Maman m’a encore emmené à Brisbane pour la danse. J’ai répété toute la semaine, et elle a dit que je pourrais jouer une nouvelle scène avec elle. Donc je l’ai suivi, comme je le fais toujours quand elle tourne à Brisbane pour la danse. J’aime bien y aller quelques jours, ça me fait comme des vacances avec ma mère, des week-ends prolongés où je ne fais que danser et parler de ça. C’est plutôt cool non ?

Elle m’a dit de préparer mes affaires, c’est toujours moi qui prépare mes affaires de danse parce que sinon Max oublie toujours la moitié. Mais il a préparé mes valises, parce que j’ai pas le temps de tout faire non plus. J’espère qu’il a bien fait attention à rien oublier et à mettre mes robes préférées. Parce qu’on va faire des photos, et on va aller faire des soirées pour présenter le films. J’adore ces soirées, et j’adore qu’on fasse des photos de moi dans mes plus belles robes. Et il faut que j’en ai une différente chaque soir. Donc Max porte ma valise jusqu’à la voiture alors que je dois encore vérifier mon sac de danse. Maman a préparé le sien aussi. Et quand on est prête, on nous emmène au jet. Et quelques temps plus tard on est à Brisbane.

Un nouveau chauffeur nous attend, et je sais qu’aujourd’hui on doit passer à l’école de danse. Maman a des gens à voir et je pourrais répéter autant de temps que je le veux. Et je vais certainement voir Diana aussi. Je dois lui dire pour le film, elle va certainement apprendre la chorégraphie avec moi. On arrive et je pose mes affaires en la cherchant un peu partout, je déteste chercher les gens mais c’est l’heure à laquelle elle finit son cours donc elle doit bien être quelque part. Et je décide de crier son prénom, ce sera plus simple non ? “DIANA” toujours rien, pas de réponse. “DIANAAAAAA” Oui je crie plus fort et plus longtemps, quelqu’un finira peut-être par me dire où elle est passée. “ALLEEEEZ réponds on a une chorégraphie à apprendre.”

(2005)
Et un, et deux, et trois, et quatre. Les pas s’enchainaient, se répétaient, se ressemblaient. En avant, en arrière, et dans toutes les directions qui se trouvaient disponibles sous ses pieds. Et cinq, et six, et sept, et huit. Elle tournoyait, virevoltait, se laissait porter par le vent. On reprend. Les gestes qui finissaient par s’ancrer dans sa mémoire, dans son corps et dans ses muscles. Elle finissait par les retenir, Diana. L’entrainement le lui permettait. Et c’était surement ce qu’elle préférait, dans tout ça. S’entrainer longtemps, plus durement, pour réussir à sortir les enchainements que leur professeur attendait. Ce n’était pas en restant en retrait et en attendant que les choses se fassent qu’elle réussirait à acquérir cette technique et à achever un tel niveau de performance. Et un, et deux, et trois, et quatre. La main de Max qui venait la faire tourner sur elle-même, ses cheveux qui s’emmêlaient au fil des tours. La pression de ses doigts contre les siens, la confiance aveugle qu’elle lui portait - littéralement, les yeux de Diana restaient à poing fermé. Et cinq, et six, et sept, et huit. Son souffle se faisait de plus en plus rare, ses bras se crispaient au fil des pas effectués. La fatigue commençait, à contre coeur, à s’immiscer en son sein, et bien qu’elle aurait désiré continuer pendant des heures durant, elle avait besoin d’une pause. « Le cours touche à sa fin. On se revoit dans deux jours. » Les paroles du professeur tombaient à pic. C’était ce dont elle avait besoin. Reprendre son souffle, s’autoriser une pause, avant de se laisser de nouveau emporter par l’effroi que la danse lui procurait. Ses pas la menèrent vers son sac posé dans un coin de la salle. Une bonne gorgée d’eau fraiche pour se redonner des forces, et remettre ses idées en place. Elle se laissait facilement abandonner quand elle dansait, et elle avait toujours un moment de latence lorsqu’elle devait revenir dans l’instant présent. C’était son échappatoire, son monde en parallèle du réel. C’était là qu’elle se sentait le mieux, Diana, lorsqu’elle se laissait porter par le son et les enchainements. « DIANA. » La jeune fille releva la tête, fronçant quelque peu les sourcils. Il lui semblait avoir entendu une voix appeler son prénom, était-elle en train de rêver ? « DIANAAAAAA. » Non, elle n’hallucinait pas, quelqu’un était réellement dans les couloirs des studios en train de la rechercher - et non sans un bruit. Reprenant une dernière gorgée d’eau, elle finit par refermer son sac pour le jeter sur son épaule. « ALLEEEEZ réponds on a une chorégraphie à apprendre. » Ce fut avec un sourire aux coins des lèvres que Diana vint se poster dans le couloir, les yeux dirigés vers l’autre bout du corridor. Elle avait son âge, la petite blonde qui hurlait son nez à tord et surtout à travers. Elle n’était pas perdue, et savait exactement ce qu’elle cherchait, parce-que ce n’était pas la première fois qu’elle venait ici. « Tu vas te faire mettre à la porte à crier comme ça, Ivy. » Mais ça faisait un bon moment que les deux jeunes filles n’avaient pas pu passer du temps ensemble. Ivy n’était pas d’ici, elle n’habitait pas Brisbane, ce qui faisait que leurs rencontres se trouvaient espacées dans le temps. Au dam de Diana, qui passait toujours de bons moments aux côtés de la blondinette. « Tu sais bien qu’ils peuvent être un peu coincés ici, face à une tornade comme toi. »

Spoiler:

Je la cherche et je ne suis pas du tout patiente. Alors au bout de quelques minutes (secondes peut-être) je me mets à crier le nom de Diana partout où je passe dans cette école de danse. Quelle idée de faire des bâtiments aussi grand ? Je soupire, déjà excédée de ne pas trouver ce que je recherche. Elle est peut-être en cours, ou peut-être pas. Mais en tout cas, j’espère qu’elle est quelque part par là et que je n’use ni ma salive ni mes cordes vocales pour rien. Je crie de plus en plus fort et ça me vaut quelques regards choqués de certaines personnes que j’envoie valser d’un revers de main. Ce ne sont pas eux qui m’intéressent, c’est Diana. Et enfin la petite tête brune de mon amie (amie est un grand mot) apparaît dans l’embrasure d’une porte. “Qu’est ce que tu fichais ? ça fait au moins 5 minutes que je te cherche.” Et 5 minutes, c’était déjà presque un effort surhumain.

Et je ris fort quand elle dit qu’ils vont me virer si je continue de hurler comme ça. “Je pourrais hurler comme ça pendant des heures, personne n’oserait me dire quoi que ce soit.” Et, en plus, sa mère aussi se balade dans l’école de danse au même moment. Mais elle a dit qu’elle en aurait pour longtemps, ce qui va nous laisser un bon moment avant d’être dérangé par qui que ce soit. Alors j’avance dans la grande salle pleine de miroir pour faire quelques mouvements alors que je ne suis même pas en tenue. J’aime bien cette école à Brisbane, elle est presque mieux que celle de Sydney. “Oh je suis une tornade ?” Et je souris parce que cette comparaison me plaît énormément. Et je me mets à tourner comme pour illustrer ses propos. “Les gens sont toujours coincés dans cette ville, c’est bien différent de Sydney.” Et je fronce un peu les sourcils. “Je suis là pour peut-être 2 semaines, ma mère doit tourner quelques scènes de films ici.” Et la meilleure nouvelle arrive ensuite, et je me rapproche d’elle, elle sourire carnassier aux lèvres. “Et devines quoi…” Elle ne devinera sûrement pas parce que je ne lui laisse même pas le temps de réfléchir. “Ils cherchent des danseuses figurantes.” Et elle pourrait faire partie du film avec moi.

(2005)
C’était la moue rieuse et les yeux plein de malices que la jeune fille avait posé ses yeux sur Ivy. Elle ne se souvenait plus de la dernière fois que leurs chemins avaient pu se croiser, elle se rappelait seulement que lorsqu’elles étaient toutes les deux, la danse devenait d’autant plus présente et que la bonne humeur était de mise. C’était peut-être ce qu’il lui manquait le plus, ici, à la danse. Certes, elle avait Max et pour rien au monde elle ne l’échangerait contre quelqu’un d’autre - mais une copine avec qui passer du bon temps et de qui se sentir proche ne serait pas de refus. « Qu’est ce que tu fichais ? ça fait au moins 5 minutes que je te cherche. » Elle vint pointer du regard, du menton, la salle de classe de laquelle elle venait de s’extirper. « J’avais cours, il vient juste de terminer. » Et même si elle adorait passer du temps en compagnie de Ivy, et que cette dernière se serait mise à hurler plus tôt que ça, Diana n’aurait pas dévié son attention du cours auquel elle assistait. Améliorer ses compétences étaient primordial, à ses yeux. Ce n’était pas en s’amusant en coulisses qu’elle pourrait gagner les prochaines compétitions. « Je pourrais hurler comme ça pendant des heures, personne n’oserait me dire quoi que ce soit. » Son attention se reporta sur la blondinette qui rebroussait chemin dans sa direction, la rejoignant à même la salle de danse qu’elle venait de quitter. Les prunelles de Diana ne la lâchait pas, la trouvant tout autant terrifiante et intrigante en même temps. Elle était beaucoup de choses qu’elle n’oserait jamais être, Ivy, aux yeux de Diana. « Oh je suis une tornade ? » Diana n’était pas une tornade, par exemple. Et elle savait qu’en qualifiant la jeune fille de telle, cette dernière ne se vexerait pas. En effet, elle vit imiter la tornade littéralement, prenant de la vitesse à tourner sur elle-même. « Une véritable tornade. » Les conséquences s’en venant surement avec, même. Diana ne connaissait pas assez Ivy pour savoir comment elle pouvait se comporter dans la vie de tous les jours, mais rien qu’à voir comment elle présentait lorsqu’elles se croisaient au studio de danse, Diana savait qu’elle pouvait en faire voir de toutes les couleurs à qui désirait comprendre l’arc-en-ciel. « Les gens sont toujours coincés dans cette ville, c’est bien différent de Sydney. » Elle vint hausser les épaules, rapidement. Elle connaissait Sydney mais de façon tellement succincte qu’elle ne pourrait venir confirmer les dires de la jeune fille. Elle n’y avait mis les pieds que lors de compétitions ou de concours de danse, et le parquet dédié à ce type de rencontre était la seule chose qu’elle avait réellement retenu de cette ville. « Je suis là pour peut-être 2 semaines, ma mère doit tourner quelques scènes de films ici. » Là, la curiosité de l’adolescente fut piquée à vif. Ses yeux tournèrent de nouveau vers Ivy, son attention toute focalisée sur ce qu’elle allait dire à la suite. Les moments où Ivy et sa mère étaient présentes au studio faisaient partie des meilleurs souvenirs de Diana. Les danses qu’elle pouvait pratiquer à ces moments là étaient bien différentes de tout ce qu’elle apprenait au quotidien entre ces quatre murs et elle n’avait jamais autant évolué qu’à ces occasions. « Deux semaines ? Entières ? Pour vrai ? » L’excitation était à peine contenue dans sa voix. « Et devines quoi… » Celle de la blonde n’était guère mieux contenue, et Diana eut à peine le temps de venir hausser un sourcil sur le haut de son front que la jeune fille reprit la parole. La patience n’était pas réellement son fort - et c’était pour le mieux à ce moment là, la jeune Rhodes voulait savoir au plus vite ce qu’elle voulait lui annoncer. « Ils cherchent des danseuses figurantes. » Un instant, et un second qui vint suivre sans crier gare, passèrent. L’excitation dans le regard de Diana n’avait cependant pas diminué, et tout un tas d’idées se mirent à traverser son esprit. « Des danseuses figurantes ? Comme toutes celles qu’on voit dans les grands films de Hollywood ? » Elle n’était pas la plus branchée cinéma, mais cet art ne lui échappait pas lorsqu’il pouvait être source d’apprentissage. « On va avoir d’autres personnes connues comme ta maman qui vont venir ici pour danser aussi ? » Elle était naïve, Diana. Certains pourraient même la qualifier de quelque-peu idiote - elle ne voyait juste pas ce qui pouvait se situer sous son nez, rien de plus. Déjà à l’époque, elle avait la tête quelque peu dans les nuages là où ses pieds martelaient parfaitement le sol de ses pas de danse.

Spoiler:

J’ai cherché Diana pendant quelques longues minutes. Des minutes qui m’ont paru longue quand j’étais en train de hurler dans les couloirs de l’école de danse. Et maintenant, elle est juste devant moi, elle sort de son cours de danse et je regrette presque de ne pas être arrivé plus tôt, j’aurais pu m’incruster et suivre le cours avec elle. Elle me compare à une tornade et j’aime beaucoup l’idée, j’entre dans la salle de danse et commence à tourner sans m’arrêter. Si j’avais mes pointes j’aurais sûrement commencé un manège pour ne plus m’arrêter avant de longues minutes. Cet endroit me donne envie de danser, et c’est sûrement ce que je vais faire jusqu’à ce que ma mère en ait fini avec son rendez-vous. “J’aime cette idée.” Et je souris à Diana en me tournant vers elle alors que je me retrouve au milieu de la pièce.

Et je commence à lui parler de combien de temps je vais être ici, mon sourire en coin s’élargit parce que je passe rarement plus d’un week-end sur Brisbane, mais là, je reste près de deux semaines si tout se passe bien. Je vois que mon amie a l’air ravi, et encore, elle n’est pas au bout de ses surprises. J’attends un peu, je laisse du suspens parce que ça m’amuse et parce que je la vois trépigner d’impatience. Mais je fini par tout lui dire. “Oui deux longues semaines, et ce sera stage de danse intensif j’espère que t’es prête.” Bien sûr qu’elle l’est, elle est toujours à fond quand il s’agit de danser Diana.

Mais la vraie annonce c’est les danseuses figurantes, parce que j’ai déjà parlé de Diana à ma mère, elle l’a déjà vu danser, et je suis quasiment sûre que si j’insiste elle lui proposera une place pour danser. Une place derrière moi bien sûr, mais une place quand même. Je ne veux pas non plus que quelqu’un me vole la vedette. Je hoche vivement la tête en me rapprochant lentement d’elle. “Comme les danseuses d’Hollywood. Ca te dit de tenter ta chance ?” Je ne sais même pas pourquoi je pose vraiment la question quand on connait déjà toutes les deux la réponse évidente. “Tu me laisses même pas le temps de te donner les meilleures nouvelles !” J’ai dit stage de danse intensifs pas vrai ? Alors ce ne sont certainement pas les profs de danse de Brisbane qui vont venir nous coacher pour ce film. Et c’est bien pour ça que je compte l’embarquer avec moi dans cette aventure de quelques semaines seulement, elle doit en profiter à fond et moi aussi. “Un chorégraphe américain, je connais plus son nom. Et une danseuse étoile française !” Et moi, c’est cette nouvelle là que je préfère. J’adore les danseurs français, et j’aime surtout montrer au monde entier que je maitrise parfaitement cette langue (comme beaucoup d’autres d’ailleurs). “Devine laquelle !” Mes yeux pétillent de malice alors que je l’entraine avec moi dans la grande salle.  

(2005)
« Oui deux longues semaines, et ce sera stage de danse intensif j’espère que t’es prête. » Les yeux de la jeune Diana n’en pouvaient plus de s’ouvrir de plus en plus, émerveillés par les paroles de Ivy. Elle savait amener de bonnes nouvelles, dans le tourbillon de la tornade qu’elle était. Elle savait aussi leur donner les bonnes intonations pour rendre une conversation pourtant simple intrigante au point où Diana buvait désormais ses paroles, ne retenant plus l’excitation qui l’animait. Elle voulait en savoir plus, elle voulait en découvrir plus - et, bien sûr qu’elle était prête pour un stage de danse intensif, elle l’était toujours. Leur professeur leur avait parlé d’un quelque-chose qui se passerait au sein de leurs murs dans les semaines à venir, mais elle n’avait pas pensé qu’elle aurait la chance de passer ce moment là avec Ivy. Et elle enchainait ses paroles, Ivy, elle venait en annoncer toujours davantage - alors que Diana ne savait même pas si dans le fond, elle avait vraiment le droit de lui en dire autant dès tout de suite. Mais elle était curieuse et elle ne se freinait pas sur les questions envers son amie. « Comme les danseuses d’Hollywood. Ca te dit de tenter ta chance ? » Sa bouche vint former un O parfait, ses yeux vinrent s’écarquiller toujours plus, si cela était possible. « De tenter ma chance de ? Pour les danseuses figurantes ? » Diana était encore jeune et même si le devant de la scène ne lui avait jamais fait peur, elle s’était contentée jusque maintenant de mettre son art en avant sur des compétitions et des concours, et surtout jamais seule. Il était très rare qu’elle en vienne à danser sans Max, plus le temps avançait. « Dis pas des bétises, je suis pas une professionnelle moi, j’ai pas ma place dans ce genre de choses ! » Pourtant, son niveau était largement suffisant pour ce genre de choses, justement. Elle pourrait déjà faire partie d’une grande partie de l’histoire de la danse, Diana, si elle n’avait pas décidé de pratiquer cet art uniquement pour le plaisir qu’il pouvait lui procurer. « Tu me laisses même pas le temps de te donner les meilleures nouvelles ! » Elle vint étirer un petit sourire d’excuses, ne sachant trop retenir sa curiosité il fallait dire. Tout ce que Ivy lui disait était autant étonnant qu’agréable à imaginer, alors forcément qu’elle venait en poser mille des questions. « Un chorégraphe américain, je connais plus son nom. Et une danseuse étoile française ! Devine laquelle ! » Le cerveau de Diana était trop assailli d’images de spectacles et de plateaux, de chorégraphie parfaitement orchestrées pour imaginer quelle danseuse pourrait venir jusqu’ici, depuis la France, dans leur petit studio à Brisbane. Alors, elle vint secouer la tête, hausser quelque peu les épaules, alors que Ivy venait attraper sa main pour l’entrainer dans le grand studio du fond, celui où les spectacle se mettaient sur pieds. « Je sais pas, tu les connais mieux que moi les noms des danseurs. C’est une qu’on voit à la télé et dont on entend parler ici, quand on fait les cours de classique ? » Ses pas venaient accélérer pour suivre le mouvement, alors qu’elle tentait de se rappeler les quelques informations que leur professeur de classique pouvait leur donner sur les danseurs en vogue du moment et dans l’histoire. Elle n’avait pas fait en sorte de faire un cursus uniquement concentré sur la danse, Diana, et parfois il lui arrivait de peiner à savoir ce genre de détail.

Spoiler:

Je fais dans le suspens, dans l’attente. J’adore voir Diana qui est prête à devenir folle parce que je ne parle pas assez vite. Mon sourcil se hausse à de nombreuses reprises alors que je me pose juste devant elle pour lui parler de tous mes plans pendant ces deux longues semaines. On est pareil sur la danse, on est passionné. Et je suis sûre qu’elle est prête pour faire un stage de danse intensif, alors je n’ai pas vraiment besoin de réponse même si je laisse un moment de silence, pour toujours laisser un peu plus de suspens. Elle est étonnée que je lui propose de tenter l’audition, si j’en parle à ma mère elle est sûre de réussir, et elle passerait dans un film, avec moi. Derrière moi, mais avec moi quand même. “C’est dommage, parce que j’ai déjà la date et la chorégraphie à préparer.” Je fais mine de m’éloigner, elle va me suivre, je le sais. Je vois dans ses yeux qu’elle en meurt d’envie.

Je laisse encore du temps et ça me fait rire, je joue même aux devinettes avec elle. C’est le meilleur stage auquel elle pourra jamais assister. Mais, pour y avoir le droit gratuitement, il faut qu’elle fasse partie des danseuses figurantes. J’imagine que ça doit être cher comme genre de stage pour le commun des mortels ? Pas que ça m’intéresse mais c’est une question qui est rapidement passée dans mon esprit avec que je la chasse du revers de la main. “Sylvie Guilhem” Et mes yeux s’agrandissent, même moi ça m'impressionne c’est pour dire. “Elle a du caractère.” Et elle va me remarquer, elle pourrait remarquer Diane aussi si elle ne me fait pas d’ombre, je ne râlerais même pas. “Alors ? T’en penses quoi ?” Maintenant c’est moi qui suis impatiente, parce qu’elle ne m’a toujours pas dit si elle voulait vraiment passer cette audition. “Je me prépare toute seule ou tu travailles avec moi ?” On va le faire ensemble, et on passera des heures de jour comme de nuit à travailler et retravailler les même mouvements pour être parfaite. Moi je suis sûre d’avoir ma place dans ce film, pour Diana, il y a 95% de chances.

(2005)
Elle n’osait pas trop s’y projeter, Diana, même si les paroles de la petite blonde lui donnaient drôlement envie. Si elle comprenait bien, Ivy lui suggérait de venir faire partie des danseurs figurants dans le prochain film de sa mère, le film pour lequel elles étaient toutes les deux à Brisbane pendant les prochaines semaines. Ca lui paraissait invraisemblable, et pourtant elle était la seule des deux gamines à ne pas y croire. « C’est dommage, parce que j’ai déjà la date et la chorégraphie à préparer. » Ivy se moquait d’elle, elle venait jouer de ses réactions et de ses émotions - et le pire, dans tout ça, c’était que ça fonctionnait. Diana était de plus en plus intriguée par ce que la gamine pouvait lui apporter comme éléments, comme détails, et ses yeux brillaient à en rendre jaloux un ciel étoilé. « Mais normalement, c’es que les professionnels qui peuvent avoir accès à ses essais là ! Ne me fais pas chanter, Ivy, tu sais bien que c’est pas sympa. » Ses mots étaient mitigés, elle était frileuse, mais le ton de sa voix trahissait tout le reste. Elle ne saurait contenir correctement son excitation à l’idée de pouvoir participer à un projet de la sorte. Ce n’était pas tant l’idée de venir tourner dans un film, mais plutôt le fait de pouvoir venir se donner à fond pour quelque-chose qui rendrait les gens heureux lorsqu’ils le verraient. Les films de danse permettaient d’initier un nombre impressionnant de futurs jeunes talents qui s’ignoraient encore - Diana en connaissait un rayon, elle regardait encore et encore les mêmes films de danse les soirs d’hiver. Finalement, ne voulant pas perdre un seul instant de le présence de Ivy à ses côtés, la fillette vint enchainer les questions et les interrogations sur la suite du programme dont la blonde lui parlait. « Sylvie Guilhem. » Qu’elle vint lui répondre lorsqu’elle lui demande quelle danseuse française osait s’aventurer jusqu’à eux, ici, à l’autre bout du monde. « Elle a du caractère. » La bouche de Diana vint former un O parfait, alors que l’étonnement se lisait parfaitement dans ses yeux. Elle n’était encore qu’une gamine comme à un matin de noël, en réalité, actuellement. « Mais c’est l’une des meilleures ! » Elle ne faisait pas un cursus scolaire uniquement basé sur la danse, mais elle connaissait tout de même un rayon - et surtout lorsqu’un nom aussi connu venait dans la conversation. « Alors ? T’en penses quoi ? Je me prépare toute seule ou tu travailles avec moi ? » Ralentissant ses pas, venant presque quelque peu trainer de la patte, les deux jeunes filles finirent par arriver dans le grand studio, là où Ivy cherchait à entrainer Diana depuis le début. Là, des danseurs et des danseuses dont la jeune Rhodes n’avait jamais vu les visages se tenaient, dans leurs tenues, prêts à se mettre en mouvement au moindre coup de sifflet. La bouche de la demoiselle vint s’ouvrir et se fermer plusieurs fois, son esprit et son attention accaparés de partout. Elle ne savait plus où donner d cela tête et de la raison, Diana. Elle ne savait plus ce qu’elle devait dire, les moments où elle devait acquiescer. Elle était perdue dans tant d’informations et n’était surtout pas habituée à de tels projets. La compétition ne lui faisait pas peur, à Diana. Elle en avait l’habitude pour avoir côtoyer certains des meilleurs podium d’Australie. Mais là, l’enjeu était tout différent. Ce n’était pas pour sa propre gloire et pour ses propres défis qu’elle entrerait dans cette salle, aujourd’hui. Elle le ferait pour s’afficher aux yeux de tous dans le simple but de s’afficher - et ce n’était pas sa came habituellement. « Ivy… » Une partie de l’excitation avait quitté ses yeux, désormais, alors qu’elle laissait un brin d’inquiétude prendre sa place. « Je suis pas assez forte pour aller là et faire partie de tout ça, tu le sais… » Ce n’était pas vrai, mais c’était la réalité à laquelle elle croyait, alors qu’elle montrait du menton à son amie la salle remplie de danseurs bien plus âgés qu’elle et bien plus doués.

Spoiler:

Je m’amuse avec Diana, je lui donne les informations au compte gouttes avec un suspens tout calculé. Je pense qu’elle déteste ça mais je m’en fiche, elle n’a pas l’air de réaliser ce que je lui propose. Je suis sérieuse, cette fois je ne mens pas mais elle a raison de douter. Si elle n’avait pas été mon amie j’aurais très bien pu jouer avec ses passions et lui faire subir le pire ascenseur émotionnel de toute sa vie. “Les professionnels ouuuuuu les amies de la fille de l’actrice principale du film.” Si elle ne veut pas de la place je ne la forcerai pas non plus. Je ne vais pas la supplier de faire partie de ce film, ça fera plus de place pour ne voir que moi et ma mère.

Elle ne peut pas refuser un stage avec de telles légendes de la danse, elle sait que c’est une grande chance pour elle alors je me demande juste ce qu’elle attend pour jeter son sac par terre et se remettre à danser jusqu’à avoir les pieds en sang. “Je sais !” Je suis habituée à ce genre de stage et de fréquentations, mais pour Diana, c’est peut-être la plus grande chance de sa vie. Je continue d’avancer et je la ramène dans la bonne salle. La plus spacieuse. Il y a déjà un bon nombre de danseurs qui n’attendent que de commencer le cours, et c’est à Diana de décider si elle veut faire partie de tout ça ou non. Elle n’a qu’un mot à dire et elle pourrait avoir les plus belles tenues et se retrouver face caméra plus d’une fois. Je ne suis pas le genre d’amie qui va lui dire que c’est la plus forte du monde, qu’elle va faire une tabac, parce que je n’en sais rien. Mais ça me frustre qu’elle ne suive pas ma décision sans sourciller. “Qu’est ce que t’as à perdre ?” Je grognerais presque alors que les danseurs s’échauffent à quelques mètres de nous. “T’as un stage gratuit à la clef, une tonne d’expérience et des jours entiers à ne faire que danser. Et crois moi, si t’étais pas assez forte ma mère aurait dit non quand j’ai proposé que tu nous accompagne.” Elle a toutes les cartes en main, elle n’a plus qu’à prendre la bonne décision.                

(2005)
La situation divisait clairement le comportement des deux jeunes filles. Elles ne réagissaient pas de la même façon et là où Ivy était clairement dans son élément, comme un poisson dans l’eau, Diana optait pour une toute autre réaction. Là où la blonde n’en pouvait plus d’attendre de se remettre à danser, les pas de la brune ne cessaient de ralentir au fur et à mesure des secondes qui s’écoulaient. L’hésitation devenait grande, si grande qu’elle prenait désormais toute la place qui pouvait lui être accordée et se rendre disponible pour elle. « Les professionnels ouuuuuu les amies de la fille de l’actrice principale du film. » Diana ne remettait pas en cause l’idée que Ivy puisse la faire entrer dans le casting sans lui faire passer de réelle audition de performance ou quoi que ce soit - il y avait beaucoup de rôles qui étaient obtenus grâce au bouche à oreille, c’était un fait bien connu. Mais là, ce qu’elle lui proposait était impensable. Diana n’était qu’une gamine aux yeux de toutes les autres personnes présentes aujourd’hui, elle n’était en rien légitime que de se fondre dans la masse, se laisser porter par la foule. « Qu’est ce que t’as à perdre ? » Le regard un brin déstabilisé, voire même quelque peu apeuré, de la jeune Rhodes faisait le trajet entre les danseurs qui s’échauffaient et Ivy, à ses côtés, attendant après ses prochaines paroles. Son coeur battait la chamade, ses oreilles se mettaient presque à siffler. Ce qui était certain, c’était que son souffle devenait court. « T’as un stage gratuit à la clef, une tonne d’expérience et des jours entiers à ne faire que danser. Et crois moi, si t’étais pas assez forte ma mère aurait dit non quand j’ai proposé que tu nous accompagne. » Elle croyait en tous les mots qui se formaient au bout des lèvres de son amie. Elle y croyait dur comme fer et pouvait, en se laissant un instant de répit, imaginer tout ce qu’elle lui contait. Les robes. Les caméras. Le plaisir. Mais tout ceci était trop gros - pour elle, à ses yeux. Diana n’avait rien à faire dans les décors que lui plantait Ivy. Elle n’y avait en aucun cas sa place - sans parler des conséquences qu’une telle décision pourrait avoir sur son avenir, sur sa famille et ses proches. Elle n’était pas vieille, Diana, mais avait déjà la tête sur les épaules et les pieds bien ancrés dans le sol. Alors, avant même qu’elle ne s’en rende comptes, la tête de Diana était déjà en train d’osciller de gauche à droite, ses pas étaient déjà en train de stagner en s’apprêtant à faire demi-tour. « Non… » Ce fut le bruit de sa propre voix qui la fit sortir de sa stupeur. Et, après être restée un instant de plus le regard dans le vague, elle décala ses pupilles pour qu’elles viennent s’ancrer dans celles de la jeune fille à ses côtés. « Ivy, c’est… c’est impossible pour moi. » Elle était jeune mais savait déjà ce qu’elle désirait dans la vie, la jeune Rhodes. Et même si la danse était ce qui lui procurait le plus de joie et d’allégresse dans ce monde, elle ne souhaitait pas avoir des projecteurs braqués sur elle en permanence lorsqu’elle profitait des planches. « Vraiment, merci, mais… Je peux pas faire ça. C’est pas pour moi, ça… » Des mots presque murmurés, pourtant pleinement assumés, simplement impensables pour l’une ou l’autre - pour la première, le refus ne faisait pas partie de son vocabulaire et pour la seconde, jamais elle n’aurait pensé se voir offrir une telle possibilité.

Spoiler:

Je pensais vraiment que Diana me suivrait. Qu’elle enfilerait ses chaussons et sa tenue de danse pour me suivre et s’entrainer jusqu’à ce que mort s’en suive et qu’on soit filmées ensemble. Je l’emmène, l’entraîne dans les dédales des couloirs de l’école de danse pour retrouver ma mère et tous les autres danseurs professionnels. C’est peut-être la chance de sa vie, son moment. Mais j’entends un non dans mon dos, et je déteste que quelqu’un me dise non. Mon regard devient noir et mes bras se croise sur ma poitrine. On ne dit pas non à Ivy Waterhouse. Je soupire, elle me fait perdre mon temps et elle m’agace. Mon humeur change du tout au tout en moins de quelques secondes et je n’ai plus envie de la voir dans les parages si au final elle savait depuis le début qu’elle allait dire non. “Qu’est ce que tu fais là alors ?” Je grogne, lève les yeux au ciel. “Peut-être que t’es pas à la hauteur.” Je peux devenir méchante quand je me braque, et elle m’a braqué la demoiselle. J’ai envie de danser, et, il y a encore quelques minutes, je l’aurais fait avec elle et elle aurait pu devenir célèbre. Mais, maintenant, elle peut être sûre que plus jamais je ne glisserai son prénom à l’oreille de ma mère lorsque nous reviendrons dans cette ville. “C’était peut-être ta seule chance de faire ce que tu veux vraiment.” Je soupire, un soupire qui siffle entre mes dents et qui montre que je suis excédée. Ma tête se tourne et je m’éloigne de la jeune femme qui a décidé d’arrêter de me suivre. “Je vais leur dire de chercher une autre danseuse pour nous accompagner.” Elle a dit non une fois, elle ne le dira pas une deuxième. C’est tant pis pour elle. Elle aurait pu devenir actrice et ma meilleure amie, elle aurait pu danser toute sa vie, mais elle vient de griller toutes ses chances.