It's strange what desire will make foolish people do I never dreamed that I'd meet somebody like you Nobody loves no one
Mai 2020. Le brun avait beau ne pas avoir grandi dans ce milieu - loin de là - il se fondait désormais avec une facilité déconcertante dans toutes les soirées mondaines et autres événements sélectifs de ce genre. Il fallait avouer qu’il avait la chance de bien présenter, et de posséder un sourire en or ainsi qu’un minois à qui on aurait presque tout donné sans hésiter par deux fois. Cette apparence, il la devait bien à la chance - même si tout le reste, sa position sociale ainsi que sa faculté d’adaptation à tout lieu et tout interlocuteur, il savait qu’il ne le devait qu’à lui-même et à son travail acharné pour arriver jusque là. Il n’avait jamais lésiné sur l’investissement personnel lorsqu’il était étudiant, et c’était encore le cas aujourd’hui où il ne comptait pas ses heures, qu’il s’agisse de son boulot officiel ou de ses magouilles sur le côté, en compagnie d’Halsey. En réalité, tout cet ensemble formait sa vie, et il ne dissociait pas vraiment de côté professionnel et personnel, ce qui le rendait d’autant plus redoutable - car il était en permanence dans le calcul et le jeu, ne sachant parfois plus lui-même qui il était réellement en-dessous de toutes ces apparences. Mais loin de lui l’idée de se sentir forcé à revêtir un masque - au contraire, il le faisait avec un naturel qui trompait (presque) n’importe qui. Rien de tel pour le stimuler qu’une soirée bondée de personnes influentes, et surtout, riches. A peine embauché chez ABC, il avait su rentrer dans les petits papiers des bonnes personnes pour se faire convier à ce genre d’évènements où les invités étaient triés sur le volet.
Il avait arboré le dernier de ses costumes, réalisé sur-mesure pour mettre en valeur sa carrure dont il connaissait l’effet - et puis, après tout, il avait l’argent de se payer ce genre de choses, d’autant plus qu’il s’agissait d’un investissement réellement utile. A peine arrivé à la soirée, ses collègues l’avaient attiré pour qu’il vienne saluer le patron d’ABC - rien que ça. Tout sourire, sachant déjà se faire apprécier de collègues qu’ils ne connaissaient que depuis quelques semaines mais qui semblaient l’avoir intégré avec une facilité déconcertante, il avait bien entendu suivi ce beau monde pour rencontrer le boss. Inutile de préciser qu’il s’agissait d’un homme occupé, et qu’après avoir échangé deux formules politesses avec Clyde, ce dernier avait bien vite compris que le patron ne comptait pas lui compter le récit de ses dernières vacances. Pas assez bête pour s’imposer là où il n’était plus désiré, Clyde s’était contenté d’une introduction qu’il trouvait déjà plus que satisfaisante - après tout, il fallait bien commencer quelque part pour se développer un nouveau réseau à Brisbane - puis s’était éclipsé vers le bar pour se munir d’un verre. Il n’aimait pas boire, il n’aimait pas l’idée d’avoir bu, et encore moins celle d’aller jusqu’à perdre ses moyens - mais s’il ne faisait pas comme tout le monde, on allait le remarquer, et pas dans le bon sens. Alors qu’il se retournait pour sonder la salle du regard et essayer de reconnaître quelques personnalités influentes autour desquelles il pourrait aller tourner, il s’était retrouvé presque nez à nez avec une jeune femme sortie de nul part. Plutôt mignonne, mais ce n’était pas vraiment le genre de qualité qu’il était venu chercher ce soir. “Bonsoir, enchanté.” Et vous êtes ? Riche, peut-être ? Pas qu’il ait particulièrement envie de lui faire la conversation, mais puisqu’elle se trouvait devant lui, il pouvait difficilement ignorer sa présence sans passer pour un goujat - ce qui aurait été le contraire de l'image qu’il souhaitait renvoyer. Alors, il se contenta de lui décocher un sourire poli qui aurait presque donné l’impression qu’il avait tout le temps du monde à passer en charmante en compagnie. Pas vraiment, mais on ne savait jamais ce qu’elle pouvait bien avoir à lui dire.
Une soirée mondaine, encore une fois. Je suis toujours invitée partout, je ne sais pas si je dois ça à mon nom de famille ou à ma capacité à attirer le scandale. Certainement un peu des deux. Et j’en profite. C’est tout ce que j’aime ça. Les soirées où tout le monde est classe, je vais être entourée par un nombre incalculable de gens aussi riches que moi. C’est comme si je me retrouvais à la maison le temps d’une soirée. Il va falloir jouer avec les faux sourires, discuter avec les gens que j’aime et ceux que je n’aime pas. Il y a bien plus souvent que je n’aime pas au cas où vous vous poseriez la question.
J’observe le monde entier, et surtout les hommes présents par ici. Je suis entourée par des riches, et j’aurais bien besoin de redorer mon blason pendant un temps. Quelques photos, des couvertures de magazines et le tour est joué pas vrai ? Comme d’habitude. Et, avec un peu de chance, mon père me dirait de retourner à Sydney parce que je fais trop de conneries. Il s’excusera sûrement d’avoir arrêté de me donner de l’argent et je reprendrai ma vie comme elle l’était avant. Alors je cherche ceux qui ont à peu près mon âge, un qui a l’air un peu bad boy qui ferait bien sur des photos instagram. Je sonde la salle, arborant mon plus beau sourire. Celui de la blonde niaise qui ne sait pas aligner trois mots à la suite sans être complètement perdue. Et qu’ils sont naïfs à y croire tous. Je rencontre des gens influents, d’autres que j’avais déjà vu à de nombreuses reprises. Ceux que j’ai déjà vu ne m’intéressent pas, je sais que beaucoup de monde voyage pour rejoindre ce genre de soirées. Et ce soir, j’ai besoin de quelqu’un qui vient de Brisbane, un type que je pourrais avoir à ma botte et à ma disposition quand je le voudrai. Et c’est pas génial les relations à distance pour ça.
Un type attire mon regard un peu tardivement. J’observe son costume, ses traits. Il a l’air parfait pour cette mission. Il est plutôt beau, assez élégant et n’a pas vraiment l’air à 100% dans son élément. Je penche légèrement la tête, il pourrait faire l’affaire. J’avance et me plante devant lui. Sourire aux lèvres, bras croisés sur ma poitrine et j’attrape ses yeux au vol. “C’est moi qui suis enchantée.” Oui je la joue jeune fille sage et intéressée. Je sais faire absolument tout ce que je veux, je suis capable de jouer n’importe quel rôle. Et certains diraient que je devrais utiliser ces capacités pour devenir actrice au lieu de m’amuser à manipuler les types riches que je peux croiser. Mes yeux papillonnent et je joue un peu avec mes doigts. Oui je sais jouer la fille gênée aussi, juste une seconde. “Vous… Vous êtes nouveau ? Je crois que je ne vous ai jamais vu par ici !” La réponse m’intéresse uniquement pour savoir d’où il vient et ce qu’il peut bien faire là. “Je vous offre quelque chose à boire ?” Avant même qu’il ne réponde je me débrouille pour qu’on s’éloigne un peu, qu’on aille vers le bar et qu’on s’isole de la foule. Ca devrait être facile, il n’a pas l’air d’être très intelligent.
“C’est moi qui suis enchantée.” Il n’y a pas à dire, la blonde a l’air plutôt décidée, et il ne fait plus de doute qu’elle ne s’est pas retrouvée devant Clyde par le plus grand hasard. Elle a beau afficher un sourire que beaucoup d’hommes qualifieraient de charmant, ses bras croisés signalent tout de suite au brun qu’elle n’est peut-être pas exempte d’un quelconque objectif en l’approchant ainsi. Qui est-il vraiment pour qu’une jeune femme participant à ce genre de soirée décide de l’aborder ? A moins qu’elle n’ait des plans très clairs sur la manière d’occuper sa nuit, et d’être suffisamment directe pour tenter une approche frontale ? Clyde ne l’a jamais vue, et rien chez elle ne lui permet de mettre le doigt sur son identité ou ses intentions, mais il n’est pas du genre à se laisser duper par un joli sourire et quelques mèches de cheveux qui tourbillonnent tandis qu’un air gêné s’affiche sur le visage de la jeune femme. “Vous… Vous êtes nouveau ? Je crois que je ne vous ai jamais vu par ici !” Le brun doit bien avouer qu’elle sait y faire, et qu’elle manie une palette variées d’expressions à la perfection. Malgré son flair habituel, il n’arrive pas à savoir s’il doit se méfier d’elle ou profiter de son intérêt pour se faire une place dans le cercle de connaissances de cette jeune femme qui a presque l’air intéressante, à défaut d’avoir l’air vraiment intelligente. Jamais du genre à refuser une invitation lorsqu’elle se présente, il préfère de loin jauger l’intérêt qu’il pourrait retirer de quelqu’un avant de le rayer de sa liste, et la blonde lui offre cette opportunité sur un plateau, ce qui le pousse à lui répondre avec un entrain non feint. “Je débarque fraîchement de Perth.” Il lui lance un clin d’oeil. “Promotion.” Pas vraiment, en réalité, mais il préfère croire que la vérité est malléable et qu’être passé d’un journal local à ABC peut être qualifié de promotion, en quelque sorte. Au fond, il préfère surtout être évasif mais se poser en interlocuteur suffisamment intéressant et intéressé pour pousser la jeune femme à se montrer un peu claire sur ce qu’elle attend réellement de cette conversation - car il doute qu’elle soit ici pour parler bulles de champagne. “Je vous offre quelque chose à boire ?” Il acquiesce d’un geste de la tête, et n’a même pas le temps d’en placer une avant qu’elle ne s’écarta pour laisser passer quelqu’un et se place très stratégiquement pour le pousser à s’éloigner et se rapprocher du bar. Intérieurement, il sourit, car cette méthode il la connaît - et pour cause, il l’affectionne particulièrement. “Laissez-moi vous inviter plutôt.” D’un geste, il appelle le serveur et fait remplir deux coupes de champagne, lui tendant la première avec un sourire en coin. Clyde est un homme généreux - lorsqu’il le veut - si jamais elle en doutait. “Qu’est-ce qui vous amène à cette soirée, Mademoiselle… ?” Mademoiselle j’espère reconnaître ton nom et me faire une plus claire idée de la personne à qui je m’adresse.
J’essaie d’être attentive au moindre détail. Tout peut être un signe. Une marque de vêtement, une façon de se tenir ou une expression utilisée dans une conversation. Je suis à l’affût, et j’ai repéré ce type inconnu, un peu étrange au milieu de la foule. J’ai l’impression qu’il a l’air à sa place, mais quelque chose me chiffonne et m’attire en même temps. Alors je ne vais pas contre mon instinct, je vais le voir. Je me place devant lui, grand sourire aux lèvres et un air un peu niais sur le visage. C’est celui qui marche toujours. Il est comme les autres, je ne vois aucune différence chez lui. Alors ma technique est la même que pour tous les autres hommes que je peux fréquenter habituellement.
Je pose mes premières questions, l’air un peu gênée. Je ne sais pas ce qui lui plaît le plus mais je finirai par le savoir au détour d’une conversation. Promotion, premier élément qui m’intéresse vraiment. Il est ici pour une promotion. Mais je continue de me méfier. Il pourrait savoir jouer, mais je n’en suis pas convaincu. Il a l’air bien trop heureux de voir mes deux yeux bleus s’orienter vers lui et lui donner toute mon attention. “Vous travaillez dans quoi ?” Je me fais intéressée, et quand il m’expliquera je ferai sûrement celle qui ne comprend rien à rien parce qu’il utilise des mots trop compliqués. Ils sont tous si facile à avoir c’en est presque ennuyant à la longue. Je l’éloigne un peu de la foule pour nous rapprocher du bar, ça aussi je l’utilise souvent pour être seule avec ma proie. Mon sourire s’agrandit quand il propose de payer les verres. “Quel gentleman.” La flatterie ça marche beaucoup aussi sur ce type de mec. Il a très probablement tout dans les muscles et rien dans le cerveau. Quoi que, il n’est pas non plus très musclé. Heureusement qu’il est plutôt mignon sinon je ne m’y serais jamais intéressée plus de 10 secondes. “Ivy, et vous ?” Je ne suis pas assez conne pour donner mon nom de famille à peine on me rencontre mais peut-être que lui oui. S’il le fait c’est qu’il n’a rien à cacher de ce côté là, ou qu’il veut se vanter de venir d’une famille célèbre dans le milieu. “J’ai été invité, alors je discute avec les gens mais je dois avouer que je ne comprends rien à la plupart des conversations…” Une fausse mine boudeuse qui me fait rire intérieurement. Je comprends sûrement tout mieux que tout le monde ici. “Et vous vous êtes là pour votre promotion ?” Mes lèvres se posent délicatement sur la coupe alors que mes yeux ne lâchent pas les siens.
“Vous travaillez dans quoi ?” Clyde n’est pas vraiment étonné que la blonde ait sauté sur le sujet du boulot à l’instant même où il a prononcé le mot ‘promotion’ - cela dit, elle est suffisamment intelligente pour ne pas relever cette partie-là, du moins pas tout de suite. Au contraire, elle fait mine d’être intéressée par la vie du brun, mais ce dernier a de sérieux doutes quant à l’honnêteté de la jeune femme. Elle l’a abordé trop vite, a sauté sur les sujets intéressants au bout de quelques échanges seulement, et si un autre homme pourrait se sentir flatté d’attirer ainsi l’attention d’une jolie femme, Clyde connaît trop bien ce genre de petit jeu pour s’y laisser avoir. Il ne sait rien de cette fille et veut bien lui laisser le bénéfice du doute, car elle pourrait se révéler intéressante malgré l’air un peu niais qu’elle affiche, mais il n’est pas dupe. Alors, il hésite, ne sachant pas s’il doit lui révéler son véritable poste, ce qui ferait peut-être fuir la demoiselle si elle espérait dénicher un avocat ou un homme d’affaires. Cependant, s’il espère pouvoir se mettre cette fille dans la poche, le lieu est bien trop public pour qu’il se laisse aller à des mensonges qui risqueraient de le rattraper bien vite, et de lui causer bien du tort que cette simple conversation ne mérite pas. Alors il choisit de prendre le parti de l’honnêteté, restant néanmoins vague sur sa position dans la hiérarchie, que la blonde reste libre de s’imaginer. “Je suis journaliste d’investigation pour ABC.” Evidemment qu’il précise ABC, car il sait bien que ce nom résonne chez tout le monde, à l’inverse d’un banal journal local dont peu de monde aurait déjà entendu parler. Pour la convaincre de rester en sa compagnie quelques secondes supplémentaires, le temps qu’il se fasse une idée plus précise sur cette inconnue qui l’a abordé de manière si cavalière, il lui offre un verre. “Quel gentleman.” Ce à quoi il répond d’un léger mouvement de tête et d’un sourire en coin parfaitement maîtrisé, tout en levant légèrement sa coupe à l’intention de la demoiselle. Il y a trempe légèrement ses lèvres avant d’estimer qu’il serait peut-être temps que la demoiselle lui livre quelques informations sur elle. “Ivy, et vous ?” Et merde. Il aurait préféré son nom de famille, et n’importe qui de bien intentionné et n’ayant aucune arrière-pensée n’aurait sans doute pas hésité à lui donner son nom complet, puisque c’est cela que sa question avait suggéré. Pas si nette que ça alors, blondie. Mais plutôt sympathique, et charmante avec son sourire boudeur, alors Clyde veut bien se laisser aller au jeu un moment. “Logan.” Et cette fois, il choisit de mentir, sachant qu’il saura couvrir ses traces ou justifier ce petit écart de vérité si nécessaire. Le prénom de Logan est le sien, du moins était le sien jusqu’à ses dix-huit ans, mais il lui arrive encore souvent de l’utiliser lorsqu’il se présente dans le milieu du journalisme, comme une énième manière de rester discret, et qu’il ne considère d’ailleurs pas réellement comme un mensonge. Il possède d’ailleurs une pièce d’identité vieille de dix ans désormais, sur laquelle Clyde n’est encore que son second prénom.
Puisque la jeune femme semble bavarde mais étonnamment avare d’informations la concernant, Clyde tente de la questionner davantage. “J’ai été invitée, alors je discute avec les gens mais je dois avouer que je ne comprends rien à la plupart des conversations…” Alors comme ça, elle veut jouer à l’idiote ? Elle est presque convaincante, mais ça ne prend pas totalement, même si Clyde lui offre un sourire poli pour masquer son amusement. “Je vous comprends, beaucoup de personnes se servent de ces soirées pour discuter boulot, et ça devient vite ennuyant. Vous n’êtes pas là pour des raisons professionnelles alors, je suppose ?” Allez, balance quelques infos, blondie. “Et vous vous êtes là pour votre promotion ?” Il n’avait donc pas tort, le sujet de la promotion est bel et bien au centre des préoccupations de la demoiselle, ce qui ne laisse désormais plus réellement de doute sur ce qui semble intéresser la blonde chez lui. Mais elle le fait rire, à se démener pour qu’il la trouve charmante, alors il continue à la suivre. “Absolument. Je préférais rencontrer la direction dans un cadre plus… sympathique.” Est-ce utile de préciser qu’il essayait par là de lui faire comprendre qu’il a une certaine ambition, et qu’il sait s’en servir pour se rapprocher des bonnes personnes ? Si elle-même pratique le même jeu que lui, elle l’a sans doute déjà compris. Si le brun espère la garder à ses côtés, il faut qu’il lui donne une raison de croire qu’il est intéressant, au-delà de la simple titulature de son job. Il lui offre donc un sourire éclatant avant d’avaler une nouvelle gorgée de champagne. “J’avais accompli ma mission de la soirée et je songeais à partir, mais vous êtes arrivée au bon moment. C'est si rare, une femme qui ose prendre les devants.” A elle de tirer la signification qu’elle pouvait bien vouloir de cette phrase, qu’il avait prononcée d’un ton tout à fait neutre, et sans lui lancer le moindre regard lubrique - il ne manquerait plus qu’elle pense qu’il l’invitait à passer derrière le bar, là, tout de suite.
Il est difficile à cerner le brun. Mais je garde mon sourire niais sur le visage, ça a l’air de lui plaire. Je nous emmène un peu plus loin, un endroit où peu de personnes pourraient nous rejoindre. C’est parfait. J’ai un verre à la main et je continue de l’écouter attentivement. Mon cerveau scanne les informations pour que je puisse récupérer celles qui m’intéressent vraiment. Mais je dois rester discrète, au cas où il cache un cerveau quelque part. Je lui pose des questions sur lui, je m’extasie à chacune des réponses même si plus on avance plus j’ai l’impression que c’est un mec lambda et que j’ai fait un mauvais choix. Journaliste pour ABC, et il ne m’a même pas reconnu. Ses patrons devraient le virer pour ça. Mais je me tais, je ne lui donnerai pas mon nom de famille facilement, surtout maintenant que je sais qu’il est journaliste. Je vais me méfier d’ailleurs, tout ça n’est peut-être qu’un stratagème pour avoir des informations sur moi ou mes parents. “Oh impressionnant !” Pas du tout, j’ai déjà croisé bien mieux et je regrette presque de l’avoir emmené lui jusqu’ici. Logan sans nom de famille donc, et je serre un peu les dents. Il est donc seulement journaliste et j’ai envie de lever les yeux au ciel et de lui laisser ma coupe de champagne pour aller en voir un autre. Mais il a du potentiel, je ne sais pas pourquoi mais j’ai envie de continuer cette conversation, en jouant mon rôle à la perfection. Comme toujours. “C’est beau Logan.” Je souris en hochant la tête.
Je parle beaucoup sans donner une seule vraie information sur moi. Il n’aura rien venant de moi tant que je n’aurais pas une bonne raison de m’intéresser à ce type. Je fais comme si je ne comprenais rien à rien, et il sourit donc ça doit probablement marcher même si quelque chose sonne faux sur son visage. “Oui alors j’écoute et je parle pas trop.” Ca c’est vrai, parce que je ne vois pas l’utilité de rendre moins con ceux qui discutent en leur donnant de vraies informations pour qu’ils puissent s’en servir. “Non je suis pas là pour le travail.” Et c’est tout, tu n’auras rien chéri. Je continue de sourire, il va devoir passer à autre chose parce que je pourrais rester muette s’il continue avec ce genre de questions. Il y a des cadres et là ça commence à m’intéresser, mais les cadres du journal pourraient me reconnaître. “Ca doit être mieux qu’une soirée en entreprise c’est sûr.” Les galas attirent toujours ceux qui ont de l’ambition, et il en a peut-être le garçon. “C’est le première fois que tu fais ce genre de soirée ?” Mon sourire se veut rassurant et j’espère que ce n’est pas sa première soirée. Je souris en replaçant mes cheveux quand il me flatte, il n’a pas l’air de savoir que ce genre de technique est beaucoup trop utilisée et que j’aurais très bien pu lever les yeux en soupirant. “Je suis sûrement une femme pas comme les autres.” C’est la stricte vérité, il ne trouvera jamais mieux que moi. “Vous êtes de Brisbane ?”
“Oh impressionnant !” Jamais personne ne s’est extasié de cette manière-là à l’annonce de son métier, et Clyde a donc bien du mal à croire que le sourire de la jeune femme soit vraiment honnête. S’il avait encore un doute sur les intentions de la demoiselle, elles viennent de s’éclaircir subitement alors que cette dernière le complimente bien trop pour penser tout ce qu’elle dit, et pour que ses yeux pétillent d’une réelle lueur d’admiration. Pourtant, il ne sait pas bien si elle cherche l’argent ou le pouvoir, les deux motivations principales chez ce genre de femmes qui n’approchent que les hommes en vue d’en obtenir quelque chose. A moins que ce ne soit que physique, mais la blonde ne correspond pas à cette description, elle est bien trop avide d’informations sur lui pour ne vouloir que son corps. “C’est beau Logan.” Visiblement, l’appréciation n’a pas de limites - est-ce que certains hommes se font vraiment avoir ? Ceux avides de validation, de reconnaissance, peut-être. “Je vous retourne le compliment.” Il est de bon goût de lui montrer que son sourire charmeur est apprécié, et Clyde le lui rend en ne manquant pas de rentrer dans son jeu de séduction qui ne dupe en réalité personne.
La jeune femme se présente presque comme une imbécile venue à cette soirée pour servir de pot de fleur et de faire-valoir - alors qu’en réalité, Clyde devine une certaine ambition personnelle derrière ses airs de godiche. “Oui alors j’écoute et je parle pas trop.” Pour une femme qui parle peu, elle s’est pourtant montrée particulièrement bavarde en l’abordant alors qu’ils ne se sont jamais ne serait-ce que croisés auparavant. “Non je suis pas là pour le travail.” Et c’est ce manque d’informations qui agace Clyde - il veut bien se livrer, ou du moins lui fournir une semi-vérité, mais il en attend autant de son interlocutrice. Si elle veut jouer l’idiote, elle ne devrait pas se montrer si secrète, cela la dessert et la fait passer pour quelqu’un qui a véritablement quelque chose à cacher. “Vous accompagnez quelqu'un ?” Et le brun reprend une gorgée de champagne, un sourire énigmatique sur les lèvres, tandis qu’il lui offre un regard curieux. Elle a tout le loisir de se défiler et de ne pas lui répondre, ou même de lui mentir, mais elle ne fera que se trahir un peu plus si elle évite une par une ses questions. “Ça doit être mieux qu’une soirée en entreprise c’est sûr.” Clyde hoche la tête en signe d’assentiment tandis qu’il balaye une nouvelle fois son regard sur la salle - il n’y repère personne d’autre avec qui il souhaite s’entretenir ce soir, alors la jeune femme fera l’affaire pour l’instant. Après tout, peut-être est-elle même intéressante sous ses airs d’ingénue - du moins, il retrouve un peu de lui en elle, dans son jeu de dupe, et la pensée suffit à l’amuser.
“C’est la première fois que vous faites ce genre de soirée ?” Sous-entendu, où te places-tu réellement sur l’échelle sociale, Logan ? “Pas vraiment. J’en ai même sûrement trop fait pour les apprécier encore, pour être honnête.” Il ne ment pas, le brun, car ce genre de soirée est typiquement le genre d’endroit dans lequel il aime se fondre, fouiner, sourire et prétendre, le genre d’endroit idéal pour dénicher les informations qu’il lui manque parfois pour cibler sa prochaine ‘victime’. Cependant, même si elles lui sont nécessaires, ces soirées où les apparences et les jeux de pouvoir régissent les relations sociales lui donnent parfois la gerbe, sous son sourire de façade - mais ça l’arrange bien, tous ces mensonges, c’est son gagne pain. “Je suis sûrement une femme pas comme les autres.” Sûrement pas, en effet, Ivy. Clyde acquiesce d’un sourire amusé, car malgré ses airs innocents, la jeune femme semble savoir ce qu’elle veut et ne manque pas de répartie, ce qu’il apprécie particulièrement. “Vous êtes de Brisbane ?” “Non, je ne suis ici que depuis quelques mois. D’où la promotion.” Il lui lâche un clin d’œil. “Mais je compte bien y rester, les perspectives professionnelles sont bien plus intéressantes qu’à Perth.” Et voilà, elle sera presque ravie d’avoir obtenu une information de plus sur lui, alors qu’en réalité, les perspectives qu’il mentionne sont loin d’être celles qu’elle imagine. “Et vous ? Vous connaissez déjà tout le monde ici ?”
Logan donc, sans nom de famille lui non plus et je pourrais grogner ou grincer des dents si je ne n’étais pas obligée de garder ce rôle de pinbêche idiote. Je commence à me méfier de ce type, il est en train d’user des même techniques que moi. Est ce qu’il est plus intelligent qu’il en a l’air ? Je ne fronce pas les sourcils, je ne laisse pas mes questionnements transparaître sur mon visage, j’attends juste qu’il fasse une erreur, qu’il se trahisse. Un sourire niais quand il me dit que mon prénom est beau, sérieusement ? Il a pas mieux comme compliment. Il commence vraiment à m’épuiser. Mais il se cache, et j’ai l’impression qu’il ment. J’ai une bonne intuition en général, alors je me fais confiance, et je continue de chercher à le connaître.
Il veut des détails et je ne peux pas lui en vouloir. Je sais que je vais devoir donner quelques informations pour qu’il ne se méfie pas de moi. Je n’ai pas envie qu’il sache vraiment pourquoi je cherche à me rapprocher de lui. Je ne cherche pas longtemps la bonne réponse à cette question, j’ai beaucoup de réponse toute prête dans ma tête quand on me pose ce genre de questions. Je regarde tout autour de nous et je soupire. “J’aurais dû venir avec un… ami.” Je baisse un peu les yeux. “Mais il ne m’a pas rejoint donc je suis toute seule ici.” Je suis surtout là pour rencontrer des gens haut placés dans le coin. Et je ne sais pas si Logan est important, il ne lâche pas d’informations qui m’intéressent et ça me frustre. “Vous aussi vous êtes seul ?” Ou est ce qu’il a une femme qui l’attend quelque part. Une femme ou un homme d’ailleurs.
Les questions s’enchainent, et je reste vague dans les réponses en gardant ce sourire qui fait toujours mouche. Il ne fera pas exception le jeune homme, sauf si lui aussi fait partie des bons manipulateurs sur cette planète. “Comme je vous comprends.” Je hoche la tête même si je ne le comprends pas du tout. Jamais je ne pourrais me lasser de faire ce genre de soirées. Elles rythment ma vie depuis que je suis capable de marcher. On échange les questions, et j’essaie d’assembler les pièces du puzzle. “Perth ? Effectivement vous serez mieux à Brisbane.” Ce n’est pas le plus grande ville d’Australie mais c’est déjà mieux. “Non c’est pareil pour moi, je suis arrivée il n’y a que quelques semaines.” C’est la vérité cette fois-ci. Il en faut bien un peu au milieu de tous les mensonges.
En toute objectivité, la jeune femme est plutôt mignonne, mais elle affiche un air trop crédule pour être plausible aux yeux de Clyde. Plus les questions s'enchaînent et plus il la trouve particulièrement curieuse - et clairement intéressée, car si elle le complimente, elle ne semble pourtant pas tendre vers l’option de le ramener chez elle ce soir. Ce n’est apparemment pas ce qu’elle cherche, et pourtant, ses grands yeux emplis d’expectative laissent à penser qu’elle espérer obtenir quelque chose de lui - reste à savoir quoi, même si Clyde se complaît au moins à dévier ses questions tout autant qu’elle contourne les siennes. Même le soupir de la blonde sonne faux, et pourtant, Clyde veut bien croire qu’il en dupe plus d’un, car lui-même ne saisit pas réellement ce que cache la jeune femme sous cette façade construite de toutes pièces. “J’aurais dû venir avec un… ami. Mais il ne m’a pas rejoint donc je suis toute seule ici.” Visiblement, elle s’est plutôt rapidement remise de la déconvenue de cet ami au point d’aller aborder des inconnus - ce qui semble plutôt paradoxal à en juger par l’air déçu qu’elle affiche.
“Je n’aime pas les déconvenues de dernier moment non plus.” “Vous aussi vous êtes seul ?” “Oui et non, j'accompagne des collègues.”
Si elle espérait lui tirer les verres du nez quant à l’existence d’une potentielle Mrs Logan, elle ne peut que se mordre les doigts de tourner autour de ses questions, car Clyde prend un malin plaisir à faire de même. De plus, ce n’est pas réellement un mensonge, et il lui décoche tout de même un sourire suffisamment charmeur pour qu’elle n’abandonne pas tout de suite les potentielles arrières-pensées qu’elle a peut-être quant à lui. Cependant, et malgré le fait qu’elle entretienne la conversation, le brun comprend vite qu’elle n’est pas réellement intéressée par lui, à en juger par son intérêt qui s’affaiblit nettement dès lors que les sujets ne sont plus aussi croustillants. “Comme je vous comprends.” Réponse toute faite qu’il a servi tant de fois lui-même, et qu’il est à la fois agacé, surpris et amusé de recevoir à son tour. “Perth ? Effectivement vous serez mieux à Brisbane.” Visiblement, la demoiselle est donc de Brisbane, ce qui vaudrait le coup de creuser davantage sur elle, alors. “Non c’est pareil pour moi, je suis arrivée il n’y a que quelques semaines.” Ou peut-être pas, finalement, si elle est toute aussi nouvelle que lui à cette ville. “C’est dommage, je ne pourrais pas vous demander trop de conseils sur les lieux à connaître absolument, alors.” Ivy peut bien interpréter ce sous-entendu de la manière qu’elle veut, et c’est justement ce que recherche Clyde, laisser la porte entrouverte tant qu’il n’en sait pas davantage sur la blonde - après tout, les personnes les plus intéressantes se cachent parfois derrière les apparences les plus trompeuses. Puis, sur le point d'enchaîner et d’enfoncer le clou un peu plus loin pour laisser planer l’idée que le petit jeu de charme de la blonde fonctionne sur lui, son regard est attrapé au passage par un de ses collègues qui lui fait signe de le rejoindre. Pour mystérieuse qu’Ivy puisse être, l’objectif premier de Clyde en venant à cette soirée est de se rapprocher de ses collègues, alors il ne peut décemment ignorer l’appel d’un d’eux. Il offre donc un regard désolé à Ivy, accompagné d’un sourire contrit. “Je suis navré, un de mes collègues m’appelle. C’était un plaisir de vous rencontrer, Ivy.” Etait-ce réellement un plaisir, et ce dernier était-il partagé ? Difficile à dire. “J’espère vous recroiser à une prochaine soirée, peut-être.” D’ici là, il ne manquerait pas de se renseigner un minimum sur la demoiselle.
J’observe avec insistance le visage de ce mec que je ne connaissais pas encore il y a quelques minutes. Il est beau, et je ne l’ai jamais vu j’en suis certaine. Ca m’étonne. Même s’il ne vient pas de Brisbane j’aurais dû le rencontrer ailleurs s’il était vraiment quelqu’un d’ambitieux. Je penche la tête mais garde un sourire naïf ancré sur mes lèvres carmins. “J’essaie de m’occuper autrement.” Je hausse les épaules. Je ne devais être accompagné de personne mais certains mecs pensent qu’une femme ne peut pas être seule pendant ce genre d’évènements. Il y en a qui sont réellement bloqués à l’âge de pierre, et c’est ceux là que je préfère manipuler et arnaquer. “Et vous passez une bonne soirée ?” Une soirée avec des collègues, ça n’annonce rien de palpitant. Je soupire et finis mon verre. Ces coupes de champagne sont bien trop petites. Il ne dit rien qui puisse vraiment m’intéresser et je ne lui donne aucune information sur moi non plus. J’ai l’impression qu’on tourne en rond, et qu’il en cache bien plus que ce qu’il ne veut bien laisser paraître.
Je donne les informations avec parcimonie. Il ne sait rien de très important sur mieux et je m’en porte mieux. Je ne sais pas qui il est, et je ne donne que rarement mon nom de famille aux mecs qui ne me reconnaissent pas. Je suis toujours aussi étonnée qu’il ne m’ait pas encore reconnu alors qu’il est journaliste. J’en serais presque frustrée. “Vous avez pas encore visité la ville donc ?” Je fronce les sourcils, il doit être ici depuis seulement quelques jours s’il n’a rien vu. “Je commence à bien connaitre les bars et les boîtes de cette ville.” C’est bien la seule chose que je pourrais lui montrer si jamais on en venait à se revoir, ce qui n’est pas encore sûr. Il s’échappe et je reste sur ma faim. Il doit aller voir un collègue et j’ai vraiment l’impression que c’est un homme qui cache beaucoup de choses. Un homme un peu comme moi et ça m’intrigue. “Déjà ?” Je sais qu’il va partir et je fais la moue alors que je cherche déjà quelle sera l’autre victime de ma soirée. J’ai un papier, et je vole un stylo sur un des serveur qui passe par là pour noter mon numéro. “Si vous avez envie de visiter les bars un de ces soirs appelez moi !” Je sens qu’il a du potentiel le jeune homme, et que je pourrais en apprendre un peu plus sur ses activités. Mais s’il ne me rappelle pas, j’en trouverai un autre, peut-être un peu moins intéressant.