Marcher à contre-courant est devenu mon petit pêché mignon, celui de pouvoir égarer de ça et de là des coups de coude dans les côtes des étudiants et des étudiants qui m'ont royalement fait chier en classe ces derniers temps. Ça passe parfaitement, entre un "Mille excuses" et un "Décidément, je ne sais pas où j'ai la tête!", additionné d'un des sourires les plus faux que j'ai en banque. Ils sont nettement trop jeunes et tout autant naïfs pour capter le machiavélique de la chose. C'est qu'on vient tout juste d'emménager en Australie, et qui que ce soit frôlant le sol de marbre de l'université de Brisbane à mes côtés n'a pas encore reçu tout à fait le bon mémo sur la marche à suivre lorsque je suis dans les parages.

Avant, c'était Londres, et avant ça, Milan. On a dérivé à Paris aussi entre-temps, mais de toutes les villes dans lesquelles on a pu habiter, ma préférée reste Boston. Harvard m'a plu du début à la fin. Là-bas, personne ne se faisait chier avec des banalités, personne n'était qu'en surface. Les discussions étaient bonnes, les échanges étaient phénoménaux. On y est restés durant tout notre cursus d'études avant d'y décrocher des postes de chargés de cours, on en a mangé de la merde avant de pouvoir avoir nos propres salles de cours. Et lorsqu'ils nous ont catapultés à la Sorbonne, j'ai ragé, j'ai ragé fort. Saül en a fait les frais mais comme à l'habitude, il m'a désamorcée mieux que quiconque. C'était une question de vie ou de mort à un certain point, et pour ça, je parle du reste du monde entier - mes menaces ne vont jamais à lui.

Ses étudiants donc, qui quittent sa classe sans que je ne me gâte d'une petite attaque. Il y a encore des restes, posés autour de son bureau à quémander la bouche baveuse et l'oeil brillant le récit de ses dernières aventures. Pour l'heure, ma silhouette s'appuie dans l'embrasure de la porte, comptant sur mes prunelles acérées vissées sur sa nuque pour qu'il finisse par capter que je suis là. Lorsqu'ils ont tous réalisé qu'ils sont de trop, j'entre et ils sortent. Son bureau est nickel, ses affaires sont placées dans un ordre impeccable qu'il tient coûte que coûte, que je défais en glissant mes doigts parmi les papiers, en entraînant vers la chute pléthores de ses stylos si dûment rangés.  

« Y'a des rumeurs de trésor, dans le coin. Tu savais? » moi, je sais. Moi, j'ai entendu les discussions en messe basse à la bibliothèque de l'université. Moi, j'ai l'oreille affinée. Et lorsque mes bras passent de chaque côté de ses épaules pour le ramener un peu plus à mes lèvres, c'est un sourire déjà vainqueur qui s'y affiche. Il sait aussi bien que moi que je nous vois déjà remporter la cagnotte sans foi ni loi.

Le cours du jour était passionnant, comme d'habitude. De toute façon, il l'est essentiellement parce que Saül en est le professeur. Les étudiants sont curieux, ça aide. Une poignée d'entre eux seulement réussiront à faire quelque chose de leurs études, mais Saül n'en a pas grand chose à faire. De tous les professeurs, il est celui qui se mélange le moins aux autres dans la salle réservée au petit personnel. Il n'y a mis les pieds qu'une fois avec Ariane, pour boire un mauvais vin d'accueil en compagnie des autres. Toutes les universités ne se sont pas toujours montrées accueillantes comme celle-ci, mais Ariane et Saül n'ont de toute façon pris cette spécialisation que pour cacher autre chose. Être prof, ce n'est pas du tout ce qui finance leurs voyages et les extras.

Saül le connaît, ce regard, quand Ariane s'approche enfin. Les étudiants filent bien vite, guettant au passage de quoi faire des ragots. « Y'a des rumeurs de trésor, dans le coin. Tu savais? » « Tu sais toujours tout plus vite que moi, c'est dans la police qu'on aurait dû s'implanter. » Un baiser pour elle et Saül s'éloigne un instant pour ranger tout ce qu'elle a laissé comme bazar. Il a appris à ne plus faire de commentaires, ce serait lui tendre le bâton pour se faire battre. Oui, ils auraient dû s'implanter dans la police. Quel est le proverbe, déjà ? Garde tes amis proches et tes ennemis encore plus proches ? Quelque chose du genre. « Il y a toujours des rumeurs de trésor, moi ce que je veux ce sont des faits. Qui t'en a parlé ? » C'est vrai qu'il a remarqué, Saül, que la ville semble décidée à leur jouer de drôles de tours ces temps-ci. Et puis, cette histoire sanglante qui a marqué le musée de la ville a eu le temps de faire le tour des oreilles.

Les papiers ont déserté le bureau de l'italien, qui passe son bras autour de la taille de son épouse. La constante, ce sont les alliances qu'ils portent à l'annulaire. Le plus beau des trésors c'est Abel qui attend sagement le retour de ses parents. Quelques secondes plus tard, les deux époux sortent. A cette heure de la journée, les couloirs sont complètement vides. « Le directeur doit savoir quelque chose. » Et les deux professeurs passent justement devant son bureau. « Je sais toujours crocheter les serrures. » Le chuchotis, à l'oreille d'Ariane, les lance déjà sur leur terrain de chasse favori : celui des chasseurs de trésor.

Réussite - La serrure ne résiste pas au crochetage.
Presque - La serrure résiste, mais les couloirs sont toujours aussi vides.
Échec - La serrure résiste et quelqu'un vient déranger les voleurs.

« Tu sais toujours tout plus vite que moi, c'est dans la police qu'on aurait dû s'implanter. »
« Ew, je porte très mal le trench. »

L'enseignement est ce qui semblait le plus logique, le plus tangible. C'est là où personne n'allonge un peu trop le nez sur nos trouvailles, où on n'a pas à devoir gérer les questions et autres demandes intrusives d'un corps de police en entier qui finirait presque toujours par nous piquer des mains nos plus précieux secrets. Pour l'heure, le moins la moindre source d'autorité ne vient errer autour de nous, le mieux. Lorsque ses lèvres attrapent les miennes au vol, mon rictus de dégoût bien plus pour sa proposition de réorientation de carrière s'envole au profit d'un sourire entendu de plus. Jamais je ne jouerais la Bonnie d'un autre Clyde que lui.

« Il y a toujours des rumeurs de trésor, moi ce que je veux ce sont des faits. Qui t'en a parlé ? » oh le lourd, oh le cartésien. Il se dégage pour ramasser un bordel, j'en cause un autre en attrapant une craie pour en barbouiller son tableau si savamment aligné. Qui écrit aussi droit, qui écrit aussi bien avec un bras posé contre le vide? « Pour que tu chasses avec quelqu'un d'autre que moi? Oublie ça. » la pique vole entre un rire et un autre. Ce qu'on fait là, on l'a commencé ensemble autant qu'on le finira à deux. Il n'y a pas de changement d'équipe en cours de route, encore moins de trahisons au programme. Si ma confiance n'est accordée qu'à un cercle très restreint de gens sur cette planète, elle lui est entièrement dédiée.

Il n'a pas besoin d'être noyé de compliments et de baisers de plus, lorsque je glisse mon bras sous le sien, que mes doigts s'affairent à pincer la peau à travers sa veste de tweed du parfait petit professeur érudit. Il se complaît dans le rôle bien plus facilement que moi, et si mes escarpins me ravissent par l'écho terrifiant qu'ils causent à claquer sur le linoléum des couloirs de l'université, mes chaussures de terrain me vont bien mieux.  

Une porte, une autre, leurs couloirs sont fades, lisses, beiges et droits. Ils manquent de reliques et d'artefacts, ils ne ressemblent en rien à ceux du manoir familial aménagé par nos soins au fil de nos voyages. « Le directeur doit savoir quelque chose. » mon sourcil se hausse, sachant déjà où il ira avant même qu'on y soit. Les avantages de cumuler plus d'une décennie à ses côtés, assurément. « Je sais toujours crocheter les serrures. » « Vas-y, j'ai du rouge à peaufiner. » le sous-entendu qu'il sera assez lent à faire que mes lèvres pourront enfin être aussi parfaitement carmin que je le veux vient avec un ton qui frôle la moquerie de bac à sable.

J'ignore ce qui me satisfait le plus, entre découvrir un tombeau débordant de richesses toutes plus dorées les unes que les autres, ou d'entendre le cliquetis distinct d'une serrure qui cède aux mauvaises intentions de mon mari. La porte s'ouvre sur sa silhouette à lui, la mienne se faufile à sa suite en refermant le tout ni vu ni connu. « Si Abel apprend ça un jour on est dans la merde. » que je pouffe, chuchotant au passage. Lorsque le bambin d'à peine trois ans arrivera à ouvrir les portes qu'on lui cachent pour l'instant, ce sera plus que chiant de devoir lui expliquer tout de A à Z, de devoir lui faire un crash course sur qui sont réellement ses parents. Évitons, pour le moment.

Saül part à gauche, je file à droite, la chorégraphie est aussi facile à suivre qu'enregistrée. On l'a faite des dizaines de fois, aujourd'hui ne sera pas exception à la règle. « C'est le recteur de la galerie académique, qui m'a dit. Il l'a entendu du curateur du musée. » que je finis par expliquer, les doigts occupés à glisser sur des documents et autres cahiers. Lorsque je relève le menton, c'est vers une fissure tracée le long du mur que mon attention se rive. Est-ce que ce serait un passage secret, ou je ne vois que ce que je veux voir?



WIN il y a bel et bien un passage secret dans le bureau du directeur, menant vers des indices sur la suite de la chasse au trésor
SO CLOSE - il y a bel et bien un passage secret dans le bureau du directeur maaaaaaaais l'endroit semble avoir déjà été fouillé par quelqu'un, signe que oui, il en savait plus
FAIL - rien du top flop flop flop, l'idée de Saül était nulle et elle le lui fera bien savoir

« Pour que tu chasses avec quelqu'un d'autre que moi? Oublie ça. »
« Je gagnerais à changer de partenaire, tu manques vraiment d'esprit de coopération. »

Ils gagnent ensemble, pillent ensemble, revendent ensemble. Pour l'instant, l'engrenage ne présente aucun grain de sable. Tout va pour le mieux. La suite est simple est efficace, les deux époux se dirigeant d'un pas décidé dans les couloirs de l'université. L'endroit est calme, vraiment trop calme. Rien qui inquiète beaucoup Saül, de toute façon. La porte du bureau du directeur est aisée à trouver. « Vas-y, j'ai du rouge à peaufiner. » Les mains déjà armées du nécessaire, Saül s'affaire à l'ouvrage. Penché sur la porte, l'italien crochète la serrure sans beaucoup de difficultés. En quelques instants, ils peuvent se faufiler sans craintes dans le bureau, qui se trouve par ailleurs au rez-de-chaussée. De quoi filer par la fenêtre, si les choses venaient à se gâter. « Si Abel apprend ça un jour on est dans la merde. » « C'est la première chose que je lui apprendrai à faire. » Lorsqu'il se mettra dans des difficultés, il lui faudra bien savoir se servir de sa tête - et de ses mains. Saül referme derrière lui la porte et enfile les gants de cuir qu'il emporte toujours avec lui. Pour le mauvais temps, officiellement. Pour ne jamais laisser de traces, officieusement.

Déjà, le couple se met au travail. Ils ont l'habitude de ce genre de cas, lorsque certains refusent de coopérer sagement. « C'est le recteur de la galerie académique, qui m'a dit. Il l'a entendu du curateur du musée. » « J'ai entendu des histoires vraiment louches à propos d'événements étranges. Je n'y croirai que lorsque j'aurai le nez devant. » Un peu comme Saint-Thomas, Saül ne croit que ce qu'il voit. Les doigts de l'italien passent et repassent sur tous les bords du bureau en bois, filent à travers les rainures de la chaise et tâtent tous les clous du dessous de l'assise. Mais Ariane est plus rapide. Des deux explorateurs, elle a toujours été la plus observatrice. Saül la rejoint en deux pas, glisse à son tour ses doigts tout du long de la fissure qui mène à une petite encoche. « Tu gagnes pour cette fois. » L'instant d'après, le mur s'ouvre sur une cache. Quelqu'un a vraisemblablement pensé que la seule présence de la cachette protégerait ses documents.

« Ca parle d'un bateau. D'une livraison. Une... tablette. » Saül fronce les sourcils. Dans le couloir, on entend des pas. L'instant d'après, Ariane et son époux ont filé par la fenêtre.

***

« C'est horrible, l'odeur. » Tout est horrible. Il n'était pas comme ça, le fleuve, hier. Saül ne prend jamais trop de temps pour le contempler tant il a peur bleue de l'eau, de toute façon. La journée arrive sur sa fin. « Comment tu veux qu'on trouve lequel est le bon ? » Sur la note qu'ils ont emporté, rien à propos de l'indication du bateau, sinon un numéro à peine visible. Sur la berge, les animaux morts pourrissent. « Je ferai brûler mes vêtements en rentrant. Et toi aussi. Pas moyen que je traverse, on ne sait même pas si elle existe, cette tablette. Il n'y a rien sur sa composition, ni sur ce qu'elle vaut. Si ça se trouve, elle est en bois. » Des rivières de sang, il ne manquait plus que ça.

Réussite - Le premier bateau qu'ils choisissent d'explorer sera le bon. Et en plus, il n'est pas si loin des autres, facilitant ainsi la traversée.
Presque - Le premier bateau qu'ils choisissent d'explorer sera le bon. En revanche, rien en vue pour y accéder...
Echec - Mauvais bateau. Oops.

« J'ai entendu des histoires vraiment louches à propos d'événements étranges. Je n'y croirai que lorsque j'aurai le nez devant. » blablabla et il m'ennuie. Il m'ennuie à jouer à l'adulte, il m'ennuie à réagir sans la moindre envie. Si on l'avait écouté, des tas de chasses n'auraient même pas eues lieu - et des tas d'erreurs enthousiasmées de ma part non plus. Ça par contre, je me garde de le souligner.

Le passage secret se dévoile sous ses doigts, les miens tatouent sa nuque d'une mélodie - de victoire - complètement inventée. « Tu gagnes pour cette fois. » « Redis-le encore. » de la musique à mes oreilles, il ferait pareil si c'était l'inverse qui se produisait.

Et ils viennent enfin, les mots magiques. « Ca parle d'un bateau. D'une livraison. Une... tablette. » c'est l'adrénaline qui nous pousse à partir en fuite, c'est l'adrénaline aussi qui ajoute un baiser de plus à notre compteur. Un plus langoureux encore que les précédents. Ce soir, on rentre avec un nouveau trésor à la maison.

***

« C'est horrible, l'odeur. »
« Arrête de râler et avance. »
« Comment tu veux qu'on trouve lequel est le bon ? »
« Tu as peur de l'eau, pas du sang. »
« Je ferai brûler mes vêtements en rentrant. Et toi aussi. Pas moyen que je traverse, on ne sait même pas si elle existe, cette tablette. Il n'y a rien sur sa composition, ni sur ce qu'elle vaut. Si ça se trouve, elle est en bois. »
« Ou en or. Incrustée. Les momies ont du goût. »

Au moins, à force de lui parler, il finit par bel et bien être distrait et faire autre chose que de râler en retrait. Le sang a taché nos vêtements jusqu'à la taille quand on finit enfin par grimper à bord de ce qui semble être un parmi des dizaines de bateaux abandonnés. La chasse sera peut-être un peu plus longue que prévue, n'en reste que si après de longues minutes on finit totalement bredouille, rien ne m'empêche de sortir sur le pont le temps de chercher notre nouvelle embarcation à piller.

Un tour sur moi-même, sa paume que je plaque sur mes paupières pour me brouiller la vue, et l'excitation de l'interdit me fait pointer ce bateau-là, tout juste à notre gauche.

Réussite - jamais deux sans - deux, les voilà maintenant sur le bon bateau
Presque - jamais deux sans trois, le second bateau n'est pas le bon, maaaaaais le prochain le sera
Echec - ouais non finalement ils auraient dû prendre un GPS

« Arrête de râler et avance. »
« Ne me dis pas quoi faire. » C'est pire que tout, s'il ne peut pas voir le fond du fleuve. Le sang est horrible, l'odeur des animaux morts est pareille. C'est le choc qui prévaut, surtout, de voir les pierres se couvrir d'un liquide poisseux. Les bateaux sont immobilisés.
« Tu as peur de l'eau, pas du sang. »
« J'ai peur de rien. » Mais surtout de l'eau, c'est vrai. C'est problématique, quand ils explorent des endroits reculés et qu'il faut savoir se mouiller - littéralement. Quand Abel sera capable d'assurer sa part, lui aussi, Saül l'enverra en cours de natation. Il se débrouillera pour faire ces morceaux là du travail à la place de son père.
« Ou en or. Incrustée. Les momies ont du goût. »
« Si c'est du bois, tu me dois trois semaines de ménage. On congédie Britton. » Pauvre Britton.

Et le premier bateau n'est pas le bon, évidemment. Saül s'est couvert de sang pour rien et Saül râle, Saül se plaint, Saül joue au plus détestable quand il faut remonter sur un autre pont qui n'est pas le bon non plus. Le sang, c'est horrible à laver des vêtements, l'italien en sait quelque chose. Quand elle désigne le bateau suivant, Saül sort son meilleur ton de voix : celui qui maugréé. « Je te hais, mais je te hais. On aurait pu attendre que quelqu'un d'autre s'en charge. Il aurait suffit de s'emparer de la trouvaille. » Il l'aime, bon dieu qu'il l'aime, sauf quand elle l'oblige à traverser des eaux poisseuses.

Environ une heure plus tard, ils sont enfin sur un bateau qui semble être le bon. Il porte une partie du numéro retrouvé sur la note, mais la porte de la cale est fermée. De nombreux coups de pieds plus tard, Saül parvient à faire sauter le cadenas rouillé et s'introduit dans le ventre du bateau. « Ici aussi, ça pue. » L'odeur est plus atroce encore, à vrai dire. Des les trois portes qui sont sur leur route, deux d'entre-elles semblent mener aux boyaux de l'engin. « On a de la chance d'être seuls. » A moins que...

Réussite - Porte une : elle mène aux cales; l'une des caisses renferme la tablette.
Presque - Porte deux : elle mène aux cabines. Lorsqu'ils passent la porte, elle se referme derrière eux. Il faudra continuer de s'enfoncer dans le bateau...
Échec - Porte trois : elle ne mène nul part. Lorsqu'ils passent la porte, elle se referme derrière eux. Il faudra emprunter la trappe au sol pour se sortir de ce mauvais pas. Qui sait ce qui les attend à l'arrivée ?

« Je te hais, mais je te hais. On aurait pu attendre que quelqu'un d'autre s'en charge. Il aurait suffit de s'emparer de la trouvaille. » pauvre homme, de qui je mime chaque mot et chaque réaction, exagérant le tout comme si j'étais une gamine gâtée à peine plus âgée que notre enfant-roi à nous. « Moi aussi, je t'aime. » surtout quand il râle, surtout quand il rage.

Surtout quand la Terre entière a l'air d'être contre lui, qu'il se casse un ongle ou qu'une mèche est distraite par le vent. Que la poussière des tombeaux le fait éternuer et que le sang qui a remplacé l'eau du fleuve tache ses vêtements tout comme les miens. Depuis quand le sang a remplacé l'eau du fleuve? « Encore plus quand tu ne triches pas. » et moi, je triche, bien évidemment que je triche. Lui envoyant à la tête une vague bien ensanglantée du revers de la main. Oups.

Un bateau ne suffit pas, pas plus qu'un second. C'est le troisième qui est le charme, et si ses lèvres goûtent le fer et la pourriture, les miennes sont aussi pires lorsque je lui vole un baiser au détour d'un couloir sinueux bordant les cabines. Une multitude de portes s'offrent à nous, il choisit la bonne et évidemment qu'il m'en parlera jour et nuit, pendant toute une vie, et même pendant toutes celles d'après. Ça fait partie des petits caractères du contrat, ça aussi.

« On a de la chance d'être seuls. »
« Bouh. »

Ennuyant, lassant, pas motivant. Être seuls veut dire aucune attaque pour nosu voler la tablette des mains, veut dire aucun moyen de tester qui de lui ou de moi est meilleur pour arracher la langue de quelqu'un aujourd'hui, ou qui arrivera le mieux à enchaîner les prises de judo avec agilité et précision. Demain, je rêve qu'on se batte de nouveau ensemble. Comme toujours.

« Allez, viens, dépêche. Ce soir t'es aux fourneaux. » en attendant, on se battra en pleine cuisine. Quand Britton sera occupé à mettre au lit notre terreur, nous, on verra qui remportera le pierre, feuille, ciseau et pourra choisir le vin qui accompagnera le repas.