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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptySam 1 Aoû 2020 - 18:54

Et il venait à peine de poser le pied sur le sol canadien que déjà, il ne pensait qu’à Jude. Le sac de voyage défait, les fermetures éclairs éclatées. Les cheveux en bataille, l’haleine qui puait la clope d'atterrissage avec des turbulences, qu’il a craquée à la seconde où il est sorti de l’avion pour se poster dans le hall de l’aéroport. Il était parti depuis un peu plus d’un mois, il avait fait tout le nord de l’Australie, voyagé en van et en faisant du pouce et en crèchant chez des potes de toujours comme un jeune adolescent rebelle sans aucun repère. Il était fauché, il rêvait d’avoir du fric pour y retourner, il acceptait pas les rides qui commençaient à pousser sur son visage, ni même les quelques cheveux blancs précoces qui parsemaient sa tignasse ébouriffée. Mais à l’instant même où il respirait l’air glacé d’un Canada frigorifié, c’était vers Jude que ses pensées s’étaient de suite rivées. Vers elle, et vers Ellie aussi, à qui il tentait de s’adapter, à qui il savait être tout sauf idéal, comme figure paternelle. Trop dissipé, le Epstein, trop perdu dans sa tête et dans son coeur et dans sa vie. Mais l’élan de vouloir faire mieux, peut-être, un jour, sûrement, qui l’avait motivé à accepter l’invitation d’une Jude souriante au téléphone le lendemain matin, quand elle l’avait appelé à ce qui semblait être l’aurore - il était passé 9h, mais il vivait de nuit, Jack, c’était son horaire et son mode de vie.

S’était retrouvé à la porte de Jude, elle l’avait laissé entrer le bonheur qui faisait briller son regard, ses lèvres qui avait glissé un temps sur celles de Jack alors qu’il ne le méritait pas, cet amour, qu’il ne le mériterait jamais et ne l’avait jamais mérité non plus. Pourtant il prenait tout, il appréciait, il l’aimait, il la voulait. Compliqué. « Je suis revenu hier. » qu’il finit par répondre, quand Ellie déboule dans la salle à manger, et contre toute attente ne lève pas les yeux vers lui, lui qui accroche son regard fatigué sur le visage de porcelaine de la gamine - sa, gamine. « Et j’ai pensé qu’il était plus que temps qu’il passe goûter la nouvelle recette de pancakes que je teste sans réussir depuis si longtemps. » Jude arrive sur l’entrefaite, dispose une grande assiette justement garnie de ce qui semble être l’essai numéro infini d’une préparation qu’elle doit bien avoir maîtrisée dès le début, mais qu’elle s’affaire à répéter jusqu’à l'atteinte de la perfection. Il sourit Jack, reprend un peu de café, mâche ses mots, se noie dans ses silences alors qu’il a l’impression d’être un pâle touriste de leur quotidien à elles. « Tu as grandi. » et il statut stupidement, les iris toujours vissés à la silhouette d’Ellie. « Elle a tes yeux. » Jude précise, attendrie. « J’avais jamais remarqué. » bien sûr que non Jack, parce que tu ne remarques rien du tout, de toute façon.

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@ellie epstein
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyDim 2 Aoû 2020 - 22:04

Journée habituelle, journée morose. Encore une journée qu’Ellie est obligée de passer entre les quatre murs de la petite maison qu’elle partage avec Jude, sa mère. Les rues sont frigorifiées, les routes enneigées. Le bus scolaire ne passe plus, l’école a fermé ses portes jusqu’à la fin de la pause hivernale. La vie à la maison est… simple, calme. Papa n’est pas là mais ça, elle s’y est habituée. Il a jamais été là, de toute façon. Tout ce qu’elle connait, c’est la vie à deux. La vie avec une mère qui s’efforce de rendre sa fille heureuse, de l’éduquer avec les moyens du bord.

La vérité, c’est que tout se passe bien à la maison. Ellie passe son temps collée à sa mère quand elle n’est pas occupée à faire ses devoirs pour la rentrée, ou lorsqu’elle n’est pas affalée en pyjama dans le canapé, hypnotisée par ses dessins-animés préférés. Parfois, maman l’autorise à sortir devant la maison pour jouer avec les voisins à coup de boules de neige… mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui, il fait trop froid, mais surtout, Jack est de retour.

Il est reparti après être resté quelques jours à la maison il y a un peu plus d’un mois. Maman a jugé bon de l’inviter ce matin. Elle lui a dit la veille au soir lorsqu’elle l’a mise au lit, sachant pertinemment qu’entre la petite fille de neuf ans et son père, c’est compliqué. Bienveillante, elle a toujours tout fait pour qu’ils s’entendent ne serait-ce qu’un minimum, à coups de « Sois gentille avec lui. » « Il t’aime très fort, tu sais ? » « Il fait de son mieux… »… Mais pour Ellie, c’est que du vent. S’il était gentil, il resterait. S’il l’aimait, il viendrait plus souvent. S’il faisait de son mieux, ça se verrait.

Quand la gamine voit sa mère s’activer vers la porte d’entrée pour aller ouvrir avec l’un de ces énormes sourires sur le visage, ceux qu’on ne voit que très rarement, ceux qu’elle ose uniquement montrer lorsqu’il revient… ceux qu’il ne mérite pas. Et c’est ça le pire, c’est qu’il se comporte toujours comme un con et qu’elle est toujours la première à lui tendre la main lorsqu’il ose se pointer tous les quinze du mois. Et toutes ces étoiles qu’Ellie voit dans les yeux de sa mère à chaque fois que son père revient, c’est elles qui lui donnent envie de tout casser, de lui gueuler à la figure que c’est un sale con, qu’il mérite pas son attention et qu’elle est bien bête de lui donner tant d’importance… lui qui semble ne pas l’aimer plus que ça. Du moins, il ne le montre pas, pas assez à ses yeux.

Ellie, elle se lève à contrecœur du canapé lorsqu’elle se met à entendre cette voix masculine dans la salle à manger. Elle suit l’odeur des pancakes en trainant les pieds, s’insère autour de la table sans même prêter attention à la grande silhouette qui se tient près de sa mère. Ça a toujours été comme ça avec Jack. Ils ne sont rien de plus que des inconnus, il fait parfois un pas vers elle mais elle recule presqu’automatiquement. À ses yeux, il n’a jamais fait d’effort pour essayer de la connaître… elle ne voit pas pourquoi elle devrait en faire.

L’enfant fait sa vie, assise face à l’assiette garnie de pancakes et de sirop d’érable que sa mère lui a préparé. Ceux-ci sont l’expérience d’une nouvelle recette trouvée dans un magazine de cuisine. Ils sont bons, tout ce que maman fait a bon goût. Elle attaque le pancake innocent à coup de fourchettes, remplit sa bouche au maximum. Si elle a fait l’effort de s’approcher de la table, elle n’en est pas moins impatiente de la quitter. À ses côtés, les deux adultes discutent. Ils parlent d’elle, juste sous ses yeux, comme si elle n’était pas là. Ellie ne croise pas le regard de son père, les yeux rivés vers cette assiette qu’elle ne quitte pas du regard.

C’est lorsqu’elle entend son père commenter son apparence physique qu’elle réagit, après avoir pris le temps d’avaler ce qu’elle avait sur la langue. « Vu que t’es jamais là, c’est normal que t’as jamais remarqué. » Cette réponse sèche lui vaut ce regard froid de la part de sa mère, celui qui veut dire « Ellie, porte-toi bien. ». Parce que tu comprends Ellie, Papa mérite plus de respect. Papa mérite de l’amour, Papa mérite de la gentillesse. Mon cul. Sous les yeux de ces deux parents qui ne se comprennent pas, elle se saisit de son verre de jus d’orange pour en boire un peu, avant de relever les yeux pour la première fois pour les poser sur sa mère. « Maman, je peux aller manger dans le canapé… ? Devant la télé, s’il te plait ? » Sans même attendre qu’elle lui réponde, elle pose d’avance ses deux mains sur les bords de son assiette, prête à décamper. Elle était bien mieux devant la télévision avec Bob l’éponge.

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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyVen 21 Aoû 2020 - 16:15

La scène avait tout de doux ou du moins, de l'extérieur c'était ainsi qu'elle paraissait. Jude et son visage rieur, son sourire solaire. Jack et ses dizaines d'histoires, d'anecdotes et d'aventures sur le bout des lèvres. Et Ellie, petit animal sauvage de gamine au caractère déjà si bien trempé. Elle apparaît et de suite il dégage ses prunelles de la femme de sa vie pour les laisser parcourir le profil d'une enfant qu'il ne voit jamais mais à qui il pense tout le temps. Chaque fois, il en sort encore plus fasciné par la jeune femme qu'elle est en train de devenir, chaque fois il accumule de nouvelles bribes de miettes d'elle, pour compléter un portrait qui l'intrigue autant qu'il l'effraie. Elle le déstabilise, sa fille, elle l'effraie aussi.

« Vu que t’es jamais là, c’est normal que t’as jamais remarqué. » là encore plus que n'importe quand. La langue acérée de la fillette claque sur son palais, elle lui renvoie du revers ce qu'il ne fait que mériter tellement il n'est que de passage, tout le temps, dans leur vie. Quand il est sur scène il pense toujours à Jude et à Ellie, leur a composé des chansons, tentant d'expier ses dizaines de milliers de pêchés une fois le rideau levé. Mais ça ne sert à rien, quelques paroles qui viennent du coeur et une mélodie qui s'y accorde parfaitement. Ça sert à rien et ça ne le rachète absolument pas, lui qui ravale durement sa salive en réalisant bien trop tard comment il en fait bien trop peu. « Maman, je peux aller manger dans le canapé… ? Devant la télé, s’il te plait ? » Jude soupire mais garde contenance, partage un regard vif et bref avec Jack avant de laisser Ellie filer en sachant avec pertinence que si elle la retient la gamine n'en fera que pire. « Je lui ai donné tes lettres. » ses mots sonnent comme des excuses qu'elle ne devrait pas avoir à formuler. C'est elle la bonne mère, et c'est lui qui fait un père pitoyable à n'envoyer que des cartes postales et des lettres pendant sa tournée. « Je savais que j'aurais dû appeler. » qu'il souffle, défait, avant d'inspirer doucement et d'accepter la tasse de café qu'elle lui tend sans aucun reproche. Elle sait qu'il s'en veut lui-même suffisamment.

« J'ai un truc à aller finir à l'étage, tu lui apportes son repas? » elle essaie, elle essaie vraiment fort Jude. Alors il se promet d'essayer autant qu'elle, hochant de la tête pour finir par apparaître dans l'embrasure de la porte du salon. Il tient l'assiette d'Ellie dans une main la sienne dans l'autre. « Tu regardes quoi? » le voilà qui se la joue curieux, une seconde avant de détourner ses prunelles du visage de la brunette pour voir, à son grand étonnement, qu'elle n'a pas mis à l'écran des cartoons comme il s'y attendait. Elle grandit si vite, il en perd le souffle quotidiennement.

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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyLun 31 Aoû 2020 - 2:43

Entre elle et son père, c’est compliqué, bien plus compliqué que ça ne devrait l’être entre un père et une fille. Celui qui avait des devoirs ne s’en est jamais occupé, bien trop fatigué à courir après le succès et les applaudissements. Papa n’est pas un papa comme les autres, et ça, Ellie l’a compris bien assez tôt. Elle s’en est rendu compte lorsqu’elle observait les pères de ses copines venir les chercher à la sortie de l’école, elle s’en est rendu compte lorsque sa mère lui a annoncé que cet anniversaire se ferait encore une fois sans Jack, et elle s’est fait une raison au fil du temps, lorsqu’elle s’est mise à voir de moins en moins son visage au quotidien. Elle l’aime, son père… mais c’est bien trop compliqué, et même s’il lui arrive de caresser son joli minois sur les vieilles photos de cet album qu’elle aime emprunter à sa mère, elle peut pas lui pardonner, se jeter dans ses bras comme ça, même si elle en a envie plus que tout au monde… Ce serait trop facile, puis ce serait faire semblant d’aller bien. Et s’il y a quelque chose que la petite sait faire, c’est se faire entendre.

Elle est presque soulagée d’entendre sa mère l’autoriser à aller se réfugier dans leur petit salon, loin de cette présence nuisible qu’elle peine de plus en plus à supporter. C’est toujours la même chose, et elle l’a remarqué. Il se pointe après un long moment, essaie de se rapprocher d’elle comme s’il avait été là les semaines qui précédent sa visite mais échoue lamentablement. Ils peinent à se créer un lien, tous les deux. Jude se tue à essayer de les rapprocher, mais en vain. S’il y a quelque chose qu’Ellie a hérité de son père, c’est sa mauvaise foi et son petit côté têtu.

La fillette s’affale dans le canapé après avoir attrapé la télécommande. Les pieds sur le divan, elle attrape le plaid pour s’en couvrir les jambes et s’installer confortablement, attendant patiemment que Jude lui ramène son assiette. La plupart du temps, lorsqu’elles sont toutes les deux, elles mangent devant la télévision. Elles regardent leur feuilleton préféré tout en commentant les actions parfois totalement débiles de leurs personnages préférés… Une petite série comique, une série assez drôle qui sait la tenir en haleine, et ce même si elle n’a même pas l’âge de regarder les épisodes. C’est une petite habitude, un bien pour compenser un malheur qui chagrine la gamine plus qu’elle ne le laisse imaginer.

Les images défilent sur l’écran cathodique. Ellie boit chacune des paroles qui sortent des enceintes de la télévision à un volume qui va plus fort qu’il ne le devrait. L’enfant parvient presque à en oublier la mauvaise ambiance qu’il y avait à table… mais ça, c’était avant qu’elle ne le voie passer le cadre de la porte du salon pour venir la rejoindre… Sa tignasse brune s’agite brièvement lorsqu’elle tourne la tête pour l’observer alors que le poids de l’homme se fait sentir lorsqu’il décide à s’installer à ses côtés. Ellie laisse la télécommande se perdre dans les plis de son plaid et laisse Jack lui donner son assiette, assiette qu’elle pose sur ses genoux après s’être redressée.

« C’est une série marrante, dans un poste de police de New-York. » Elle lui répond d’un ton calme, saisissant le bout de sa fourchette pour continuer à déguster ses pancakes, son attention divisée entre la télévision et son vieux. Elle mâche, prend un malin plaisir à se remplir le bidon d’un plat qu’elle aime de tout son cœur. « On regarde ça avec maman, ça fait quelques mois que ça passe à la télé… » Une série qui les fait toutes les deux rire, qui leur fait oublier les soucis du quotidien…

La gamine s’empiffre, avale ces bouchées de pancakes comme si c’était les dernières qu’elle avait l’occasion de manger. Sa mère a beau lui enseigner les bonnes manières, c’est plus fort qu’elle. Elle a toujours été comme ça, Ellie. Du genre à toujours vouloir se presser, à faire les choses n’importe comment, quitte à attirer les regards et les sourires. C’est une bête sauvage qu’il faut savoir dompter. Certains y parviennent, d’autres non.

« Si t’étais plus souvent à la maison, on pourrait regarder à trois, tu sais ? » Calme, apaisée… elle l’est presque. On dirait que le simple fait de faire quelque chose qu’elle aime l’aide à s’apaiser, surtout à côté de Jack… C’est tout ce qu’elle demande, son attention. Mais elle en a marre de devoir lui courir après constamment, elle qui aimerait que son père privilégie le domicile familial à la scène.

En quelques bouchées, l’assiette est vide. Ellie se penche brusquement en avant pour pouvoir la poser sur la petite table entre le canapé et la télé. Puis d’un mouvement sec, elle vient se réinstaller dans le fond du divan. Son regard est cette fois-ci posé sur lui… la télé ne l’intéresse plus, pas pour le moment, en tout cas. « Parfois, j’entends maman pleurer. Elle dit que c’est rien, mais je crois que c’est parce que tu lui manques. » qu’elle lui confie d’un ton presque insensible.

Parce qu’Ellie s’est fait une raison, elle ne pleure plus pour lui. Ses lettres lui réchauffent le cœur, c’est pour cette raison qu’elle les garde bien au chaud sous son oreiller… mais elle ne se fait pas d’illusions : papa ne sera jamais comme le père de ses amies, et peut-être que maman devrait aussi s’y faire.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyLun 31 Aoû 2020 - 18:39

Oh que pendant un instant un seul, il se sent invincible, l'imbécile heureux qu'il personnifie en se calant aux côtés d'Ellie. En rien il ne ressemble à un père Jack, l'air bien plus d'un adolescent avec ses fringues qui ont vu la guerre, ses jeans déchirés et ses mèches qui partent dans des sens dont on n'arrive même pas à déceler ce qui est la fin du début. Tout est dans l'apparence de la scène, quand bien même la gamine continue de vivre sa vie sans un unique coup d'oeil, il prend ce qu'elle lui laisse. Il prend tout ce qu'il peut Epstein, que ce soit des miettes, quelques bribes à peine. Il espère au point de même se dire que si elle sourit la brunette, c'est parce qu'elle a peut-être entendu qu'il a ri au même moment qu'elle à une blague lambda dont il ne se souvient même plus. Du reste par contre, il enregistre tout, mémorise précieusement.

« C’est une série marrante, dans un poste de police de New-York. » « J'adore New York. J'aime un peu moins les flics. » il renchérit sur le même ton qu'elle, comme si son avis avait la moindre importance, comme si les détails qu'il ramenait aussi stupidement qu'égoïstement à son sujet allaient intéresser Ellie. Elle a bien mieux à faire que de chercher à apprendre à connaître son père, lui qui n'est toujours là que pour mieux partir au final.C'est la seule assurance qu'il lui laisse. « On regarde ça avec maman, ça fait quelques mois que ça passe à la télé… » quelques mois alors, qu'il passera à les imaginer lovées sur le canapé. Jude a toujours les doigts glacés, peu importe le nombre de plaids qu'il posait sur ses épaules du temps de leur adolescence d'amoureux transis. Une pensée pour les doigts d'Ellie maintenant et un coup d'oeil qu'il y dédie en se demandant si elle a les mains aussi bouillantes que les siennes ou si elle tient de sa mère pour ça aussi.

Une bouchée pour elle, une longue gorgée de café pour éveiller son esprit encore embrumé pour lui. « Si t’étais plus souvent à la maison, on pourrait regarder à trois, tu sais ? » elle fait mal, la gamine. Elle fait mal sans même faire exprès et il le sait, ne lui en voudrait jamais. L'inverse n'est pas toute aussi vraie et ce serait mentir de dire qu'il n'est pas persuadé qu'en temps normal, Ellie le déteste. Elle a tous les droits de le maudire, il fait son maximum le plus stupidement possible pour après tout. « Je sais. » il sait mais il stagne, le musicien paradoxalement toujours parti en tournée. Il sait qu'il n'a rien de stable, il sait qu'il est trop nomade, si on peut trop l'être. À ses yeux, soit il reste et s'enlise, se déteste et leur offre la pire version de lui-même. Ou alors il part et ne leur revient que lorsqu'il va bien. Sa logique est complètement discutable et il le sait bien plus que qui que ce soit d'autre ; pourtant il y est trop attaché, il est trop borné pour pouvoir y faire la moindre différence à son sens. « Parfois, j’entends maman pleurer. Elle dit que c’est rien, mais je crois que c’est parce que tu lui manques. » oh qu'elle fait mal, la gamine.

« Tu voudrais venir dans les coulisses? » au regard d'Ellie qu'il sent brûler sur sa nuque, il accroche le sien, plein d'espoir. C'est un changement complet de tactique et d'angle de discussion, c'est sa manière à lui d'essayer de gratter un peu de positif dans une situation qui n'en a plus, par sa faute, depuis des années. « Demain, j'ai un show en ville et Jude sera là, et c'est soir de semaine j'sais, mais si t'as envie tu pourrais, je me chargerai de négocier avec elle. » et il parle, il parle Jack, il aligne les mots les uns après les autres aussi vite qu'il peut bien qu'il pèse sur chacun d'entre eux. Jude saura et Jude sera d'accord, Jude ne s'opposera absolument en rien à ce qu'il tente d'être là pour Ellie, quand il peut et veut l'être.

Jude d'ailleurs dans la pièce d'à-côté, qui échappe distraitement d'une main tremblante sa tasse de café au sol. Le son se répercute dans la maison en entier. Lui, il n'entend pas, habitué au désordre, habitué à vivre dans un van de mecs où la vaisselle sale se compte au nombre d'assiettes qu'ils jettent plutôt que de s'investir à les laver tant elles sont crottées. Pour l'heure de toute façon, la seule chose qu'il entend, c'est le souffle d'Ellie précédent sa réponse.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyMar 8 Sep 2020 - 3:36

Non, Ellie n’est pas habituée à partager ce genre de moments avec son paternel, elle qui n’est habituée qu’à le voir une fois tous les premiers jeudis du mois… Lorsqu’elle l’a vu passer la porte de la maison, elle savait que ça ne se passerait pas très bien, qu’elle passerait la durée de son séjour à la maison à lui lancer des regards noirs comme elle aime le faire jusqu’à ce qu’il se décide enfin à partir… Pourtant, aujourd’hui semble échapper à la règle, père et fille parviennent enfin à parler. Jack l’a prise de court, s’est approché d’elle durant l’un de ces petits moments d’intimité, de plaisir qu’elle aime tant passer au fond de son canapé avec la télé allumée… et en semblant s’intéresser à ce qu’elle fait, il est parvenu à récupérer son attention… volant même la vedette au programme télévisuel.

La gamine n’est pas dupe ; elle a bien remarqué la voix posée de son père, il pense certainement être parvenu à lui retourner le cerveau… mais ce n’est pas le cas ; il est et restera à jamais un papa pourri comme pas deux. Pourtant, elle est prête à lui donner un peu de répit cet après-midi. Non pas parce qu’elle n’a pas la force de lui dire tout ce qu’elle a sur le cœur, non… mais bel et bien parce qu’elle apprécie elle-aussi cette tranquillité, ce calme qui règne dans le salon, les yeux de son père posé sur sa petite tignasse brune… mais ça, elle ne l’avouera jamais alors que c’est bien tout ce qu’elle a toujours voulu le plus.

Papa n’aime pas la police, les flics, les poulets. Il est déjà allé en prison, ça n’a duré que quelques mois, Ellie le sait. Maman ne lui a rendu visite qu’une fois, Ellie ne l’a jamais accompagnée et n’a jamais accepté ni même daigné s’y rendre une seule fois durant la durée de sa peine alors que sa mère essayait tant bien que mal de l’y encourager… Une sale histoire, un truc « stupide » comme maman le disait, mais quelque chose qui lui aura quand même valu une peine de sept mois de prison. Dur. Ça l’a abattue au départ, Ellie. Parce que Papa n’aurait plus du tout l’occasion de passer la voir, parce qu’il était en prison et que c’est pas quelque chose à avouer à ses copines… Mais au final, elle s’y est résignée. La prison, c’était qu’une excuse de plus pour s’éloigner d’elle.

Elle glousse quand même, la gamine, elle lui offre son premier sourire depuis bien longtemps. Parce que si on peut reconnaitre beaucoup de défauts chez Jack, elle est certainement la seule à voir son honnêteté comme un point fort… Les pères de ses amies, elle les voit jamais parler comme ça devant elles. Ça aurait été un père super Jack s’il avait été présent dans la vie de sa fille… elle en est elle-même convaincue.

Il n’aurait aucun mal à se faire apprécier de sa fille… Il n’y a qu’à la voir à cet instant présent, avec ses yeux qui ne veulent pas le quitter, lui qui lui donne bien plus d’attention qu’elle n’en a jamais demandé. Et à sa simple proposition, elle s’émerveille et tout un tas d’étoiles prennent place dans ses yeux. Aller le voir jouer, rester dans les coulisses de l’une de ses performances en ville ? « Pour de vrai ? » Son regard s’accroche au sien alors qu’elle se met à écarquiller les yeux, elle n’arrive pas à y croire. La gamine se met à remuer dans le canapé, laissant le plaid glisser sur le carrelage froid du salon alors qu’elle se redresse et se tourne pour réellement lui faire face…

Cette simple proposition (qu’elle ne se permettrait absolument pas de refuser, elle qui a toujours voulu le voir jouer) la rend toute chose et lui fait presque oublier toute cette rancœur qu’elle a à son égard… « Tu l’promets ? Je vais pouvoir te voir jouer ? Et je serais derrière les rideaux ? » Soir de semaine ou pas, elle ne doute pas des capacités de son père à convaincre sa mère… elle se bat elle-même depuis très longtemps pour que ces deux-là passent du temps ensemble.

Et à cet instant précis, Ellie n’a d’yeux que pour son père. Elle s’imagine déjà le regarder depuis les backstages, son père la rockstar, à une heure à laquelle elle serait habituellement couchée… Elle en rêve, Ellie. « Ce serait trop bien. » La gamine sent le rouge lui monter aux joues, elle se mord discrètement la lèvre comme pour essayer de se retenir de sourire… mais elle ne peut pas.

Une tasse s’écrase sur le sol de la cuisine. Ellie sursaute presque, jetant presque immédiatement un œil de l’autre côté de la pièce.

« Merde. » Ça lui échappe comme ça, sans qu’elle y fasse attention. Simple réflexe, simple mécanisme qui s’est déclenché sans crier gare. Maman déteste quand elle prononce ces vilains gros mots qu’elle entend surtout à l’école mais aussi à la télévision. Elle n’a pas besoin d’aller jusqu’à la cuisine pour savoir ce dont il s’agit : Maman a encore fait tomber quelque chose. Ça arrive bien trop souvent en ce moment, elle a les mains qui tremblent, elle lâche les couverts lorsqu’elle fait la table, elle lâche des assiettes lorsqu’elle fait la vaisselle… « Elle arrête pas de faire tomber des trucs, Maman. » confesse la gamine, se tournant à nouveau vers son paternel. « Elle a les mains qui tremblent, elle fait tomber des trucs… mais elle fait comme si c’était pas grave. » Mais Ellie sait que ces chutes sont plus que le fruit de simples maladresses… Personne ne passe son temps à trembler, personne n’a les larmes aux yeux en ramassant les bouts de verre d’une tasse brisée en mille morceaux. « Je crois qu’elle est malade. »

Elle essaie de rester indifférente, Ellie… mais cette voix tremblante la trahit. Elle met les pieds à terre, et c’est presque en courant qu’elle rejoint Jude dans la cuisine… Sa mère est à quatre pattes, peine à ramasser les éclats de verre de ses doigts tremblants et de ces yeux larmoyants… elle se sent honteuse. « Maman, qu’est-ce tu fais ? » La gamine s’active, s’agenouille à ses côtés pour l’aider à réunir tous ces bouts de verre avec ses mains nues. Elle pourrait se blesser, c’est même très probable… mais elle s’en fiche. C’est pas ça qui lui fait peur à Ellie, mais plutôt cet air désespéré qu’elle parvient à cerner dans les yeux de sa mère… comme si elle essayait de la protéger d’une vérité bien trop douloureuse, d’un diagnostic qui la détruirait à jamais. « Ça va aller, Maman… Pleure pas, s’teuplaît. » Elle la conseille, essaie de la rassurer alors qu’elle n’arrive pas à se retenir elle-même de pleurer. Les premières larmes coulent sur ses joues, elle renifle et souffle un grand coup avant de fondre en larmes ; elle déteste voir sa mère dans un tel état… et ça arrive bien trop en ce moment pour ne pas être grave. Ellie sent son petit monde s'effondrer depuis plusieurs semaines, et elle a peur pour la personne la plus chère à ses yeux.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyVen 18 Sep 2020 - 0:58

« Tu l’promets ? Je vais pouvoir te voir jouer ? Et je serais derrière les rideaux ? » il aurait pas dû avoir à promettre. Il aurait pas dû avoir à hocher de la tête vivement de la positive, et lui confirmer du sourire et du coup d'oeil le plus rassurant qu'il avait en banque qu'ils allaient bel et bien partager ce genre de moments ensemble. « Ce serait trop bien. » pourtant, il l'échappe depuis toujours Jack, brisant les coeurs et surtout le sien, à statuer et à jurer quand au final il ne livre rien. Pourtant, quand sa voix enrouée d'émotion ajoute un « C'est promis, Ellie. » il y croit dur comme fer.

Puis, il n'y croit plus. « Merde. » il n'y croit plus parce que son esprit est complètement figé, ses prunelles avec, fixées sur le profil d'une Ellie en panique qui est bien trop jeune pour l'être. « Elle arrête pas de faire tomber des trucs, Maman. Elle a les mains qui tremblent, elle fait tomber des trucs… mais elle fait comme si c’était pas grave. » comme si c'était pas grave - lui, il aurait dit que ça ne l'était pas. Lui, il aurait été désabusé, il aurait laissé ça aller. Il n'aurait pas pris le temps de s'inquiéter sauf que maintenant, il ne pense qu'à ça. Quand Ellie souffle une dernière fois, son intonation et les démons qui colorent son regard de gamine encore si jeune et si fragile lui brisent le coeur direct. De nouveau. « Je crois qu’elle est malade. » et elle se lève, lui avec. Il se mouve sans mot Epstein, quel sombre imbécile, qui se contente pour les premières secondes de simplement assister à la scène en retrait. S'il avait eu un esprit d'analyse il aurait tout additionné ensemble, s'il avait été le moindrement alerte il aurait bien sûr su quoi faire et comment dès lors qu'il voit l'amour de sa vie recroquevillée au sol à tenter d'effacer les traces de ce qui à ses yeux a des consonances du pire des crimes. « Maman, qu’est-ce tu fais ? » Ellie se joint à elle, et c'est lorsqu'elle statue un « Ça va aller, Maman… Pleure pas, s’teuplaît. » qu'il les voit, les larmes.

« Ellie, est-ce que tu peux aller chercher des serviettes, et les mouiller avec de l'eau chaude? » il n'a pas grandes ressources Jack, mais il sait comment s'occuper de chair blessée et coupée lui qui se retrouve dans des bagarres à tout bout de champ. Attendant que la fillette les laisse seuls, il souffle. Prenant le relais sur le parquet autant vernis que travaillé, il immobilise une minute les mains de Jude pour les embrasser volatilement. Les siennes se dédient à ramasser les éclats de verre ensuite.

***

Il n'a pas tenu sa promesse.
Il ne l'a pas amenée dans les coulisses.
Ce soir, ils sont à l'hôpital.

Jude est dans la salle d'examen de l'autre côté d'une immense porte qu'ils ont fermés quand bien même Jack les a insulté de tous les noms possible et inimaginables. Violent comme jamais devant une Ellie qui aura désormais tout en main pour colorer son langage des pires vulgarités du monde en l'instant. Jude est malade mais ils ne savent pas de quoi, Jude est faible et ils vont la garder toute la nuit en observation. C'est la seule chose qu'ils savent.

« Tu veux un truc à boire? » il n'a pas faim, se doute férocement qu'elle non plus. Pourtant l'air est sec dans les couloirs aseptisés d'un des établissements qu'il a le plus visité de sa vie, qu'il déteste de tout son coeur aussi. « T'as l'âge de boire du café? » aux grands maux les grands remèdes diront-ils.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyDim 20 Sep 2020 - 3:49

Elle a un tas d’étoiles dans les yeux Ellie quand il lui promet qu’il va l’emmener, lui faire visiter les backstages de sa prochaine représentation. Elle sourit, elle sent la joie l’ensevelir et semble presque oublier toutes ces choses qui l’empêchaient d’être heureuse quelques minutes plus tôt. Papa s’absente, Papa n’est pas souvent là… mais il lui a promis de l’emmener quelque part, de lui laisser jeter un œil à la vie qu’il mène lorsqu’il n’est pas à leurs côtés.

Puis on l’a empêchée de rêver un peu plus longtemps. Elle entend des bris de verre, on lui retire le peu de joie qu’elle avait pour la ramener à la vie réelle, celle qu’elle mène seule avec sa mère depuis quelques années maintenant, depuis bien trop longtemps. Maman est malade, Maman n’arrête pas de faire des bêtises. Elle fait tomber des choses, elle tremble. Elle met la faute sur sa maladresse, sur la fatigue mais Ellie n’est pas dupe et perçoit bien cette tristesse, ces extraits de panique dans les yeux de celle qui l’a mise au monde. La gamine quitte le canapé dans un sursaut, rejoint sa mère dans la cuisine. Le spectacle est le même que d’habitude : des bris de verre sur le sol, sa mère anéantie… elle l’est de plus en plus ces derniers temps. Ç’est trop fréquent, et elle sent bien que c’est plus grave qu’elle ne l’aimerait. Elle est désemparée, la petite. Désemparée en voyant sa mère dans un tel état de faiblesse, mais aussi parce que ses doigts ensanglantés l’inquiètent. Elle sent sa respiration se mettre à trembler, ses yeux s’humidifier… Mais Jack est là pour prendre les choses en main, cette fois. La gamine hoche la tête et se rue vers la salle de bain pour aller s’équiper comme il le lui a demandé. Des serviettes, de l’eau chaude… c’est dans ses cordes. Elle passe des petites serviettes sous le lavabo, les mouille à coup d’eau bouillante. Elle ne pense pas à les tordre pour les dégorger et revient vers la cuisine en courant, laissant couler de l’eau sur son passage.

La semaine se termine différemment qu’elle a commencé, la visite de Jack a pris une tournure malheureuse, inattendue. Il a rompu une autre promesse, il ne l’a pas emmenée dans les coulisses de l’un de ses shows comme il le lui avait proposé… à la place, ils terminent la journée dans les couloirs d’un hôpital qu’Ellie n’a que très peu fréquenté dans sa vie. Ça sent mauvais, ça sent le mélange de désinfectants et de médicaments.

Père et fille sont seuls comme ils ne l’ont pas été depuis bien longtemps. Papa s’est énervé, a déblatéré tout un tas d’insultes qu’elle connaissait déjà pour certaines, mais qu’elle a pris le soin de bien garder en tête pour d’autres ; Jude s’en mordra les doigts dans les jours à venir… si elle sort de la salle d’examen.

D’habitude active, elle a troqué cette petite boule d’énergie qu’elle a l’habitude dans la poitrine contre des mouchoirs qui remplissent désormais les poches de son pantalon de pyjama. Elle s’est calmée, Ellie. Assise avec Jack, cette ressemblance qu’il mettait en avant à son arrivée est désormais bien réelle… ils se ressemblent, Jack et Ellie. Ils ont tous les deux le cœur brisé.

« Mouais. » Elle n’a pas soif… elle est fatiguée, elle est affamée, mais elle veut surtout rentrer à la maison, main dans la main avec celle qu’on lui interdit de voir depuis son arrivée à l’hôpital. « J’ai neuf ans… bien sûr que j’ai l’âge de boire du café. » Question idiote, réponse idiote. Y a pas d’âge pour boire de café, de toute façon…

Ses yeux quittent enfin ses baskets pour retrouver ceux de son père, les mêmes que les siens. Elle glisse de sa chaise pour atterrir sur ses deux pieds… ça l’embête de bouger, elle ne veut pas rater une possible intervention du médecin… mais elle a besoin d’air, de manger, de boire. « Tu poses que des questions nulles. » Elle renifle en le reluquant un peu… Les circonstances sont décevantes, mais elle ne mentira pas : elle est contente qu’il soit là pour sa mère.

Elle prend sa main, la petite Epstein. Premier toucher, première fois depuis bien trop longtemps qu’elle sent la chaleur de sa main dans la sienne. C’est elle qui mène la danse et qui le tire au bout du couloir, près des ascenseurs là où se trouvent les divers distributeurs. Elle ne vient pas souvent à l’hôpital mais c’est toujours la partie qu’elle préfère, celle qui sait lui redonner le sourire et qui lui fait oublier la raison qui l’y a amenée. Son regard parcourt la façade du distributeur à café. « Tu me laisses mettre la pièce, hein… ? » qu’elle lui demande sans vraiment le faire… Si elle veut le faire, elle le fera. « Faut en prendre un pour maman aussi, pour lui donner des forces. » Elle en a forcément besoin, en salle d’examen… Et même si Ellie ne veut pas y penser, elle a peur que ce soir, ce soit la fin de tout… Les médecins paraissaient assez occupés, concernés par son état de santé.

L’enfant l’est tout autant, voire même deux fois plus… Sa mère, c’est tout ce qu’elle a. Son père, elle ne peut pas compter sur lui et n’ose pas réellement imaginer une vie sans sa mère… « Maman va pouvoir rentrer demain à la maison, tu penses ? » Elle se racle la gorge en glissant la pièce dans le distributeur et en pressant les boutons qui lui donneront bientôt de quoi reprendre des forces, ils en auront besoin.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyVen 25 Sep 2020 - 17:48

Il y a des tonnes et des tonnes de gens qui passent de tous les styles et de toutes les silhouettes sous leurs yeux. Aucun ne se ressemble, pourtant ils sont tous pareils pour Jack qui les confond, les inconnus. Les médecins et les blouses blanches éparses, les familles et les gamins, les grands-parents et le cycle qui recommence. Eux deux pourtant, ils sont figés dans le temps. Ellie lui donne même l'impression de retenir son souffle tellement sa cage thoracique reste impossible à associer à la moindre inspiration, la moindre expiration à travers. « Mouais. » il déteste entendre le trémolo dans sa voix de nouveau, celui qu'il associe lâchement à une gorge enrouée de ne pas avoir parlé depuis des heures. Pourtant, le bras qu'il avait lassement posé sur le dossier de sa chaise à elle se rapproche, et sa joue se pose sur la tête aux mèches ébouriffées de la gamine - sa gamine. Il aura toujours besoin d'un temps d'adaptation pour le capter.

Un café, le temps d'ironiquement décompresser. « J’ai neuf ans… bien sûr que j’ai l’âge de boire du café. » son rire est sec, dessine des rides déjà bien marquées au creux de ses paupières même s'il ne touche encore qu'à la trentaine. Il a eu la vie difficile, c'est tout, à travers les substances illicites, les nuits blanches et le rock, celui qui salit la peau et qui noircit les coeurs. « C'est bien ce que je pensais. » qu'il nargue Jack, dressant le portrait d'un genre de complicité entre eux deux même si ils sont bien loin d'en avoir une véritable. Il essaie le père, il tente d'alléger l'ambiance sans jamais savoir s'il réussit, aujourd'hui encore moins que les quelques maigres autres et précédentes fois. Pourtant elle s'active ou du moins, elle en donne l'impression. « Tu poses que des questions nulles. » c'est tout ce que ça lui prend pour sourire un peu, ou du moins tenter de toutes les forces qu'il lui reste. Il se lève Jack, lui tend la main, lâche un « T'aurais aimé mieux que je te demande chocolat ou caramel? » teinté d'espièglerie en espérant qu'elle réponde un mélange des deux. Point bonus sur elle y ajoute une touche de beurre d'arachides. C'est la sainte trinité des saveurs pour un snack sucré salé selon Epstein senior, et s'il lui a passé les gènes des yeux, il espère également lui avoir transféré ceux des bonnes papilles gustatives. Quel bordel qu'il s'efforce de ne penser qu'à ça, qu'à toutes ces futilités-là, quand au bout du couloir il reconnait le visage de l'infirmière attitrée à Jude qui passe la porte en pressant le pas, s'engouffrant dans la chambre de sa femme sans mot dire.

« Tu me laisses mettre la pièce, hein… ? »

Et il reprend constance, du moins, s'en donne l'impression. Sa main elle, celle qui est libre et qui n'est pas enserrée à celle de la fillette, part à la chasse à toutes les pièces qu'il peut bien garder au fond de la poche lasse de son jeans troué. Quand il revient à la surface, sa paume se tend vers la brunette et elle y verra une bonne dizaine de dollars à utiliser bon gré mal gré. « Prends tous les extras. » les sirops et les crèmes, les essences et les poudres. Qu'elle se gâte, qu'elle abuse du sucre, qu'elle remplisse les gobelets jusqu'au rebord et qu'elle goûte toutes à les saveurs. Ça lui permettra sûrement de se gratter un morceau de bonheur à travers les démons qui colorent ses prunelles et même si c'est éphémère, au moins ça aura pour effet de passer, d'y être acté. « Faut en prendre un pour maman aussi, pour lui donner des forces. » son coeur se brise, pas mal au même moment où il hoche de la tête de la positive, résolu. Qu'elle lui en fasse un comme elle l'aime, qu'elle lui en serve un exactement dans son goût, qu'elle se raccroche au gobelet pour Jude comme aux espoirs qu'elle dresse la seconde qui suit. « Maman va pouvoir rentrer demain à la maison, tu penses ? »

Idéalement, il aurait dû mentir. Idéalement, il aurait dû camoufler l'air perdu qu'il porte, celui qui est la seule chose qu'il sait tenir envers et contre tout. Mais il peut pas se résoudre à ravaler ni même à lui cacher la vérité, quand bien même elle est jeune et quand bien même elle n'est encore qu'une enfant. « Je sais pas Ellie. » Jack qui n'a jamais été aussi franc qu'il ne l'est que lorsqu'elle est là. « Mais je sais qu'elle voudrait, très fort. » ça aussi, c'est vrai. Il parle pour Jude mais il est persuadé que c'est évidemment ce qu'elle voudrait au plus profond de son coeur, au plus profond du lit d'hôpital dans lequel elle doit se caler en l'instant. La motivation et la persévérance seront ce qui la sortira de là, il en est sûr.

Puis, il ose. La machine à café continuant de cracher ses infusions au fur et à mesure de ses paroles hésitantes. « Est-ce que tu voudrais, que je rentre aussi? » à la maison, pour vrai. Pas juste entre deux spectacles, ni entre deux tournées. « Que j'aide. » il tente de se trouver une utilité, et ce sera entre la vaisselle sale et les vêtements à laver qu'il pourra peut-être construire des liens qu'il a mis bien trop de temps déjà à évoquer. « T'as le droit de pas vouloir. C'est pas parce qu tu bois du café et que t'as neuf ans que t'as pas le droit de faire des caprices. »[/color] qu'il dédouane, qu'il la soulage. Elle est une enfant encore, elle n'a pas à porter ce genre de décisions sur ses épaules.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyMar 29 Sep 2020 - 19:37

Les hôpitaux et Ellie, ça n’a jamais fait bon ménage. Le jour de naissance, elle brayait comme un animal qu’on essaie d’éloigner de sa mère. Rebelote à ses sept ans quand elle a trébuché après un faux mouvement lors d’une partie de foot avec le fils des voisins et quelques copains… une entorse grave qui résulte sur sa mère qui panique et qui l’emmène aux urgences en plein samedi après-midi… Elle grognait la petite lorsque les médecins ont parlé de lui poser un plâtre, de lui immobiliser la jambe le temps de quelques semaines. Finalement, elle n’a pas pu passer à côté.

Il n’y a rien de positif à une visite à l’hôpital. La gamine a vu l’état de sa mère se détériorer au fil des dernières semaines sans pour réagir d’une quelconque façon. Les chutes qui se multiplient, sa maladresse qui s’amplifie. Elle n’a rien pu lui dire, elle n’a pas su l’aider, sa mère aimait mettre ça sur le coup de la fatigue, sur ces derniers médicaments qu’elle prenait et qui avaient le don de lui soutirer une bonne grosse dose d’énergie. Il y avait les tremblements, aussi. Beaucoup de symptômes, de nouvelles choses qu’elle ne parvenait pas à assimiler ni à mettre en parallèle… c’est qu’une gamine après tout, elle n’est pas médecin. Puis maman dit qu’elle sait ce qu’elle fait, alors…

C’est bien la première fois qu’ils sont seuls pour la première fois, père et fille. La première fois qu’ils semblent aussi proches, qu’un semblant d’air familial se dessine sur eux. La petite fille l’a laissé s’approcher d’elle, poser sa tête par-dessus la sienne. Elle ne se sent pas bien, n’a pas envie de se battre… Elle ne le dira pas, mais elle apprécie même sentir sa présence, ce parfum qu’elle ne connait pas mais qui vient se frotter contre le bord de ses narines. Ça devrait tout le temps être comme ça, mais ça l’est pas.

C’est lui qui brise le silence, qui lui propose de quoi se rafraîchir, de quoi détendre cette gorge nouée depuis quelques heures, depuis leur arrivée dans cet endroit qu’elle maudit tant. « Nan… C’est pour les enfants, ça. » Elle adore ça, le chocolat et le caramel. Elle en raffole et si Jack trainait plus souvent à la maison, il saurait qu’ils ont une place bien spéciale dans un tiroir du meuble de cuisine… Mais non, Ellie ne lui dira pas. Elle préfère boire du café, avoir l’air grande alors qu’à son âge, elle n’a même pas encore atteint la taille nécessaire à l’entrée des manèges de ces parcs d’attraction qu’elle aimerait un jour visiter. La gamine se laisse glisser de sa chaise, puis vient prendre la main chaude de son paternel qui l’emmène aux machines vendeuses de rêve, le seul point fort de ses visites à l’hôpital.

Grande mais pas assez pour le laisser mettre les pièces à l’intérieur du distributeur, elle se fait entendre, lui demande de lui donner… ce qu’il fait après s’être vidé les poches et s’être saisi des quelques pièces qui y trainaient. Les deux paumes collées l’une à l’autre, elle accueille avec grand sourire. La gamine prend son temps, compte au détail chacune des pièces qu’il lui a donné. Les plus grandes, les plus petites… Ça lui prend deux minutes. Deux minutes qu’elle passe à se chuchoter à elle-même sous le regard d’un homme qui découvre de nouvelles habitudes à sa fille.

« C’est beaucoup, 11.78$ ? » qu’elle lui demande en relevant la tête, elle qui n’a toujours pas la notion de l’argent, elle qui imagine son père comme un grand artiste, de ceux qu’elle voit tout le temps à la télévision… Il doit avoir plein d’argent, Jack.

Elle suit ces conseils, Ellie. Elle appuie sur une grande partie des boutons, en lit certains en s’exclamant tout en continuant de les presser en voyant les chiffres sur l’écran évoluer et le montant changer. Un gobelet, un second, puis un troisième. Des mélanges qu’elle n’a jamais pu goûter, à base de sucre, de noisettes, de chocolat et de café… De quoi les remettre d’aplomb, c’est ce qu’elle espère, en tout cas.

Les mots de Jack ne la rassurent pas, lui dont la parole n’a plus vraiment d’importance ni de sens. Il ne cherche pas à la rassurer, il semble répondre le plus honnêtement possible… C’est loin de ces promesses qu’il n’a jamais respectées. « Moi aussi, je le veux très fort. » Il ne lui ment pas, il lui dit simplement la vérité, et elle l’apprécie.

La machine a café continue de tourner. Elle l’observe silencieusement sur un fond de bruit tordant, dérangeant, grinçant… la machine n’est pas toute neuve. « Hein ? » Il la surprend, lui met une grande claque dans la figure. Elle s’y attendait pas, Ellie, elle sait pas quoi lui dire. Est-ce qu’elle voudrait qu’il rentre à la maison avec eux, qu’il se montre présent… ? Elle l’a toujours voulu. Elle fronce vulgairement les sourcils, penche un peu la tête en le fixant sérieusement, un peu surprise. « Je… Je veux pas faire de caprice. » Elle fait pas de caprices Ellie, même si Maman dit souvent le contraire. La gamine se met à se mordre inconsciemment la lèvre… elle hoche doucement la tête sans lui montrer d’engouement… Elle en a marre d’être déçue. « J’aimerais bien que tu viennes à la maison, que tu restes avec nous, moi. Surtout si Maman elle en a besoin. » Parce qu’elle n’est pas naïve, Ellie sait qu’elle n’arrivera jamais à prendre soin de sa mère, pas autant qu’il le pourrait. « Ce serait même… trop bien. » Elle défronce les sourcils, sent sa gorge se dénouer… un peu de douceur vient regagner ses lèvres, elle lui offre son sourire le plus sincère. C’est pas le père parfait Jack, mais elle veut bien lui laisser une chance de plus.

Elle pense à sa mère bien malade, à ce gobelet rempli à ras bord qui la fera certainement sourire, c’est une bonne attention. Ça lui donnera des forces, ça lui fera du bien. « Tiens, prends celui-là. » Les trois gobelets posés sur le bord de la machine à café, la gamine se saisit de l’une d’entre eux sans vraiment y faire attention et le tend à Jack. « Je vais prendre le mien et celui de maman, moi. » qu’elle le prévient… Un verre dans chaque main, elle fait bien attention à chacun de ses pas. Les gobelets remplis à ras bord, le liquide chaud fait des vagues, manque même de couler le long des bords… mais la petite fait attention. Une goutte, c’est une goutte… faut que sa mère en ait assez pour se remettre d’aplomb. Une fois qu'elle sera remise sur pieds, ils pourront rentrer à la maison... comme une vraie famille.
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Message(#)black lake (epsteins, fb) EmptyMar 13 Oct 2020 - 3:41

« Je… Je veux pas faire de caprice. » qu'elle le voit ainsi lui brise le coeur, bien plus qu'il ne l'était déjà. Elle ne devrait pas recevoir le tout comme une demande déraisonnable, elle ne devrait pas imaginer qu'il n'a pas envie d'être près de sa famille et encore moins dans une situation qui semble autant prendre des proportions affreuses que celles que suggèrent les bips incessants des couloirs de l'hôpital. Pourtant c'est sa faute et la sienne à lui seul, c'est lui qui a défini ce genre de climat et c'est lui qui a suggéré entre les lignes à quel point il était un nomade incapable de se poser ici, avec elles. C'est sa faute et il en est l'entier responsable - mais pour l'heure, la machine à café occupe le reste de pensées qu'il se fait violence à ne pas laisser dériver vers la chambre où il imagine que Jude a été postée pour la nuit.

Un souffle, un soupir, un seul. Et quand ses prunelles croisent celles d'Ellie, quand il la voit hausser le menton pour que ses iris puissent s'accrocher à ceux de son père, la ressemblance est marquante, elle le frappe de plein fouet. On dirait Jude, qui le regarde. « J’aimerais bien que tu viennes à la maison, que tu restes avec nous, moi. Surtout si Maman elle en a besoin. » elle ne devrait pas avoir de trémolo dans sa voix, il ne devrait pas avoir les mains moites, hésiter à la prendre dans ses bras, ne pas le faire finalement. Il ne devrait pas se balancer d'un sens comme de l'autre, et encore moins chercher ses mots alors que l'évidence vient avec le « Ce serait même… trop bien. » qu'Ellie affirme en toutes lettres.

Elle est douée la gamine, elle a la même capacité que Jack de s'émerveiller des détails, des petites choses, et des cafés avec. « Tiens, prends celui-là. » ses mains encerclent le gobelet bouillant qu'elle lui tend. Il n'a pas de mal avec la chaleur Jack, éternel canadien ayant grandi dans les montagnes enneigées de la Colombie-Britannique. Il y est habitué, aux contrastes entre le chaud et le froid. La climatisation de l'hôpital n'est qu'un argument de plus pour resserrer son cardigan autour de ses épaules. « Je vais prendre le mien et celui de maman, moi. »

L'instant d'après par contre, il pose son verre de carton sur le rebord d'une fenêtre à proximité. Son cardigan d'ailleurs, qu'il retire d'office, le passant sur les épaules de la gamine sans y penser à deux fois désormais. Jack et son semblant de sens paternel, qu'il dégaine en même temps qu'il se décide enfin à l'attirer contre son torse qui se gonfle plus lentement qu'au ralenti. Elle sent la clope et le cuir par sa faute à lui, mais quand il perd des baisers contre les mèches hirsutes d'Ellie, c'est décidément le mieux qu'il puisse faire, entre la cause et les circonstances. « Je reste, alors. Pour de vrai. » pour une fois une seule dans sa vie, il y croit, à sa promesse. Il la tiendra coûte que coûte.
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