| | | (#)Ven 24 Juil 2020 - 23:13 | |
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Cauchemar en cuisine ? Je sors d’un service. Je suis lessivé. Je rallume mon téléphone. Plusieurs messages. Dont un message vocal. D’un ami traiteur. Je l’écoute. Il a répondu à une lettre de commande émanant de la ville de Brisbane. Il doit organiser le cocktail dînatoire qui doit succéder au vœux du maire prévu le surlendemain. Il a besoin de renfort.Il a pensé à moi. Pour l’aider à superviser la préparation. Je le rappelle. Je suis au garde à vous. Un extra, je ne peux pas y cracher dessus. J’ai besoin d’argent. Je le rappelle sur le champ. J’accepte sa proposition. Nous nous donnons rendez-vous pour le lendemain matin, afin de tout planifier, de tout organiser.
* Jour J. La pression monte. L’heure du discours des vœux se rapproche. De la mise en place du cocktail dînatoire aussi. Nous sommes à pied d’œuvre afin qu’il n’y ait pas d’impair. Que tout soit parfait. Il en va de la réputation du traiteur. Travailler pour la ville de Brisbane est une opportunité en or. Pour se faire connaître, étendre son réseau professionnel et prospérer. Aucun faux pas. Le traiteur nous a bien mis en garde. Mais, il a parfaitement confiance en son équipe. La veille, les rôles de chacun ont été répartis. Afin que le travail soit optimal, que nous ayons un coup d’avance lorsque le cocktail battrait son plein.
Afin de faciliter le service auprès des invités des vœux, la présentation des mets dans des verrine a été privilégié. Il s’agissait dès à présent, de préparer des centaines de verrine. Ma mission. Préparer près de cent verrines de poires au foie gras. S’il y a un met d’exception, un met qui marque les festivités de fin d’années, c’est bien le foie gras. En toast, sur du pain d’épices, c’est juste divin. Là, avec les poires caramélisées et les épices, le goût et le mélange sucré salé sera au rendez-vous. Nous n’en sommes pas là. Seulement aux prémices. Première étape. Éplucher les nombreuses poires de variété Rocha. Il ne s’agit pas de ma tâche favorite. Pour autant, je m’y attelle, sans rechigner. J’ai une cinquantaine de poire à déshabiller de leur peau. Une… Deux… Trois… Dix… Vingt… J’atteins la moitié. C’est éprouvant. Je vois le bout. Les déchets s’accumulent sur mon plan de travail. Il me tarde de terminer cette basse besogne. Quarante… Quarante-cinq… Quarante-neuf… Cinquante… Le compte y est. Je déverse les peaux de poires dans une poubelle à composte.
Deuxième étape. La découpe. Dans un premier temps, je coupe chaque poire en quartier. Je retire le trognon. Indigeste avec les pépins. Et, une par une, je les coupe en brunoise. En cubes de un centimètre chacun. Minutieusement. Aucune distraction n’est possible, pour limiter les faux pas. D’autant plus lorsque l’on a en main un couteau aiguisé. Tandis que je fais une pause, je vois entrer dans la cuisine un homme. Blond et d’une quarantaine d’année. En costume trois pièces. Rien que ça. Probablement un représentant de la mairie. L’œil de Moscou qui vient s’assurer que tout se déroule parfaitement. Il s’est précipité vers le traiteur. Je le vois déjà l’assaillir de questions. Je lève les yeux au ciel, avant de me consacrer, à nouveau, à mes poires. Les cubes de poires s’accumulaient sur ma planche à découper. Tandis que j’ai coupé en brunoise une dizaine de poires, j’allume le feu sous une poêle. J’y insère cinq noisettes de beurre. Elles fondent. J’y ajoute les premières poires finement découpée. Je les saupoudre de sucre et je les laisse cuire, en remuant régulièrement.
Tout en ayant un œil sur le feu, je peux continuer la découpe des poires. Pourtant, je sens une présence derrière moi, quelqu’un m’observe. C’est assez déstabilisant. Néanmoins, je ne me laisse pas déconcentrer. Je mélange les poires. Doucement, elle commence à caraméliser. J’y ajoute un mélange de quatre épices et une cuillère de miel. Je laisse cuire. L’odeur commence à être alléchante. Un raclement de gorge. Je fais mine de ne pas l’entendre et je continue mon travail. J’ai encore du travail… Nouveau raclement de gorge. Je me relève. Je me retourne et sèchement et légèrement exaspéré je réponds : « Quoi !? ». L’homme sapé comme un prince des temps modernes se trouve à quelques centimètres de moi. |
| | | | (#)Sam 8 Aoû 2020 - 14:50 | |
| Les voeux du maire. Cet événement, Camil l’attendait au moins autant qu’il le redoutait. Comme chaque année, il avait lui-même commencé les démarches pour l’organisation, avant de briefer correctement ses équipes pour qu’elles prennent le relai. L’Américain, en bon perfectionniste, avait souvent du mal à lâcher du lest et à accorder sa confiance à autrui. Ses équipes savaient qu’elles étaient libres d’agir, tout en sachant qu’il avait un oeil sur tout, qu’il ne laissait rien au hasard, et qu’il était susceptible, à tout moment, de demander des comptes. Il s’empara de son téléphone portable, et rédigea un message à l’intention de Sixtine, sa petite soeur, pour l’informer qu’il rentrerait tardivement ce soir. Elle devait s’y attendre ; depuis quelques jours, l’ainé des Smith était aux abonnés absents : une fois de plus, il avait donné la priorité à sa carrière.
Sa journée avait débuté tôt — à l’aube, pour être tout à fait exact. Conscient du travail qui l’attendait, il avait tout bonnement décidé de se passer de sa séance quotidienne de sport. Il le regrettait déjà ; à cette heure-ci, il aurait bien eu besoin de se défouler. Il quitta son bureau pour la première fois de la matinée, alors que l’heure du déjeuner était passée depuis bien longtemps. Téléphone greffé à l’oreille, il donnait des directives à ses collaborateurs et autres extras qui avaient été embauchés pour cet événement particulier. Il dévala les escaliers de la mairie, bien décidé à s’accorder quelques minutes de répit pour aller se chercher à manger. Échec cuisant : il sentit rapidement les effluves émanant des cuisines, et décréta qu’il était grand temps d’aller y jeter un coup d’oeil. Comme chaque année, l’Australien fut surpris par cette fourmilière, importée de toute pièce, qui s’agitait depuis quelques heures pour satisfaire les palais exigeants des élites, hommes politiques, et autres personnalités en vue de Brisbane. Il déambula dans les allées, et se dirigea d’un pas déterminé vers le traiteur qui avait été embauché pour cette occasion. Il s’assura que tout se passait pour le mieux, et fut soulagé d’entendre que c’était pour le moment le cas. Il poursuivit sa déambulation dans les allées improvisées, avant de s’arrêter devant un cuisinier en particulier, qui travaillait un produit qui l’avait immédiatement fait tiquer. Il adorait l’odeur qui s’échappait de cette préparation, mais un simple coup d’oeil lui fit comprendre que s’il laissait faire, la soirée serait un véritable fiasco. Il se signala d’un raclement de gorge, et attendit patiemment que le principal intéressé réagisse. L’Australien n’avait pas le droit à l’erreur, et le maire comptait sur lui pour tout superviser — un travail qu’il faisait avec détermination et passion depuis des années. Il avait sacrifié des heures, des jours, des semaines pour être irréprochable dans les missions qui lui avaient été confiées.
L’indifférence du cuisinier agaça passablement Camil, qui se racla à nouveau la gorge. Cette fois-ci, l’employé se fit nettement plus virulent. Le politicien arqua un sourcil, se recula d’un pas, et détailla son interlocuteur des pieds à la tête. Loin de se sentir en faute malgré l’évidente animosité que lui manifestait cet inconnu, il croisa les bras sur sa poitrine et laissa planer quelques secondes de silence avant de se présenter. « Camil Smith, directeur du cabinet du maire. » Son interlocuteur le trouverait probablement pédant et détestable, mais il s’en fichait royalement : l’important, c’était que cet homme sache à qui il s’adressait. Il n’était pas n’importe qui, et refusait tout bonnement qu’un mec — quel qu’il soit — lui manque de respect. Son air pincé ne trompait personne ; il n’était pas de bonne humeur, et le titiller serait tout, sauf une bonne idée. « Et vous êtes… ? » Demanda-t-il, alors que le cuisinier se détournait enfin de ses poires pour lui faire face. Il lui laissa à peine le temps de répondre, pour ensuite enchaîner : « Vous êtes au courant, naturellement, que le maire est allergique aux poires ? » Il avait posé la question en sachant très bien que ce n’était probablement pas le cas — sinon, le traiteur et ses équipes n’auraient pas perdu leur temps à éplucher et cuisiner ces fruits. Il nota d’en faire la remarque à ses équipes ; ce genre de mauvaise surprise, à quelques heures à peine d’un événement aussi important que celui qui marquait le début d’année, était inconcevable. « Il va falloir changer votre programme, et rapidement. » Annonça l’Américain sur un ton sans appel. « Et me faire à manger, aussi. » Décréta Camil, après avoir jeté un coup d’oeil à sa montre. Par chance pour le cuisiner, l’Américain n’avait rien contre les poires, lui. - Spoiler:
@Byron Oberkampf désolée pour le temps de réponse, je suis en présence réduite
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| | | | (#)Dim 9 Aoû 2020 - 15:02 | |
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Cauchemar en cuisine ? Un premier raclement. Je reste concentré sur mon objectif. La préparation des verrines poire-foie gras. Un vrai délice. Beaucoup de travail. Première étape harassante : l’épluchage. Ce n’est pas une partie de plaisir. Loin de là. La seconde, la découpe, me permet de lancer, petit à petit, la préparation des bouchées. Un second raclement. Plus accentué. Plus guttural. Je ne peux faire abstraction plus longtemps. Je me retourne. Je le reconnaît. L’homme qui était entré en trombe dans les cuisines. Il me toise de bas en haut. Les bras croisés sur son torse. Silencieux. Que veut-il au juste ? J’ai autre chose à faire. Plus important. Les vœux du maire approche. Chaque minute est précieuse. Il se présente. Je reste stoïque devant son identité. Le directeur de cabinet du maire. Je comprends mieux sa dégaine tirée à quatre épingles. Rien ne dépasse. Même pas une mèche rebelle. Il est assez impressionnant. Déstabilisant. Il n’est pas là pour enfiler des perles. J’ai la sensation qu’il est loin d’être commode. Regard hautain. Je ne vais pas me laisser faire. Directeur de cabinet ou non. Après s’être mis en avant, il tenta de connaître mon identité en me retournant l’amabilité. Je termine sa phrase. « En train de cuisiner ! ». Je fais volte-face. Comme s’il n’est pas là. Les poires, sur le feu, ont caramélisé. L’odeur est entêtante. Les invités ne vont pas être déçu. Je continue de mélanger les morceaux de poires. Je veux éviter qu’ils carbonisent. Je sens son regard oppressant, derrière mon épaule. Il scrute le moindre de mes mouvements. Et tranchant, comme la lame d’une guillotine, il me demande si j’ai connaissance de l’allergie du maire. Une allergie aux poires. J’ai un frisson. J’arrête tout mouvement. Je me retourne : « Vous vous fichez de moi ? ». Je vois l’amoncellement de poires sur mon plan de travail. Les épluchures. Le temps passé dessus. « Les propositions de verrines ont été validées ! » Compte tenu de l’évènement, le traiteur a travaillé en étroite collaboration avec les services de la mairie afin d’élaborer le menu de la soirée. Compte tenu de l’événement, sans être dans le cœur du système d’organisation, le traiteur, que je connais très bien, a répondu à une lettre de commande de la mairie. Une fois le devis accepté par le service financier de la ville, après étude des différentes propositions de traiteurs, il a dû détaillé le menu et proposé plusieurs alternatives, plusieurs thématiques afin de laisser au client le soin de choisir le menu qui sied le mieux à l’évènement. Tout a été validé, à un moment ou à un autre, par les services de la mairie compétents. « Avec tout ce que nous préparons, Monsieur le Maire aura l’embarras du choix, même s’il n’aime pas les poires. Je ne pense pas qu’il meurt de faim ! » Ce con m’a fait perdre le film de ma recette. Je ferme les yeux un instant. Je me concentre. La recette s’encre, à nouveau, dans mon esprit. Je respire un grand coup. Je reprend.
Camil Smith est toujours derrière moi. Il ne bouge pas. Combien de temps vais-je l’avoir sur le dos ? Dès qu’il est entré dans les cuisines, tout bien peigné, je ne l’ai pas senti ce mec. Le casse-couilles de première. Et je dois l’avoir sur mon dos. Aussi désagréable qu’une tique. Il me stabilise à fouiner partout, à chercher la petite bête. Veut-il graisser la patte du maire ? C’est ça le deal ? Une nouvelle remarque de sa part. Il veut que je change le programme. Après tout ce travail déjà accompli ? Il se fourre le doigt dans l’oeil l’ami ! Je me retourne, les mains appuyées contre le plan de travail, je l’observe, je le défie du regard. « Il n’en est pas question… Quid des fruits rouges, du concombre ou de la betterave… Des gens en sont allergiques et pourtant, ses produits servent de base à des verrines… Vous savez que des boulangers sont allergiques à la farine, mais où va le monde ? ». Si nous devions prendre en considération les allergies des uns et des autres, il n’y aurait plus de festivités. Plus rien. « Ce n’est pas pour rien qu’il y a un choix conséquent dans les produits travaillés… Pour satisfaire chaque papille ! » Il faut savoir satisfaire le plus grand nombre. Faire des compromis, des concessions, trouver un juste milieu pour que le maximum de personnes y trouve son compte. Ce n’est pas la base la politique ça, Monsieur le directeur du cabinet du maire ? Ayant la sensation qu’il va m’emmerder encore un certain temps, j’éteins les feux de cuissons derrière moi. C’est à ce moment là qu’il me demande de préparer quelque chose à manger. Je lève les yeux au ciel. Ce gars est exaspérant. Il veut chambouler tout le programme et en plus, il veut qu’on lui serve la becquée. Il est donc sans gêne. Je le vois regarder avec gourmandise les morceaux de poires caramélisés. C’est donc cela, il espère rafler le pactole. « Vous m’avez pris pour votre bonniche ? Vous ne voulais pas un massage aussi ? » Demande-je, un tantinet énervé, les mains crispées sur le plan de travail. |
| | | | (#)Lun 24 Aoû 2020 - 16:25 | |
| « Ça ne répond pas à ma question. » Il détestait être pris pour un idiot, et il avait la désagréable impression que ce cuisinier n’en resterait pas à ce coup d’essai. Déjà, la tension montait entre les deux hommes. « Absolument pas. » Répondit Camil, sur un ton parfaitement calme. Il voyait bien que sa remarque ne plaisait pas au cuisinier, mais il s’en fichait complètement : l’important, c’était que son travail soit irréprochable. Et si cela impliquait de jeter deux heures de travail à la poubelle — ou, pour éviter le gaspillage, de donner cette réalisation à une association qui serait ravie de la récupérer, l’Américain l’ordonnerait. Cet inconnu pouvait toujours s’agacer, il ne changerait pas d’avis. Point, à la ligne. « Peut-être, mais pas par mes soins. Et il semblerait que l’un de mes collaborateurs ne sache pas que le maire est allergique aux poires. » Répliqua Camil, dont la patience commençait à atteindre ses limites. Il n’avait pas pour habitude qu’on remette en cause ses ordres — et encore moins quand ceux-ci étaient parfaitement valables. L’Australien n’était pas un ange, et savait que la situation pourrait très vite dégénérer. Vue la tension qui régnait ce jour, une simple étincelle pourrait déclencher un incendie.
« Je me fous royalement des allergies des uns et des autres. » Répondit sèchement le directeur du cabinet du maire de Brisbane. Il n’était pas du tout d’humeur à discuter, à expliquer en long, en large et en travers à cette personne pourquoi il devait renoncer à sa préparation aux poires. Il avait bien trop de choses à faire, à vérifier ; expliquer les subtilités de la politique à un tel énergumène lui semblait être une perte de temps qu’il ne pouvait décemment pas se permettre. « Ce qui m’importe, c’est les goûts et la santé du maire. » Et si ça embêtait ce prestataire, c’était la même chose. Camil avait arrêté de se formaliser des réactions et susceptibilités des uns et des autres depuis bien longtemps ; il avait vite compris que, si on voulait réussir en politique, c’était la personne la plus haut placée qu’il fallait choyer. « Et ni vous, ni moi n’avons envie d’avoir notre tronche en une du quotidien de la ville demain matin parce que notre cher élu aura eu droit à un aller simple pour les urgences — ou pour la morgue, si les choses tournent mal. » Siffla l’Américain, le regard froncé. Sa soeur n’aurait probablement pas approuvé son ton tranchant et son manque de diplomatie, mais Camil avait clairement d’autres chats à fouetter. « Ce n’est pas un conseil bien avisé. C’est un ordre. » Jugea bon de rappeler Camil qui, même s’il avait sagement écouté les mots de son interlocuteur, n’avait pas changé d’avis. On disait de lui qu’il était dur en affaires — mais il l’était sans doute davantage lorsqu’il s’agissait de son métier, et a fortiori d’une soirée aussi importante que celle-là. Les voeux du maire étaient une véritable institution, un événement attendu par tous. Des centaines de convives avaient été conviés, et Camil avait passé les derniers jours à anticiper sur le moindre faux pas, le moindre problème imaginable. Il y avait forcément des choses auxquelles il n’avait pas songé — les aléas du direct — mais il savait qu’il avait limité les risques. Bonniche ? Il y allait un peu fort, là. L’Américain pouvait comprendre que le cuisinier soit déçu et frustré, mais il n’acceptait pas pour autant qu’on s’adresse à lui sur ce ton. « Je suis votre employeur et, sauf erreur de ma part, votre rôle est de préparer à manger. » Donc, exécution, eut-il envie d’ajouter, tout en sachant que le cuisinier n’apprécierait probablement pas qu’on lui donne un tel ordre, sur un tel ton. « Vous pouvez réutiliser votre préparation avec les poires. Pour ma part, je n’ai rien contre. » Commenta l’Australien, dont l’estomac commençait à se faire entendre. Son petit-déjeuner lui semblait bien lointain, désormais. Il aurait presque été tenté d’accepter pour le massage, juste pour agacer davantage son interlocuteur. Mais une petite voix intérieure — dont le timbre ressemblait étrangement à celui de Sixtine, à la réflexion — lui susurra qu’envenimer la situation n’aiderait en rien, et n’était pas non plus une preuve de maturité. « Je ne vous en demande pas tant. Contentez-vous de faire ce pour quoi vous êtes rémunéré. »
@Byron Oberkampf |
| | | | (#)Lun 21 Sep 2020 - 19:39 | |
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Cauchemar en cuisine ? Je ne me laisse pas démonter. Je le provoque. Il veut connaître mon identité. Je botte en touche. Il garde son calme. Imperturbable. Quelques mots, courts, efficaces sortent de sa bouche. En pleine maîtrise de ses émotions. De mon côté, je reste campé sur mes positions. Je n’en démords pas. Je ne veux pas que mon travail soit anéanti à cause des lubies d’un col blanc. Il retoque mon travail. Sans ménagement. Même si celui-ci a été validé par l’administration municipale. Il fait tout un patacaisse pour des poires. Je lève les yeux au ciel. Je regrette d’avoir accepter d’être en renfort ce soir. Juste pour avoir la pression de cet énergumène sur le dos. Là, juste pour se faire mousser auprès du maire. D’autant plus que, si j’en suis là, ce n’est pas hasard. Il se rattrape aux branches, malgré le trou dans la raquette, béant. Il rejette la faute sur ses collaborateurs, ignorant l’allergie du maire. La belle affaire. Trouver un bouc émissaire pour dissimuler son incompétence, sa faute personnelle. « Ils ont bon dos les collaborateurs. Vous avez juste merdé lamentablement. Vous n’assumez pas et vous préférez jeter l’opprobre sur autrui. Vous savez l’erreur est humaine ? » J’ai la sensation qu’il ne l’ai pas. Il brûle d’ambition. Je suis persuadé qu’il veut devenir calife à la place du calife. Il n’est pas humain. Il se positionne volontairement, au dessus de la mêlée. Pour éviter les coups. Pour les asséner. Hors d’atteinte. « Vous savez, en cuisine, c’est la brigade dans sa globalité, dans son unité, dans sa complémentarité qui trinque en cas de service calamiteux. Et le chef prend une part pleine et entière dans l’échec. Il ne rejette pas la faute, comme vous le faites, sur le collaborateur. » Malgré la pression exercée, je tente de garder mon calme.
Je prends sur moi. Je tente de justifier mon travail. Des bouchées, il en faut pour tous. Pour le maire. Pour l’ensemble des convives. Prendre en compte un panel de goûts et de saveurs. Pour que chacun y trouve son compte. Pour autant, nous n’avons pas le même point de vue. Borné, il ne varie pas d’un iota. Il n’y a que le maire, le maire, seulement le maire qui compte. Quelle étroitesse d’esprit. En oublie-t-il l’étymologie du mot ‘démocratie’ ? Le pouvoir au peuple. Pour le bien commun. Le maire n’est pas seul dans ce monde. Seulement dans l’univers parallèle de Monsieur Smith. « Vous êtes égoïste ! Le maire n’est pas le nombril du monde ! » Et le voilà prendre un ton alarmiste. Allergie. Hôpital. Morgue. De suite les grands mots. Pour protéger le premier édile de la ville. Pourtant, une intoxication alimentaire et une allergie chez une convive ferait, à mes yeux, tout autant mauvaise presse. Je ris intérieurement. Il se dévoile au grand jour. Sa plus grande crainte : se retrouver derrière les barreaux. Il ne pense pas au maire. Mais à sa pauvre petite personne. À l’image qu’il renverrait aux citoyens. Ainsi, il devient plus incisif à mon égard. Pour que j’abandonne la partie. Et ma préparation aux poires. Je rétorque. « Donc nous en revenons au même point. Vous avez merdé au départ. Il est inutile d’accabler vos collaborateurs... » Ses larbins plutôt. « Et vous craignez que votre incompétence et la légèreté dont vous avez fait preuve dans les préparatifs soient étalée sur la place publique ! » Silence. J’ai vidé mon sac. Je pense que je peux nettoyer mon plan de travail, ranger mes affaires et m’en aller. J’attends le déluge. J’attends son courroux. Et je préfère que tout parte à la benne, plutôt que de le voir se sustenter des mets que j’ai pu préparer pour rien. À moins qu’il s’étouffe avec. Auquel cas, bon débarras ! Et je lui fais savoir. Sans ambages. « Plutôt crever ! Autant que ça aille à une œuvre caritative plutôt qu’à vous… Vous n’avez pas l’impression de profiter du denier public ? » Sans déconner. J’avais un mauvais pressentiment lorsque je l’ai vu débarquer. Ma crainte s’est confirmée. Il s’est abattu sur moi, tel un aigle. Et ne me lâche plus. Dans un mouvement de recul, inexpliqué, nerveux, je heurte quelques verrines. Et là, le drame. Ou pas.
Win : Quelques verrines s’entrechoquent, valsent dangereusement vers le vide. Je les suis du regard. Plusieurs sont en passe de basculer. Le Destin est avec moi. Leurs mouvements s’atténuent. Elles ne tombent pas. So close : Quelques verrines s’entrechoquent, valsent dangereusement vers le vide. Je les suis du regard. Plusieurs sont en passe de basculer. Le Destin me joue des tours. L’une d’elles chavire. Réflexe. Je la suis du regard, et la rattrape in extremis, avant qu’elle n’atteigne le sol. Lose : Quelques verrines s’entrechoquent, valsent dangereusement vers le vide. Je les suis du regard. Plusieurs sont en passe de basculer. Le Destin est contre moi. Tandis que j’en rattrape une in extremis, une seconde chois sans que je n’ai eu le temps de la récupérer. Elle se fracasse au sol. Son contenu gicle dans tous les sens, tapissant notamment les chaussures et le pantalon de M. Smith. |
| | | ÂGE : des milliers d'années, mais je suis bien conservé. STATUT : marié au hasard. MÉTIER : occupé à pimenter vos vies, et à vous rendre fous (a). LOGEMENT : je vis constamment avec vous, dans vos têtes, dans vos esprits, et j'interviens de partout, dans vos relations, dans vos joies, vos peines. POSTS : 31460 POINTS : 350 TW IN RP : nc PETIT PLUS : personne ne sera épargné, c'est promis les chéris. AVATAR : je suis tout le monde. CRÉDITS : harley (avatar), in-love-with-movies (gif) DC : nc PSEUDO : le destin. INSCRIT LE : 15/12/2014 | (#)Lun 21 Sep 2020 - 19:39 | |
| Le membre ' Byron Oberkampf' a effectué l'action suivante : Lancer de dés
'dé action' : |
| | | | (#)Ven 9 Oct 2020 - 9:55 | |
| « Je ne vous permets pas de vous adresser à moi sur ce ton. » Siffla Camil, qui avait été rattrapé par l’impatience et par l’évidence — s’il ne renonçait pas à sa préparation, qui avait l’air délicieuse au demeurant, ils couraient droit à la catastrophe. Alors, à quoi bon faire preuve de sympathie et de bonne humeur quand la personne en face de nous en était dépourvu ? Il perdait son temps avec cet individu, c’était une évidence. Et, surtout, il y avait quelque chose qu’il ne parvenait pas à comprendre : pourquoi ne se pliait-il pas à ses ordres ? Les hiérarchies avaient été inventées pour éviter la cacophonie, mais l’inconnu ne semblait pas avoir compris cette leçon essentielle. Pourtant, elle était bien utile — surtout en situation de crise, comme c’était actuellement le cas. « Par pitié, cessez votre petite leçon de morale à deux balles. » Soupira l’Américain en levant les yeux au ciel. Il n’avait jamais aimé qu’on le prenne de haut. « Sauf erreur de ma part, je n’ai pas jeté sous le bus un de mes collaborateurs en particulier. » Il n’avait jamais cité personne, alors qu’il savait pertinemment qui était son bras droit pour cet événement important et particulier. Il aurait pu l’appeler sur le champ, et lui passer un savon mémorable. Mais à quoi bon ? L’erreur avait été constatée, et Camil souhaitait avant tout la réparer. Il aurait tout le loisir d’en reparler ultérieurement avec le fauteur — et il le ferait, avec certitude. « S’il faut que l’ordre vienne d’en haut pour que vous vous exécutiez, alors qu’il en soit ainsi. » Le politicien, bien loin d’être impressionné par l’évidente frustration du cuisinier, sortit son téléphone portable de la veste de son costard. Il pianota quelques instant sur l’écran tactile, et entreprit de répondre à quelques messages importants. « Puisque le chef prend une part pleine et entière dans l’échec, comme vous le dites si bien, j’imagine que vous n’aurez aucun souci avec le fait que je l’informe de notre… désaccord. » Et encore, il restait poli. Certains de ses confrères n’auraient eu aucun scrupule, et auraient ordonné qu’il soit éjecté manu militari. Dans un moment stressant, personne n’avait envie d’avoir un nuisible dans les parages. Mais l’Américain était un homme de challenge.
« Vous ne pouvez pas comprendre. » Se résigna Camil en secouant la tête. Il finissait par croire que ce n’était pas de la mauvaise foi, mais une simple incompréhension du milieu dans lequel le politicien évoluait depuis des années. Il en connaissait toutes les ficelles, tous les rouages — contrairement à son interlocuteur. « C’est tous unis, pour que lui puisse briller. » Il n’épilogua pas davantage ; à quoi bon, de toute façon ? Ils ne seraient jamais d’accord, parce qu’ils étaient trop antagonistes pour ça. « Bon, passons. Nous perdons tous les deux notre temps, et nous ne trouverons jamais un terrain d’entente. » Conclut l’Américain en levant les yeux au ciel. « Vous prenez votre tâche très à coeur. » Fit remarquer le politicien, surpris par tant de vigueur dans les propos de l’inconnu. Crever, plutôt que de le laisser déguster sa préparation aux poires ? Décidément, il avait vraiment une dent contre lui. « Aucunement. Au contraire, jeter, ce serait gâché. Tandis que là, je me propose pour picorer. Pour le reste, libre à vous de le ramener chez vous. » Déclara Camil en haussant les épaules. Loin d’être impressionné par l’altercation qu’il venait d’avoir avec lui, il s’empara d’une des verrines pour la goûter. Et puis, soudainement, la colère du cuisinier le rendit inattentif et maladroit. Mauvaise idée : le regard de Camil se posa sur les verrines, disposées sur un plateau, qui tangua dangereusement. Et l’inévitable se produisit, trop rapidement pour que l’un des deux hommes puisse réagir et éviter la catastrophe. « Ça, chez moi, ça s’appelle le karma. » Commenta Camil, le regard rivé sur le sol. Les morceaux de verre s’étaient mélangés à la préparation du cuisinier. Si son interlocuteur avait été moins idiot, moins borné, et moins enclin à lui chercher des noises, le politicien aurait sans doute fait preuve de compassion : être obligé de jeter des heures de travail à la poubelle n’était jamais plaisant. « Ou le destin, appelez ça comme vous voulez. » Mais le résultat était le même : tout était bon à jeter, et l’Australien n’avait plus qu’à recommencer.
@Byron Oberkampf |
| | | | (#)Ven 18 Déc 2020 - 21:48 | |
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Cauchemar en cuisine ? « Où je vous fais une leçon de morale ? Je fais simplement un amer constat. Vous vous sentez supérieur aux autres car vous être le secrétaire au cabinet du maire. Par conséquent, vous ne ressentez aucune culpabilité à l’idée d’accuser vos collaborateurs d’erreur dans la communication autour des allergies de Monsieur le maire. Pourtant, vos larbins ont bien pris leurs directives de quelqu’un Monsieur le secrétaire ! » Il m’insupporte. Son attitude m’insupporte. Ses réponses m’insupporte. « Encore heureux. Vous feriez exploser le taux de mortalité des employés de la mairie ! ». Il garde son calme. N’obtenant rien de moi, il déploie la menace de la hiérarchie. Je le vois sortir son téléphone. Le pianoter avec dextérité. Concentré. Comme il n’arrive pas à me faire entendre raison, ou plutôt ‘comme j’ai du répondant’, il veut en informer le chef. Il nourrit l’espoir légitime que ce dernier réussisse à me faire entrer dans les rangs. À juste titre. Là où ses propos auraient pu me calmer, il n’en est rien. Au contraire. À mon grand désarroi, ils rajoutent de l’huile sur le feu. « Oui, faîtes donc. Informez-le de votre erreur. Enfin pas de votre erreur visiblement, mais celle de vos sous-fifres ! ». Car il ne s’agit pas là d’une erreur d’un chef, ou d’un quelconque membre de la brigade. Non. Le problème vient de la mairie. D’un manque criant de communication. D’un oubli malencontreux.
Les tensions semblent s’aplanir. Grâce au bon vouloir du secrétaire du cabinet du maire. Il tente de calmer le jeu. Il emploie une métaphore pour illustrer son investissement auprès du maire. Le maire n’est pas le messie. « Et s’il se jette d’un pont, vous le suivez tous ? » Se sacrifier pour un homme. J’en reste pantois. D’autant plus que, derrière cette union de façade pour qu’il brille au firmament de la politique, certains (le secrétaire du cabinet le premier ?), j’en suis persuadé, n’attendent qu’une seule chose, que son éclat défaille et qu’il laisse sa place aux carnassiers qui n’attendent qu’un faux pas de sa part. Il coupe court à mes propos. Pour une fois, nous sommes sur la même longueur d’ondes. Nous sommes dans la confrontation. Quoiqu’il dise, je trouverais toujours à redire, montrer mon opposition face à ses propos. Une discussion stérile. Irrémédiablement. Il m’a tapé sur le système. Je ne vais pas devenir mielleux et compréhensif en un claquement de doigt. D’ailleurs, la rengaine repart de plus bel. « Je ne prends pas les choses trop à cœur ! Je constate simplement que vous ne me semblez pas mourir de faim, contrairement aux sans abris que je peux voir dans les rues. Je trouve fort de café de profiter de l’intolérance alimentaire du maire pour vous remplir la panse gratos ! »
Mais dans un élan d’énervement un plateau de verrine tangue dangereusement. J’observe la scène. J’ai l’espoir de fou qu’elle ne choit pas. Qu’elle se stabilise. Il n’en est rien. Surpris par la chute impromptue, une verrine vient s’éclater au sol et asperger les alentours. Elle baptise mon interlocuteur.J’ai un regard d’horreur. La goutte d’eau qui fait déborder le vase. Horrible. J’attends son courroux. En même temps, je jubile de l’avoir salopé par inadvertance. Sa réaction me surprend. Il me parle de karma. Il me parle de destin. Pipeau. Pipeau. Pipeau. « Ou juste un malheureux concours de circonstance… » Silence. « Peut-être que cela ne serait pas arrivé si vous n’étiez pas aussi borné et obtus ! » A me casser les pieds… Juste pour le bon plaisir du maire… Les vœux sont-ils à destination des habitants de la ville ? Ou simplement de l’auto-congratulation ? Pour le faire briller... |
| | | | (#)Sam 2 Jan 2021 - 15:47 | |
| « Écoutez-vous : depuis que je vous ai informé que ce produit ne pourrait pas être servi, vous êtes monté sur vos grands chevaux en m’accusant de tous les maux. » Commença Camil, alors qu’il refusait d’abandonner la partie. Mais après avoir jeté un rapide coup d’oeil à sa montre, il constata que le temps lui manquerait cruellement pour poursuivre la défense de ses idéaux. « Ce n’est pourtant pas la qualité de votre travail que je remets en cause. Mais vous êtes vexé, braqué, et plutôt que de vous concentrer sur le reste, vous restez fixé sur un plat qui, de toute façon, n’arrivera jamais sur le buffet de ce soir. » Camil y veillerait personnellement. Que les verrines soient délicieuses ou complètement loupées, il n’était pas question que le maire prenne le risque d’y goûter. Cela pouvait sembler injuste au cuisinier, mais c’était ainsi. Il y avait les donneurs d’ordre, et les exécutants. « Directeur, en réalité. » Rectifia Camil, tout en sachant pertinemment que sa remarque allait faire sortir son interlocuteur de ses gonds. Il lui avait déjà bien fait comprendre qu’il se fichait de qui il était, et de ce qu’il avait à lui dire. Mais le politicien n’était pas à une provocation près. Il ricana en l’entendant parler du taux de mortalité chez les employés de la mairie, et enchaîna : « Et vous aimeriez essayer de rivaliser, en essayant d’empoisonner le maire ? Belle mentalité. » Allez, mange, crétin. Cette conversation était absurde, une perte de temps pure et dure. Mais Camil refusait d’abandonner, pour le moment. Il ne se priva donc pas d’envoyer un message au prestataire et patron du cuisinier, pour lui rendre compte de son attitude déplorable. Le directeur du cabinet du maire laissa échapper un petit rire désabusé. Décidément, cette conversation devenait de plus en plus ridicule, de plus en plus absurde. Des gens qui avaient la tête dure, Camil en avait rencontré ; mais jamais il n’avait imaginé qu’un prestataire se montrerait aussi vindicatif. Qu’il le veuille ou non, la mairie avait fait appel aux services de son employeur ; ce dernier devait donc se soumettre aux ordres dictés par le client. Il n’y avait pas d’autre discussion possible ; cela pouvait sembler dur et tyrannique, mais c’était comme ça. Et si le cuisiner trouvait quelque chose à y redire, alors Camil l’invitait volontiers à démissionner et à s’engager sur d’autres terrains pour faire bouger les choses. Les cartes seraient entre les mains du patron ; lui avait fait son devoir. À voir si le prestataire souhaitait s’embarrasser — ou non — d’un employé dissident et, soyons honnête, problématique.
Camil avait naïvement pensé que tenter d’expliquer les choses au cuisinier l’aiderait à comprendre les choses ; malheureusement, il était vraisemblablement trop borné ou trop vexé pour prêter une oreille attentive à ce que le politicien lui disait. « Je répète ce que je disais précédemment : vous ne comprenez pas. » La loyauté, c’était une qualité rare et parfois difficilement compréhensible. Il avait évolué et grandi aux côtés du maire. Il avait bossé, bossé comme un chien pendant des heures et des heures. Ses nuits de sommeil avaient souvent été amputées, sa vie personnelle et sociale avaient été reléguées au second plan, et sa dévotion avait été entière. Il avait été un bon élève, pour pouvoir prendre la relève du maître — ou, mieux encore, le dépasser. C’était une relation presque paternelle qui s’était instaurée entre eux. Une relation dont le cuisinier n’avait pas conscience, et à laquelle il ne croirait jamais. Camil préfère donc se taire, plutôt que d’essayer de raisonner un type qui ne voulait rien entendre. « Ce n’est pas la réaction de quelqu’un qui ne prend pas les choses à coeur. » Fit remarquer l’Américain en arquant un sourcil. L’Australien soupira, en enchaîna : « Faites ce que vous voulez, ça m’importe peu en réalité. » Que la nourriture soit distribuée aux employés de la mairie ou offerte à des associations de charité lui convenait ; l’important, c’était surtout que tout cela ne finisse pas à la poubelle.
Le plateau de verrines trembla, et tangua, et quelques unes terminèrent leur course sur le sol. Les victuailles éclaboussèrent le bas du pantalon de Camil, et ce dernier soupira fortement. Bon sang, il ne manquait plus que ça. Il passa une main sur son front, inspira profondément, et expira ensuite : surtout, rester calme. « Donc c’est de ma faute, si vous êtes maladroit ? » L’Américain laissa échapper un rire sans joie. « C’est la meilleure, celle-là. » Le cuisinier ne manquait pas de culot. Sans parler de mauvaise foi ; il accusait clairement Camil d’être responsable de ses maux, alors qu’il n’y était clairement pour rien. « Je vous laisse, vous avez à faire. » Commenta le politicien en jetant un coup d’oeil dédaigneux au sol, désormais constellé de tâches de fruits. Camil se détourna du travailleur, et se dirigea vers la sortie. Il croisa un de ses collaborateurs, et lui relata l’incident qui s’était produit. « Veille à ce que les poires ne soient pas sur le buffet. Personne ne veut être témoin d’une catastrophe ce soir. » Déclara-t-il, alors que celui-ci hochait vigoureusement la tête.
@Byron Oberkampf |
| | | | (#)Sam 2 Jan 2021 - 18:18 | |
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Cauchemar en cuisine ? J’ai la sensation que le ciel me tombe sur la tête lorsqu’il m’accuse de prendre la mouche. Ma réaction est légitime. « Parce que vous vous attendiez à ce que je vous lèche les mocassins sans piper mot ? Alors que, si nous remonter le fil des préparatifs de l’évènement, il y a une eu couille dans le potage au niveau de la communication de vos service !» Je l’écoute poursuivre sa logorrhée vomitoire dans le seul but de me prouver par A plus B que la moutarde m’est trop vite montée au nez, que ma réaction a été, tout simplement démesurée. « C’est vous qui m’avez agressé en premier, en me tombant sur la poire, sans crier gare ! » Silence. « C’est vous qui avez manqué de diplomatie monsieur le secrétaire du cabinet ! » Je reprends ma respiration. Entre ses dents il me reprend. Je lève les yeux au ciel. Il en est là ? À me reprendre sur des futilités ? Mais quel gros con sérieux ! « Vous êtes au cabinet. Faîtes pas chier ! » Dis-je du tac au tac. Je ne retiens pas les grades de toutes les personnes que je croise dans la rue… Encore moins ceux des pecnots comme lui. « Donc vous avouez que vous êtes intraitables avec vos collaborateurs en leur mettant une pression de dingue ? » Silence. « Non, je ne veux pas me débarrasser du maire... Je ne vois pas ce que j’y gagnerais ! Mais vous par contre... ». Ça en est trop pour lui. La menace tombe. Il veut prévenir mon chef pour insubordination. Je ne l’en empêche pas… Mais je lui rappelle simplement que si nous en sommes là, c’est toujours à cause de lui…
« Mais allez-y ! Faites vous plaisir. Je le lis dans vos yeux que vous en mourrez d’envie ! Dites-le que je suis con ! » Au lieu de dire que je ne comprends pas. J’ai bien saisi que nous nous n’étions pas du même monde. D’autant plus lorsqu’il se croit tout permis au point de pouvoir profiter de l’allergie du maire pour se sustenter le gosier. Une nouvelle passe d’armes se joue entre nous. Il m’accuse de prendre les choses trop à cœur, ce que je réfute, sous le coup de mon énervement. « Vous m’emmerdez ! » Lâche-je sans ambages, avant qu’il ne close le débat. Mais tout cela en est trop. La discussion est montée dans les tours et, un geste brusque m’a fait heurter des verrines se trouvant sur le rebord. L’une tombe et explose au sol, tapissant les chaussures et le bas du pantalon de mon interlocuteur. Je lui rejette la faute mais lui pointe du doigt ma maladresse. « Si vous n’aviez pas pris cet air hautain et dictatorial avec moi nous n’en serions pas là ! ». Le politicien semble avoir lâché prise. Il me regarde silencieux. Il ne dit rien. Il jette un regard à sa montre. Avant de s’éclipser, sans oublier de me rappeler que j’ai du ménage à faire. Tandis qu’il a pris ses distances, que je le vois souffler quelques mots à l’oreille d’un collaborateur, je me saisis d’une balayette et d’une pelle afin de faire disparaître les morceaux de poire et les éclats de verre. Je m’abaisse pour accomplir ma tâche sans oublier d’adresser quelques mots au politicien qui était à présent sorti de la cuisine : « Bon débarras ! »
Sujet clos |
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