SEMAINE 2
D’après mes savants calculs - non - il y a quasi 500 kilomètres à parcourir depuis Charleville jusqu’à Windorah. Le stop uniquement pour ce premier bout de chemin. De toute façon, il y a zéro transports en commun. On va arriver dans un tout petit patelin et je pense pas qu’on arrivera à faire le trajet en une seule fois. Par contre une chose est sûre, c’est qu’il n’y a qu’une seule route pour s’y rendre. On va forcément se croiser se décroiser avec les autres participants. Se doubler, se voir sur le bord de la route en galère. Si on voit Kelly, j’aimerai bien qu’on ait un véhicule assez grand pour pouvoir lui rendre la pareille de la dernière fois. Elle nous a fait une jolie petite blague à la supérette et je ne lui en tiens pas rigueur du tout. C’était plus drôle qu’autre chose. Au moins ça me donne des idées aussi pour essayer de ralentir les autres qu’on croisera éventuellement. Mais vraiment là sur ce bout de chemin, c’est certain qu’il n’y aura pas grand chose que des stations services. Heureusement qu’on a fait le plein de biscuits et chips en promo dans un grand supermarché qu’on a visité à Charleville après qu’on ait passé la ligne d’arrivé vendredi.

Voilà, une première voiture qui met son clignotant après que Liam ait attiré leur attention. Je m’approche mais pas trop près, il gère souvent bien tout seul le stop. Pour l’instant je gère bien la carte aussi. Faut dire que j’ai un bout assez facile. Y’a qu’une ligne droite. Faudra just peas qu’on loupe de s’arrêter au bon endroit. Ne pas aller trop loin. Pourquoi je pense à ça ? Je vais nous porter mal chance. Non non tout va bien se passer. Je plie un peu la carte comme pour me donner de l’espoir qu’on va embarquer avec cette voiture ci. « Y’a pas mal de place en plus dans celle là. » Que je dis à Liam. Il faut penser à Gerard et Baltazhar qui sont aussi de la partie à nos côtés. J’ai toujours un peu de mal à faire abstraction d’eux. J’ai toujours envie de leur parler, de les inclure.

@May Glitters @Liam Taylor

10h30 A.M Nous voilà de retour sur la route. On recherche difficilement une voiture qui accepterait de nous récupérer. Nous avons presque cinq cents kilomètres à parcourir d’ici jusqu’à Windorah, notre seule et unique halte obligatoire. Les autres participants se sont déjà éparpillés un peu partout, certain par chance ont même déjà dû trouver une voiture Cette fois-ci c’est moi qui me colle à la tâche de faire le stop alors que Kan s’occupe de la carte. Le vent souffle modérément, mais ça reste suffisent pour pouvoir faire voler mes cheveux. La première semaine fut éprouvante, riche en rebondissement et surtout en rencontre. Je n’aurais jamais pu parier sur le fait de retrouver Kelly ici-même, ni que je puisse la croiser sur ma route. Ça faisait un petit moment qu’on ne s’était pas vu et le peu de fois où ça arrive c’est autour d’un repas organisé par maman Taylor qui reste toujours gaga de son ex-belle-fille, autant vous dire que quand Chad est présent c’est plutôt bizarre comme réunion de famille. Le weekend quant à lui s’est moins bien passé, le repos a été certes la bienvenue, mais cette foutu soirée qui se devait être détente s’est transformée en cauchemar. Pourquoi a-t-il fallu que je tombe sur la seule dingue de l’émission ? Un simple verre d’eau à moitié terminé et voilà que le scandale éclate en plein milieu de la foule. Les gros titres sur les journaux le lendemain matin : L’eau tue ! Incroyable ça… Je suis perdu dans mes pensées et sur mon avis partagé sur le début de mon aventure entre des points positifs et peu de points négatifs, mais une voiture vient me retirer de cette rêverie. « Bonjour, désolé de vous déranger. On participe à une émission qui se nomme Race of Australia. Le but est d’aller jusqu’à Perth en partant de Brisbane. On doit impérativement faire Charleville – Windorah. Allez-vous vers là-bas ou pouvez-vous nous en approcher le plus possible ? » J’entends Kane derrière moi, content qu’on ait enfin fait mouche, mais je préfère être prudent, on s’est déjà pris des non provenant de personnes qui voulaient faire les malins devant la caméra. « On vous en supplie, c’est une course contre la montre et on doit y être le plus rapidement possible ou l’on est directement éliminé. » Je sais que je presse peut-être un peu trop mon interlocuteur, mais ça prendrait une décennie à tout lui expliquer dans les détails, je préfère y aller de but en blanc. « Alors Kane, prêt pour une nouvelle aventure ? »

lancer de dé:

Il est tôt, le soleil ne cogne pas follement, on est en hiver, mais je meurs de chaud. Je crois que je suis nerveux. Très nerveux. C’est un sprint pour cette étape et je sais pas si on va arriver à nos fins. Qu’il n’y ait qu’une route me stresse carrément. De voir les autres binômes partir dans des voitures sous mes yeux aussi. Surtout ça ouais. On est encore à Charleville au tout début de la course. J’ai envie de boire de mon eau mais comme Liam est en pleine négociation pour une voiture je ne veux pas me risquer à perdre du temps si jamais ils nous disent ok et qu’il faut embarquer aussitôt. Tu auras le temps de boire plus tard. Oui oui j’ai mangé un sacré petit déjeuner à l’hôtel. Je me souviendrais de ce buffet à volonté encore longtemps. Y’avait les céréales favorites et ça a été comme la meilleure nouvelle de l’année. « On vous en supplie, c’est une course contre la montre et on doit y être le plus rapidement possible ou l’on est directement éliminé. » Il emploie les grands moyens et j’ai envie de venir faire mes yeux de chien battu au cas où ça nous aiderait. « Alors Kane, prêt pour une nouvelle aventure ? » Sauf que la voiture profite du petit moment de distraction de Liam vers moi pour partir en trombe.  « Fuck !! » Et je m’en fou si on a pas le droit de jurer à la télé. Ils auront qu’à mettre des bip sur mes paroles. Mais là avant que je me décide à déchirer la carte en deux, y’a une nouvelle voiture qui arrive et je fais des grands signes. J’ai attiré leur attention et ils se mettent sur le bas côté. Respire. Calme. On y va. Et j’y vais ayant repris un peu de contenance.

« Bonjour, on fait une course en stop de Brisbane à Perth et on doit aller jusqu’à Windorah le plus rapidement possible. Je crois qu’on est les derniers encore sur le bord de la route. Est-ce que vous pouvez nous aider s’il vous plaît ? » Je me mordille la lèvre en les regardant, attendant de voir le verdict tomber. Je leur tends le petit papier explicatif qui est aussi dans notre kit de survie de l’émission. Y’a plus de détails que ce que je viens de dire et ça se lit assez brièvement. Je croise fort les doigts. Dites oui dites oui dites oui dites oui…

« Balthazar, c’est le moment de dire au monteur de mettre la musique Sound of Silence… » J’essaie de tourner la situation au ridicule, utilisant de l’ironie pour essayer de me débloquer. Comment faire espérer avant de tout détruire et de se barrer. Mon visage reste figé, ma main toujours tendue vers là où se situait la fenêtre du conducteur pour lui serrer la main. Kane remarque que je suis sur le point de casser quelque chose, visiblement je n’ai pas encore assez dormi pour calmer mes nerfs. C’est mon compagnon de route qui reprend le rôle de l’autostop. Je sens qu’on va commencer à galérer dès le début et cette fois-ci on ne peut même pas avoir l’option prendre le bus ou autre, on est obligé de faire s’arrêter une voiture pour qu’elle nous emmène jusqu’à Windorah. Je vois un autre groupe nous passer devant, pas très compliqué de remarquer ceux qui ont réussi, il suffit de voir une grosse caméra à l’arrière de la voiture. On est même probablement les derniers à ne pas être encore parti… Kane arrive finalement à en arrêter une autre, mais je préfère rester à l’écart, je ne sais pas si je vais pouvoir me retenir avec un nouvel échec. Bingo, la voiture redémarre, elle ne prend pas du tout cette route…. « POURQUOI ÊTRE AUSSI CORROMPU ????? » J’exagère, je fais un petit cinéma devant la caméra pour leur donner de l’audience, mais il y a vraiment une partie de moi qui est à deux doigts de balancer une ânerie. « Bon, ok, on va réussir, il n’y a pas de raison qu’on soit les seuls à ne pas partir de cette foutu ville. » Je prends mon courage à deux mains, je vois une voiture hésiter à se rabattre pour venir nous voir. Je me mets devant elle, mains sur le capot tel un désespérer qui cherche à tout prix à fuir la ville. « S’il vous plait ! Ça va bientôt faire une heure qu’on est bloqué ici alors que tout le monde est déjà parti. » Je lui explique tout le principe de l’émission encore une fois, mais je m’emmêle un peu les pinceaux, mais grosso merdo je pense que la jeune femme a compris le principe du ROA. « Je pense que ça pourrait marcher avec elle. On attend qu’elle passe son appel à son petit ami, mais la chance va enfin nous sourire. »

lancer de dé:

« Balthazar, c’est le moment de dire au monteur de mettre la musique Sound of Silence… » J’explose pas de rire, mais j’ai un très grand sourire sur mes lèvres. Il aurait pas pu mieux dire. C’est vraiment le genre de truc qui me font plaisir dans la vie. « Hello darkness my old friend. »

On avance pas. On avance pas du tout. Personne ne nous prend. Il faut que je rationalise les choses et que je respire. Ca sert à rien du tout de paniquer. Ca va juste nous ralentir. Il faut que j’imagine ça comme si c’était une intervention. Je gère très bien le boulot. Des fois j’aimerai bien que mes émotions soient aussi facile à gérer dans ma vie privée mais je suis bien loin du compte. J’ai jamais compris comment mon cerveau pouvait aussi bien faire la différence entre « zen c’est le boulot » et « tu gères rien, c’est ta vie perso ». C’est vraiment pas cool. Peut être qu’il faudrait que je vive tout le temps à la caserne pour que ma vie soit un peu plus maîtriser ? Mais telle n’est pas la question parce que c’est la course. Rien n’est perdu. Les autres n’auront peut être pas de chance sur la deuxième partie. Ils ont filé en vitesse mais tout est encore jouable. C’est exactement le moment qu’il faut pour que je lance un plan foireux comme celui que Kelly nous a fait mais le problème c’est qu’il n’y a aucune équipe à côté. Je ne peux rien faire du tout. Non, on ne commence pas à paniquer Kane. Calme calme. Je prends une inspiration et je me calme. J’enlève mon hoodie parce que je meurs de chaud. Je tourne ma casquette à l’envers parce que j’ai l’impression que ça va me donner de la force. Mais nope. La voiture se barre aussi tôt. Limite si j’ai pas eu le bras décroché vu comme j’étais proche. Pas cool. J’essaie de pas péter mon cable alors que je suis pas loin. Si cette nouvelle voiture ne s’était pas arrêté je crois je l’aurai mal pris. Et puis Liam qui reprend le lead pour cette voiture. « S’il vous plait ! Ça va bientôt faire une heure qu’on est bloqué ici alors que tout le monde est déjà parti. » Et moi qui fait des prières silencieuses à côté. Seigneur, je sais que je crois pas en la religion mais sur un malentendu, peut être que vous pouvez nous aider.  « Je pense que ça pourrait marcher avec elle. On attend qu’elle passe son appel à son petit ami, mais la chance va enfin nous sourire. » Seigneur petit jésus si c’est vous qui avez fait ça, bien joué. Alors elle nous prend ou pas ?

Je n’arrive pas à y croire. On se retrouve une fois de plus sans rien. Il y a toujours ce putain d’arrêt de bus qui nous fait de l’œil là-bas, à quelques mètres de nous, mais impossible de le prendre, on doit impérativement s’y rendre en auto-stop. Il faut qu’on se calme, on va réussir, on ne peut quand même pas être le seul et dernier duo à ne pas sortir de Charleville si ? On ne va quand même pas se faire éliminer alors que nous ne sommes même pas sortis de la ville ? Il faut qu’on bouge, qu’on se pose ailleurs, ici ça ne marche pas. « Ramène-toi Kane, on va voir par là-bas on aura peut-être un peu plus de chance. » Il y a une place avec quelques voitures qui passent, ça devrait pouvoir le faire, on n’aurait même pas besoin de les arrêter, ils le sont déjà pour certains. On s’y précipite donc, je suis le premier à me retrouver sur place, Kane me talonne le pas. Maintenant il suffit de trouver une personne qui est ouverte d’esprit et prête à nous prendre. « S’il vous plaît Monsie…. » Même pas le temps de terminer ma phrase que le voilà déjà en train de redémarrer la voiture sans même baisser sa fenêtre. Bordel. « Reste ici et essaie de trouver quelqu’un, si jamais tu choppes une voiture tu viens me récupérer, je vais vers la sortie de la ville. Je viendrai te chercher si jamais j’en trouve une avant. » Je laisse Kane sur place, c’est un risque de se séparer, mais au point où on en est il n’y a plus vraiment le choix. Le temps passe beaucoup trop vite ce qui nous éloigne peu à peu de la qualification pour la suite des événements. Ok, voilà la sortie, il y a quelques voitures. Je reprends auto-stop, c’est la seule solution pour les faire s’arrêter ici. Oh putain, voilà une voiture qui ralentit.

lancer de dé:

Toujours au point mort. J’essaie de me rassurer en me disant qu’on aura marqué l’histoire de Race of Australia en n’avançant pas d’un kilomètre dans cette première partie d’étape. J’ai envie de rire plus que de pleurer maintenant que j’ai bien vu que tout le monde est bien loin devant nous. On les a tous vu passer depuis trop longtemps. On ne gagnera jamais. C’est sûr. La motivation s’en va petit à petit au fil des heures qui passent toujours sur le bord de la route. Le même bord que celui qu’on a foulé au début de la journée. C’est ridicule. On a vraiment pas de chance aujourd’hui. Tout le monde nous laisse là.  « Ramène-toi Kane, on va voir par là-bas on aura peut-être un peu plus de chance. » Liam ne lâche rien et ça me redonne de l’espoir pour dire la vérité. Peut être que y’en a d’autres un peu plus loin qui sont à présent dans la même merde que nous. Mais bon, faudrait qu’on avance un minimum pour penser qu’on a encore un pied dans la course. « Reste ici et essaie de trouver quelqu’un, si jamais tu choppes une voiture tu viens me récupérer, je vais vers la sortie de la ville. Je viendrai te chercher si jamais j’en trouve une avant. » Il tente le tout pour le tout et il a raison. On a rien à perdre parce qu’on a déjà perdu. Alors je suis ses directives parce que j’en ai pas de mieux à donner. Changer de stratégie ça peut payer. Et oui. C’est le cas parce que je le vois s’arrêter en voiture devant moi peu après. Un large sourire se forme sur mes lèvres alors que je monte dans la voiture. « Merci madame, c’est très apprécié. » Et je fais un fist bump à Liam qui a géré cette première voiture. « C’est toi le meilleur. » On avance un petit peu, même si on a des heures de retard. On avance. Ca fait du bien.