Tu sais pas trop pourquoi c'est à Jet que tu as écris. Probablement parce qu'il est le seul à vraiment comprendre ce que tu es en train de traverser. Probablement parce qu'il est le seul présent à Brisbane à connaître les fautes de Saül, celui à qui tu peux vider ta rage sans faire attention aux mots que tu choisis. Tu peux tout dire. Il sait tout. Absolument tout. C'est ce dont tu as besoin ce soir. Même si, en vérité, tu avais simplement besoin de briser la solitude qui devient de plus en plus lourde. Ce soir, tu ne voulais juste pas être seul. Saül, il s'est barré pour tu ne sais combien de temps. À lire la colère dans ses yeux, ce ne sera pas avant quelques jours au moins. Alors, ouais, tu avais agrippée ton portable, qui avait un peu trop naturellement choisis le contacte de Jet, qui lui, t'avait refilé son adresse trop facilement. Sans poser de question. Voilà pourquoi tu es en route pour Redcliffe.

Tu es presque surprise quand tu arrives dans le logement. Ça va. C'est pas trop dégueu. C'est... convenable. C'est loin d'être la luxure dans laquelle tu as l'habitude de plongée, mais c'est la normalité du commun des mortels. Ça va. Tu t'attendais à pire. Comme quoi tu l'avais jugé un peu trop rapidement encore une fois. En moins de deux, tu te retrouves devant sa porte. À la seconde où tu toques à la porte, l'angoisse te rattrape. Qu'est-ce que tu fous là Elise ? Il en a rien à faire de tes problèmes de couple. Mais tu ne peux plus rebrousser chemin. T'es déjà devant sa porte et il a déjà ouvert. Tu restes planté là quelques secondes montant ton regard dans le sien. « Je me suis engueulé avec Saül » que tu balances directement comme raison de ta venue. Une belle et charmante engueulade, mais pas pour les raisons qu'il doit penser. Cette fois-ci, c'était toi la fautive. Et il en a profité Saül pour tout mettre sur ton dos et s'enlever tout le blâme. Tu l'as laissé faire comme une idiote. Tu as l'air tout aussi idiote planté là sur le pas de la porte de Jet.

@jeremiah etish

J’étais vraiment seul dans mon nouveau chez moi ce soir. Nouvel appartement auquel j’essaie de m’habituer petit à petit. Je ne le garderai peut-être pas longtemps, je n’en sais rien. Je n’aime pas rentrer dans une routine, être trop habitué à quelque chose. Alors pour le moment je profite de cet appartement qui était déjà meublé, dans lequel j’ai juste emmené quelques vêtements dans mes bagages. Je n’ai pas beaucoup de choses, même si maintenant il y a un costume qui prend à mon goût beaucoup trop de place dans ma valise. J’ai pas encore tout vider, je vais sûrement partir en tournée dans quelques temps. Ca me changera les idées, je n’ai pas vraiment envie de rester à Brisbane ces derniers temps.

Elise m’a envoyé un message, et je n’ai pas caché ma surprise. J’hésitais à sortir, aller vendre quelques sachets dans un bar en bas de chez moi pour m’occuper tant que je n’arrive pas à dormir. Elle a demandé mon adresse, et je lui ai donné. Il y a combien de chances pour qu’elle débarque vraiment ? Peut-être 1/1000. Alors je jette mon téléphone de l’autre côté du lit et continue de bosser sur mes chansons et mes accords. Le temps passe rapidement et je relève la tête au moment où quelqu’un toque à ma porte. Vraiment ? Est ce qu’elle a vraiment fait le déplacement ? Elle doit vraiment aller mal, ou avoir quelque chose d’important à me dire.

J’ouvre, et c’est vraiment elle. Etonnant. Je tiens la porte en attendant qu’elle s’explique. Elle s’est engueulée avec Saül. Je hoche simplement la tête et m’écarte pour la laisser entrer. Je ne l’ai pas faite venir jusqu’ici pour la laisser à la porte. “A cause de lui de toi ou de l’autre conne ?” Ca fait un bout de temps que j’ai refusé de prononcer son prénom à voix haute, c’est encore lui accorder bien trop d’importance et d’attention qu’elle ne mérite pas. “Tu veux crier ? Frapper sur un truc ? T’asseoir et pleurer dans un coin ?” J’espère qu’elle ne va pas choisir la dernière option parce que si elle choisit ça elle ira dans un coin du couloir pour se plaindre.

« A cause de lui de toi ou de l’autre conne ? » À cause de toi cette fois. Même si tout le reste n'avait pas particulièrement aider à avoir une discussion convenable. « Qu'est ce que ça change ? » que tu lui demandes en entrant chez lui après qu'il se soit poussé pour te laisser passer. Tu observes doucement les lieux. C'est chaotique. Rien de surprenant. Il faut quand même dire que ça t'en prend peu pour trouver un endroit chaotique. Toi qui est un peu trop ordonné. C'est quand même un chaos qui te rappelle celui de Jack. Et ton petit coeur, il se serre un peu. Tu as été tellement stupide de croire que tu ne te ferais pas prendre au même jeu. Stupide et imprudente, d'avoir pris pour acquis les absences de Saül. Cette maison est encore la sienne. Il a encore droit d'aller et venir quand ça lui chante. Ce serait important que tu t'en rappelle, même si, ces absences risques de quadruplé avec la dernière discussion.

« Tu veux crier ? Frapper sur un truc ? T’asseoir et pleurer dans un coin ? » « Je sais pas. » Tu ne sais pas. Tu ne sais rien. Tu ne sais même pas pourquoi t'es chez lui. Tu ressens tout et rien à la fois. C'est mort et ça brûle en même temps à l'intérieur de toi. C'est le bordel dans ta tête. Tu ne gères plus rien depuis ton retour d'Afrique et ça ne fait qu'empirer de semaines en semaines. Et être ici, chez Jet, c'est probablement la pire idée que tu as bien pu avoir. « Tu t'en vas ? » C'est qu'il pourrait presque y lire la détresse dans ton regard. Presque. Tu les a remarqué les valises à moitié pleine ou à moitié vidé. Ça porte en confusion pour tout dire. Il s'en va ou il revient ? Il s'en va. C'est ton intuition qui te le dit. Tout le monde s'en va et tu vas te retrouver toute seule. Encore. Ce serait probablement le temps de faire le ménage dans ta vie. Parce que là, tu ne fais que te faire du mal, autant a toi qu'à lui.

 Je sais pas pourquoi elle débarque chez moi et j’ai pas envie de lui demander. Elle doit avoir ses raisons et je sais pas vraiment si je m’y intéresse. Elle me dérange pendant mon boulot par contre, elle a de la chance que j’ai ouvert la porte. J’aurais toujours pu lui donner l’adresse sans la laisser entrer mais elle a vraiment l’air désespérée Elise, et… triste ? Etonnant de la voir dans cet état là la brune. Et elle me dit qu’elle s’est engueulée avec Saül. Et depuis quand ça la rend triste ce genre de choses ? “Donc tu squattes chez moi et tu me raconte même pas ?” Je passe dans la cuisine. “Si tu veux un truc la cuisine est là ?” Je ne sais même pas ce que j’ai dans mon placard mais autant proposer. Peut-être qu’elle aura un simple verre d’eau après avoir vérifié. Je me demande ce qu’elle a et je range (je déplace le bordel) de mes notes et de mes partitions sur la table du salon. J’ai du mal à écrire ces derniers temps mais j’essaie de me forcer. C’est devenu mon nouveau vrai travail après tout. 


Je lui propose des activités et elle ne sait toujours pas. On dirait une enfant de 5 ans à qui on a volé son goûter. “Bah assieds toi déjà, ou fais quelque chose, t’es flippante à rester debout comme ça sans rien faire.” Je la regarde, on pourrait presque croire que j’ai à faire à un zombie. Elle est un peu bizarre et je ne comprends pas pourquoi elle semble aussi bouleversée par cette engueulade en particulier. “C’est toi c’est ça ? C’est toi qui as fait la connerie cette fois ?” Je croise son regard et je ne le lâche pas tant que ce n’est pas elle qui le détourne cette fois. Malheureusement pour elle, je commence à la connaître. Je fronce les sourcils, elle est vraiment trop bizarre aujourd’hui. Elle a peur que je m’en aille ? C’est la première à me virer ou à se barrer quand on passe des moments ensemble. “Qu’est ce que ça peut te faire ?” Je regarde mon sac que je n’ai pas fini de vider, ou de remplir selon les points de vue. “J’en sais rien, je prévois rarement quand je pars en général.” Je le faisais avant ça, quand je n’avais pas des tournées à travers l’Australie. “Tu veux que je t’envoie l’adresse de ma prochaine destination pour que tu me rejoigne ?” Je tente l’humour, elle a l’air d’en avoir besoin là. 



 

« Donc tu squattes chez moi et tu me raconte même pas ? » Le silence parle de lui même. Non. Tu lui racontes pas. Et puis, squatter, c'est un bien grand mot. Tu es juste de passage. Ouais c'est ça. Qui est-ce que tu essaies de convaincre Elise ? Lui ou toi ? « Si tu veux un truc la cuisine est là » Wow. Quel accueil. Pourquoi ça t'étonne de toute façon ? Tu regardes quelques instants le bordel de la cuisine. Pas certaine que tu aies vraiment envie de t'aventurer là dedans. « Bah assieds toi déjà, ou fais quelque chose, t’es flippante à rester debout comme ça sans rien faire. » Tu es flippante. Ah bon. Tu t'exécutes tout de même, prenant place sur le canapé du salon. « C’est toi c’est ça ? C’est toi qui as fait la connerie cette fois ? » Et mince. Déjà démasqué. « J'appellerai pas ça une connerie. C'est pas comme si notre mariage tenait encore debout. » C'était pas une connerie. Votre mariage est déjà irrécupérable. Les mots durent ne sont toujours pas prononcé, mais, oui, on peut dire que vous n'êtes plus vraiment un couple. Vous faites juste semblant de pas comprendre que c'est finit.

Tu les remarques les valises qui semblent annoncer un départ. Il s'en va Jet ? Il part quand ? Pour combien de temps ? « Qu’est ce que ça peut te faire ? » Ton regard qui retrouve le sien, alors qu'un rire nerveux menace de s'échapper de tes lèvres. C'est qui ? Ariane ? Qu'est-ce que ça peut te faire ? « Rien. » C'est ce que tout le monde veut entendre de toute façon. Que ça te fait rien d'être cocu, que ça te fait rien qu'il s'en aille Jet. « J’en sais rien, je prévois rarement quand je pars en général. Tu veux que je t’envoie l’adresse de ma prochaine destination pour que tu me rejoigne ? » Non sûrement pas. Tu pourrais pas partir avec lui, même si tu sais parfaitement que l'invitation n'a rien de sérieux. Mais si elle le serait, vous seriez incapable de vous supportez. Tu aurais sûrement péter les plombs au bout de quelques heures. C'est bizarre ce qu'il y a entre vous deux, tu ne saurais pas mettre de mot dessus. C'est bien et ce ne l'est pas à la fois. « Tu le voudrais pas vraiment. » Comme s'il était le seul à pas vraiment le vouloir.

« Sur quoi tu travailles ? » que tu lui demandes ensuite en observant le véritable fouillis que forme des partitions ici et là, des notes écrites un peu partout. Une nouvelle chanson probablement, ou une vieille qu'il retravaille peut-être. Tu n'y connais que dalle là dedans de toute façon. Tu as juste envie de parler d'autre chose que de ta vie chaotique pour une fois.

Elle parle peu, je parle beaucoup. Ca c'est étonnant aussi, toute cette situation est étrange. Jamais je n'aurais cru avoir Elise dans mon salon. Je la regarde réagir, elle observe mon appartement qui doit être sacrément en bordel à ses yeux. Elle a l'air dégoûté par ma cuisine, tant pis pour elle. Je ne vais pas non plus me mettre en 4 pour son plaisir alors qu'elle ne veut même pas me dire ce qu'il s'est passé. Pourquoi elle est venue là ? Pour rester debout et regarder mes partitions ? Je fronce les sourcils, je la surveille. Elle est chez moi et je ne veux pas qu'elle fasse n'importe quoi ou qu'elle touche à tout. "C'est quoi ta connerie qui n'en est pas une ?"  je regarde encore vers elle. Elle a l'air de se méfier et je soupire, elle est fatigante. "C'est pas comme si j'allais te juger ou t'engueuler alors arrête de te méfier." l'hôpital qui se fout de la charité, je me méfie encore d'elle aussi. 


Elle me demande si je m'en vais. Pourquoi ça l'intéresse ? Pourquoi je lui proposerai presque de partir elle aussi ? Elle n'accepterait pas, donc je le propose sur le ton de l'humour. Je ne sais même pas si elle m'apprécie ou si elle m'utilise juste quand elle n'a personne d'autre à aller voir. C'est certainement la deuxième option la plus plausible. Je vais vers le frigo et je sors deux bières sans savoir si elle en boit. Si elle en boit pas je boirai les deux. "T'es pas dans ma tête tu peux pas le savoir." elle m'énerve à croire qu'elle est capable de savoir tout ce qu'il se passe dans ma tête juste parce qu'on s'est vu 2 ou 3 fois. "T'accepterais pas." ca par contre j'en suis certain. 


Elle me demande sur quoi je travaille. Je fronce les sourcils de nouveau, j'ai beaucoup de feuilles autour de moi et je ne bosse sur rien en particulier. "J'essaie d'écrire mais on peut pas dire que ce soit concluant" et ça aussi ca m'énerve pas mal.   "Je joue un peu, je cherche des mélodies au piano ou au violon." j'ai laissé tomber la guitare parce que je n'arrive à rien jouer maintenant. J'ai posé les partitions entre nous sur le canapé, c'est pas comme si j'avais réussi à écrire quelque chose ce soir de toute façon. 

 

« C'est quoi ta connerie qui n'en est pas une ? C'est pas comme si j'allais te juger ou t'engueuler alors arrête de te méfier. » Pourquoi est-ce qu'il te jugerait pas toi ? Il le juge bien ton mari. Il juge ses fautes qui sont désormais les miennes que les tiennes. Pourquoi tu en serais épargné ? Parce que tu t'es pas tapé sa Ariane ? C'est juste ça le problème pour lui ? Que ce soit elle ? Probablement. Qu'est-ce que ça peut bien lui faire que ton mari t'ai trompé si on soustrait Ariane de l'équation ? « J'ai couché avec son meilleur ami. » Les mots que tu détaches un à un comme si ça minimisait l'impact de ceux-ci, comme si ça rendait la chose insignifiante. Les mots que tu dis à voix haute pour la première fois. Son meilleur ami. C'est toi la pire des deux sans aucune doute. T'es trop stupide.

« T'es pas dans ma tête tu peux pas le savoir. » Pas besoin de l'être. Tu en es convaincu. Tu comprends toujours pas pourquoi il ne t'a pas barrer de sa vie. Il doit se dire la même chose de toi, alors que rien ne devrait lié deux personnes comme lui et toi. Rien du tout. Vous devriez être deux étrangers, sans plus. Pourquoi est-ce que vous êtes tous les deux dans son salon ? Pourquoi est-ce qu'il vient de poser deux bières sur la table du salon ? « T'accepterais pas. » Non. Probablement pas. Sans savoir pourquoi tu n'accepterais pas ou même pourquoi tu refuserais. « Pourquoi je devrais accepter ? » que tu lui demandes, l'air de plutôt lui demander de te convaincre de le faire. Pourquoi je devrais partir avec toi, Jet ?

« J'essaie d'écrire mais on peut pas dire que ce soit concluant. Je joue un peu, je cherche des mélodies au piano ou au violon » Ton regard passe du sien pour retrouver les partitions éparpillés entre vous deux. Tu ramènes tes jambes en tailleur avant de piger dedans le tas de feuilles. Il y a longtemps que tu n'as pas vu ça une partition de musique, les notes qui défilent sur les feuilles sans que tu te souviennes vraiment de ce qu'elle signifie. Ça te reviendrai sûrement rapidement. « Tu joues du piano et du violon ? » Ça te surprend. Ça lui colle pas à la peau. Tu piges alors une deuxième feuille, la regarde plus attentivement. Tu lis les paroles. Et merde. Tu la reposes aussitôt. Pas besoin de savoir pour qui il l'a écrit celle-là. Tu le sais déjà. « Je croyais que les fortes émotions aidaient à l'écriture. » La rage. L'amour et ses peines aussi. Surtout. Il n'est pas en plein dedans lui ? Trop fier pour l'admettre probablement.

L’erreur de débutant. Elle a couché avec le meilleur ami. Je soupire un peu, sourire en coin au bord des lèvres et je tourne les yeux vers elle. “T’as craqué toi aussi donc.” Je lève les yeux au ciel. Est ce que c’est vraiment le type de fille qui a besoin de quelqu’un, d’un mec en particulier, pour se sentir exister ? Moi qui pensais qu’elle pouvait être une femme indépendante, gérante de sa vie. Je l’ai peut-être surestimé la Williams. “Pourquoi tu t’es faite choper ?” C’est certainement une débutante alors elle a dû faire une connerie comme le ramener chez elle, ou le faire venir sans se souvenir que son mari devait rentrer. Être infidèle c’est toute une organisation, et je sais de quoi je parle.

Pourquoi, et comment on en arrive à parler d’un hypothétique voyage que ni elle ni moi devrait accepter ? Je ne sais pas, ce n’est peut-être pas vraiment une bonne idée qu’elle soit assise sur mon canapé et que je la laisse s’installer au milieu de mes partitions. Au milieu de mon intimité à moi sans rien lui demander en retour. Elle n’accepterait pas, je ne devrais pas avoir l’idée de proposer, donc pourquoi on continue d’en parler ? Pourquoi je cherche les raisons pour lesquelles elle devrait me suivre ? Parce que c’est un jeu, et que c’est impossible qu’elle me suive. “Parce que t’as sûrement envie de bouger de Brisbane.” Parce qu’on vit plus ou moins la même chose, et je sais que je pourrais partir n’importe quand pour m’éloigner de tous les souvenirs. “C’est pas si long que ça et c’est qu’à quelques heures d’avion tu pourrais rentrer n’importe quand.” Moi aussi je pourrais revenir quand je le veux. “Y’a un gala pendant lequel je vais être obligé de porter ton costume.” Là je grogne parce que j’en ai vraiment pas envie. “Et y’a toute une équipe à diriger pendant quelques jours, et je déteste prendre les rênes pour ça.” Ca lui changerait les idées non ? De jouer au petit tyran pendant quelques jours. Mais ce ne sont que des suppositions, elle n’acceptera pas de toute façon.

On parle musique aussi, et les deux sujets sont plutôt proches. Encore des clichés, elle est étonnée que je joue autre chose que de la guitare. “J’en joue certainement mieux que de la guitare.” Parce que j’en joue depuis bien plus longtemps. “Mais je les utilise pas en concert.” Parce que c’est plus difficile à transporter et à gérer sur une scène pour chanter en même temps. “J’ai un synthé là-bas, et mon violon dans ma chambre.” Est ce qu’elle sait jouer ? Elle tombe sur une partition, et je soupire fort. Je la déteste cette musique, mais je continue de la chanter pour que tout le monde la connaisse. Je veux qu’elle hante Ariane cette chanson, pendant un long moment. “Ouais c’est certainement parce que je ressens rien que j’écris pas alors.” Ce n’est qu’un demi mensonge. Parce que j’ai vraiment l’impression de ne plus rien ressentir. Donc, soit j’ai définitivement enterré mon coeur, soit je souffre tellement que je ne le sens même plus. On s’habitue à la douleur non ?

« T’as craqué toi aussi donc. » Il lève les yeux au ciel. Il juge. Tu savais bien que tu n'y échapperais pas. « Tu juges. » Tu le mérites probablement. Ou pas. Après tout, il s'attendait à quoi Saül ? Que tu allais gentiment attendre qu'il en ait marre de sa copine ? Non. S'il ne veut plus rien te devoir, ça marche dans les deux sens. « Pourquoi tu t’es faite choper ? » Oh vraiment ? Tu dois vraiment expliquer à quel point tu as été imprudente ? « J'ai ramené un tee-shirt. Il l'a trouvé. » C'était stupide de le faire. C'était stupide de te laisser le faire. Ce devait juste être un petit souvenir, parce qu'il partait longtemps, parce qu'il allait te manquer. Un beau souvenir empoisonné, oui

« Parce que t’as sûrement envie de bouger de Brisbane. C’est pas si long que ça et c’est qu’à quelques heures d’avion tu pourrais rentrer n’importe quand » Vous êtes vraiment en train d'avoir cette discussion ? On dirait bien oui. Ça suffit tout de même à ce qu'un sourire s'installe sur tes lèvres. Ce sera au moins ça de gagné. « Y’a un gala pendant lequel je vais être obligé de porter ton costume. » « Tu commences à m'intéresser. » Parce qu'il sait pas faire les noeuds. Pas vrai ? C'est juste pour ça. Pour rien d'autre. Bien sûr. Ce serait si dommage de gâcher un costume si parfait avec un noeud raté. « Et y’a toute une équipe à diriger pendant quelques jours, et je déteste prendre les rênes pour ça. » « T'as déjà Sebastian pour ça. » C'est pas à lui de s'occuper de la partie gestion ? Et sa présence suffit a t'enlever le goût d'y aller. Parce qu'il est trop bizarre et, surtout, parce qu'il connaît trop bien Saül. « C'est pas un bon moment pour moi. Pour m'en aller. » C'est pas une défaite. C'est la vérité. Tu as trop de choses a régler ici. Tu ne peux plus fuir.

« J’en joue certainement mieux que de la guitare. Mais je les utilise pas en concert. J’ai un synthé là-bas, et mon violon dans ma chambre. » « Où est-ce que t'as appris ? » Parce qu'il a sûrement pas appris dans ses écoles de musique de riches. Il n'a sûrement pas eu de cours privés. Il n'a pas eu le côté chiant de ce qui devrait être un passe-temps, une passion même pour certain. Tu es curieuse de savoir ce qui la conduit là. Tiens, il te rend curieuse maintenant ? « Ouais c’est certainement parce que je ressens rien que j’écris pas alors. » Tu sais pas trop si tu l'envie de rien ressentir. Toi, ça te rend cinglé de ressentir ce que t'as jamais ressenti. Tu gère pas, mais au moins tu les vis, tes émotions. Ça va finir par le rattraper Jet. « Dommage. Tu craches sur un beau paquet de fric. » Tu n'en crois pas un mot de toute façon. C'est lui qu'il essaie de convaincre et non l'inverse.

Une seule tromperie, et elle a commis toutes les erreurs à la con. “Ca devrait pas t’étonner.” Je juge parce qu’elle n’a pas réfléchi une seconde. C’est quoi ? La crise de la quarantaine ? Le souvenir d’un premier amour et un tee-shirt qu’elle ramène parce que son amant va trop lui manquer ? Pourquoi mélanger tromperie et sentiment, où est le plaisir ? Je tourne mon regard vers elle, regard qui veut tout dire. Quelle conne. “Je suis obligé de juger là !” Elle ne me laisse pas le choix la débutante. Je lève les yeux au ciel mais je ne relance pas le sujet. Elle est bête, elle s’est mise au même niveau que lui, alors qu’elle aurait pu tout avoir si elle avait su garder ses sentiments pour elle un peu plus longtemps.

On parle voyage, et je commence à avoir envie de pousser le jeu un peu plus loin. Moi je peux partir, elle, elle va avoir peur et elle reculera au dernier moment même si elle acceptait là. J’en suis persuadé, elle n’est pas assez courageuse pour faire ce genre de choses. “Oh vraiment ?” Je n’y crois pas une seule seconde. Elle ne peut pas être intéressée par ce genre de voyage, et pourtant je cherche toujours à donner quelques arguments. Est ce qu’elle aurait vraiment envie de changer d’air ? Ca m’étonnerait. “Sébastian vient pas.” Il ne me suit que très rarement pendant mes tournées, et il ne se déplace pas quand c’est seulement une série d’un ou deux concerts pour quelques jours. “Y’a personne pour faire le tyran et diriger tout le monde.” Et elle, c’est certainement un tyran encore pire que Sébastian. Elle n’a pas de raison de ne pas la faire, seulement la peur. “C’est pas comme si ça durait 10 ans.” Elle me fait soupirer, pourquoi elle se prend constamment la tête ? “C’est 3 ou 4 jours.” C’est un week end prolongé. “Te cherche pas d’excuses, t’as aucune raison de refuser un truc pareil.” Je tourne mes yeux vers elle, c’est juste un jeu non ? Et je sais déjà que j’ai gagné, parce qu’elle ne suivra pas. “T’as juste peur.” Peut-être que je vais encore la vexer et qu’elle va partir en me disant que je suis trop con.

Je sais que tous mes instruments sont quelque part dans mon appartement. Pourquoi elle s’intéresse ? “J’ai appris tout seul.” Je ne raconte pas les détails de mes escapades dans les salles des endroits où on donnait des cours de musiques. Je ne parle pas du voisin de ma mère qui jouait de la guitare à côté. “Tu joues ?” J’ai le droit de m’intéresser moi aussi non ? Elle tombe sur la mauvaise partition et les mauvaises paroles. “Si j’arrivais à écrire je le ferais.” Parce que j’essaie de le faire depuis des jours, des semaines déjà. “Elle mérite pas cette chanson.” Ca glisse d’entre mes lèvres sans que je ne puisse le contrôler. “C’est pratique de rien ressentir non ?” Je m’autorise un sourire, même si je ne sais toujours pas ce qu’il peut bien se passer dans ma tête ou dans mon coeur.

« Je suis obligé de juger là ! » Tu sais. Il fait bien. Tu le jugerais aussi si la situation serait inversé. C'était stupide. T'es au courant. Tu te sens mal pour Jack, pour leur amitié probablement détruite. Tu n'as jamais voulu que ça se termine ainsi pour lui. Tu n'as jamais voulu détruire ce qu'ils avaient tous les deux. Mais les risques étaient là. Il les connaissait parfaitement Jack et il a quand même plongé dans l'aventure. Va t-il le regretter ? Tu n'en serais pas surprise. Tu lui avait dit qu'il finirait par le regretter. Il t'a pas écouté. Et tu la laissé faire. Tu as été égoïste là dessus. Tu le regrettes même pas. Même si ce que vous aviez se termine là, tu ne regrettes aucune seconde.

« Oh vraiment ? » Il te croit pas. Tu l'entends dans sa voix. Peut-être qu'il a raison de pas le faire aussi. C'est quand même insensé de simplement pensé a l'idée de partir avec lui, non ? Oui totalement. « Sébastian vient pas. Y’a personne pour faire le tyran et diriger tout le monde. » Donc pas de Sebastian. C'est déjà plus intéressant. Pour de vrai. Même si tu vois pas vraiment ce que tu ferais là. Tu lèves les yeux au ciel lorsqu'il te décrit comme un tyran. N'importe quoi. T'es pas si pire. Des plans que tout le monde te déteste là bas. « C’est pas comme si ça durait 10 ans. C’est 3 ou 4 jours. » Okay. Pourquoi est-ce qu'on dirait qu'il essaie vraiment de te convaincre de le suivre ? Il raconte n'importe quoi. Il veut pas que tu viennes. Il veut juste te convaincre que tu as envie d'y aller pour t'y refuser la venue par la suite. « Te cherche pas d’excuses, t’as aucune raison de refuser un truc pareil » « J'ai surtout aucune raison d'accepter tu veux dire. » La liste des raisons pour lesquelles tu devrais refuser, elle est longue, tellement longue. Alors que celle pour lesquelles tu devrais accepter, elle est vide. Complètement vide. « T’as juste peur » Tes sourcils se froncent. Les points d'interrogation s'installe dans ton regard. « Peur de quoi ? De toi ? » Sûrement pas. Tu as pas peur de peu importe ce qu'il peut bien penser. Il peut juste pas accepté que tu refuses Jet, c'est tout. « Arrête de faire comme si tu voudrais que j'viennes. Je suis sûrement pas la première dans ta liste » Vous n'aviez pas conclu de ne pas jouer entre vous ? Non. C'est toi qui l'a exigée. Lui, il a rien dit. Il s'amuse et ça te dérange.

« J’ai appris tout seul. » C'est vague. Il veut pas en parler. Pourquoi il veut pas ? Tu le saura peut-être un jour, ou peut-être pas. « Tu joues ? » Tu fais signe que non de la tête. Non. Tu ne joues plus depuis longtemps. Trop longtemps. Ça fait si longtemps que tu as l'impression de n'avoir jamais vécu cette vie là. « Pas vraiment. Plus maintenant. » Tu fouilles dans ses partitions, dans son intimité et il te laisse faire. Il y en a une en particulier qui attire ton attention. Une que tu sais parfaitement pour qui elle a été écrite. Il n'a pas le profil du mec qui a été amoureux bien des fois Jet. Les liens se font tout seul. « Si j’arrivais à écrire je le ferais. Elle mérite pas cette chanson » La partition que tu laisses retomber alors que ton regard retrouve le sien. « C'est une belle chanson. » Toutes les filles de ce monde rêverait d'une si belle mélodie d'amour, même elle, elle a dû être touché quand il l'a jouer pour elle. Elle le lui a dit ? « C’est pratique de rien ressentir non ? » « C'est pas pratique si tu veux tourner la page, non. » Tes épaules qui se haussent. Chacun vit ses peines à sa manière. Toi, tu les vis mal, mais au moins tu les vis. Tu les vis et ensuite tu pourras passer à autre chose.

Je la juge, bien évidemment, elle a fait des conneries. Elle aurait fait pareil si ça avait été dans l’autre sens. Mais ça ne me serait jamais arrivé, je suis pas assez con pour faire ce genre d’erreur. Pas assez con ou trop expérimenté ? Je ne sais pas trop mais je pense que c’est mieux de dire que la première option est celle qui est vraie. C’est sûrement mieux pour mon image que je dois apparemment soigner depuis quelques temps. Je ris légèrement mais je ne renchérit pas, je n’en vois pas l’utilité. On ne va pas parler de ça toute la soirée, elle n’est pas là pour ça.

Un voyage. Quelques jours que je devais passer loin de Brisbane. J’avais le choix entre un départ demain, la semaine prochaine ou dans deux semaines, et Sébastian organisait tout autour de ça. “Alors pourquoi t’as pas déjà refusé catégoriquement ?” Pourquoi elle est encore en train de discuter avec moi des pour et des contres ? Je cherche des arguments, parce qu’elle a l’air d’être sur le point d’accepter. Est ce que ça devient un défi ? Peut-être bien. Ca passe mieux que de dire que j’aimerais finalement qu’elle m’accompagne. Pourquoi je peux bien avoir envie de ça ? Je ne comprends vraiment pas ce qui se passe dans mon cerveau des fois, et elle m’épuise Elise. Pourquoi rien ne tourne normalement avec elle ? Pourquoi on est toujours sur le jeu et aucun de nous deux ne veut perdre ? C’est fatigant les jeux, mais je continue parce que j’aime toujours autant ça. Elle n’a pas encore vraiment refusé, je n’ai pas encore vraiment proposé. Est ce qu’il est là le problème ? “Tu pourrais.” Certains diraient même qu’elle devrait avoir peur de moi. Mais elle ne les connait pas ces gens là, elle ne les fréquente pas. Et tant mieux pour moi non ? “J’ai pas de liste.” Je n’emmène pas n’importe qui sur mes week end de tournée, c’est un coup à faire croire à une conne qu’elle a de l’importance. Très peu pour moi. Là, j’ai juste besoin de quelqu’un pour diriger les équipes, ça pourrait être un voyage professionnel. “Si je te propose là, tu dirais oui ?” Là je l’ai posé la question, il y a seulement deux issus possibles. Soit elle dit qu’elle vient, et elle me donne tort, soit elle reste ici et elle me donne raison. Et j’ai étonnement envie qu’elle me donne tort Elise. Je sors mon téléphone et envoie un message à Sébastian. “Je pars demain, à la première heure. A toi de voir.” Elle me suit ou elle ne me suit pas, mais moi, je ne serai plus là pour quelques jours.

On parle musique et la conversations s’annonce intéressante au début, quand on ne fait que parler d’instruments. “Tu joues quoi ?” Elle jouait, elle l’a sous-entendu. Et si j’ai un des bons instrument dans cet appart, elle va sûrement devoir me faire une démo. Mais la conversation devient déplaisante quand elle regarde mes partitions, et qu’elle voit la mauvaise au milieu du tas. Quand elle essaie de parler de sentiments, de tristesse. Des émotions que je ne ressens pas, ou plus, ou trop. Je n’en sais trop rien, j’ai arrêté d’y réfléchir depuis que les joints sont bien trop nombreux dans une seule journée. “Ouais” La plus belle que j’ai écrite sûrement, et pourtant ça n’a pas suffit. Pourtant elle est partie avec son mari à elle. Pourtant on est là tous les deux alors qu’eux sont certainement tous les deux ailleurs. “Alors comment je devrais m’y prendre pour tourner la page ?” C’est pas comme si j’avais de l’expérience pour ça. Mais s’il y a une solution miracle, un moyen pour qu’Ariane disparaisse de ma tête une bonne fois pour toute, je suis prêt à tout.

« Alors pourquoi t’as pas déjà refusé catégoriquement ? »
« Tu m'énerves. » Et tu n'as pas de bonne raison.

« Tu pourrais. » Un tu devrais qui sonne comme un tu devrais. Pourquoi tu devrais ? Tu le connais pas trop Jet en fait. Tu le connais probablement encore moins bien que tu le penses. Enfin, tu n'es pas stupide. Ça paraît que ce n'est pas un ange, mais t'es quand même bien loin de te douter dans tout ce qu'il baigne. « J'ai pas peur de toi. » Au moins ça tu sais. Alors que tout le reste, tu ne sais rien du tout. Tu sais même pas pourquoi t'es là. Tu sais même pas pourquoi ton chemin croise toujours le sien, alors qu'au fond, t'as du mal à le supporter. « J’ai pas de liste. » Un rire moqueur s'échappe de tes lèvres. Le genre de rire qui veut dire que tu ne crois pas un mot de ce qu'il dit. Il a une liste. Elle est sûrement bien remplis. « Ouais, c'est ça. » Il a l'allure du genre de mauvais garçon qui a la fille qu'il veut quand il le veut.

« Si je te propose là, tu dirais oui ? » « Jet... » Demande pas. Ta main qui se passe dans ton visage. Le regard songeur qui se pose dans le sien. Pourquoi tu hésites ? C'est stupide. Tu devrais juste dire non. « Je pars demain, à la première heure. A toi de voir » « Demain ? » Demain. C'est trop vite. Ça te laisse même pas le temps de répondre vaguement, de réfléchir convenablement à la question, de penser aux faibles pour et aux nombreux non.  C'est un coup de tête qu'il te demande de faire. C'est une décision irréfléchi qu'il veut que tu prennes. « Je peux pas partir demain. » Pourquoi tu peux pas ? « On va s'arracher la tête après deux heures » Ça, c'est un fait. Il n'arrivera jamais à te supporter tout ce temps là et toi, encore moins longtemps.

« Tu joues quoi ? » « Piano. Ça fait longtemps. Trop longtemps. » Ça fait combien d'années que tu n'as pas touché les notes d'un panio ? Vingt ans ? Environ. Tu n'as jamais rejoué après la naissance de Cosimo. Peut-être même avant ça. C'est si loin. « Ouais » Ouais, c'est une belle chanson. Il l'approuve, mais il ne l'aime plus comme il l'a déjà aimé probablement. Elle est probablement devenue un fardeau pour lui, pour son petit coeur dont il tente de nier l'existence. « Alors comment je devrais m’y prendre pour tourner la page ? » Et il te demande ça à toi ? Qu'est-ce que t'en sais ? « J'en sais rien. Je l'apprend en même temps que toi. » Elle est là la vérité. Tu n'en a jamais vraiment vécu des peines d'amour. Enfin, peine d'amour, c'est un grand mot. C'est plutôt la perte de ta stabilité qui te perturbe autant. C'est la brisure de ta famille qui te déchire. L'amour, il y a longtemps qu'il s'est éteint, même si tu garderas probablement toujours une certaine affection pour le père de ton fils, pour celui qui a partagé la moitié de ta vie. « J'suis sûrement pas une bonne référence. J'suis terrorisée. » Un mince sourire qui s'installe sur tes lèvres. Un sourire un peu triste par contre.

”Je sais” Je l’énerve autant qu’elle peut m’énerver quand c’est elle qui cherche les failles. Là c’est moi qui les trouve. Comme si elle avait quelque chose de mieux à faire ici, quelque chose à perdre à partir avec moi. Je me demande pourquoi elle a l’air d’autant réfléchir, elle ne prend jamais de décision sur un coup de tête ? Moi c’est ce que je fais tout le temps. C’est bien plus amusant de ne pas avoir le temps de tout organiser non ? Elle n’a pas peur de moi, c’est étrange. “J’ai dû terrifier une bonne partie des femmes qui était présente au gala où on s’est vu pour la première fois.” J’ai détesté ce gala, je le déteste toujours d’ailleurs. “Arrête de penser que je mens tout le temps.” Là je ne mens pas, j’ai aucune liste à proposer. Mais je commence à en avoir marre de devoir me justifier après chaque phrase juste parce qu’elle pense me connaître, alors qu’elle ne sait rien de moi.

Ce voyage me tente vraiment, et je décide de partir demain. Avec ou sans Elise. Je préférerais avec, mais c’est à elle de décider de ce qu’elle veut faire ou non. Je lui donne seulement quelques arguments, des raisons pour lesquelles elle devrait tout laisser ici et partir prendre l’air. Si elle ne part pas, elle restera toute seule ici, et ce n’est pas ce qu’elle veut j’en suis certain. “Elise…” J’ai plus ou moins posé la question mais elle n’a pas donné de réponse. Pourtant elle a envie de s’enfuir je le vois dans ses yeux. Pourquoi elle craque pas ? “Demain.” Le message est envoyé, je pars demain. Elle a déjà l’air de paniquer à l’idée d’un départ aussi rapide. “Si tu peux.” Un sac, pour 4 jours c’est fait en 5 minutes. Et si elle n’est pas satisfaite de ce qu’elle a emmené elle pourra toujours acheter de nouvelles robes là-bas. “On verra bien.” Oui le je est passé en on parce qu’elle a vraiment l’air d’envisager un départ. “Arrête de réfléchir, y’a rien qui te retient ici. C’est 4 jours, c’est juste pour prendre l’air.” C’est ce que je me suis dit au moment où j’ai envoyé ce texto sans prévenir personne à part Elise de ce départ précipité. “Et si t’en as marre après deux heures rien ne te retient là-bas.” Elle peut partir au bout de 2 heures, 2 jours, ou même 2 semaines si elle n’a plus envie de revenir dans cet enfer.

Elle joue de la musique Elise, et ça ne m’étonne qu’à moitié. C’est bien le genre des riches de faire faire de la musique à leurs enfants pour faire bien. “T’aimais ça ?” Ou est ce qu’elle a juste été obligé ? “Si t’aimais jouer t’auras pas perdu la main.” Ce sont des choses qui restent, il suffirait de la poser devant un piano pour avoir le fin mot de l’histoire. Mais on parle de sentiments, de tristesse. Donc de trahison. C’est comme ça que je l’ai ressenti, et que je le ressentirai toujours très certainement. Je soupire, elle l’apprend en même temps que moi, et c’est rassurant de me dire que je ne suis pas le seul à avoir souffert de cette situation. “On peut juste déverser toute notre haine sur eux, c’est tout ce qu’ils méritent non ?” Qu’on essaie de les détruire, et de les blesser autant qu’ils l’ont fait eux. “Par quoi ?” Je me demande bien ce qui peut faire peur à Elise Williams.

« Elise… » Il t'énerve. Pourquoi est-ce qu'il te demande ça ? Pourquoi est-ce qu'il voudrait que tu viennes de toute façon ? Tout tes sens sont en alertes. Ils sont sur leurs gardes. Tout ça te semble si insensé. Aussi insensé que toi qui s'est lancé directement chez lui. « Demain » Demain. Demain. C'est trop rapide demain. Ça te laisses même pas le temps de bien y réfléchir. « Si tu peux. » « Non. Je peux pas. » Et la raison ? Tu n'en donne aucune, parce qu'il n'en a pas. Autre que ce serait déraisonnable d'accepter. « On verra bien. Arrête de réfléchir, y’a rien qui te retient ici. C’est 4 jours, c’est juste pour prendre l’air. Et si t’en as marre après deux heures rien ne te retient là-bas. » Tu te prends la tête. C'est trop compliqué. Tu veux pas réfléchir à ça. Ta vie est assez compliqué comme ça. Pourquoi il en rajoute Jet ? Tu n'es pas dans un bon mood mentale pour prendre une bonne décision, pour prendre la raisonnable. « Je- c'est pas une bonne idée » Tu peux pas juste dire oui ou non ? De toute façon, à force de tourner autour du pot, il va la prendre pour toi la décision. Il va partir avec ou sans toi.

« T’aimais ça ? » « Parfois. » Tu hausses les épaules. Oui et non. La pression qui venait avec, tu n'aimais pas ça. Une pression qui venait parfois des autres, souvent de toi. Tu visais l'excellence dans tout ce que tu entreprenais, jusqu'à t'en rendre malade. « Si t’aimais jouer t’auras pas perdu la main. » Ça reviendrait sûrement rapidement oui. Des années et des années à pratiquer, ça ne s'oublie pas si facilement. Tu supposes. Tu n'en sais rien. Tu veux pas savoir. Ça fait partie d'une vie que tu as oublié dès l'instant même où tu as quitté tes terres Australiennes pour devenir quelqu'un d'autre, plus ou moins.

« On peut juste déverser toute notre haine sur eux, c’est tout ce qu’ils méritent non ? » Tu l'as déjà fait toi, sans le vouloir. Tu l'as brisé Saül comme il t'a brisé. Tu as même frappé plus fort que lui. Tu en as récolté aucune satisfaction. Juste de la honte. « Par quoi ? » « Faire ce que je veux au lieu de ce que je devrais. » Et c'est tellement pathétique de le dire à voix haute. C'est quand même ce que tu as fais toute ta vie, faire ce qu'on attendait de toi sans jamais te choisir toi. Marié Saül parce que c'est ce qu'on avait choisi pour toi, le détester pendant des années parce que tu n'as pas voulu contredire personne. Voler un enfant, parce que se serait trop honteux d'être incapable d'en avoir. Avoir une vie parfaite en apparence seulement.