Ses iris bleus se relevèrent vers lui à sa phrase suivante. Jamais n'avait-elle dit qu'elle était malheureuse, juste que ça ne se passait pas très bien. Mais le mot était juste et c'était d'autant plus dur à admettre une fois que ce fut prononcé à haute voix. Elle ne pouvait pas le nier, elle en était incapable. Hassan la connaissait suffisamment pour savoir si elle était heureuse ou non, qu'importe à quel point elle s'évertuait à jouer sur les apparences. Il n'était pas dupe. Son rictus devenait bien plus triste, avant qu'elle ne baisse la tête pour continuer à regarder où elle mettait les pieds jusqu'à ce qu'ils soient contraints de s'arrêter, abrégeant ainsi une promenade qui aurait pu durer des heures. Joanne avait toujours aimé marcher. "C'est gentil." lui souffla-t-elle avec reconnaissance. Joanne avait la gorge nouée, les yeux bien humides. Aussi émotive pouvait-elle être, elle avait appris ces derniers mois à se contrôler. Parce qu'il le fallait. "Mais je ne me le permettrai pas, tu dois déjà avoir beaucoup à faire, en ce moment." Le deuxième semestre entamé, avec son lot de partiels et de copies à préparer, de fins de programmes à boucler pour mieux préparer la rentrée prochaine. "Ca va aller." répéta-t-elle encore une fois. Et puis, pour l'heure, il n'y avait pas grand chose qu'Hassan pourrait faire, malheureusement. Mais elle se sentait soutenue, et rien que cela lui mettait un peu de baume au coeur. Contraints de rebrousser chemin, Hassan et Joanne firent demi-tour, dans le silence. Le brun gardait un oeil sur son chien. Ce n'était que de longues minutes plus tard que la jeune femme reprit la parole. "Si jamais... Tu as un jour de nouveau le temps pour une promenade comme celle-ci..." Son ton était hésitant. Joanne ne voulait pas déranger au fond. Mais prendre l'air lui permettait de se vider un peu la tête. Et Dieu savait combien elle en avait besoin. "Enfin je ne serai pas contre de renouveler une balade comme celle-ci." Elle se trouvait si maladroite dans sa demande, ou plutôt, sa suggestion. Mais elle savait qu'il comprendrait. Pour ça aussi, il la connaissait suffisamment.
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| | | | | | | | (joassan) only the very best |
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