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@lily mcgrath

Une semaine. Rien de plus, rien de moins, et pourtant le temps avait été comme perturbé durant les sept derniers jours. Le sommeil avait été quelque peu aux abonnés absents, pour Ezra, depuis qu’il était rentré chez lui presque en courant le weekend d’avant, alors que le soleil amorçait de façon significative son ascension vers le zénith. Comme un voleur, comme un étranger - et tous ces adjectifs lui collaient à la perfection à la peau. Il avait volé quelque-chose qui ne lui appartenait pas, il se sentait depuis comme un étranger dans son propre corps. La nuit qu’il avait partagé avec Lily n’aurait pas du exister, et si sur le moment l’idée lui semblait être la bonne, les regrets quelque peu amers avaient fait leur chemin dans son esprit depuis le moment où il était sorti de chez elle, depuis l’instant où il avait laissé le café en arrière.

Mais s’ils en étaient tous les deux arrivés jusqu’à commettre le geste de trop, la faute ultime, ce n’était pas sans raison. S’il connaissait parfaitement les siennes et s’il savait qu’il y avait des affaires dans son coeur et dans sa tête qu’il devait remettre en ordre, il en était de paire pour Lily. Il la connaissait, Ezra, malgré le temps passé et les années écoulées. Pendant une période, ils s’étaient livrés à coeurs ouverts l’un à l’autre sans retenue, et les souvenirs de ces moments à ne s’effaçaient pas aussi facilement. Il connaissait bien Lily, Ezra, et il savait que cette façon d’agir n’était pas sienne. Elle aimait son mari, il ne doutait absolument pas des sentiments de la jeune femme. C’était le pourquoi elle les avait compromis qui le rendait quelque peu curieux, surtout très inquiet.

Une semaine s’était écoulée depuis qu’ils s’étaient revus et il n’avait pas encore eu de retour de la part de la jeune femme. Il mentirait s’il disait que ça ne le tenait pas un brin éveillé la nuit et que ce manque de nouvelles pouvait être une cause parfaite de son manque de sommeil. Une semaine qu’il lui avait indiqué qu’ils en rediscuteraient, sans faute, et qu’il ne lui laissait pas le choix. Parce-qu’au delà de devoir mettre des mots sur leur geste, des explications sur l’impensable, il y avait quelque-chose qui rongeait Lily de l’intérieur et qu’il fallait expulser. Ezra refusait qu’elle continue de vivre avec un malêtre intérieur et s’il fallait qu’il soit fautif dans cette histoire pour qu’elle s’allège l’esprit et le coeur, il en prenait la responsabilité. Mais pour se faire, il fallait qu’elle revienne vers lui. C’était le deal, il attendait de ses nouvelles et elle viendrait le voir, ils discuteraient et adviendrait ce qui pourrait. Alors, lorsque le septième jour, son téléphone émit la sonnerie habituelle indiquant l’arrivée d’un nouveau messages texte, la curiosité d’Ezra était à son comble en attirant l’appareil. Je passe ce soir chez toi, à quoi il répondit dans les dix secondes suivantes un Je t’y attendrai. - comme il lui avait promis.

Le vent soufflait fort le soir arrivé, la pluie battait même sur les carreaux de l’appartement d’Ezra. L’hiver commençait à amorcer sa fin pour l’année en cours mais il se faisait plus présent que bien des semaines plus tôt. Ezra se trouvait dans son canapé, une tasse de café à la main et des papiers concernant le garage dans l’autre lorsque la sonnette vint retentir dans tout l’appartement silencieux. Posant le contenu de ses deux paumes à même la table basse du salon, il vint inspirer une première fois avant d’expirer longuement. Le reste de la soirée s’annonçait long, il le savait, il le sentait. Mais pour rien au monde il se défilerait. C’était une attitude qu’il adoptait, de temps à autres, avec certaines personnes. Lily ne faisait pas partie de cette liste là. Quelques pas en direction de la porte et une seconde de plus après, il vint ouvrir la porte de son appartement pour tomber sur la jeune femme.

Remettre de l’ordre dans une vie qui justement n’a plus rien d’ordonnée : c’est ce qu’elle attendait avant d’aller voir Ezra. Elle attendait d’avoir revu Matt, elle attendait un miracle juste après leur discussion, justement. Il n’y en a pas eu et ses affaires ainsi que ses chats ont déménagés chez ses parents, eux qui habitent en centre ville depuis quelques mois à peine. Ils sont désormais trois à détester leur appartement mais une seule enchaîne les heures à l’hôpital comme si elle n’avait ni besoin de manger ou se reposer. Elle déteste rentrer chez elle, elle déteste retrouver cette minuscule chambre sans vie qui n’a rien à voir avec l’appartement de Matt qui était devenu sien et surtout, surtout, elle déteste ne pas savoir quoi faire de la bague trônant fièrement sur son annulaire. A défaut d’être capable d’arranger quoi que ce soit de ce côté là, Lily tente au moins de tenir Ezra au courant des récents événements et des possibles répercussions sur sa propre vie. Elle s’en veut déjà bien assez d’avoir dû lui dire au revoir par l’issue de secours, la brune ne veut pas lui rendre la vie plus difficile encore. Il ne mérite pas ça, même si elle pense encore et toujours qu’il est un sacré imbécile et que c’est énervée au possible qu’elle en vient à toquer à sa porte. Les bras croisés, son pied battant la mesure contre le béton de l’entrée, elle se répète mentalement un discours qu’elle ne suivra pas. Ses cheveux sont trempés et les gouttes ruissellent sur son visage malgré le fait qu’elle n’ait été sous la pluie que quelques dizaines de secondes à peine. Devant le Beauregard, il y a pourtant bien longtemps qu’elle ne se soucie plus de son apparence de jeune femme parfaite.

Lorsqu’il ouvre la porte et qu’elle semble redécouvrir son visage pour la première fois, une part d’elle même tente de négocier l’idée principale et d’abandonner la mission mais ce qu’il lui reste de conscience se refuse une telle chose. Elle aurait voulu passer une main amicale dans son dos, l’embrasser sur la joue et ensuite se faufiler dans son appartement mais au lieu de tout cela elle reste sur le pas de la porte, les bras croisés et la mine fermée. Ses lèvres ont déjà pris un aspect à peine plus violacé mais elle reste trop fière pour lui montrer qu’elle a froid à cause du temps horrible. “Tu comptais me le dire quand ?” Les accusations tombent sans qu’elle ne soit encore capable de les expliquer pleinement. Elle est bouleversée rien qu’à l’idée d’y penser mais le prononcer à haute et intelligible voix la rend réellement malade. Elle était la seule supposée avoir fauté dans toute cette histoire, il devait être blanc comme neige, il devait être le modèle, il ne devait surtout, surtout pas être en couple lui aussi. “Ta copine ? Sérieusement Ezra, une copine ?” Le problème n’est pas qu’il soit en couple et bien loin de là ; dans d’autres circonstances elle lui aurait rappelé de se laver les dents le matin en plus du soir et que non, manger des chips n’est pas un repas à part entière. Elle lui aurait souhaité tout le bonheur du monde - juste après avoir quand même vérifié qu’il ne sort pas avec n’importe qui - et aurait été sincèrement heureuse pour lui autant que pour elle. Cette fois-ci tout est différent et Lily s’autorise enfin à exploser face à lui après avoir dû garder les apparences intactes pendant d’interminables heures à son travail. Parce qu’en plus de sortir avec une fille (femme, qu’importe), il a aussi fallu qu’il la choisisse dans le même hôpital où la McGrath travaille. Il est vraiment doué pour compliquer les choses et elle, elle est bien décidé à ne pas faire un seul pas chez lui avant d’avoir eu toutes les explications demandées. “T’étais pas supposé … T’étais pas supposé avoir fait une erreur toi aussi. Ça devait être juste mon problème, avec Matt … Pas toi et Alice.” Sa seule vie était supposé partir en fumée ; lui, aussi imbécile puisse-t-il être, ne devait pas être impacté par les choix impulsifs de la brune. Incapable de correctement expliquer une telle chose à l’oral et lui dire ô combien elle tient à lui alors qu’il a ce don si incroyable de l’énerver, elle se contente de parler avec ses mains et lever les yeux au ciel pour mieux les reposer dans les siens ensuite. “Bordel, Ez.” Elle conclut d’un timbre de voix plaintif, totalement perdue. Il est le seul à qui elle pourrait totalement se confier sur tout ce qu’il se passe en ce moment dans sa vie et la seule chose qu’elle trouve à faire c’est lui reprocher des erreurs basées sur des quiproquos. La vérité, c’est qu’elle ne sait toujours pas comment s’y prendre et que fondre en larmes dans ses bras semble inconcevable. Ils sont des adultes, ils devraient régler leurs problèmes comme tels.

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Son échine vint être parcourue d’un courant électrique qui ne lui plaisait guère lorsque ses prunelles se posèrent sur la silhouette de la jeune femme - et pourtant, il s’attendait à la trouver derrière la porte, il y était préparé. Mais si ce n’était pas la première fois que cela arrivait, mais si ce n’était qu’une image vue mille et une fois, tout ceci restait inédit pour eux deux. Si jusque là, ils s’étaient évertués à rester dans le droit chemin, ce dernier courbait dangereusement depuis les sept derniers jours. Et à aucun moment, cela plaisait à Ezra. L’instant partagé avec Lily sept jours plus tôt avait été des plus agréables, il en nierait pas ça. Mais ce n’était pas eux - et ce n’était surtout pas ce que leur situation actuelle leur permettait. Ils avaient donné dans ce domaine, des soupirs et des regards attrapés à la volée, des années auparavant; alors qu'ils y étaient autorisés et que c’était un élément de tout un tout qui se reconstruisait au fur et à mesure qu’il se détruisait autour d’eux. Désormais, la situation n’était plus telle et si elle s’effritait ces derniers jours, c’en était simplement dû à leur folie passagère. Alors, inspirant une fois supplémentaire une bouffée d’air supposée lui donner du courage, Ezra vint se redresser quelque peu - et n’eut le temps de venir prononcer la moindre parole que déjà, Lily prenait les devants. « Tu comptais me le dire quand ? » Et s’il s’attendait à tout et à peu près n’importe quoi comme introduction de la part de la jeune femme, s’il s’attendait en réalité à subir la colère qui devait la ronger depuis ces derniers jours, les quelques mots qu’elle venait de prononcer n’allaient pas dans ce sens là. Alors, il fronça un brin les sourcils, cherchant dans son regard une explication rapide qu’il ne saurait saisir jusque là. « Te dire quoi quand ? » Le reproche n’étirât pas présent dans sa voix, simplement l’étonnement. Car Lily n’attendait pas à ce qu’il lui avoue qu’ils avaient dérapé trop loin et que l’erreur ne devait plus être commise - ils avaient compris avant même de la réalité tous les deux très bien que c’était le cas, et elle avait été la première à le lui rappeler au petit matin. « Ta copine ? Sérieusement Ezra, une copine ? » Ah ?

Ah. Ah. Ah, ah. Merde. S’il avait eu besoin d’une seconde ou deux pour comprendre la référence que Lily était explicitement en train de lui faire, Ezra voyait désormais exactement de quoi elle parlait. Il lui manquait certains éléments pour comprendre comment elle avait pu venir à être au courant de cette situation, mais au moins il comprenait la référence et comprit, par association et l’instant immédiatement suivant, pourquoi la jeune femme vint perdre un brin le contrôle de la situation. « T’étais pas supposé … T’étais pas supposé avoir fait une erreur toi aussi. Ça devait être juste mon problème, avec Matt … Pas toi et Alice. » La dite Alice, dont elle connaissait même le prénom, qui habitait en réalité la porte juste à côté de la sienne. Et si Ezra n’était en aucun cas dérangé par l’idée que la Alice en question puisse entendre toute la discussion entre Lily et lui, puisque Matt était désormais au courant de l’histoire, d’autres personnes ne devaient, elles, pas être au courant de l’explication qu’il s’apprêtait à donner à la jeune femme. Cependant, savourer un instant le moment présent lui semblait plus urgent que de faire rentrer Lily dans son appartement, alors il vint croiser les bras sur son torse, retenant le petit sourire qui était en train de s’esquisser sur ses lèvres de ne pas se faire trop présent pour ne pas rendre la jeune femme plus en colère qu’elle ne semblait déjà l’être. Oh, il allait se faire envoyer balader lorsque Lily allait s’apercevoir qu’il se moquait d’elle présentement, mais il s’en fichait quelque peu. L’occasion était trop belle pour ne pas la saisir. « Bordel, Ez. » En entendant le ton employé sur ces derniers paroles, le jeune homme ne put retenir plus longtemps un petit rire, venant secouer la tête et lever les yeux au ciel en simultané, alors que son sourire se faisait de plus en plus présent sur ses lèvres - et surtout de plus en plus insupportable. « Quelle histoire affreuse, tu as raison. » Il vint tendre sa main en avant, ses doigts rassemblés et pointant vers le haut, plissant le bout du nez et abusant du côté théâtral dans ses gestes. « Frappe moi les doigts d’avoir été un si méchant garçon, je le mérite ! » Le petit rire qui s’en suivit se fit, lui, entendre dans tout le couloir de l’immeuble - et donna le signal à Ezra qu’ils se devaient de continuer cette conversation à l’intérieur de l’appartement. Laissant alors s’échapper un dernier sourire pour se calmer, il vint se décaler de l’encadrement de porte - sans perdre son petit sourire un provocateur, s’il fallait être tout à fait honnête. « Entre, s’il te plait, Lily. Tu peux pas rester sur le palier et en plus, t’es trempée jusqu’aux os, tu vas attraper la morte. Je vais aller te trouver des fringues sèches. » Et sans attendre qu’elle ne lui réponde, il vint finalement disparaitre le temps d’un instant dans sa chambre, parti à la recherche de quelque-chose pour que la jeune femme puisse se mettre au sec, ne lui laissant par la même occasion aucune autre option que de rentrer dans l’appartement pour continuer cette discussion.

Elle a voulu jouer la carte de la déstabilisation tout en sachant très bien qu’Ezra mettrait un certain temps avant de comprendre où Lily voulait en venir mais voilà que maintenant elle se fait prendre à son propre jeu. La brune lit dans ses yeux - et sur son stupide visage de stupide garçon qui a oublié de grandir - un amusement qui n’a pas lieu d’être, pas alors qu’elle passe ses jours et ses nuits à s’inquiéter pour chaque chose en ce monde. Si elle n’est pas heureuse en ce moment alors elle se dit égoïstement qu’il ne devrait pas l’être non plus et qu’il n’en a pas le droit.

Alors qu’elle avait eu l’impression de faire le plus gros sacrifice qui soit en évoquant devant Ezra lui même avoir fait une erreur, mot pour mot, elle réagit ensuite quand une enfant vexée dès lors qu’il ne sait qu’y répondre en rigolant. Il a toujours eu ce don de tout dédramatiser qu’elle lui enviait dans le temps mais aujourd’hui justement le contexte a changé, tout a changé et eux avec, raisons pour lesquelles il n’était absolument pas supposé réagir d’une telle manière. Le rire du Beauregard n’est qu’un élément de plus ajouté à la longue liste de tous ceux qui la déstabilisent, alors qu’il a justement toujours personnifié la structure solide sur laquelle elle s’est retenue pendant de longues semaines et d’autres longs mois. La stupide structure solide, précisons le bien une fois de plus alors qu’il tend ses doigts de manière théâtrale et elle de laisser ses yeux rouler en direction du ciel par pure agacement. Il la connait par coeur, ce n’est pas un secret, mais il utilise toutes ses clés pour ne la faire qu’enrager un peu plus à chaque seconde. Il est bien vrai qu’elle sait prendre la mouche rapidement, mais lui a un don certain pour battre tous les records. « Quelle histoire affreuse, tu as raison. » Bien sûr qu’elle a raison, la question ne se pose même pas et s’il continue d’employer ce ton elle va bien vite se souvenir de la liste exhaustive de tous les poisons à utiliser contre le corps humain.

Si elle est une enfant qui se vexe trop rapidement alors lui en est un autre qui ne sait toujours pas quand est ce qu’il devrait s’arrêter de rigoler - surtout quand il s’agit de rigoler d’elle. « Frappe moi les doigts d’avoir été un si méchant garçon, je le mérite ! » Les bras de Lily se serrent un peu plus autour de sa poitrine, tant comme signe de mécontentement que parce que la brise n’arrange en rien l’aspect gelé de sa peau trempée. “Garde ce genre de discours pour elle.” Même répéter le nom de la présumée petite amie du brun revient trop pour elle. Avoir trompé son mari était déjà inimaginable mais la simple idée qu’ils aient échoué des deux côtés au lieu d’un seul la rend d’autant plus malade. Ezra est l’éternel adolescent, l’imbécile heureux, l’ami qu’elle compte garder pour toujours, celui qui n’a pas intérêt à mourir d’une autre main que la sienne le jour où il aura fait la dix septième blague de trop. Il est beaucoup de choses, Ezra, et une infinité d’autres, mais il n’est pas celui qui trompe sa petite amie. Lily refuse ce scénario, elle demande un voyage dans le temps, elle demande à ce que cela puisse être supprimé. Pour lui, cet imbécile qui mérite tout de même d’être heureux.

« Entre, s’il te plait, Lily. Tu peux pas rester sur le palier et en plus, t’es trempée jusqu’aux os, tu vas attraper la morte. Je vais aller te trouver des fringues sèches. » Toujours aussi renfermée sur elle même, elle esquisse tout de même son premier pas dans l’appartement en suivant le sillage du brun, déjà loin. Elle n’a de toute façon besoin de personne pour se repérer en ces lieux qu’elle connaît par coeur, assez pour prendre le temps de ranger la vaisselle propre dans chacun des tiroirs, remettre la nourriture à sa place dans les placards, enlever les bières vides du plan de travail et en nettoyer les traces sur le bois. Elle regrette de ne pas avoir pu faire la vaisselle le temps qu’il soit loin, parce que ça aurait pu l’occuper un instant de plus. Aujourd’hui, tout est bon à prendre, même lorsqu’il s’agit d’éviter le regard du seul homme en qui elle n’a jamais cessé de croire durant toutes ces années. “Je change pas de sujet tant que tu ne m’as pas expliqué.” Elle a un nom, elle a un visage, elle a une profession bien trop semblable à celle de Lily ; ce serait impossible de l’oublier ou même nier son existence. “Je veux juste savoir si tu l’as trompée. Si tu étais déjà en couple avec elle il y a une semaine, si tu l’as trompée avec moi , si toi aussi tu as fait une erreur ; si moi aussi je dois voir une personne et savoir que je suis responsable de la destruction d’un pan de sa vie.

Hey, au fait. “Matt sait.” qu’elle balance sans transition, désireuse de se délester de ce poids pesant sur ses épaules tremblantes à cause du froid, adéquation parfaite avec ses dents à qui elle refuse de claquer pour ne pas montrer un énième signe de faiblesse - son humanité, qu’importe. Elle va râler, bouder, lancer un regard noir, refuser les fringues tendues par Ezra avant de finalement se raviser, non sans lâcher une menace au passage. Après tout, il l’a déjà observée dans des états bien plus pitoyables que celui-ci encore. “Est ce que t’as fait ça parce que c’est à lui que je suis mariée ?” La question ne faisait pas partie de toute la batterie qu’elle se répétait mentalement et pourtant elle arrive aussi naturellement que douloureusement alors qu’elle relève ses yeux perçants dans les siens. Elle refuse de croire qu’il l’aurait utilisée tel un vulgaire pantin mais avant d’avoir une réponse franche de sa part, elle restera incapable de s’ôter l’idée de la tête.

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Il devait se mordre l’intérieur de la joue pour ne pas venir rigoler encore davantage par rapport à ce qu’il était déjà en train de faire. Il s’en voudrait plus tard, sûrement - peut-être - de se moquer de la jeune femme de la sorte; mais pour l’instant il préférait prendre ses premières paroles à la légère et venir balayer d’un rire et d’une blague la gravité de la situation, plutôt que d’aborder un air si sérieux comme elle le faisait présentement. Oh, loin d’Ezra l’idée de ne pas prendre tout ça au sérieux. Il savait très bien à quel point ils avaient fauté et la façon dont cet élément seul pouvait déterminer le reste de leurs vies. Mais il savait aussi à quel point cela pouvait les tirer vers le bas, les amener vers des tords et des travers qui ne se devaient pas d’adopter - pas de suite, et pas sur le long terme. Alors, il préférait venir ajouter sa touche d’humour personnalisée, sa pointe de malice qui viendrait, à coup sur, enrager Lily. Et plus elle enrageait, plus il y prenait plaisir - elle le savait, mais l’un comme l’autre ne savait s’empêcher d’adopter ce comportement naturel. « Garde ce genre de discours pour elle. » Pour Alice, qu’elle venait souligner avec le elle sur ces paroles. Le monde était étrangement fait, il fallait l’avouer. Quelle était la probabilité que Lily apprenne pour le couple que formait Alice et Ezra, alors qu’ils n’en étaient pas à s’affichait à tord en public et à en parler à travers le reste du temps ? Le jeune homme ne savait même pas comment elles se connaissaient, mais il avait bien hâte d’entendre la partie de cette histoire - et, à la suite, de venir raconter son point de vue à lui.

Pour pouvoir lui expliquer ce dernier, cependant, il se devait de faire entre Lily dans son appartement et de fermer la porte à leur suite. Il ne pouvait pas se permettre de lui expliquer la vraie situation dans le couloir de l’immeuble. Il ne lui laissa alors pas d’autre choix que d’entrer dans l’appartement, lui faisant miroiter l’histoire complète et plus encore si elle le désirait, alors qu’il y avait tout un autre monde duquel il devait discuter et duquel Ezra désirait parler. Parce-que le couple qu’il soit-disant formait avec Alice, c’était une chose. Le fait que Lily l’apprenne et qu’elle imagine que cette nouvelle variable puisse ajouter des problèmes à la situation, c’en était une autre. Qu’ils en viennent à oublier le pourquoi ils devaient discuter à la base du problème - ce n’était pas envisageable. Ezra laissa le loisir à la jeune McGrath de le suivre à sa suite dans son appartement, vagabondant un instant ou deux de sa chambre à sa salle de bain, à une distance raisonnable de son regard à elle, l’incitant sans réellement le vouloir et tout en le désirant du fond du coeur qu’elle fasse comme chez elle. La cuisine parfaitement rangée lorsqu’il revint avec un sweatshirt, un jogging et une serviette sèche à la main quelques minutes plus tard témoignaient que Lily avait fait comme chez elle. Dans d’autres circonstances, il aurait levé les yeux au ciel - mais il avait perdu la position de pouvoir à partir du moment où il avait laissé l’appel de la chair le guider.

« Je change pas de sujet tant que tu ne m’as pas expliqué. » Oh, il n’avait en réalité aucun espoir quand à une issue de secours inverse. Elle était têtue, la gamine, lorsqu’elle le désirait. « Je veux juste savoir si tu l’as trompée. » Ezra vint soupirer un brin, perdant son petit sourire malicieux pour venir aborder un visage bien plus sérieux, bien plus calme également. Foulant le sol de la cuisine de quelques pas, il vint attraper deux bières dans le bac à légumes du frigo qu’il ouvrit dans la foulée - en posant une à hauteur de Lily, juste à côté des vêtement secs posés à même la table, qu’il lui avait fourni; si elle ne voulait rien de tout cela, c’était son problème désormais. L’instant suivant, il tirait une chaise pour s’asseoir, incitant du menton la demoiselle à en faire de même. « Et il faudra que tu m’expliques comment tu peux être au courant de ça. » Il haussa un sourcil, regard dirigé et insistant envers la jeune femme, avant de venir boire une longue gorgée de bière. « Alice et moi ne sommes pas en couple. » Une seconde de silence pour laisser le temps à Lily d’attraper le premier wagon de l’histoire. « Donc non, je l’ai pas trompé. » Il s’apprêtait à ajouter je ne ferai jamais un truc pareil, et puis même sa stupidité naturelle réussit à se rappeler que, s’ils avaient cette conversation aujourd’hui Lily et lui, c’était parce-qu’elle avait fait ça et il ne désirait en rien la juger; de plus, il était facile d’avancer de telles paroles sans avoir la capacité de lire l’avenir. « On fait semblant d’être en couple pour faire rager l’ex-copain de Alice. En réalité c’est ma voisine. Et on s’entend bien. Mais ça va pas plus loin. » Il haussa rapidement les épaules, glissant son regard de nouveau en direction de la jeune femme. Il s’attendait à mille et une réactions de sa part désormais. « Ce que je viens de te dire là, personne est au courant et devant le reste du monde, on fait croire dur comme fer au mensonge. Alors je comptes sur toi pour pas nous trahir. » Comme je te trahirai jamais que ses prunelles lui criaient d’une voix déchirante.

Parce-qu’en réalité, si Ezra osait révéler ce genre d’information à Lily alors qu’Alice et lui s’appliquaient si bien à garder le secret depuis plusieurs mois, c’était car il avait confiance en elle et que, réellement, il ne la trahirait jamais. Les secrets de Lily, il les connaissait par coeur et sur le bout des doigts. Il avait été celui, pendant une période, à qui elle venait les confier et avec qui elle en parlait. Aujourd’hui encore, qu’il soit lui-même un de ses secrets perdurait presque la tradition. Alors, il lui faisait pleinement confiance pour garder son secret comme il gardait lui le sien. « Matt sait. » Ah. Ca, en revanche, ce n’était pas prévu au programme - pas de suite, pas dans ses pensées en tous cas. Venant avaler une gorgée de bière de travers, menaçant de passer définitivement l’arme à gauche, il vint quelques instants plus tard relever un regard peu assuré en direction de la demoiselle. « Il sait… Il sait ? » Juste pour être sûr d’être sur la même longueur d’onde qu’elle. Même si l’évidence transparaissait dans ses mots, même si elle ne pouvait être autrement que cette dernière. Il avait besoin que l’on vienne mettre mille et une formes différentes sur ces mots pour lui faire pleinement comprendre que, finalement, il n’était déjà plus son secret à elle. « Il a dit quoi ? » Question idiote. « Est ce que t’as fait ça parce que c’est à lui que je suis mariée ? » Interrogations entrecroisées, regard qui vint se baisser. La question de Lily n’était, elle, pas idiote. Ce serait même le dernier adjectif qui pourrait venir à l’esprit d’Ezra pour la décrire. A tel point que, pas plus tard que le lendemain des faits, il s’était posé la même question. Avait-il osé franchir ce cap parce-qu’il s’agissait de lui, et de personne d’autre ? Avait-il été manipulé par des ressentis qui n’étaient plus censés avoir lieu et qui dataient d’un autre temps ? Les interrogations avaient tourné et tourné dans son esprit, avaient remué ses pensées, durant les sept derniers jours écoulés. Il en avait tiré quelques brides de réponse, mais s’était aperçu qu’il était incapable de formuler un quelque-chose de complet. « Est-ce que tu préfèrerais que ce soit le cas ? » Des mots comme presque chuchotés, à peine imaginés. Il savait que ce n’était pas la réponse qu’elle attendait, mais Ezra savait que c’était une question qui se devait d’être posée. Pour remettre les choses un peu plus à plat. Pour savoir s’ils marchaient tous deux dans la même direction. Si Lily désirait que ce fusse le cas, qu’il n’ait qu’assoupi une vengeance des plus idiots à travers son existence - il s’accommoderait de cette version; promis, ça lui suffirait également, si ça leur permettait de mettre leurs conflits conjugaux de côté. Mais il ne désirait pas avancer de tels faits - surtout vu la proportion de fausseté qu’ils comportaient - si tel n’était pas son désir à elle.

La brune garde ses bras croisés sous sa poitrine, bien décidée à lui prouver à quel point elle n’est pas encline à rigoler de quoi que ce soit ce soir - et tout autant encline à ne pas lui montrer qu’elle crève de froid et que son orgueil la tuera un jour. « Et il faudra que tu m’expliques comment tu peux être au courant de ça. » Elle l’observe sortir les bières et se prépare mentalement à venir nettoyer la trace qu’elles auront laissé sur la table, non loin des habits qu’elle s’apprête à prendre à un moment avant de lui laisser un regard noir qui signifiera “merci”. Ses explications à propos d’Alice n’arriveront que bien longtemps après les siennes et cela a tout à voir avec le fait qu’elles sont infiniment moins importantes à éclaircir.

« Alice et moi ne sommes pas en couple. »

Elle s’était attendue à tout un tas d’explications différentes dès lors qu’il s’agissait d’Alice mais aucune d’elles n’en venait à la conclusion qu’ils n’étaient pas en couple. Elle leur a imaginé une histoire cachée, elle leur a donné un amour interdit, elle s’est dit qu’ils se préparaient à fuir à l’autre bout du monde. L’infirmière leur a imaginé tout ce qui était possible, elle leur a donné toutes les circonstances atténuantes de l’univers. Dans chaque scénario, pourtant, ils étaient un couple. Cela semblait tomber sous le sens que, finalement, elle n’a jamais pensé une seule fois à remettre en cause le plus gros mensonge de toute cette histoire : non, Ezra n’est pas en couple - et Alice non plus, alors, mais autant dire qu’elle est le cadet de ses soucis. Une part d’elle est soulagée qu’il ne soit pas stupide au point de tromper sa copine et une autre part ne peut que déjà anticiper à quel point cette révélation ne rend en rien la situation plus facile à vivre. Il ne lui reste qu’une seule issue de secours. Finalement, elle s’autorise à abaisser quelque peu ses barrières et à décroiser les bras, venant se poster face au Beauregard, sa bière entre ses mains. « Donc non, je l’ai pas trompé. » Donc oui, Lily est la seule à avoir trompé son petit ami - lequel est, au delà de ça, son mari. Son esprit reste toujours autant tiraillé mais elle ne peut s’empêcher de se sentir rassurée d’une telle annonce, au fond. Pour la première fois depuis longtemps, elle reste silencieuse et se retient de tout jugement de valeur et de tout reproche, ses yeux fuyants ne trouvant refuge nulle part et ses lèvres ne se collant plus que désormais au goulot de la bouteille. « On fait semblant d’être en couple pour faire rager l’ex-copain de Alice. En réalité c’est ma voisine. Et on s’entend bien. Mais ça va pas plus loin. » Les explications l’emmènent à sourire doucement, elle qui se souvient avoir joué à ce jeu là lorsqu’elle avait sûrement dix ans. Ezra est un éternel enfant, ce n’est un secret pour personne, mais une part de la jeune femme ressent une fierté mal placée à l’idée qu’il vienne en aide à une amie, comme si elle avait quoi que ce soit à voir là dedans.

Son sourire est éphémère, il blêmit dès lors qu’il prend la relève et devient le plus sérieux des deux, le temps d’un simple instant. « Ce que je viens de te dire là, personne est au courant et devant le reste du monde, on fait croire dur comme fer au mensonge. Alors je comptes sur toi pour pas nous trahir. » La bouteille est reposée sur la table et ses yeux dans les siens. A cela elle n’a pas besoin de réfléchir un seul instant ni même de peser le pour et le contre. Elle le fait tout le temps, pour tout et n’importe quoi, des choses les plus futiles du quotidien aux plus grandes décisions de sa vie. Elle le fait tout le temps, sauf lorsqu’il s’agit d’Ezra. “Tu sais bien que je ne dirai rien.” Tout comme lui garde ses secrets depuis toutes ces années, elle en fait de même avec les siens. Il s’agit là même de tout un pans de leur relation qui n’appartient qu’à eux et qu’elle n’a jamais abordé avec qui que ce soit d’autre. Alice n’est pas sa petite amie, c’est finalement tout ce qui importe. Maintenant, elle respire au moins un peu mieux - mais ne risque pas pour autant de s’excuser d’avoir eu une attitude aussi sauvage à son égard.

Et même si la McGrath aurait préféré parler du petit jeu amoureux-non-amoureux d’Alice et Ezra plus longtemps, elle sait pourtant que sa visite n’a rien de joyeuse et que plus ils tourneront autour du pot et plus ce sera difficile d’aborder le véritable sujet du jour. Elle se lance donc la première, l’air grave et l’esprit en vrac. « Il sait… Il sait ? » Déjà elle ressent le besoin de se justifier et d’arrondir les angles, pourtant. Il n’a pas de blague en stock, il n’a même plus son rire d’enfant qui a oublié de grandir - elle aurait préféré entendre ça plutôt que la crispation qu’elle décèle sous ses mots. “On nous a vu. Tout le monde sait au DBD.” Ce n’est pas elle qui a trahi leur nuit, elle le promet. Ce n’est pas elle qui a eu à choisir entre sa fidelité à Ezra et celle qu’elle voue à Matt - même si, dans un sens, c’est bien ce qu’elle a fait. Le monde a su à l’instant même où elle l’a embrassé, ils ont tout deviné à la seconde où ils ont disparu du champ de vision commun. Ils n’ont même pas pensé à se cacher, les imbéciles qui se pensaient déjà rois du monde. Ils auraient pu replonger dans les bras l’un de l’autre à n’importe quel moment lors de ces longues dernières années, chacun cultivant à merveille son célibat, mais il a fallu qu’elle décide de se marier pour qu’ils agissent. L’ironie fait mal, elle ramène à la surface une infinité de remords. « Il a dit quoi ? » Aussitôt Lily hoche la tête de la négative, elle l’adulte qui refuse pourtant de se remémorer des souvenirs par prétexte qu’ils font mal. Ses yeux se ferment à peine alors qu’elle se replie sur elle et trouve refuge dans sa coquille. Les habits posés sur la table lui servent d’excuse parfaite, elle n’aura qu’à prétexter que ses tremblements sont dûs au froid quand bien même elle n’est pas si trempée que ça et que l’intérieur de son appartement chauffé n’a rien à voir avec la nuit qui tombe sur la ville. Elle attrape la pile rapidement avant de se diriger dans la salle de bain sans même avoir à se faire guider en ces lieux, laissant simplement un “Rien.”, amer, dans son sillage. Matt n’a rien dit, si ce n’est un relève toi alors qu’elle était pitoyablement assise contre la porte et un je ne sais pas alors qu’elle lui a demandé, plus pitoyablement encore, s’il restait encore de l’espoir à propos d’un ‘nous’. Depuis, plus rien, et elle préfère oublier cela en enfilant à la hâte des habits secs pour se donner une seconde de répit par la même occasion, quitte à laisser Ezra seul avec ses questionnements. L’infirmière s’offre de longues secondes ingrates et tout autant de profondes inspirations avant de revenir dans la cuisine, ses jambes repliées sous elle, la bière salvatrice de nouveau entre ses mains. “Je sais pas s’il me pardonnera un jour. Il a quitté l’appart, je sais même pas où il est maintenant. Je suis retournée chez mes parents en attendant.” Personne d’autre qu’Ezra n’aurait pu entendre ces confessions, aussi simples puissent-elles sembler être. Elles sont pourtant la preuve d’une humanité et d’une sensibilité que la brune ne cesse de cacher au reste du monde, à une seule exception près depuis tant d’années.

De la longue liste de ses questions existentielles, elle sort enfin la dernière du chapeau, celle qui lui ferait le plus de mal s’il venait à lui donner la mauvaise réponse. La brune forme à peine ses mots et boit une gorgée de bière supplémentaire une fois ces derniers envolés, déjà pressée de passer à autre chose. « Est-ce que tu préfèrerais que ce soit le cas ? » Généralement elle n’aurait été que plus exaspérée encore d’un tel renvoi de question, mais pas cette fois ci. Bien au contraire, elle se trouve être plus émue qu’autre chose, là où elle pense déceler une part de vulnérabilité de son homologue - ou peut être a-t-il enfin appris à se moquer d’elle avec discrétion, qui sait. “Non, bien sûr que non.” Elle ne veut pas être la blonde écervelée de l’histoire, celle que le reste du monde prend pour son pantin articulé et s’en sert dans le simple but d’arriver à ses fins. Égoïstement, elle préfère qu’il ait été guidé par d’autres sentiments, ne serait-ce la nostalgie d’un passé aujourd’hui révolu. “J’aurais préféré ne faire de mal à personne, c’est tout. Il ne mérite pas ça.” Défendre Matt face à un Ezra qui ne l’accuse (pour le moment) de rien, c’est une situation qu’elle n’aurait jamais cru avoir à vivre. Elle se dit que si elle s’excuse assez alors son mari finira peut être par entendre ses paroles. Elle se dit que si elle parle assez à Ezra de son mariage alors ils n’auront pas à avoir cette discussion qui dit qu’ils ont fait quelque chose de mal, bien loin de tout ce qui lui a un jour été inculqué à l’église. Son éducation est tout ce qu’il lui reste quand ses sentiments, eux, n’ont rien de fiable en cet instant. “Je suis rassurée que tu sois pas en couple. Je me sentais mal à l’idée de lui mentir.” Tant de confessions qui, encore une fois, n’auraient jamais pu être faites face à qui que ce soit d’autre. “Mais t’as pas répondu à la question.” Est ce que tu as agi par pure vengeance, Ezra ?

leave a light on.

@lily mcgrath

Si le début de cette conversation l’avait, pendant un temps, fait sourire plus que de raison, le sérieux était de nouveau de mise sur le visage d’Ezra. Il n’était pas en couple avec Alice, mais le reste du monde pensait bien que c’était le cas et les deux complices comptaient garder cette version là intacte autant de temps qu’il leur était possible de le faire. Pour le bien d’Alice et de ses histoires. « Tu sais bien que je ne dirai rien. » Il le savait et il se serait même idiot d’en être venu à lui poser la question. Il le savait, parce-que c’était exactement la réponse qu’il lui aurait donné si elle avait posé la même question. Il le savait, parce-que depuis des années c’était le pacte silencieux qu’ils avaient convenu entre eux - deux enfants qui avaient vu le meilleur et surtout le pire chez l’autre personne.

Et qui, dernièrement, avaient effectué le pire ensemble. « On nous a vu. » Fuck. « Tout le monde sait au DBD. » Double fuck. Que Matt en vienne à être au courant, c’était une chose. Que tout le monde le rejoigne dans ce monde où l’ignorance n’était pas de mise, c’était tout autre chose. Car si tout le monde savait, Ezra n’aurait pas à s’inquiéter que de Matthew - mais il laissait ce choses là de côté pour un autre moment. Ce fut à ce moment là cependant que la conversation prit une tournure bien différente. Comme si l’orage après la tempête venait s’installer, prendre place, prêt à laisser le ciel tomber sur la tête des deux idiots qu’ils étaient, Lily et lui. Il vint oser, Ezra, à demander ce qu’il avait dit. Parce-que c’était la question la plus logique qui lui semblait être présentement et que jamais il ne se cacherait de ce genre t’interrogation à Lily. Même s’il voyait bien qu’elle n’était pas la bienvenue, même s’il voyait bien l’état dans lequel ça rendait la jeune femme. Elle ne vint pas répondre de suite, se contentant d’un « Rien. » à peine murmuré, à peine audible, ramassant les fringues sèches qu’Ezra lui avait offert l’instant d’avant qui semblait être mille ans plus tôt. La question lui faisait mal à Lily, et lui se sentait idiot d’être toujours le plus honnête à ses côtés. Ses mâchoires vinrent se serrer un brin davantage alors qu’il secouait quelque peu la tête, venant plonger cette dernière dans ses mains. Ils avaient été idiots - là était le meilleur résumé de cette situation. Et il était prêt à assumer toutes les conséquences tout seul e cette histoire pour l’épargner elle. Si c’était possible, si elle le faisait faire. Il n’avait rien à perdre ou presque - son amitié avec Matt était de toute façon ruinée à jamais semblerait-il par les traces du passé. Au pire, il se verrait ramer davantage pour retourner vers celui qui fut jadis la personne en qui il avait le plus confiance sur cette terre. Mais Lily, elle, avait tout en jeu et sur la table, elle avait sa vie qui dépendait de la suite et des conséquences de leur action.

Ezra ne releva le regard que lorsqu’elle vint se réinstaller à ses côtés, la jeune femme attrapant sa bière à la volée, s’y agrippant comme s’il s’agissait d’une bouée jetée au milieu d’une mer agitée. Il ne vint pas reposer sa question, parce-qu’il savait que ce serait inapproprié et que s’il voulait avoir les réponses à cette dernière, il n’aurait qu’à faire le grand garçon et à aller la poser directement à l’intéressé. Si Lily ne voulait pas lui dire, il irait voir Matt et les problèmes seraient réglés. « Je sais pas s’il me pardonnera un jour. Il a quitté l’appart, je sais même pas où il est maintenant. Je suis retournée chez mes parents en attendant. » La situation était bien plus inquiétante qu’elle ne l’était jusque maintenant, finalement. Il l’entendait à la façon dont elle prononçait ses mots, dont elle se servait de son intonation de voix. Il détestait la voir comme ça. Et là où il s’apprêtait à dire quelque-chose, il eut le bon réflexe de ne pas ajouter un mot de plus pour le moment. Il aurait voulu lui dire qu’elle n’avait qu’à lui demander et qu’il resterait à ses côtés le temps que Matt rebrousse chemin vers elle, qu’il lui prêterait volontiers un toit le temps qu’elle décide de rentrer chez elle, et tout ce qui allait de paire avec ces deux propositions - mais se rappela, au bon moment, que s’ils étaient là à discuter de tels sujets c’était parce-que justement, ils avaient passé un moment de trop ensemble; il ne désirait pas en rajouter une couche, pas comme ça, pas de suite.

Surtout que la question que vint poser ensuite Lily ôtait un nouveau vent de légèreté sur cette conversation bien plus pesante qu’il n’aurait souhaité. Ezra était idiot et s’était imaginé qu’ils auraient pu en discuter sans que ça leur serre le coeur autant que présentement. Il était idiot de croire que les choses pouvaient être abordées par le côté simple lorsque l’évidence était tout autre sous leurs yeux. Lily osant lui demander s’il avait agi tel qu’il l’avait fait par simple vengeance, par goût de faire souffrir un brin davantage un Matt ravageur de son passé. Il s’était demandé, Ezra, si ça avait été le cas. Et même si au fond de lui il ne désirait pas que ce soit le cas, il ne pourrait jamais parler avec certitude au nom de son inconscient qui agissait selon son libre-arbitre depuis bien plus longtemps qu’il ne pouvait s’en souvenir. Consciemment, en tous cas, il n’avait pas agi de la sorte - mais avant de faire parvenir sa réponse à la jeune femme, il lui demanda ce qu’elle voulait entendre. Parce-que la seule chose dont il était certain aujourd’hui Ezra, c’était qu’il aurait les épaules pour tout encaisser et tout supporter seul s’il le fallait. Il aimait Lily, il l’aimait depuis des années et elle aurait toujours une place particulière dans son coeur - même si l’amour qu’il éprouvait pour la jeune femme dans le présent était bien différent de celui qu’il ressentait des années auparavant. Il l’aimait mais si pour lui sauver son coeur il devait renoncer à la garder dans entourage proche, il le ferait. Il sacrifierait son lien avec elle pour sauver celui qu’elle tissait désormais avec Matt. « Non, bien sûr que non. » il mentirait en disant qu’un léger soupire de soulagement ne s’était pas échappé d’entre ses lèvres, contre son gré, à ce moment là. C’était égoïste de désirer la garder comme alliée à ses côtés dans cette épreuve, mais cela venait soulager son coeur. « J’aurais préféré ne faire de mal à personne, c’est tout. Il ne mérite pas ça. » Dix ans plus tôt, Ezra se serait offusqué d’entendre que le McGrath ne méritait pas quelque-chose comme ça et aurait prouvé par mille solutions que ce n’était pas le cas. Aujourd’hui, il vint simplement hocher lentement la tête, les lèvres pincées. « Je suis rassurée que tu sois pas en couple. Je me sentais mal à l’idée de lui mentir. » Il ne le serait plus à l’heure actuelle s’il l’avait été au moment des faits. « Mais t’as pas répondu à la question. » Il ne le savait que trop bien.

Alors, Ezra vint remonter son regard, ce dernier s’était concentré principalement sur l’étiquette qui se décollait lentement avec la condensation du froid contre le verre de la bière, dans celui de la jeune femme à ses côtés. Il prit un instant, et un autre supplémentaire avant de venir répondre finalement à sa question. Parce-qu’il voulait lui laisser tout le temps possible pour se rétracter et lui demander de dire qu’il n’avait été qu’un simple égoïste. Peut-être qu’il aurait préféré de son côté également agir que par simple motivation de vengeance - son coeur lui criait cependant que ce n’était pas le cas et que dans cette situation, le mensonge n’était plus nécessaire. « C’est pas parce-que c’est lui que j’ai fait ça, non. » Il soupira, lassement. « C’est parce-que c’es toi. » Dits comme ça, à chaud, les mots paraissaient d’une violence exacerbée. Et pourtant, ils avaient été dits du bout des lèvres, à peine murmurés, comme relâchés après avoir été détenus pendant des années. Si Ezra avait agi de la sorte sept soirs plus tôt et s’était laissé emporté par quelque-chose de bien plus grand que lui, c’était parce-que c’était Lily et personne d’autre. Elle avait cette place dans sa vie et dans son coeur que personne d’autre ne saurait prendre, pas même Ginny - et pourtant ce pan là de sa vie consommait déjà beaucoup de son énergie. « Parce-qu’à ce moment là, j’ai vu des souvenirs de y’a dix ans et que mon cerveau n’a pas pris la peine de me prévenir que ce n’était plus le cas. » Parce-que également, elle représentait quelque-chose de certain dans des situations où seule l’incertitude régnait en maitre. Elle avait été sa stabilité dans des moments de doute et de peur, son rocher auquel s’accrocher quand tout autour s’effondrait au premier coup de vent venu. Et ce soir là, il avait eu besoin de ça Ezra. Ce n’était pas la vengeance mais c’était l’égoïsme qui avait vaincu. « Je suis désolé. » Parce-qu’il s’en voulait d’avoir été si faible là où elle l’avait connu bien plus solide pour elle.

L’attente de la réponse semble infiniment longue, surtout alors qu’elle n’ose même plus respirer trop fort de peur de casser avec une seconde personne l’alchimie qui les lie. Si elle n’a fait que prendre la défense de Matt, elle en pense tout autant pour Ezra. Lui non plus ne mérite pas de subir aucune conséquence d’un geste qu’il n’a ni demandé, ni planifié. Il était un acteur cette soirée-là, c’est bien vrai, mais ils ont agi tels deux adultes consentants et cela lui semble absolument impossible de lui reléguer sur les épaules la moindre faute. Elle l’a embrassé la première et pour ce geste comme pour tout ce qui en a découlé, Lily est prête à assumer seule chacun des conséquences. « C’est pas parce-que c’est lui que j’ai fait ça, non. » A son tour elle a un égoïste rictus de soulagement, heureuse de ne pas avoir été une fois de plus un pantin dont les autres se servent comme bon leur semble. S’il avait répondu autrement, sa réaction aurait été immédiate, la baffe qui serait partie avec et la porte claquée derrière elle tout autant encore. Dire qu’il n’y avait pas de bonne ou mauvaise réponse à donner à cette question aurait été un mensonge éhonté. Un de plus. Pourtant Ezra s’en sort admirablement bien, elle l’assure et se l’assure à elle même aussi en lisant l’honnêteté dans les traits de son visage fatigué. Comme il l’a fait pour elle, la jeune femme lui laisse tout le temps dont il a besoin pour trouver les mots à son tour. « C’est parce-que c’es toi. » Elle hoche de la positive, la mâchoire toujours serrée, désormais incapable de boire quoi que ce soit de la bière qu’elle tient fermement entre ses doigts gelés. Cette phrase n’aurait pas eu le même effet si elle avait été prononcée par qui que ce soit d’autre. Si Alfie lui avait dit la même chose mot pour mot alors cela aurait signifié qu’il s’était joué d’elle une fois de plus alors qu’il avait voulu se prouver quelque chose (sûrement que s’il avait pu la mettre dans son lit vingt ans plus tôt alors il en était encore capable aujourd’hui, quelque chose dans le même registre). Si le stupide australien premier du nom lui avait dit ça, ses yeux n’auraient pas papillonné d’émotion, pas comme ils le font face au stupide australien second du nom. A défaut de savoir quoi en penser, en déduire ou même comment y répondre, elle laisse simplement son corps réagir naturellement. Pour une fois et justement parce que c’est Ezra, elle ne cherche pas à être quelqu’un d’autre. Finalement, elle se dit qu’elle aurait voulu avoir trouvé ces mots quand Matt lui a demandé pourquoi. Ils font bien plus de sens que quoi que beaucoup de choses dans cet univers. « Parce-qu’à ce moment là, j’ai vu des souvenirs de y’a dix ans et que mon cerveau n’a pas pris la peine de me prévenir que ce n’était plus le cas. » La jeune femme hoche une fois de plus la tête. Ces mots ne signifieraient sans doute rien pour un oeil extérieur mais elle en pèse chaque syllabe, ne sachant si elle souhaite laisser les souvenirs remonter ou non. Ceux qui se rapportent uniquement à Ezra sont beaux, assurément, mais ceux qui englobe chaque parcelle de leur relation sont affreux, douloureux et malheureusement, omniprésents. Ils ont dû toucher le fond pour tenter de remonter ensemble et aujourd’hui n’est qu’un bref aperçu de ce qu’ils avaient bien pu être, dix ans plus tôt justement.

« Je suis désolé. » Moi aussi.”

L’australienne avoue à son tour dans un dernier souffle qui a tout de dramatique sans qu’elle n’ait cherché à ce que ce le soit. Dans ses vêtements trop amples, elle laisse remonter ses manches plus loin que ses doigts encore et les pans de son pantalon jusqu’à ses talons. Elle a besoin de se faire petite et de se perdre dans des habits qui ne sont pas les siens, à défaut de le faire dans des draps. “On n’a jamais été doué pour trouver le bon timing, hein ?” Elle tente, vraiment, dans un sourire presque aussi sincère qu’il n’est désolé. Rapidement pourtant, c’est son sérieux qui reprend le dessus. “Je veux pas arrêter de te voir ou de te parler pour autant. C’est juste … C’est arrivé, okay, et je regrette juste la manière dont ça s’est passé, mais je veux pas …” Il est difficile pour elle de parler ce qu’elle désire ou non et même de ses sentiments sans avoir à s’ouvrir telle une boîte de Pandore. Chaque sentiment se réfère tant à lui qu’à Matt et il ne mérite pas qu’elle parle sans cesse d’un autre homme alors qu’il est là depuis de nombreuses années et qu’il a toujours beaucoup compté à ses yeux. “Je veux pas te perdre.” Ses dents lacèrent l’intérieur de ses joues et ses lèvres alors qu’il reste encore et toujours extrêmement difficile pour elle d’avouer de telles choses. Elle se sent petite chose fragile et il comprend bien mieux que personne à quel point c’est un état qu’elle ne souhaite pas retrouver, mais force est d’avouer qu’elle a aussi besoin de lui dire ce qu’elle a sur le coeur. Il est le seul qu’elle sait pouvoir tout entendre dans les moindres détails. “Dans tout ça, j’ai juste peur de perdre des gens que j’aime.” Finalement, c’est tout ce qu’elle retient. Les problèmes sont nombreux, les conjonctures impossibles ; mais celui-ci est le pire d’entre tous.

leave a light on.

@lily mcgrath

Il le perçut, sans aucun mal, le petit sourire de soulagement que vint étirer les lèvres de Lily lorsqu’il répondit enfin à sa question. Il le comprenait, ce soulagement - et à dire vrai, il le ressentait même jusqu’à l’intérieur de lui. Il était même heureux de le voir se manifester d’une quelconque façon, le contraire l’aurait surement quelque peu déçu de la part de la demoiselle. Il était sincère, Ezra, quand il lui répondait, parce-qu’il n’y avait pas besoin de porter de masques lorsqu’il était à ses côtés. Ca n’avait jamais été le jeu qu’ils aimaient jouer - et ce soir, il n’en avait une fois de plus nullement besoin. Lily ne venait pas ici pour lui demander de porter ce masque, de toutes façons.

« Moi aussi. » Qu’elle vint répondre, dans un soupire, à peine lui a t-il exprimé qu’il était désolé. Leurs paroles à tous deux étaient sincères, et le regard d’Ezra cherchait particulièrement présentemeent à venir s’accrocher à celui de la jeune femme. Car, au delà de sa position à lui dans toute cette histoire - sa position plus que délicate, il en était tout à fait au courant -, il s’inquiétait du ressenti de son amie. Il la connaissait, la jeune femme, aussi bien qu’ils avaient pu partager le fond du gouffre ensemble et autant qu’il l’avait aidé à s’en ressortir. Il la connaissait et il était intimement persuadé que cette situation lui pesait sur le cœur bien plus qu’elle ne se permettait de l’admettre. Il le voyait dans ses traits tirés, dans ses mots hésitants, dans sa respiration retenue. Il le voyait dans son regard fuyant et dans ses doigts tremblants. Le moindre geste, le moindre signe - il voyait que quelque-chose de bien plus lourd piétinait son cœur à elle. Et il en était en grande partie responsable. Il aurait pu ne pas apporter ce type de pierre à l’édifice et pourtant, il ne s’était pas empêché à un seul instant d’agir comme un idiot. « On n’a jamais été doué pour trouver le bon timing, hein ? » Le sourire qu’il vint étirer était à la fois amusé et attristé. Ils n’avaient jamais été bons à cet exercice, non. Ni dans un autre temps ni dans le présent.

« Je veux pas arrêter de te voir ou de te parler pour autant. C’est juste … C’est arrivé, okay, et je regrette juste la manière dont ça s’est passé, mais je veux pas … » Et alors qu’il aurait pu avoir le loisir de venir l’interrompre de dix manières différentes, de prendre le relai sur sa pensée, de venir y ajouter son point de vue - Ezra ne fit rien de tout ça, se contentant de venir allonger son bras par dessus la table de la cuisine, de venir poser sa main sur celle de Lily qui triturait de façon trop insistante l’étiquette de la bouteille de bière. Il aurait eu l’occasion de venir compléter là, de ses propres paroles, les pensées de la jeune femme mais il savait à quel point les moments où Lily s’ouvrait autant à autrui pouvaient être rares. Alors il préféra ne rien dire et lui laissait l’occasion de vider son coeur de toutes les pensées qui l’empêchaient d’aller de l’avant. « Je veux pas te perdre. » « Tu me perdras pas. » Paroles exprimées du bout des lèvres, dans un bout de souffle. « Dans tout ça, j’ai juste peur de perdre des gens que j’aime. » « Tu nous perdras pas. » Parce-qu’il pouvait s’avancer pour les autres personnes qui n’étaient pas lui, sans trop de soucis. Parce-qu’elle ne l’avait pas nommé, mais il savait parfaitement de qui elle parlait, Lily.

Et que ce dernier avait intérêt à se tenir à carreaux de son côté, sinon Ezra aurait deux mots à partager avec lui. Ils avaient fauté, certes, mais le coeur de Lily ne méritait pas qu’on vienne le piétiner de la sorte alors que toutes les meilleures intentions du monde pavaient sa route à elle. Lily était douce, Lily était aimante - et c’était sûrement en se laissant manger par toutes ces émotions qu’elle en était arrivée dans cette situation. Alors, s’il fallait qu’il s’assure par lui-même que Matt lui donnait une nouvelle chance, Ezra le ferait. Elle ne voulait pas perdre les gens qu’elle aimait et le Beauregard n’était pas prêt à la laisser s’échapper de sa vie de nouveau. Elle était la lueur d’espoir qui annonçait que tout pouvait de nouveau redevenir lumière, même lorsque les ténèbres frappaient fort à la porte. Elle ne voulait pas perdre les gens qu’elle aimait mais s’il devait compromettre sa proximité avec elle pour qu’elle puisse retrouver celle qui l’unissait à Matthew, sans la tenir au courant, il le ferait.

Finalement, avec un petit soupire, Ezra vint tirer la chaise sur laquelle se trouvait la jeune femme pour l’amener à ses côtés. L’instant d’après, un bras en dessous de ses genoux et le deuxième dans son dos, il vint la soulever de l’assise afin de l’emmener avec lui sur le canapé du salon, parcourant de quelques enjambées la distance les séparant du salon. S’asseyant dans le fond du divan, il garda la jeune femme contre lui, assise désormais sur ses genoux, ne relâchant pas son étreinte autour de son corps. « Tu nous perdras pas et je t’en fais la promesse, Lily. » Il n’y avait pas beaucoup de personnes envers qui Ezra s’oserait à faire de telles promesse, mais elle méritait au moins ça et bien plus encore. Il déposa un baiser contre sa tempe, déposant sa joue contre son front, fermant les yeux un instant. « Et tu sais très bien que je serai toujours là pour toi. » Si Lily n’était pas du genre à se livrer à autrui en temps normal, dans le monde d’Ezra elle figurait également dans la catégorie des exceptions. A ses côtés, il n’avait peur de rien. A ses côtés, la honte n’existait pas. C’était l’avantage d’avoir déjà montré le pire de vous à une personne - le reste n’importait finalement plus tellement.

A défaut de s’acharner contre l’étiquette de la bouteille qui n’a jamais rien demandé, c’est désormais la peau d’Ezra qu’elle caresse bien plus doucement, machinalement, tout en laissant libre cours à ses paroles. Avec lui au moins, elle sait qu’il n’y a aucune sorte de censure à avoir et parfois, il est vrai que ne pas mentir a quelque chose de reposant. Ce qu’elle redécouvre être plus rassurant encore, ce sont les bons mots qu’il trouve à lui répondre dans la seconde. « Tu me perdras pas. » Suivi d’un « Tu nous perdras pas. » dont elle ne savait pas avoir tant besoin avant de l’entendre. Il n’est pas bête, il a compris qu’elle craignait tant de voir changée sa relation avec lui que celle avec Matt, et aucun mot ne serait suffisant pour qu’elle lui exprime toute sa gratitude. Elle s’attendait à une guerre acharnée entre les deux et si jamais elle s’avère avoir eu tort à ce sujet, alors elle serait la plus soulagée qui soit. Les yeux qu’elle remonte lentement dans les siens laissent déjà entrevoir ce qu’elle ressent.

Elle est une adulte forte et autonome et elle peut tout faire toute seule, Lily, parce qu’elle n’a pas besoin de personne et que personne n’a non plus le droit de lui dire quoi que ce soit. Pourtant elle le laisse ramener sa chaise près de lui tout comme elle se laisse porter comme une plume, ses bras passés autour des épaules du brun. « Tu nous perdras pas et je t’en fais la promesse, Lily. » Bien qu’elle n’apprécie pas être celle qu’on doit rassurer une fois de plus, surtout à la suite de ses propres erreurs, elle ne prend pas le temps de s’offusquer de quoi que ce soit. Entre ses bras elle se sent aller un peu mieux, un peu moins mal. Son visage reste posé dans son cou et elle ne laisse tomber aucun de ses bras, parce que tant qu’ils restent ici alors rien de mal ne pourra arriver. « Et tu sais très bien que je serai toujours là pour toi. » Lily le sait. Elle le sait bien. Il a toujours été là pour elle, elle n’en a jamais douté. Jamais elle n’aurait préféré avoir qui que ce soit d’autre dans sa vie à sa place, en démontre son corps qu’elle refuse de détacher du sien, pas même son visage niché près de son cou. Ses doigts jouent avec ses cheveux, elle a au moins l’impression de le rassurer à son tour, sans trop savoir de quoi elle tente de le protéger. Le reste du monde tout entier, sans doute. “Un jour je te rendrai la pareille. C’est ma promesse.” Il le mérite ; et elle le pense même quand il joue à l’imbécile et qu’elle imagine parfis sa tête au bout d’un pique. Il mérite d’être heureux, pour longtemps, et jamais elle ne voudrait se mettre en travers d’une telle chose. En attendant elle ne fait que gagner du temps, laissant les minutes s’écouler, jurant de faire au mieux pour ne pas lui bloquer la circulation sanguine nulle part. Peu à peu ses bras retombent de ses épaules mais elle ne change pas de position pour autant, sa tête appuyée contre son torse, alerte à sa fréquence cardiaque qui s’apaise avec le temps qui passe. A un moment, elle a sûrement juré qu’elle ne dormirait pas chez lui, mais ils savaient tous les deux que ce n’était qu’un mensonge - le seul, elle le promet. En sa présence, sa vie cesse momentanément de s’effondrer, alors elle avait besoin de rester aussi longtemps que possible, et de raisonnable. Un jour, elle le promet, elle saura être aussi bonne pour lui qu’il l’est pour elle depuis si longtemps.