N'est-ce pas un peu cliché que d'entrer dans une salle de spectacle qui prépare un concours de Rock'n'roll et que la première chose qu'on entende c'est du Elvis Presley ? Encore plus quand les enceintes passent Hound Dog. Au moins ça nous met tout de suite dans l'ambiance et c'est donc avec un large sourire que je me tourne vers Loan commençant à bouger mes épaules au rythme de la musique  «ça va être dément ! » hurlais-je pour que mon copain m'entende. J'éclate ensuite de rire en m'approchant de lui et l'embrasse amoureusement  « ça fait tellement longtemps que je rêêêêve de faire ça ! T'imagine même pas !» mon sourire se faire encore plus large alors que je lui attrape la main pour l'entraîner derrière moi.

Nous nous frayons un chemin vers la table des inscriptions et, sourire éternel sur les lèvres, je me place devant la femme. Habillé d'une robe à pois et coiffé à la pin up, elle se fend parfaitement dans le décord.  «Hello ! » la saluais-je avec entrain  «Je suis venu m'inscrire au concours ! » la jeune femme me regarde puis semble chercher quelqu'un d'autre des yeux  «Vous savez qu'il faut être deux pour s'inscrire ? » demande-t-elle, un sourire désolé sur les lèvres  « mais je peux vous inscrire et on peut essayer de vous trouver une ...»  « Non, non, c'est bon, je ne suis pas venu seul» dis-je en tirant Loan et passant mon bras autour de ses hanches  «J'aimerais nous inscrire tous les deux, ensemble, en tant que partenaire » elle observe mon copain, cligne un instant des yeux puis fini par comprendre ce que j'insinue et son sourire retrouve le chemin vers ses lèvres  «Génial ! Du coup je vais vous laisser remplir ce formulaire et accrocher ces numéros sur vos vêtements. Si vous avez besoin de vous changer ou quoique ce soit, il y a des vestiaires prévus à cet effet là-bas » elle désigne une porte  « On commence dans plus ou moins une heure, vous allez tous vous retrouver là-bas au bord de la scène et vous aurez chacun 2 min pendant lesquels vous nous montrez ce dont vous êtes capable. Ok ?» j'hoche la tête  « Compris m'dame !»

J'attrape le formulaire puis me dirige vers une table  «Une heure … ça nous laisse le temps de boire au moins une bière » assurais-je alors que je remplis frénétiquement les cases de la feuille  «C'est quoi encore ta ville de naissance? »  demandais-je, relevant la tête et interrogeant mon copain du regard, les sourcils froncés.

« Ca va être dément ! » Un sourire se dessine sur mes lèvres alors qu'à mes côtés Clément semble plus surexcité que jamais. On vient tout juste d'arriver au concours de Rock organisé par la ville dans cette semaine à thème rétro/vintage. C'est Clément qui a insisté, en vrai au mot Rock, il m'avait déjà convaincu, pour que l'on vienne participer. Il est déjà en train de se trémousser et ses lèvres qui viennent retrouver les miennes insufflant cette joie de vivre. Ca va être une bonne journée. « Ca fait tellement longtemps que je rêêêêve de faire ça ! T'imagine même pas ! » « Bizarrement, je commence à me faire une idée. » que je plaisante alors que dans la seconde d'après, il m'entraîne près des tables d'inscriptions. La demoiselle qui nous accueille semble légèrement à l'Ouest et soudainement, je crains la remarque homophobe. Je me suis toujours fait violence pour ne pas m'en soucier, mais il faut avouer que depuis le conflit avec Kelly, j'ai l'impression de devenir craintif. Je n'ai pensé à rien lorsque Clément m'a embrassé aux yeux de tous, mais face à l'hésitation de la jeune femme je suis mal à l'aise. Heureusement, mon copain ne se démonte pas et lorsque son bras s'enroule autour de mes hanches, je me sens déjà un peu mieux. Au final, elle semble bien se moquer de notre orientation sexuelle et prépare les papiers nécessaires à notre inscription. On a fait un effort vestimentaire tous les deux. J'ai sorti mon plus beau pantalon à pinces, une chemise manche courte que j'ai rentrée dans le dit pantalon et le tout agrémenté d'une paire de bretelles. Les cheveux plaqués sur le haut du crâne, la montre de mon père au poignet et des souliers vernis aux pieds. Très années cinquante. Mon regard se perd sur les autres participants, tout le monde a fait un effort et c'est tellement sympa de voir les gens jouer le jeu pour honorer le thème.

Pris dans mes rêveries, je me fais à nouveau entraîner par Clément qui me fait asseoir à une table, la tête déjà dans les papiers. « Une heure… Ca nous laisse le temps de boire au moins une bière. » Un rire m'échappe. « Mouais, danser la vessie pleine, c'est pas fou. » que je ricane un peu. Non, j'ai déjà fait cette erreur une fois et c'était clairement pas fou. Je préfère que l'on s'éclate sur la piste et que l'on se paie un coup à boire après, mais il sait déjà que je vais le suivre quoiqu'il arrive. Je l'observe alors que son stylo gratte déjà les deux feuilles en même temps. Il est beau là, Clément, dans son élément et j'ai vraiment hâte de partager ce moment avec lui. « C'est quoi encore ta ville de naissance? » « Brisbane. » Il devait être en train de chercher un nom allemand quand en réalité, c'est bien dans la ville australienne que j'ai vu le jour. « Et c'est gentil de me rajeunir, mais faut que tu rajoutes une année à la date de naissance. » que je taquine en venant me coller un peu à lui et embrasser sa joue. « On doit choisir une chanson, tu crois? » C'est bien le genre de truc qui pourrait nous prendre des heures, en vrai. Ma main sur sa cuisse, je continue à observer autour de nous où des couples sont déjà en train de s'entraîner. Certains semblent vraiment être venu pour gagner tandis que d'autres semblent prendre tout cela avec bien plus de fun. « Ça va être fun! » parce que ça se doit de l'être comme tout ce que l'on fait depuis mon retour d'aventure.

Ça fait tellement longtemps que je rêve de participer à ce genre de concours ! Lorsque Yoko était encore en ville on avait dit qu'un jour on sauterait le pas et s'inscrirait. Mais il y a eu trop d'obstacle sur notre route, si bien qu'au final nous n'avons jamais eu l'occasion de le faire. Ensuite elle est partie, puis il y a eu d'autres éléments qui ont fait que je n'y ai plus penser jusqu'à ce que la ville de Brisbane n'organise un mois placé sous le signe du vintage avec des soirées rockabilly tous les soirs. C'est donc, sans hésiter, que Loan a accepté de m'accompagner à une de ces soirées et je dois dire que je suis on ne peut plus heureux de partager ce moment avec mon copain ! Depuis que je me suis confié sur mon passé et que je suis aller le voir à l'autre bout du pays pour le rassurer sur sa personne, j'ai l'impression que notre relation a évoluée dans le bon sens du terme et que tout devient de plus en plus sérieux entre nous. Et ça me plaît, énormément.

Installé à une table, entrain de remplir frénétiquement les feuilles d'inscriptions, je fini par relever mon regard sur mon copain quand je me rends compte que je ne sais même pas où il est né. Je sais qu'il a grandit quelque part en Allemagne mais y est-il né aussi ? La réponse est négative et toute simple : il a vu le jour à Brisbane.  «Sérieux … ? » demandais-je, arquant un sourcil  «Donc ...attend, t'es australien en fait ? » je fronce légèrement les sourcils puis incline la tête sur le côté avant d'hausser les épaules  «Intéressant  » soufflais-je en remplissant la case concernant le lieu de naissance avant que Loan ne vienne se coller contre moi et me dise que je me suis trompé dans son année de naissance  « Quoi ? T'es tellement vieux déjà ? » m'exclamais-je avec humour et ironie, rentrant la tête entre mes épaules pour esquiver une attaque sournoise de la part de mon copain  « J'rigole ! T'es encore bien conservé pour ton âge !» surenchéris-je alors que je saute de la chaise pour m'éloigner en rigolant, retournant vers la jeune femme pour lui donner les fiches d'inscription. Je discute encore un instant avec elle puis fait un croché par le bar et revient vers Loan avec deux bières.

 «Tiens, t'auras cas aller aux toilettes avant qu'on ne commence » dis-je en déposant un verre devant lui  « Et j'ai parlé avec l'orga, elle a dit qu'on ne choisira pas de chansons et que c'est un truc à l'ancienne. Genre, chaque couple va sur scène l'un après l'autre et danse. Les juges nous jugerons et nous noterons sur critères bien spécifiques et ...voilà» j'hausse les épaules et prend une gorgé de ma bière  « Heureusement qu'on adore tous les deux l'impro hein» je lui lance un regard malicieux avant de le pousser gentiment  «Je sais pas toi, mais moi je suis ici pour le fun. Genre, vraiment. Si on gagne, c'est top et génial et tout, mais je suis surtout là pour m'amuser avec toi » et je me penche à nouveau pour l'embrasser, ignorant totalement les quelques regards qui se tournent vers nous.

« Donc... Attends, t'es australien en fait ? » Je me mords la lèvre inférieure pour ne pas exploser de rire face à son air si surpris et sérieux. « Il paraît, oui. » Bien sûr que je le taquine alors qu'il semble tomber des nues, s'attendant probablement à ce que je lui donne un nom de ville allemande imprononçable pour lui. « J'ai la double nationalité. » que je lui annonce en souriant un peu. Mon père avait insisté pour que l'on se fasse naturaliser, il a toujours dit que cela pourrait s'avérer nécessaire un jour même si je ne me vois clairement pas repartir faire ma vie en Allemagne. On sait, il a raison après tout. « Quoi ? T'es tellement vieux déjà ? » « C'est ça, moque toi de tes aînés. » que je râle en venant lui donner une petite, tape sur l'épaule. On ne parle jamais de la différence d'âge entre nous tout simplement, car ça n'a jamais été un problème. Clément à cinq ans de moins que moi sur le papier, mais dans sa façon d'agir, je ne vois aucune différence. « J'rigole ! T'es encore bien conservé pour ton âge ! » A part, lorsqu'il parle de moi comme d'un vieillard. Pas le temps de répliquer qu'il a déjà filé ailleurs pour rendre nos fiches d'inscriptions. Il ne va pas tenir en place pour le reste de l'après-midi, c'est certains. On dirait un enfant le matin de Nöel et à l'observer de loin, je dois probablement sourire comme un niais. Avec lui, je me sens bien.

Il revient avec des bières, m'explique un peu mieux le déroulement du concours alors qu'autour de nous, les couples se préparent. « Je sais pas toi, mais moi, je suis ici pour le fun. Genre, vraiment. Si on gagne, c'est top et génial et tout, mais je suis surtout là pour m'amuser avec toi. » Gagner ROA m'as donner un sens de la compétition que je ne soupçonnais pas, mais il a raison, aujourd'hui, c'est avant tout pour s'amuser. « Promis, on s'amuse. » Et lorsque ses lèvres rejoignent les miens, je me laisse porter par son baiser. Jusqu'à ce raclement de gorge sur notre gauche et les regards insistant que je perçois. Le rouge me monte aux joues et je recule quelque peu tout en restant proche, malgré tout, de Clément. Cela se doit d'être une bonne journée.

Le concours débute sur les chapeaux de roues avec un couple très dynamique et qui sait clairement bien danser, on enchaîne avec des gens un peu moins doués, mais surtout là pour s'amuser. Je sirote ma bière tout en admirant le spectacle. « J'ai reçu le chèque de ROA. » que j'annonce sans déverrouiller mon regard de la scène. « J'ai vraiment envie de créer un lieu pour partager des moments comment ça avec des danseurs de tous les horizons. » C'est clairement ce qui me fait vibrer, ce que j'ai envie de retrouver tous les jours en allant au boulot. « Je crois que mes ambitions changent un peu en ce moment. »

Oui, je suis excité comme jamais. Oui j'ai envie de m'amuser. Et oui je suis on ne peut plus heureux d'être là avec Loan et de pouvoir partager ça avec lui. Alors que j'attends au bar, mon regard glisse vers mon copain installé à la table et lorsque je lui fait un signe de la main, c'est un amour puissant qui se déverse en moi. Depuis la dernière fois où je lui ai parlé de toutes les choses qui me sont arrivées, que nous nous sommes enfin échangés les mots 'je t'aime' et que je suis aller le rejoindre à l'autre bout du pays, mon amour pour lui s'est affirmé et n'a fait que grandir encore et encore, chaque jour un peu plus.

Attrapant les deux bières, sourire éternel sur les lèvres, je repars vers Loan et me met à blaguer un peu avant d'aller lui voler un baiser. Avec amour, je l'embrasse et j'aurais bien aimé faire duré l'échange encore quelques instants de plus, mais Loan en décide autrement. Restant donc un peu sur ma faim, je décide de prendre une gorgé de ma boisson alors que le concours commence tout juste. Apparemment il y a 6 groupes qui s'affrontent entre eux. Puis il y a un les quarts de finales entre  les vainqueur des groupes 1 et 2, ceux des groupes 3 et 4, et ceux des groupes 5 et 6. Puis les demis finales puis la finale. Etant donné que Loan et moi sommes dans le 6e groupe, nous avons encore un peu de temps.

Mon copain décide d'ailleurs d'accès la conversation sur notre nouveau projet qui se concrètise de plus en plus, encore d'avantage avec sa victoire à ROA. D'ailleurs, il a tôt fait de m'informer qu'il vient d'avoir le chèque des gains et m'avoue que ses ambitions changent  «C'est génial ! » m'exclamais-je avec un large sourire  «De mon côté j'ai fini de monter un dossier en béton pour avoir des subventions de l'état. Celui à qui j'ai donné ce dossier à dit qu'il était sûr à 100% qu'on aura droit à l'aide maximum. On a aussi le backup de Charles et Vanessa a même commencé une cagnotte leetchie pour nous » je souris largement  «Je pense qu'on va être bien et qu'on va pouvoir doubler notre budget avec tout ça. » je sirote ma bière  «J'ai trouvé pas mal d'endroits aussi qui pourraient potentiellement faire l'affaire et faut juste que j'appelle les propriétaires pour qu'on aille les visiter. Donc ...à voir ! Mais vois que ce projet se concrétise vraiment là et j'ai tellement hâte de commencer à mettre le tout en place » je lui offre un large sourire  « Faudrait aussi qu'on trouve un petit staff. Des bénévoles qui aimeraient donner de leur temps et tout.» je prend une profonde inspiration pour faire une pause avant de reprendre  «Ah et Sybbie serait d'accord pour rallier le HERO avec notre future association. » je fronce les sourcils  « Faudrait d'ailleurs lui trouver un nom funky !»

De le voir sautiller dans tous les sens me fait avoir des yeux bien trop amoureux sur la silhouette de mon petit ami qui s'éloigne pour confirmer notre inscription. On partage beaucoup plus de choses tous les deux depuis mon retour en ville. Je crois que la séparation imposée de six semaines, donc beaucoup plus longue que prévue, nous a fait réaliser un bon nombre de choses. Pour la première fois depuis ce qui me semble être une éternité, je me sens bien dans ma relation, j'ai la sensation d'être à ma place même si à l'extérieur des choses me taraude encore. Les paroles de Kelly on laisser une trace dans mon esprit et embrasser Clément en public est encore un exercice quelque peu compliqué. Je vois bien qu'il ne comprend pas, rien qu'au petit froncement imperceptible entre ses sourcils, mais je ne me vois pas lui parler de cela ici. Il faudra que l'on en discute, je le sais pertinemment. En aucun cas, je ne voudrais qu'il pense que je cherche à dissimuler notre relation. L'idée en est même très loin. Kelly a simplement réveillé une vieille peur que je pensais oublier à jamais.

En attendant notre tour et alors que les premiers participants se lancent sur la piste, on en vient à parler de nos projets futurs. Clément a bossé comme un dingue sur l'idée durant mon absence. Il s'est donné à deux cent pourcent et j'ai vraiment hâte de pouvoir me plonger un peu plus dans l'aventure avec lui. « Maintenant que je suis vraiment là et qu'on a les fonds, les choses vont pouvoir avancer. » Tout devient bien plus concret et c'est clairement ça qui en devient excitant. Il me parle de lieu à visiter et cela me fait réaliser que j'ai complètement oublié de lui parler de quelque chose. « Oh j'ai un local aussi. » Et déjà, je fouille dans ma poche pour en sortir mon portable et lui montrer quelques photos. « J'ai eu un petit coup de cœur, mais on ira tous les voir ensemble ! » que je lui propose, sourire aux lèvres.

Sous nos yeux, les deux danseurs tentent une figure qui se termine sur une belle gamelle pour la jeune femme. Je grimace un peu et reporte mon attention sur Clément qui me parle de sa meilleure amie et de son association LGBTQ+. « C'est une chouette idée ça! » Il faut croire que nos idées se marient à la perfection depuis le départ. « Je veux vraiment que ce soit un lieu ouvert à tous que ce soit pour la danse ou pour le théâtre. » C'est mon idée de gamin ça. « Ou même juste pour organiser des meetings et se rencontrer autour d'un thème ou non. » Je suis persuadé que l'on pourrait créer un petit comité artistique tout ce qu'il y a de plus génial. Ce n'est pas quelque chose qui court les rues à Brisbane et parfois on est bien trop seul à courir les auditions sans jamais connaître personne du milieu. « Faudrait d'ailleurs lui trouver un nom funky !» « T'aurais une idée ? » que je lui demande alors que je n'aie encore clairement jamais pensé à cela. Me voilà parti en pleine réflexion, me tournant pleinement vers Clément, mon menton posé sur son épaule. Je suis bien là, près de lui. Et sur la scène, les couples s'enchaînent dont certains sont plutôt bon. « Merde, je le connais lui, il danse depuis qu'il sait marcher. » Un gars que j'ai connu au travers de différentes auditions. « C'est un putain d'homophobe... » que je finis par soupirer alors que l'homme aide sa compagne à monter sur scène.

Je n'ai pas chômé pendant l'absence de Loan. J'ai mis en place des meeting avec la commission pour avoir droit à des subventions qui a été charmé par notre idée, une collègue à mit en ligne une cagnotte, mon père m'a promit de participer un peu financièrement et j'ai compté mes économies. Ne sachant pas si Loan gagnerait ou pas, j'ai décidé de mettre toutes les chances de notre côtés. Et maintenant, avec la somme qu'il a amassé grâce à sa victoire, nous n'aurons plus à nous faire du côté financier. Je pense même que nous allons pouvoir augmenter notre budget et trouver vraiment l'endroit qui nous plait le plus. D'ailleurs, Loan me montre directement un endroit pour lequel il a eu le coup de cœur, précisant toutefois que nous allons visiter les lieux ensemble.  «T'as pas intérêt à aller visiter un lieu sans moi ! » que je m'indigne avec ironie en attrapant son portable pour regarder les photos  «ça a l'air super chouette ! Tu m'envoie le lien s'teup ? Que je le mette dans le dossier que j'ai à la maison.  » dis-je en lui redonnant son téléphone  «J'ai aussi quelques endroits en tête qui m'ont l'air tout parfait pour ce qu'on veut faire » Je prends une gorgé de ma bière  «J'en ai contacter deux ou trois déjà et les propriétaires me donneront une date demain ou dans la semaine. » assurais-je alors que je passe une main dans le dos de mon copain.

Celui-ci, s'approchant de moi, semble surprit lorsque je lui dit qu'on devrait donner un nom à cet endroit qui sera le notre. Je pince les lèvres et hausse les épaules  «Des bribes d'idées, oui ... » je me recule légèrement  «genre … Funkysteps, ou Upbeat... groovsy, Groovy room, SpiritGroove, swingo, socialdance, danceways...Sybbie a proposé Dancepuppy, elle»  je laisse échapper un rire amusé et hausse les épaules  « J'aime bien Groovsy et SpiritGroove, mais faut que le nom te plaise aussi à toi»

Je lui adresse un doux sourire et allait l'embrasser lorsqu'il se redresse brusquement, son attention étant accaparé par un des candidats qu'il reconnaît et ne connaît que trop bien. Un gars qui danse depuis toujours et qui est surtout homophobe. Je pose moi-même mon regard sur l'homme que j'ai déjà vu quelque part mais hausse les épaules  «Tant pis, on va se gêner pour l’anéantir » je pose mon regard sur Loan et pince les lèvres  « ça va aller ?» demandais-je, soudainement inquiet  « Je veux dire … enfin, de lui faire face et … ?» et quoi ? Risquer de te prendre encore des remarques ?  « Si...Si ça te gêne qu'on soit aussi proche, tu le dis hein» soufflais-je en prenant une gorgé de ma bière, m'éloignant légèrement de mon copain. Même si ça m'ennuie, même si j'ose espérer que je me trompe, j'accepterais la requête de mon copain.

« T'as pas intérêt à aller visiter un lieu sans moi ! » Il est si investit que je ne peux m'empêcher de l'observer alors qu'il m'énonce toutes ses idées, tout ce sur quoi il a durement travaillé pendant mon absence. C'est comme s'il s'était jeté là-dedans à corps perdu pour éviter de penser au fait que l'on ne pouvait pas se joindre et ça me touche bien plus que de raison. Ce projet que je nourris depuis des années lui tient réellement à cœur et je sais que j'ai pris la bonne décision en lui proposant de ce lancer dans cette aventure avec moi. Je ne regrette pas et si mon regard se veut être celui d'un amoureux transit, j'emmerde ceux qui y trouveront quelque chose à redire. Il observe les photos du lieu que j'avais repéré sous toutes les coutures, il ne laissera rien passer. Je me demande si, au final, il ne sera pas le plus exigeant du couple dans cette histoire. « Ça a l'air super chouette ! Tu m'envoies le lien s'teup ? Que je le mette dans le dossier que j'ai à la maison. » Je récupère mon téléphone et m'exécute en souriant. « Hop c'est fait ! » L'autre soir on a même commencé un moodboard tous les deux sur Pinterest, le truc dégouline déjà d’un million d'idées parmi lesquelles il faudra encore faire le tri, mais on lancer dans notre idée et je ne veux pas passer à côté de ça. Il faut que l'on agisse comme on le ressent sur l'instant, ne pas se poser de questions et faire dans l'intuition du moment. Et d'ailleurs, Clément semble avoir bien plus réfléchi que moi lorsqu'il m'annonce avoir des idées de noms pour notre endroit. La liste s'éternise passant par toutes les couleurs et tous les sons. « J'aime bien Groovsy et SpiritGroove, mais faut que le nom te plaise aussi à toi. » Je prends le temps de réfléchir, répète les deux noms à voix haute en hochant la tête. « SpiritGroove, je trouve ça un peu lourd. Mais j'aime bien Groovsy. » Et peut-être que moi aussi j'avais pensé à différent nom pour notre lieu de prédilection. « Qu'est-ce que tu penses de In Motion, Spotlight ouuuuu Groove and Go ? »

Mon attention est finalement attirée par un des candidats que je connais plutôt bien. Il est aussi bon danseur qu'il est homophobe et cela en dit beaucoup sur sa personnalité. Plus loin, je me tiens de lui, mieux je me sens pour être honnête et je préfère l'évoquer à Clément. Mon petit ami qui, automatiquement, se met sur le mode pilote et qui ne se laissera jamais faire. J'ai toujours été comme cela, moi aussi et pourtant, il ressent ma faiblesse. « Ça va aller ? Je veux dire… Enfin, de lui faire face et… ? » Avant, j'aurais répondu sans aucune hésitation. Je ne compte pas me laisser abattre pour ce que je suis. Aujourd'hui, ce sont les propos de Kelly qui résonne dans un coin de ma tête. « Si...Si ça te gêne qu'on soit aussi proche, tu le dis hein. » Et c'est seulement maintenant que je réalise qu'il n’a cessé de s'éloigner depuis sa prise de parole, ce qui m'inquiète bien plus que tout le reste. Instinctivement, mon bras vient s'enrouler autour de ses hanches pour le ramener vers moi. « Tu restes là ! » Je me rapproche doucement de lui, fixe mon regard dans le sien un instant, avant de venir l'embrasser tendrement, profitant du moment sans penser aux gens qui nous entourent. « Un jour… Je t’expliquerais pourquoi je réagis comme ça parfois, mais pas ici. » que je lui explique doucement. Les propos de Kelly ont simplement réveillé une douleur du passé dont je n’ai jamais parlé avec Clément. « On va profiter de notre après-midi. » que je murmure contre sa mâchoire, léger sourire aux lèvres.

Les groupes s’enchaînent et rapidement, c’est le numéro de notre vague qui est appeler. Je prends la main de Clément et le tire avec moi. « Alleeeer ça va être bien. » On s’aligne derrière les autres, je fais bouger mes chevilles un peu, me rappelle de quelques pas plus que célèbre des danses de ce style et plonge mon regard dans celui de Clément. « Nous faut un signe de main, si jamais on se perd. » Je sais d’avance que cela n’arrivera pas, mais je préfère assurer le coup.

Parfois j'ai l'impression d'en faire beaucoup et de m'investir peut-être un peu trop dans ce projet qu'est le notre. Je sais que Loan n'a pas eu beaucoup de temps de le faire en participant à ROA du coup c'est naturellement et automatiquement que j'ai pris le relais, mais il y a des moments où je me dis que je devrais ralentir le rythme. Et pourtant, je n'en suis pas capable, tant j'ai envie que ce projet voit le jour le plus vite possible. Lorsque je propose des idées de noms à Loan, celui-ci ne semble pas forcément très enchanté. Ou est-ce seulement une impression ? Je n'en sais rien. Toujours est-il que, lorsqu'il réfute mes idées pour en proposer d'autre je me contente de sourire et hausser les épaules  «Grove and go pourquoi pas, mais les autres je suis vraiment pas fan » et c'est la vérité, je ne dis pas ça parce qu'il n'a pas accepter mes idées, mais bel et bien car ces noms ne me parlent absolument pas.

Dans tous les cas, ce sujet est très vite clos étant donné que Loan visualise un homme qu'il connaît et qu'il sait être, en plus d'un excellent danseur, un sacré homophobe. Instantanément, je m'éloigne légèrement de mon copain, sachant pertinemment qu'il est bien plus sensible à tout cela depuis ce qui s'est passé pendant la course infernale. Mais Loan ne semble pas l'entendre de cette manière et, m'attrapant par les hanches, m'oblige à revenir me coller à lui avant de m'avouer qu'un jour il m'expliquera pourquoi il réagit de cette manière. Je lui adresse un sourire compatissant et hoche la tête soufflant rapidement un  « ok» avant que nous n'abandonnions notre table lorsqu'on appel notre groupe.

Alignés avec les autres danseurs au bord du dancefloor, Loan se rassure un peu en disant que ça va bien se passer  « C'est ce que je me tue à te dire» soufflais-je à son oreille avant de rigoler doucement et rouler des yeux lorsqu'il reprend qu'il nous faut un signe de la main si jamais on se perd  « Non, je refuse» dis-je en hochant la tête  « Je veux dire, on en a jamais eu besoin, ni pendant nos entraînements, ni sur scène. C'est pas ici et maintenant qu'on va se tromper hein» et j'hausse les épaules, sûr de moi.

Et c'est ainsi que le concours commence pour nous. Les play off sont faciles et nous sommes bien rapidement projeter en final face au rival de Loan. J'avoue que nous gagnons nos pool plus j'ai envie de gagner le concours en lui-même. Ainsi, lorsque nous arrivons en final, je sais, dans le fond, que je ne suis plus là pour m'amuser mais bel et bien pour gagner. Un coup d’œil à Loan me fait comprendre qu'il n'en pense pas moins : nous ne repartirons pas sans la victoire. Ignorant donc le regard mauvais de nos adversaires, je me replace au bord de la piste de danse et observe le couple qui s'élance sur le parquet  « Ils font beaucoup de fautes» glissais-je des commentaires à mon copain  «ça se voit qu'ils sont stressé. Les mouvement de Maureen ne sont plus aussi fluide qu'avant et Jasper n'est pas totalement en rythme. Ils sont pas non plus toutafait synchronisé, elle est souvent un quart de seconde plus rapide que lui» je souris doucement  « je crois qu'on a nos chances ...» et ça me rend réellement heureux.

Toute l'aventure ROA a clairement perturbé nos habitudes et plus particulièrement notre implication dans l'évolution du projet. Je pensais m'absenter quelques semaines et non pas plus d'un mois. Clément avait énormément de temps libre sur les bras et il a pu se plonger à corps perdu dans toutes les idées que je lui avais laissé gribouiller sur des carnets et des bouts de feuille volante. Je vois à quel point, il s'est investi dans tout cela et je lui en serais à jamais reconnaissant. Mais il est vrai que depuis mon retour, nous n'avons pas eu pleinement le temps de se poser pour parler de tout cela plus amplement. Ce qui augure une discussion un brin décousue et clairement inapproprié pour l'endroit. « Grove and go pourquoi pas, mais les autres, je suis vraiment pas fan » Je lui souris tendrement et viens attraper ses lèvres dans un léger baiser. « Tu sais quoi, on va faire un bol à la maison ou on mettra tous les noms qu'on aime. » Pour déjà faire une sorte de liste et ensuite, on prendra le temps d'en discuter entre nous, je veux que tout cela soit bien fait, que l'on ne se précipite pas pour rien. Le projet me tient réellement à cœur et je veux que l'on soit en accord tous les deux. « Et on va prendre le temps de vraiment en discuter, maintenant que je suis revenu et que j'ai le temps. »

En attendant, on se concentre sur la compétition qui bat son plein sous nos yeux. Quelques participants semblent redoutables, mais j'ai foi en notre duo et Clément y croit encore plus. Les premières étapes sont presque trop simples pour nous, mais elles nous permettent de se remettre dans le bain en douceur. On retrouve nos habitudes en quelques pas seulement et lorsque mon regard croise le sien à un moment dans les derniers rounds, je sais que l'on est venu pour gagner, quoiqu'on en dise. Et au final, il ne reste plus que nous et Jasper et sa partenaire. Il ne cesse de nous lancer des regards noirs juste avant de se lancer sur la piste. C'est peut-être ça qui finis par lui faire perdre le contrôle ou de voir Clément venir me murmurer à l'oreille. « Continue tu le déstabilise. » Je deviens une horreur lorsque la compétition est en jeu encore plus lorsque je ne supporte pas mon adversaire.

Ils avaient presque terminé leur danse, encore quelques mouvements et c'était terminé. Mais Jasper a foiré, il s'est emmêlé les pieds et tout à vriller. Aux yeux du commun des mortels, ce n'était rien, même pas un léger trébuchement. Pour un danseur, c'est la pire chose qui puisse arriver, parce que le simple sursaut fait perdre le rythme. Et Jasper le sait dès l'instant où je vois la colère barrer son visage, il est foutu. Tout se termine rapidement, dans un enchaînement de pas mal assumé. Peut-être que je me cache un peu derrière Clément lorsqu'il passe à nos côtés, mais c'est fièrement que j'attrape la main de mon copain pour l'entraîner sur scène. « Je t'aime. » Ultime signe de confiance alors que nos regards se croisent, le silence s'installe dans la salle et c'est à nous.

Tout se passe à merveille et c'est probablement l'un des meilleurs moments de danse que j'ai pu vivre. On était en parfaite synchronisation, tout était fluide, tout était simple. C'est avec un sourire immense scotché aux lèvres que j'entraîne Clément en dehors de la piste et cette fois, je n'hésite pas une seconde à venir l'embrasser avec envie. « C'était parfait! »

Je me contente de sourire, compréhensif, lorsque Loan me dit que nous nous prendrons le temps plus tard de bien discuter de tout. Je m'approche un instant de lui, pose ma main sur la sienne et lui caresse les doigts avant de lui adresser un clin d'oeil et me laisser glisser de ma chaise, entraînant mon amant derrière moi pour rejoindre la piste de danse. C'est bientôt notre tour et la hâte de montrer au monde ici ce dont nous sommes capable grandit de plus en plus.

Et tout se passe merveilleusement bien. Loan est le meilleur des partenaires, la complicité qui s'est créé entre nous au fil de ces derniers mois n'a fait que s'intensifier, augmentant ainsi nos chances et notre entente sur scène. Il nous suffit d'un coup d’œil, un regard plus perçant qu'un autre pour nous comprendre et savoir ce que souhaite l'autre. Sans doute est-ce le fruit d'un travail acharné pour la northlight qui fait que nous arrivons à nous orienter aussi facilement sur la scène, fait est que nous sommes en parfaite symbiose et synchronisation lorsque nous démarrons le concours.

Au fur et à mesure que nous avançons, nous ne laissons aucun répit à nos adversaires qui sont éliminés l'un après l'autre jusqu'à ce que nous ne nous retrouvions en final face de Jasper et Maureen. Ils sont fort, mais pas aussi fort que nous ! Et je remarque bien qu'ils ne supportent pas la pression. Une personne lambda n'y verrait que du feu, en vrai les gens seraient même parfaitement impressionnés par leur prouesse, mais un œil avisé et professionnel tel que le mien ou celui de Loan ou encore celui des juges saura voir les failles, mais mouvements peu contrôlés, les déséquilibres et la non synchronisation de leurs faits et gestes. Alors, lorsqu'ils s'arrêtent, je suis persuadé à 100% du fait que nous les dépasseront.

Et c'est ce qui arrive. Lorsque nous finissons notre danse improvisée sur You're the one that I want, je suis sais que nous avons gagné. Je le sens, tant nous avons été en parfait harmonie tout au long et qu'en plus de cela nous avons montrer à quel point la danse nous procurait une joie inégalable. Le public est d'accord et le juris est unanime : Nous remportons la victoire ! Laissant exalté notre bonheur, je me jette dans les bras de mon copain et le sert fermement contre moi, persuadé que rien ni personne ne pourra ternir cette joie qui émane de mon être.

C'était pourtant sans compter sur Jasper qui, comme je m'en rends compte, est un sacré mauvais perdant. Il tente tous les arguments possibles pour faire comprendre que lui et Maureen étaient les meilleurs, il essaie même de nous faire comprendre que nous sommes des tricheurs. Je le regarde avec un certain amusement et un sourire moqueur qui, toutefois, disparaît rapidement lorsqu'il touche une corde sensible : nous sommes deux hommes. Je fronce les sourcils, me place presque naturellement devant Loan, mon regard fixé sur l'homme qui déblatère toutes les horreurs du monde concernant notre orientation sexuelle.

 « Vous avez raison Jasper» les paroles du juge suprême sonnent comme un coup de massue.  «...pardon ? » j'hallucine, clignant des yeux  «Il a raison, les danses que vous nous avez montrées sont plus facile à réaliser entre deux hommes étant donné que vous plus de force » j'écarquille les yeux, bien trop choqué par ces propos  «Vous déconnez là … ? Vous n'êtes pas sérieux ? » A mon ton, Loan doit sans doute comprendre que je suis entrain de m'échauffer un peu trop car je le sens qui agrippe mon poignet comme pour me retenir  « Non, je ne déconne pas» reprend sèchement le juge  « On devrait vous juger différemment, notre grille de notation est différente d'un sexe à l'autre. Et clairement si on prend cette grille pour vous, votre danse était vraiment dans la moyenne inférieure»  « Mais pourquoi vous nous avez rien dit avant ?!» que je m'exclame, ignorant le fait que nous attirons tous les regards  «Si on avait été mit au courant avant on aurait ajuster la difficulté de notre danse ! Ça aurait pas été un problème putain ! »  « Clément, je vais te demander de te calmer...» reprend le juge sur un ton calme, diplomate et bien trop détestable  « C'est une décision qui a été prise par tous le monde ici ...» je sers les dents, résiste un peu plus à Loan qui est entrain de tirer sur mon bras, me soufflant d'arrêter, que ça n'en vaut pas la peine.  « Ouais, écoute un peu ta maman !» lance Jasper avec un regard narquois  « C'est bien elle la meuf de votre coupe, non ?» ajoute-t-il en désignant mon copain d'un coup de tête.

S'en est trop. Décuplant ma force, je me délivre de l'emprise de mon copain et me jette sur Jasper, littéralement. Il tombe à la renverse, se cogne la tête contre le parquet et, sous le cris horrifié de sa partenaire, nous roulons un peu sur le sol avant que je ne me retrouve sur lui. J'ai le temps de frapper deux fois son visage, sentant son nez craquer sous mes doigts -a moins que ce n'était mes phalanges?- avant que des bras n'entourent mes épaules qu'on ne nous sépare.  « ASSEZ !» hurle le juge  «CLEMENT TU SORS D'ICI » s'insurge-t-il en désignant la sortie de la salle  «TOUT DE SUITE » je le fixe, puis fusille Jasper du regard avant que Loan ne m'attrape à nouveau le bras pour me tirer derrière lui  «lâche moi ! » grognais-je en repoussant violemment sa main, me dirigeant vers la sortie sans un mot et sans un regard de plus, mon corps vibrant de rage.

Les étapes se sont enchaînées dans une aisance qui n'a fait que confirmer la force de notre duo sur scène. Il n'y avait aucun doute dans nos mouvements, aucune hésitation et en pleine maîtrise de notre art, nous avons fini par décrocher la victoire. Ou tout du moins c'est ce qui fut annoncé. Clément aura tout juste le temps de sauter dans mes bras avant qu'une cohue se crée autour de la table des jurés. Jasper en chef de file est déjà en train de vociférer, remettant en doute la véracité de notre victoire. Il aurait pu remettre en doute des détails techniques, le choix de la chanson ou un tempo manqué, mais il s'abaisse a bien pire. C'est bien son style de frapper plus bas, d'enchaîner les accusations discriminatoires sans honte, ni gêne. Il ne lui faudra que quelques minutes pour pointer ce qui le dérange réellement du doigt : il s'est fait battre par deux hommes. Deux hommes en couple par-dessus le marché. Et s'ensuivit la pire démonstration de l'humanité. Oh, il n'est jamais à cours d'arguments Jasper, lorsqu'il s'agit d'être homophobe et surtout de faire tourner la situation à son avantage. 

Ce qui était une belle journée et une victoire méritée vire alors au cauchemar. Instinctivement, Clément agit comme un protecteur, mais lorsqu'il en vient à hausser le ton sur le jury, je comprends que tout va aller bien plus mal. En douceur, je viens enrouler mes doigts autour de son poignet afin de lui rappeler ma présence et de tenter de le calmer surtout. Mon geste n'aura qu'un effet de courte durée tant le juré s'applique à nous démontrer, prétextant un barème de notation différent selon les sexes. On aurait triché parce que nous sommes deux hommes et que notre musculature sous-entend que les portés deviennent bien plus simples pour nous. Je voudrais relever l'absurdité de la situation, ils sont tous en train de sous-entendre que Jasper est bien moins fort physiquement, mais j'en suis incapable. Je tente de calmer mon copain, mais il n'en démords pas. « Viens on s'en va, ça n'en vaut pas la peine. » Je voudrais fuir cette pièce, m'enfermer chez moi et ne plus penser à cela. Je voudrais que Clément me suive, mais sa colère me cloue sur place et les propos de notre concurrent me glacent le sang. « C'est bien elle la meuf de votre couple, non ? » Il tape là où ça fait le plus mal. Et s'en ai trop pour Clément qui perd littéralement son sang-froid. Je n'ai pas le temps de réaliser quoique ce soit qu'il a déjà sauté sur Jasper pour le frapper au visage. « CLEMENT ! » Je voudrais qu'il s'arrête, je voudrais partir. Tous les yeux sont braqués sur nous et tout le monde chuchote son avis en nous pointant du doigt. « Clément arrête ! » Il me fait honte d'agir ainsi et c'est un autre homme qui est obligé de le contenir pour qu'il se calme. Ca hurle de tous les côtés, Jasper réclame que l'on appelle les flics et cette fois, c'est trop pour moi. « Maintenant, on s'en va ! » J'attrape Clément par le bras, bien déterminé à le tirer hors d'ici. Jamais je n'aurais pu envisager la suite des évènements, le regard noir qu'il me lance et cette manière qu'il a de s'adresser à moi. « Lâche moi ! » Il s'enfuit sans se retourner alors qu'autour de moi les insultes pleuvent, les remarques homophobes et j'en passe. Mon pire cauchemar qui se déroule sous mes yeux. Soudainement, j'ai peur que l'on s'en prenne à moi, comme ce fut le cas, il y a des années de cela. Je bredouille des excuses, récupère les affaires que l'on avait laissées sur une table et m'échappe de cette salle.

Il tourne comme un lion en cage lorsque je le trouve. Sa rage fulmine par tous les pores de sa peau encore transpirante et le voir dans cet état m'attriste autant que cela me met en colère. « Plus jamais tu me parles comme ça. » que je lui rappelle avant de jeter ses affaires à ses pieds. « Démerde-toi pour rentrer. » Je ne veux plus le voir tant qu'il sera énervé ainsi. La violence n'a jamais été une solution surtout face à des abrutis pareils. Je tremble tellement que j'ai du mal à sortir mes clés et quand c'est le cas, elles viennent s'écraser sur le sol. Je voudrais juste rentrer chez moi...