Asher Buckley Le RP prend place en 2005 à Brisbane. Asher a 16 ans. (© white rabbit)

Tu as vraiment aucune envie d’aller à cette fête parce que tu sais ce qu’il t’attend. Debbie, cette meuf qui te colle depuis plusieurs mois maintenant. Tu la laisses faire parce que ça fait bien. Tu laisses croire à tes potes ce qu’ils veulent bien croire mais là, y’a cet anniversaire cet aprem. C’est pas dans le cadre du lycée cette fois. C’est moins facile d’être mixé avec les autres ou de t’esquiver juste quand ça va un peu trop loin. Parce que c’est déjà allé trop loin la dernière fois et elle t’a bien fait comprendre qu’elle a envie de plus mais t’es terrifié. T’as pas envie et en même temps t’as bien envie de laisser tout le monde continuer de croire que oui, y’a bien eu relations intimes avec elle. Donc t’es un peu bloqué là. C’est pour ça que t’es en train de rentrer chez toi en catimini. Ta mère t’as accompagné jusqu’à chez ton pote et au lieu d’entrer dans la maison comme quelqu’un de normal, t’as fait demi tour et t’as pris le bus pour rentrer chez toi. Tu fais le tour de la maison pensant qu’il y aurait moins de monde derrière si tu entres par la cuisine mais y’a Birdie là. Installé sur la balancelle. Tu te redresses d’un coup parce qu’elle va cramer ta couverture c’est sûr. Elle a l’air absorbé dans ses pensées et tu tentes quand même… Tu ouvres la porte de derrière doucement mais tu entends qu’elle s’éclaircit la gorge alors tu t’arrêtes dans ta lancée pour te tourner vers elle. Tu mets ton index devant ta bouche pour lui faire comprendre qu’il faut être discret là. C’est important. « Je suis pas là. Dis pas que tu m’as vu parce que je suis pas là. Qu’est ce que tu fais là? » Tu réfléchis en même temps que tu parles. « Tu crois qu’on peut aller chez toi ? » Parce que au moins tu seras sûr que personne ne tombera sur toi ici car tu ne seras véritablement pas ici. Pas besoin de te justifier rien, ce sera la vérité. T’es pas là, t’es ailleurs, t’es un vagabond.

Spoiler:

Il a dit ‘j’en ai pour cinq minutes’.
Alors Birdie s’est mise à décompter les secondes et les minutes.
Voilà huit minutes et treize secondes que cela dure.

Elle aurait pu s’allonger mais elle n’a personne pour la bercer sur la balancelle. C’est nul. Alors elle est assise, avec le bout des pieds qui touche vainement le sol pour obtenir l’effet d’avant en arrière et arrière en avant. Répétitif. Agaçant. Birdie a pourtant de la patience (absolument pas) mais pas maintenant. Buck n’est pas là, il n’y a pas l’once d’un cheveu blond qui arrive à l’horizon et elle a même été foutu à la porte par la seule fille de la fratrie. Pourtant, Birdie voulait juste aider Penny. Mais non, la gosse lui a dit qu’elle ‘voulait faire comme les grands’ ses muffins. Tout en l’entrainant dehors et en lui claquant la porte vitrée à la figure.

Birdie a soupiré, elle a levé les yeux au ciel, pensant que le comportement dramatique doit être génétique. Elle aurait pu alors compter les cailloux, ou même les balancer contre la vitre des portes fenêtres mais elle n’est pas sûre que Mère Buckley soit d’accord avec ça. Alors Birdie se tient sage sur sa balancelle, attendant le retour de l’enfant prodige affalée, les mains croisées sur le ventre et le regard coincé sur le ciel qu’elle entre aperçoit entre le tissu de l’objet et le toit de la (grosse) maison.

Il y a du bruit mais c’est pas l’enfant prodige qu’elle voulait.
« Je suis pas là. Dis pas que tu m’as vu parce que je suis pas là. Qu’est ce que tu fais là ? » « J’ai vu ta mère t’amener en voiture, t’es déjà de retour ? Ou c’est vraiment pas toi et t’es juste un doppelganger ? Une vision psychique ? Un clone ? » Il serait foutrement bien foutu, comme clone quand même. Elle veut le même. Il y aurait au moins quelqu’un pour la comprendre et la suivre dans ses délires. « Tu crois qu’on peut aller chez toi ? » Le bout du pied qui la fait balancer de nouveau accompagné d’une moue cadburienne qui le regarde avec perplexité et attention, le menton relevé et les yeux qui tentent de le sonder. « Y a ta sœur dans la cuisine. Tu pourras pas rentrer discrètement. En plus, je suis sûre qu’elle a fermé les portes de l’arrière à clé. » Parce qu’Asher veut rentrer en mode spy visiblement (à part si c’est vraiment un clone). « Chez moi, c’est pas à côté, tu le sais. » C’est même carrément trop loin. Ses doigts jouent entre eux et Birdie penche la tête sur le côté. « T’aurais plus de chance si t’escalade la façade. A part si Buck rentre entre temps. Dans tous les cas, c’est risqué. » Pour son opération discrétion. Et aussi pour le reste.

« Je vais aller me cacher dans le garage jusqu’à la fin de la journée. » Asher a vraiment l’air de cacher un truc. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, il a le regard presque fuyant et surtout, il a vraiment l’air d’en chier qu’elle soit là, qu’elle l’ait vu et fait capoter son plan initial. Même si au final, sans elle, il n’aurait pas su que Penny est dans la cuisine à l’instant T et que sa sœur n’aurait pas eu la discrétion de la Cadburn du haut de ses dix ans. Donc, dans un sens, elle vient de lui sauver le cul même si Asher n’a pas l’air très reconnaissant. C’est pas grave, la jolie blonde s’en remettra. « Ou alors on peut faire croire que t’as eu une urgence et que tu m’as appelé et que je suis rentré parce que y’avait que moi qui pouvait t’aider ? » De sa balancelle, Birdie pouffe de rire. « J’aimerai bien savoir quoi. T’as une idée ? » En attendant, il n’est pas très ingénieux. Il continue à lui parler alors qu’il veut se la jouer discret, la forçant à lui répondre et émettre encore plus de son que s’il se cachait dans le fameux garage vers lequel il semble tant vouloir se diriger.

« Il fou quoi Dan ? »
« Si je l’savais, je serai avec lui en train de le faire. Ce qui t’aurait visiblement bien arrangé. »

Enfin, peut–être pas tous. Birdie a le monde qui s’ouvre un peu plus à elle mais ce n’est pas pour autant qu’elle laissera Dan l’entrainer dans n’importe quoi. Elle a toujours le feu qui monte doucement aux joues quand il le faut, la Cadburn. Toujours une délicate créature qui se perd un peu entre les fantasmes d’adolescente et les beautés de l’enfance. Un peu brouillon, complètement embrouillant, terriblement confus. « Tu fais quoi toi là ? A part me prendre en flag et me faire flipper. » « Rude, Ash, vraiment rude. Qui dit que c'est pas toi qui vient de me prendre en flag, mmh? » Comme si elle avait demandé de le coincer par inadvertance. Heureusement que le teint et l’aspect fuyards d’Asher reste une petite comédie en soi parce que sinon, Birdie aurait pu se vexer. « A la base, j’attends juste ton frère en profitant de votre balancelle. » Balancelle qu’elle finit par abandonner en se levant pour suivre les traces du Buckley mâle junior deuxième du nom. « J’y suis pour rien si t’as quelque chose à cacher. » Elle laisse échapper un moment, juste le temps d’aller elle–même ouvrir la porte du garage – à force de venir, c’est presque autant chez elle ici – avant d’y laisser son dos dessus, le regard brillant. « C’est quoi, d’ailleurs ? » Qu’est–ce qui fait qu’Asher veuille tant que ça se cacher aux yeux de sa famille ?  

« Rien. Je veux juste pas me justifier d’être rentré plus tôt. » Birdie arque un sourcil, qui vient se cacher derrière son épaisse frange – sa dernière lubie qui a failli faire tourner de l’œil son aînée. C’est le sourcil qui dit beaucoup de choses. Celui qui informe qu’elle ne le croit pas. Celui qui évoque qu’il n’est qu’un menteur. Celui qui annonce qu’elle est juste encore plus curieuse de savoir le pourquoi du comment. « C’est mignon comme façon de tourner les choses. Je pourrai presque te croire. » Et elle sourit, Birdie. Avec ce petit air qui accompagne ce sourcil relevé, le malicieux, l’amusé. « Tu sais comment ils sont hmmm… » La jeune Cadburry le sait. Elle en flanche la tête et les yeux, un moment de compassion pour Asher. Elle ignore ce que c’est. D’avoir des parents qui veillent sur leurs progénitures. Qui leur demandent des comptes. Qui leur imposent des règles. Ses parents à elle lui ont offert un luxe incroyable : son indépendance. En brillant par leur absence, Birdie est libre, elle peut faire ce qu’elle veut quand elle veut et elle arrive à cet âge où la liberté est plus que primordiale. Alors le poids que peut avoir Asher sur ses épaules, cette gêne latente, elle ignore si elle est vraiment destinée pour elle ou pour sa famille. Sa mère qui ne manquera sûrement pas de lui poser les questions aux réponses qu’il ne voudra pas dire. Il a son jardin secret, Asher, mais Birdie irait bien y couper quelques tiges. Par simple curiosité.

« Tu veux pas qu’on aille quelque part qui n’est pas ici ? » Birdie regarde l’entrée du jardin, les fenêtres de la maison, le bout de route. Pas une tige de cheveux de Buck qui apparait sur aucun horizon. La Cadburn se redresse, elle presse ses lèvres entre elles et elle s’apprête à répondre quand il rajoute. « Je te dirai un secret. » Là, ce sont les deux sourcils qui se soulèvent. D’étonnement. Parce que ce n’était clairement pas attendu, comme réflexion. « C’est que t’as vraiment envie de partir d’ici pour m’attirer avec un secret. » Elle fourre son nez là où il ne faut pas, Birdie, c’est bien connu. En tout cas, pour les gens qu’elle apprécie. Le reste de l’humanité, elle s’en fiche un peu. De son point de vue, vu leur traitement envers elle, la blondinette ne mérite pas à ce qu’elle s’attarde sur eux. Birdie se lève en se dirigeant vers lui avant de passer son bras par–dessus le sien – à défaut de pas être assez grande pour le passer au-dessus de ses épaules. « Je te suis mais t’as intérêt à bien me dire un secret. Sinon, je hurle dire à tes parents que t’es là. » La Cadburn a un sourire de coin qui veut affirmer qu’elle se fout de lui. Ou alors que non ?

Les Buckley sont à l'opposé des Cadburry. Grande villa, règles à respecter, des enfants qui se doivent d'être bons dans leurs domaines et plus encore, des contraintes et des repas familiaux aussi détendus qu'un lion en pleine Sibérie. Sans fourrure. Quelque chose que Birdie n'a jamais compris – il y a peu de choses qui ont un sens dans sa tête. Elle qui a toujours vécu librement, sauvagement selon certaines mauvaises langues. Elle aime bien venir chez les Buckley, même si elle est sûre que la maman ne l'aime pas. Birdie ignore pourquoi, tout comme elle ignore le comportement de la matriarche à son égard qui en découle. Elle en connaît d'autres, des mamans qui ne l'aiment pas. La petite effrontée, l'étrange créature qui entraîne ses amis dans des contrées tout aussi bizarres qu'elle. « Quoi tu me crois pas ? Je te dirai tout à l’heure. » L'œil bleu de Birdie est naturellement soupçonneux mais elle hausse les épaules tout en resserrant son emprise sur son bras. « Oublie juste pas que ce sont tes fesses que je couvre. Si jamais te vient l'idée incongrue de vouloir te défiler, mon petit grain de poussière de fée. » Parce qu'Asher, ça donne Ash qui donne… enfin l'idée est assez claire, certainement. Il n'y a pas à chercher très loin pour les surnoms incongrus, surtout avec des Cadburry à l'imagination plus fertile qu'un Anthony Hopkins sous champignon. Un soir de pleine lune. Vraiment.

La rue est étrangement calme. Même Elimbah est plus bruyant. Birdie préfère toujours Elimbah. Il y a de la vie, au moins. Les gens sont eux mêmes, ils ne se cachent pas, ils ne prétendent pas. Et elle a assez d'expérience pour savoir que la ville est différente. Il n'y a qu'à voir Asher. Cutie Asher. Mais cutie Asher ne l'est pas assez pour se cacher. « Vous faites quoi avec Dan quand vous êtes juste tous les deux seuls dans sa chambre ? » Birdie éclate d'un rire franc, gorge déployée, sans aucune retenue, comme toujours. Elle utilise sa main libre pour repousser son visage, toujours en riant, comme pour l'inciter de regarder ailleurs. « Qu'est ce que tu penses qu'on fait ? » La Cadburn se penche vers lui pour lui parler à voix basse. « Je lui tresse les cheveux mais sssht, faut pas le dire. » Même si c'est quelque-chose qu'elle fait souvent. Dan qui râle face à Will qui soupire ou Malachi qui a son air de coin. A chacun sa réaction, Dan était sûrement le plus drôle. Elle a une obsession capillaire – sûrement un trait qu'elle partage avec son aînée.

La petite blonde regarde la route vide derrière elle tout en sortant une sucette en forme de cœur de son arrière poche. « Tu penses que quelqu'un va venir me kidnapper en me baladant sur le bord de route ? Tu cherches à te défiler, pas vrai ? On va pas tourner autour pendant des plombes, Buck le second. Crache le morceau. Tu risques rien avec moi. » Birdie est beaucoup de choses mais porter des jugements n'en fait pas partie. A part si vraiment jugement a besoin. Comme pour réveiller ses proches de leurs conneries perpétuelles, par exemple (oui parce que Birdie est la mieux placée pour cela, à n'en pas douter).

Asher Buckley Le RP prend place en 2005 à Brisbane. Asher a 16 ans. (© white rabbit)

TW : Langage cru Elle te croit pas. Elle te connait. Tu vas quand même essayer de l’entourloupe comme tu le fais avec tant de personne. Ca passe ou ça passe pas, mais faut tester pour voir si ça marche. Tu laisseras jamais une situation sans avoir fait ton maximum pour arriver à la finalité que tu veux. Là, c’est de ne pas perdre la face devant tes amis et tes parents surtout. Car ces amis n’en sont pas vraiment. T’es en train de les esquiver, tu veux pas passer de temps avec eux. Rien n’est naturel. Avec Birdie c’est déjà mieux. Tu peux passer des heures avec elle sans que ça soit bizarre. « Oublie juste pas que ce sont tes fesses que je couvre. Si jamais te vient l'idée incongrue de vouloir te défiler, mon petit grain de poussière de fée. » Tu roules les yeux comme si elle disait un truc totalement bête alors qu’elle a exactement raison.« Tu me prends pour qui. » Pour exactement ce que tu es Asher. Le problème, c’est que tu ne le sais pas vraiment toi même. Et puis tu te rends compte que c’est totalement une question con que tu lui as posé vu comme elle se marre aussi spontanément. « Qu'est ce que tu penses qu'on fait ? » T’as plein d’idées. « Je lui tresse les cheveux mais sssht, faut pas le dire. » Elle ne te dit rien cela dit. Tu trouves ça suspicieux. Toi aussi tu ne réponds pas quand y’a anguille sous roche, peut importe le sujet en question. « Tu réponds pas. » Tu n’insistes pas pour autant. Tu veux juste lui pointer qu’elle ne répond pas, tu te fais donc tout un tas d’idées. « Tu penses que quelqu'un va venir me kidnapper en me baladant sur le bord de route ? Tu cherches à te défiler, pas vrai ? On va pas tourner autour pendant des plombes, Buck le second. Crache le morceau. Tu risques rien avec moi. » Un grand sourire se forme sur tes lèvres parce qu’elle rentre pas dans ton jeu. Elle sait que tu n’as rien à dire. Tu le lui confirmes de ton regard mais pas de tes mots. « Tu dis n'importes quoi. Pourquoi je voudrais que tu te fasses kidnapper? Je préfère passer du temps avec toi. » Ca c'est bien un des rares trucs vrais que tu lui as dit. « Tu veux vraiment que je te dis ce que je pense que vous faites avec Dan ? Je pense que tu le suces. » Des mots forts pour la choquer, pour qu’elle oublie ton soit disant secret. « Peut être plusieurs fois, ou une seule fois. Mais je pense que c'est arrivé. »Pour qu’elle s’outre ou qu’elle avoue. Elle va avouer. T’es sûr de toi. Ce n’est pas platonique entre eux. Tu n’as aucune amies filles qui veulent être que ton amie. Birdie. A part elle, parce qu’elle est trop occupé avec ton frère déjà. Elle peut pas sucer deux lièvres à la fois. Y’en a qui le font. T’as les pires amis Asher. Tous des petits cons bourgeois qui comprennent rien à la vie. Qui font pour faire bien. Toi tu fais pas, mais tu dis que tu fais. Pour faire bien.

Spoiler:

« Tu me prends pour qui. »
« Pour un cachotier merdeux qui ment aussi mal qu’il joue l’effronté. »

Il fait son rebelle, Asher, alors qu’il n’en est pas un. Birdie se moque, avec le sourire, avec humour, et pourtant, à cet âge, elle n’est guère mieux. Elle n’est pas rebelle, la petite blonde ; elle vit dans ses propres libertés. Des libertés qui ne sont pas forcément ceux acceptées en société, qui ne sont pas dans les normes d’un enfant, convenable aux adultes de laisser leurs progénitures faire. C’est bien là toute la différence entre Asher et Birdie ; le contrôle parental. Asher avait l’air terrifié quelques minutes auparavant que ses parents, sa mère ou sa sœur le voit – Birdie n’a jamais connu cette crainte (à part peut–être le jour où elle a voulu reprendre le sol de la cuisine en arc–en–ciel, qu’elle était sûre qu’y avait marqué que ça s’enlevait à l’eau et qu’en faites non et qu’elle avait fui les lieux du crime avant que son aînée n’apparaisse dans le cadre de la pièce). La Cadburn voit bien qu’Asher n’a pas le nez qui s’allonge car il ne ment pas vraiment, mais il omet quelque chose. Elle veut savoir ce que c’est. Pourquoi il ne peut – veut – pas lui dire ?

« Tu réponds pas. »
« Toi non plus. » Ils peuvent être deux à jouer à ce jeu–là. « Je dis si tu dis. » Tout le monde en sort gagnant, n’est–ce pas la meilleure des solutions qu’elle puisse lui proposer ? Même si franchement, l’esprit candide de Birdie vis–à–vis de sa relation avec Buck risque de décevoir Asher quant aux réponses qu’il attend. « Tu dis n'importes quoi. Pourquoi je voudrais que tu te fasses kidnapper? Je préfère passer du temps avec toi. » Il sourit et, pour une fois depuis cinq ou six minutes, Birdie sourit aussi tout en frottant sa joue contre la courbe de l’épaule d’Asher. « Tu peux être cute quand tu veux. » Mais ça, c’est trois secondes avant « Tu veux vraiment que je te dis ce que je pense que vous faites avec Dan ? Je pense que tu le suces. » Il a réussi à lui couper le souffle, Buckley le second. « Peut être plusieurs fois, ou une seule fois. Mais je pense que c'est arrivé. » Le petit con. Birdie dégage son bras et ses mains se font vivantes alors qu’elle le tape avec force sur son propre avant–bras. « Je retire ce que j’ai dit, t’es qu’un pauvre couillon. » L’idée la chagrine autant que l’image la répugne. Elle s’arrête en plein milieu, l’expression guillerette de son visage s’étant envolée pour laisser place à un renfermement soudain, inattendu, inédit venant d’elle. Est–ce qu’elle se sentirait blessée ? « Sache que je ne suce pas Dan. Si c’est vraiment ce que tu penses de moi, Asher, c’est vraiment pas drôle. » Oui, Birdie est blessée. Parce qu’Asher n’est pas le premier à lui balancer cela. Qu’elle a déjà entendu cette remarque à l’école. Tout ça car ses amis les plus proches sont masculins. Mais venant d’Asher, c’est d’autant plus blessant qu’elle pensait qu’il la connaissait assez pour savoir qu’elle n’est pas de cette tranche–là. Qu’elle ne fait pas ce genre de choses. « Est–ce que tu fais partie de ceux qui ont l’esprit trop étroit pour croire que l’amitié fille/garçon existe pas ? Si c’est le cas, je sais pas ce qu’on fait là. Tu voulais t’isoler pour avoir ton tour ? Va te faire foutre, Asher. »

Et ses talons qu’elle tourne prennent la direction opposée vers où ils se dirigeaient. Droit sur le retour de la maison. Droit vers les Buckley. Prête à aller crier haut et fort que le petit dernier est rentré plus tôt que prévu. Birdie peut être candide mais elle ne manque pas de fierté. On l’a sali assez comme ça au lycée. Elle ne veut pas non plus que ses amis s’y mettent – si elle peut véritablement compter Asher comme un ami à ce stade.

« Birdie attend ! » Pourquoi ? Il n’a pas su attendre avant de prononcer ses mots. Il n’a pas su mettre un frein à ses pensées qui ont franchi ses lèvres. Il n’a pas réfréné l’insulte à demi voilée qu’il vient de lui faire sauter au visage sans aucun scrupule, avec un ton presque (trop) guilleret pour l’occasion. Pourquoi elle, elle devrait l’attendre ? Elle n’a plus rien à attendre de lui. Birdie n’ignore pas qu’elle donne l’impression que tout coule sur elle. Chaque critique, chaque moquerie, chaque mot blessant. Et la plupart du temps, c’est le cas. Mais la grande rêveuse qu’elle est – ou a été ? – en prend un coup à chaque fois. Asher vient de lui crocheter une droite puissante qui l’a rendu plus k.o. qu’elle ne l’aurait songé. Parce qu’elle avait songé qu’elle aurait un minimum de valeur à ses yeux. Mais visiblement non puisqu’il vient de sous–entendre qu’elle traine avec Dan juste pour assouvir des plaisirs aussi malsains que dégoûtants. Il n’est pas mieux que les autres, finalement. « Je plaisantais attend ! » Il insiste, il est juste derrière, il finit par attraper son bras mais elle ne bouge pas. Elle s’arrête – elle attend – le dos raide et la mâchoire crispée. Close. Serrée. Il se place dans son champ de vision et elle regarde son torse, les muscles de son cou, la forme de ses épaules, tout tant que ce n’est pas son visage. Une plaisanterie, vraiment. Elle en a connu, des plaisanteries comme celles–là. La petite blonde veut juste rejoindre la chambre de Dan, s’y enfermer qu’il soit là ou pas et attendre son retour pour qu’il la raccompagne.

Mais y a Asher qui se fait obstacle. Birdie ignore pourquoi elle lui laisse l’opportunité de s’expliquer – à croire qu’elle ne peut juste pas s’en empêcher. Même après avoir été insultée de la sorte. « J’ai pas voulu aller à la fête parce que y’a une fille qui veut me faire ce genre de truc et… » Soupire, rame, accouches, Asher. Birdie se veut détacher, impassible et dénuée d’intérêt mais il répond à la curiosité qui la taraude et qui a fait qu’ils se sont échappés en premier lieu. Ses cils battent un mouvement, puis deux et à la troisième, ils finissent par se rehausser sur le visage de l’adolescent qui finit sa phrase en suspens. « Et j’ai pas envie. » « Et alors ? » Naturellement, spontanément, instinctivement. Et alors quoi ? « Et si mes potes le savent… » Y a des yeux qui roulent dans leurs orbites et un soupir qui s’échappe de ses propres lèvres. Tout ça pour ça, vraiment ? « Je m’excuse… S’il te plaît dis ça à personne… » Birdie claque sa langue contre son palais avant de croiser les bras. « Tu t’excuses de m’avoir insulté ou juste pour être sûr que je dirai rien à personne ? » Son cou lui ait douloureux à force de se tenir aussi rigide, position absolument pas naturelle chez la Cadburn mais qui se résigne pourtant à maintenir une posture qui se veut forte. « T’aurais pu me le dire directement au lieu de passer par un chemin de traverse. Tu t’occupes de ta réputation au point de me salir au passage ? T’es pas vraiment mieux que les autres, au final. » Elle pourrait, Birdie, demain, aller crier haut et fort la vérité. Elle pourrait même le confier en premier lieu à Buck, cela serait une vengeance plus qu’équitable. Mais la petite blonde n’a pas encore cet esprit. Elle n’a pas encore été totalement happé et assombri par le monde réel. Alors elle ne dira rien, elle le sait. Même si à cet instant, Asher ne mérite pas son silence. Alors le doute planera un petit peu, juste pour le faire paniquer ce qu’il faut et lui faire comprendre qu’il y a des choses qui ne sont pas drôles. « Pourquoi tu veux pas ? » Pourquoi tu voudrais ?

Un « non… » qui veut tout dire et rien dire à la fois. Est–ce qu’elle réagit trop vite, trop fort ? Est–ce que la réaction est disproportionnée ? Sûrement qu’Asher ne s’attendait pas à un tel retour de bâton. Birdie non plus, à vrai dire. Elle navigue entre des eaux qu’elle ne connait et maitrise pas forcément. Ses attitudes et réactions ne sont pas prévisibles et elle s’en découvre des nouveaux un peu plus tous les jours – que ce soit de bons ou de mauvais moments à passer. Force de constater qu’Asher a appuyé là où ça fait mal et qu’en excuse, elle a son bagage émotionnel fourni par des années d’attaques de la part de ses paires à l’école.

« J’ai jamais dit ça à personne hein. »
« Tu l’as dit à moi, c’est déjà trop. »
« J’ai dit le premier truc qui m’est venu par la tête pour que tu arrêtes de me questionner et que tu oublies le secret… »
« C’est une grande réussite. »

Parce qu’au final, ils y reviennent à ce foutu secret qui n’en est pas un mais qui en est un quand même. Quand il détourne son regard face à sa question, Birdie s’en détend un peu, juste légèrement, parce qu’Asher a l’air vraiment tracassé. Pour elle, qui s’en fiche de ce que les autres pensent, elle ne saisit pas l’amplitude d’un tel tracas. Voilà pourquoi est–ce qu’elle ne s’en est jamais souciée. Cela aurait remis toute sa vie en question, ses envies, ses plaisirs, sa façon d’être. Birdie a toujours préféré être elle–même quitte à ce que ça dérange et que ça lui vaille des railleries à la cour de récréation que d’être un pantin de plus dans une société aux normes bien trop limitées. Asher est la preuve que les limites sont étouffantes et peuvent aller à l’encontre de ce que l’on veut. « Je sais pas moi ! Elle me plaît pas. » La petite blonde arque un sourcil pour pointer la contradiction dans sa phrase. « J’ai juste pas envie. » Il la fuit du regard – il a vraiment l’air gêné. S’il est comme ça avec elle, qu’est–ce qu’il se passerait si ça se savait pour de vrai ? « J’ai le droit non ? » Birdie se mord la joue intérieure, indécise sur ce qu’elle est censée dire. « Je suis mal placée pour comprendre les rouages de la réputation, vu celle que j’ai. » De la folle, de la bizarre, de la tarée de service. « Mais si t’as pas envie, t’as qu’à… Juste le dire ? » A qui ? Elle n’en sait rien. « Si tes potes se moquent de toi pour ça, c’est pas de vrais potes. » Au moins, Birdie peut se réjouir que ses amis les plus proches sont peu nombreux mais l’accepteront toujours telle qu’elle est, quoiqu’elle fasse. « T’as pas à te forcer. » Pour elle, cela lui semble normal. Chacun fait ce qu'il veut et est libre de ses propres choix. Cela dépasse la petite blonde.