Est ce que je déteste toujours autant les expositions ? Oui, bien sûr, quelle question.
Est ce que je voudrais être partout sauf justement où je me trouve en ce moment même ? Oui, bien sûr, quelle question.
Est ce que je suis pourtant en train de bouger le moindre petit doigt pour m’en aller ? Là, absolument pas.

J’observe le public et m’amuse de leurs réactions, je subtilise des verres de champagne simplement pour arroser les plantes de la galerie et pour mieux apprécier le regard outré que me lancent les mamies au loin, celles qui attendaient l’arrivée du serveur comme la Faucheuse elle même. J’ai appris à m’amuser d’un rien, comme les gamins à qui on donne un papier et un crayon et dont on donne l’ordre de faire passer le temps tout seuls. Si j’avais eu ça à ma disposition j’aurais été l’adulte le plus heureux de la Terre mais au delà de ça me voilà bien habillé dans des chemises qui grattent, mes chaussettes rouge et vertes dépareillées me rappelant sans doute un peu trop les bancs de l’église que j’occupais il y a encore vingt ans de ça. La moitié d’une vie, voilà tout ce que j’ai égaré là bas - et mon âme avec, sûrement, mais là n’est pas la question.

Des vieilles dames aigries mon regard s’attarde sur leurs maris qui parlent chasse et se pensent connaisseur, les plus aventureux d’entre eux s’osent à quelques commentaires sur le style des peintures et le courant auquel elles pourraient appartenir. Je rêve que Ginny soit à mes côtés simplement pour mieux m’enfuir de l'événement avec elle mais à défaut de pouvoir la compter à ma droite, ce sont mes yeux intrigués qui se posent sur une jeune adulte dont j’aurais presque pu confondre la chevelure avec celle de ma femme. Elle tranche pourtant facilement avec la moyenne d’âge de 90 ans de tous les riches et inutiles convives de la salle, ceux bien plus prêts du cercueil que du berceau. Elle, c’est tout le contraire. “Tu t’es perdue gamine ? Tu cherches tes parents, peut être ?” J’interroge, moqueur, tout en levant un sourcil interrogateur. Une chose est sûre, c’est qu’elle n’a sûrement pas sa place dans ce monde de requins-artistes.

Son père fait chier mais royalement. Sa soirée était calée, elle devait aller voir des amis. Mais non bien sur, il a besoin d'elle encore une fois ! Dylane soupire grandement. «  Ma chérie, il me faut une des oeuvres et tu sais que ce soir j'ai un repas avec l'équipe. » Elle le toise du regard. « Elle a bon dos l'équipe ! Et puis j'y connais rien en art » Son père la regarde avec un air de chien battu. «  Prends celle qui te plaît, l'important est que j'en ai une. Tout mes amis en ont donc il m'en faut une » Elle hausse un sourcil. Depuis quand son père devait faire comme ses amis, ces riches qui le sont depuis toujours. Elle lève les bras en l'air et sort de la maison en direction de cette exposition. Voulant classé ça le plus rapidement possible, elle n'a même pas prix le temps de mettre une tenue de circonstance. Et puis si un jeans ne leur convient pas tant pis. Elle n'est pas en guenille non plus. Arrivée sur place, elle passe la porte. Son regard se porte sur les gens présents, que des vieux. Qu'est ce qu'elle fout là bon sang ?! Elle s'aventure dans la salle et regarde quelques tableaux sans savoir ce qu'ils évoquent. Elle ne cherche même pas à comprendre à vrai dire. Un serveur passe avec du champagne mais elle décline l'invitation. Son but est d'acheter une peinture, la ramener dans la maison familiale et enfin rejoindre ses amis à cette soirée sur la plage, bien plus intéressant qu'ici. Alors qu'elle avance sans savoir quoi choisir, une voix la sort de ses pensées. Non mais il se prend pour qui ? Elle le pense fort mais ne dit rien. Elle vient au nom de son paternel et ne peut se permettre de dire des conneries. «  La gamine est majeure et elle a le portefeuille assez rempli pour acheter une de ces choses » Montrant les toiles du doigt. «  Ca vous suffit comme explication ? » Elle roule des yeux n'ayant aucune idée qu'elle vient de parler à ce fameux peintre.

Mes yeux jaugent la tenue qu’elle porte et je m’étonne presque de ne pas voir des trous au niveau de son genou voir même des franges pendant au bout de son pantalon en pattes d’éléphant. Non, vraiment, je la pense venue d’une décennie plus tôt mais coincée dans le corps d’une gamine de treize ans. Elle a cette innocence peinte sur le visage et personne ne pourra jamais la lui retirer. Je sais bien la reconnaître et pour cause : Ginny a la même depuis treize années que je la connais, elle l’avait sans doute déjà bien avant et Matt pourrait le confirmer. Elle, pourtant, ce n’est pas pareil. Personne ne peut réellement être comparé à ma femme, après tout.

« La gamine est majeure et elle a le portefeuille assez rempli pour acheter une de ces choses. » Elle grogne et répond, je jurerais presque voir des incisives en train de pousser dans sa mâchoire. La scène est bien plus risible qu’autre chose mais, la tête toujours tournée en sa direction, je tente au maximum de garder mon sérieux. Après tout, elle est ici la seule capable de m’amuser un tant soit peu et ce serait bien dommage de déjà congédier un jouet. “Tu parles toujours de toi à la troisième personne ? C’est ce qu’ils t’apprennent, papa maman ?” Je m’imagine déjà la détester, elle et son nom à particule. Je pense même qu’il est français, simplement pour ajouter un peu plus de fancy à toute l'histoire familiale inventée une nuit d’hiver au coin du feu, les orteils posés sur le tapis de fourrure d’ours polaire. « Ça vous suffit comme explication ? » “A vrai dire, non, absolument pas.” Je réponds du tac au tac sans sourciller puisque je sais qu’à ce jeu je ne peux que gagner et elle perdre lamentablement. Elle est une enfant et viendra tôt ou tard le moment où elle courbera l’échine, c’est certain. “Allez dis moi, ton portefeuille, c’est papa ou maman qui le remplit ?” Il y en a toujours un qui sera plus généreux que l’autre envers la petite fille chérie de la dynastie, c’est bien connue.

Une expostion d'oeuvres d'art, sérieusement Dylane n'a pas sa place ici. Elle n'y connaît absolument rien et risque de ramener n'importe quoi à son père. Tant pis, il aura qu'à assumer de ne pas être venue de lui-même. Au pire, elle prendra la première venue et ce sera une histoire classée. Sur place, elle fait tâche dans le décor. Autant par sa tenue qu'elle n'a pas voulu changer que par les personnes présentes. Ils sont tous d'un âge avancé. A croire que les jeunes ne s'intéressent à cette forme d'art. Dommage en soi. Bien entendu, elle est dans le lot mais maintenant elle ne le dénigre pas. C'est juste qu'au moment de choisir quelque chose d'artistique, elle a préféré prendre des cours de piano qui ne lui servent à rien non plus.

Alors qu'elle est plantée devant une toile, un gars vient l'emmerder. Elle roule des yeux et lui répond. Elle est pas patiente ce soir et n'a qu'une envie pouvoir foutre le camp. Et puis il lui veut quoi ce mec ?! Qu'il aille faire sa visite de ton côté et la laisse tranquille. “Tu parles toujours de toi à la troisième personne ? C’est ce qu’ils t’apprennent, papa maman ?”  Elle le toise du regard et ne se démonte pas pour autant. «  Juste quand des énergumènes de ton genre viennent me faire chier » Cependant, il n'a pas l'air de vouloir la laisser en paix ce qui a le don de l'agacer.  “A vrai dire, non, absolument pas.” Sa tête se secoue négativement. «  Et bien vous n'aurez rien d'autre de ma part donc si vous pouviez aller emmerder une autre personne merci bien » Son regard se repose sur la toile qu'elle observait juste avant bien qu'elle n'ait pas de coeur pour celle-ci. Donc elle avance de quelques pas pour regarder la prochaine qui est déjà plus belle selon elle. “Allez dis moi, ton portefeuille, c’est papa ou maman qui le remplit ?” Rhaaaaa ! Pourquoi on croit de suite qu'elle ne peut pas être autonome. «  Non je travaille merci de vous en inquiéter » Et puis pourquoi, elle lui répond. En plus cela ne le regarde en rien. Elle penche vraiment pour cette toile maintenant reste à trouver le fameux Auden Williams. De sa main, elle happe un serveur et lui demande où elle peut trouver le peintre en question. Celui-ci lui montre discrètement du doigt. Son regard se tourne. C'est bien ma veine . Elle soupire et le regarde. «  Et donc c'est comme ça que vous accueillez des acheteurs potentiels ? » Toute compte fait, elle est pas certaine d'avoir envie d'acheter la toile en question. Elle pourra toujours trouver une excuse auprès de son paternel ...

Je m’amuse de la gamine qui ne se démonte pas et répond à chacune de mes piques sans sourciller ou presque. C’est loin de m’impressionner, certes, par contre c’est un passe temps assez divertissant pour l’homme aigri et habitué aux expositions en tout genre que je représente. Le public regarde les tableaux et moi je m’amuse avec ce que j’ai à disposition, voilà tout. « Juste quand des énergumènes de ton genre viennent me faire chier » Je hausse les épaules, déçu de son manque d’imagination dans cette réplique ci. Bien sûr que je suis une énergumène, voyons, il n’y a rien de nouveau à cela et il ne faut pas beaucoup de temps à qui que ce soit pour s’en rendre compte non plus. Pour moi, ce n’est en rien un reproche qu’elle me fait là mais seulement une simple constatation.

« Et bien vous n'aurez rien d'autre de ma part donc si vous pouviez aller emmerder une autre personne merci bien » Son regard quitte le mien pour se focaliser sur une toile puis une seconde alors le mien en fait de même, à l’inverse, passant de ma propre toile à ses iris. Elle a un air juvénile et un teint de porcelaine, le petit ange tombé du ciel qui tente de se la jouer démon. Elle ne risque pas de m’avoir à ce jeu là. Finalement je crois venir au bout de sa patience avec ma question à propos de l’argent, ces quelques billets qui pourraient mettre le monde à feu et à sang sans que je n’arrive toujours à en comprendre la raison. J’étais heureux quand je n’avais rien, je le suis tout autant aujourd’hui que j’ai tout. « Non je travaille merci de vous en inquiéter » Sûrement de 10h à 12h, pas les week end ni les jours fériés, rien qui puisse tâcher ni même user ses parfaites petites empreintes de doigts. Elle doit être derrière un bureau à classer des dossiers et aiguiller des gens toute la journée, rien de plus, rien de moins.

Le manège qui s'ensuit me laisse rieur et je me tiens simplement en mordant mes lèvres entre mes dents, amusé au possible de la scène qui se déroule sous mes yeux et de l’état de décomposition avancé de la jeune femme qui découvre mon nom. La voilà qui revient, quelques secondes à peine après avoir voulu prendre son envol. Bien tenté, bien tenté. « Et donc c'est comme ça que vous accueillez des acheteurs potentiels ? » “Seulement les VIP.” C’est le moment où je flatte malhabilement son ego, simplement parce que ça aussi en plus du reste, ça m’amuse. “Si tu veux les toiles qui rentrent dans ton budget, on vend sûrement des porte clés à l’accueil” Portefeuille bien rempli, tu parles.

Déjà qu'elle avait pas envie d'être là, faut qu'on vienne l'emmerder royalement. Sa tenue doit faire en sorte qu'on la croit paumée dans le coin. Et pourtant ! Comme quoi, il ne faut pas se fier à une tenue vestimentaire ou à l'apparence tout court. Les personnes ayant de l'argent ne sorte pas toujours avec des marques sur elle et de la haute couture. Bien sur qu'elle en mets mais dans les occasions et sûrement pas pour une soirée prévue sur la plage. Du moins si elle arrive à se barrer d'ici à temps et c'est pas gagné. Elle remballe le gars sans une once de remords et continue de regarder les différents tableaux s'offrant à elle. Un d'eux lui fait de l'oeil. Son dévolu jeter dessus, elle va donc se renseigner où elle peut trouver l'artiste en question. Fallait vraiment que ce soit ce type qui a l'air de croire qu'il est supérieur à tout ceux qui l'entourent. Très bien ! Mais Dylane ne courbera pas l'échine devant lui, elle est bien trop fière pour cela. Bien entendu, un sourire est posé sur ses lèvres quand elle s'approche à nouveau de lui. Si cela ne tenait qu'à elle, elle lui aurait bien fait mangé mais elle se doit de rester courtoise et polie vu qu'elle vient de la part de son paternel. Arrivée à sa hauteur, elle ne le tarie pas d'éloge quant à son accueil. “Seulement les VIP.”  S'il croit qu'elle va tomber dans le panneau comme une bleue, il se trompe. Elle a été, malgré elle, élevée dans ce monde rempli de fric.  “Si tu veux les toiles qui rentrent dans ton budget, on vend sûrement des porte clés à l’accueil”  Un sourire prend place sur ses lèvres. «  C'est certain qu'avec mon simple revenu d'ambulancière, j'aurais du mal » Et surtout, elle ne serait pas dans cette exposition. «  Mais là, je viens de la part de mon paternel. Monsieur Bradford si cela vous parle et si pas, c'est pareil » Son père est connu certes mais plus souvent par les fans de sport en tout genre vu sa carrière et celles de ses frères ou alors par des fans de magazines à scandale dont elle fait souvent les frais alors qu'elle essaye tant bien que mal de mener une vie normale, enfin normale pour elle ce qui est différent de monsieur tout le monde soyons franc. Seul son métier sort du lot. Elle sort le chéquier et le regarde sans sourciller. » Du coup combien je vous prie ? » Tout ce qu'elle veut, c'est finaliser cet achat au plus vite bien qu'elle sent qu'il ne va pas lui rendre la tâche facile.

Elle essaye, la gamine. Elle essaye de se battre et elle essaye de se faire une place dans ce monde d’adulte qui n’est pas le sien. La brune essaye de nager avec les gros poissons alors qu’elle n’a pas sa place ici, elle essaye de s’en convaincre alors que cela ne fait de sens pour personne si ce n’est elle. Qu’elle essaye si cela lui fait plaisir, qu’elle tente, qu’elle perde son temps et son énergie à la tâche si c’est finalement tout ce qui l’intéresse dans ce monde. «  C'est certain qu'avec mon simple revenu d'ambulancière, j'aurais du mal » C’est d’autant plus certain désormais, en effet. Non seulement elle n’a apparemment pas l’appuie financier de ses parents que j’aurais pu croire mais aussi elle n’a pas l’apport de son propre métier. Je doute effectivement fort qu’en ayant un salaire d’ambulancière elle puisse prétendre à beaucoup de choses - même si une part de moi doute de toute façon qu’elle soit en âge de déjà avoir terminé une quelconque formation. «  Mais là, je viens de la part de mon paternel. Monsieur Bradford si cela vous parle et si pas, c'est pareil » “Tu parles toujours autant de lui ou simplement pour les grandes occasions ?” Il a l’air d’être le centre de sa vie mais il est loin d’être le mien, alors au moins on parle de lui et au mieux ce sera.

Je continue de l’observer d’un regard amusé, incertain de savoir jusqu’où est ce qu’elle sera capable d’aller dans ses idées saugrenues. » Du coup combien je vous prie ? » Mes yeux se reposent de nouveau sur la toile, le temps pour moi de me souvenir de son prix sans avoir à lui mentir. “Celle-ci est l’une des moins chères, tu as de la chance.” La peinture se situe dans la fourchette basse de toutes les oeuvres proposées à la galerie, peut être qu’après tout elle sera capable de se l’offrir. “Ça fera 1600 dollars.” J’hausse les épaules face à ce montant qui me semble plutôt dérisoire aujourd’hui. J’espère qu’elle n’a rien contre le fait de finir le mois en ne mangeant que des pâtes.

Juger sur l'apparence, c'est mal et c'est pourtant ce qu'il fait. Le regard qu'il lui porte, la façon dont il lui parle ... Et pourtant, son compte est banque ne reflète pas du tout sa tenue actuelle. Elle aurait pu faire un effort si seulement elle était ici pour son propre intérêt mais non, loin de là. Elle a été prise au dépourvue alors que son but était de se rendre à une soirée sur la plage d'où une tenue décontractée. Et maintenant qu'elle a cité son métier, il doit jubilé à l'idée qu'elle ne sorte de là qu'avec un piètre porte clef mais c'est mal connaître la brune. Le chéquier sorti, elle attend le prix en indiquant qu'elle est là pour son père.  “Tu parles toujours autant de lui ou simplement pour les grandes occasions ?” Ses lèvres se pincent pour s'empêcher de répondre de manière peu cordiale. «  Seulement quand il m'envoie acheter des trucs sans aucune importance » Elle soupire et reporte son attention sur ledit tableau et demande encore une fois le prix qu'elle en finisse. “Celle-ci est l’une des moins chères, tu as de la chance.”  Elle hausse un sourcil. “Ça fera 1600 dollars.” Si elle revient avec un tableau si bas de gamme, son père ne pas apprécier ce qui la fait soupirer. «  C'est lequel le plus chère ? Bien que je prends tout de même celui-là en plus. Il sera bien dans les toilettes.» Demande-t-elle dépitée de devoir encore passer un peu de temps dans le coin et ne manquant pas de critiquer l'oeuvre qu'elle aime bien pourtant. Elle aurait même été capable de complimenter le créateur s'il n'était pas aussi hautain et imbu de lui-même. Un couple entre et vient la saluer. Des amis de son père sans doute, elle leur remet le bonjour par politesse ne connaissant même pas leurs noms. A force de gala, elle ne peut pas tous les retenir, c'est impossible et puis cela ne l'intéresse pas le moins du monde. Mais peut-être que cela fera comprendre à cet artiste qu'elle fait partie de ce monde bien malgré elle et son fameux jeans.

Elle sort son chèque comme s’il s’agissait du Saint Graal mais pour que ce soit le cas, il faudrait au moins que les comptes en banque soient remplis et s’il y a bien quelque chose dont je doute, c’est ça. Elle peut écrire tous les chiffres qu’elle veut mais s’ils ne correspondent à rien alors on ne risque pas d’aller bien loin. . «  Seulement quand il m'envoie acheter des trucs sans aucune importance » Peu impressionné, je hausse les épaules. Sans le vouloir, elle ne fait que confirmer l’impression de fille à papa que j’ai d’elle et peu importe ce qu’elle peut dire à partir de maintenant, j’ai l’impression que cela n’arrangera en rien son cas. Tout ce qu’elle fait, elle semble le faire pour lui faire plaisir et se faire bien voir. C’est assez pathétique à vrai dire, je ne l’envie en rien. Tout l’argent du monde n’a aucune importance là dedans.

Semblant déçue face au prix que je lui donne et l’information avec, elle tente de surenchérir aussitôt. «  C'est lequel le plus chère ? Bien que je prends tout de même celui-là en plus. Il sera bien dans les toilettes.» Je m’apprêtais à lui répondre avec naturel mais nous sommes dérangés par un couple qui ne trouve rien de plus normal que de venir parler de la pluie et du beau temps avec elle, comme si c’était le lieu pour de telles conneries. Généralement les vieux se contentent de se congratuler entre eux et je souffle déjà à l’idée que leur gang soit aussi fait de jeunes âmes en perdition comme semble l’être la sienne. Une fois les présentations terminées, je suis loin de cacher mon agacement face à la situation. Je n’avais déjà pas envie d’être là mais si en plus les invités n’y mettent pas du sien, je vais réellement finir par repartir plus tôt que prévu, une fois de plus. “Dans cette exposition en tout cas, c’est la toile derrière toi. 38 000 dollars.” J’aurais pu inventer un prix simplement pour lui dégoter des sueurs froides mais je m’en tiens à la réalité des faits. La toile est immense et les matériaux ne sont pas courants, son prix est donc tout à fait justifié pour quiconque s’y connait un minimum en matière d’art. “Tu peux faire un chèque de 40 000 dollars, t’embête pas pour ça.” Je souris. Je pourrais mentir et dire que les 400 dollars supplémentaires iront à une association mais ce serait faux et je n’ai même pas le courage de me faire passer pour quelqu’un de bien. L’argent ira dans ma poche et servira pour de nouveaux projets ou autres voyages, comme c’est finalement toujours le cas. “Si tu ne veux rien de plus, j’imagine qu’on en a terminé.” A moins qu’elle se décide à acheter toute la collection de ce soir, je n’ai pas grand intérêt à rester en sa compagnie - d’autant plus alors que je rêve seulement de rentrer chez moi, peu importe que les toiles se vendent ou non ce n’est pas mon problème.

Dylane aurait pu se contenter de la première toile mais elle connaît son père ou plutôt ses amis et ils auraient critiquer le fait qu'il ait pris la moins chère. Franchement, elle a du mal à les comprendre et ça la saoule plus qu'autre chose mais peut-être moins que ce Williams qui la prend pour ce qu'elle n'est pas. Être juger, elle a l'habitude certes mais ce n'est pas pour autant qu'elle aime ça. Est ce qu'elle le fait avec lui ?! Un peu mais ce n'est que lui rendre la monnaie de sa pièce. Après qu'un couple ait fini de lui faire la conversation, elle peut à nouveau se concentrer sur son achat. Le visage de l'artiste montre bien son agacement ce qui la fait hausser les épaules. “Dans cette exposition en tout cas, c’est la toile derrière toi. 38 000 dollars.” Elle se tourne pour la regarder. Ca ne l'inspire pas plus que ça mais tant pis. «  Et bien mets la de côté, mon vieux viendra la chercher » Elle a pas envie de faire l'aller retour et puis ça rentrera pas dans sa voiture.  “Tu peux faire un chèque de 40 000 dollars, t’embête pas pour ça.”  Elle roule des yeux tout en écrivant le montant se foutant pas mal des quelques dollars en plus tant que ça pouvait le faire taire.  “Si tu ne veux rien de plus, j’imagine qu’on en a terminé.” Elle opine du chef. «  En effet, déjà que je voulais pas venir » Elle soupire et lui tend le chèque bien dodu tout en espérant ne pas le recroiser mais dans la vie rien n'est moins certain et encore moins vis à vis de son métier. Elle salue le couple d'un signe de tête et sort de là pour se rendre à sa voiture garée juste devant. Elle grimpe dedans sans demander son reste et peut enfin se rendre à cette soirée tant attendue.